NOTE DE SYNTHESE

La loi française du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de grossesse, dite loi Veil, modifiée par la loi du 31 décembre 1979, a dépénalisé l'avortement sous certaines conditions. Ces dispositions ont été codifiées et font désormais partie du code de la santé publique.

L'article L 162-1 de ce code précise que l'interruption de la grossesse peut être demandée par une femme enceinte en " situation de détresse ", avant la fin de la dixième semaine de grossesse.

La femme doit d'abord consulter un médecin, qui l'informe des risques encourus et lui remet un dossier qui rappelle notamment les dispositions législatives applicables. Pendant le délai de réflexion d'une semaine dont elle dispose avant de confirmer sa demande, elle doit obligatoirement avoir un entretien avec un conseiller conjugal ou familial, ou avec une assistante sociale. Lors de la deuxième consultation médicale, qui doit avoir lieu au plus tôt deux jours après l'entretien, elle doit remettre au médecin l'attestation d'entretien et la confirmation écrite de sa demande d'interruption de grossesse.

Lorsque l'interruption de grossesse est pratiquée pour motif thérapeutique , elle peut avoir lieu au-delà du délai de dix semaines , le diagnostic prénatal étant prévu par la loi.

Pour les mineures célibataires, l'article L 162-7 du code de la santé publique rend obligatoire l'autorisation d'un des parents ou du représentant légal. En revanche, les mineures mariées n'ont pas besoin d'une telle autorisation.

La réforme actuellement envisagée :

- porterait de dix à douze semaines le délai maximal pendant lequel une femme peut demander une interruption volontaire de grossesse pour des motifs autres que strictement thérapeutiques ;

- supprimerait l'obligation pour les mineures non mariées d'obtenir l'autorisation parentale.

Pour évaluer ces deux propositions, les dispositions législatives correspondantes de plusieurs pays européens ( Allemagne , Belgique , Danemark , Espagne , Italie , Pays-Bas , Royaume-Uni et Suisse ) ont été analysées.

Cet examen montre que :

- le délai maximal pendant lequel une femme peut demander une interruption volontaire de grossesse pour des motifs non thérapeutiques est supérieur à dix semaines dans tous les pays sous revue à l'exception du Danemark ;

- sauf au Danemark, en Espagne et en Italie, la loi permet aux mineures, à partir de l'âge de quatorze ou de seize ans, de recourir à l'interruption volontaire de grossesse sans autorisation parentale.


1) Dans tous les pays étudiés sauf au Danemark, l'interruption volontaire de grossesse qui ne répond pas à un motif strictement thérapeutique peut avoir lieu dans un délai supérieur à dix semaines

a) En matière de délai, les règles danoises équivalent aux règles françaises

La loi danoise évoque certes la douzième semaine de grossesse , mais les instructions prises par le ministre de la Justice précisent que, étant donné le point de départ du décompte, ce délai équivaut à dix semaines après la conception .

b) Les lois allemande, anglaise, belge et italienne prévoient des délais supérieurs à dix semaines

En Allemagne, le délai prévu par la loi est de douze semaines après la conception. Il en va de même en Belgique .

Les lois italienne et anglaise exigent que l'intervention ait lieu respectivement dans les quatre-vingt-dix premiers jours et dans les vingt-quatre premières semaines de la gestation.

c) Les lois espagnole, néerlandaise et suisse ne comportent aucune indication de délai

La loi néerlandaise ne prévoit aucun délai . Cependant, comme la limite extrême pour pratiquer une interruption volontaire de grossesse est estimée à vingt-quatre semaines et que le début de la grossesse est très difficile à dater précisément, le délai est généralement ramené à vingt ou vingt-deux semaines .

De même, la loi fédérale suisse ne prévoit aucun délai . Toutefois, le motif susceptible de justifier le recours à une interruption volontaire de grossesse (menace sérieuse d'une atteinte grave et permanente à la santé) y est souvent interprété de façon restrictive.

En Espagne , la loi ne prévoit pas non plus de délai lorsque l'intervention est demandée pour risque de mise en danger de la santé de la femme. En revanche, en cas de viol ou de risques de malformations de l'enfant, la loi prévoit un délai : douze semaines dans le premier cas, et vingt-deux dans le second.

2) Sauf au Danemark, en Espagne et en Italie, la loi permet aux mineures de recourir à l'interruption volontaire de grossesse sans autorisation parentale à partir de quatorze ou seize ans

a) Au Danemark, en Espagne et Italie, la loi ne permet pas aux mineures de prendre seules la décision de recourir à l'interruption volontaire de grossesse

A l'intérieur de ce groupe de trois pays, il faut toutefois établir une distinction entre, d'une part, le Danemark et l'Italie, et, d'autre part, l'Espagne.

En effet, les lois danoise et italienne sur l'interruption volontaire de grossesse traitent explicitement des mineures. Toutes deux requièrent le consentement parental. Cependant, elles prévoient aussi que l'intervention puisse être pratiquée sans l'accord des parents, voire malgré leur opposition.

Au Danemark, les commissions ad hoc , instituées dans chaque comté, notamment pour autoriser les interruptions volontaires de grossesse au-delà de la douzième semaine, peuvent décider que l'accord des parents est superflu. Elles peuvent même autoriser une interruption volontaire de grossesse malgré l'opposition des parents.

En Italie, lorsque les parents refusent de donner leur consentement, le médecin peut s'en remettre au juge des tutelles qui prend seul la décision, sans que celle-ci puisse être contestée. Par ailleurs, en cas de danger grave pour la femme enceinte, l'intervention peut être pratiquée sans l'accord des parents ou du juge des tutelles.

En revanche, en Espagne , la législation relative à l'interruption volontaire de grossesse n'évoque pas le cas des mineures. Il faut donc appliquer les dispositions du code civil sur l'autorité parentale .

b) Dans les autres pays, à partir de quatorze ou de seize ans, les mineures n'ont pas besoin du consentement parental

En Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni et en Suisse, la loi sur l'interruption volontaire de grossesse n'évoque pas le cas particulier des mineures. Les prescriptions générales relatives aux actes médicaux s'appliquent donc.

En Allemagne, en Belgique et en Suisse, ces dispositions mettent l'accent sur la " capacité de discernement " de la mineure. En Allemagne, elle est avérée en général à partir de seize ans, et en Belgique à partir de quatorze ans. En Suisse, la plupart du temps, une mineure enceinte est considérée comme " capable de discernement ".

Aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, la loi prévoit que, à partir de seize ans, tout mineur peut donner son consentement à un traitement médical.

Quelle que soit la règle applicable, aucune des législations étudiées ne fait de distinction entre les mineures selon qu'elles sont mariées ou non. A cet égard, la réforme envisagée, si elle est adoptée, rapprochera la loi française de la grande majorité des dispositions étrangères.

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