II. LES INFRACTIONS PENALES CONTRE LA VIE PRIVEE

Il n'existe actuellement aucune infraction pénale générale contre la vie privée . Plusieurs des rapports relatifs à l'introduction d'une législation tendant à la protection de la vie privée ont proposé la création de telles infractions. En particulier, le deuxième rapport Calcutt de 1993 suggérait la création de trois infractions pénales :

- l'entrée dans une propriété privée ;

- la mise en place d'un dispositif de surveillance ;

- la prise de clichés ou l'enregistrement de la voix d'une personne chez elle ;

dans la mesure où ces actes n'auraient pas été expressément autorisés et auraient été accomplis pour obtenir des informations personnelles, destinées à être publiées ensuite.

Ces informations auraient été sanctionnées par des amendes pouvant atteindre 5.000 livres.

A l'heure actuelle, la diffamation constitue une infraction pénale lorsqu'elle est susceptible de porter une très grave atteinte à la réputation de la personne concernée.

Par ailleurs, la loi sur la protection contre le harcèlement a créé une nouvelle infraction pénale qu'elle sanctionne d'une amende ou d'une peine de prison pouvant aller jusque six mois.

III. LES MECANISMES D'AUTOREGULATION DE L'AUDIOVISUEL ET DE LA PRESSE ECRITE

1) L'audiovisuel

La Broadcasting Standards Commission (BSC) traite notamment les atteintes « injustifiées » à la vie privée, réalisées par une chaîne de radiodiffusion ou de télévision, quelle qu'elle soit. La création de la BSC a été prévue par la loi sur l'audiovisuel (5 ( * )) . Tous les membres de la BSC sont nommés par le ministre compétent pour l'audiovisuel.

La loi a chargé la BSC d'élaborer un code de bonne conduite . Publié il y a plusieurs mois (document n° 6), il est applicable depuis le 1 er janvier 1998.

Dans ce document, il est indiqué qu'une atteinte à la vie privée doit être justifié par un « intérêt public primant toute autre considération » et que « les moyens utilisés pour obtenir l'information doivent être proportionnés au fait étudié ». La BSC n'exclut donc pas l'utilisation de caméras et de micros cachés quand « la crédibilité et l'authenticité de l'information » l'exigent et que « les mots ou les images enregistrés servent un intérêt public qui l'emporte sur tout autre ». Elle insiste sur le fait que la notion de vie privée est relative, certaines personnes étant particulièrement exposées au regard du public, soit à cause de leur position, soit à cause de la publicité dont elles s'entourent.

La BSC fait paraître ses décisions dans un bulletin mensuel. Elle peut également obliger les chaînes à les publier, sous la forme qu'elle désire, dans un court communiqué diffusé après les informations du soir par exemple.

Les plaintes ne sont pas recevables si le plaignant dispose d'une voie de recours devant les tribunaux. Elles doivent être déposées dans un délai de trois mois ou de six semaines selon qu'elles concernent une émission de télévision ou de radiodiffusion.

La commission fait publier ses décisions au cours des émissions, sous la forme qu'elle souhaite et à l'heure qu'elle désire. Cette publication prend souvent la forme d'une déclaration de 200 mots, diffusée après les informations du soir.

Tous les membres de la commission sont nommés par le ministre compétent pour l'audiovisuel.

2) La presse écrite

a) L'institution de la Commission des plaintes en matière de presse

A la suite des travaux menés après la deuxième guerre mondiale par la Commission royale sur la presse, le Conseil de la presse ( Press Council ), chargé d'élaborer un code de bonne conduite et de censurer les conduites journalistiques indésirables, fut créé.

Sa composition très partisane et l'absence de tout pouvoir de sanction l'empêchèrent d'agir efficacement.

C'est pourquoi le gouvernement chargea en 1989 la commission Calcutt de proposer de nouvelles solutions. Dans son rapport rendu en 1990, la commission suggérait le remplacement du Press Council par une institution plus crédible, la Commission des plaintes en matière de presse ( Press Complaints Commission : PCC ). Celle-ci fut mise en place au début de l'année 1991.

La PCC a établi un code de bonne conduite (document n° 6). Toute plainte pour infraction à ce code peut, dans le délai d'un mois suivant la publication incriminée, lui être soumise.

En matière de vie privée, le code de la PCC condamne l'utilisation du téléobjectif et des écoutes téléphoniques seulement lorsque les informations obtenues ne servent pas l'intérêt général. De plus, la condamnation des photographies prises au téléobjectif sans autorisation ne s'applique qu'aux clichés pris dans des propriétés privées, dans des chambres d'hôtel ou dans les parties des hôpitaux où les malades sont soignés ou logés. Le code ne s'oppose donc pas à la réalisation de clichés de l'extérieur d'une propriété privée, du hall d'un hôtel ou de la salle d'attente d'un hôpital par exemple.

D'après le code, sert l'intérêt général toute information permettant de :

- « détecter ou mettre en évidence un crime ou une infraction sérieuse ;

- « protéger la santé et la sécurité du public ;

- « empêcher le public d'être abusé par les propos ou les actes d'un particulier ou d'une organisation ».

Cette définition, très extensive, permet à la presse d'affirmer que l'information selon laquelle les enfants du Premier ministre fréquentent une école donnée sert l'intérêt général car les électeurs doivent savoir si le Premier ministre accorde ses actes à ses paroles.

b) Les critiques apportées au fonctionnement de la Commission

La PCC est très critiquée, notamment parce qu'elle ne dispose d'aucun réel pouvoir de sanction : elle ne peut pas infliger d'amendes, et les éditeurs ne peuvent pas être contraints de se soumettre à ses recommandations. En général, c'est-à-dire dans environ 85 % des cas, le journal publie une excuse ou un rectificatif à la suite d'une plainte considérée comme justifiée. Si le différend n'est pas réglé de cette façon, la commission rend une décision officielle que l'éditeur a l'obligation de publier intégralement.

Ainsi, en septembre 1995, Buckingham Palace se plaignit d'un article paru dans la revue Business Age dans lequel la fortune de la Reine était citée comme la première du pays, estimant qu'il y avait confusion entre la fortune personnelle de la Reine et celle de l'institution royale. La PCC confirma la plainte de la Reine et indiqua que la revue aurait dû expliquer le mode de calcul de la fortune royale et vérifier ses informations auprès de Buckingham.

En 1992, Sir David Calcutt, qui avait présidé la commission dont les travaux ont été à l'origine de la création de la PCC, fut chargé de rendre un rapport sur le fonctionnement effectif de la PCC. Au début de l'année 1993, il s'exprimait ainsi : « La PCC n'est pas un régulateur efficace de la presse (...). La PCC telle que constituée est, par essence, un organe créé par l'industrie (la presse), dominé par l'industrie, mettant en oeuvre un code de conduite élaboré par l'industrie, et qui s'avère particulièrement favorable à l'industrie ».

Il se montrait partisan de la mise en place d'un tribunal chargé de réprimer les manquements à la déontologie professionnelle. D'autres ont proposé de donner à un médiateur ou à une autre commission de la presse le pouvoir d'imposer des amendes ou d'exiger des compensations financières au profit des plaignants.

Après le décès de la Princesse de Galles, le président de la PCC a annoncé la publication d'un nouveau code, plus sévère. Celle-ci est annoncée pour le début de l'année 1998. Le nouveau code devrait notamment étendre la notion de « propriété privée » pour y inclure des lieux comme les églises ou les restaurants et limiter l'utilisation du téléobjectif.


* (5) La BSC existe depuis avril 1997 et résulte de la fusion de deux organismes pré-existants, le Broadcasting Standards Council et la Broadcasting Complaints Commission. Auparavant, c'était la seconde qui traitait des atteintes à la vie privée.

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