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ÉTUDE D'IMPACT

PROJET DE LOI

RELATIF À LA DIFFÉRENCIATION, LA DÉCENTRALISATION, LA DÉCONCENTRATION ET PORTANT DIVERSES MESURES DE SIMPLIFICATION DE L'ACTION PUBLIQUE LOCALE

NOR : TERB2105196L/Bleue-1

12 mai 2021

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION GÉNÉRALE 8

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS 9

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION 22

TABLEAU D'INDICATEURS 33

TITRE IER - LA DIFFERENCIATION TERRITORIALE 37

Article 1er : Définition de la différenciation 37

Article 2 : Extension du pouvoir réglementaire local 43

Article 3 : Conférences territoriales de l'action publique 48

Article 4 : Élargissement des dispositifs de participation citoyenne locale 55

TITRE II - LA TRANSITION ECOLOGIQUE 61

CHAPITRE IER - LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE 61

Article 5 : Clarification de la répartition des compétences et des qualités de chef de file des collectivités territoriales dans le domaine de la transition écologique 61

CHAPITRE II - LES TRANSPORTS 69

Article 6 : Transfert des routes nationales aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles 69

Article 7 : Décentralisation de routes nationales à titre expérimental aux régions 87

Article 8 : Transfert de la maîtrise d'ouvrage des routes nationales 97

Article 9 : Dispositions relatives au transfert des petites lignes ferroviaires et de leurs gares 106

Article 10 : Permettre aux collectivités la mise en place de radars automatiques 114

Article 11 - Mesures relatives aux sanctions sur le domaine public fluvial 120

CHAPITRE III - LA LUTTE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ET PRÉSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ 124

Article 12 : Réforme de la gouvernance de l'ADEME et délégation d'une partie du fonds chaleur et du fonds économie circulaire de l'ADEME 124

Article 13 : Rôle des régions en matière de protection de la biodiversité 136

Article 14 : Renforcement du pouvoir de police dans les espaces naturels protégés 147

TITRE III - L'URBANISME ET LE LOGEMENT 153

Article 15 : Adaptation du mécanisme d'exemption de communes de l'application des obligations SRU afin d'en améliorer sa pertinence et prise en compte de la suppression de la taxe d'habitation dans le décompte des résidences principales 153

Article 16 : Possibilité pour le préfet de département de prendre des mesures correctives en cas de non-utilisation ou d'utilisation conforme à la loi, par les bénéficiaires locaux 163

Article 17 : Suppression de l'échéance de 2025 pour l'atteinte des obligations légales et définition d'un rythme de rattrapage uniforme à 33% du nombre de logements sociaux locatifs manquants, porté à 50% et 100% à l'approche de l'objectif légal. 168

Article 18 : Instauration du contrat de mixité sociale (CMS) comme outil de contractualisation d'engagement et de moyens favorisant l'atteinte des objectifs légaux en matière de production de logements sociaux 178

Article 19 : Prise en compte dans la procédure de bilan triennal des objectifs définis par le contrat de mixité sociale et renforcement des sanctions financières applicables aux communes carencées par l'instauration de taux de majorations « plancher » 184

Article 20 : Suppression de la procédure d'aménagement des objectifs triennaux et des commissions départementales 191

Article 21 : Elargissement de l'objet social de l'Association Foncière Logement 196

Article 22 I et II : Renforcement des dispositifs de mixité sociale dans le logement social et accès au logement des travailleurs des secteurs essentiels 201

Article 22 III : Prolongation des délais de mise en oeuvre de la cotation de demande de logement social et de la gestion en flux des droits de réservation des logements locatifs sociaux 209

Article 23 : Prolongation de l'expérimentation sur l'encadrement des loyers 213

Article 24 : Prolongation du délai de mise en conformité des règlements de copropriété 221

Article 25 : Renforcement des dispositifs de délégation de compétences de l'État aux intercommunalités en matière de logement social et d'hébergement 225

Article 26 : Opérations de revitalisation du territoire dans les agglomérations polycentrées 231

Article 27 : Biens sans maître et biens en état d'abandon manifeste 240

Article 28 I : Renforcer les compétences des organismes de foncier solidaires (OFS) et prévoir des adaptations pour certains organismes pouvant être agréés OFS 257

Article 28 II : Extension du champ de compétence des organismes de foncier solidaire (OFS) 267

Article 29 : Appui du département à l'élaboration du programme local de l'habitat 274

Article 30 : Renforcement des outils mobilisables dans le cadre des projets partenariaux d'aménagement (PPA) et des grandes opérations d'urbanisme (GOU) 280

TITRE IV - LA SANTE, LA COHESION SOCIALE, L'ÉDUCATION ET LA CULTURE 292

CHAPITRE IER - LA PARTICIPATION À LA SÉCURITÉ SANITAIRE TERRITORIALE 292

Article 31 : Réforme de la gouvernance des agences régionales de santé (ARS) 292

Article 32 : Financement des établissements de santé par les collectivités territoriales 298

Article 33 : Recrutement des personnels de centre de santé 303

Article 34 : Facultés pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire 307

CHAPITRE II - COHÉSION SOCIALE 317

Article 35 : Expérimentation de la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) 317

Article 36 : Compétence du département en matière d'habitat inclusif 325

Article 37 : Centres intercommunaux d'action sociale pour les communautés urbaines et les métropoles 332

Article 38 : Transfert aux départements de la tutelle des pupilles de l'État 337

Article 39 : Recours obligatoire au traitement automatisé d'appui à l'évaluation de la minorité pour l'évaluation de la minorité et de l'isolement des personnes se déclarant mineurs non accompagnés 345

Article 40 : Rattachement des directeurs des établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance dans la fonction publique territoriale 352

CHAPITRE III - L'ÉDUCATION 358

Article 41 : Renforcement du lien des gestionnaires de collèges et lycées avec les collectivités territoriales 358

CHAPITRE IV - LA CULTURE 385

Article 42 : Interventions des collectivités territoriales en faveur des établissements de spectacles cinématographiques 385

TITRE V - DISPOSITIONS COMMUNES A L'ENSEMBLE DES TEXTES DU PRÉSENT PROJET DE LOI EN MATIÈRE FINANCIÈRE ET STATUTAIRE 393

Article 43 : Dispositions financières applicables aux transferts 393

Article 44 : Dispositions relatives à la fonction publique territoriale, applicables aux transferts 410

TITRE VI - MESURES DE DECONCENTRATION 416

Article 45 : Attribution de la fonction de délégué territorial de l'ADEME au préfet de région 416

Article 46 : Renforcement du rôle du préfet dans l'attribution des aides des agences de l'eau 422

Article 47 : Contrats de cohésion territoriale 428

Article 48 : Article d'habilitation autorisant le Gouvernement à agir par ordonnance afin de renforcer le rôle d'expertise et d'assistance du CEREMA au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements 436

Article 49 : France Services 442

TITRE VII - MESURES DE SIMPLIFICATION DE L'ACTION PUBLIQUE 451

CHAPITRE IER - ACCÉLÉRATION DU PARTAGE DE DONNÉES ENTRE ADMINISTRATIONS AU BÉNÉFICE DE L'USAGER 451

Article 50 : Accélérer l'échange de données entre administrations au profit de l'usager 451

Article 51 : Simplifier les procédures de mise en demeure et de sanction de la Commission nationale de l'informatique et des libertés - CNIL 460

Article 52 : Accélérer la mise en place des Bases Adresses Locales utiles pour le déploiement du très haut débit 470

CHAPITRE II - SIMPLIFICATION DU FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS LOCALES 476

Article 53 : Simplifier la répartition des tâches entre l'assemblée délibérante et l'exécutif local en déléguant à ce dernier les décisions d'admission en non-valeur de faibles montants 476

Article 54 : Faciliter les dons de biens mobiliers par les collectivités territoriales 483

Article 55 : Clarification des dispositions applicables au droit de renonciation du président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre au transfert des pouvoirs de police spéciale 488

Article 56 - Relations entre le conseil métropolitain et les conseils de territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence 492

CHAPITRE III - COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE 497

Article 57 : Coopération sanitaire transfrontalière 497

Article 58 : Développer la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement 501

Article 59 : Possibilité pour les collectivités territoriales et groupements étrangers de participer au capital des sociétés publiques locales (SPL) 506

CHAPITRE IV - MESURES DE SIMPLIFICATION DE L'ACTION PUBLIQUE LOCALE EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT ET D'ENVIRONNEMENT 511

Article 60 : Elargissement du droit de préemption des terres agricoles sur les aires d'alimentation des captages d'eau potable 511

Article 61 : Clarifier l'application de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière afin de permettre à toute personne publique ou privée intéressée d'apporter un concours financier aux ouvrages et aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutière 516

Article 62 : Clarifier le régime de protection des alignements d'arbres 520

Article 63 : Sécurité des réseaux - simplifier la répartition des compétences en matière d'entretien des réseaux de distribution de gaz 526

Article 64 : Permettre aux collectivités d'exiger des propriétaires la réalisation d'un diagnostic de leurs raccordements aux réseaux publics d'assainissement au moment de la vente d'un bien immobilier 534

Article 65 : Habiliter le Gouvernement à réformer le droit de la publicité foncière par voie d'ordonnance 540

CHAPITRE V - MESURES DE SIMPLIFICATION DU FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS 554

Article 66 : Possibilité pour les établissements publics de l'État de mutualiser leurs fonctions support 554

Article 67 : Réforme des statuts de l'établissement public industriel et commercial (EPIC) La Monnaie de Paris 560

CHAPITRE VI - MESURES LIÉES À L'APPEL À PROJETS FRANCE EXPÉRIMENTATION AU SERVICE DE LA RELANCE ET DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES INNOVANTES 566

Article 68 : Prolonger la durée des expérimentations menées par les chambres d'agriculture 566

Article 69 : Élargir les possibilités de mise à disposition des fonctionnaires de l'État auprès des associations agissant dans les territoires 576

CHAPITRE VII - TRANSPARENCE DES ENTREPRISES PUBLIQUES LOCALES 582

Article 70 : Renforcement du contrôle par les assemblées délibérantes 585

Article 71 : Renforcement du rôle des commissaires aux comptes 591

Article 72 : Extension du contrôle de l'Agence française anticorruption (AFA) 596

Article 73 : Nullité des actes non transmis 599

CHAPITRE VIII - MODERNISATION DES MISSIONS DES CHAMBRES RÉGIONALES DES COMPTES 603

Article 74 : Evaluation des politiques publiques territoriales 603

TITRE VIII - DISPOSITIONS RELATIVES A L'OUTRE-MER 608

Article 75 : Création à titre expérimental d'un état de calamité naturelle exceptionnelle en Outre-mer 608

Article 76 : Report de la date de transfert au bloc local de la zone des cinquante pas géométriques et de la fin de vie des agences des cinquante pas géométriques 619

Article 77 : Adaptation de la prescription acquisitive immobilière à Mayotte 628

Article 78 : Création dans les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de la Martinique, de La Réunion et de Mayotte d'une catégorie d'établissements publics à caractère industriel et commercial en matière de formation professionnelle 638

Article 79 : Financement participatif dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) 655

Article 80 : Modification des conseils économiques, sociaux, environnementaux, de la culture et de l'éducation (CESECE) de Guyane et de Martinique 660

Article 82 : Adaptation et extension en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française 665

Article 83 : Modalités de cession du foncier de l'État en Guyane 668

INTRODUCTION GÉNÉRALE

A l'issue du Grand débat national, le Président de la République a annoncé l'ouverture « d'un nouvel acte de décentralisation adapté à chaque territoire » et précisé lors du Congrès des maires du 19 novembre 2019 que la décentralisation devait s'assortir d'une logique d'efficacité dans la répartition des compétences et de lisibilité de l'action publique.

Le présent projet de loi vise, tout d'abord, à faire évoluer le cadre des relations entre l'Etat et les collectivités territoriales en consacrant le principe de différenciation territoriale qui permet d'adapter l'organisation des compétences des collectivités aux particularités locales dans le respect de la Constitution, en premier lieu du principe d'égalité.

Il engage également à construire une nouvelle étape de la décentralisation en parachevant le transfert de certains blocs de compétence, et en clarifiant la répartition de certaines compétences répondant ainsi aux aspirations d'une action publique de proximité dans des domaines aussi essentiels que la transition écologique, l'urbanisme et le logement, la santé, la cohésion sociale ou encore l'éducation.

Il propose un nouveau renforcement de la déconcentration en redonnant une unité à la parole et à l'action de l'Etat dans les territoires tout en offrant de nouveaux outils d'ingénierie aux collectivités.

Il simplifie certains volets de l'action publique, notamment en matière de fonctionnement des institutions locales.

Il apporte enfin à des réponses à des problématiques spécifiques rencontrées par les départements et collectivités d'outre-mer.

Le présent projet de loi comprend huit titres :

1) Titre Ier - La différenciation territoriale

2) Titre II - La transition écologique

3) Titre III - L'urbanisme et le logement

4) Titre IV - La santé, la cohésion sociale, l'éducation et la culture

5) Titre V - Dispositions communes à l'ensemble des textes du présent projet de loi en matière financière et statutaire

6) Titre VI - Mesures de déconcentration

7) Titre VII - Mesures de simplification de l'action publique

8) Titre VIII - Dispositions relatives à l'Outre-mer.

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS

Article

Objet de l'article

Consultations obligatoires

Consultations facultatives

1 er

Définition de la différenciation

Conseil national d'évaluation des normes

2

Extension du pouvoir réglementaire local

Conseil national d'évaluation des normes

3

Conférences territoriales de l'action publique

Conseil national d'évaluation des normes

4

Élargissement des dispositifs de participation citoyenne locale

Conseil national d'évaluation des normes

5

Clarification de la répartition des compétences et des qualités de chef de file des collectivités territoriales dans le domaine de la transition écologique

Conseil national d'évaluation des normes

6

Transfert des routes nationales aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil supérieur de la fonction publique d'Etat

Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

7

Décentralisation de routes nationales à titre expérimental aux régions

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

8

Transfert de la maîtrise d'ouvrage des routes nationales

Conseil national d'évaluation des normes

9

Dispositions relatives au transfert des petites lignes ferroviaires et de leurs gares

Conseil national d'évaluation des normes

Commission nationale de la négociation collective de l'emploi et de la formation professionnelle

10

Permettre aux collectivités la mise en place de radars automatiques

Conseil national d'évaluation des normes

11

Mesures relatives aux sanctions sur le domaine public fluvial

VNF

Mission interministérielle de l'eau

12

Réforme de la gouvernance de l'ADEME et délégation d'une partie du fonds chaleur et du fonds économie circulaire de l'ADEME

Conseil national d'évaluation des normes

13

Rôle des régions en matière de protection de la biodiversité

Conseil national d'évaluation des normes

14

Exercice du pouvoir de police dans les espaces naturels protégés

Conseil national d'évaluation des normes

15

Adaptation du mécanisme d'exemption de communes de l'application des obligations SRU et prise en compte de la suppression de la taxe d'habitation dans le décompte des résidences principales

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

16

Possibilité pour le préfet de département de prendre des mesures correctives en cas de non-utilisation ou d'utilisation non-conforme à la loi par les bénéficiaires des fonds

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

17

Pérennisation de l'application du dispositif SRU d'obligation d'un taux légal de logement social, au-delà de son échéance de 2025

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

18

Instauration du contrat de mixité sociale (CMS)

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

19

Prise en compte dans la procédure de carence de la mise en oeuvre des actions du CMS et instauration de taux de majoration « plancher »

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

20

Suppression de la procédure nationale d'aménagement des obligations triennales et des commissions départementales

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

21

Elargissement de l'objet social de l'Association Foncière Logement (AFL)

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

22 I et II

Renforcement des dispositifs de mixité sociale dans le logement social et accès au logement des travailleurs des secteurs essentiels

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

22 III

Prolongation des délais de mise en oeuvre de la cotation de demande de logement social et de la gestion en flux des droits de réservation des logements locatifs sociaux

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

23

Prolongation de l'expérimentation sur l'encadrement des loyers

Conseil national d'évaluation des normes

24

Prolongation du délai de mise en conformité des règlements de copropriété

Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières

25

Renforcement des dispositifs de délégation de compétences de l'État aux intercommunalités en matière de logement social et d'hébergement

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

26

Opérations de revitalisation du territoire dans les agglomérations polycentrées

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

27

Biens sans maître et biens en état d'abandon manifeste

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

Organes délibérants des collectivité d'outre-mer de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin

28

I et II

Renforcer les compétences des organismes de foncier solidaires et étendre le champ du bail réel solidaire

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

28 III

Extension du champ de compétence des organismes de foncier solidaire (OFS)

Conseil national d'évaluation des normes

29

Appui du département à l'élaboration du programme local de l'habitat

Conseil national d'évaluation des normes

30

Renforcement des outils mobilisables dans le cadre des projets partenariaux d'aménagement (PPA) et des grandes opérations d'urbanisme (GOU)

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

31

Réforme de la gouvernance des agences régionales de santé (ARS)

Conseil national d'évaluation des normes

Caisse nationale d'assurance maladie

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole

Conseil de l'union nationale des caisses d'assurance maladie

32

Financement des établissements de santé par les collectivités territoriales

Conseil national d'évaluation des normes

33

Recrutement des personnels de centre de santé

Conseil national d'évaluation des normes

34

Facultés pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire

Conseil national d'évaluation des normes

35

Expérimentation de la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA)

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales.

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole

36

Compétence du département en matière d'habitat inclusif

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil national de l'habitat

37

Centres intercommunaux d'action sociale pour les communautés urbaines et les métropoles

Conseil national d'évaluation des normes

38

Transfert aux départements de la tutelle des pupilles de l'État

Conseil national d'évaluation des normes

39

Recours obligatoire au traitement automatisé d'appui à l'évaluation de la minorité pour l'évaluation de la minorité et de l'isolement des personnes se déclarant mineurs non accompagnés

Conseil national d'évaluation des normes

40

Rattachement des directeurs des établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance dans la fonction publique territoriale

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière

Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

41

Renforcement du lien des gestionnaires de collèges et lycées avec les collectivités territoriales

Conseil national d'évaluation des normes

Comité technique ministériel de l'éducation nationale

Conseil supérieur de l'éducation

42

Interventions des collectivités territoriales en faveur des établissements de spectacles cinématographiques

Conseil national d'évaluation des normes

43

Dispositions financières applicables aux transferts

Conseil national d'évaluation des normes

44

Dispositions relatives à la fonction publique territoriale, applicables aux transferts

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil supérieur de la fonction publique d'Etat

Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

45

Attribution de la fonction de délégué territorial de l'ADEME au préfet de région

Conseil national d'évaluation des normes

46

Renforcement du rôle du préfet dans l'attribution des aides des agences de l'eau

Conseil national d'évaluation des normes

47

Contrats de cohésion territoriale

Conseil national d'évaluation des normes

48

Article d'habilitation autorisant le Gouvernement à agir par ordonnance afin de renforcer le rôle d'expertise et d'assistance du CEREMA au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil d'administration du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement

49

France Services

Conseil national d'évaluation des normes

50

Accélérer l'échange de données entre administrations au profit de l'usager

Conseil national d'évaluation des normes

Commission nationale de l'informatique et des libertés

51

Simplifier les procédures de mise en demeure et de sanction de la Commission nationale de l'informatique et des libertés - CNIL

Conseil national d'évaluation des normes

Commission nationale de l'informatique et des libertés

52

Accélérer la mise en place des Bases Adresses Locales utiles pour le déploiement du très haut débit

Conseil national d'évaluation des normes

53

Simplifier la répartition des tâches entre l'ordonnateur et le comptable en déléguant à ce dernier les décisions d'admission en non-valeur de faibles montants

Conseil national d'évaluation des normes

54

Faciliter les dons de biens mobiliers par les collectivités territoriales

Conseil national d'évaluation des normes

55

Clarification des dispositions applicables au droit de renonciation du président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre au transfert des pouvoirs de police spéciale

Conseil national d'évaluation des normes

56

Relations entre le conseil métropolitain et les conseils de territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence

Conseil national d'évaluation des normes

57

Coopération sanitaire transfrontalière

Conseil national d'évaluation des normes

58

Développer la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement et d'urbanisme

Conseil national d'évaluation des normes

59

Participation des collectivités territoriales et groupements étrangers au capital des sociétés publiques locales

Conseil national d'évaluation des normes

60

Modification des dispositions relatives au droit de préemption des terres agricoles sur les aires d'alimentation des captages d'eau potable

Conseil national d'évaluation des normes

Mission interministérielle de l'eau

61

Clarifier l'application de l'article L 122-4 du code de la voirie routière afin de permettre à toute personne publique ou privée intéressée d'apporter un concours financier aux ouvrages et aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutière

Conseil national d'évaluation des normes

62

Clarifier le régime de protection des alignements d'arbres

Conseil national d'évaluation des normes

63

Sécurité des réseaux - simplifier la répartition des compétences en matière d'entretien des réseaux de distribution de gaz

Conseil national d'évaluation des normes

64

Permettre aux collectivités d'exiger des propriétaires la réalisation d'un diagnostic de leurs raccordements aux réseaux publics d'assainissement au moment de la vente d'un bien immobilier

Conseil national d'évaluation des normes

Mission interministérielle de l'eau

65

Habiliter le Gouvernement à réformer le droit de la publicité foncière par voie d'ordonnance

Conseil national d'évaluation des normes

66

Possibilité pour les établissements publics de l'État de mutualiser leurs fonctions support

Conseil national d'évaluation des normes

67

Réforme des statuts de l'établissement public industriel et commercial (EPIC) La Monnaie de Paris

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil d'administration de la Monnaie de Paris

Conseil social et économique de la Monnaie de Paris

68

Prolonger la durée d'expérimentations menées par chambres d'agriculture

Conseil national d'évaluation des normes

Assemblée permanente des chambres d'agriculture

69

Élargir les possibilités de mise à disposition des fonctionnaires de l'État auprès des associations agissant dans les territoires

Conseil supérieur de la fonction publique d'Etat

Conseil national d'évaluation des normes

70

Renforcement du contrôle par les assemblées délibérantes

Conseil national d'évaluation des normes

71

Renforcement du rôle des commissaires aux comptes

Conseil national d'évaluation des normes

72

Extension du contrôle de l'Agence française anticorruption (AFA)

Conseil national d'évaluation des normes

73

Nullité des actes non transmis

Conseil national d'évaluation des normes

74

Evaluation des politiques publiques territoriales

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil supérieur des chambres régionales des comptes

75

Création à titre expérimental d'un état de calamité naturelle exceptionnelle en Outre-mer

Conseil national d'évaluation des normes

Collectivités de l'article 73 et de l'article 74 de la Constitution

76

Report de la date de transfert au bloc local de la zone des cinquante pas géométriques et de la fin de vie des agences des cinquante pas géométriques

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil départemental et Conseil régional de Guadeloupe (article L. 3444-1 du CGCT pour les départements d'outre-mer et article L. 4433-3-1 du CGCT pour les régions d'outre-mer)

Collectivité territoriale de Martinique qui exerce les compétences attribuées à un département d'outre-mer et à une région d'outre-mer et toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi (article L. 7211-1 et s. du CGCT)

Conseil national de la mer et des littoraux

Office national des forêts

Conservatoire du littoral

Agences des cinquante pas géométriques

Communes

77

Adaptation de la prescription acquisitive immobilière à Mayotte

Conseil national d'évaluation des normes

Département de Mayotte

78

Création dans les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de la Martinique, de La Réunion et de Mayotte d'une catégorie d'établissements publics à caractère industriel et commercial en matière de formation professionnelle

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil régional de Guadeloupe

Conseil régional de la Réunion

Collectivité territoriale de Martinique

Collectivité territoriale de Guyane

Département de Mayotte

Commission nationale de la négociation collective de l'emploi et de la formation professionnelle

79

Financement participatif dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF)

Conseil national d'évaluation des normes

Conseil consultatif des TAAF

80

Modification des conseils économiques, sociaux, environnementaux, de la culture et de l'éducation (CESECE) de Guyane et de Martinique

Conseil national d'évaluation des normes

Collectivité territoriale de Guyane

Collectivité territoriale de Martinique

81

Ratification des dispositions de l'ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) prises sur le fondement de l'article 74-1 de la Constitution

82

Adaptation et extension en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française

Conseil national d'évaluation des normes

83

Modalités de cession du foncier de l'État en Guyane

Conseil national d'évaluation des normes

Collectivité territoriale de Guyane

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION

Article

Objet de l'article

Textes d'application

Administration compétente

1 er

Définition de la différenciation

2

Extension du pouvoir réglementaire local

3

Conférences territoriales de l'action publique

4

Élargissement des dispositifs de participation citoyenne locale

5

Clarification de la répartition des compétences et des qualités de chef de file des collectivités territoriales dans le domaine de la transition écologique

6

Transfert des routes nationales aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles

Décrets en Conseil d'Etat

Ministère des transports

Arrêté ministériel

Ministère des transports

Arrêtés préfectoraux

Représentant de l'Etat du département

7

Décentralisation de routes nationales à titre expérimental aux régions

Décret

8

Transfert de la maîtrise d'ouvrage des routes nationales

9

Dispositions relatives aux transferts de petites lignes ferroviaires et de leurs gares

10

Permettre aux collectivités la mise en place de radars automatiques

Décret en Conseil d'Etat

11

Mesures relatives aux sanctions sur le domaine public fluvial

Décret en Conseil d'Etat

12

Réforme de la gouvernance de l'ADEME et délégation d'une partie du fonds chaleur et du fonds économie circulaire de l'ADEME

Décret en Conseil d'Etat

Décret simple

13

Rôle des régions en matière de protection de la biodiversité

Décret en Conseil d'Etat

14

Exercice du pouvoir de police dans les espaces naturels protégés

15

Adaptation du mécanisme d'exemption de communes de l'application des obligations SRU et prise en compte de la suppression de la taxe d'habitation dans le décompte des résidences principales

Décret en Conseil d'Etat

Décret simple

16

Possibilité pour le préfet de département de prendre des mesures correctives en cas de non-utilisation ou d'utilisation non-conforme à la loi par les bénéficiaires des fonds

Décret en Conseil d'Etat

17

Pérennisation de l'application du dispositif SRU d'obligation d'un taux légal de logement social, au-delà de son échéance de 2025

Décret en Conseil d'Etat

18

Instauration du contrat de mixité sociale (CMS)

Décret en Conseil d'Etat

19

Prise en compte dans la procédure de carence de la mise en oeuvre des actions du CMS et instauration de taux de majoration « plancher »

20

Suppression de la procédure nationale d'aménagement des obligations triennales et des commissions départementales

Décret en Conseil d'Etat

21

Elargissement de l'objet social de l'Association Foncière Logement (AFL)

22 I et II

Renforcement des dispositifs de mixité sociale dans le logement social et accès au logement des travailleurs des secteurs essentiels

Deux décrets en Conseil d'Etat

Décret simple

Ministère de la transition écologique

22 III

Prolongation des délais de mise en oeuvre de la cotation de demande de logement social et de la gestion en flux des droits de réservation des logements locatifs sociaux

Deux décrets en Conseil d'Etat devront faire l'objet d'une modification

23

Prolongation de l'expérimentation sur l'encadrement des loyers

24

Prolongation du délai de mise en conformité des règlements de copropriété

25

Renforcement des dispositifs de délégation de compétences de l'État aux intercommunalités en matière de logement social et d'hébergement

26

Opérations de revitalisation du territoire dans les agglomérations polycentrées

27

Biens sans maître et biens en état d'abandon manifeste

28 I et II

Renforcer les compétences des organismes de foncier solidaires et étendre le champ du bail réel solidaire

28 III

Habilitation autorisant le Gouvernement à agir par ordonnance afin d'étendre le champ de compétence des organismes de foncier solidaire

Ordonnance

29

Appui du département à l'élaboration du programme local de l'habitat

30

Renforcement des outils mobilisables dans le cadre des projets partenariaux d'aménagement (PPA) et des grandes opérations d'urbanisme (GOU)

Décrets en Conseil d'Etat

31

Réforme de la gouvernance des agences régionales de santé (ARS)

Décrets

32

Financement des établissements de santé par les collectivités territoriales

33

Recrutement des personnels de centre de santé

34

Facultés pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire

35

Expérimentation de la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA)

Décret en Conseil d'Etat

36

Compétence du département en matière d'habitat inclusif

37

Centres intercommunaux d'action sociale pour les communautés urbaines et les métropoles

38

Transfert aux départements de la tutelle des pupilles de l'État

Décret en Conseil d'Etat

39

Recours obligatoire au traitement automatisé d'appui à l'évaluation de la minorité pour l'évaluation de la minorité et de l'isolement des personnes se déclarant mineurs non accompagnés

Décret en Conseil d'Etat

40

Rattachement des directeurs des établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance dans la fonction publique territoriale

41

Renforcement du lien des gestionnaires de collèges et lycées avec les collectivités territoriales

Décret en Conseil d'Etat

42

Interventions des collectivités territoriales en faveur des établissements de spectacles cinématographiques

43

Dispositions financières applicables aux transferts

Décret

Ministères des transports

Arrêtés interministériels

Ministère de l'intérieur

Ministère de l'économie, des finances et de la relance

44

Dispositions relatives à la fonction publique territoriale, applicables aux transferts

Décret en Conseil d'Etat

Premier ministre

Ministère de la transition écologique et solidaire

Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

Décret simple

Premier ministre

Ministère de la transition écologique et solidaire

Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales

45

Attribution de la fonction de délégué territorial de l'ADEME au préfet de région

46

Renforcement du rôle du préfet dans l'attribution des aides des agences de l'eau

47

Contrats de cohésion territoriale

48

Article d'habilitation autorisant le Gouvernement à agir par ordonnance afin de renforcer le rôle d'expertise et d'assistance du CEREMA au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements

Ordonnance

49

France Services

50

Accélérer l'échange de données entre administrations au profit de l'usager

Décrets en Conseil d'Etat

Arrêté

51

Simplifier les procédures de mise en demeure et de sanction de la Commission nationale de l'informatique et des libertés - CNIL

Décret en Conseil d'Etat

Premier ministre

Ministère de la Justice

52

Accélérer la mise en place des Bases Adresses Locales utiles pour le déploiement du très haut débit

Décret

53

Simplifier la répartition des tâches entre l'ordonnateur et le comptable en déléguant à ce dernier les décisions d'admission en non-valeur de faibles montants

Décret

DGCL

DGFiP

54

Faciliter les dons de biens mobiliers par les collectivités territoriales

Décret

55

Clarification des dispositions applicables au droit de renonciation du président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre au transfert des pouvoirs de police spéciale

56

Relations entre le conseil métropolitain et les conseils de territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence

57

Coopération sanitaire transfrontalière

58

Développer la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement et d'urbanisme

59

Participation des collectivités territoriales et groupements étrangers au capital des sociétés publiques locales

60

Modification des dispositions relatives au droit de préemption des terres agricoles sur les aires d'alimentation des captages d'eau potable

Décret en Conseil d'Etat

61

Clarifier l'application de l'article L 122-4 du code de la voirie routière afin de permettre à toute personne publique ou privée intéressée d'apporter un concours financier aux ouvrages et aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutière

62

Clarifier le régime de protection des alignements d'arbres

Décret simple

63

Sécurité des réseaux - simplifier la répartition des compétences en matière d'entretien des réseaux de distribution de gaz

64

Permettre aux collectivités d'exiger des propriétaires la réalisation d'un diagnostic de leurs raccordements aux réseaux publics d'assainissement au moment de la vente d'un bien immobilier

Décret en Conseil d'Etat

65

Habiliter le Gouvernement à réformer le droit de la publicité foncière par voie d'ordonnance

Ordonnance

66

Possibilité pour les établissements publics de l'État de mutualiser leurs fonctions support

Décret en Conseil d'Etat

67

Réforme des statuts de l'établissement public industriel et commercial (EPIC) La Monnaie de Paris

68

Prolonger la durée d'expérimentations menées par chambres d'agriculture

69

Élargir les possibilités de mise à disposition des fonctionnaires de l'État auprès des associations agissant dans les territoires

Décret en Conseil d'Etat

70

Renforcement du contrôle par les assemblées délibérantes

Décret simple

71

Renforcement du rôle des commissaires aux comptes

72

Extension du contrôle de l'Agence française anticorruption (AFA)

73

Nullité des actes non transmis

74

Evaluation des politiques publiques territoriales

Décret en Conseil d'Etat

75

Création à titre expérimental d'un état de calamité naturelle exceptionnelle en Outre-mer

76

I -1°- Décote - article 3 de la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer

Décret en Conseil d'Etat

Ministère en charge des domaines et Ministères de co-tutelle des agences de cinquante pas géométriques

I-3°mise en place d'un pouvoir de police des domaines au profit des agences des cinquante pas géométriques

Décret en Conseil d'Etat

Ministères de co-tutelle des agences de cinquante pas géométriques

77

Adaptation de la prescription acquisitive immobilière à Mayotte

78

Création dans les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de la Martinique, de La Réunion et de Mayotte d'une catégorie d'établissements publics à caractère industriel et commercial en matière de formation professionnelle

Délibérations de l'assemblée délibérante des collectivités concernées

79

Financement participatif dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF)

Décret simple

80

Modification des conseils économiques, sociaux, environnementaux, de la culture et de l'éducation (CESECE) de Guyane et de Martinique

Décret en Conseil d'Etat

81

Ratification des dispositions de l'ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) prises sur le fondement de l'article 74-1 de la Constitution

82

Adaptation et extension en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française

Ordonnance

83

Modalités de cession du foncier de l'État en Guyane

TABLEAU D'INDICATEURS

Indicateurs

Définition et modalités d'élaboration

Valeur cible

Date de démarrage, modalité et périodicité du suivi

Nombre de kilomètres de routes nationales transférés par l'Etat aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles

Recensement des kilomètres de routes nationales transférés par l'Etat aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles

800 kms

Huit mois après l'entrée en vigueur de la loi, date à laquelle les routes seront transférées aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles

Recensement par la DGITM du MTES

Bilan annuel

Nombre de transferts en pleine propriété de lignes ferroviaires d'intérêt local ou régional aux collectivités territoriales ou à leurs groupements

Recensement du nombre de transferts en pleine propriété de lignes ferroviaires d'intérêt local ou régional aux collectivités territoriales ou à leurs groupements

Deux au moins dans les deux ans suivant la promulgation de la loi

Deux ans après la promulgation de la loi

Recensement par la DGITM du MTES

Bilan annuel

Nombre de conventions "opérations de revitalisation du territoire dite de proximité" signées

Recensement des conventions "opérations de revitalisation du territoire dite de proximité" signées

NC

Un an après la promulgation de la loi

Recensement auprès des préfectures

Bilan annuel

Nombre de programmes locaux de l'habitat adoptés par des communautés de communes bénéficiant de l'assistance technique du département

Recensement des PLH, prévu à l'article L. 302-1 du CCH, adoptés par des communautés de communes après signature d'une convention avec le département en vue d'une mise à disposition à titre gratuit de l'assistance technique nécessaire à l'élaboration d'un PLH

12 nouveaux PLH (actuellement 24 communautés de communes, soumises à l'obligation de disposer d'un PLH, n'en ont pas, soit une cible à 50%)

Un an après la promulgation de la loi

Bilan sur la base de l'enquête habitat/SuDocUH

Bilan annuel

Nombre de contrats de cohésion territoriale signés

Recensement des contrats de cohésion territoriale signés

810

Un an après la promulgation de la loi

Recensement auprès des préfectures

Bilan annuel

Nombre de structures labélisées "France Services"

Recensement des structures labélisées "France Services"

2 500

Un an après la promulgation de la loi

Recensement par l'ANCT

Bilan trimestriel

Nombre de données échangées entre administrations dans le cadre de la possibilité ouverte à une administration de se procurer des données directement auprès d'une autre administration française

Liste des données partagées dont la publicité est prévue à l'article L. 114-8 nouveau du code des relations entre le public et l'administration

NC

Un an après la promulgation de la loi

Bilan annuel

TITRE IER - LA DIFFERENCIATION TERRITORIALE

Article 1er : Définition de la différenciation

1. ÉTAT DES LIEUX

Le principe d'égalité a été consacré, au sein du bloc de constitutionnalité, par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, notamment son article 6 qui dispose que la loi doit être la même pour tous, par le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et par l'article 1 er de la Constitution du 4 octobre 1958.

Il a également été consacré par la jurisprudence depuis la décision du Conseil constitutionnel n° 73-51 DC du 27 décembre 1973 (dite « Taxation d'office » ), qui en a fait un élément majeur du contrôle de la conformité des lois 1 ( * ) .

Bien qu'elles soient par principe proscrites par le bloc de constitutionnalité, notamment lorsqu'elles ont pour objet l'origine, la race, la religion, les croyances et le sexe, des différenciations sont néanmoins possibles sans qu'une rupture d'égalité devant la loi soit établie.

Aux termes d'une jurisprudence constante, le Conseil constitutionnel a en effet jugé que le principe d'égalité devant la loi ne s'oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit (décision n° 91-291 DC du 6 mai 1991 ; décision n° 2018-738 QPC du 11 octobre 2018). Le juge constitutionnel a ainsi apporté un tempérament au principe d'égalité : la rupture d'égalité n'est pas constituée lorsqu'une situation différente est régie de façon différente par la loi.

Dès lors, le principe constitutionnel d'égalité ne fait pas obstacle à ce que les règles régissant l'attribution et l'exercice des compétences locales, qui sont en principe les mêmes au sein de chaque catégorie de collectivités territoriales de droit commun (communes, départements, régions), soient différentes entre des collectivités territoriales relevant de la même catégorie.

Ainsi, dans son avis n° 393651 du 7 décembre 2017 relatif à la différenciation des compétences des collectivités territoriales relevant d'une même catégorie et des règles relatives à l'exercice de ces compétences, le Conseil d'État a rappelé que le cadre constitutionnel en vigueur n'impose pas un cadre légal uniforme et figé aux compétences des collectivités territoriales de droit commun.

Une différenciation des compétences au sein d'une même catégorie de collectivités territoriales et une différenciation des normes applicables à l'exercice de leurs compétences par des collectivités territoriales appartenant à une même catégorie sont donc possibles, à la condition toutefois que ces deux modalités de différenciation soient justifiées par des différences objectives de situation entre collectivités ou par des raisons d'intérêt général, de sorte que le principe d'égalité soit respecté.

Dans ces conditions, le législateur a pu autoriser tant l'attribution de compétences différenciées aux collectivités territoriales relevant d'une même catégorie que des modalités différenciées d'exercice des compétences locales.

A titre d'exemple, s'agissant de la différenciation des compétences, la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace a confié à cette collectivité, département regroupant le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, l'exploitation et la gestion des routes nationales et des autoroutes non concédées. Cette différenciation est justifiée par les problématiques inhérentes au transport routier dans le sillon rhénan et répond à une situation propre au territoire alsacien.

En ce qui concerne la différenciation des normes applicables à l'exercice des compétences locales, le législateur a par exemple pu prévoir, dans la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, que les communes non urbanisées, les communes isolées et les petites communes sont dispensées de l'obligation de disposer d'au moins 20 % de logements sociaux, sur la base de critères géographiques et démographiques et en raison de leur situation différente des autres communes au regard de l'objet de cette obligation.

Enfin, concernant les règles régissant l'exercice des compétences locales, la loi organique n° 2021-467 du 19 avril 2021 relative à la simplification des expérimentations mises en oeuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution traduit la volonté du Gouvernement de renforcer la différenciation en fonction des spécificités locales. Ainsi, les collectivités territoriales pourront, à l'issue d'une expérimentation, décider d'appliquer, dans le respect du principe d'égalité, des règles différentes de celles prévues par le droit national en ce qui concerne l'exercice des compétences qui leur sont dévolues par la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

A l'occasion de la concertation qui a été menée par la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales dans le cadre de la préparation du présent projet de loi, les élus locaux ont exprimé leur besoin de pouvoir adapter, dans certains domaines, les règles nationales aux particularités des territoires.

En effet, l'application d'une règle nationale uniforme ne permet pas toujours de répondre au besoin de proximité et d'efficacité de l'action publique qui a été exprimé par les élus et les citoyens ces dernières années, et particulièrement à l'occasion du Grand débat national. Aujourd'hui, les citoyens attendent des politiques publiques qu'elles tiennent compte de la diversité et de la singularité de leurs besoins et les élus locaux souhaitent pouvoir adapter les normes nationales en vue de mettre en oeuvre des solutions innovantes et adaptées aux spécificités locales.

Aussi, s'agissant de l'attribution des compétences locales, de leur répartition entre les différentes catégories de collectivités territoriales et des règles encadrant l'exercice de ces compétences, il apparaît utile de consacrer dans la loi le principe même de l'adaptation du droit aux réalités locales et d'en préciser les conditions, tels qu'ils ont été progressivement dégagés par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence et par le Conseil d'État dans les avis qu'il a récemment rendus (avis n° 393651 du 7 décembre 2017 relatif à la différenciation des compétences des collectivités territoriales relevant d'une même catégorie et des règles relatives à l'exercice de ces compétences 2 ( * ) ; avis n° 396789 du 21 février 2019 relatif aux compétences de la collectivité européenne d'Alsace 3 ( * ) ).

La reconnaissance de la différenciation en matière d'attribution et d'exercice des compétences aux collectivités territoriales relève du domaine législatif en application de l'article 34 de la Constitution, aux termes duquel « la loi détermine les principes fondamentaux [...] de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources » . Il paraît aujourd'hui opportun d'ancrer le principe de différenciation des compétences locales et des normes encadrant leur exercice dans la loi pour faire suite aux différents travaux récemment conduits, notamment par le Conseil d'Etat, qui ont permis de dégager les conditions dans lesquelles ce principe peut être mis en oeuvre de manière juridiquement sécurisée.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Il s'agit de donner une plus grande effectivité à la différenciation territoriale en consacrant son principe par la loi, de sorte que le législateur puisse, dans un cadre juridique clair et sécurisé, adapter, en fonction des volontés locales et dans le respect du principe d'égalité, les règles d'attribution et d'exercice des compétences des collectivités territoriales aux particularités locales.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il pourrait être envisagé de ne pas légiférer dès lors que le cadre constitutionnel actuel, tel qu'il a été précisé par la jurisprudence constitutionnelle, ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre d'une différenciation dans l'attribution et dans l'exercice des compétences des collectivités territoriales, sous réserve que le principe d'égalité soit préservé.

Toutefois, cette solution présente l'inconvénient de ne pas faire apparaître clairement, en l'absence de disposition législative expresse, que cette possibilité est d'ores et déjà ouverte aux collectivités territoriales qui aspirent légitimement à pouvoir voir adapté aux spécificités locales le droit qui leur est applicable.

3.2. OPTION RETENUE

Il a donc été décidé d'introduire, dans le chapitre du code général des collectivités territoriales (CGCT) relatif au principe de libre administration, une disposition prévoyant expressément que la loi peut déroger aux règles d'attribution et d'exercice des compétences locales, consacrant ainsi le droit à la différenciation territoriale, dans le respect du principe d'égalité. Ainsi, les règles relatives à l'attribution et à l'exercice des compétences qui s'appliquent à une catégorie de collectivités territoriales peuvent être différenciées dans le respect du principe d'égalité.

Il appartiendra ainsi au législateur, dans le cadre de lois de décentralisation ou de lois sectorielles, de prévoir des règles différenciées d'attribution et d'exercice des compétences locales.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La présente disposition modifie en deux points le chapitre Ier relatif au principe de libre administration du titre unique du livre Ier de la première partie du CGCT.

D'une part, elle réorganise ce chapitre Ier actuellement composé des articles L. 1111-1 à L. 1111-11 en trois sections, respectivement consacrées aux dispositions générales et à l'exercice différencié des compétences, aux délégations de compétences, et à l'exercice concerté des compétences.

D'autre part, elle enrichit cette section 1 nouvellement créée d'un article L. 1111-3-1 prévoyant que la loi peut déroger aux règles d'attribution et d'exercice des compétences locales sans qu'il soit porté atteinte au principe d'égalité.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

En consacrant le principe de la différenciation territoriale, cette disposition permettra aux collectivités territoriales de solliciter plus facilement et dans un cadre juridique sécurisé une adaptation des règles régissant l'attribution et l'exercice des compétences qui leur sont dévolues par la loi.

L'attribution de compétences différenciées et l'application de règles différenciées dans le cadre de l'exercice de leurs compétences pourront être sollicitées par les collectivités territoriales en fonction des besoins qu'elles pourront elles-mêmes identifier et faire remonter par les associations d'élus locaux.

En outre, les guichets destinés à accompagner les collectivités territoriales dans la mise en oeuvre des expérimentations, que le Conseil d'Etat préconise d'instituer dans son étude « Les expérimentations : comment innover dans la conduite des politiques publiques » publiée le 3 octobre 2019, permettront aux collectivités territoriales de faire connaître leurs propositions en matière de différenciation des compétences.

Afin que le principe d'égalité soit respecté, la modulation de l'attribution et de l'exercice des compétences locales devra cependant être justifiée par des différences objectives de situation, tenant par exemple à des particularités géographiques, démographiques, économiques ou sociales, propres aux collectivités territoriales qui souhaiteront en bénéficier.

Par exemple, comme indiqué ci-dessus, le législateur a confié à la collectivité européenne d'Alsace la compétence relative à l'exploitation et à la gestion des routes nationales et des autoroutes non concédées en raison du caractère transfrontalier de ce territoire et des problématiques en matière de transport routier qui résultent de cette caractéristique géographique propre à l'Alsace.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des départements et des régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution, des collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie 4 ( * ) .

Article 2 : Extension du pouvoir réglementaire local

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le pouvoir réglementaire 5 ( * ) consiste dans l'édiction d'actes à caractère général et impersonnel d'une valeur inférieure à la loi.

En effet, dans sa décision n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002 sur la loi relative à la Corse, le Conseil constitutionnel a considéré, pour la première fois, que le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales avait pour fondement le deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution, posant le principe de leur libre administration, et non les seuls articles 13 et 21 relatifs au pouvoir réglementaire national.

La loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République l'a consacré en inscrivant, aux termes de l'article 72, alinéa 3, de la Constitution que « Dans les conditions prévues par la loi, les collectivités territoriales (...) disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences » . Elle a ainsi entériné une jurisprudence établie.

Le Conseil d'État a en effet reconnu aux collectivités territoriales la capacité à prendre les mesures réglementaires liées à l'organisation de leur service public (par exemple organiser le droit de grève en l'absence de dispositions législatives ; cf. Conseil d'État, 9 juillet 1965, Pouzenc) ou à la gestion de leur domaine (Conseil d'État, 6 novembre 1998, n°171317).

Il a précisé que « le pouvoir réglementaire des collectivités territoriales n'est pas inconditionné. Il s'exerce dans les bornes d'une compétence définie par la loi et doit avoir un fondement législatif. Cette double limitation est imposée par l'article 34 de la Constitution aux termes duquel : " la loi détermine les principes fondamentaux (...) de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources " » (avis d'Assemblée générale du 15 novembre 2012).

Le Conseil constitutionnel a également reconnu aux collectivités territoriales un pouvoir réglementaire en matière d'organisation interne (décision n° 98-407 DC du 14 janvier 1999) en considérant qu'il appartenait, non pas au législateur, mais à l'assemblée délibérante de se prononcer sur le caractère public des séances de sa commission permanente, au travers de son règlement intérieur.

Enfin, la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a reconnu aux régions un pouvoir de proposition en matière d'adaptation des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur 6 ( * ) , ou en cours d'élaboration, concernant les compétences, l'organisation et le fonctionnement d'une, de plusieurs ou de l'ensemble des régions.

Le pouvoir réglementaire local reste cependant peu utilisé et trouve principalement une traduction concrète à l'échelle des communes. A titre d'exemple, le maire dispose d'un pouvoir réglementaire local dans des domaines précis, notamment :

- l'urbanisme : il peut déterminer des prescriptions d'urbanisme dans les bornes de la loi, dont il suit et contrôle l'application dans les permis de construire qu'il délivre ;

- au titre de ses prérogatives de police : il dispose d'un pouvoir d'appréciation en matière de limitation de vitesse. Si les vitesses maximales autorisées sont fixées par le pouvoir réglementaire national (article R. 413-2 du code de la route), le maire peut les restreindre pour des motifs liés à la sécurité publique (article R. 413-1 du même code) ou, en agglomération, pour des motifs liés notamment aux nécessité de la mobilité ou de la protection de l'environnement (article L. 2213-1 du code de l'environnement). Il peut même relever la vitesse maximale autorisée jusqu'à 70 km/h en agglomération, en fonction des circonstances locales (article R. 413-3 du code de la route). L'article 36 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, codifié à l'article L. 3221-4-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), prévoit la possibilité pour le président du conseil départemental ou, lorsqu'il est l'autorité détentrice du pouvoir de police de la circulation, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), de fixer, pour les sections de routes hors agglomération relevant de sa compétence et ne comportant pas au moins deux voies affectées à un même sens de circulation, une vitesse maximale autorisée supérieure de 10km/h à celle prévue par le code de la route, dans le cadre précisé par la loi ;

- la sécurité dans les établissements recevant du public : les règles sont fixées par le pouvoir réglementaire national (article R. 123-12 du code de construction de l'urbanisme - CCH). L'article R. 123-13 du CCH précise que certains établissements peuvent, en raison de leur conception ou de leur disposition particulière, donner lieu à des prescriptions exceptionnelles soit en aggravation, soit en atténuation. Les atténuations aux dispositions du règlement de sécurité ne peuvent être décidées que sur avis conforme de la commission consultative départementale de la protection civile. L'autorité compétente pour prendre ces prescriptions exceptionnelles est le maire, en tant qu'autorité accordant le permis de construire ou en tant qu'autorité de police. Cela lui permet, par exemple, d'autoriser qu'une porte donnant sur l'extérieur s'ouvre dans le sens contraire de l'évacuation (CAA Paris, 31 janvier 2008, n°06PA01728).

Le pouvoir réglementaire local peut trouver à s'étendre, dans le cadre juridique actuel, tout en préservant un équilibre nécessaire entre simplification et lisibilité des normes et ainsi favoriser l'efficacité de l'action publique locale en fonction de ses spécificités et de ses besoins.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

En application des dispositions de l'article 72 alinéa 3 de la Constitution, les collectivités territoriales disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences dans le respect des conditions suivantes :

- le législateur définit les cas et conditions de l'exercice de celui-ci dans le respect des compétences des autres collectivités ;

- le pouvoir réglementaire local ne peut avoir pour effet de remettre en cause le pouvoir réglementaire du Premier ministre : les collectivités territoriales doivent respecter, le cas échéant, le cadre qu'il fixe. Si la loi ne prévoit aucun décret d'application, les collectivités peuvent arrêter elles-mêmes les règles qu'appelle l'exercice de la compétence que la loi leur a confiée, dans la mesure toutefois où aucune disposition d'ordre national n'est nécessaire ;

- il serait contraire aux articles 21 et 72 de la Constitution de confier aux collectivités territoriales le soin de fixer des règles d'application d'une législation étrangère aux compétences locales ;

- le pouvoir réglementaire local ne doit pas intéresser les conditions essentielles de mise en oeuvre des libertés publiques (décision n° 84-185 DC du 18 janvier 1985 et n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002) et il ne peut en résulter une rupture du principe d'égalité. En pratique, la limite tenant au principe d'égalité reste souple. Les règles d'urbanisme varient d'une commune à l'autre sans qu'il s'ensuive aucune question quant à la constitutionnalité des facultés ainsi ouvertes par le législateur.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le législateur est compétent pour attribuer un pouvoir réglementaire aux collectivités territoriales. Le Conseil d'État considère de manière constante que, le Gouvernement ayant pour mission d'assurer l'exécution de la loi, il peut être amené à prendre tous les compléments nécessaires sans lesquels la loi ne serait pas applicable, y compris dans les domaines de compétences des collectivités territoriales. L'avis du Conseil d'État du 15 novembre 2012 précité rappelle que la révision constitutionnelle de 2003 n'a pas modifié cette interprétation.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les dispositions envisagées poursuivent un objectif d'adaptation locale dans le respect des orientations posées par le pouvoir constituant ainsi que par la jurisprudence constitutionnelle et administrative afin de répondre au besoin d'une plus grande proximité et d'une meilleure lisibilité de l'action publique exprimée par nos concitoyens lors du Grand Débat National, dans lequel le Président de la République a affirmé sa volonté d'ouvrir « un nouvel acte de décentralisation adapté à chaque territoire » . La concertation conduite en 2020 dans chaque région et département sous l'égide des préfets sur les modalités de l'exercice local des compétences a été animée par l'ambition de transformer les relations entre l'État et les collectivités territoriales, en partant des besoins et des projets du terrain. La présente disposition entend ainsi, dans divers champs de l'action publique, ouvrir par la loi, eu égard aux exigences constitutionnelles, de nouveaux champs au pouvoir réglementaire local.

Enfin, certaines collectivités locales, entendues dans le cadre de la mission flash sur le pouvoir réglementaire local menée par les députées Monica MICHEL et Patricia LEMOINE, ont à nouveau exprimé le « besoin de pouvoir adapter les politiques publiques aux spécificités locales, en ayant la possibilité de déroger à la norme nationale (législative ou réglementaire). Renforcer le pouvoir réglementaire local doit être un moyen de gagner en efficacité pour rapprocher la prise de décision du terrain. Les élus locaux doivent avoir plus d'autonomie pour trouver des solutions locales adaptées au contexte de leurs territoires » .

3. DISPOSITIF RETENU

La disposition envisagée vise à élargir le pouvoir réglementaire local sur différents points de compétence dans le cadre des concertations territoriales, comme peut l'être, à titre d'exemple, la fixation du nombre d'élus au conseil d'administration des centres communaux et intercommunaux d'action sociale (CCAS et CIAS), le fait de laisser au maire le soin de déterminer le délai dans lequel il transmet à l'Office national des forêts l'état de répartition, entre les titulaires du droit d'usage, du nombre de bestiaux admis respectivement au pâturage et au panage, ou bien encore la possibilité donnée aux conseils municipaux de fixer par une délibération le régime des redevances dues aux communes pour l'occupation provisoire de leur domaine public par les chantiers de travaux .

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La disposition a vocation à concerner le pouvoir réglementaire tel qu'il est traité dans les différents articles des codes relativement aux compétences des collectivités territoriales, ainsi, l'article L. 123-6 du code de l'action sociale et des familles, l'article L. 241-11 du code forestier et l'article L. 2333-84 du CGCT et devront être modifiés en conséquence.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette disposition nouvelle permettra aux collectivités territoriales de déterminer elles-mêmes les modalités d'application de la loi chacune dans leur domaine de compétences et ainsi de les adapter aux circonstances locales.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des collectivités régies par l'article 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie.

Article 3 : Conférences territoriales de l'action publique

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales avait institué la « conférence des exécutifs », laquelle rassemblait à l'échelon régional le président du conseil régional, les présidents des conseils généraux, ceux des communautés urbaines et des communautés d'agglomération afin d'étudier et débattre, à l'initiative de l'exécutif régional, de tous sujets concernant l'exercice de compétences pour lesquelles une concertation est prévue par la loi et de tous domaines nécessitant une harmonisation entre région et départements. Son fonctionnement s'est avéré très disparate entre les régions.

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a élargi la composition de la conférence des exécutifs aux présidents des conseils de métropoles et à un représentant par département des communautés de communes situées sur le territoire régional. Dans son rapport qu'il avait remis au Président de la République le 13 septembre 2011, Jean-Jacques de Peretti avait eu l'occasion de souligner les aspects novateurs de la loi du 16 décembre 2010, notamment les schémas d'organisation des compétences et de mutualisation des services et livré une boîte à outils en vue d'une clarification de la répartition des compétences entre départements et régions la mieux adaptée aux besoins locaux.

Elle a introduit l'article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT), qui permet à une collectivité territoriale de déléguer à une collectivité territoriale relevant d'une autre catégorie ou à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) une compétence dont elle est attributaire. La compétence déléguée est exercée « au nom et pour le compte » de la collectivité territoriale délégante. Les conditions de cette délégation sont fixées par voie conventionnelle entre la collectivité territoriale délégante et la collectivité territoriale ou l'EPCI-FP délégataire.

Elle a également institué le schéma d'organisation des compétences et de mutualisation des services, en limitant son champ à l'amélioration de la coopération entre une région et les départements qui la composent. Le schéma était facultatif quant à son élaboration et conditionné pour sa mise en oeuvre à l'accord de la région et de tous les départements.

La loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) a consolidé le dispositif de la gouvernance locale des collectivités et de leurs groupements à l'échelle régionale en instituant, avec l'article L. 1111-9-1 du CGCT, une conférence territoriale de l'action publique (CTAP) présidée par le président du conseil régional, chargée de favoriser un exercice concerté des compétences des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics.

Sa composition comprend des membres de droit (président de la région, présidents des conseils départementaux, présidents des EPCI-FP de plus de 30 000 habitants ayant leur siège sur le territoire de la région) et des membres élus (représentants des EPCI-FP de moins de 30 000 habitants, représentants des communes de plus de 30 000 habitants, entre 3 500 et 30 000 habitants, de moins de 3 500, le cas échéant représentant des collectivités territoriales et groupements de collectivités des territoires de montagne).

La CTAP organise librement ses travaux au travers de commissions thématiques dont une seule, celle relative à la culture, est inscrite dans la loi, et leur publicité dans le cadre de son règlement intérieur. Le préfet de région est amené à y participer dans les conditions fixées au 4 ème alinéa du III de l'article L. 1111-9-1 précité, notamment lorsque la conférence donne son avis sur une demande d'une collectivité territoriale ou d'un EPCI-FP tendant à obtenir la délégation de l'exercice d'une compétence de l'État dans le cadre fixé à l'article L. 1111-8-1 du CGCT ou lorsqu'elle intervient au titre du premier alinéa du II de l'article 26 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

La CTAP débat et rend des avis sur tous les sujets relatifs à l'exercice de compétences et à la conduite de politiques publiques nécessitant une coordination ou une délégation de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements. Son action a notamment pour objectif d'examiner et d'organiser les modalités de leur action commune. Enfin, elle débat des conventions territoriales d'exercice concerté des compétences (CTEC) organisée sous l'égide d'une collectivité dite « chef de file », dont la mise en oeuvre est assise sur les dispositions de l'article L. 1111-9 du CGCT. Il appartient à chaque « chef de file » d'élaborer une convention territoriale d'exercice concerté d'une compétence (CTEC) fixant les objectifs de rationalisation et les modalités de l'action commune pour chacune des compétences concernées. La loi a été souple pour la mise en oeuvre des CTEC : elle ne prévoit pas de calendrier de déploiement et a retenu une approche très ouverte du rattachement des actions aux domaines de compétences. Chaque « chef de file » propose une définition du périmètre de la convention. Quelques régions se sont engagées dans la mise en oeuvre de CTEC : la région Occitanie en matière de solidarités territoriales avec les départements au titre de leur chef de filât dans ce domaine dans un objectif de coordination, de simplification et de clarification des interventions financières respectives ; la région PACA dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la protection de la biodiversité ; la région Bretagne sur le tourisme ; la région Île-de-France en matière d'aménagement du territoire pour permettre la pérennisation d'aides au développement des territoires ruraux.

La loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique prévoit que la délégation de compétence puisse intervenir sur tout ou partie de la compétence concernée. Ce faisant, l'évolution législative ainsi introduite épouse les autres mécanismes particuliers de délégation en vigueur, déjà sécables, lesquels sont exclusifs de l'application du mécanisme de droit commun ainsi que l'a rappelé le Conseil d'État dans son arrêt du 12 mai 2017 relatif à la nouvelle répartition des compétences en matière d'interventions économiques des collectivités territoriales et de leurs groupements issue de l'application de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRE) - (req. n°397364).

Parmi les mécanismes de délégation sectorielle entre collectivités territoriales qui s'imposent au droit commun de l'article L. 1111-8 précité figurent, par exemple :

- les aides aux entreprises que la région peut déléguer en tout ou partie à la métropole de Lyon, aux communes et à leurs groupements en vertu de l'article L. 1511-2 du CGCT ;

- l'établissement et l'exploitation de réseaux de communications électroniques qu'une collectivité territoriale ou un groupement, qui s'est vu transférer la compétence, peut déléguer à un syndicat mixte ouvert en application de l'article L. 1425-1 du même code ;

- le fait qu'un établissement de coopération intercommunale qui y est expressément autorisé par ses statuts « peut demander à exercer, au nom et pour le compte du département ou de la région, tout ou partie des compétences dévolues à l'une ou l'autre de ces collectivités » selon les dispositions de l'article L. 5210-4 du même code.

Les principes de la délégation de compétences visée à l'article L. 1111-8 du CGCT peuvent être résumés de la manière suivante :

- les modalités de contrôle du délégant sur le délégataire sont négociées entre les deux parties : il convient donc que le délégataire y consente, le délégant conservant pour sa part la responsabilité de l'exercice de la compétence par le délégataire, dès lors qu'elle est exercée au nom et pour le compte de la collectivité délégante ;

- aucune subdélégation n'est en principe possible à l'exception du seul et unique cas des transports scolaires en région Île-de-France en application de l'article L. 3111-15 du code des transports, dès lors qu'une collectivité territoriale ne peut déléguer qu'une compétence dont elle est attributaire en propre ;

- la délégation de compétences entre collectivités d'une même catégorie n'est pas possible au regard de leur compétence géographique ;

- les EPCI-FP ne peuvent, en principe, déléguer leurs compétences, conformément aux principes d'exclusivité et de spécialité régissant leur fonctionnement, cette règle ayant toutefois connu trois amodiations récentes :

1/ les transports scolaires par application de l'article L. 3111-9 du code des transports dans sa rédaction issue de la loi NOTRE susmentionnée ;

2/ les dispositions de la loi n° 2017-1838 du 30 décembre 2017 relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations (GEMAPI) permettant à un EPCI-FP de déléguer tout ou partie de sa compétence en matière de GEMAPI à un syndicat mixte labellisé « établissement public d'aménagement et de gestion des eaux » (EPAGE) ou « établissement public territorial de bassin » (EPTB) au sens de l'article L. 213-12 du code de l'environnement ou à tout syndicat mixte ou tout syndicat de communes, cette dernière faculté s'éteignant cependant au 31 décembre 2020, de telle sorte qu'après cette date les seuls EPAGE et EPTB pourront se voir déléguer tout ou partie des missions de la GEMAPI telles que visées au I de l'article L. 211-7 du code de l'environnement ;

3/ la loi du 27 décembre 2019 susmentionnée, laquelle a ouvert la possibilité à une communauté de communes ou à une communauté d'agglomération de déléguer tout ou partie des compétences relatives à l'eau, à l'assainissement des eaux usées et à la gestion des eaux pluviales urbaines, ou une ou plusieurs de ces compétences à leurs communes membres ou à un syndicat infra-communautaire existant au 1 er janvier 2019.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le rapport de l'inspection générale de l'administration intitulé « Délégation de compétences et conférence territoriale d'action publique, de nouveaux outils au service de la coopération territoriale » de mai 2017 avait été amené à relever que les CTAP n'avaient pas réussi à faire émerger un « pacte de gouvernance locale », en pointant à ce titre plusieurs écueils : la lourdeur de l'instance, un équilibre entre urbain et rural peu favorable à la prise en compte du fait métropolitain, et la difficulté des élus à se mobiliser pour la faire vivre dans la durée.

En réalité, la portée de ces conférences territoriales dépend essentiellement de la volonté locale des élus locaux de les utiliser au mieux de leurs potentialités. Le Gouvernement n'envisage pas de refonder les équilibres de ces instances mais d'affiner le périmètre de leurs compétences et de leurs responsabilités.

Alors que les préfets ont été amenés à procéder à leur renouvellement conformément au droit en vigueur issu des articles L. 1111-9-1 et D. 1111-2 du CGCT dans le prolongement du renouvellement général des conseils municipaux intervenus en 2020, le choix fait par le Gouvernement, en concordance avec les souhaits des élus locaux, est, tout en conservant une stabilité dans la composition de ces instances, de leur donner une nouvelle dynamique en ouvrant plus largement les possibilités de délégation de compétence qui leur sont soumises et qui ont l'avantage de réunir à la fois la région, les départements, les communes et leurs intercommunalités.

La mesure répond aux demandes des élus locaux déjà exprimées à l'occasion des débats du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, afin de pouvoir développer davantage les possibilités de délégations de compétence entre collectivités territoriales et EPCI-FP, lesquelles constituent également un outil de la différenciation.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'article du projet de loi a pour objectif d'ouvrir la possibilité de délégation des compétences de façon plus souple sur la base d'un projet identifié, pour sa réalisation ou sa gestion, et non sur l'ensemble de la compétence.

3. DISPOSITIF RETENU

L'option retenue est d'étoffer les compétences des CTAP sans remettre en cause leur équilibre, ce qui est un gage de leur stabilité, de façon à ce que les élus locaux continuent de s'approprier l'outil.

Les délégations porteront sur la réalisation ou la gestion de projets structurants pour les territoires, en concordance avec les orientations énoncées par le Président de la République et sa volonté d'ouvrir un nouvel acte de décentralisation adapté à chaque territoire.

Le mécanisme de délégation du présent article épouse les formes classiques du droit conventionnel de la délégation de compétence au sens des articles L. 1111-8 et R 1111-1 du CGCT tout en comportant plusieurs aménagements notables :

- il permet aux CTAP de prendre une résolution actant le principe de délégations dans les matières susmentionnées, laquelle vaut jusqu'au renouvellement suivant des conseils régionaux, en laissant les collectivités et les EPCI-FP intéressés libres de les conduire ;

- il lie les délégations à la réalisation de projets structurants dans la région et constitue un nouvel outil en sus des conventions d'exercice concerté des compétences déjà en vigueur dans le cadre de ces conférences territoriales ;

- il ouvre les possibilités de délégations jusqu'alors cloisonnées en permettant par exemple à une région de déléguer une compétence économique à un département pour un projet donné ou à un département de déléguer une compétence sociale à une région. Elle permet également à un EPCI-FP de déléguer sur un projet des compétences de manière ascendante ;

- il accroît la place du représentant de l'État dans la région, lequel participera à la conférence que le président de région devra convoquer sur le sujet dans les douze mois qui suivent le renouvellement des conseils régionaux, en donnant la possibilité au préfet de région de proposer des projets en la matière.

L'orientation s'inspire, dans l'esprit et la forme, du dispositif retenu par la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace, singulièrement de l'article L. 3431-3 du CGCT, lequel charge la Collectivité d'organiser les modalités de mise en oeuvre du schéma alsacien de coopération transfrontalière, dans le respect des compétences des autres collectivités territoriales et de leurs groupements, et prévoit les délégations de compétences susceptibles d'être conclues.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 1111-9-1 du CGCT.

4.2. IMPACTS BUDGÉTAIRES

L'impact budgétaire de la présente disposition est neutre car elle consiste à déléguer des responsabilités d'exécution qui auront été budgétairement assumées par le délégant.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cet article de loi ne crée aucune charge nouvelle pour les collectivités territoriales et leurs groupements. Au contraire, il apportera de la souplesse aux dispositifs existants afin de les adapter aux territoires et aux réalités locales.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'impact sur les services des collectivités territoriales est minime.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'appliquera à l'ensemble des régions dotées d'une conférence territoriale de l'action publique.

Article 4 : Élargissement des dispositifs de participation citoyenne locale

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Conformément à l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, « La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation ».

La participation directe des électeurs à la vie locale a été introduite en droit français par la loi n° 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République (loi ATR) et enrichie ensuite par divers textes dont la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République 7 ( * ) .

1.1.1. Consultation locale des électeurs et droit de pétition dans le droit en vigueur

Selon l'article 72-1, alinéa 1 er de la Constitution, le droit de pétition est le droit par lequel les électeurs d'une collectivité peuvent demander l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante de cette collectivité d'une question relevant de sa compétence.

Une forme de droit de pétition a été introduite dans la section du code général des collectivités territoriales (CGCT) relative à la consultation des électeurs. La consultation locale des électeurs a été initialement ouverte aux seules communes par les articles 10 et suivants de la loi n° 92-125 précitée. L'article 122 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a étendu ce dispositif à l'ensemble des collectivités territoriales.

Ainsi, l'article L. 1112-15 du CGCT prévoit que « Les électeurs d'une collectivité territoriale peuvent être consultés sur les décisions que les autorités de cette collectivité envisagent de prendre pour régler les affaires relevant de la compétence de celle-ci ».

Pour ce qui concerne plus particulièrement le droit de pétition, l'article L. 1112-16 du CGCT prévoit que : « Dans une commune, un cinquième des électeurs inscrits sur les listes électorales et, dans les autres collectivités territoriales, un dixième des électeurs, peuvent demander à ce que soit inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante de la collectivité l'organisation d'une consultation sur toute affaire relevant de la décision de cette assemblée ».

Le droit de pétition prévu par le CGCT permet donc l'inscription de l'organisation d'une consultation des électeurs à l'ordre du jour d'une assemblée, et non l'inscription d'un sujet particulier.

1.1.2. Distinction entre la consultation des électeurs et le référendum local

La consultation des électeurs se distingue du référendum local en ce qu'elle ne vise qu'à recueillir un simple avis des électeurs, tandis que le référendum local permet l'adoption d'une décision. Le référendum local figure à l'article 72-1 alinéa 2 de la Constitution, qui prévoit que « Dans les conditions prévues par la loi organique, les projets de délibération ou d'acte relevant de la compétence d'une collectivité territoriale peuvent, à son initiative, être soumis, par la voie du référendum, à la décision des électeurs de cette collectivité ». Le référendum local a été introduit à l'article LO. 1112-1 du CGCT par la loi organique n° 2003-705 du 1 er août 2003 relative au référendum local. À la différence du référendum local, qui relève de la seule initiative de la collectivité, les électeurs peuvent être à l'initiative d'une demande de consultation par l'exercice du droit de pétition, la décision de l'organiser relevant toutefois de l'assemblée délibérante. Comme indiqué ci-dessus, il est nécessaire de réunir un cinquième au moins des électeurs dans les communes et un dixième des électeurs dans les autres collectivités territoriales. Un électeur ne peut signer plus d'une demande par an et par collectivité.

Ainsi que le précise l'article L. 1112-20 du code général des collectivités territoriales (CGCT), « après avoir pris connaissance du résultat de la consultation, l'autorité compétente de la collectivité territoriale arrête sa décision sur l'affaire qui en a fait l'objet ».

La consultation des électeurs, tout comme le référendum local, ne peuvent porter que sur une affaire relevant de la compétence de la collectivité.

1.1.3. Autres dispositifs de démocratie participative

De nombreux autres dispositifs de démocratie participative existent, dont voici quelques exemples.

L'article L. 131-1 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que « Lorsque l'administration décide, en dehors des cas régis par des dispositions législatives ou réglementaires, d'associer le public à la conception d'une réforme ou à l'élaboration d'un projet ou d'un acte, elle rend publiques les modalités de cette procédure, met à disposition des personnes concernées les informations utiles, leur assure un délai raisonnable pour y participer et veille à ce que les résultats ou les suites envisagées soient, au moment approprié, rendus publics ». Il résulte de ces dispositions que les autorités administratives ont la faculté de procéder à la consultation du public dans le cadre d'une réforme, d'un projet ou d'un acte relevant là aussi de leur compétence.

L'ordonnance n° 2016-488 du 21 avril 2016 relative à la consultation locale sur les projets susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement a ajouté une possibilité de recours à une consultation locale (article L.120-1 du code de l'environnement), mais elle est organisée par l'Etat et non par les collectivités.

Dans le cadre d'un projet de création d'une commune nouvelle, une consultation des électeurs est organisée au sein de chaque commune concernée, en l'absence d'accord de la totalité des conseils municipaux sur le projet de création, et à condition que 2/3 au moins des conseils municipaux des communes concernées représentant plus des 2/3 de la population se soient prononcés favorablement à la création d'une commune nouvelle (articles L. 2113-2 et L. 2113-3 du CGCT).

Les collectivités territoriales peuvent également créer des comités consultatifs comprenant des citoyens non élus sur toute affaire relevant de leurs compétences (articles L. 2143-2 et L. 5211-49-1 du CGCT).

D'autres formes de participation à la vie locale peuvent être organisées par les collectivités territoriales, telles que budgets participatifs, consultations en ligne sur des projets particuliers...

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 72-1 de la Constitution dispose que « la loi fixe les conditions dans lesquelles les électeurs de chaque collectivité territoriale peuvent, par l'exercice du droit de pétition, demander l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante de cette collectivité d'une question relevant de sa compétence ».

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le seuil de nombre d'électeurs (un cinquième dans les communes et un dixième dans les autres collectivités territoriales) apparaît élevé et rend difficile l'aboutissement de certaines demandes d'organisation d'une consultation. Même si ces chiffres sont déjà anciens, un recensement effectué par les services de l'Etat pour la période entre 1995 et 2009 montrait que le nombre de consultations organisées était faible 8 ( * ) . En 2008 et 2009, 17 communes avaient organisé des consultations. Entre 1995 et 2009, 233 consultations avaient été organisées.

La pétition ne peut par ailleurs n'avoir que pour but l'inscription « à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante de la collectivité l'organisation d'une consultation sur toute affaire relevant de la décision de cette assemblée ». Il apparaît nécessaire de diversifier les buts de la pétition, en permettant qu'elle puisse également avoir pour objet de saisir la collectivité de toute affaire relevant de sa compétence, en application de l'article L.72-1 de la Constitution, et non simplement l'inscription de l'organisation d'une consultation des électeurs.

Enfin, il est apparu nécessaire de préciser les suites données à la pétition.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le premier objectif poursuivi est la facilitation de la mise en oeuvre concrète de ce droit de pétition. La division par deux des seuils actuellement en vigueur (passage d'un cinquième à un dixième des électeurs dans les communes et d'un dixième à un vingtième des électeurs dans les autres collectivités territoriales - soit pour une commune de 100 000 électeurs : passage de 20 000 à 10 000 électeurs), permettra de rendre plus aisée le rassemblement des signatures d'électeurs nécessaires à l'aboutissement d'une pétition.

Le deuxième objectif est l'élargissement des objectifs de la pétition. Il sera en effet désormais possible de saisir la collectivité de toute affaire relevant de sa compétence.

Le troisième objectif est d'obliger le conseil municipal ou le bureau de l'assemblée délibérante à se prononcer sur la recevabilité de la pétition par une décision motivée, décision qui pourra faire l'objet d'un recours devant le tribunal administratif.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a été envisagé de fixer des seuils très bas afin de favoriser l'exercice du droit de pétition. Or, des seuils trop faibles, outre qu'ils ne seraient pas la garantie du caractère représentatif des pétitionnaires, pourraient entraîner un nombre élevé de pétitions, ce qui n'est pas apparu pertinent.

Il a également été envisagé de ne pas rendre opposable la délibération du conseil municipal ou du bureau de l'assemblée délibérante relative à la recevabilité de la pétition. Cette option n'a pas été retenue car l'opposabilité de la délibération renforce les droits des pétitionnaires.

3.2. OPTION RETENUE

Le seuil de nombre d'électeurs (un cinquième dans les communes et un dixième dans les autres collectivités territoriales) est divisé par deux : il sera d'un dixième dans les communes et d'un vingtième dans les autres collectivités territoriales.

La pétition pourra avoir pour objet de saisir la collectivité de toute affaire relevant de sa compétence.

Enfin, le conseil municipal ou le bureau de l'assemblée délibérante devra se prononcer sur la recevabilité de la pétition par une décision motivée, décision susceptible d'un recours devant le tribunal administratif. Le dispositif retenu est directement inspiré de celui applicable en Polynésie française (article 158 9 ( * ) de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le premier et le dernier alinéa de l'article L. 1112-16 du CGCT territoriales sont modifiés.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les organes délibérants des collectivités territoriales pourront être saisis de pétitions d'une manière plus souple.

4.3. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mise en oeuvre du droit de pétition sera facilitée pour les particuliers, du fait de l'abaissement des seuils.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATION MENÉE

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

TITRE II - LA TRANSITION ECOLOGIQUE

CHAPITRE IER - LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Article 5 : Clarification de la répartition des compétences et des qualités de chef de file des collectivités territoriales dans le domaine de la transition écologique

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Dans l'état actuel du droit, les collectivités territoriales et leurs groupements concourent aux objectifs de transition écologique et de développement durable que sont notamment la lutte contre le changement climatique, la préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources, le développement de consommation et de production responsables ou encore la transition énergétique. Ce mouvement de contribution des autorités décentralisées à ces objectifs ne va qu'en s'accélérant, d'importantes réformes ayant récemment mis les collectivités territoriales au coeur de dispositifs visant à promouvoir la transition écologique. C'est le cas, par exemple, de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, dont l'un des principaux objectifs est de “contribue[r] aux objectifs ambitieux que la France s'est fixée dans l'accord de Paris puis dans le plan climat” 10 ( * ) confie aux intercommunalités, autorités organisatrices de la mobilité de droit commun, le soin de développer les mobilités douces et partagées sur le territoire national. C'est le cas, également de la feuille de route pour l'économie circulaire (FREC) d'avril 2018, qui place les collectivités territoriales au coeur du dispositif ayant pour ambition de mieux recycler et mieux valoriser nos déchets, notamment en facilitant “le déploiement de la tarification incitative de la collecte des déchets” 11 ( * ) . Le développement de ces compétences sectorielles et l'interdépendance des problématiques relevant de la transition écologique appelle aujourd'hui, comme l'a fait remarquer le Sénat, à “attribuer aux collectivités un bloc de compétences cohérent dans le domaine de la transition écologique” 12 ( * ) .En vertu de l'article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la région dispose de la qualité de chef de file pour organiser l'action locale dans les domaines de l'aménagement et du développement durable du territoire, de la protection de la biodiversité ainsi que dans le domaine du climat, de la qualité de l'air et de l'énergie. Elle élabore à ce titre plusieurs schémas ayant un impact sur la transition écologique tels que le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires qui détermine notamment les objectifs en matière de maîtrise et de valorisation de l'énergie, de lutte contre le changement climatique, de pollution de l'air ou encore de protection et de restauration de la biodiversité.

L'échelon régional favorise et coordonne également les actions locales en matière de rénovation énergétique des bâtiments notamment dans le cadre du programme régional pour l'efficacité énergétique.

Les départements contribuent à la résorption de la précarité énergétique, sans toutefois que ce rôle, qui mérite d'être mieux mis en avant, ne soit explicitement lié, à ce stade, à la transition écologique.

Le bloc local dispose, quant à lui, de nombreuses compétences intervenant directement en faveur de la transition écologique, telles que la maîtrise de la consommation énergétique, le développement d'équipements faibles en émission de gaz à effet de serre ou la réduction de la pollution atmosphérique. Ces attributions sont visées aux articles L. 2224-31 et suivants du CGCT.

Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) que sont les communautés de communes, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les métropoles se sont vus attribuer de fortes compétences en matière de protection et de mise en valeur de l'environnement et de politique du cadre de vie telles que : la collecte et traitement des déchets des ménages et déchets assimilés, la lutte contre la pollution de l'air, la lutte contre les nuisances sonores ou encore le soutien aux actions de maîtrise de la demande d'énergie. Ils sont également compétents dans les champs de l'eau et de l'assainissement au sens des dispositions des articles L. 2224-7 et L. 2224-8 du CGCT, à l'exception à ce stade des communautés de communes au sein desquelles a pu être adoptée une minorité de blocage par les communes membres, par l'application combinée de la loi n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes puis la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, reportant ainsi l'exercice obligatoire de la compétence au 1 er janvier 2026. Les EPCI-FP sont également compétents à titre obligatoire en matière d'eaux pluviales urbaines à l'exception des communautés de communes au sein desquelles la compétence peut être transférée à titre supplémentaire par les communes.

En application des dispositions des articles L. 5215-20 et L. 5217-2 du CGCT, les communautés urbaines et les métropoles exercent en outre des compétences en matière de gestion des services d'intérêt collectif que sont la contribution à la transition énergétique, la concession de la distribution publique d'électricité et de gaz ou encore la création et l'entretien des infrastructures de charge de véhicules électriques. Aussi, les métropoles et les EPCI-FP de plus de 20 000 habitants élaborent et adoptent un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) en application de l'article L. 229-26 du code de l'environnement, en cohérence avec les objectifs nationaux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, d'efficacité énergétique et de production d'énergie renouvelable. Ces personnes publiques ont la qualité de coordinateur de la transition énergétique sur leurs territoires respectifs au sens de l'article L. 2224-34 du CGCT.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ». La répartition entre plusieurs catégories de collectivités territoriales de leurs compétences respectives relève donc du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La transition écologique constitue une priorité du Gouvernement conformément aux orientations annoncées par le Président de la République, comme en témoigne, par exemple, le plan France Relance, qui consacre près d'un tiers des 100 milliards d'euros consacrés à la relance de l'économie française post-Covid à son verdissement 13 ( * ) . L'ensemble des collectivités territoriales et de leurs groupements sont ainsi amenés à concourir à cet effort et la clarification de leurs attributions et de leurs champs d'intervention s'avère nécessaire pour la bonne lisibilité de l'ensemble des politiques publiques en la matière et, ainsi, assurer une allocation la plus efficiente possible des ressources mobilisées.

Le présent article entend dans un domaine en forte évolution clarifier la répartition des compétences des collectivités territoriales et de leurs groupements aux enjeux de la transition écologique, que sont, notamment la lutte contre le réchauffement climatique et la protection de la biodiversité.

En outre, il s'agit de donner davantage d'attributions à l'échelon départemental qui pourra associer les objectifs de transition écologique aux problématiques auxquelles il est confronté dans le cadre de l'exercice de ses compétences, et particulièrement en matière de santé et de lutte contre la précarité énergétique.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les collectivités territoriales ont été désignées « chef de file » pour organiser sur leur territoire respectif, en lien avec leurs groupements, les modalités de leur action pour l'exercice des compétences relatives à la transition écologique. C'est le cas, notamment, de la région, qui est cheffe de file pour l'exercice des compétences relatives à l'aménagement et au développement durable du territoire, à la protection de la biodiversité, ainsi qu'au climat, à la qualité de l'air et à l'énergie. C'est le cas, également, du bloc communal, chef de file pour l'exercice des compétences relatives à la mobilité durable.

Le présent article entend modifier l'article L. 1111-9 du CGCT afin de préciser, de définir et de rationaliser le rôle et l'intervention des différents échelons locaux en la matière.

Ces dispositions permettent d'étoffer le mécanisme de convention d'exercice concerté des compétences prévu au V de l'article L. 1111-9-1 du CGCT, examiné en conférence territoriale de l'action publique (CTAP).

L'objectif est de conforter cet outil par l'extension du chef de filât, de façon à renforcer les leviers disponibles pour les élus locaux dans la conduite de leurs projets, aux fins de mettre en cohérence l'exercice des compétences et de favoriser les cofinancements. En effet, le chef de filât, en donnant à un échelon territorial la possibilité de coordonner l'action dans un champ de compétence des autres collectivités territoriales intervenant dans ce même champ de compétence, sans permettre l'exercice d'une tutelle entre collectivités, assure la cohérence de la mise en oeuvre des politiques publiques liées à cette compétence. Par exemple, le chef de filât de la région en matière d'intermodalité des transports, consacré aux articles L. 1213-3 et suivants du code des transports, permet le développement concerté des transports en commun gérés à la fois par la région, autorité organisatrice de la mobilité régionale et des transports ferroviaires d'intérêt régional, et par les intercommunalités, qui ont vocation à devenir autorités organisatrices de la mobilité locale, ainsi qu'avec le département, qui gère le réseau routier départemental.

La mise en oeuvre du dispositif de CTEC rend applicables les dispositions du I de l'article L. 1111-9 du CGCT. D'une part, il permet le maintien d'un taux de 20% au rehaussement du quantum de la participation minimale du maître d'ouvrage à 30% prévue dans le cadre du chef de filât. D'autre part, il ouvre la possibilité de bénéficier de subventions d'investissement et de fonctionnement soit de la région, soit d'un département.

Le présent article précise en parallèle dans la loi la contribution des départements à la transition écologique, à l'article L. 3211-1 du CGCT régissant les attributions de la collectivité départementale, prévoyant qu'ils participent à la transition écologique dans le cadre de l'exercice des compétences qui leur sont attribuées et particulièrement en matière de santé et de lutte contre la précarité énergétique.

Des dispositions similaires ont été ajoutées à l'article L. 4211-1 du CGCT pour affirmer la contribution des régions à la transition écologique dans le cadre de l'exercice de leurs compétences en matière d'énergie, de mobilités et d'économie circulaire.

La contribution des départements et des régions à la transition écologique passe nécessairement par le respect des principes énumérés aux articles L. 110-1 et suivants du code de l'environnement.

Enfin, la participation des départements et des régions à la transition écologique s'effectue dans le respect des attributions propres à chaque échelon local.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

D'une part, il aurait pu être envisagé de ne pas modifier les dispositions existantes. Or l'enjeu de la transition écologique est croissant et justifie une adaptation et une précision des modalités et capacités d'intervention des collectivités territoriales. En effet, l'Accord de Paris, qui constitue le cadre international d'action contre les changements climatiques et dans lequel la France est très impliquée, reconnaît “la nécessité d'une riposte efficace et progressive à la menace pressante des changements climatiques” de même que “l'importance de la participation des pouvoirs publics à tous les niveaux et des divers acteurs, conformément aux législations nationales respectives des Parties, dans la lutte contre les changements climatiques” . Prenant acte, les Parties à l'Accord “reconnaissent que l'adaptation est un défi mondial qui se pose à tous, comportant des dimensions locales, infranationales, nationales, régionales” et font de ce constat “un élément clef de la riposte mondiale à long terme face aux changements climatiques” 14 ( * ) .

D'autre part, la compétence de certaines collectivités territoriales aurait pu être supprimée, comme, par exemple, supprimer la compétence du département en matière de lutte contre la précarité énergétique et la transférer à la région ou au bloc communal, pour créer une compétence exclusive à un ou deux niveaux de collectivités territoriales.

3.2. OPTION RETENUE

Les options retenues consistent à affirmer et préciser le rôle des collectivités territoriales dans la transition écologique : d'une part, en inscrivant de façon explicite, dans le droit positif, que l'exercice de certaines compétences ont vocation à contribuer à cette transition ; d'autre part, en précisant certains contenus de chef de filât, dans la perspective de garantir une meilleure coordination et, donc, une plus grande efficacité de l'action concertée de ces collectivités.

Les modifications apportées aux dispositions du II de l'article L. 1111-9 du CGCT ont pour objet de conforter le rôle de la région en matière de planification de la transition et de l'efficacité énergétique. Ces modifications visent également à renforcer leurs compétences en matière d'économie circulaire en leur conférant un rôle de coordination et d'animation de l'action de tous les échelons territoriaux.

Les modifications apportées au III de l'article L. 1111-9 du CGCT ont pour finalité d'associer davantage les départements à la transition écologique en leur reconnaissant la qualité de « chef de file » pour organiser les actions de transition écologique concernant la santé, l'habitat et la lutte contre la précarité, en lien avec les compétences qui leur sont dévolues.

Le bloc communal se voit également reconnaître la qualité de « chef de file » pour organiser les actions en matière de transition écologique sur leur territoire, afin d'acter le rôle de cet échelon de proximité dans la réalisation de cet objectif.

Les EPCI-FP auxquels ont été transférées les compétences en matière de gestion de l'eau, d'assainissement et de prévention des déchets organisent également l'action commune pour l'exercice de ces compétences par les collectivités territoriales et leurs groupements.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article a pour effet de modifier les articles L. 1111-9, L. 3211-1 et L. 4211-1 du CGCT.

En matière de compétences, ces dispositions étendent les missions dévolues aux départements en élargissant leurs champs d'intervention notamment en matière de santé et de lutte contre la précarité énergétique et de redéfinissent les missions des régions en précisant que l'échelon régional concourt à la transition écologique notamment en matière d'énergie, de mobilités et d'économie circulaire.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les dispositions modifiant les articles L. 3211-1 et L. 4211-1 du CGCT viennent inscrire, dans la loi, les compétences respectives des collectivités régionale et départementale, qu'elles mettent déjà en oeuvre à leur échelle. Cette écriture à iso-périmètre n'a donc pas d'impacts économiques et financiers supplémentaires pour ces collectivités territoriales.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les dispositions envisagées clarifient et par conséquent renforcent la répartition des compétences des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière de transition écologique.

Les compétences de l'échelon régional en la matière sont élargies pour y intégrer la compétence en matière de coordination et d'animation de l'économie circulaire. Sa compétence en matière d'organisation de la planification de la transition écologique (notamment au travers des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires - SRADDET) est réaffirmée et précisée.

Les contours de la contribution des départements en matière de transition écologique sont également précisés dans les dispositions envisagées afin d'encadrer clairement leur rôle et leurs missions.

Les communes et les EPCI-FP vont se voir reconnaître la qualité de « chef de file » pour l'organisation des actions locales en matière de transition énergétique, ainsi qu'en matière de gestion de l'eau, d'assainissement et de prévention des déchets..

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les dispositions envisagées ont un impact environnemental car les collectivités territoriales et leurs groupements sont ainsi clairement missionnées pour lutter contre le réchauffement climatique, favoriser la transition énergétique, la préservation de la ressource en eau ou encore la prévention des déchets.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions envisagées s'appliqueront dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Ces dispositions s'appliquent en concordance avec les conférences territoriales de l'action publique et sont donc effectives au sein des régions qui en disposent.

CHAPITRE II - LES TRANSPORTS

Article 6 : Transfert des routes nationales aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles

1. ÉTAT DES LIEUX

Le transport des personnes et des marchandises s'effectue à 88% par la route 15 ( * ) . Les routes appartenant aux communes, aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI à FP) et aux départements représentent 98% des 1 100 000 km du réseau routier français; elles accueillent 68% de la circulation.

L 'État a la responsabilité de 21 100 km répartis entre autoroutes concédées (9 000 km) et autoroutes (2 600 km) et routes nationales (9 500 km) non concédées. Ces routes non concédées, directement à la charge de l'État et représentant 1% de l'ensemble du réseau, assurent plus de 18% du trafic routier.

Est envisagé le transfert volontaire de routes nationales et de certains tronçons autoroutiers aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles.

Ce transfert s'inscrit dans un mouvement de décentralisation initié dès 1972 où l'État a attribué aux départements la responsabilité de la gestion de 55 000 km de routes nationales secondaires. La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (dite loi LRL) leur a ensuite transféré 18 000 km supplémentaires de routes nationales d'intérêt local (RNIL), en confiant simultanément aux départements la gestion des personnels et des moyens correspondants. Il s'en est dégagé une répartition des rôles : à l'État les grands itinéraires à fort trafic, aux départements les autres voies dites de proximité, avec une amélioration globale de la gestion du réseau.

Les EPCI à FP se sont saisis de la compétence voirie progressivement, parfois sous l'impulsion du législateur, qui en a fait une compétence obligatoire pour les métropoles et les communautés urbaines. Cette compétence est importante pour ces EPCI à FP car elle participe des politiques publiques de mobilité, de développement économique et d'aménagement du territoire. Le projet de transfert des routes nationales avec droit de priorité de la métropole de Lyon et des métropoles sur les départements s'inscrit ainsi dans l'objectif de rationaliser la gestion de la voirie urbaine.

Le projet envisagé présente la singularité, si on le compare aux transferts obligatoires de 1972 et 2004, de s'effectuer sur une base volontaire, c'est-à-dire uniquement si les départements, la métropole de Lyon ou les métropoles en manifestent la volonté. Ce transfert n'est pas pour autant à la carte dans la mesure où cette volonté exprimée ne sera pas suffisante. En effet, l'État établira d'abord une liste des voies transférables et devra in fine donner son accord aux demandes des collectivités, avec la préoccupation de préserver la cohérence des grands axes routiers.

Un tiers des départements ont d'ores-et-déjà manifesté leur intérêt pour ce transfert selon l'association des départements de France.

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le projet de transfert des routes nationales nécessite de déterminer la consistance du transfert, ses bénéficiaires et le mécanisme juridique par lequel le transfert est opéré.

1.1.1. La consistance du transfert

A - Les routes nationales

En vertu de l'article L. 121-1 du code la voirie routière (CVR), le domaine public routier national est composé par les autoroutes et les routes nationales. Cette disposition précise que ce domaine « est constitué d'un réseau cohérent d'autoroutes et de routes d'intérêt national ou européen. Des décrets en Conseil d'Etat, actualisés tous les dix ans, fixent, parmi les itinéraires, ceux qui répondent aux critères précités (...) ». Il s'agit du décret n° 2005-1499 du 5 décembre 2005 relatif à la consistance du réseau routier national.

Le transfert prévu concerne principalement les routes nationales et marginalement certains tronçons autoroutiers.

Le domaine public routier comprend tant la voie elle-même que ses dépendances qui sont les éléments nécessaires à l'exploitation de la chaussée ainsi qu'à la sécurité des usagers. Ainsi, le projet consiste dans un transfert plein et entier de propriété de la chaussée et des ouvrages d'art dont notamment les ponts et les tunnels, mais également les terrains servant d'assiette aux voies, aux accotements, aux murs de soutènement ainsi que des différents équipements routiers, dont les immeubles accueillant les centres d'entretien et d'intervention. Il faut enfin ajouter les acquisitions foncières réalisées par l'État en vue de l'aménagement des routes transférées et relevant de son domaine privé.

La rédaction proposée de la consistance des biens transférés est en substance identique au III de l'article 18 de la loi relative aux libertés et responsabilités locales, dite « loi LRL », du 13 août 2004, ayant transféré aux départements la voirie nationale d'intérêt local et à l'article 6 de la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace (CEA) ayant transféré le réseau routier national non concédé situé sur le territoire des deux départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin à la CEA ou à l'Eurométropole de Strasbourg pour la partie du réseau traversant son territoire.

B - Les éléments d'identification des routes nationales transférables

L'appartenance d'une route au réseau national au sens de l'article L. 121-1 du CVR a été précisée par le Conseil d'État dans un arrêt du 23 mai 2007 (n° 288378) à la suite de la contestation du décret n° 2005-1499 du 5 décembre 2005 relatif à la consistance du réseau routier national :

- « seules la fonction des routes et la cohérence des itinéraires doivent être prises en compte en application de l'article L. 121-1 du code de la voirie routière » , sont ainsi indifférentes l'existence d'un péage ou la densité du trafic en tant que telle ;

- « la prise en compte d'éléments tels que le niveau de trafic de longue distance, l'éventuelle desserte des grandes métropoles régionales et des grands pôles économiques, l'intérêt des routes au-delà du cadre départemental ainsi que la cohérence locale du réseau » sont des critères pertinents pour caractériser ou non une route nationale au sens de l'article L. 121-1 ;

- les routes peuvent perdre leur dimension nationale lorsqu'elles sont doublées par un réseau autoroutier permettant d'assurer le transit national ou européen.

Le réseau routier national est ainsi composé d'itinéraires fonctionnels dont les objectifs sont les suivants :

- objectif 1 : un réseau essentiel pour l'exercice des prérogatives régaliennes de l'État : permettre la mobilité militaire, garantir la sûreté de l'État et assurer la gestion de crise ;

- objectif 2 : un maillage de l'hexagone reliant la capitale aux territoires et les territoires entre eux : favoriser le désenclavement, le développement et la cohésion des territoires ; faciliter la combinaison des usages dans les pôles urbains ;

- objectif 3 : un maillon central du réseau transeuropéen : fluidifier et assurer la continuité des trajets de transit et de longue distance des personnes et des biens.

Le réseau routier national qui a vocation à être transféré aux départements et aux métropoles recouvre les éléments suivants :

- les parties de réseaux routiers dont le transfert était prévu lors de l'acte de décentralisation de 2004, mais qui n'ont pas été transférés en raison d'une forte opposition des collectivités concernées ;

- les parties de réseaux routiers qui désormais ne sont plus nécessaires dans l'aménagement du territoire ;

- les parties de réseaux routiers dont les caractéristiques et fonctionnalités ont un rôle important pour les échanges régionaux ou départementaux mais dont le transfert ne remettrait pas en cause le maillage du territoire par le réseau routier national restant.

L'ensemble de ces éléments pourrait représenter entre 1000 et 4000 km de voies potentiellement transférables.

1.1.2. Les bénéficiaires du transfert

L'article L. 111-1 du CVR définit le domaine public routier comme « l'ensemble des biens du domaine public de l'État, des départements et des communes affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées ». L'article L. 2111-14 du CG3P retient un champ personnel plus large qui avait déjà été reconnu par la jurisprudence en disposant que « le domaine public routier comprend l'ensemble des biens appartenant à une personne publique mentionnée à l'article L. 1 et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées ». L'article L. 1 du CG3P vise l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements et les établissements publics. Par sa formulation générale, l'article L. 2111-14 précité consacre la possibilité toute collectivité territoriale ou tout EPCI d'être propriétaire du domaine public routier.

La longueur du réseau routier des collectivités représente 98% du réseau routier français, un pourcentage plus élevé que dans les autres pays européens, partagé entre les départements (35%) et le bloc communal (63%).

Les bénéficiaires du transfert prévu par le présent article sont les personnes publiques qui aujourd'hui disposent, d'une part, d'une assise territoriale suffisante propre à accueillir des portions cohérentes de routes et, d'autre part, d'une expérience avérée du domaine routier. Il s'agit des départements, avec une spécificité pour la Guyane, et de la métropole de Lyon pour les collectivités territoriales ainsi que des métropoles.

A - Les collectivités territoriales : le département et la métropole de Lyon

Le département dispose d'une compétence de droit commun en matière de voirie sur les voies lui appartenant. Les dispositions encadrant la voirie départementale figurent aux articles L.  131-1 à L. 131-8 et R. 131-1 à R. 131-11 du CVR. Le département assume, en application de l'article L. 131-2 de ce code, les dépenses relatives à la construction, à l'aménagement et à l'entretien des routes départementales. Le président du conseil départemental y exerce les pouvoirs de police, notamment celui de la circulation (article L. 131-3 du CVR), sous réserve des attributions dévolues aux maires et au représentant de l'Etat.

Les départements sont responsables de plus de 377 000 km de routes, hors transfert aux métropoles. Depuis la décentralisation routière de 2004, les départements ont pris en charge les personnels, environ 30 000 agents des directions départementales de l'équipement devenus agents départementaux, soit 8 à 12% des effectifs des départements. Les dépenses de voirie représentent en moyenne 27% de leurs dépenses d'investissement. En hausse de 14% en 2019, elles s'élèvent à 3,2 Md d'euros, ce qui représente 6 000 euros / km hors grands travaux.

Il n'y a plus de voies nationales dans les départements et régions d'outre-mer (DROM), à l'exception de Mayotte et de la Guyane. Lors du transfert des routes nationales aux départements en 2004, l'article L. 4433-24-2 du CGCT qui a été abrogé désignait d'office le département de Guyane, avant sa fusion avec la région dans le cadre de la Collectivité territoriale de Guyane, comme bénéficiaire du transfert. En conséquence, il est prévu au V du projet d'article que le transfert des voies nationales sera possible au profit de la collectivité territoriale de Guyane.

La métropole de Lyon est devenue propriétaire du domaine public routier de l'ancienne communauté urbaine et du département du Rhône depuis le 1 er janvier 2015 en vertu de l'article L. 3651-2 du CGCT. Cela représente 3 500 km de chaussées dont 100 km de voies rapides, comprenant près de 2 000 ouvrages d'art dont 723 ponts. La métropole gère, entretient et exploite elle-même ces voies.

B - Les métropoles

Le transfert des routes nationales aux métropoles s'inscrit dans leur compétence plus générale d'organisation du service public des transports, même s'il faut souligner le caractère propre de l'exploitation de l'infrastructure de voirie de la politique de mobilité. Aux termes de l'article L. 5217-2 du CGCT, en matière d'aménagement de l'espace métropolitain, la métropole exerce, en lieu et place des communes membres, l'organisation de la mobilité ainsi que la création, l'aménagement et l'entretien de la voirie.

Seules les métropoles et les communautés urbaines sont devenues obligatoirement propriétaires de la voirie qui leur a été transférée au titre de leur compétence. Les articles L. 5217-5 pour les métropoles et L. 5215-28 du CGCT pour les communautés urbaines organisent un transfert des biens à titre gratuit dans l'année qui a suivi le transfert de la compétence. Par contraste, en principe, les communautés de communes et les communautés d'agglomération bénéficient d'une mise à disposition des biens de la commune qui reste propriétaire de la voirie. Les communautés de communes (article L. 5214-16 du CGCT) et les communautés d'agglomération (article L. 5216-5 du CGCT) ne sont propriétaires que des voies qu'elles ont créées.

En outre, depuis la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 dite MAPTAM organisant des transferts de compétences des départements aux EPCI, les métropoles ont bénéficié de transferts du domaine public routier de départements. Le 9° du IV de l'article L. 5217-2 du CGCT énonce que par convention passée avec le département, la métropole exerce à l'intérieur de son périmètre, par transfert, en lieu et place du département, ou par délégation, au nom et pour le compte du département, la gestion des routes classées dans le domaine public routier départemental ainsi que de leurs dépendances et accessoires. Ce transfert est constaté par arrêté du représentant de l'État dans le département. Cet arrêté emporte le transfert à la métropole des servitudes, droits et obligations correspondants ainsi que le classement des routes transférées dans le domaine public de la métropole.

Dans ce mouvement, le présent projet d'article prévoit logiquement un droit de priorité aux métropoles et à la métropole de Lyon sur les départements pour le transfert des routes nationales.

1.1.3. Le mécanisme juridique du transfert

A - Un transfert de propriété entre personnes publiques à titre gratuit

Le transfert des routes nationales aux collectivités et aux métropoles s'inscrit dans les principes du droit commun de la circulation des biens entre personnes publiques.

L'article L. 3112-1 du CG3P autorise par dérogation au principe d'inaliénabilité du domaine public, les cessions de propriétés publiques relevant du domaine public entre personnes publiques, sans déclassement préalable, lorsque les biens sont destinés à l'exercice des compétences de la personne publique acquéreur.

En outre, aux termes de l'article L. 1321-1 du CGCT, « le transfert d'une compétence entraîne de plein droit la mise à la disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l'exercice de cette compétence ». Cette mise à disposition, sans transfert de propriété, a lieu à titre gratuit (article L. 1321-2 du CGCT). L'article L. 1321-4 du CGCT indique que les modalités de l'éventuel transfert de propriété qui suit la mise à disposition, sont déterminées par le législateur. C'est dans ce cadre qu'ont été adoptées les dispositions spéciales précitées des articles L. 5215-28 pour les communautés de communes et L. 5217-5 pour les métropoles.

Comme pour le transfert des routes nationales aux départements en 2004 et récemment à la communauté européenne d'Alsace et à l'Eurométropole de Strasbourg en 2019 16 ( * ) , le présent projet prévoit une cession à titre gratuit.

B - Un transfert financièrement équilibré

Le principe constitutionnel de compensation financière énoncé quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution selon lequel « tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice » implique que la compensation présente les caractères suivants :

- intégrale : les ressources transférées sont équivalentes aux dépenses (directes ou indirectes) effectuées par l'État au titre des compétences transférées ;

- concomitante : le transfert des ressources doit être concomitant au transfert des charges aux collectivités ;

- garantie : dans le temps au niveau du coût arrêté lors du transfert de la compétence ;

- contrôlée : la compensation financière fait l'objet d'un arrêté interministériel, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) ;

- conforme à l'objectif d'autonomie financière.

Ce transfert, dont les modalités sont présentées ci-après dans l'étude d'impact de l'article relatif aux modalités de compensation financière du transfert de compétences et de personnels, serait dans toute la mesure du possible neutre pour les collectivités territoriales. En effet, les transferts des charges seront accompagnés par un transfert des ressources correspondant afin d'aboutir à un accord financier équilibré pour les collectivités et l'État.

Le projet envisagé de transfert n'exclut pas que selon l'étendue du linéaire concerné, le mécanisme retenu pour que la collectivité reprenne la propriété et la gestion de portions du réseau routier national soit la voie du déclassement de droit commun. Dans le cas de tronçons de longueurs très réduites, les compensations en terme de ressources pourraient paraître inadaptées pour la collectivité concernée, notamment si la faible longueur de l'itinéraire aboutit à un transfert sans personnels et à un droit à compensation très faible, cas pour lequel un déclassement permettant la remise en état des chaussées peut être jugé plus avantageux.

C - Un transfert volontaire

Les départements pourront solliciter un transfert sur la base d'une liste établie par l'État des routes ou portions de routes nationales pouvant faire l'objet d'un transfert. L'État devra ensuite donner son accord définitif sur le transfert. Le Gouvernement ne souhaite pas imposer un transfert tout en conservant une marge d'appréciation et de décision en fonction des circonstances locales et des enjeux globaux des routes.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le transfert des routes nationales ne présente pas a priori de risques d'inconstitutionnalité.

Le Conseil constitutionnel a validé en 2004 le transfert obligatoire aux départements des routes nationales ayant une vocation locale (CC, déc. n° 2004-503 DC du 12 août 2004). Il s'est prononcé uniquement sur les exigences constitutionnelles de clarté et d'intelligibilité de la loi en relevant que la loi « met en oeuvre de façon précise le transfert » et prévoit que l'Etat réalisera « une étude exhaustive portant sur l'état de l'infrastructure (...) ainsi que sur les investissements prévisibles » (cons.30). Il ressort implicitement de cette décision que le législateur est habilité à transférer des routes nationales dès lors qu'il établit de manière transparente et objective les routes concernées et la charge financière afférente à ce transfert afin de déterminer le droit à compensation des départements.

Ce droit à compensation financière est reconnu aux collectivités territoriales au quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution précité au point 1.1.3.2. S'agissant de l'article 121 de la loi du 13 août 2004 prévoyant la compensation financière des départements due au transfert de routes nationales, le Conseil d'État a refusé de transmette une question prioritaire de constitutionnalité visant l'atteinte portée au principe de la libre administration des collectivités territoriales et au principe de la compensation financière des transferts de compétence, en ce que la compensation ne prévoyait pas les charges résultant du développement du domaine routier transféré (CE, 29 oct. 2010, n°342072). En citant les décisions n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003 et n° 2004-509 DC du 13 janvier 2005 du Conseil constitutionnel, le Conseil d'État a considéré qu'en prenant en compte, pour le calcul de la compensation financière, les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'investissement liées à la gestion de ce domaine routier, soit les crédits que l'État consacrait à l'exercice de cette compétence à la date du transfert, le législateur a retenu l'intégralité des charges afférentes au domaine public transféré sans qu'il soit besoin d'englober les crédits nécessaires au développement et à la modernisation du réseau.

Cette jurisprudence vient confirmer que l'article 43 du présent projet de loi prévoyant une complète compensation financière liée à l'entretien et l'exploitation des routes nationales garantit aussi bien le principe de libre administration des collectivités territoriales que l'alinéa 4 de l'article 72-2 de la Constitution. Il y a lieu également de relever que l'article 43 est une disposition similaire aux articles 91 de la loi du 27 janvier 2014 MAPTAM et 123 de la loi du 7 août 2015 NOTRe que le Conseil constitutionnel n'a pas relevé d'office lorsqu'il a été saisi de certaines dispositions de ces lois.

On mentionnera enfin que le Conseil d'État a rejeté le recours contre le décret n° 2005-1499 du 5 décembre 2005 relatif à la consistance du réseau routier national, lequel a défini par la négative les anciennes routes nationales transférées aux départements en 2004. Sur l'absence d'accord des départements, il a considéré « qu'aucune disposition législative ni aucun principe général du droit n'impose que la consultation des départements revête un caractère contradictoire », dès lors les routes nationales transférées avaient bel et bien un caractère local (CE, 23 mai 2007, n° 288378). Le présent projet prévoyant l'accord des collectivités territoriales et des métropoles pour le transfert des routes nationales s'inscrit ainsi d'autant plus dans le respect de libre administration des collectivités territoriales.

Il ressort de ces éléments que la combinaison des articles 6 et 43 du projet de loi est conforme à la Constitution.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Il n'existe pas de convention dont l'objet serait d'appréhender la mise en oeuvre du transfert des routes nationales dans le domaine public d'autres personnes publiques.

Le présent projet prend en considération la directive 2008/96/CE concernant la gestion de la sécurité des infrastructures routières en prévoyant, sans y être contraint, que les routes nationales transférées garderont leur statut actuel de route d'importance européenne au sens de la directive et de l'article L. 118-6 du CVR. Cet aspect est développé au point 4.1. « Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne ».

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Premièrement, le cadre réglementaire relatif au déclassement des routes nationales est inadapté au projet du transfert volontaire des routes nationales. En effet, le recours à un déclassement préalable des routes nationales, puis à leur reclassement dans le domaine public d'une collectivité présente de nombreux inconvénients.

La procédure de déclassement s'applique par route ou section de route qui ne réponde pas aux critères de l'article L. 121-1 du CVR précité prenant en compte la fonction des routes et la cohérence des itinéraires dans la perspective de caractériser un intérêt national ou européen. Le reclassement est prononcé par l'autorité administrative lorsque la collectivité intéressée, consultée, n'a pas dans un délai de cinq mois donné un avis défavorable. En cas d'avis défavorable, le reclassement peut être prononcé par décret en Conseil d'État. Le reclassement donne droit à une compensation financière correspondant aux coûts des travaux nécessaires à la remise en état de la route ou section de route nationale, hors accotements en agglomération. Ces coûts sont évalués contradictoirement, à la date du reclassement, entre l'État et la collectivité ou, à défaut d'accord, fixés par décret en Conseil d'État. Il s'agit donc d'une procédure qui, même si elle associe les collectivités concernées, demeure verticale et ne répond pas au partenariat souhaité par le Gouvernement.

En outre, cette approche atomisée ne permet pas de redessiner la carte des routes nationales. Pour ce faire, le Gouvernement a besoin de connaître en amont l'ensemble des linéaires concernés pour porter une appréciation globale sur ce qu'il est possible de transférer au regard de l'impératif de préserver les grands axes routiers. Une approche inter-individuelle avec chaque collectivité rend également difficile la mise en place de critères de décision homogènes, avec le risque d'un traitement différencié des collectivités.

Enfin, la compensation financière n'est pas de celle protégée par l'article 72-2 alinéa 4 de la constitution. Le Conseil d'État a considéré que ne pouvait être qualifié de transfert de compétences au sens de la Constitution, le transfert par déclassement d'une autoroute au domaine public routier départemental (CE, 21 déc. 2018, n° 420652).

Deuxièmement, des mesures particulières doivent être adoptées pour le transfert des personnels d'exploitation. Le présent article renvoie à l'article du projet de loi fixant les règles applicables aux personnels en cas de transfert de compétence, qui prévoit, par référence à la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, que doit être conclue dans les trois mois à compter de la date du transfert une convention entre l'Etat et la collectivité concernée, afin de fixer la liste des services ou parties de services transférés. Dans l'attente de sa signature, les services concernés reçoivent leurs instructions des collectivités. A défaut d'accord, la liste des services ou parties de services transférés est arrêtée par les ministres intéressés, après avis d'une commission nationale de conciliation.

Il convient d'adapter cette procédure eu égard au caractère particulier de cette disposition. En effet, il ne s'agit pas en l'espèce de transférer des blocs de compétences mais des tronçons linéaires de routes. Les agents d'exploitation sont actuellement affectés dans des centres d'entretien et d'intervention dont une partie seulement sera décentralisée, parfois au profit de plusieurs collectivités. Il sera donc nécessaire de procéder à l'examen de la situation des personnels non pas au niveau de chaque service ou partie de service, comme cela se fait habituellement, mais de chaque agent. Les dispositions de la loi MAPTAM n'étant pas applicables en l'état, eu égard notamment aux dispositions relatives à la période transitoire, la convention devra être conclue entre l'Etat et la collectivité préalablement au transfert de compétences. En l'absence d'accord, il ne pourra être procédé au transfert des agents. Dans ce cas, une compensation financière correspondante sera versée, le nombre d'emplois pris en compte étant, dans ce cas, fonction de la surface de chaussées transférée.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les objectifs poursuivis sont une amélioration du service aux usagers et une gestion simplifiée et plus efficace de la voirie des pôles urbains.

La poursuite d'une amélioration de l'état des routes s'inscrit dans le mouvement initié par la décentralisation de 2004 des 18 000 km de routes nationales, moitié moins que les routes nationales actuelles. L'État a versé aux départements au titre de la compensation financière 1,2 Md€. De leur côté, les départements ont augmenté de l'ordre de 30 % leurs dépenses consacrées depuis 2005 à la remise en état du réseau routier (Cour des comptes, « Le bilan de la décentralisation routière », 2012). Ce bilan financier lourd n'a pas été jugé négatif eu égard à la situation préexistante, à savoir une participation importante des collectivités territoriales au financement du réseau national, les insuffisances en matière de partition des services des DDE et le mauvais entretien d'une partie du réseau national. La décentralisation a ainsi conduit à une réhabilitation du réseau qui s'était dans les décennies précédentes sensiblement dégradé et à la mise en place d'une réelle capacité de gestion du domaine routier des départements, les deux éléments concourant à l'amélioration du service aux usagers.

Les départements sont dotés aujourd'hui d'une réelle expertise et d'une capacité opérationnelle pour la gestion des infrastructures routières. Ils disposent des moyens matériels, humains et financiers nécessaires. Les départements mettent régulièrement à disposition de certaines communes et EPCI à FP leur compétence d'ingénierie. Le département est ainsi au niveau local l'acteur le plus susceptible d'assurer la qualité du service. Par exemple, il intervient à titre principal pour les opérations de déneigement, informe en temps réel le public sur l'état des routes et commence à investir dans des infrastructures innovantes qu'il s'agisse de la construction de 200 aires de covoiturage en Loire-Atlantique ou de la construction de la première « route solaire » par le département de l'Orne.

Le transfert des routes nationales aux métropoles vise également à répondre à l'enjeu majeur de la gestion de la voirie des grandes villes et de leur périphérie. La commande publique globale des EPCI à FP sur la voirie est désormais équivalente à celle effectuée par les départements. En cohérence avec le transfert du domaine routier départemental aux métropoles, il convient de renforcer le rôle de direction de ces dernières. Il est attendu une plus grande cohésion de l'action intercommunale (connexion voies et villes, partage d'usage) ainsi qu'une meilleure articulation avec d'autres politiques (développement économique ; collecte des déchets ; eau et assainissement ; environnement).

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La voie de la négociation avec les collectivités comme méthode de transfert a conduit à envisager de procéder à une décentralisation de certains tronçons de routes nationales par le biais d'un appel à manifestation d'intérêt potentiellement ouvert à toutes les collectivités. Toutefois, les caractéristiques du réseau routier ainsi que la dimension et les moyens de certaines collectivités ont conduit à écarter cette option.

L'appel à manifestation d'intérêt peut être appréhendé à partir de deux dispositifs qui ont procédé à des transferts à des collectivités territoriales sur la base du volontariat : celui de l'article 28 de la loi LRL qui a transféré des aérodromes appartenant à l'État et celui de l'article 22 de la loi NOTRe qui a procédé à un transfert de compétence pour les ports relevant des départements. Ces dispositifs comprenaient un appel à manifestation d'intérêt pour solliciter le transfert de biens (ports ou aérodromes), auquel les collectivités territoriales pouvaient candidater. En cas de demandes multiples pour un même bien, les procédures prévoyaient soit une concertation, sous l'égide du préfet de région, entre les différents candidats, soit la proposition de la constitution d'un syndicat mixte en vue de gérer le bien. A l'inverse, si aucun candidat ne se présentait, le préfet disposait de la faculté de désigner une collectivité territoriale bénéficiaire du bien.

Ces dispositifs sont cependant peu adaptés au domaine routier national. Les routes nationales sont en principe étendues et traversent le territoire de nombreuses collectivités. Confier, sur un même tracé, certains tronçons de routes à des communes, communautés de communes ou communautés d'agglomération, conduirait à un morcellement et à une multiplication des intervenants rendant peu efficiente l'action publique. Cela pourrait poser des difficultés pour l'entretien des voies concernées, mais également des questions de sécurité eu égard au nombre d'intervenants.

Ces considérations rejoignent le fait que les communes n'aient pas été privilégiées dans le processus de transfert.

Les communes dont le réseau représente près de 670 000 km et qui ont pu, avec leur accord, recevoir de l'État la propriété de routes nationales qui ne présentaient pas d'intérêt départemental (article L. 121-1 du CVR et article 3 du 5 déc. 2005 précité), n'ont pas vocation à bénéficier du transfert des routes nationales actuelles en raison du faible linéaire qui serait concerné et du facteur de complexité supplémentaire qu'il créerait dans la gestion de la voirie.

Concernant les régions qui ne disposent pas de domaine public routier à l'exception des régions ultramarines de La Réunion et de la Guadeloupe (article L. 4433-24-1 du CGCT) et par conséquent, ne sont pas actuellement dotées de compétences techniques ou de services pour entretenir des axes routiers, il a été jugé préférable de recourir dans un premier temps à une expérimentation de cinq ans décrite dans l'étude d'impact relative à l'article 7 du projet de loi. L'implication des régions est complétée par la possibilité pour les départements de transférer la gestion de parties de leur domaine routier aux régions (article 7 du projet de loi) et pour l'État de transférer aux régions la maîtrise d'ouvrage, voire l'entretien ou l'exploitation, des voies nationales d'intérêt régional (article 8 du projet de loi).

3.2. OPTION RETENUE

La loi prévoit un mécanisme permettant une décentralisation sur une base volontaire, sans être pour autant à la carte. L'État n'aura pas compétence liée pour prononcer le transfert. En effet, si les routes identifiées comme transférables ont vocation à être décentralisées dès lors que les collectivités auront demandé le transfert, il appartiendra à l'État de s'assurer que la juxtaposition des souhaits et des refus des collectivités n'aboutisse pas à un mitage du réseau routier national de nature à remettre en cause sa cohérence globale.

Les étapes du transfert et les délais maximum qui y sont associés, sont les suivants :

- 2 mois à compter de la promulgation de la loi, publication par décret de la liste des routes transférables ;

- 3 mois à compter de cette publication, demande des départements, de la métropole de Lyon et des métropoles au ministère des transports du transfert de routes identifiées. En cas de demande portant sur la même portion de voie, la demande de ces dernières prévaut ;

- 8 mois à compter de la publication de la liste, l'État notifie sa décision sur les demandes de transfert après examen des demandes au regard notamment de la cohérence des itinéraires ;

- Au plus tard 4 mois après la notification de la décision, publication de l'arrêté du représentant de l'État dans le département constatant les routes transférées. Prise d'effet du transfert, soit au 1 er janvier de l'année suivant la prise de l'arrêté, si l'arrêté est pris avant le 31 juillet, soit au 1 er janvier de la seconde année suivant celle la prise de l'arrêté, si celui-ci est pris après le 31 juillet. Le retour d'expérience de la loi n° 2019-816 du 2 août 2019 ayant transféré le réseau routier national situé en Alsace à la collectivité européenne d'Alsace et à l'Eurométropole de Strasbourg démontre qu'une fois le transfert prononcé, il reste de nombreuses étapes (transfert des biens annexes, transfert des contrats et marchés...) à franchir pour que le transfert se passe dans de bonnes conditions. Dans le cas où les arrêtés interviendraient après un 1 er juillet, il n'apparaît ainsi pas raisonnable que le transfert prenne effet le 1 er janvier suivant.

Le délai entre le vote de la loi et la prise d'effet du transfert dépendra de la date de promulgation de la loi et du rythme auquel les différentes étapes du transfert seront accomplies. Au vu des délais maximums prévus dans la loi, le délai de transfert sera toutefois comparable, voire inférieur, à celui de la loi LRL de 2004 ayant prévu une date maximale de transfert au 1 er janvier 2008.

Le texte ouvre la possibilité d'un transfert de voies autoroutières qui garderaient leur statut d'autoroute tout en incorporant le domaine public départemental ou métropolitain. Pour rappel, la loi n° 2019-816 avait, pour la première fois, prévu que des autoroutes puissent intégrées le domaine public routier d'une collectivité territoriale, en l'espèce, la collectivité européenne d'Alsace, tout en conservant un statut autoroutier.

Le présent projet reprend l'essentiel du dispositif de la loi n° 2019-816 notamment la conservation du statut autoroutier et du pouvoir de police du préfet. Il prévoit également des dispositions relatives aux aménagements physiques qui pourraient être réalisés sur les autoroutes transférés par le nouveau propriétaire. Ces dispositions soumettent à l'avis du préfet les projets de modifications les plus substantielles, qui seraient susceptibles de remettre en cause les principales fonctionnalités de l'autoroute. Un décret précisera les projets visés, mais il s'agira par exemple des modifications du profil en travers de l'autoroute. Des dispositions similaires sont à l'étude dans le cadre des ordonnances que le gouvernement est habilité à prendre en application de l'article 13 de la loi n° 2019-816.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le projet de transfert des routes nationales n'a pas d'impacts directs sur l'ordre juridique interne dans la mesure où ces transferts s'opèrent dans un cadre juridique existant, à savoir que les routes transférées intégreront le domaine routier des départements, de la métropole de Lyon et des métropoles. Les transferts accroîtront la consistance de ces domaines routiers avec des conséquences organisationnelles et financières, mais sans que de nouvelles règles en résultent.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Le projet d'article tient compte de la directive 2008/96/CE concernant la gestion de la sécurité des infrastructures routières. Elle prévoit un ensemble de procédures à réaliser aux stades de la conception, de la réalisation et de l'exploitation en vue d'améliorer la sécurité routière. Le champ d'application de la directive était initialement limité aux routes faisant partie du réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Il a été récemment étendu par la directive 2019/1936 du 23 octobre 2019, modifiant la directive 2008/96/CE, à l'ensemble des autoroutes, routes principales et routes situées en dehors des zones urbaines bénéficiant d'un financement de l'Union européenne. Les routes principales sont définies par la directive comme les routes situées en dehors des zones urbaines qui relie les principales villes ou régions, ou les deux et qui appartiennent à la catégorie de route la plus élevée en dessous de la catégorie « autoroute » dans la classification nationale.

La directive 2008/96/CE a été transposée dans le code de la voirie routière aux article L. 118-6 et suivants et D. 118-5-1 et suivants, ainsi que par deux arrêtés du 15 décembre 2011 relatifs, respectivement, à la gestion de la sécurité des infrastructures routières et à l'aptitude des auditeurs de sécurité routière. Le choix opéré en 2011 a ainsi été d'inclure l'ensemble du réseau routier national, les autoroutes et les routes nationales, ayant désormais le statut de routes d'importance européenne, dans le champ de la directive. Ce choix témoignait d'une approche volontariste qui rend le droit français déjà conforme à la directive du 23 octobre 2019.

Eu égard à l'objet de sécurité des directives et de la gestion actuelle des routes nationales selon ses normes de prévention, le projet prévoit que les routes nationales transférées continueront d'être assujetties au statut des routes d'importance européenne malgré leur déclassement et reclassement en routes départementales ou routes appartenant au réseau de la métropole de Lyon ou d'une métropole. Afin de conserver une certaine souplesse et de tenir compte de possibles évolutions des circonstances de droit ou de fait, le projet prévoit la possibilité de sortir une partie de ces voies du réseau d'importance européenne par décret.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

La voirie des collectivités territoriales représente 50 % des commandes de l'industrie routière, pour un montant annuel dépassant 6 Md€. Ce secteur de 1 420 entreprises et 86 300 salariés (« L'état de la route 2016 », L'Union des syndicats de l'industrie routière française ( URSIF ) devenue Routes de France) est donc fortement dépendant de la demande des collectivités territoriales et de l'évolution de leur politique d'entretien et d'investissement en matière de voirie.

L'impact sur les entreprises ne peut être anticipé de manière précise, mais le transfert de réseau maintient la nécessité de sa gestion et de son entretien, avec un impact globalement neutre attendu à ce titre.

4.2.2. Impacts budgétaires

Le transfert des routes nationales entraînera un transfert de ressources aux collectivités pour leur permettre d'assumer la charge transférée.

Ce transfert de ressources prévoit d'une part, un droit à compensation pour les charges de fonctionnement et d'investissement et d'autre part, un transfert de service s'accompagnant notamment d'un transfert de la masse salariale correspondante. La compensation des collectivités territoriales interviendra sur plusieurs lois de finances (LFI) à compter de l'année de la prise d'effet du transfert. Elle sera effectuée de façon provisionnelle dans un premier temps avant d'être ajustée définitivement une fois le droit à compensation arrêté. Cette nécessité est justifiée par le fait que les données comptables ou d'effectifs consolidés de l'année précédant le transfert, ne peuvent être connues et validées lors de l'adoption de la première LFI de compensation financière. Le droit à compensation des collectivités sera calculé sur la base des dépenses moyennes constatées sur une période maximale de trois ans pour les dépenses de fonctionnement et une période minimale de cinq ans pour les dépenses d'investissement. Il faut par ailleurs rappeler qu'une partie du droit à compensation peut faire l'objet d'une compensation de la TVA, et sera donc dégrevé de la TVA (dépenses d'investissements et une partie des dépenses de fonctionnement dédiées à l'entretien de la voirie), compte tenu des mécanismes prévus par le Fond de Compensation de la TVA.

Comme précisé auparavant, si le périmètre du transfert est très réduit, le mécanisme de déclassement pourra être jugé plus adapté à la situation (notamment dans les cas où il n'y aurait pas de ressources en personnels à transférer, cas pour lesquels le droit à compensation serait très faible). Pour les déclassements, les textes prévoient une soulte pour la remise en état des infrastructures déclassées.

L'évaluation de la compensation financière du transfert des charges de fonctionnement et d'investissement sera réalisée pour chaque transfert sur la base du « coût historique ». Ainsi, les impacts économiques et financiers ne peuvent pas être évalués à l'avance, ceux-ci étant dépendants des transferts effectivement réalisés. Toutefois, à titre d'exemple, pour les 300 km de routes nationales sur le territoire alsacien, un droit à compensation provisionnel a été inscrit en loi de finances pour 2021 à hauteur de 19,9 M€, estimé selon les modalités de calcul de la compensation financière retenues dans le cadre du présent projet de loi.

Il est important de préciser que chaque territoire dispose de spécificités propres pouvant faire varier le droit à compensation financière. Ces spécificités sont notamment l'intensité de la rigueur hivernale, le nombre d'ouvrages d'arts, la proportion de voies rapides ainsi que la nature et l'importance du trafic sur le territoire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'impact sur les collectivités territoriales et les métropoles sera essentiellement d'ordre financier qu'il s'agisse du calcul du montant de la compensation (cf. impacts budgétaires) ou du coût ultérieur du personnel transféré (cf. impacts sur les services administratifs).

A titre d'information le réseau routier national composé de 11 500 km de routes métropolitaines dispose, au titre de l'année 2020, pour sa gestion et son entretien de 7 358 ETP au sein des directions interdépartementales des routes.

L'évaluation des effectifs à transférer aux collectivités territoriales est difficilement réalisable a priori. En effet, l'évaluation dépendra des différentes demandes de transferts par les collectivités territoriales. D'un territoire à l'autre, en fonction des typologies d'infrastructures et de trafic ainsi que des contraintes climatiques comme la viabilité hivernale notamment, le volume d'effectifs moyen peut varier fortement.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Le présent projet de loi prévoit le transfert des services et parties de services de l'État aux collectivités territoriales et métropoles concernées par l'exploitation des routes nationales transférées.

Les emplois participant à l'exercice des compétences de l'État transférées seront mis à disposition ainsi que les moyens fonctionnels leur permettant d'assurer les prérogatives qui lui sont juridiquement confiées dans l'attente des partages définitifs. Lors de cette mise à disposition, la rémunération des agents restera à la charge de l'État.

Dans un délai de deux ans à compter de la date de publication du décret en Conseil d'État fixant les transferts définitifs des services, les fonctionnaires de l'État exerçant leurs fonctions dans un service ou une partie de service transféré aux collectivités territoriales ou aux métropoles et pourront opter soit pour le statut de fonctionnaire territorial, soit pour une demande de détachement sans limitation de durée dans la collectivité s'ils souhaitent conserver leur statut, dans les conditions prévues par l'article 83 de la loi MAPTAM.

L'arrêté de compensation relatif au transfert des personnels, soumis pour avis à la CCEC, sera adopté après évaluation du nombre entier d'emplois à temps plein susceptibles d'être transférés et valorisation financière des fractions d'emplois ne pouvant donner lieu à transfert.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'État et le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ont été consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les transferts constatés par arrêté des représentants de l'État dans les départements après décision de l'État, prendront effet ainsi que le classement des routes transférées dans la voirie départementale, de la métropole de Lyon et des métropoles au 1 er janvier de l'année suivante, dans le cas où l'arrêté interviendrait avant le 31 juillet d'une année ou le 1 er janvier de la seconde année suivante, dans le cas où il interviendrait après le 31 juillet.

Au plus tard trois mois avant la date du transfert effectif de la compétence, une convention conclue entre l'État et les collectivités territoriales ou établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre concernés doit déterminer les modalités de répartition des services ou parties de service ainsi que le nombre et la liste des personnels chargés de la mise en oeuvre des compétences de l'État transférées à chaque collectivité après consultation des comités sociaux placés auprès des services de l'État et des collectivités concernées.

5.2.2. Application dans l'espace

Le transfert s'applique aux voies du réseau national situées sur le territoire métropolitain, de la Guyane et de Mayotte. Les autres départements et régions d'outre-mer ne sont pas concernés car il n'y a plus de voies nationales sur le territoire de La Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique.

5.2.3. Textes d'application

Le transfert nécessite d'adopter un décret listant les routes nationales transférables.

Le transfert des voies sera constaté au niveau local par un arrêté des préfets.

Une modification du décret n° 2005-1499 du 5 décembre 2005 relatif à la consistance du réseau routier national devra prendre en compte l'évolution du transfert des routes nationales.

Le transfert entraînera une compensation financière dont les principes sont définis à l'article 43 du projet de loi. Un décret fixera les conditions d'application du IV de l'article 43.

Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre budget déterminera la compensation définitive versée à la personne publique recueillant la route nationale transférée.

Enfin, les dispositions relatives au transfert des services chargés des compétences de l'État transférées aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles, nécessiteront les décrets d'application suivants :

- un décret simple approuvera une convention type de mise à disposition des services ou parties de services ;

- un décret en Conseil d'Etat fixera la date et les modalités de transfert définitif des services ou parties de services ;

- le cas échéant, un décret instituera une commission nationale de conciliation en cas de désaccord entre l'État et la collectivité, pendant la phase de préparation des conventions de mise à disposition, sur l'évaluation du nombre d'ETP à transférer.

Article 7 : Décentralisation de routes nationales à titre expérimental aux régions

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le rôle des régions dans l'organisation des mobilités a été constamment renforcé depuis la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU) du 13 décembre 2000 17 ( * ) . La loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », a fait de la région le chef de file de « l'intermodalité et de la complémentarité entre les modes de transports ». Elle est ainsi chargée de l'élaboration d'un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Ce document obligatoire pour la région doit fixer des objectifs en matière d'équilibre et d'égalité des territoires, d'implantation des différentes infrastructures d'intérêt régional, de désenclavement des territoires ruraux, d'intermodalité et de développement des transports, de lutte contre le changement climatique et de pollution de l'air. En outre, la loi d'orientation des mobilités a conféré à la région, jusque-là autorité organisatrice de transports, la qualité d'autorité organisatrice de mobilité.

Dans ce contexte, le présent article du projet de loi vise à permettre aux régions volontaires d'exercer à titre expérimental pendant 5 ans la compétence d'aménagement, d'entretien et d'exploitation d'infrastructures routières 18 ( * ) .

Le réseau non concédé situé sur chaque territoire des régions représente 1% des routes en France, mais assure plus de 18% du trafic routier. Il comprend 2 600 km d'autoroutes et 9 500 km de routes nationales, soit 12 100 km. Toutefois, d'une part, environ 4 500 km de routes peuvent prioritairement être proposées aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles (cf. article 6 du projet de loi) et, d'autre part, environ 1 000 km d'itinéraires structurants entrent dans le giron de l'État, identifiés à ce jour par les autoroutes A20, A75, A84, A28 et les routes nationales N137 et N175 assurant la continuité de l'autoroute A84. Les grands itinéraires interrégionaux resteraient de la compétence de l'Etat.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le transfert aux régions à titre expérimental de la compétence voirie sur une partie du réseau routier national concerne directement deux dispositions constitutionnelles, l'article 37-1 relatif aux l'expérimentation et l'article 72-2 relatif au droit à compensation des transferts de compétences. Une expérimentation ne relèverait pas de l'article 72 selon lequel “ (...) les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l'a prévu, déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences ”. En effet, une telle expérimentation ne nécessiterait pas d'accorder aux régions un pouvoir normatif dérogatoire à des dispositions législatives ou réglementaires.

En vertu de l'article 37-1 de la Constitution, “ la loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental ”. Il est alors nécessaire de délimiter précisément l'objet de l'expérimentation et en fixer la durée.

L'article 72-2 de la Constitution pose le principe selon lequel tout transfert de compétence entre l'État et les collectivités s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Ainsi, les régions bénéficieraient d'une compensation. Par conséquent, les modalités de calcul de la compensation financière attribuée aux régions sont régies par les mêmes principes et conditions que ceux appliqués aux transferts définitifs de la voirie nationale aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles. En outre, les personnels de l'État devraient être mis gratuitement à la disposition de la région qui ne subirait aucun impact financier.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les régions ne disposent pas, en l'état actuel du droit, d'une compétence pour aménager, entretenir ou exploiter des routes.

Deux options sont possibles : un transfert de propriété définitif ou une mise à disposition temporaire, dans le cadre d'une expérimentation, qui permettrait aux régions d'exercer temporairement les attributions du propriétaire.

Les transferts de compétences de l'État aux collectivités territoriales, même à titre expérimental, nécessitent l'élaboration de dispositions en vue d'organiser les modalités de transfert ou de mise à disposition des services chargés de leur mise en oeuvre. Elles sont fixées par la loi dans la mesure où elles ont un impact sur les conditions d'exercice de la libre administration des collectivités territoriales.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les objectifs poursuivis sont, comme pour les départements, une amélioration du service aux usagers et une gestion simplifiée et plus efficace de la voirie qui représente un intérêt structurant à l'échelle régionale dépassant des pôles urbains et départementaux.

Les régions ne disposent pas aujourd'hui de compétences en matière de voirie, mais sont néanmoins compétentes pour l'organisation des transports et des mobilités à l'échelle régionale.

Il est ainsi projeté que la région, en tant qu'autorité organisatrice des mobilités, exerce une réelle coordination des pôles d'échanges, des besoins en matière de déplacement sur un réseau structurant un territoire plus vaste que l'échelle départementale 19 ( * ) afin d'accroître l'efficience dans la mise en oeuvre de la modernisation des infrastructures de transport interdépartementales.

Pour ce faire, une région souhaitant expérimenter la mise à disposition du réseau routier national non concédé, hormis les autoroutes A20, A75, A84, A28 et les routes nationales N137 et section de N175 assurant la continuité de l'autoroute A84, est tenue de demander l'ensemble du réseau routier national se trouvant sur son territoire, à l'exception des sections de routes qui seront transférées aux départements et aux métropoles de la région concernée.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Deux principales options ont été envisagées: un transfert de compétence se traduisant par un transfert de propriété de l'Etat vers les régions, ou une expérimentation permettant aux régions volontaires d'exercer temporairement une compétence de gestion d'infrastructures routières.

Le transfert de compétence a par essence un caractère définitif. Il peut s'exercer soit sur une base volontaire, à l'exemple de ce que le présent projet de loi prévoit pour les départements et les métropoles, soit à titre obligatoire sur le modèle de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés 20 ( * ) et responsabilités locales ayant décentralisé 18 000 km de voies nationales aux départements. Il emporte, en termes statutaires et de gestion des ressources humaines des conséquences différentes de l'expérimentation, puisque le transfert de compétence implique, après une phase de mise à disposition des agents, l'exercice d'un droit d'option permettant aux agents de l'État de choisir entre l'intégration dans la fonction publique territoriale ou le maintien dans la fonction publique d'État, sous la forme d'un détachement sans limitation de durée dans la fonction publique territoriale. En termes de compensation financière, le transfert de compétence n'aurait pas nécessairement eu des effets très différents que les modalités retenues dans le cadre de la présente mise à disposition dès lors que les charges de fonctionnement et d'investissement liées à la mise à disposition seront compensées selon les mêmes principes qu'un transfert définitif et que le transfert définitif des ETP est compensé financièrement par l'État.

L'option d'un transfert de compétence définitif a toutefois été écartée. En effet, contrairement aux départements, les régions ne disposent pas en l'état actuel du droit d'une compétence en matière de gestion d'infrastructures routières. N'étant pas gestionnaires d'infrastructures routières, elles ne disposent ni de l'expertise technique ni des moyens humains des collectivités compétentes en la matière, notamment les départements. L'exercice de cette nouvelle compétence est donc pour les régions une innovation aux effets importants.

Pour ces motifs, la voie d'une expérimentation, dispositif temporaire reposant sur une démarche volontaire de la part des régions, a été préférée à celui d'un transfert définitif.

3.2. OPTION RETENUE

Le présent article du projet de loi vise à permettre aux régions volontaires d'exercer à titre expérimental pendant cinq ans la compétence d'aménagement, d'entretien et d'exploitation d'infrastructures routières, en l'articulant avec les prérogatives des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunal à fiscalité propre déjà compétents en la matière et en dotant les régions des moyens financiers, humains et juridiques pour exercer cette nouvelle compétence.

Elle s'accompagne de l'attribution aux présidents des conseils régionaux d'un pouvoir de police de la circulation 21 ( * ) sur les voies mises à leur disposition et d'un dispositif permettant aux régions et aux départements de préciser la répartition de leurs missions sur le réseau routier.

3.2.1. La mise à disposition dans le cadre d'une expérimentation

A - Modalités procédurales

Dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la loi, l'État publiera par décret une liste des voies du domaine public routier national non concédé susceptibles d'être mises à disposition des régions souhaitant participer à l'expérimentation. Elle sera différente de celle destinées aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles.

Dans un délai de trois mois à compter de la publication de la liste, les régions pourront demander à participer à l'expérimentation.

La demande devra nécessairement porter sur l'ensemble des voies énumérées dans la liste publiée par l'État et situées sur le territoire de la région. Contrairement aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles, qui pourront choisir les voies du réseau routier national énumérées dont ils demandent le transfert, la demande des régions ne pourra porter que sur l'ensemble des voies énumérées dans la liste destinée aux régions. Le motif de cette obligation est la nécessité d'éviter une trop grande parcellisation des réseaux routiers des différents propriétaires ou gestionnaires, parcellisation qui poserait des problèmes de gestion difficilement surmontables.

La demande des régions portera également, par détermination de la loi, sur les voies dont les départements, la métropole de Lyon et les métropoles n'auront pas demandé le transfert, ces voies ayant vocation à être également mises à disposition des régions ayant demandé à participer à l'expérimentation.

Le délai à l'expiration duquel la liste des voies pouvant être mises à disposition des régions et le délai ouvert aux régions pour demander à participer à l'expérimentation sont donc alignés sur ceux relatifs au dispositif de décentralisation des voies aux départements, aux métropoles et à la métropole de Lyon. Cet alignement est destiné à permettre aux différentes collectivités de se coordonner dans l'expression de leurs besoins.

Dans une troisième étape, l'État informera les régions du périmètre définitif retenu pour l'expérimentation après avoir notifié à l'ensemble des collectivités territoriales et métropoles situées sur leur territoire des régions sa décision quant aux voies qui leur seront transférées.

La loi ouvre ensuite un délai de huit mois pour que l'État et la région concluent la convention d'expérimentation. La convention énumérera les voies mises à disposition de la région, qui seront les voies proposées aux régions dans liste publiée par l'État et les voies dont les départements et métropoles n'auront pas demandé le transfert, ainsi que les modalités de la mise à disposition.

B - Objet et portée de la mise à disposition

Le caractère expérimental du dispositif fait obstacle à ce que les régions bénéficient d'un transfert de propriété des voies du réseau routier national non concédé. La mise à disposition emportera toutefois de très larges effets : elle investira les régions des droits et obligations du propriétaire pour une durée de cinq ans. La loi prévoit ainsi que la région est substituée à l'État, pour les servitudes, droits et obligations correspondants.

La région sera compétente pour aménager, entretenir et exploiter les voies mises à sa disposition. La notion d'aménagement doit se comprendre de manière large comme incluant le cas échéant la réalisation de nouveaux tronçons routiers.

La convention prévoira les modalités de cette mise à disposition. Elle énumérera les biens mis à disposition et prévoira, le cas échéant, les modalités d'utilisation des biens qui seraient simultanément affectés aux voies mises à disposition et aux voies que l'Etat continuerait d'exploiter.

3.2.2. Le dispositif complémentaire à la mise à disposition dans le cadre de l'expérimentation

Le dispositif complémentaire concerne le pouvoir de police de la circulation et la faculté de transferts de gestion des voies entre les départements et les régions.

D'une part, le IV du présent article attribue au président du conseil régional le pouvoir de police de la circulation sur les voies du réseau routier national mises à sa disposition au titre de l'expérimentation. Cette disposition est nécessaire, les régions ne disposant pas en l'état actuel du droit d'un domaine public routier. Ce pouvoir de police s'exercera sans préjudice des compétences détenues par le maire et le représentant de l'État en matière de police de la circulation au titre du code de la route et du code général des collectivités territoriales, telles le pouvoir de police du maire en agglomération et certaines prérogatives du représentant de l'État sur les routes à grande circulation.

Le représentant de l'État conservera toutefois son pouvoir de police de la circulation sur les autoroutes mises à disposition des régions, lesquelles conservent leur statut autoroutier, de manière cohérente avec les dispositions de la loi n°2019-816 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace et avec les dispositions de l'article 6 du projet de loi.

Le représentant de l'État disposera d'un pouvoir de substitution d'action en cas de carence injustifiée du président du conseil régional dans l'exercice de son pouvoir de police.

D'autre part, les V et VI du projet d'article prévoient, afin d'accompagner la mise à disposition, de permettre aux régions et aux départements de se répartir s'ils le souhaitent les différentes missions par un transfert de gestion au sens de l'article L. 2123-3 du CG3P qui confère un pouvoir autonome de décision à l'autorité gestionnaire. Ces dispositions sont conçues comme un mécanisme de souplesse. Les régions vont récupérer les routes que les départements auront refusé de prendre avec possiblement des routes esseulées. Inversement, les routes figurant sur la liste dédiée aux régions pourront s'inscrire dans un périmètre à forte densité de routes départementales. Il s'agit ainsi de ne pas figer une distribution des routes qu'on ne maîtrise pas entièrement en raison du caractère volontaire de la décentralisation.

La région pourra ainsi transférer aux départements tout ou partie des missions d'aménagement, d'entretien et d'exploitation sur les routes mises à sa disposition dans le cadre de l'expérimentation. De même, le département pourra transférer aux régions tout ou partie des missions d'aménagement, d'entretien et d'exploitation sur les routes départementales identifiées comme d'intérêt régional dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.

Ces transferts de gestion seront concrétisés par des conventions qui prévoiront les modalités de ces transferts, notamment les moyens humains et financiers mis à disposition. Le président du conseil régional ou départemental deviendra compétent pour exercer le pouvoir de police sur les voies mises à disposition.

3.2.3. Le bilan de l'expérimentation

Il est prévu qu'à l'issue de l'expérimentation, l'État et la région concernée dressent un bilan. A la suite des enseignements tirés de l'expérimentation, le législateur demeurera libre d'envisager un transfert définitif des voies pour créer un domaine public routier régional.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La décentralisation à titre expérimental aux régions des compétences en matière d'aménagement, d'entretien ou d'exploitation des routes du réseau national non concédé n'a, au-delà de sa mise en place, aucun impact sur l'ordre juridique interne.

L'expérimentation n'entraîne pas de dispositifs nouveaux, mais uniquement des mesures d'ajustement en relation avec le droit existant, comme le pouvoir de police de la circulation dévolu au président du conseil régional à l'exception des autoroutes qui restent sous la responsabilité du préfet. De même, les biens et le personnel sont traités par les règles classiques de la mise à disposition. Pour les cas des biens à double usage ou des personnels intervenant pour plusieurs personnes publiques, un système de conventionnement sera mis en place sans que des règles spéciales soient nécessaires.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

La voirie des collectivités territoriales représente 50% des commandes de l'industrie routière, pour un montant annuel dépassant 6 Md€. Ce secteur de 1 420 entreprises et 86 300 salariés (« L'état de la route 2016 », L'Union des syndicats de l'industrie routière française ( URSIF ) devenue Routes de France) est donc fortement dépendant de la demande des collectivités territoriales et de l'évolution de leur politique d'entretien et d'investissement en matière de voirie.

L'impact sur les entreprises ne peut être anticipé de manière précise, mais la mise à disposition du réseau national maintient la nécessité de sa gestion et de son entretien, avec un impact globalement neutre attendu à ce titre.

4.2.2. Impacts budgétaires

La mise à disposition de voies du réseau routier national non concédé entraînera un transfert de charges aux régions qu'il est juridiquement nécessaire de compenser. Une convention fixera le montant et les modalités de versement de cette compensation.

Le montant sera fixé par les parties selon les principes définis par l'article du projet de loi relatif aux transferts de compétence à titre définitif. La compensation des charges d'investissement et de fonctionnement se fera donc sur la base des dépenses actualisées de l'inflation et constatées sur, respectivement, au moins les cinq années précédant la mise à disposition s'agissant des dépenses d'investissement et au plus les trois années précédant la mise à disposition s'agissant des dépenses de fonctionnement.

Par ailleurs, le présent article prévoit le transfert aux régions, pendant la durée de l'expérimentation, de la maîtrise d'ouvrage des opérations sur le réseau routier national inscrites dans les dispositifs contractuels entre l'État et les régions en vigueur à la date de l'expérimentation, incluant ainsi notamment les contrats de plan État - Région (CPER). La convention prévoira le versement sur la durée de l'expérimentation des financements de l'État restant à mobiliser au titre de ces dispositifs.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'expérimentation n'aura pas d'impact financier direct sur les régions en raison de la compensation financière et de la mise à disposition gratuite du personnel de l'État. Il reviendra cependant aux régions d'accueillir les agents de l'État. Les comités sociaux placés auprès des services de l'État et des collectivités concernées devront être consultés sur les modalités de répartition et de mise à disposition des personnels telles que prévues par la convention d'expérimentation.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Au II du projet d'article, il est prévu que les services de l'État qui participent à l'exercice de ces compétences sont gratuitement mis à disposition des régions pour la durée de l'expérimentation. La convention d'expérimentation conclue entre l'État et les régions détermine les modalités de répartition des personnels mis à disposition ainsi que le nombre et la liste des personnels chargés de la mise en oeuvre des compétences transférées à titre expérimental après consultation des comités sociaux placés auprès des services de l'État et des collectivités concernées.

Lorsque les personnels remplissent pour partie seulement leurs fonctions dans les services ou parties de service concernés, ces transferts donnent lieu à une compensation financière des fractions d'emploi correspondantes sans mise à disposition des services, pour la durée de l'expérimentation dans les conditions prévues au III de l'article 44.

4.5. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

L'expérimentation qui prévoit une substitution de l'autorité compétente pour l'aménagement et l'exploitation de voies du réseau national non concédé n'a pas en tant que telle d'impact sur l'environnement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale a également été consulté.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La loi, d'application immédiate, sera mise en oeuvre en suivant les différentes étapes décrites à l'article 7. La date de la mise à disposition effective des biens et des personnels entre les mains des régions sera fixée dans la convention d'expérimentation conclue avec l'État. L'expérimentation s'achèvera cinq ans après l'adoption de cette convention.

5.2.2. Application dans l'espace

Les articles 6 et 7 du présent projet de loi concernent le réseau routier national. En outre-mer, les collectivités de la Guyane, de Mayotte et de Saint-Pierre-et Miquelon sont concernées (il n'y a plus de voies nationales sur le territoire de La Réunion, de la Guadeloupe et de la Martinique). Le réseau routier national présent dans le territoire de ces trois collectivités pourra leur être transféré en application de l'article 6. Par conséquent, l'article 7 ne s'appliquera pas aux collectivités d'outre-mer.

5.2.3. Textes d'application

Un décret listera les routes du réseau national qui pourront être mises à la disposition des régions.

Article 8 : Transfert de la maîtrise d'ouvrage des routes nationales

1. ÉTAT DES LIEUX

Selon l'article L. 2411-1 du code de la commande publique (CCM), les maîtres d'ouvrages publics 22 ( * ) , c'est-à-dire les maîtres d'ouvrage qui sont des personnes publiques, sont investis d'une mission d'intérêt général dont ils ne peuvent en principe se départir.

L'article L. 2421-2 du CCM liste les attributions de la maîtrise d'ouvrage publique : 1° La détermination de la localisation de l'opération ; 2° L'élaboration du programme ; 3° La fixation de l'enveloppe financière prévisionnelle ; 4° Le financement de l'opération ; 5° Le choix du processus selon lequel l'ouvrage sera réalisé ; 6° La conclusion des marchés publics ayant pour objet les études et l'exécution des travaux de l'opération.

A ces missions s'ajoutent également l'approbation des études d'avant-projet et des études de projet du maître d'oeuvre (article L. 2422-6 du CMM) et celles issues de différentes législations, non spécifiques à la maîtrise d'ouvrage publique mais s'y appliquant également, qui font du maître d'ouvrage le responsable de l'obtention des différentes autorisations administratives nécessaires à la réalisation du projet.

Les maîtres d'ouvrages publics sont tenus d'exercer eux-mêmes ces missions, sauf à recourir à l'une des deux exceptions que sont le mandat de maîtrise d'ouvrage et le transfert de mandat d'ouvrage.

Le mandat de maîtrise d'ouvrage est défini à l'article L. 2422-5 du CMM, comme le contrat par lequel le maître d'ouvrage confie à un mandataire l'exercice, en son nom et pour son compte, de tout ou partie des attributions limitativement énumérées à l'article L. 2422-6. Le mandat de maîtrise d'ouvrage, couramment appelé « délégation de maîtrise d'ouvrage », ne constitue toutefois qu'une exception de portée limitée à l'obligation faite au maître d'ouvrage d'exercer lui-même sa mission, puisque les actes réalisés par le mandataire sont réputés l'être par le mandant dont la responsabilité peut être engagée en cas de dommage (par exemple, s'agissant de la responsabilité vis-à-vis des constructeurs : CE, 5 juin 2013, Région Haute-Normandie, n° 352917).

Le recours au mandat de maîtrise d'ouvrage est encadré par le code de la commande publique. Les maîtres d'ouvrages publics peuvent y recourir après mise en concurrence préalable, le mandat de maîtrise d'ouvrage étant un marché public, et il ne peut porter que sur les missions énumérées à l'article L. 2422-6 du CMM une fois le programme défini. Dans le cas des travaux d'infrastructure routière, la définition du programme n'est établie qu'à l'issue de l'enquête publique de déclaration de projet ou préalable à la déclaration d'utilité publique : le mandat de maîtrise d'ouvrage ne peut ainsi être conclu que postérieurement à la conduite par le maître d'ouvrage routier des études préalables du projet et des procédures de concertation et de consultation du public.

Le transfert de maîtrise d'ouvrage, seconde exception au principe précité, consiste dans la possibilité offerte à plusieurs maîtres d'ouvrage publics simultanément compétents pour la réalisation d'un ouvrage ou d'un ensemble d'ouvrages de désigner par convention celui d'entre eux qui exercera la maîtrise d'ouvrage sur la totalité de l'opération (article L. 2422-12 du CMM).

Le champ du transfert de maîtrise d'ouvrage est très limité car il est caractérisé par une compétence simultanée des maîtres d'ouvrage, qualifiée de co-maîtrise publique.

Les conditions posées au transfert de maîtrise d'ouvrage public restreignent donc fortement la faculté pour l'État de transférer aux collectivités territoriales, avec leur accord ou à leur demande, la maîtrise d'ouvrage d'une opération d'aménagement du réseau routier national.

S'agissant des régions, cette possibilité est exclue puisque, les régions n'ayant à ce jour pas de domaine public routier, un cas de co-maîtrise d'ouvrage public ne peut pas se présenter.

S'agissant des collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI à FP) disposant d'un domaine public routier, le recours à l'article L. 2422-12 se justifie surtout dans certains cas bien particuliers, lorsque l'opération porte sur une intersection entre une voie du domaine national et une voie du domaine d'une collectivité. Hors de ces cas, le recours à l'article L. 2422-12 du CMM est plus difficilement justifiable.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'objet des dispositions relatives au transfert de maîtrise d'ouvrage est de permettre à l'État, aux régions, départements, métropoles, communautés urbaines et à la métropole de Lyon de s'entendre sur un transfert temporaire de l'État vers l'une de ces collectivités de la maîtrise d'ouvrage d'une opération d'aménagement du réseau routier national non concédé. Sont principalement visées des opérations d'ampleur importante, de développement du réseau consistant dans la création d'un nouveau tronçon routier, comme une déviation ou un contournement.

Une mesure législative est nécessaire afin de permettre l'exercice de cette maîtrise d'ouvrage, en dehors du cadre législatif issu de l'article L. 2422-12 du CCM.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le transfert temporaire de maîtrise d'ouvrage vise à servir tant les intérêts de l'État que ceux des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI).

S'agissant de l'État en tant qu'opérateur routier, celui-ci est confronté à une baisse continue de ses moyens tant financiers qu'humains 23 ( * ) , ce qui réduit sa capacité à mener de front une multitude d'opérations, sauf à devoir étirer les délais de réalisation, et alors même que le cadre légal et réglementaire entourant ces opérations, au travers notamment des différentes autorisations administratives à obtenir et des études nécessaires à leur obtention, est particulièrement consommateur de ces moyens.

S'agissant des collectivités territoriales et des EPCI, quand bien même l'opération projetée porte sur un réseau qui n'est pas le leur, elles peuvent avoir un intérêt évident à la réalisation de l'opération, au vu de ses effets positifs sur la socio-économie locale, et ainsi être prêtes à exercer temporairement la maîtrise d'ouvrage de l'opération.

Dans de tels cas, l'option d'un mandat de maîtrise d'ouvrage n'est pas toujours satisfaisante. D'une part, le mandat de maîtrise d'ouvrage ne peut pas porter sur l'ensemble de la maîtrise d'ouvrage, puisqu'il ne peut intervenir qu'une fois le programme défini, qui correspond approximativement au stade d'un projet déclaré d'utilité publique. D'autre part, il n'opère pas un transfert de responsabilité du maître d'ouvrage primaire, originel, vers le maître d'ouvrage de second rang (le mandataire).

Il est donc souhaitable que, pour des opérations portant sur le réseau routier national, le cadre restrictif posé au transfert de maîtrise d'ouvrage soit assoupli afin que l'Etat-opérateur routier et les collectivités territoriales ou EPCI puissent librement avoir recours, soit au mandat, soit au transfert de maîtrise d'ouvrage, en fonction des circonstances de chaque projet et de leurs intérêts respectifs.

Une convention procédera au transfert de maîtrise d'ouvrage et organisera les conditions dans lesquelles elle est exercée par la collectivité territoriale ou l'EPCI. L'ouvrage réalisé ayant vocation à intégrer le réseau routier national pour être entretenu et exploité par les services de l'État, la convention prévoira notamment des modalités de suivi et de contrôle par les services de l'État de la maîtrise d'ouvrage exercée par la collectivité, sans que ces modalités ne viennent dénaturer le transfert auquel il est procédé. Elle comportera aussi des éléments précis concernant les conditions de maintien du trafic pendant les travaux, l'État conservant la responsabilité de l'exploitation générale du réseau.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La modification du code de la commande publique, plutôt que celle du code de la voirie routière, était envisageable. Toutefois, dans la mesure où seule la voirie nationale est concernée, il a été décidé de modifier les compétences des collectivités concernées, d'une part au titre du code de la voirie routière pour les départements, les métropoles, les communautés urbaines et la métropole de Lyon, et d'autre part, au titre du code général des collectivités territoriales (CGCT) concernant l'article relatif aux attributions des régions.

Par souci de lisibilité du droit, le premier alinéa de l'article L. 2411-1 du code de la commande publique, qui énumère le principe de l'interdiction faite aux maître d'ouvrage de déléguer l'exercice de leur mission ainsi que les dérogations à ce principe, a été complété par un renvoi à la disposition introduite dans le code la voirie routière, afin que l'article L. 2411-1 du code de la commande publique recense le principe et l'ensemble de ses dérogations.

3.2. OPTION RETENUE

Sur le fond, une fois le principe de la possibilité de transférer la maîtrise d'ouvrage décidé, plusieurs options étaient envisageables s'agissant du périmètre des collectivités susceptibles de pouvoir bénéficier d'un transfert de maîtrise d'ouvrage.

L'ouverture de cette faculté aux départements était naturelle, au vu de l'expertise progressivement acquise par ces derniers de par l'exercice de la maîtrise d'ouvrage exercée sur leur voirie. S'agissant des métropoles, de la métropole de Lyon et des communautés urbaines, leur compétence en matière de voirie s'est progressivement affirmée (cf. les développements relatifs à l'article 6). Le département de Haute-Saône est à titre d'illustration demandeur d'une maîtrise d'ouvrage sur l'ensemble de la RN 57 sur son territoire ce qui dépasse largement la notion de co-maîtrise d'ouvrage évoqué ci-dessus.

S'agissant des régions, si elles ne disposent pas d'une compétence en matière de voirie, leur rôle dans l'organisation des mobilités a été renforcée par les lois MAPTAM, NOTRe et, plus récemment, par la loi d'orientation des mobilités. Par ailleurs, les régions sont compétentes pour identifier et participer au financement des voies et axes routiers d'intérêt régional. En matière même d'exercice de maîtrise d'ouvrage routière, des conventions de mandat ont été conclues entre l'Etat et la région Auvergne-Rhône-Alpes pour le développement de la RN 88 en 2019 et 2020. La région Normandie sollicite pour l'avenir un dispositif du même type pour l'aménagement de la RN 13 entre Evreux et Chauffour. Au vu de ces considérations, le projet d'article étend la faculté de transférer la maîtrise d'ouvrage d'une opération portant sur le réseau routier national aux régions si cette voie constitue un itinéraire d'intérêt régional et est identifiée par le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.

La disposition précise que le transfert de maîtrise d'ouvrage peut porter sur une opération de développement ou d'aménagement du réseau routier national. La notion d'aménagement doit s'entendre de manière large : elle recouvre tant des opérations d'ampleur importante comme la création d'un nouveau tronçon routier (par exemple une déviation ou un contournement) que des opérations d'ampleur a priori plus limitée, comme la création des élargissements de voies ou de plateforme.

Elle concerne l'ensemble du réseau routier national non concédé, c'est-à-dire les routes nationales et les autoroutes non concédées. Les autoroutes concédées sont exclues du dispositif, la maîtrise d'ouvrage des opérations de développement ou d'aménagement des autoroutes concédées ayant vocation à être exercée par les sociétés concessionnaires d'autoroute, délégataires de l'État.

L'article précise que le transfert se fait à titre gratuit et se situe donc hors du champ de la commande publique.

L'option retenue a été de modifier le code de la voirie routière et le CGCT, ce dernier renvoyant aux dispositions du code de la voirie routière.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 4211-1 du CGCT, l'article L. 121-5 du code de la voirie routière, et l'article L. 2411-1 du code de la commande publique sont modifiés.

Les impacts sur l'ordre juridique interne seront limités. Le transfert de maîtrise d'ouvrage publique de l'Etat vers une collectivité territoriale transférera à celle-ci la responsabilité de l'exercice de cette maîtrise d'ouvrage, dans les conditions prévues dans chaque convention d'espèce sur la base d'un référentiel national, régulièrement réévalué.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La disposition relative à l'extension de la capacité de l'État de transférer la maîtrise d'ouvrage d'opérations de développement du réseau routier national non-concédé aura quant à elle un impact positif sur la capacité des collectivités à porter et à mettre en oeuvre des opérations importantes pour les territoires, cohérentes avec le fonctionnement global du réseau routier national, mais jugées non prioritaires par l'État.

D'un point de vue du financement, le dispositif devrait avoir un impact neutre pour l'État : en effet, le financement d'opérations de développement du réseau routier national par l'État est exclusivement financé dans le cadre des contrats de plan État-Région (ou contrats de convergence et de transformation dans les outre-mer) ou dans le cadre de programmes spécifiques (Route Centre Europe Atlantique), la part de financement de l'État provenant en intégralité de crédits non budgétaires 24 ( * ) , issus de l'AFITF (Agence de financement des infrastructures de transport de France 25 ( * ) ).

Ainsi, si l'État était amené à contribuer au financement d'un projet dont il transférerait la maîtrise d'ouvrage à une collectivité, ce financement ne pourrait s'inscrire que dans le cadre précédemment décrit. Dès lors, la mesure ne serait pas susceptible d'augmenter le nombre de projets routiers réalisés, ni de le diminuer, de sorte que la mesure ne contribuerait pas à l'amélioration du niveau de service offert par le réseau routier national.

Dans le cas contraire, la mesure est susceptible d'augmenter le nombre de projets routiers réalisés et ainsi le niveau de service offert par le réseau routier national. Cependant, la mesure pourrait également conduire les collectivités à réserver leurs financements pour les projets dont elles souhaiteraient assurer la maîtrise d'ouvrage en diminuant ainsi leurs cofinancements sur les opérations qui seraient sous maîtrise d'ouvrage de l'Etat.

L'impact global résultant de ces effets directs et indirects reste donc incertain. En tout état de cause, cette disposition devrait permettre une allocation des ressources humaines et financières des collectivités plus en adéquation avec les objectifs recherchés par ces dernières dans la conduite de leurs politiques publiques.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Pour les mêmes raisons que celles évoquées en partie 4.2.1, la disposition relative à l'extension de la capacité de l'Etat de transférer la maîtrise d'ouvrage d'opérations de développement du réseau routier national non-concédé aura un impact positif sur l'activité des entreprises, les collectivités étant susceptibles d'initier des opérations que l'État n'aurait pas choisi de lancer.

De plus, la réalisation de ces nouvelles opérations se traduirait par une hausse du niveau service offert aux usagers du réseau routier national (voir partie 4.6) qui bénéficiera également aux entreprises et à leurs employées.

4.2.3. Impacts budgétaires

Pour les mêmes raisons que celles évoquées en partie 4.2.1, l'impact sur le budget de développement du réseau routier national de la disposition relative à l'extension de la capacité de l'État de transférer la maîtrise d'ouvrage d'opérations de développement du réseau routier national non-concédé est neutre, si l'opération était déjà prévue dans les CPER ou positive si elle permet d'initier de nouvelles opérations.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La disposition relative à l'extension de la capacité de l'État de transférer la maîtrise d'ouvrage d'opérations de développement du réseau routier national aura quant à elle un effet positif sur les collectivités territoriales. En effet, elle vise à répondre à une demande de certaines collectivités territoriales en leur offrant la possibilité de recourir à un dispositif juridique plus adapté au pilotage par celles-ci d'opérations de développement du réseau routier national au bénéfice direct de leurs territoires, ce que ne permet le droit actuel. Elles imposeront néanmoins des dépenses de maîtrise d'ouvrage et donc de personnel supplémentaires, en lien avec les volumes d'investissement décidés.

En tout état de cause, ces moyens humains et financiers des collectivités seront en adéquation avec les objectifs recherchés par ces dernières dans la conduite de leurs politiques publiques et d'aménagement des territoires.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

A ce jour, le recours à des contrats de mandat de maîtrise d'ouvrage avec des collectivités territoriales est relativement marginal 26 ( * ) . Cependant, les quelques précédents ont montré que ce dispositif contractuel nécessite une très forte implication des services de l'État, notamment des services de maîtrise d'ouvrage routière des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), en particulier lorsque la collectivité mandataire ne dispose pas de la totalité des compétences de maîtrise d'ouvrage routière (cas des conseils régionaux), et ce alors que les opérations concernées ne constituent en général pas des priorités pour l'État. En effet, dans ce dispositif, l'État reste maître d'ouvrage de l'opération et à ce titre assume la pleine responsabilité juridique des procédures devant être conduites ou encore celle liée à la mise en oeuvre des prescriptions de l'autorisation environnementale du projet.

Ainsi, la disposition relative à l'extension de la capacité de l'État de transférer la maîtrise d'ouvrage d'opérations de développement du réseau routier national aura un impact positif sur les services de l'État et en particulier ses services déconcentrés (DREAL principalement). En effet, l'action de l'État serait alors réduite pour le projet concerné à un seul contrôle technique (accord sur le programme de travaux, contrôle du respect de ce programme de travaux, contrôle des exigences de conception des infrastructures de l'État, exploitation sous chantier ...) et, le cas échéant, financier. En particulier, la responsabilité juridique des procédures à conduire, autorisations à solliciter et travaux à mener, reviendrait alors pleinement à la collectivité qui assurerait la maîtrise d'ouvrage du projet.

De même, la responsabilité juridique de maître d'ouvrage restera de la seule responsabilité de la collectivité.

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Pour les mêmes raisons qu'évoquées précédemment (voir partie 4.2.1), le transfert de la maîtrise d'ouvrage aura un impact positif pour les particuliers en permettant le cas échéant, le lancement d'opérations complémentaires d'aménagement du réseau. Cet impact positif se traduirait par une augmentation du niveau de service offerts aux usagers. Cette augmentation du niveau de service peut concerner :

- des gains de temps de parcours pour les usagers des routes d'intérêt régional (ex : projet conduisant à résorber un point de congestion) ;

- des gains de régularité des temps de parcours et de diminution du stress lié à l'incertitude des temps de parcours (ex : projets conduisant à diminuer les risques d'incidents ou d'accidents - moindre risque de perturbation du réseau - ou à faciliter les conditions d'entretien du réseau ou d'intervention en cas d'accident - moindre perturbation du réseau en cas d'événement) ;

- des gains de sécurité routière (ex : correction de points accidentogènes) ;

- des gains de confort (ex : liés à l'amélioration des caractéristiques géométriques des infrastructures).

La mesure est également susceptible d'avoir un impact positif pour les riverains des infrastructures concernées (ex : opérations consistant à réduire les nuisances sonores subies par les riverains).

4.6. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La disposition relative à l'extension de la capacité de l'État de transférer la maîtrise d'ouvrage d'opérations de développement du réseau routier national non concédé n'aura pas d'impact majeur sur l'environnement.

Il convient de noter que les projets de développement concernés par la mesure seraient quasi systématiquement soumis à évaluation environnementale et/ou à autorisation environnementale et que cette autorisation ne peut être délivrée que si les impacts résiduels du projet sur l'environnement (après mise en place des mesures d'évitement, de réduction et de compensation) ne sont pas significatifs. Il est notamment exigé d'atteindre un objectif d'absence de perte nette, voire de gain, s'agissant de l'impact sur la biodiversité.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions s'appliqueront dès l'entrée en vigueur de la loi.

5.2.2. Application dans l'espace

Il existe du réseau routier national en Guyane, à Saint-Pierre et Miquelon et Mayotte. Ces trois collectivités sont sous le régime de l'identité législative. Le texte ne prévoit donc pas de mesure d'adaptation pour ces collectivités.

Article 9 : Dispositions relatives au transfert des petites lignes ferroviaires et de leurs gares

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le régime juridique des infrastructures de transport ferroviaire est aujourd'hui inscrit dans le titre premier du livre premier de la deuxième partie du code des transports (articles L. 2111-1 à L. 2113-5).

L'État est le propriétaire unique du réseau ferré national, défini par les dispositions combinées, d'une part, de l'article L. 2111-1 du code des transports, qui dispose que « la consistance et les caractéristiques principales du réseau ferré national sont fixées par voie réglementaire » et, d'autre part, du décret n° 2002-1359 du 13 novembre 2002 fixant la consistance du réseau ferré national, qui dispose que « le réseau ferré national est constitué des lignes ou sections de lignes de chemin de fer suivantes : lignes concédées par l'État à la Société nationale des chemins de fer français avant le 31 décembre 1982 et non retranchées du réseau ferré national ; lignes ayant fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique depuis le 1 er janvier 1983 et mises en exploitation par la Société nationale des chemins de fer français ou par Réseau ferré de France ; lignes incorporées au réseau ferré national et non retranchées de ce réseau ; lignes dites « voies mères d'embranchement », établies dans les conditions prévues par le décret du 5 mai 1997 susvisé ou en application de dispositions antérieures régissant leur établissement et non retranchées du réseau ferré national » .

Le réseau ferré national représente aujourd'hui plus de 27 000 kilomètres de lignes, dont environ 2 100 kilomètres de lignes à grande vitesse. C'est sur ce réseau ferré que sont exécutés l'essentiel des services de transport ferroviaire, notamment par l'État, autorité compétente pour l'organisation des services de transport ferroviaire de voyageurs d'intérêt national (article L. 2121-1 du code des transports) et par les régions, autorités compétentes pour l'organisation des services de transport ferroviaire de voyageurs d'intérêt régional (article L. 2121-3 du même code), sauf en Île-de-France (article L. 2121-9 du même code). Les petites lignes ferroviaires, soit les lignes de desserte fine du territoire, d'intérêt local ou régional, classées UIC 7 à 9 (selon la méthodologie issue de l'Union internationale des chemins de fer) 27 ( * ) , représentent environ un tiers du réseau français accueillant des voyageurs, soit de l'ordre de 9 000 kilomètres sur les 27 000 kilomètres de lignes et accueillent 17% du trafic des trains régionaux.

La société SNCF Réseau est, en application de la loi (article L. 2111-9 du code des transports), le gestionnaire d'infrastructure sur les lignes de ce réseau ferré national, qui lui sont par ailleurs attribuées par l'État (article L. 2111-1 et L. 2111-20 du code des transports).

La loi prévoit actuellement deux ensembles de dispositions permettant aux régions, qui sont habilitées à exploiter des infrastructures de transport ferré ou guidé d'intérêt local et régional (article L. 2112-1-1 du code des transports, introduit par la loi n° 2014-872 du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire), de solliciter le transfert à leur profit de certaines catégories de lignes ferroviaires appartenant à l'État.

D'une part, les articles L. 3114-1 à 3114-3 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) (créés par l'article 7 de la loi du 4 août 2014 précitée et modifiés ensuite par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, puis par l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe SNCF) permettent des transferts de propriété d'infrastructures ferroviaires ou d'installations de service appartenant à l'État au profit d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales, compétent en matière de développement économique, à la demande 28 ( * ) de l'assemblée délibérante de celui-ci. Ces transferts sont limités à deux séries de lignes : « soit les lignes que la personne publique bénéficiaire utilise ou envisage d'utiliser pour organiser des services de transport de personnes et qui sont séparées physiquement du reste du réseau ferré national, soit les lignes à faible trafic n'ayant pas été utilisées par des services de transport de personnes depuis plus de cinq ans » . Une fois le transfert survenu, la collectivité territoriale ou le groupement bénéficiaire du transfert devient propriétaire de l'infrastructure à la place de l'État et détermine librement les modalités de gestion des lignes ainsi transférées. La procédure de ce transfert est déterminée par les articles R. 3114-1 et suivants du même code (créés par le décret n° 2017-1556 du 10 novembre 2017 relatif au transfert de propriété du domaine public ferroviaire et portant diverses dispositions relatives à ce domaine).

D'autre part, en application de l'article L. 2111-1-1 du code des transports (introduit par l'article 172 de loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités), les régions, autorités organisatrices de transport ferroviaire régional, peuvent solliciter le transfert de gestion, dans les conditions prévues par l'article L. 2123-3 du CG3P, de « lignes d'intérêt local ou régional à faible trafic du réseau ferré national » . Ce même article prévoit que le monopole légal de SNCF Réseau pour la gestion des lignes du réseau ferré national (prévu par les articles L. 2101-1 et L. 2111-9 du code des transports) ne s'applique pas aux lignes ainsi transférées, dont la région est donc libre de déterminer les modalités de gestion (par exemple en confiant la gestion de l'infrastructure ferroviaire sur ces lignes à une entité tierce). La propriété des lignes considérées, qui continuent à faire partie du réseau ferré national, demeure à l'État.

1.2. CADRE CONVENTIONNEL

Les normes européennes régissant la libéralisation des services de transport ferroviaire 29 ( * ) imposent, en dehors d'un nombre réduit de cas dérogatoires, une séparation stricte entre les gestionnaires d'infrastructures ferroviaires et les entreprises fournissant les services de transport sur ces infrastructures.

La gestion d'une infrastructure ferroviaire étant une activité de type « monopole naturel » 30 ( * ) , dans la mesure où il est important d'éviter d'éventuelles duplications du réseau, l'État bénéficie de larges marges de manoeuvre pour l'organisation des gestionnaires d'infrastructure.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les outils à la disposition des régions paraissent incomplets. Pour mettre en oeuvre ces dispositions, il est donc nécessaire de passer par la loi.

Il apparait nécessaire d'ajouter une possibilité supplémentaire dans l'éventail des outils qui permettent la gestion efficace et raisonnée des « petites lignes ferroviaires », en plus du dispositif de transfert de gestion prévu par l'article L. 2111-1-1 du code des transport (introduit par l'article 172 de la loi du 24 décembre 2019 précitée).

Il semble en effet utile de permettre aux régions de mettre en oeuvre les solutions les plus adaptées à la situation spécifique de chaque ligne, et de contribuer à revitaliser le réseau de lignes de desserte fine des territoires, à la fois dans un objectif d'aménagement du territoire - notamment de lutte pour le désenclavement des territoires intermédiaires et ruraux - et dans un objectif de lutte contre le réchauffement climatique, par la promotion de modes de transports alternatifs à la voiture.

Ainsi, il semble pertinent :

- d'étendre la possibilité de transfert de propriété des infrastructures ferroviaires et des installations de service à l'ensemble des lignes ferroviaires d'intérêt local ou régional à faible trafic, après autorisation donnée par l'Etat qui se prononce au regard des besoins liés à la politique nationale en matière de transports et des besoins en matière de défense ;

- de transposer une dérogation laissée aux États-membres par le droit communautaire, prévue à l'article 2 point 3 au a) de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen, permettant notamment à une région, sur une ligne ferroviaire qu'elle récupèrerait appartenant à un réseau local ou régional autonome, de confier à une entité unique la gestion de l'infrastructure ferroviaire et l'exploitation des services de transport ;

- et de prévoir la possibilité, pour les bénéficiaires de transferts de gestion, de modifier l'affectation des biens transférés sans que cela ne conduise à mettre automatiquement fin aux transferts.

Par ailleurs, pour éviter tout risque juridique, il est nécessaire de préciser dans la loi la possibilité d'inclure les gares et autres installations de service dans les transferts de gestion. Pour tenir compte du fait que les quais ferroviaires en gares de voyageurs sont gérés par SNCF Gares & Connexions, filiale de SNCF Réseau, il semble également souhaitable que cette entreprise soit partie à la convention technique, visée à l'article L. 2111-9-1 A du code des transports, de mise en oeuvre des transferts de missions de gestion de l'infrastructure.

En outre, s'agissant de l'aspect social, le droit commun de la mise à disposition de salariés d'une entreprise prêteuse à une entreprise utilisatrice, tel que prévu par l'article L. 8241-2 du code du travail doit être précisé à la marge pour traiter le cas de la mise à disposition des salariés de la SNCF Réseau ou le cas échéant de SNCF Gares et Connexions dans le cadre de transfert des petites lignes. En effet, l'esprit de l'article L. 8241-2 du code du travail est de recourir au dispositif de mise à disposition pour un nombre limité de salariés et surtout pour des durées courtes. Or, dans le cadre des transferts de gestion, de missions ou d'infrastructures liés aux petites lignes, la mise à disposition des salariés doit pouvoir être utilisée par SNCF Réseau ou le cas échéant SNCF Gares & Connexions pour des durées longues (au regard des durées envisagées pour les transferts des petites lignes) et potentiellement pour l'ensemble des salariés affectés aux services concernés.

Il s'agit donc d'autoriser explicitement dans le cas précis du transfert des petites lignes la mise à disposition de salariés sur une longue durée et de prévoir de manière explicite que l'avenant signé par le salarié dès lors qu'il accepte les conditions de sa mise à disposition, et donc sa durée, précise la durée de cette mise à disposition. Cette inscription dans l'avenant se fait sans préjudice des modalités de rupture anticipée qui seront le cas échéant définies dans la convention de mise à disposition, et qui pourront être reprises également dans cet avenant.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif, s'agissant des dispositions sur le transfert de gestion des lignes d'intérêt local ou régional à faible trafic, est triple :

- préciser les contours du transfert de gestion introduit par la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités et notamment clarifier la possibilité d'inclure les installations de service (dont l'Etat est propriétaire, mais dont SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexions peuvent être affectataires), en particulier les gares exclusivement dédiées aux lignes transférées, dans les transferts ;

- déroger aux dispositions prévoyant que tout changement d'affectation d'un bien, faisant l'objet d'un transfert de gestion, entraîne la fin de ce transfert et le retour à titre gratuit du bien transféré à l'Etat, ou le cas échéant à l'affectataire de ce bien (SNCF Réseau ou SNCF Gares & Connexions) ; il s'agit ainsi d'offrir la possibilité aux régions, si elles le jugent nécessaire, de changer l'affectation des biens transférés sans que le transfert de gestion ne prenne fin ;

- préciser que les transferts de gestion entraînent le transfert des droits et obligations liés aux biens transférés (de l'Etat, ou de l'affectataire des biens transférés le cas échéant, au bénéficiaire du transfert de gestion).

Concernant la mise à disposition des salariés des sociétés SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexions, tout en s'appuyant sur le cadre du prêt de main-d'oeuvre tel qu'il est défini par le code du travail, il apparait nécessaire de préciser la durée maximale pendant laquelle les salariés pourront être mis à disposition, au regard des durées généralement longues prévues pour les transferts de gestions ou de missions. De même, cette durée devra être précisée dans l'avenant au contrat de travail signé par le salarié dès lors qu'il acceptera les conditions de sa mise à disposition. Cette durée maximale ne fait pas obstacle à la rupture anticipée de la mise à disposition dont les modalités seront définies dans la convention de mise à disposition et reprises dans l'avenant.

3. DISPOSITIF RETENU

Le dispositif retenu :

- modifie l'article L. 3114-1 du CG3P relatif au transfert de propriété du domaine public ferroviaire, en ajoutant les lignes d'intérêt local ou régional à faible trafic parmi celles qui peuvent faire l'objet d'une cession de l'État aux collectivités territoriales ou aux groupements de collectivités territoriales, compétents en matière de développement économique ;

- précise explicitement que les installations de service, et notamment les gares de voyageurs, peuvent bien être incluses dans les transferts de gestion de petites lignes ferroviaires ;

- crée une dérogation aux dispositions du I de l'article L. 2123-3 du CG3P, de façon à permettre à l'autorité organisatrice de transport ferroviaire bénéficiaire d'un transfert de gestion en application du présent article de modifier l'affectation des biens ainsi transférés, sous réserve de l'accord préalable du ministre chargé des transports, sans que ce changement d'affectation n'entraîne le retour des biens concernés à la société SNCF Réseau et/ou à sa filiale SNCF Gares & Connexions. De plus, l'autorité organisatrice de transport ferroviaire bénéficiaire du transfert est substituée à la société SNCF Réseau ou à la filiale dans l'ensemble des droits et obligations liés aux biens qui lui sont transférés, à l'exception de ceux afférents à des dommages constatés avant la date du transfert et à des impôts ou taxes dont le fait générateur est antérieur à cette même date ;

- ajoute, par modification du troisième alinéa de l'article L. 2111-9-1 A du code des transports, SNCF Gares & Connexions en tant que partie à la convention technique de mise en oeuvre des transferts de missions de gestionnaire d'infrastructure ;

- introduit en droit national, par modification du I de l'article L. 2122-2 du code des transports, une dérogation, notamment en termes de séparation du gestionnaire d'infrastructure et des entreprises ferroviaires, applicable aux réseaux ferroviaires locaux ou régionaux autonomes et destinées uniquement à l'exploitation de services de transport de voyageurs empruntant une infrastructure ferroviaire ;

- explicite les modalités de mise à disposition des salariés des sociétés SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexions dans le cadre d'un transfert de gestion ou d'un transfert de missions de gestion de l'infrastructure ferroviaire. Ainsi, il est créé un nouvel article L. 2111-9-1-B dans le code des transports qui pose explicitement la possibilité pour SNCF Réseau ou le cas échéant SNCF Gares & Connexions de recourir au dispositif de mise à disposition de salariés dans le cas de transfert de gestion, de missions ou d'infrastructure liées aux petites lignes. Cet article prévoit également que ces mises à disposition peuvent atteindre la durée de la convention de transfert des petites lignes, dans la limite de vingt années. Enfin, l'article prévoit que l'avenant au contrat de travail précise également la durée de la mise à disposition.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 3114-1 du CG3P, ainsi que les articles L. 2111-1-1, L. 2111-9-1 A et L. 2122-2 du code des transports. Un article L. 2111-9-1 B est créé au sein du code des transports.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Ces dispositions sont a priori sans impact budgétaire, pour l'Etat comme pour les régions. En effet, de nouvelles lignes seront éligibles à des transferts de propriété, mais elles pouvaient d'ores et déjà faire l'objet de transferts de gestion. Or, d'une part, les impacts budgétaires des transferts de propriété seront a priori identiques aux impacts des transferts de gestion, et d'autre part, ces derniers ne pouvaient en tout état de cause pas être estimés, la règle, prévue par la loi, étant simplement que l'opération ne doit pas avoir d'impact économique pour les sociétés SNCF Réseau et SNCF Gares & Connexion. On peut donc supposer que l'impact budgétaire d'un transfert de gestion pour les régions sera nul en cas de mise à disposition des agents affectés à la gestion des infrastructures transférées (dans la mesure où le transfert se traduira alors par des économies pour SNCF Réseau / SNCF Gares & Connexions, qui les reverseront aux régions), et qu'il tendra vers 0 rapidement dans le cas contraire (le temps que les agents de SNCF Réseau / SNCF Gares & Connexions soient redéployés, et que les économies correspondantes soient reversées aux régions).

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cet article offre une possibilité supplémentaire qui est facultative, tant pour l'État que pour les régions.

Ce n'est que dans ce cadre que la disposition impliquera des charges nouvelles en termes de gestion administrative et technique pour les services du conseil régional.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

L'objectif est de renforcer l'offre ferroviaire, au regard des compétences de développement économique et d'aménagement du territoire qui incombent aux régions au sens de l'article L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), sur les lignes ferroviaires de desserte fine qui contribuent à un maillage efficace du territoire, en concordance avec les besoins et les attentes des usagers du train, pour leur travail ou leurs loisirs. 31 ( * )

4.5. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Le renforcement de l'offre ferroviaire, en tant que modèle de transport répondant aux objectifs de développement durable et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, privilégie une desserte en proximité dans les territoires au plus proche des centres de vie.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article L.2271-1 du code du travail, la disposition relative à la mise à disposition des salariés a été soumise à la Commission nationale de la négociation collective de l'emploi et de la formation professionnelle.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'appliquera à l'ensemble des régions.

Article 10 : Permettre aux collectivités la mise en place de radars automatiques

1. ÉTAT DES LIEUX

Depuis leur déploiement sur le territoire national en 2003, les appareils de contrôle automatique permettant la constatation des excès de vitesse et des franchissements de feu rouge ainsi que la verbalisation de ces infractions ont contribué de manière importante à l'amélioration de la sécurité sur les routes de France. Aujourd'hui, le parc de radars automatiques est constitué de 4 200 radars dont 3 050 à poste fixe (hors mobiles et déplaçables). A la fin de l'année 2021, le nombre de radars sera constitué de 4 700 équipements. Selon l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), le système de contrôle sanction automatisé a entraîné une baisse des vitesses moyennes pratiquées, ce qui a entraîné une baisse moyenne des accidents mortels à proximité des radars de 66 %. Ainsi, en 10 ans, entre 2003 et 2012, les radars auraient permis de sauver 23 000 vies. Le dispositif de contrôle sanction automatisé permet, outre la constatation de certaines infractions au code de la route, d'identifier le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule concerné et de gérer les opérations relatives aux avis de contravention correspondant et le traitement judiciaire des contestations.

Juridiquement, l'article L. 130-9 du code de la route prévoit que les constatations effectuées par ou à partir d'appareils de contrôle automatique, ayant fait l'objet d'une homologation, font foi jusqu'à preuve du contraire et peuvent faire l'objet d'un procès-verbal revêtu d'une signature manuelle numérisée. Les infractions constatables sans interception par ce moyen sont prévues à l'article R. 130-11 du code de la route. Les articles 529 et suivants du code de procédure pénale organisent la procédure de l'amende forfaitaire qui s'applique notamment lorsque les infractions sont constatées sans interception. Par ailleurs, ce dispositif est régi par l'arrêté du 13 octobre 2004 portant création du système de contrôle automatisé.

Le développement, l'homologation, l'acquisition, l'installation et la maintenance de ces équipements sont depuis 2003 assurés exclusivement par les services de l'État, conformément à l'article 11 du décret du 12 août 2013 modifié portant organisation de l'administration centrale du ministère de l'intérieur.

Le traitement des infractions constatées par ces appareils est réalisé, sous le contrôle du procureur de la République de Rennes, par les agents du centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR), armé par des policiers et des gendarmes, ainsi que par le service de l'officier du ministère public (OMP) spécialement affecté au centre national de traitement des infractions (CNT).

La décision d'implanter ou d'utiliser des radars n'est jamais prise en considération d'intérêts financiers, mais uniquement pour contribuer à la réduction des morts et des blessés sur les routes. Ainsi, une étude est réalisée au préalable de l'implantation d'un radar sur les vitesses pratiquées, l'accidentologie et le contexte environnant pour éviter les mécanismes d'évitement et pour voir si une approche plus globale et avec d'autres dispositifs alternatifs ou complémentaires est possible (ralentisseurs, marquages, feux rouges, signalisation...).

Les agents verbalisateurs des collectivités territoriales (agents de police municipale, gardes champêtres et agents chargés de la surveillance de la voie publique) peuvent constater, en fonction de leur champ de compétences, tout ou partie des infractions contraventionnelles prévues par le code de la route. Toutefois, les moyens d'action dont disposent aujourd'hui les collectivités territoriales pour automatiser la lutte contre l'insécurité routière sont juridiquement limités. En effet, s'ils peuvent utiliser la vidéo-protection, ils ne peuvent pas déployer à leur initiative des appareils de contrôle automatique tel que souligné par le rapport d'information du Sénat sur la politique d'implantation des radars du 18 juillet 2017.

Les collectivités territoriales sont des acteurs majeurs de la sécurité routière au niveau local. Elles disposent de compétences propres en la matière. Elles assurent, d'une part, la gestion des infrastructures routières qui comprennent notamment les appareils de contrôles automatiques, et disposent, d'autre part, de compétences en matière de police de circulation, qui visent à assurer la sécurité et la commodité de passage sur les voies publiques. À ce titre, le maire dispose, conformément aux articles L. 411-1, R. 411-4, R 411-8 du code de la route et L. 2213-1-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), de la faculté d'abaisser la vitesse maximale autorisée sur les routes qui relèvent de sa compétence. Il est ainsi le mieux placé pour juger le bien-fondé de l'implantation d'un radar sur le territoire de sa commune.

L'action de police judiciaire des agents de police municipale et des gardes champêtres, effectuée sous le contrôle du procureur de la République localement compétent, constitue un vecteur de proximité et facilite la mise en oeuvre d'une politique pénale au plus près des particularités du ressort en termes de sécurité routière, par l'intermédiaire de l'OMP.

Selon le document de politique transversale relatif à la sécurité routière publié en annexe du projet de loi de finances (PLF) pour 2021, l'État a consacré en 2019 3,7 milliards d'euros à la politique de sécurité routière et le coût total des 56 016 accidents corporels survenus l'an passé est estimé, quant à lui, à 39,7 milliards d'euros

Enfin, en termes de produit des amendes, un compte d'affectation spéciale (CAS) existe afin de retracer la répartition du produit des amendes issues du contrôle automatisé et le produit des autres amendes forfaitaires de la police de la circulation. Ce compte a reçu, en 2019, 1,65 milliards d'euros dont 760 M€, proviennent des amendes liées au contrôle automatisé. Le reste de la somme, 889 M€, constitue le produit des amendes de stationnement et des contraventions. En plus des 13,2% affectés au désendettement de l'Etat, les recettes générées par les radars en 2019 ont été réparties entre quatre destinataires :

- l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) : 231 M€ ;

- les collectivités territoriales : 120 M€ ;

- l'entretien des radars et le fichier national du permis de conduire : 283 M€ ;

- le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) : 26 M€.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les collectivités territoriales sont des acteurs majeurs de la sécurité routière au niveau local. Elles disposent de compétences propres en la matière. Elles assurent, d'une part, la gestion des infrastructures routières qui comprennent notamment les appareils de contrôles automatiques, et disposent, d'autre part, de compétences en matière de police de circulation, qui visent à assurer la sécurité et la commodité de passage sur les voies publiques. À ce titre, le maire dispose de la faculté d'abaisser la vitesse maximale autorisée sur les routes qui relèvent de sa compétence. Il est ainsi le mieux placé pour juger le bien-fondé de l'implantation d'un radar sur le territoire de sa commune.

L'action de police judiciaire des agents de police municipale et des gardes champêtres, effectuée sous le contrôle du procureur de la République localement compétent, constitue un vecteur de proximité et facilite la mise en oeuvre d'une politique pénale au plus près des particularités du ressort en termes de sécurité routière, par l'intermédiaire de l'OMP.

Il est nécessaire de recourir à la loi afin d'ajouter l'installation des appareils de contrôle automatique parmi les compétences des collectivités territoriales et de leurs groupements et permettre aux agents de police municipale ou gardes champêtres de procéder au traitement des constatations effectuées par ces appareils.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le contrôle sanction automatisé est un des outils privilégiés permettant de répondre à l'objectif d'une meilleure sécurité routière. La mobilisation de cet outil par les collectivités territoriales devrait permettre de mieux lutter contre l'insécurité routière au niveau local.

Les objectifs visés sont principalement une diminution de l'accidentalité, en améliorant le respect des prescriptions du code de la route. La constatation sans interception permet d'augmenter de manière significative la probabilité pour les usagers de la route d'être contrôlés, ce qui influence durablement leur comportement et permet de lutter plus efficacement contre la plupart des grandes causes d'accidentalité et de mortalité routière.

Par ailleurs, la possibilité donnée aux collectivités territoriales d'implanter des appareils de contrôle automatique offre de nouvelles possibilités aux agents verbalisateurs des communes qui pourront concentrer les actions sur des opérations telles que celles de dépistage des conduites sous l'influence de l'alcool ou après usage de stupéfiants, pour lesquels une interception du conducteur est toujours nécessaire.

3. DISPOSITIF RETENU

La mesure envisagée vise à permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'installer des appareils de contrôle automatique ayant fait l'objet d'une homologation. Ils pourraient décider du nombre et des lieux d'implantation de ces équipements sur leur territoire en prenant en compte les critères d'accidentalité et d'insécurité routière, et après concertation associant notamment les services territoriaux de l'Etat. Le traitement des infractions constatées par ces équipements serait assuré par des policiers municipaux affectés dans des centres locaux de traitement. Le coût de cette mesure sera limité pour les collectivités territoriales dans la mesure où les équipes des collectivités sont déjà mobilisées dans les actuels centres de supervision urbaine (CSU) et les unités de vidéo-verbalisation (UVV) pour améliorer la sécurité routière par l'intermédiaire des caméras de vidéo-protection.

Les conditions d'installation des appareils de contrôle automatique décidées par les collectivités territoriales ou leurs groupements seront définies par décret en Conseil d'État.

En termes d'acquisition, ces dispositions n'auraient aucun impact sur les prérogatives de l'État, qui conserverait la gestion des appareils de contrôle automatique installés à son initiative.

Cette évolution maintient la capacité de l'État à poursuivre sa politique de lutte contre l'insécurité routière, en conservant sa capacité à financer et à décider, après concertation locale, des lieux d'installation d'appareils de contrôle automatique comme c'est le cas depuis 2003, sur la base de critères exclusivement liés à l'accidentalité et à la mortalité routière.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La mesure envisagée modifie l'article L. 130-9 du code de la route.

Les infractions constatables sans interception par ce moyen sont prévues à l'article R. 130-11 du code de la route.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

En termes d'acquisition, ces dispositions n'auraient aucun impact sur les prérogatives de l'État, qui conserverait la gestion des appareils de contrôle automatique installés à son initiative .

Un mécanisme de versement du produit des amendes à la collectivité territoriale qui a décidé de l'implantation de l'équipement , après déduction des dépenses laissées à la charge de l'Etat notamment pour le recouvrement des amendes, pourrait être envisagé. Celui-ci nécessiterait la création d'une troisième section au Compte d'affectation spéciale (CAS) « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » en loi de finances.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les conditions d'installation des appareils de contrôle automatique décidées par les collectivités territoriales ou leurs groupements seront définies par décret en Conseil d'État.

Aujourd'hui, le parc de radars automatiques est constitué de 4 200 radars parmi lesquels 116 sont situés sur des voies communales. Les infractions constatées par un appareil de contrôle automatique sont respectivement traitées par le CACIR qui assure la gestion des contraventions (environ 35 agents) et le CNT qui assure notamment l'édition et l'envoi postal ou électronique des avis . Un appareil de contrôle peut constater entre 10 et 30 infractions par jour.

Ces collectivités ou groupements devront, à tout le moins, mobiliser les agents de police municipale (25 500 agents) ou les gardes champêtres (900 agents), en charge du traitement des constatations effectuées par les appareils installés à leur initiative. Les agents déjà en fonction dans les centres de supervision urbaine et dans les unités de vidéo-verbalisation seront mobilisés.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Permettre aux collectivités territoriales de décider de l'implantation des radars permet de lutter contre l'insécurité car ceux-ci contribuent à la baisse de l'accidentalité et de la mortalité sur les routes. Selon l'ONISR, la mise en place du contrôle sanction automatisé a permis de diminuer le nombre d'accident mortel à proximité de 66 %. En 10 ans, entre 2003 et 2012, les radars ont permis de sauver 23 000 vies.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLCATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'appliquera à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des collectivités d'Outre-mer.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'État précisera les conditions d'installation des appareils de contrôle automatique par les collectivités territoriales ou leurs groupements et les modalités de traitement des constatations effectuées par ces appareils par les agents de police municipale ou les gardes champêtres.

Article 11 - Mesures relatives aux sanctions sur le domaine public fluvial

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. MAJORATION DE LA REDEVANCE DUE EN CAS D'INSTALLATION IRRÉGULIÈRE D'OUVRAGES DE PRISE ET DE REJET D'EAU

Voies navigables de France est un établissement public à caractère administratif chargé notamment de la gestion des voies navigables qui lui sont confiées, soit environ 6 700 km, pour permettre le développement du transport fluvial (article L. 4311-1 du code des transports). Les ressources de l'établissement permettant d'assurer ces missions se composent de la subvention pour charge de service public (SCSP) de l'Etat, de subventions d'investissement de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) et de ses ressources propres. Parmi ses ressources propres, par ordre décroissant de recettes se trouvent, (i) la redevance de prise et de rejet d'eau, (ii) les redevances d'occupation domaniales, (iii) les péages de navigation et (iv) les autres recettes de valorisation dont les recettes liées à l'énergie hydroélectrique.

Ces redevances représentent près de 30% des recettes de fonctionnement de l'établissement et revêtent par conséquent un intérêt stratégique pour l'établissement, nécessitant leur acquittement par les redevables.

La redevance de prise et de rejet d'eau représente 22% des ressources de VNF, soit 127,5 millions d'euros par an. Elle est perçue auprès des titulaires d'ouvrages prélevant et rejetant de l'eau dans le domaine public fluvial confié à VNF et se compose d'une part fixe (l'emprise des installations) et d'une part variable (les volumes d'eau prélevables ou rejetables par ces installations).

L'article R. 4316-8 du code des transports prévoit qu'en cas d'installation irrégulière d'ouvrages de prise ou de rejet d'eau ou de modification des ouvrages sans autorisation, la redevance est majorée dans la limite de 100% des sommes éludées, sans pouvoir excéder le montant maximal prévu à l'article 131-13 du code pénal en matière de peines contraventionnelles. Cette limitation réduit la portée de cette sanction.

1.2. AJOUT D'UNE SANCTION À L'INTERDICTION DE DÉPÔT ET DE DÉGRADATION DU DOMAINE PUBLIC FLUVIAL

La contravention de grande voirie relative au dépôt et à la dégradation du domaine public fluvial, prévu à l'article L. 2132-10 du code général de la propriété des personnes publiques, n'est pas assortie de sanction rendant cette interdiction efficace.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. MAJORATION DE LA REDEVANCE DUE EN CAS D'INSTALLATIONS IRRÉGULIÈRES D'OUVRAGES DE PRISE ET DE REJET D'EAU

Cette mesure a pour objet de prévoir, au niveau législatif, une majoration de la redevance due, sans plafond, afin de pouvoir écarter le seuil fixé par le code pénal et qui vient limiter les sanctions administratives pécuniaires en l'absence de dispositions législatives contraires. Ce plafond actuel, de 1 500 €, est d'un montant dérisoire comparé au rendement de la redevance et ne permet pas une gestion optimale du domaine public.

L'objectif de cette mesure est de rendre cette sanction réellement dissuasive et ainsi empêcher l'installation irrégulière d'ouvrages ou la modification des ouvrages sans autorisation.

2.2. AJOUT D'UNE SANCTION À L'INTERDICTION DE DÉPÔT ET DE DÉGRADATION DU DOMAINE PUBLIC FLUVIAL

L'absence de sanction rend l'interdiction de dépôt sauvage et de dégradation du domaine public fluvial inefficace et ne protège pas le domaine public fluvial.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

Le recours à la loi étant nécessaire pour supprimer le plafond limitant la majoration de la redevance due et pour prévoir une sanction à une contravention de grande voirie, aucune autre option n'est envisageable pour atteindre les objectifs poursuivis.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Il est proposé d'insérer un nouvel article L. 4316-12 au chapitre VI du titre premier du livre III de la quatrième partie (partie législative) du code des transports. Il sera nécessaire de modifier par la suite l'article R. 4316-8 de ce code qui prévoit le plafond de la majoration de la redevance due par référence aux dispositions du code pénal.

Il est proposé de compléter l'article L. 2132-10 du code général de la propriété des personnes publiques instituant la contravention de grande voirie relative au dépôt et à la dégradation du domaine public fluvial par l'ajout d'une amende et d'une obligation de remise en état.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Majoration de la redevance due en cas d'installation irrégulière d'ouvrages de prise et de rejet d'eau

L'impact financier concerne principalement VNF, compte tenu du champ d'application de la disposition restreint à cet acteur. La disposition emporte en pratique des effets sur les redevables de la redevance hydraulique ne respectant pas les obligations légales et réglementaires.

4.2.2. Ajout d'une sanction à l'interdiction de dépôt et de dégradation du domaine public fluvial

Cette mesure n'a pas pour objectif de générer des ressources mais d'assurer un meilleur respect des dispositions légales.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Ces mesures de renforcement des protections du domaine public fluvial sous l'égide de VNF peuvent avoir un effet indirect sur les collectivités territoriales dans le cadre de leurs politiques de lutte contre les dépôts sauvages de déchets ainsi que des mesures prises pour la protection des milieux aquatiques.

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les sanctions proposées visent à assurer le respect du droit d'occupation domanial du domaine public fluvial et donc à protéger ce domaine, la ressource en eau et le milieu naturel.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Les dispositions ont fait l'objet d'un avis favorable du conseil d'administration de VNF du 15 janvier 2021 et de la mission interministérielle de l'eau à l'issue de la consultation électronique réalisée entre le 28 janvier et le 11 février 2021.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions sont applicables sur l'ensemble du domaine public fluvial navigable confié à VNF. Ce domaine est exclusivement situé sur le territoire métropolitain.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat devra être adopté afin de supprimer la référence aux peines contraventionnelles, plafonnant la majoration de la redevance due, prévue à l'article R.4316-8 du code des transports.

CHAPITRE III - LA LUTTE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ET PRÉSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ

Article 12 : Réforme de la gouvernance de l'ADEME et délégation d'une partie du fonds chaleur et du fonds économie circulaire de l'ADEME

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

1.1.1. Gouvernance de l'ADEME

L'ADEME, dénommée l'agence de la transition écologique, est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial créé en 1991 32 ( * ) et placé sous la tutelle du ministère de la transition écologique et du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Elle mène des actions d'orientation et d'animation de la recherche, de prestation de services, d'information et d'incitation en vertu de l'article L. 131-3 du code de l'environnement, ainsi que des actions transversales (production et consommation durable, villes et territoires durables).

L'ADEME s'est dotée d'une nouvelle organisation de ses aides financières réparties en quatre familles (aides à la réalisation, à la connaissance, au changement de comportement et aides dans le cadre de contrats d'objectifs) couvrant l'ensemble des domaines de soutien à la transition énergétique et écologique : la réduction des consommations d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre, le développement des énergies renouvelables et de l'économie circulaire, la reconversion des friches et des sites pollués ainsi que l'amélioration de la qualité de l'air intérieur et extérieur.

En 2019 33 ( * ) , 576 M€ d'aides ont été attribuées par l'agence sur son budget en soutien à 4 000 opérations dans les territoires auxquels s'ajoutent 141 M€ au titre du programme d'investissement d'avenir sur 58 opérations. 78% concernent des aides à la réalisation, soit 449 M€ permettant d'accompagner des études de projets et d'investissements pour un total de 2,4 Md€ d'investissement sur les projets aidés.

L'année 2019 a été marquée par la poursuite de l'augmentation des engagements sur le fonds chaleur, passant de 197 M€ en 2017 à un budget exécuté de 295 M€ en 2019. Ce programme finance principalement, à hauteur de 274 M€ en 2019, les investissements de production et de distribution de chaleur renouvelable et de récupération, majoritairement sous forme de réseaux de chaleur et de chaufferies biomasse (notamment dans le cadre de l'appel à projet Biomasse-Chaleur-Industrie-Agriculture-Tertiaire), mais aussi d'équipements de valorisation biogaz par injection au réseau dont le nombre d'opérations a significativement augmenté, Le fonds chaleur a également été mobilisé sur le solaire thermique et les opérations de récupération de chaleur fatale.

Dans le domaine de l'économie circulaire, l'action de l'ADEME s'est déclinée sur le soutien à la prévention des déchets et l'animation des territoires à hauteur de 40 M€ et le soutien aux investissements publics et privés, à hauteur de près de 51 M€, le soutien à la valorisation des déchets organiques pour 22 M€ et diverses actions de soutien à l'économie circulaire à hauteur de 13 M€. 20 M€ ont été engagés pour les études, le développement de l'expertise, les aides à la décision et les actions de formation, ainsi que la campagne nationale de communication vers le grand public. L'Outre-mer et la Corse ont fait l'objet d'un soutien de rattrapage structurel pour plus de 17 M€.

L'agence poursuit également son appui aux collectivités territoriales dans les démarches énergie/climat dans le cadre des plans climat air énergie territoriaux ou des contrats de transition écologique et conforte son engagement dans des actions de communication et de formation dans les territoires (assises européennes de la transition énergétique, assises nationales des énergies renouvelables citoyennes, rencontres régionales économie circulaire-déchets).

Par ailleurs, dans le cadre du plan France Relance, l'État a alloué 1,2 Md€ à l'ADEME, en collaboration avec l'Agence des services de paiements, pour soutenir et accompagner la réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur industriel, en renforcement de l'intervention des fonds chaleur et économie circulaire. Les 16 premiers projets lauréats soutenus fin 2020 représentent un investissement total de 291 M€ à l'échelle nationale. Ils bénéficieront d'une aide totale de 60,7 M€ d'aide à l'investissement du fonds décarbonation pour l'industrie. Ce dispositif sera poursuivi sur 2021.

En application de l'article L. 131-3 du code de l'environnement, l'agence intervient plus particulièrement dans les domaines suivants : « 1° La prévention et la lutte contre la pollution de l'air ; 2° La prévention de la production de déchets, dont la lutte contre le gaspillage alimentaire ; la gestion des déchets ; la transition vers l'économie circulaire ; la protection des sols et la remise en état des sites pollués ; 3° Le réaménagement et la surveillance d'une installation de stockage de déchets ultimes autorisée après le 14 juillet 1992, lorsque ces opérations sont rendues nécessaires du fait d'une défaillance ou d'une insuffisance des garanties de l'exploitant ; 4° La réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale ; 5° Le développement des technologies propres et économes ; 6° La lutte contre les nuisances sonores ; 7° La lutte contre le réchauffement climatique et l'adaptation au changement climatique » . Ses attributions ont été récemment renforcées dans le domaine des déchets par la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire puisqu'elle assure désormais le suivi et l'observation des filières à responsabilité élargie du producteur au sens de l'article L. 131-3 du code de l'environnement.

L'article L. 131-4 du code de l'environnement prévoit que le conseil d'administration de l'ADEME est composé de représentants de l'État et de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), d'un député et d'un sénateur, de représentants de collectivités territoriales, de personnalités qualifiées, de représentants d'associations de protection de l'environnement, agréées au titre de l'article L. 141-1 du même code , de représentants de groupements professionnels intéressés et de représentants du personnel dans les conditions définies au deuxième alinéa de l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

L'article R. 131-4 du code de l'environnement précise que l'agence est administrée par un conseil d'administration de vingt-sept membres comprenant notamment « trois représentants des collectivités territoriales nommés par décret pris sur le rapport des ministres de tutelle, après avis du ministre chargé des collectivités territoriales ».

Le rôle du conseil d'administration de l'ADEME est de régler les affaires de l'agence. Ses délibérations fixent notamment « les conditions générales d'attribution de subventions ou d'avances remboursables aux personnes publiques ou privées » conformément à l'article R. 131-9 du code de l'environnement. Le conseil d'administration a donc de larges attributions.

1.1.2. Fonds chaleur et fonds économie circulaire de l'ADEME

L'article L. 131-6 du code de l'environnement permet à l'ADEME d'attribuer des subventions et d'accorder des avances remboursables aux personnes publiques et privées. C'est dans ce cadre que s'inscrivent le « fonds chaleur » et le « fonds économie circulaire » gérés par l'agence depuis 2009.

Le « fonds économie circulaire » est consacré au soutien des opérations s'inscrivant dans les objectifs de la politique « déchets » définis par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Il peut soutenir des opérations dans le domaine de l'écologie industrielle et territoriale, la commande publique durable, l'allongement de la durée de vie et l'éco-conception des produits, ou encore la lutte contre le gaspillage alimentaire. Il a été doté de 1,6 milliard d'euros depuis 2009. Par rapport à 2019 et 2020 et une dotation du fonds à hauteur de 164 millions d'euros le niveau d'engagement du « fonds économie circulaire », abondé par les crédits du plan de relance, est doublé en loi de finances pour 2021 pour atteindre à 360 millions d'euros. Une part de l'ensemble des taxes générales sur les activités polluantes est reversée à l'ADEME pour soutenir les projets.

Le « fonds chaleur », prévu par la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, contribue aux objectifs du paquet européen énergie-climat, qui consiste à porter la part des énergies renouvelables à 23% de la consommation énergétique nationale d'ici à 2020. Destiné à l'habitat collectif, aux collectivités territoriales et aux entreprises, il permet de soutenir le développement de la valorisation énergétique des déchets non recyclables (réseau de chaleur associé à une unité de valorisation énergétique, méthanisation avec injection de biogaz dans le réseau, etc.).

Les aides financières attribuées dans le cadre de ces fonds peuvent être instruites et décidées soit « au fil de l'eau », soit dans le cadre d'appels à projets nationaux ou régionaux. Elles s'accompagnent, d'un point de vue qualitatif, de conseil ou d'aide à la réalisation des projets.

Elles sont octroyées via les directions régionales de l'agence. L'attribution est formalisée par la signature d'un contrat de financement sous forme d'une décision ou d'une convention de financement.

Elles peuvent être associées à des aides d'autres financeurs, notamment celles de la région dans le cadre des contrats de plan État-régions (CPER) 34 ( * ) - (exemples : aides de l'ADEME issues du « fonds économie circulaire » et financements régionaux dans le cadre du volet « transition énergétique et écologique » du CPER).

En matière de transition écologique, les régions ont vu leur rôle s'étoffer depuis 2015. La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) prévoit, à l'exception de la région Ile-de-France, des régions d'outre-mer et des collectivités territoriales à statut particulier, que la région est chargée d'élaborer le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), qui regroupe plusieurs documents dans lesquels il est notamment question de cohérence écologique (transports, climat-air-énergie, déchets, etc.). L'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que le SRADDET « fixe les objectifs de moyen et long termes sur le territoire de la région en matière [...], de maîtrise et de valorisation de l'énergie [...], de prévention et de gestion des déchets ». Ce schéma intègre notamment le plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD) sauf en Ile-de-France, en Corse et dans les régions d'Outre-Mer.

La loi NOTRe a également renforcé le rôle des régions en matière d'économie circulaire. L'ADEME définit cette économie circulaire comme étant un « système économique d'échange et de production qui, à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l'efficacité de l'utilisation des ressources et à diminuer les impacts sur l'environnement tout en permettant le bien-être des individus » . « L'économie circulaire doit viser globalement à diminuer drastiquement le gaspillage des ressources afin de découpler la consommation des ressources de la croissance du PIB tout en assurant la réduction des impacts environnementaux et l'augmentation du bien-être. Il s'agit de faire plus et mieux avec moins. ». L'article L. 541-13-1 du code de l'environnement dispose que chaque région est couverte par un PRPGD qui comprend un plan régional d'action en faveur de l'économie circulaire. L'intégration de ce plan d'action dans le document marque la volonté du législateur d'instaurer un pilotage régional de la transition vers une économie circulaire 35 ( * ) .

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (TECV) a réaffirmé le rôle de chef de file de la région dans le domaine de l'efficacité énergétique. L'article 188 de la loi précitée prévoit que la région constitue « l'échelon pertinent pour coordonner les études, diffuser l'information et promouvoir les actions en matière d'efficacité énergétique ». La région est ainsi chargée notamment d'élaborer un schéma régional du climat, de l'air et de l'énergie, un programme régional pour l'efficacité énergétique et un schéma régional biomasse (articles L. 222-2 à L. 222-3 du code de l'environnement).

La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC) est venue réaffirmer cette compétence en matière d'économie circulaire en ajoutant aux missions des régions énumérées par l'article L. 4211-1 du CGCT : « la coordination et l'animation des actions conduites par les différents acteurs en matière d'économie circulaire, notamment en matière d'écologie industrielle et territoriale ».

La loi AGEC a également complété les attributions du schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation prévu à l'article L. 4251-13 du code précité qui doit définir « les orientations en matière de développement de l'économie circulaire, notamment en matière d'écologie industrielle et territoriale ».

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. La détermination de nouvelles compétences pour les collectivités territoriales et leurs groupements ressort donc du domaine de la loi. Par ailleurs, l'ADEME est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial régi par les articles L. 131-3 et suivants du code de l'environnement. Le Conseil d'État a pu rappeler dans sa jurisprudence 36 ( * ) que l'ADEME constitue à elle seule une catégorie d'établissement public au sens de l'article 34 de la Constitution, ce qui implique que ses règles constitutives ne peuvent pas être modifiées par le pouvoir réglementaire et qu'il s'ensuit que seul le législateur peut compétemment les modifier.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

2.1.1. Gouvernance de l'ADEME

S'agissant de l'évolution de la représentation des collectivités territoriales et de leurs groupements au sein du conseil d'administration de l'ADEME, l'article L. 131-4 du code de l'environnement prévoit que ce conseil inclut des représentants des collectivités territoriales mais pas des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

Le législateur a pourtant confié de larges compétences aux EPCI à fiscalité propre dans les champs dans lesquels l'agence opère.

L'article L. 2224-13 du CGCT prévoit que les communes et leurs groupements ont en charge l'organisation et la réalisation du service public d'élimination des déchets ménagers.

En application des articles L. 2224-13 et suivants du CGCT, les compétences de collecte et de traitement des déchets des ménages et assimilés, au sens des articles L. 2224-13 et L. 2224-14 du même code, constituent une compétence obligatoire des EPCI à fiscalité propre (5° du I du L. 5214-16, 7° du I du L. 5216-5, 6° du I du L. 5215-20, 6° du I du L. 5217-2) et de la métropole de Lyon, collectivité à statut particulier (6° du I du L. 3641-1).

Les collectivités territoriales ou leurs groupements, qui sont responsables de la collecte ou du traitement des déchets ménagers et assimilés, doivent par ailleurs définir un programme local de prévention des déchets ménagers et assimilés indiquant les objectifs de réduction des quantités de déchets et les mesures mises en place pour les atteindre au sens de l'article L. 541-15-1 du code de l'environnement.

Enfin, en vertu de l'article L. 2224-32 du CGCT, les communes, sur leur territoire, et les EPCI, sur le territoire des communes qui en sont membres, peuvent aménager, exploiter, faire aménager et faire exploiter dans les conditions prévues par le présent code toute nouvelle installation de valorisation énergétique des déchets ménagers ou assimilés mentionnés aux articles L. 2224-13 et L. 2224-14 du même code.

Si les communautés de communes et les communautés d'agglomération disposent respectivement aux articles L. 5214-16 et L. 5216-5 du CGCT d'une compétence facultative de soutien aux actions de maîtrise de la demande d'énergie, les communautés urbaines et les métropoles disposent aux articles L. 5215-20 et L. 5217-2 du même code d'un panel de compétences bien plus intégrées encore, étant par exemple obligatoirement compétentes en matière de lutte contre la pollution de l'air, de lutte contre les nuisances sonores, de contribution à la transition énergétique ou de la création et de l'entretien de réseaux de chaleur et de froid au sens de l'article L. 2224-38 du CGCT.

Il est en outre rappelé qu'en vertu de l'article L. 229-26 du code de l'environnement, les EPCI à fiscalité propre doivent avoir adopté, au seuil de 20 000 habitants, un plan climat air énergie territorial (PCAET), lequel leur confère, notamment, la qualité de coordinateurs de la transition énergétique au plan local en application de l'article L. 2224-34 du CGCT.

La mesure vise donc à venir reconnaître que les EPCI à fiscalité propre, sont, au regard des compétences qu'ils exercent, au coeur de missions de l'ADEME, comme membres du conseil d'administration de l'établissement public.

2.1.2. Fonds chaleur et fonds économie circulaire de l'ADEME

La concertation, organisée dans les territoires entre décembre 2019 et mars 2020 par la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la répartition et l'exercice des compétences entre l'État et les collectivités territoriales, a fait émerger le besoin de renforcer les compétences des régions en matière d'économie circulaire et d'énergie renouvelable dans le fil des préoccupations qui ont été exprimées par Territoires Unis en vue de renforcer la subsidiarité et l'action dans les territoires, au plus proche de nos concitoyens.

En effet, la région dispose de moyens limités dans les domaines de l'énergie et de l'économie circulaire alors qu'elle est chef de file au sens de l'article L. 1111-9 du CGCT.

Par ailleurs, la région joue déjà un rôle important dans le financement des projets dans ces domaines, notamment au travers des CPER.

Le rôle des régions dans ces fonds doit donc être affirmé puisqu'elles apportent déjà leur concours à certains projets et qu'elles sont chefs de file sur ces sujets.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

2.2.1. Gouvernance de l'ADEME

L'objectif de cette disposition est de donner une place aux EPCI à fiscalité propre dans le conseil d'administration de l'ADEME.

Ils apporteront ainsi leur expertise, issue de leur pratique sur le terrain, de la mise en oeuvre des politiques publiques en complément de celles des autres collectivités membres, notamment des régions.

Cette disposition vise également à augmenter la collaboration et la coordination entre l'ADEME et les EPCI à fiscalité propre.

Enfin, elle répond à la demande des associations d'élus (Association des petites villes de France - APVF, Villes de France et Assemblée des communautés de France - AdCF) de siéger au conseil d'administration de l'ADEME.

2.2.2. Fonds chaleur et fonds économie circulaire de l'ADEME

La délégation d'une partie des crédits du « fonds économie circulaire » et du « fonds chaleur » de l'ADEME aux régions, à hauteur de 1/5 du montant total des deux fonds gérés par l'agence, renforcera la capacité d'accompagnement de ces dernières en faveur de projets innovants à l'échelle de leur territoire dans les domaines de l'économie circulaire et de la chaleur renouvelable, en favorisant les synergies avec la planification des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires, lesquels intègrent les composantes sectorielles de l'économie circulaire et de l'énergie, l'Île-de-France, la Corse et les régions Outre-mer étant pour leur part régies par des dispositions légales spécifiques en matière de planification, visant cependant les mêmes finalités.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Gouvernance de l'ADEME

L'ajout des EPCI à fiscalité propre comme membres du conseil d'administration de l'ADEME est l'option envisagée. En effet, les EPCI sont les seules entités, représentant les collectivités, manquantes parmi les membres du conseil d'administration.

3.1.2. Fonds chaleur et fonds économie circulaire de l'ADEME

La forme la plus aboutie serait celle de la décentralisation du « fonds chaleur » et du « fonds économie circulaire » de l'ADEME aux régions. La décentralisation donnerait l'autonomie la plus totale aux régions. Cette option n'est pas toutefois souhaitable puisque l'ADEME bénéficie d'une expertise reconnue dans le domaine des déchets et de l'énergie, ainsi que dans l'accompagnement aux projets, et que l'efficacité de sa gestion des fonds n'est pas remise en cause.

Une deuxième option pourrait être une délégation de gestion obligatoire aux régions d'une partie des fonds « chaleur » et « économie circulaire ». Cette option heurte cependant le principe même de liberté contractuelle entre personnes publiques, qui préside à la délégation en organisant, entre délégant et délégataire, les modalités de sa déclinaison opérationnelle, ses objectifs, sa durée et les moyens qui lui sont consentis.

Aussi, l'option alternative est celle de s'appuyer sur un dispositif plus classique de délégation de gestion par l'Agence à la demande des régions, par un contrat conclu entre les parties.

3.2. OPTION RETENUE

3.2.1. Gouvernance de l'ADEME

La composition du conseil d'administration de l'ADEME étant prévue par l'article L. 131-4 du code de l'environnement, une modification de cet article requiert une disposition législative. Le présent projet de loi en constitue le vecteur législatif.

L'article L. 131-4, dans sa rédaction actuelle, prévoit à son 3° que le conseil d'administration est composé « de représentants de collectivités territoriales » . Le projet de loi vient ajouter à la fin du 3° la phrase « et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre » . Le nombre de représentants pour ce collège resterait de trois.

3.2.2. Fonds chaleur et fonds économie circulaire de l'ADEME

L'option retenue est celle d'une délégation de gestion à la demande des régions des crédits de l'ADEME destinés au « fonds chaleur » et au « fonds économie circulaire ». Cette option vise à conforter leur rôle de chef de file en matière d'efficacité énergétique et d'économie circulaire et à leur donner davantage de responsabilités en matière d'économie circulaire et de chaleur renouvelable. Cette délégation concernera donc toutes les régions afin d'assurer l'homogénéité entre les territoires.

Cette délégation s'inspire de ce qui a été prévu par le législateur lors de la délégation de la gestion des fonds européens par l'article 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) qui prévoit que « l'État confie aux régions ou, le cas échéant, pour des programmes opérationnels interrégionaux, à des groupements d'intérêt public mis en place par plusieurs régions, à leur demande, tout ou partie de la gestion des programmes européens soit en qualité d'autorité de gestion, soit par délégation de gestion » .

Elle induit un conventionnement à l'instar de la délégation des aides à la pierre par l'Etat aux EPCI à fiscalité propre en vertu de l'article L. 301-5-1 du code de la construction et de l'habitation. Le contrat fixera notamment la durée, le montant du financement délégué à la région, les critères d'attribution des aides, les objectifs à atteindre et le règlement des charges de cette délégation.

Le contrat est de longue date un instrument de la décentralisation, qu'il s'agisse de conférer des moyens aux collectivités territoriales et à leurs groupements, d'organiser la gestion concertée de politiques publiques (contrats de ville, contrats locaux de sécurité, conventions territoriales d'exercice concerté des compétences) ou encore de confier des compétences nouvelles aux collectivités territoriales et à leurs groupements (conventions de délégation de compétences, notamment en matière d'attribution d'aides au logement).

S'agissant de la conduite de la politique énergétique, la décentralisation contractuelle est une méthode particulièrement adaptée. Elle permet en effet d'assurer l'indispensable conciliation entre deux objectifs : il s'agit, d'une part, de répondre au souhait des régions de disposer de nouveaux moyens d'intervention en matière de transition énergétique, tout en préservant, d'autre part, la nécessaire implication de l'Etat dans ce domaine majeur de la politique environnementale, qui engage sa responsabilité notamment sur le plan européen et international.

D'un côté, les régions bénéficieront de nouvelles responsabilités et de nouveaux moyens financiers. Elles attribueront des subventions et concours financiers dans des domaines où elles partagent leurs compétences avec l'Etat. Elles seront à même de déterminer les projets bénéficiant de ces aides et d'adapter ces choix aux besoins spécifiques de chaque territoire. Par sa flexibilité, la convention répond ainsi à la volonté de promouvoir la différenciation.

De l'autre côté, l'Etat, à travers l'ADEME, conservera un rôle essentiel de garant de la cohérence nationale des politiques publiques en matière d'énergie et d'économie circulaire. Il faut en effet rappeler que l'Etat est responsable de ses engagements européens et internationaux en matière de transition énergétique et de recyclage ou réemploi des déchets. A titre d'exemple, en matière d'énergies renouvelables, la directive 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 a fixé un objectif de 32% d'énergies renouvelables dans la consommation finale brute de l'Union européenne en 2030. L'outil de convention de transition énergétique régionale permet à l'Etat de rester partie prenante de la définition des objectifs à atteindre et de veiller à leur respect.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

S'agissant de la gouvernance de l'ADEME, l'article R. 131-4 du code de l'environnement prévoit que « trois représentants des collectivités territoriales sont nommés par décret pris sur le rapport des ministres de tutelle, après avis du ministre chargé des collectivités territoriales ». Cet article devra être modifié pour ajouter après le mot « territoriales » les mots « et leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ».

La délégation d'une partie des fonds susmentionnés requiert quant à elle d'ajouter un nouvel alinéa à la rédaction en vigueur de l'article L. 131-6 du code de l'environnement.

4.1.2. Impacts budgétaires

La délégation annuelle aux régions sera de 70 millions d'euros pour le « fonds chaleur » et de 30 millions d'euros pour le « fonds économie circulaire ».

Le règlement des charges afférentes à cette délégation sera précisé dans la convention entre l'ADEME et chaque région.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette disposition a un impact sur les trois niveaux de collectivités territoriales puisque les trois sièges prévus pour le conseil d'administration de l'ADEME devront être partagés avec les EPCI à fiscalité propre.

La délégation d'une part des fonds relevant de l'ADEME, qui sont les principaux postes d'intervention de l'agence, conforteront les compétences des régions en matière de transition énergétique et de coordination des actions en faveur de l'économie circulaire.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La gestion déléguée des fonds aura un impact sur les services des régions, pour l'expertise des dossiers. Le règlement des charges afférentes à cette délégation sera précisé dans la convention entre l'ADEME et chaque région. Aucun transfert de personnel de l'ADEME vers les régions n'est prévu.

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les actions menées par les régions en matière de transition écologique sont aujourd'hui très importantes. Leur confier de nouvelles compétences, telle que la gestion des « fonds chaleurs » et « économie circulaire », vise donner de la cohérence à leur action et à les inviter à poursuivre dans ces domaines.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La modification de la composition du conseil d'administration de l'agence au niveau des représentants des collectivités territoriales requerra un décret modifiant le décret n° 2009-603 du 28 mai 2009 relatif à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

La délégation des fonds est d'application immédiate.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'appliquera à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

S'agissant de l'intégration des représentants des EPCI à fiscalité propre, un décret en Conseil d'État est nécessaire pour gérer les équilibres au sein du conseil d'administration de l'ADEME. Les représentants des collectivités territoriales doivent ensuite être nommés par décret pris sur le rapport des ministres de tutelle, après avis du ministre chargé des collectivités territoriales.

Article 13 : Rôle des régions en matière de protection de la biodiversité

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La directive 92/43/CEE du Conseil de l'Europe du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite directive « Habitats-faune-flore », a mis en oeuvre un cadre commun pour la conservation des habitats, des plantes et des animaux d'intérêt communautaire.

Un réseau, baptisé « Natura 2000 », a ainsi été mis en place, constitué des zones spéciales de conservation définies par cette directive ainsi que des zones de protection spéciale créées par la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages, dite directive « Oiseaux », les deux catégories pouvant se superposer totalement ou partiellement.

Le réseau Natura 2000 est ainsi constitué d'un ensemble de sites naturels terrestres et marins, désignés en application de ces deux directives et des listes d'habitats et d'espèces qui leur sont annexées.

En application de l'article R.414-3 du code de l'environnement, le projet de désignation d'un site Natura 2000 est établi :

- par le ou les préfets de département lorsque le site s'étend exclusivement sur des espaces terrestres,

- ou par le préfet maritime lorsque le site s'étend exclusivement sur des espaces marins situés au-delà de la laisse de basse mer 37 ( * ) ,

- ou conjointement par le ou les préfets de département et le préfet maritime lorsque le site s'étend à la fois sur des espaces terrestres 38 ( * ) et des espaces marins 39 ( * ) ou lorsque le site s'étend exclusivement sur des espaces marins qui incluent l'estran 40 ( * ) .

En France, ce réseau représente 1760 41 ( * ) sites situés en métropole, couvrant environ 13% de la surface terrestre et 35% de la zone économique exclusive 42 ( * ) métropolitaines.

L'approche française de Natura 2000 vise à concilier la prise en compte des enjeux de préservation du patrimoine naturel avec les enjeux socio-économiques du territoire, en s'appuyant sur le développement d'une gouvernance locale. Un comité de pilotage local (COPIL) Natura 2000 43 ( * ) est ainsi chargé d'élaborer et suivre la mise en oeuvre du document d'objectifs (DOCOB) du site.

Outre la concertation, le modèle français est fondé sur la contractualisation des mesures de gestion au profit de la conservation des habitats et espèces d'intérêt communautaire. Ces mesures sont éligibles aux financements européens (fonds européen agricole pour le développement rural - FEADER, fonds européen de développement régional - FEDER et fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche - FEAMP).

Enfin la prévention des impacts est assurée par un dispositif réglementaire d'évaluation de l'incidence des projets sur la préservation des intérêts ayant justifié la désignation des sites Natura 2000.

L'état du droit national en la matière est le suivant :

La réglementation de ces sites Natura 2000 relève en droit français du Livre IV, titre 1er, chapitre IV du code de l'environnement (articles L. 414-1 et suivants et R. 414-1 et suivants, issus de l'ordonnance n° 2001-321 du 11 avril 2001 qui a transposé la directive Habitats en droit interne).

La désignation des sites : l'article R. 414-1 du code de l'environnement prévoit que le projet de désignation d'un site Natura 2000 soit établi par le préfet compétent qui soumet pour avis le projet de périmètre du site aux communes et EPCI concernés. Le dossier est ensuite transmis au ministère chargé de l'environnement. La désignation formelle des sites Natura 2000 (zone spéciale de conservation ou zone de protection spéciale) se traduit par un arrêté ministériel et une notification à la Commission européenne.

L'élaboration d'un document d'objectifs pour chaque site Natura 2000, suivi par un comité de pilotage présidé par un représentant des collectivités territoriales intéressées : les articles L. 414-2 et 3 du code de l'environnement prévoient que, pour chaque site, un COPIL est mis en place. Ce COPIL, convoqué par le préfet et dont la composition est également arrêtée par le préfet compétent (et qui comprend, conformément à l'article L. 414-2, « les collectivités territoriales intéressées et leurs groupements concernés ainsi que, notamment, des représentants de propriétaires, exploitants et utilisateurs des terrains et espaces inclus dans le site Natura 2000 ») est présidé par le représentant d'une des collectivités territoriales. Cette collectivité a également pour tâche d'élaborer, en partenariat avec les acteurs du territoire concernés, un DOCOB qui contient les mesures de conservation nécessaires au maintien ou au rétablissement des habitats naturels ou des populations des espèces pour lesquels le site est désigné. La collectivité territoriale assure enfin le suivi de la mise en oeuvre (ou « animation ») du site Natura 2000. Le DOCOB est approuvé par le préfet compétent. Si la collectivité territoriale ne soumet pas le projet de DOCOB dans les 2 ans qui suivent la création du COPIL, le préfet peut prendre en charge son élaboration. En l'absence de collectivité territoriale volontaire, le préfet assure la présidence du COPIL, élabore le DOCOB et anime le site.

Le COPIL suit la mise en oeuvre du DOCOB et soumet, en application de la partie réglementaire du code de l'environnement, au moins tous les trois ans un rapport qui retrace les mesures mises en oeuvre et les difficultés rencontrées, et indique, si nécessaire, les modifications du document de nature à favoriser la réalisation des objectifs qui ont présidé à la désignation du site, en tenant compte, notamment, de l'évolution des activités humaines sur le site.

La mise à disposition d'outils ainsi que les financements associés : l'article L. 414-3 du code de l'environnement présente les deux catégories d'outils prévus (contrats et chartes Natura 2000) pour inciter les particuliers et autres personnes de droit privé à s'engager dans des démarches concourant à l'atteinte des objectifs fixés dans le DOCOB.

Les contrats peuvent faire l'objet de contreparties financières, les chartes de bonnes pratiques pouvant donner lieu à des mesures fiscales (exonération de taxe foncière sur le patrimoine non bâti).

En application de l'article 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), les régions sont pour la période 2014-2020 les autorités de gestion des programmes relatifs aux fonds européens mobilisables à l'appui des contrats Natura 2000, notamment le FEADER.

L'élaboration d'une étude d'incidence : afin d'assurer la protection des espaces et des espèces et prévenir les impacts susceptibles de les affecter, un régime d'évaluation d'incidence est organisé par l'article L. 414-4 du code de l'environnement. Il a pour objet de vérifier la compatibilité d'un « document de planification, programme ou projet d'activités, de travaux d'aménagements, d'installation, de manifestations ou d'interventions dans le milieu naturel » , avec les objectifs de conservation des sites. Le dossier, à la charge du porteur de projet, doit permettre à l'État d'apprécier si l'évaluation des incidences est proportionnée à la nature et à l'importance des activités, aux enjeux de conservation et à l'existence ou non d'incidences potentielles.

En application du VI du même article, l'État « s'oppose à tout document de planification, programme, projet, manifestation ou intervention si l'évaluation des incidences requise en application des III, IV et IV bis n'a pas été réalisée, si elle se révèle insuffisante ou s'il en résulte que leur réalisation porterait atteinte aux objectifs de conservation d'un site Natura 2000 ». En vertu du VII, si l'évaluation conclut à une atteinte aux objectifs de conservation, en l'absence de solutions alternatives, l'État peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public majeur sous réserve de mesures compensatoires à la charge de l'autorité qui a approuvé le document de planification ou du bénéficiaire du programme ou projet d'activités.

1.2. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Les directives européennes ne définissent pas en détail le processus de consultation à suivre pour la sélection des sites. Les procédures de constitution du réseau ont de ce fait fortement varié d'un État membre à l'autre en fonction de leur système administratif.

La quasi-totalité des pays ont achevé la phase de proposition initiale à la Commission européenne. Ils s'inscrivent à présent dans le processus de désignation formelle des zones spéciales de conservation (ZSC) / zones de protection spéciale (ZPS) et de leur gestion. La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni en particulier ont fait d'importants efforts en ce sens.

La politique de protection des États-membres s'appuie sur une combinaison d'instruments statutaires, administratifs et financiers propres à chacun. Elle est laissée à la liberté des États-membres.

Sur le plan statutaire, en France comme dans la plupart des nations d'Europe, les sites Natura 2000 sont parfois des territoires précédemment protégés par des statuts nationaux.

Si le plan de gestion est utilisé dans de nombreux pays, d'autres outils de planification et de gestion sont également mis en oeuvre en s'appuyant sur les législations sectorielles existantes.

Certains États, comme l'Italie, l'Autriche, la Hongrie, utilisent ainsi les plans d'aménagement du territoire en y intégrant les différents objectifs et mesures de leur politique de conservation. En Finlande et Estonie, les mesures des plans de gestion ont bien été définies en fonction du bon état de conservation des espèces et habitats.

Peu d'États cependant ont, à l'exemple de la Belgique (Wallonie), mis en place des mesures de protection réglementaires exigeant l'abandon de certaines pratiques ou activités humaines.

Le recours à des contrats pour la gestion des sites est utilisé par l'ensemble des États membres.

En France, le réseau Natura 2000 terrestre est désormais en grande partie achevé, les efforts portant davantage sur le travail de désignation des sites Natura 2000 dans le milieu marin de manière générale. Selon la Commission européenne, en 2016 plus de 3 000 sites marins Natura 2000 ont été désignés, couvrant près de 6% de la surface marine européenne (plus de 360 000 km 2 ). L'une des raisons principales de la lenteur du processus de désignation des sites marins réside dans le manque d'informations scientifiques concernant la distribution des espèces et habitats marins protégés par l'Union européenne, particulièrement au niveau de précision nécessaire à l'identification des sites et à la mise en place d'une gestion appropriée.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les rôles respectifs de l'État et des collectivités territoriales établis dans le cadre de la législation actuelle sont les suivants.

L'État assure :

a. la désignation des sites Natura 2000 ;

b. le rôle d'autorité administrative à l'égard du site, exercé par le préfet de département ou le préfet maritime, qui comprend :

- la création du COPIL, dont la présidence a vocation à être assurée par un représentant de collectivité locale ;

- l'approbation du DOCOB élaboré par le COPIL ;

- l'exercice des missions relevant des collectivités territoriales concernées par un site, par substitution, si aucune d'entre elles ne souhaite assurer son pilotage (présidence du COPIL, élaboration et suivi de la mise en oeuvre du DOCOB).

c. le co-financement en contrepartie des fonds européens et l'instruction financière des mesures d'accompagnement et de gestion du site : animation des sites, contrats Natura 2000 en milieux forestiers ou ni-agricoles ni-forestiers (cofinancement du ministère en charge de l'écologie) et mesures agro-environnementales (cofinancement du ministère en charge de l'agriculture), ainsi que le suivi des autres mesures d'accompagnement (chartes et exonération de taxe) ;

d. l'instruction de l'évaluation des incidences des projets, travaux, aménagements, sur les enjeux de conservation des sites Natura 2000 et le contrôle de la réalisation des projets autorisés ;

e. l'interface avec la Commission européenne au regard des objectifs de suffisance du réseau et d'atteinte de l'état de conservation favorable des espèces et habitats concernés déterminés par les directives européennes, le rapportage relatif à la mise en oeuvre des directives, ainsi que la gestion des éventuels précontentieux et contentieux inhérents.

Les collectivités territoriales sont également fortement impliquées dans la mise en oeuvre de cette politique.

Le code de l'environnement confère aux collectivités territoriales ou à leurs groupements concernés le pilotage des sites Natura 2000, hors sites marins, au travers de la présidence du COPIL (gouvernance), l'élaboration du DOCOB (document de planification) et le suivi de sa mise en oeuvre (animation). Toutefois, si aucune collectivité territoriale ne souhaite assurer ces missions, c'est l'État qui en est chargé. Les collectivités territoriales président aujourd'hui la majorité des sites (60%).

Comme indiqué précédemment, les régions assurent, dans le cadre de la programmation 2014-2020 des fonds européens au travers des programmes de développement ruraux, le rôle d'autorité de gestion des dispositifs permettant de financer les mesures d'accompagnement et de gestion des sites.

Bien que la procédure actuelle de gestion des sites Natura 2000 fasse une large part à la participation des collectivités territoriales, la décentralisation d'une part plus importante de la gestion de ces sites exclusivement terrestres correspond au voeu exprimé par les Régions, de façon cohérente avec leur compétence en matière d'aménagement du territoire et d'environnement.

La décentralisation de la gestion des sites exclusivement terrestres, du fait de la compétence territoriale des régions dans le respect de la domanialité de l'État, implique nécessairement des modifications de nature législative pour pouvoir entrer en vigueur.

Une telle décentralisation permettrait à ce titre de renforcer l'intégration de cette politique. Par ailleurs, la responsabilité de gestion des fonds communautaires assumée par les régions rend nécessaire une plus forte association de ces dernières.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La disposition proposée vise à décentraliser la gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres aux régions afin de les conforter dans leur rôle de chef de file pour la biodiversité, en cohérence avec leur rôle actuel d'autorité de gestion des fonds européens.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Deux options ont été écartées :

• Celle d'une décentralisation de l'ensemble des compétences, y compris régaliennes, liées à la mise en oeuvre du réseau Natura 2000, et notamment des fonctions de désignation et de notification à la Commission européenne des sites Natura 2000 ou d'instruction des évaluations des incidences Natura 2000.

En effet, la désignation des sites implique de pouvoir apprécier la suffisance du réseau pour chaque type d'habitat et chaque espèce à l'échelle biogéographique au sein du territoire national, impliquant donc une fonction de coordination et de garant à ce titre à un niveau supra régional.

Quant aux évaluations des incidences Natura 2000, la majorité d'entre elles est attachée à une demande d'autorisation administrative (autorisation environnementale, installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), défrichement...) qui relève d'autres autorités administratives que les régions et notamment de l'État (préfet). La décentralisation de cette compétence, par ailleurs non demandée par les collectivités territoriales, a donc été écartée.

• Celle d'une décentralisation qui s'appliquerait également à la gestion des sites marins. En effet, le domaine public maritime est une compétence exclusive de l'État qui n'a pas vocation à être décentralisée.

3.2. OPTION RETENUE

Le dispositif proposé porte sur la décentralisation de la gestion des sites exclusivement terrestres et prévoit pour ces derniers (soit environ 1 540 sites 44 ( * ) ), que la fonction d'autorité administrative soit confiée au président du conseil régional ou, en Corse, au président de la collectivité de Corse, en lieu et place du préfet compétent pour les attributions suivantes :

- la constitution du COPIL, lui-même présidé par une collectivité territoriale ;

- l'approbation du DOCOB élaboré par le COPIL ;

- à défaut de collectivité territoriale volontaire, la présidence du COPIL, l'élaboration, l'animation et le suivi de la mise en oeuvre du DOCOB par substitution ;

- l'instruction et le contrôle des chartes et exonérations liées en matière de fiscalité ;

- l'établissement de la liste mentionnée aux I et II de l'article 1395 E du code général des impôts pour l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties perçue au profit des communes et de leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ;

- le co-financement en contrepartie des fonds européens et l'instruction financière des mesures d'accompagnement et de gestion du site, en articulation et sans préjudice des dispositions législatives spécifiques relatives à la gestion des programmes européens.

Pour les sites exclusivement terrestres entièrement inclus dans un terrain relevant du ministère de la défense, la composition du COPIL Natura 2000 est assurée conjointement avec l'autorité militaire, qui préside le COPIL, établit le DOCOB et suit sa mise en oeuvre en association avec le COPIL, comme le prévoit aujourd'hui l'article R. 414-8-2 du code de l'environnement.

La désignation des sites et l'instruction de l'évaluation des études d'incidences reste du ressort des services de l'État.

L'administration centrale du ministère en charge de l'écologie conserve son rôle d'instruction, d'évaluation, de désignation et de notification à la Commission européenne des sites Natura 2000.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie les articles L. 414-1, L. 414-2 et L. 414-3 du code de l'environnement, ainsi que l'article 1395 E du code général des impôts.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La phase de gestion des sites relève de l'organisation des États-membres, en concordance avec la liste des sites relevant du réseau Natura 2000 arrêtée à l'échelle de la Commission européenne.

4.2. IMPACTS ECONOMIQUES ET FINANCIERS

La mesure de décentralisation aux régions de la gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres impliquera une compensation dans les conditions prévues aux articles L. 1614-1 et suivants du CGCT à l'article 33 du présent projet de loi au titre des charges de fonctionnement le cas échéant transférées. Cette compensation sera calculée en neutralisant en dépenses et en recettes tout dispositif de cofinancement préexistant, notamment des fonds européens, venant par ailleurs financer certaines des attributions transférées.

Cette mesure impliquera également une compensation financière des personnels de l'État dont la gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres représente seulement une partie de leurs fonctions, et qui, à ce titre, ne feront pas l'objet d'une mesure de transferts de services aux régions. Cette compensation financière sera calculée dans les conditions prévues au IV de l'article 44 du présent projet de loi.

L'impact budgétaire pour l'État est concomitant avec la date d'entrée en vigueur du transfert. Son montant est précisé en loi de finances.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITES TERRITORIALES

Cet article étend le champ des compétences des régions en matière de protection de la biodiversité, de façon cohérente avec leur rôle de chef de filât de l'action territoriale en la matière, leurs compétences en matière d'aménagement du territoire et d'environnement ainsi que leur rôle d'autorité de gestion des fonds européens.

Les régions sont déjà impliquées dans le processus de gestion des sites avec les autres collectivités territoriales intéressées. Cette disposition permettra de développer les synergies locales au profit du réseau terrestre déjà constitué.

La disposition impliquera des charges nouvelles en termes de gestion administrative pour les services du conseil régional qui seront compensées par le transfert de moyens humains et financiers prévus par les articles L. 1614-1 et suivants du CGCT.

En effet, la qualification juridique de transfert de compétences au sens des articles 72-2 de la Constitution et L. 1614-1 du CGCT emporte l'application du principe de neutralité financière à cette mesure de décentralisation.

Les ressources transférées seront donc équivalentes aux dépenses effectuées par l'État au titre des attributions d'autorité administrative à la date du transfert. Elles donneront lieu à l'attribution pérenne d'une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

L'État restera garant auprès de la Commission européenne de l'atteinte des objectifs fixés par les directives européennes et interlocuteur institutionnel de la Commission européenne (à savoir le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages d'intérêt communautaire). Pour autant, s'agissant de la mise en oeuvre de deux directives européennes, la décentralisation de la gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres implique que les régions seront responsables, pour leur champ de compétences leur étant dévolu, à l'égard de l'atteinte des objectifs de résultats et de moyens fixés par ces directives.

Par conséquent, et eu égard au fait que décentralisation s'accompagnera nécessairement d'un transfert de moyens humains et financiers pour assumer pleinement cette nouvelle compétence, en cas de condamnation de la France pour non atteinte des objectifs de préservation ou de restauration fixés par les directives, l'État pourra mettre en oeuvre l'action récursoire prévue à l'article L. 1611-10 du CGCT pour ce qui concerne les responsabilités incombant aux régions.

L'exercice de cette responsabilité par les régions portera donc sur le domaine de la gestion des sites exclusivement terrestres ainsi transféré. Pour ce qui concerne la gestion de certains types de contrats à savoir les mesures agro-environnementales, celle-ci pourra faire l'objet d'une coordination entre l'État et les régions, dans le cadre notamment d'une gouvernance adaptée, eu égard à la nouvelle répartition de la responsabilité d'autorité de gestion prévue dans le cadre de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière.

Pour mémoire, cette loi prévoit en son article 33 que le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de cette loi, les dispositions législatives nécessaires pour modifier, en ce qui concerne le FEADER, les dispositions de la loi MAPTAM et prévoir les conditions dans lesquelles pour la future programmation des fonds européens, d'une part, l'État est chargé des aides surfaciques et, d'autre part, les régions peuvent être chargées des aides non-surfaciques, en précisant notamment la répartition des compétences, les transferts de services et de moyens en résultant et les modalités d'instruction des demandes et de paiement des aides.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'ensemble des compétences pré-citées aujourd'hui exercées par les services de l'Etat sur la gestion des sites terrestres (convocation des COPIL, présidence du COPIL en absence de collectivité volontaire, approbation des DOCOB...) et transférées aux Régions conduit à un allègement automatique du nombre de tâches d'instruction pour les services de l'État.

4.5. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La disposition en tant que telle n'a pas d'impact environnemental direct, dans la mesure où elle réorganise la responsabilité de l'action publique. La décentralisation de la gestion des sites Natura 2000 terrestres aux régions participera cependant de l'optimisation de l'action publique en matière de biodiversité, pour laquelle la région est chef de file, en favorisant une meilleure intégration territoriale des politiques publiques en matière de biodiversité.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée requiert pour la mise en oeuvre des dispositions modifiées au sein du code de l'environnement un décret en Conseil d'État pour venir en préciser les modalités d'application, elle entrera en vigueur le 1 er janvier 2023. Cette date vise à assurer la concordance avec les moyens qui devront être transférés au titre de la nouvelle répartition de l'autorité de gestion sur le FEADER issue de la loi DADDUE, dans le cadre de la nouvelle programmation des fonds européens qui entrera en vigueur elle-même en 2023.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des collectivités d'Outre-mer. En effet, le dispositif Natura 2000 n'étant pas applicable en Outre-mer, ces régions ne sont pas concernées.

5.2.3. Textes d'application

La mesure envisagée requiert pour la mise en oeuvre des dispositions modifiées au sein du code de l'environnement un décret en Conseil d'État tel que prévu à l'article L. 414-6 du code de l'environnement pour venir en préciser les modalités d'application.

Article 14 : Renforcement du pouvoir de police dans les espaces naturels protégés

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

De nombreux sites publics patrimoniaux français, dont les espaces naturels protégés qui occupent plus de 20% de notre territoire, sont concernés par des questions d'hyper fréquentation touristique ou d'activités de pleine nature et les dommages que celle-ci peut causer sur l'environnement. Si la fréquentation de ces espaces protégés traduit l'intérêt que représentent ces sites pour le grand public, elle entraîne parfois des impacts forts sur le patrimoine naturel : piétinement de la végétation, érosion des sols, disparition d'habitats et modification du comportement de la faune sauvage, déchets surabondants et sauvages, impact paysager, utilisation disproportionnée des ressources en eau de l'île sont quelques-unes des conséquences de cette attractivité. Ce problème peut s'avérer particulièrement marqué dans certains sites (le petit port de Porquerolles par exemple, ou encore le parc national des Calanques, facile d'accès depuis la ville de Marseille).

Sont concernés les sites naturels protégés au titre de leur patrimoine écologique (parc nationaux, réserves naturelles, sites du conservatoire du littoral...) ou/et au titre de leur patrimoine paysager sur la base de la réglementation relative aux sites classés. Les espaces naturels protégés répondent à la définition suivante : un espace géographique clairement défini, reconnu, consacré et géré, par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d'assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui lui sont associés. Les espaces protégés ainsi visés sont nombreux : espaces du littoral, parcs nationaux, réserves naturelles régionales et nationales, parcs naturels régionaux, aires marines protégées, réserves de biosphère et zones humides d'importance internationale, sites inscrits et classés, sites Natura 2000.

Les régimes de protection qui existent pour ces espaces protégés sont nombreux ; force est de constater qu'ils n'offrent pas tous le même niveau de protection, ni le même niveau de contraintes réglementaires. Certains espaces sont ainsi protégés au titre d'une convention internationale : c'est le cas des zones humides via la convention Ramsar. Certains espaces bénéficient d'une gestion dite « conventionnelle », comme les conventions de gestion de sites appartenant à l'État, les sites Natura 2000, les sites classés faisant l'objet d'une opération « Grand site » ou encore les parcs naturels régionaux.

Certains sites sont directement protégés par voie contractuelle et d'autres, de manière très générale, par la loi, par exemple la loi Littoral ou la loi Montagne.

Le Conservatoire du littoral dispose d'outils de protection via une politique d'acquisitions de terrains. Il établit, par exemple, des plans de gestion, en concertation avec le gestionnaire et les communes concernées, qui peuvent comporter des recommandations visant à restreindre l'accès du public et les usages des immeubles du site.

Enfin, certains sites bénéficient d'une protection réglementaire qui peut prendre des formes diverses. Les préfets peuvent ainsi prendre des arrêtés de protection de biotope (APB) pour protéger les habitats naturels. Les parcs nationaux, les parcs naturels marins, les réserves naturelles régionales et nationales ou encore les sites classés et les sites inscrits constituent également des exemples de protections réglementaires plus ou moins fortes dont peuvent bénéficier certains espaces.

La diversité de ces modes de protection se retrouve dans la diversité des responsables de la gestion de ces espaces. Si la police spéciale de la nature relève principalement de l'Etat, certains des espaces protégés susmentionnés sont des dispositifs décentralisés comme les réserves naturelles régionales.

Les espaces protégés reçoivent plusieurs millions de visiteurs par an dont une partie est concentrée sur des sites majeurs : 3 millions de visiteurs par an dans le parc national des calanques, 1 million dans le parc national de Port Cros 45 ( * ) , près de 10 millions dans les réserves naturelles, 40 millions sur les sites du Conservatoire du Littoral, 42 millions dans les territoires en démarche de Grands sites de France 46 ( * ) .

Les impacts liés à cette hyperfréquentation ont des conséquences sur la gestion des sites, car ils supposent des mesures de plus en plus importantes pour éviter ou réduire ces effets néfastes, et se révèlent dans certains cas difficilement conciliables avec la vocation des sites et leur protection.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Dans sa décision n° 2019-823 QPC du 31 janvier 2020, le Conseil constitutionnel a jugé qu'il découle de ces dispositions « que la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, constitue un objectif de valeur constitutionnelle ». A ce titre, « il appartient au législateur d'assurer la conciliation des objectifs précités avec l'exercice de la liberté d'entreprendre ».

Par ailleurs, l'article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources » et « de la préservation de l'environnement » , ainsi que « les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques » .

La création d'un nouveau pouvoir de police spéciale permettant de traiter la question de l'hyperfréquentation des espaces protégés, ainsi que les modalités d'exercice de ce pouvoir, relèvent donc du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les outils de protection de ces différents espaces n'ont pas permis de trouver des solutions appropriées et systématiques pour répondre efficacement à la problématique de l'hyper-fréquentation.

En effet, la réglementation des espaces protégés ne permet pas de couvrir tous les usages de ces espaces (par exemple l'objet de la réglementation « sites classés » est la préservation des valeurs paysagères du site au moyen exclusif d'un régime spécifique d'autorisation de travaux). Il n'est à ce jour pas possible de réguler, sur le fondement de la réglementation des espaces protégés, l'accès et la circulation des personnes, des véhicules et des animaux domestiques à ces espaces pour des raisons liées à la seule protection du patrimoine naturel. Ainsi, par exemple, le coeur du parc national de Port-Cros étant situé sur une partie seulement de l'île, la régulation de l'accès des visiteurs doit nécessairement passer par des mesures visant à restreindre, en amont, l'accès des visiteurs sur l'île, afin de pouvoir être effective. Or, le directeur du parc national n'a autorité que sur le coeur du parc national.

Par ailleurs, le pouvoir de police spéciale du maire en matière de protection de l'environnement qu'il détient en application de l'article L. 2213-4 du code général des collectivités territoriales (CGCT) ne s'applique qu'à la circulation des véhicules.

En outre, les pouvoirs de police générale du maire et du préfet qu'ils détiennent en application des articles L. 2212-2 et L. 2215-1 du CGCT ne permettent pas non plus de traiter la question de l'hyperfréquentation des espaces protégés, dès lors que cet enjeu n'est pas rattachable à l'une des composantes de l'ordre public général que sont la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques.

La création d'un nouveau pouvoir de police spéciale permettant de traiter la question de l'hyperfréquentation des espaces protégés, permettrait ainsi à l'autorité de police territorialement compétente de répondre efficacement à cet enjeu.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'hyperfréquentation concerne des sites très divers, tant dans leur localisation que dans le régime juridique qui s'y applique. Certains types d'espaces protégés sont d'ores et déjà soumis à des autorités administratives habilitées à réglementer les questions d'hyperfréquentation, d'autres non.

Il convient donc de créer un nouveau pouvoir de police spéciale permettant de traiter la question de l'hyperfréquentation des espaces protégés, qui s'exercerait subsidiairement aux pouvoirs conférés en la matière à certaines autorités administratives par le code de l'environnement.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une extension des pouvoirs de police spéciale du maire en matière de circulation dans le cadre de l'article L. 2213-4 du CGCT aurait pu être envisagée pour inclure la possibilité d'interdire ou de réglementer l'accès des personnes non véhiculées. En effet, cette disposition permet au maire de réglementer ou interdire la circulation des véhicules aux fins de préserver la tranquillité publique, la qualité de l'air, la protection des espèces animales ou végétales, ainsi que la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques.

Toutefois, l'article L. 2213-4 du CGCT a une portée bien plus large que la seule question des espèces, espaces et paysages, puisqu'elle vise également la tranquillité publique. Cette solution aurait également nui à la cohérence de la section première du chapitre III du CGCT qui ne porte que sur la police de la circulation et du stationnement des véhicules et qui s'applique sur l'ensemble du territoire des communes. Or, le nouveau pouvoir de police spéciale n'ayant vocation à s'appliquer que pour les espaces protégés particulièrement exposés aux problématiques de l'hyperfréquentation, il convient donc d'introduire son fondement législatif dans le livre III du code de l'environnement relatif aux espaces naturels.

Par ailleurs, des pouvoirs de police spéciale permettant de réglementer les questions d'hyperfréquentation au sein des espaces protégés sont d'ores et déjà conférés à certaines autorités administratives par le code de l'environnement, qu'il apparaît opportun de maintenir.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue est celle de la création d'un nouveau pouvoir de police spéciale du maire (dans le cas d'une intervention sur une seule commune) ou du préfet (dans le cas d'une intervention sur plusieurs communes), inscrit dans le code de l'environnement, dans les cas où le code de l'environnement n'aurait pas habilité certaines autorités administratives à réglementer les questions d'accès et de circulation au sein des espaces protégés. Cette évolution traduit ainsi l'importance des maires dans la politique générale de développement durable, y compris pour des espaces protégés relevant d'autres collectivités territoriales ou de l'État.

Le nouvel article L. 360-1 du code de l'environnement donne ainsi compétence subsidiaire aux maires (dans le cas d'une intervention sur une seule commune) ou au préfet (dans le cas d'une intervention sur plusieurs communes) pour réglementer ou interdire l'accès et la circulation des personnes, des véhicules et des animaux domestiques dans les espaces protégés au titre des Livres III et IV du code de l'environnement, par arrêté motivé, dès lors que cet accès ou cette circulation sont de nature à compromettre, soit leur protection ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, paysagères, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques, soit la protection des espèces animales ou végétales.

En cas de carence du maire, et après mise en demeure restée sans résultat, le préfet de département pourra intervenir en lieu et place du maire, lorsque la mesure ne concerne que le territoire d'une seule commune.

Les espaces protégés ainsi visés sont les suivants : espaces du littoral, parcs nationaux, réserves naturelles régionales et nationales, parcs naturels régionaux, aires marines protégées, réserves de biosphère et zones humides d'importance internationale, sites inscrits et classés, sites Natura 2000.

Enfin, les mesures de police prises sur le fondement de ce pouvoir ne s'appliqueront pas lorsque l'accès ou la circulation dans ces espaces sont nécessaires à l'exécution d'une mission opérationnelle de secours, de sécurité civile, de police, de douane ou de défense nationale.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le projet d'article crée un nouveau pouvoir de police spéciale du maire et du préfet sur l'accès et la circulation des personnes, des véhicules et des animaux domestiques dans les espaces naturels protégés. Ce pouvoir s'exerce sous réserve des pouvoirs expressément dévolus par la loi à d'autres autorités administratives (directeur du parc national, président du conseil départemental, président de l'EPCI, préfet de département lorsque l'espace naturel occupe le territoire de plusieurs communes etc.). Le présent article a pour effet de créer un nouvel article L. 360-1 dans le code de l'environnement.

Cet article ne conduit pas à modifier la répartition générale des pouvoirs de police, mais uniquement à les compléter là où il en était besoin.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les dispositions envisagées pourront avoir un impact économique sur les secteurs dépendant du tourisme, avec une baisse de fréquentation de certains sites protégés, notamment insulaires. A l'inverse, la mise en place de mesures de limitation d'accès diminuera les dépenses publiques induites par la surfréquentation des espaces (nettoyage, remise en état, consommation d'eau, surveillance). L'effet à long terme attendu est donc positif, avec une moindre dégradation des lieux et de leur image. Une meilleure répartition des visites sur l'année est aussi attendue.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les dispositions envisagées font du maire, au même titre que les autorités administratives d'ores et déjà habilitées par le code de l'environnement, un acteur majeur de la protection de sites naturels, en lui confiant la décision difficile parfois de concilier développement économique et protection de l'environnement pour un développement durable.

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les dispositions envisagées auront un impact environnemental positif en limitant les conséquences néfastes de fréquentations trop importantes au regard des capacités d'accueil de certains espaces protégés.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions envisagées s'appliqueront dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions s'appliquent en métropole, dans les Départements d'Outre-mer, ainsi que dans les Collectivités d'Outre-mer qui ont choisi d'appliquer le code de l'environnement.

5.2.3. Textes d'application

Aucun texte d'application n'est nécessaire.

TITRE III - L'URBANISME ET LE LOGEMENT

Article 15 : Adaptation du mécanisme d'exemption de communes de l'application des obligations SRU afin d'en améliorer sa pertinence et prise en compte de la suppression de la taxe d'habitation dans le décompte des résidences principales

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, modifiée, dite « loi SRU », codifié aux articles L. 302-5 et suivant du code de la construction et de l'habitation (CCH), impose aux communes de plus de 3 500 habitants (1 500 dans l'unité urbaine de Paris) comprises dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et/ou une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, une part de logements locatifs sociaux représentant 20 à 25 % des résidences principales, selon le niveau de tension sur la demande de logement social du territoire.

L'article 15 du projet de loi comporte deux mesures distinctes :

- d'une part, l'évolution du dispositif d'exemption des obligations précitées, par l'adaptation des critères (mesure 1).

- d'autre part, la prise en compte de la suppression de la taxe d'habitation, dans le calcul du taux de logement social (mesure 2) ;

Mesure 1- Dispositif d'exemption

La loi n° 2017-86 relative à l'égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017 a refondu le mécanisme d'exemption préexistant, assis sur la décroissance démographique, afin d'adapter l'application de la loi au contexte de certains territoires et la recentrer sur les territoires où la pression sur la demande de logement social est avérée, et tout particulièrement sur les territoires agglomérés ou en tous les cas bien desservis par les transports en commun.

En l'état actuel du droit, l'exemption de communes des obligations SRU est ainsi déterminée par décret, pris sur proposition de l'intercommunalité d'appartenance, après avis du préfet de région et de la commission nationale SRU. Pour pouvoir être proposées à l'exemption, les communes doivent respecter l'un des critères suivants :

- soit, au vu de la faiblesse de l'indicateur de pression de la demande de logement social lorsque la commune appartient à une unité urbaine de plus de 30 000 habitants. Le taux de tension sur la demande en logement social s'entend comme le ratio entre le nombre de demandes de logements sociaux, hors mutation interne, en fin d'année n, rapporté au nombre de relogements de demandeurs au cours de l'année n. Pour les deux dernières périodes triennales, le ratio en deçà duquel un territoire est considéré comme détendu a été fixé à 2 (moyenne des taux de tension sur trois ans) ;

- soit, à défaut d'appartenance à une telle agglomération, au regard de l'insuffisance de sa desserte par le réseau de transport en commun aux bassins de vie et d'emploi ;

- soit, en raison de l'inconstructibilité de plus de la moitié du territoire urbanisé, résultant de l'application de plan de prévention des risques, de servitudes environnementales ou de plan d'exposition au bruit (critères existants dans le dispositif d'exemption préexistant à la loi « égalité et citoyenneté »).

Le décret n° 2019-1577 du 30 décembre 2019 47 ( * ) a fixé la liste des communes bénéficiant d'une exemption de l'application de la loi au titre de ces trois critères. Sur les 1 324 communes situées en territoire SRU au titre du bilan 2020 (inventaire au 1 er janvier 2019), dépassant les seuils de population d'application de la loi et disposant de moins de 25% ou 20 % de logements sociaux, 224 sont exemptées, dont 24 au titre de la constructibilité contrainte de la majeure partie du territoire urbanisé, 50 au titre de la faible tension et 150 pour insuffisance de la desserte en transports en commun vis-à-vis des bassins de vie.

Motif d'exemption

Total

Unité urbaine faible tension (<2)

Mauvaise desserte en transports en commun

Inconstructibilité

Auvergne Rhône Alpes

20

9

10

1

Bourgogne Franche Comté

13

8

5

Bretagne

33

5

28

Centre Val-de-Loire

9

2

6

1

Grand Est

8

2

6

Guadeloupe

6

6

Hauts-de-France

6

1

5

Ile-de-France

10

10

Martinique

6

6

Normandie

15

3

12

Nouvelle-Aquitaine

30

6

24

Occitanie

20

5

13

2

Pays-de-Loire

34

9

23

2

Provence-Alpes-Côte d'Azur

9

2

7

Réunion

5

4

1

FRANCE

224

50

150

24

Mesure 2- Suppression de la taxe d'habitation

Le taux de logement social des communes est déterminé chaque année par les services déconcentrés de l'Etat qui calculent le rapport au 1 er janvier de l'année entre le nombre de logements sociaux décomptés et le nombre de résidences principales, sur le territoire communal. Pour ce faire, les services du ministère des finances adressent, chaque année, au ministère chargé du logement, le nombre de résidences principales qui figurent au rôle établi pour la perception de la taxe d'habitation.

Or, la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 supprime, en son article 16, la taxe d'habitation pour l'ensemble des foyers fiscaux, à compter de l'année 2023. Toutefois, la même loi prévoit, à l'article 1418 du code général des impôts, une obligation faite aux propriétaires de locaux affectés à l'habitation de déclarer la situation d'occupation de leur bien. Ainsi, les services du ministère des finances continueront à disposer de la donnée nécessaire permettant de dénombrer les résidences principales.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur la constitutionnalité du dispositif SRU (notamment les décisions n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000 et n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013). Ce dernier a été jugé conforme à la Constitution car poursuivant un objectif de mixité sociale, défini avec suffisamment de précision par l'article 55 de la loi SRU. La prise en compte de la suppression de la taxe d'habitation, dans le calcul du taux de logement social est une mesure purement technique qui ne pose pas de question de constitutionnalité.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Mesure 1- Dispositif d'exemption

Le dispositif actuel présente des difficultés dans son application, notamment en ce qui concerne l'appréciation du caractère de mauvaise desserte en transports en commun. Outre le fait qu'elle donne lieu à des interprétations très hétérogènes par les territoires, la notion de qualité de desserte par un (ou des) transport(s) en commun existant(s), en relation avec un (ou des) bassin(s) d'activités n'apparait pas suffisamment pertinente pour fonder l'exemption de l'application de la loi SRU.

En particulier, dans un contexte où la part modale de l'automobile demeure forte, une mauvaise qualité de desserte par les transports collectifs ne préjuge pas de l'absence d'attractivité d'une commune pour les ménages. A cet égard, lors de la préparation du décret n° 2019-1577 du 30 décembre 2019, le ministre chargé du logement n'a pas retenu les demandes d'exemption de communes formulées avec avis favorable des préfets, pour 35 communes situées hors des agglomérations de plus de 30 000 habitants, appartenant à des intercommunalités caractérisées par une très forte tension sur la demande en logement social (>5), considérant que celle-ci témoignait d'une attractivité de ces territoires et justifiait le développement d'une offre locative sociale supplémentaire. Ensuite, l'emploi d'un tel critère pourrait emporter des stratégies de détournement visant à éviter le développement des transports en commun.

En outre, si l'exemption pour motif de faible tension est incontestable dans son principe et objective dans sa mise en oeuvre puisque s'appuyant sur le calcul d'un taux de tension, celui-ci n'apparait pas pleinement cohérent au regard de son champ d'application territorial. Il est, en effet, réservé aux communes appartenant aux unités urbaines de plus de 30 000 habitants, sans que les communes hors de ces agglomérations puissent y être éligibles. Il peut ainsi apparaître inutilement restreint, même si dans la pratique, en dehors de ces territoires, les communes peuvent être exemptées sur le critère de la faible desserte par les transports en commun. Ainsi, parmi les 224 communes exemptées dans le cadre du bilan 2020, 50 le sont pour le motif de faible tension (réservé aux communes appartenant à une agglomération urbaine de plus de 30 000 habitants), auxquelles se rajoutent 53 communes exemptées pour le motif de mauvaise desserte mais, appartenant à un EPCI dont le taux de tension est inférieur à 2, soit un total de 103 communes situées dans des territoires de faible tension.

Il est donc nécessaire de légiférer pour modifier l'article L. 302-5 du CCH afin d'améliorer la pertinence du dispositif d'exemption, dans le respect des principes fixés par le législateur en 2017, et de cibler l'application de la loi sur les territoires les plus urbanisés, présentant une continuité du bâti et où la demande en logement locatif social est avérée, et, par définition, bien insérés aux bassins de vie et d'emplois.

Mesure 2- Suppression de la taxe d'habitation

L'article L. 302-5 du CCH précise que les résidences principales retenues pour le calcul du taux de logement social des communes concernées par le dispositif SRU sont celles figurant au rôle établi pour la perception de la taxe d'habitation. Compte tenu de la suppression de la taxe d'habitation à l'échéance de l'année 2023, il convient de modifier la rédaction de cet article pour tenir compte de cette évolution. En l'absence, le calcul du taux de logement social serait dépourvu de toute base légale et source de fragilités juridiques lors de contentieux.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Mesure 1 - Dispositif d'exemption

Cette mesure répond à l'objectif constitutionnel de clarté et d'intelligibilité de la loi en rendant le mécanisme d'exemption plus simple, efficient et cohérent, sans que soient remis en question les équilibres de la loi. Il permet ainsi :

- d'améliorer sa lisibilité, sa compréhension et son appréciation par l'ensemble des acteurs, en l'appréhendant au-delà de la seule mauvaise desserte par les transports en commun ;

- de faciliter l'examen des demandes d'exemption par les services déconcentrés et centraux de l'Etat et par la commission nationale SRU.

Mesure 2- Suppression de la taxe d'habitation

La modification de la référence du nombre de résidences principales pour le calcul du taux de logement social vise à assurer la bonne mise en oeuvre du dispositif SRU, en définissant dans le CCH les modalités d'obtention du nombre de résidences principales, nécessaire à la détermination du taux de logements locatifs sociaux de chaque commune située en territoire SRU.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Mesure 1- Dispositif d'exemption

L'option de laisser inchangé le dispositif d'exemption au titre de la loi SRU a été écartée, au regard des difficultés d'application précitées, et notamment, l'utilisation d'un critère d'exemption (qualité de la desserte en transport en commun) n'apparaissant pas pleinement satisfaisante au regard des objectifs poursuivis par la loi.

Mesure 2- Suppression de la taxe d'habitation

Compte tenu de la suppression de la taxe d'habitation pour les résidences principales, il était impératif de modifier la loi, faute de quoi, le calcul du taux de logement social serait dépourvu de toute base légale.

3.2. OPTION RETENUE

Mesure 1- Dispositif d'exemption

Sans modifier les équilibres généraux de la loi, ni les principes de la procédure d'exemption qui restent inchangés (liste fixée par décret sur proposition par les intercommunalités d'appartenance après avis du préfet et de la commission nationale SRU, objectifs de ciblage de l'application de la loi sur les territoires sur lesquels la demande est avérée), la mesure retenue vise à adapter les critères d'éligibilité à l'exemption sur les points suivants :

- élargissement de l'application du critère d'exemption à tous les territoires SRU (c'est-à-dire aux EPCI et agglomérations de plus de 50 000 habitants avec une commune de plus de 15 000 habitants) faiblement tendus et non plus seulement aux unités urbaines de plus de 30 000 habitants) ;

- pour les communes situées hors des agglomérations de plus de 30 000 habitants, remplacement de la notion de « faible desserte par les transports en commun de la commune aux bassins de vie » par celle « d'isolement ou l'accès difficile aux bassins de vie et d'emplois » rendant faiblement attractives certaines communes, tant pour les ménages que pour les bailleurs sociaux. Cette notion d'isolement des communes, à définir par un décret en Conseil d'Etat, serait appréciée au travers d'une analyse multi-critères combinant diverses caractéristiques de la commune : isolement géographique lié notamment à la topographie (commune en secteur de montagne), absence de liaison satisfaisante avec les bassins d'emplois, manque d'attractivité pouvant être caractérisée par divers indicateurs (décroissance de la population, manque de dynamisme de la construction, faible nombre de demandes de logements sociaux, taux de vacance élevé, faible nombre d'emplois sur place, etc.),etc..

Mesure 2- Suppression de la taxe d'habitation

Afin de tenir compte de la suppression de la taxe d'habitation, l'article L. 302-5 du CCH indique que les résidences principales retenues pour le calcul du taux de logement social des communes concernées par le dispositif SRU sont notamment issues des déclarations effectuées dans les conditions prévues à l'article 1418 du code général des impôts (CGI).

« Les propriétaires de locaux affectés à l'habitation sont tenus de déclarer à l'administration fiscale, avant le 1er juillet de chaque année, les informations relatives, s'ils s'en réservent la jouissance, à la nature de l'occupation de ces locaux ou, s'ils sont occupés par des tiers, à l'identité du ou des occupants desdits locaux, selon des modalités fixées par décret. »

Il est donc proposé de supprimer la référence à la taxe d'habitation et de renvoyer à cette déclaration comme étant la source principale sur laquelle le nombre de résidences principales est assis.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Près de la moitié des logements sociaux sont agréés chaque année dans des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle de catalyseur joué par le dispositif dans la production de logement social du pays. La mesure qui vise à adapter le mécanisme d'exemption déjà existant ne bouleverse pas les grands équilibres de la loi SRU et n'aura pas pour conséquence d'amoindrir l'effort de production de logement social. Elle est donc sans impacts macroéconomiques.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Près de la moitié des logements sociaux sont agréés chaque année dans des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle de catalyseur joué par le dispositif dans la production de logement social du pays. La mesure qui vise à adapter le mécanisme d'exemption déjà existant ne bouleverse pas les grands équilibres de la loi SRU et n'aura pas pour conséquence d'amoindrir l'effort de production de logement social. Elle n'aura donc pas d'impact sur le secteur du bâtiment et du logement social.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans présenter d'impact budgétaire en soit, la mesure proposée contribuera à poursuivre l'orientation majoritaire des aides à la pierre vers les territoires assujettis à l'article 55 de la loi SRU, en la centrant sur les secteurs où les besoins de logement social sont les plus avérés.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Mesure 1- Dispositif d'exemption

• Sur le critère d'appartenance à un territoire faiblement tendu :

Afin d'évaluer l'impact de cette évolution à date, et en s'appuyant sur le décret n° 2020-1006 du 6 août 2020 fixant les agglomérations et EPCI éligibles à un taux de 20% de logement social, le vivier des communes « exemptables » au titre de la faible tension s'élèverait à 95 communes (communes soumises ou exemptées situées dans un territoire SRU dont le taux de tension sur la demande en logement social est inférieur ou égal à 2), à comparer au chiffre de 74 communes qui seraient actuellement éligibles à l'exemption au titre de la faible tension (c'est-à-dire les communes situées dans les unités urbaines de plus de 30 000 habitants dont le taux de tension est inférieur à 2). L'évolution proposée permettra donc une meilleure prise en compte des caractéristiques locales en matière de tension locative.

• Sur le critère d'isolement/faible attractivité des communes :

La mesure élargit les critères d'appréciation de la pertinence de l'exemption au titre de la mauvaise connexion aux bassins de vie et d'emploi (en ne se référant plus à la notion de mauvaise desserte par les transports collectifs). Ces critères ayant vocation à être définis par décret en Conseil d'Etat, il n'est pas possible à ce stade de quantifier son effet mais là encore cette mesure permettra une meilleure prise en compte des dynamiques locales (et de besoin en logements sociaux).

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Mesure 1- Dispositif d'exemption

La mesure proposée vise à adapter le dispositif pour le rendre plus compréhensible et pour faciliter son appréhension tant par les services des collectivités territoriales que par ceux de l'Etat. Elle permettra donc une application simplifiée et optimisée de la loi SRU.

Mesure 2 : Suppression de la taxe d'habitation

La mesure relative à la modification de la référence du nombre de résidences principales pour le calcul du taux de logement social n'induit qu'un prolongement d'une pratique administrative existante, assurée aujourd'hui par les services de l'État, sans impliquer de renforcement des moyens consacrés.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La mesure qui vise à adapter le mécanisme d'exemption sans bouleverser les grands équilibres de la loi SRU n'aura pas pour conséquence d'amoindrir l'effort de production de logement social et est donc sans impact pour les personnes en situation d'handicap.

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

La mesure qui vise à adapter le mécanisme d'exemption sans bouleverser les grands équilibres de la loi SRU n'aura pas pour conséquence d'amoindrir l'effort de production de logement social et est donc sans impact pour la jeunesse.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure qui vise à adapter le mécanisme d'exemption sans bouleverser les grands équilibres de la loi SRU n'aura pas pour conséquence d'amoindrir l'effort de production de logement social et est donc sans impact pour les particuliers.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La mesure qui vise à adapter le mécanisme d'exemption permet un traitement particulier des secteurs détendus où la construction d'une offre sociale supplémentaire n'est pas nécessaire.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Cette proposition est issue des recommandations rendues, le 27 janvier 2021, par la commission nationale SRU, dans le cadre de la mission confiée par la ministre chargée du logement à son président le 3 décembre 2020. Cette mission avait pour objectif de réfléchir à des propositions d'évolution des dispositions législatives relatives au dispositif issu de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000. La commission nationale SRU comprend des représentants des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales, des parlementaires, des associations pour le logement des personnes défavorisées et des personnalités qualifiées.

Par ailleurs, des réunions ont eu lieu entre la ministre du logement et les associations représentatives des collectivités locales, et se poursuivront d'ici le dépôt du projet de loi au Parlement. Le Conseil national d'évaluation des normes ainsi que le Conseil national de l'habitat seront consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Mesure 1- Dispositif d'exemption

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

Mesure 2 : Suppression de la taxe d'habitation

La mesure entrera en vigueur à compter de l'année 2023, simultanément à la suppression de ladite taxe pour les résidences principales.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Mesures d'application

Un décret d'application en Conseil d'Etat sera à prendre pour modifier les dispositions relatives au mécanisme d'exemption à l'article R. 302-14 du code de la construction et de l'habitation, et notamment, préciser les critères d'isolement de la commune.

Un décret dit « décret-liste » sera par ailleurs pris pour fixer :

- la valeur de l'indicateur de tension devant permettre de déterminer les territoires SRU dont les communes pourront être exemptées d'obligations ;

- la liste des territoires SRU avec leur taux de tension sur la demande en logement social ;

- la liste des communes situées hors des agglomérations de plus de 30 000 habitants, constituant le vivier des communes éligibles à l'exemption au titre de l'isolement/mauvaise attractivité.

Le décret en Conseil d'Etat et le « décret liste » sont à prendre, au plus tard, avant la fin juin 2022 afin que la procédure d'exemption pour la période triennale 2023-2025, prévue à l'article R. 302-4 du code de la construction et de l'habitation, puisse dument être conduite (remontée des propositions d'exemption avant le 30 septembre 2022 assorties des avis des préfets, signature du décret fixant la liste des communes exemptées avant le 31 décembre 2022).

Article 16 : Possibilité pour le préfet de département de prendre des mesures correctives en cas de non-utilisation ou d'utilisation conforme à la loi, par les bénéficiaires locaux

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Principe de la loi SRU

L'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, modifiée, dite « loi SRU », codifié aux articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation (CCH), impose aux communes de plus de 3 500 habitants (1 500 dans l'unité urbaine de Paris) comprises dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et/ou une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, une part de logements locatifs sociaux représentant 20 à 25 % des résidences principales, selon le niveau de tension sur la demande de logement social du territoire.

Chaque commune soumise à la loi SRU et déficitaire au regard de cette obligation, est, d'une part, redevable d'un prélèvement annuel opéré sur ses ressources et, d'autre part, soumise à un rythme de rattrapage triennal devant lui permettre d'atteindre le taux légal et dont le respect fait l'objet d'un bilan tous les trois ans.

Le législateur a souhaité mettre en place, avec le prélèvement SRU, un mécanisme vertueux favorisant la production du logement social : d'une part, les dépenses engagées par les communes en faveur du logement social sont déduites du prélèvement, d'autre part, celui-ci est versé majoritairement à des bénéficiaires locaux, en vue de développer sur les territoires des opérations de logement social.

Modalités de détermination du prélèvement SRU et bénéficiaires

En application de l'article L 302-7 du CCH, le prélèvement est directement proportionnel au potentiel fiscal et au déficit en logement social, et est minoré des dépenses effectuées en faveur de la production de logement social.

Les prélèvements nets, hors majoration liée à la carence, sont versés par ordre de priorité aux bénéficiaires suivants :

- à l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre délégataire des aides à la pierre, si l'EPCI d'appartenance de la commune a pris cette compétence ;

- à défaut, à l'établissement public foncier local (hors Ile de France) ou à l'office foncier de Corse (OFC), si la commune appartient à un tel établissement.

- à défaut, à l'établissement public foncier d'Etat, si la commune est située dans le périmètre de compétence d'un tel établissement.

- à défaut, au fonds national des aides à la pierre (FNAP) ou, dans les DROM, au fonds régional d'aménagement foncier et urbain.

Dans le cas des communes carencées, en application de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, la majoration du prélèvement est exclusivement versée au fonds national des aides à la pierre.

Utilisation des fonds issus du prélèvement SRU

Pour les EPCI délégataires des aides à la pierre, l'article L. 302-7 du code de la construction prévoit que les sommes issues du prélèvement doivent être utilisées pour financer des acquisitions foncières et immobilières en vue de la réalisation de logements locatifs sociaux.

Outre le FNAP, dont l'objet est fléché sur le financement d'opérations de logements sociaux, les prélèvements versés aux autres bénéficiaires (EPF, OFC, FRAFU) ne font pas l'objet d'un fléchage spécifique vers la production de logements sociaux. Toutefois, en application des articles L. 324-1, L. 321-1 du CCH et L4424-26-1 du CGCT, les EPF, qu'ils soient locaux ou d'Etat ainsi que l'office foncier de Corse, mettent en place des stratégies foncières devant contribuer à la réalisation de logements, notamment de logements sociaux.

Le dernier alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation prévoit, enfin, que les EPF, l'OFC ainsi que les EPCI délégataires des aides à la pierre transmettent chaque année à l'autorité administrative compétente de l'Etat un rapport sur l'utilisation des sommes qui leur ont été reversées ainsi que sur les perspectives d'utilisation des sommes non utilisées. En outre, le bilan des actions des EPF est présenté chaque année devant le comité régional de l'habitat et de l'hébergement.

Montants 2020 des prélèvements SRU

Le montant du prélèvement brut effectué, en 2020, s'élève à 196,49 M€ dont 153,05 M€ de prélèvement de base (hors majorations pour les communes carencées) et 43,44 M€ de majorations sur les communes carencées. Après plafonnement et déduction des dépenses déductibles, le montant du prélèvement net s'établit à près de 85,454 M€ dont 59,993 M€ de prélèvements de base et près de 25,461 M€ au titre des majorations.

Le prélèvement net hors majoration a été versé aux bénéficiaires suivants :

- 23,665 M€ pour les EPCI délégataires des aides à la pierre ;

- 8,203 M€ pour les établissements publics fonciers locaux ou l'office foncier de Corse;

- 24,79 M€ pour les établissements publics foncier d'Etat ;

- 3,334 M€ pour le fonds national des aides à la pierre (métropole) ou fonds régional d'aménagement foncier et urbain (DROM).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur la constitutionnalité du dispositif SRU (notamment les décisions n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000 et n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013). Ce dernier a été jugé conforme à la Constitution car poursuivant un objectif de mixité sociale, défini avec suffisamment de précision par l'article 55 de la loi SRU. Cette mesure ne soulève donc pas de problèmes de constitutionnalité.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Dans son récent rapport relatif à l'application de l'article 55 la loi SRU, la Cour des comptes recommande d'inscrire l'obligation de rendre compte de l'emploi des sommes issues des prélèvements SRU pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), à travers les éléments de suivi annuel de la convention de délégation des aides à la pierre, et au fil de l'eau pour les établissements publics fonciers (EPF), en donnant à l'État la possibilité d'agir si l'usage des crédits n'est pas conforme à ce qui est attendu (recommandation n°5).

La mesure proposée, prise en cohérence avec la recommandation de la Cour des comptes et qui ouvre la possibilité pour l'État d'agir si l'usage des crédits par les bénéficiaires n'est pas conforme à ce qui est attendu, implique une modification de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure proposée vise à améliorer le suivi des fonds issus du prélèvement SRU ainsi que l'efficience et l'effectivité du dispositif de réutilisation de ces fonds sur les territoires en faveur du logement social.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

L'option d'un statu quo sur les règles actuelles, avec un simple renforcement du suivi via un pilotage plus rapproché du dispositif, a été écartée. L'introduction de mesures plus contraignantes, permettant au préfet d'apporter des mesures correctives en cas de non-utilisation des fonds est apparue nécessaire pour garantir l'efficience du dispositif.

3.2. OPTION RETENUE

Il est prévu la possibilité pour le préfet de département de prendre des mesures correctrices s'il constate, une utilisation des sommes prélevées non prévue par la loi ou une utilisation insuffisante de ces sommes. En particulier, il est envisagé, dans ce cas, qu'une partie, voire la totalité, de ces crédits ayant fait l'objet d'une utilisation non conforme soit reversée à un autre bénéficiaire, suivant l'ordre de priorité prévu dans la loi.

Un décret en Conseil d'Etat déterminera les modalités d'application de cette mesure.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La mesure proposée, qui n'impactera pas le montant des prélèvements effectués, est sans effet d'un point de vue macro-économique.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La mesure proposée, qui n'impactera pas le montant des prélèvements effectués, est sans effet sur les entreprises.

4.2.3. Impacts budgétaires

La mesure proposée, qui n'impactera pas le montant des prélèvements effectués, est sans effet sur le plan budgétaire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure proposée n'impactera pas le montant des prélèvements effectués. Toutefois, le suivi renforcé de l'utilisation des fonds prélevés pourrait, le cas échéant, impacter les prélèvements versés aux EPCI délégataires des aides à la pierre.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure proposée n'impactera pas le montant des prélèvements effectués. Toutefois, cette mesure, basé sur un suivi renforcé de l'utilisation des fonds prélevés, impliquera la formalisation de la procédure d'examen du bilan de l'utilisation des fonds par les bénéficiaires locaux, puisque celle-ci pourra déboucher sur la mise en place, par le préfet de département, de mesures correctives. Les impacts resteront limités, s'agissant de procédures préexistantes.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes ainsi que le Conseil national de l'habitat ont été consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble des territoires de la République soumis à l'application de l'article 55 de la loi SRU faisant l'objet de prélèvements.

5.2.3. Mesures d'application

Un décret en Conseil d'Etat déterminera la procédure, le contenu et les modalités de mise en oeuvre des mesures correctrices relatives à l'utilisation des fonds prélevés.

Article 17 : Suppression de l'échéance de 2025 pour l'atteinte des obligations légales et définition d'un rythme de rattrapage uniforme à 33% du nombre de logements sociaux locatifs manquants, porté à 50% et 100% à l'approche de l'objectif légal.

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, modifiée, dite « loi SRU », codifié aux articles L. 302-5 et suivants du code de la construction et de l'habitation (CCH), impose aux communes de plus de 3 500 habitants (1 500 dans l'unité urbaine de Paris) comprises dans un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et/ou une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, une part de logements locatifs sociaux 48 ( * ) représentant 20 à 25 % des résidences principales, selon le niveau de tension sur la demande de logement social du territoire, d'ici à 2025.

Les obligations de production de logements sociaux constituent un pilier de la politique de développement de l'offre et de mixité sociale portée par le gouvernement. Depuis sa création, la loi SRU a permis de catalyser la production de logement locatif social à destination des personnes les plus démunies comme des classes moyennes et a contribué à renforcer et rééquilibrer la production de logement social sur notre territoire dans l'objectif d'aller vers plus de mixité sociale. Ainsi, aujourd'hui, près de la moitié des logements sociaux financés chaque année l'est dans les communes soumises à la loi SRU.

Chaque commune soumise à la loi SRU et déficitaire en regard de cette obligation, est, d'une part, redevable d'un prélèvement annuel opéré sur ses ressources, directement proportionnel à son potentiel fiscal et au déficit en logement social, et, d'autre part, soumise à un rythme de rattrapage triennal devant lui permettre d'atteindre le taux légal en 2025, et dont le respect fait l'objet d'un bilan tous les trois ans.

Au vu de ce bilan, si la commune n'a pas respecté ses objectifs de rattrapage, et après avis de la commission nationale SRU et du comité régional de l'habitat et de l'hébergement, le préfet peut prononcer la carence de la commune. A cet effet, il prend un arrêté de carence à l'encontre de la commune qui emporte le transfert de certaines prérogatives du maire au préfet, soit automatiquement (droit de préemption urbain, utilisation du contingent de réservation communal), soit de manière optionnelle (délivrance des permis de construire). Le préfet peut également majorer le prélèvement financier de la commune, jusqu'au quintuplement, sans toutefois dépasser 5 ou 7,5 % des dépenses réelles de fonctionnement.

Au titre du bilan annuel 2020 (inventaire au 1 er janvier 2019), sur 2 091 communes concernées par l'article 55 de la loi SRU, 767 communes ont atteint le taux cible (25% ou 20% selon les cas), 1 100 communes sont déficitaires en logements sociaux et astreintes à obligations de rattrapage et 224 sont exemptées de l'application de la loi.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur la constitutionnalité du dispositif SRU (notamment les décisions n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000 et n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013). Ce dernier a été jugé conforme à la Constitution car poursuivant un objectif de mixité sociale, défini avec suffisamment de précision par l'article 55 de la loi SRU.

Cette mesure ne soulève donc pas de problème de constitutionnalité.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Bien que l'essentiel des dispositions de la loi demeure applicable sans limitation de durée aux communes déficitaires, le cadre législatif actuel de fixation des objectifs s'inscrit dans le respect d'une échéance fixe, le 31 décembre 2025.

Cette échéance a été introduite par la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, afin d'accélérer la production de logement sociaux, en renforçant le rythme de rattrapage imposé aux communes pour combler leur déficit de logement sociaux. Ainsi, l'article L. 302-8 du CCH prévoit que l'objectif de rattrapage correspond à 25 % des logements sociaux manquants de la commune au titre de la cinquième période triennale, objectif porté à 33 % au titre de la sixième période triennale, 50 % pour la septième période triennale et 100 % pour la huitième période triennale. Toutefois, dans un souci d'équité avec les communes anciennement soumises au dispositif, la loi a permis à toutes les communes nouvellement entrantes dans le dispositif SRU, depuis le 1 er janvier 2015, de disposer, par dérogation à l'échéance de 2025, de cinq périodes triennales pleines pour atteindre l'objectif légal de logement social, en calant les objectifs de rattrapage en conséquence. L'accroissement des objectifs de rattrapage découlant de la loi du 18 janvier 2013 précitée s'est indéniablement accompagné d'une augmentation des réalisations, comme l'indique le graphique ci-dessous.

*Taux d'atteinte des objectifs triennaux

L'inscription dans la loi d'une échéance fixe à 2025, pour mise en conformité de toutes les communes soumises avant le 1 er janvier 2025 avec leur obligation SRU, et l'arrêt au-delà de cette échéance du mécanisme de fixation d'objectifs de rattrapage calculés sur la base de leur déficit actualisé, fragilise le dispositif, dans la mesure où une part importante des communes soumises n'aura pas atteint le taux légal à cette échéance. En effet, sur les 975 communes soumises aux obligations de production avant le 1 er janvier 2015 , 681 sont soumises au taux légal de 25% de logements sociaux (dont 211 disposent de moins 10 % de LS) et 294 au taux légal de 20% de logements sociaux (dont 63 disposent de moins de 10% de logements sociaux), pouvant être réparties comme suit :

- 0 à 2 points d'écart à l'objectif : 83 communes (9%) ;

- 3 à 5 points d'écarts à l'objectif : 173 communes (18%) ;

- 6 à 10 points d'écarts à l'objectif : 270 communes (28%) ;

- + 10 points d'écarts à l'objectif : 449 communes (46%).

Ainsi, à l'exception des communes soumises depuis le 1 er janvier 2015 aux obligations SRU, le dispositif devient pour partie inopérant au-delà de 2025, l'article L. 302-8 du CCH ne définissant plus d'objectifs de rattrapage pour les communes qui n'auront pas atteint l'objectif légal à cette échéance, rendant une évolution législative nécessaire.

En outre, il apparait que l'objectif de la période triennale 2023-2025 (actuellement égal à 100% du déficit de logement locatifs sociaux) nécessitera également d'être adapté pour être rendu plus cohérent avec la réalité des territoires, tout en lui conservant un caractère à la fois ambitieux mais soutenable. Pour rappel, les objectifs assignés aux communes entrées dans le dispositif SRU avant le 1 er janvier 2015, pour la période 2020-2022, correspondent à 50 % de leur déficit, soit de manière cumulée autour de 270 000 logements, chiffre en augmentation importante par rapport à l'objectif triennal 2017-2019 (196 671 logements). Face cette augmentation des objectifs, il est probable que la part des communes qui ne rempliront pas leurs objectifs quantitatifs s'accroisse, dont des communes engagées dans des démarches volontaristes de production.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure proposée vise à écrire dans la loi, de manière non équivoque, la continuité pleine et entière du dispositif « article 55 » après 2025, pour les communes qui ne se seraient pas conformées à leurs obligations à l'échéance précitée, et à définir un rythme de rattrapage permettant de conserver la dynamique de production observée lors des dernières périodes triennales tout en tenant compte de la capacité des territoires et des acteurs du logement à produire.

La définition d'un rythme de rattrapage ambitieux, mais réaliste, permettra de crédibiliser l'action de l'Etat dans le pilotage du dispositif SRU et d'appliquer d'autant plus fermement les sanctions vis-à-vis des communes ne remplissant pas leurs objectifs triennaux.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La première option envisagée prolonge le système prévu par la loi du 18 janvier 2013, en établissant une nouvelle échéance fixe, pour mise en conformité des communes avec leur obligation, et un principe d'objectifs triennaux progressifs jusqu'à 100% lors de la dernière période. A la différence du dispositif existant, l'échéance serait toutefois différenciée selon le taux de logement social de la commune : les communes les plus éloignées de l'objectif disposeraient d'une échéance plus lointaine, pour lisser les objectifs quantitatifs dans le temps.

Les possibilités de report de l'échéance sont limitées pour assurer un niveau d'ambition de départ suffisant (minimum 25% ou 33% du rattrapage). Ainsi, le rythme de rattrapage serait modulé par l'ajout d'une à quatre périodes triennales supplémentaires (au-delà du triennal 2023-2025), avec nécessité de recalage des obligations des communes entrées dans le dispositif SRU au 1 er janvier 2015, afin d'éviter que celles-ci ne se voient appliquer un rythme de rattrapage supérieur à celui incombant aux communes entrées avant cette date. La nouvelle échéance maximale d'atteinte des objectifs hors « communes nouvelles » deviendrait 2037.

Le tableau ci-dessous présente de manière synthétique la proposition et son adaptation aux différentes situations des communes.

Le dispositif étant borné dans le temps, pour éviter la situation d'arrêt à l'échéance lorsque la commune n'a pas atteint l'objectif (situation résultant de l'application actuelle du droit), il conviendrait de prévoir dans la loi l'obligation de respecter ensuite un taux de rattrapage « glissant » de 100% du déficit.

Ce scénario a été écarté au regard de ses faiblesses :

- manque de cohérence pour les « nouvelles entrantes », ces dernières disposant, à situations de départ comparables, d'un délai plus court que les communes entrées dans le dispositif avant le 1 er janvier 2015 ;

- ajout de quatre périodes triennales, déjà significatif, ne serait pas forcément suffisant pour toutes les communes soumises au taux de 25% (majoritaires) ;

- risque d'accroissement très significatif des objectifs dans le temps, accru en cas de non atteinte sur les triennaux précédents ;

- complexité du dispositif et manque de lisibilité.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue s'inspire de la loi SRU, telle qu'elle a été conçue à l'origine, avec un objectif de rattrapage uniforme et permanent pour toutes les communes soumises (15% du déficit en logements sociaux locatifs par période triennale dans la loi SRU originelle), mais en apportant des améliorations à ce dispositif historique.

Ainsi, la loi fixerait un rythme de rattrapage de référence, applicable à toutes les communes, qui serait fixé à 33% du nombre de logements sociaux locatifs manquants. L'objectif de rattrapage serait automatiquement augmenté dès lors que le taux de logement social de la commune se rapproche de l'objectif afin d'éviter, d'une part, une décélération de la production, et d'autre part, une situation asymptotique à l'atteinte de l'objectif. A ce titre, les communes à deux points et moins du taux cible pourraient se voient assigner un objectif calé sur 100% du déficit et celles entre deux et quatre points du taux cible un objectif calé sur 50% du déficit.

Cette mesure conduit à maintenir un niveau de production ambitieux, s'inscrivant dans la continuité des objectifs fixés sur les périodes triennales passées. En effet, l'objectif cumulé pour une période triennale, appliqué aux 1 100 communes soumises en 2020, calculé selon cette méthode, s'élèverait à 219 400 logements sociaux. Si l'on appliquait uniquement le taux de 33%, l'objectif cumulé s'élèverait à 197 000. A titre de comparaison, sur la période 2017-2019, pour 1 035 communes soumises à bilan, l'objectif s'élevait à 196 671 logements sociaux et le réalisé à 210 737 logements sociaux.

Toutefois, pour assurer la soutenabilité de ce scénario à l'ensemble des communes, il convient d'introduire deux mécanismes d'ajustement :

- pour les communes « nouvellement entrantes », en cohérence avec le dispositif existant, pour leur permettre une montée en charge progressive et leur laisser le temps nécessaire à la mise en place d'une politique volontariste en matière de logement social, appuyée par la mobilisation des outils nécessaires ;

- pour adapter temporairement à la baisse, de manière dérogatoire, l'objectif de production fixé à 33%, lorsque ce dernier serait manifestement décorrélé des capacités à produire, au regard des contraintes affectant la commune, à la condition de s'engager dans une démarche de contractualisation des objectifs et des moyens dans le cadre d'un contrat de mixité sociale.

En outre, il est proposé que le préfet de département puisse, après accord du maire, rehausser l'objectif de réalisation de référence dès lors que le fonctionnement des marchés locaux de l'habitat le permet.

En comparaison avec le scénario alternatif présenté au 3.1, cette option est plus simple d'application et plus lisible pour les différents acteurs qui ont en charge la mise en oeuvre du dispositif SRU.

En conclusion, il est proposé de modifier le VII de l'article L. 302-8 du CCH afin d'inscrire dans la loi un rythme « glissant » de rattrapage de référence (33 %, porté à 50 % ou 100 % à mesure que la commune s'approche du taux cible), ainsi que des possibilités dérogatoire (à la baisse sous réserve de conclusion d'un contrat de mixité sociale) et à la hausse (avec l'accord du maire concerné).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation.

Cette évolution s'accompagne d'une mesure visant à la mise en conformité des programmes locaux de l'habitat (ou document en tenant lieu) dans un délai de deux ou trois ans selon les cas, reprenant ainsi les délais et procédures préexistants au II de l'article L. 302-4 du CCH et à l'article L. 131-9 du code de l'urbanisme (procédure de mise à jour des programmes locaux de l'habitat (PLH) en cas de nouvelles obligations SRU incombant à une commune).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Près de la moitié de la production locative sociale 49 ( * ) nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. La poursuite de ce dispositif incitatif, pour les communes qui le nécessitent, constituera un soutien à l'appareil de production, et donc à l'économie du bâtiment.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. La poursuite de ce dispositif incitatif, pour les communes qui le nécessitent, constituera un soutien aux entreprises du secteur du bâtiment.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans présenter d'impact budgétaire en soi, la mesure proposée contribuera à poursuivre l'orientation majoritaire des aides à la pierre vers les territoires assujettis à l'article 55 SRU.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Commune :

Les communes n'ayant pas rempli les obligations fixées par la loi à l'échéance de 2025 devront poursuivre leurs efforts de production en faveur du développement d'une offre locative sociale sur leur territoire, au bénéfice des ménages les plus modestes, rencontrant des difficultés à se loger.

Le dispositif conduit à fixer pour ces communes des objectifs ambitieux mais lissés dans le temps et tenant compte de leur capacité à produire. Il se substitue en particulier, pour la période 2023-2025, à un objectif théorique de 100% de rattrapage du déficit en l'état du droit.

EPCI :

En application de l'article L. 302-8 du CCH, les PLH couvrant une ou des communes soumises aux obligations de la loi SRU doivent intégrer les objectifs de réalisation de logements sociaux permettant à ces communes d'atteindre leur taux légal de logement social. Cette mesure de lissage des objectifs triennaux et de meilleure prise en compte des réalités territoriales permettra de disposer, sur tous les territoires, de documents de programmation et de planification qui comprennent des objectifs, certes ambitieux, mais plus réalistes au regard de la capacité à faire des territoires. On estime à 231 le nombre d'intercommunalités de plus de 50 000 habitants et comprenant une commune de plus de 15 000 habitants, couvertes par un PLH ou un PLUiH (source : banatic), concernées par une obligation de mise en conformité avec la présente loi.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure induit la poursuite de la fixation des objectifs et de la réalisation du bilan triennal par les préfets, dans un cadre contradictoire avec les maires. Elle n'induit qu'un prolongement d'une pratique administrative existante, assurée aujourd'hui par les services de l'État, sans impliquer nécessairement de renforcement des moyens consacrés.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

La poursuite du dispositif SRU maintient une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables pour tous les publics, dont les personnes en situation de handicap puisque ces logements sont soumis aux règles de droit commun en matière d'accessibilité. L'impact de la mesure est donc positif pour les personnes en situation de handicap, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues (notamment l'Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur, départements littoraux du sud) où l'accès au logement est le plus difficile.

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

La poursuite du dispositif SRU maintient une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables pour tous les publics, dont les jeunes. L'impact de la mesure est donc positif pour ces derniers, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La poursuite du dispositif SRU maintient une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables, auxquels 72 % des ménages sont éligibles. L'impact de la mesure est donc positif pour les particuliers, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La poursuite du dispositif SRU maintient une forte incitation à produire des logements locatifs sociaux neufs, répondant aux normes environnementales en vigueur voire au-delà, principalement collectifs, majoritairement dans les secteurs bien desservis par les réseaux de transport publics des agglomérations urbaines. La mesure induit ainsi une incitation au développement d'une offre de logement particulièrement performante au regard des critères de développement durable.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Cette proposition est issue des recommandations rendues, le 27 janvier 2021, par la commission nationale SRU, dans le cadre de la mission confiée par la ministre chargée du logement à son président le 3 décembre 2020. Cette mission avait pour objectif de réfléchir à des propositions d'évolution des dispositions législatives relatives au dispositif issu de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000. La commission nationale SRU comprend des représentants des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales, des, parlementaires, des associations pour le logement des personnes défavorisées et des personnalités qualifiées.

Par ailleurs, des réunions ont eu lieu entre la ministre du logement et les associations représentatives des collectivités locales, et se poursuivront d'ici le dépôt du projet de loi au Parlement.

Le Conseil national d'évaluation des normes ainsi que le Conseil national de l'habitat seront consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble des territoires de la République soumis à l'article 55 de la loi SRU modifiée.

5.2.3. Mesures d'application

Un décret d'application pris en Conseil d'Etat est nécessaire pour définir les modalités de mise en oeuvre de la procédure d'abaissement des objectifs triennaux de rattrapage.

Article 18 : Instauration du contrat de mixité sociale (CMS) comme outil de contractualisation d'engagement et de moyens favorisant l'atteinte des objectifs légaux en matière de production de logements sociaux

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'instruction du Gouvernement du 30 juin 2015 relative au renforcement de l'application des obligations pour les communes soumises à l'article L. 302-5 du CCH à l'issue du bilan de la quatrième période triennale 2011-2013 a encouragé les communes rencontrant des difficultés à atteindre leurs objectifs triennaux de production, et tout particulièrement les communes carencées, à s'engager dans une démarche partenariale, dans le cadre des contrats de mixité sociale (CMS) signés avec l'Etat.

Le contrat de mixité sociale doit proposer un cadre opérationnel d'actions permettant l'atteinte des obligations légales de la commune et préciser les moyens que celle-ci s'engage à mobiliser pour atteindre ses objectifs de rattrapage et notamment la liste des outils et des actions à déployer, notamment sur les volets suivants :

- foncier : intervention d'un établissement public foncier (EPF), modalités de mise en oeuvre du droit de préemption urbain, etc.

- urbanisme réglementaire : modification des documents d'urbanisme, etc.

- urbanisme opérationnel : part des logements et des logements sociaux dans les projets d'aménagement, allant au-delà des clauses de mixité sociales prévues par la loi, etc.

- programmatique (pour présenter les projets envisagés)

- financier (formalisation des moyens financiers engagés par la commune pour réaliser des logements sociaux),

- attributions de logements locatifs sociaux .

Le contrat, tel que prévu par l'instruction, couvre au minimum deux périodes triennales et peut également être signé par l'ensemble des acteurs et partenaires de la commune intervenant sur son territoire : EPF, établissement publics de coopération intercommunale (EPCI), bailleurs sociaux, Agence nationale de l'habitat ou conseil départemental. Le délégataire des aides à la pierre doit être systématiquement associé à la signature.

Le contrat de mixité sociale constitue donc un cadre de mise en cohérence des actions et des acteurs autour d'un objectif partagé, à même de déclencher des dynamiques de production. L'engagement dans cette démarche se veut volontaire, en aucun cas obligatoire, ou systématique dès lors qu'une commune est carencée.

Le contrat de mixité sociale a vocation à faire l'objet d'évaluations régulières entre l'Etat et les collectivités (suivi a minima annuel) et à être modifié, pour prendre en compte les évolutions de la situation communale.

Selon les données disponibles, en 2020, environ 230 CMS ont été signés depuis 2015, dont un peu moins d'une trentaine par des communes qui n'ont jamais été carencées.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur la conformité à la Constitution du dispositif SRU (notamment les décisions n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000 et n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013). Ce dernier a été jugé conforme à la Constitution car poursuivant un objectif de mixité sociale, défini avec suffisamment de précision par l'article 55 de la loi SRU.

Cette mesure ne soulève donc pas de problème de constitutionnalité.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

En cohérence avec la définition de nouveaux rythmes de rattrapage proposée par le projet de loi (suppression de l'échéance de 2025, définition de rythmes de rattrapage glissants sur une référence de 33% du déficit), la présente mesure vise à définir le cadre dérogatoire d'adaptation des objectifs triennaux, qui peut être mobilisé lorsque des contraintes particulières s'opposent à l'atteinte, par une commune, de ses obligations.

Afin d'assurer une forte ambition au dispositif SRU et garantir le volontarisme des communes concernées, ces adaptations aux rythmes de rattrapage de référence doivent s'inscrire dans une logique de contractualisation d'objectifs et de moyens que le CMS garantit.

Aussi, il est nécessaire de donner une assise législative à ces contrats, actuellement définis par instruction, en créant un article L. 302-8-1 dans le code de la construction et de l'habitation, qui permet, d'une part, d'instituer les CMS et d'en définir les contours (I) et, d'autre part, de définir les modalités particulières d'adoption des contrats portant abaissement des objectifs triennaux de rattrapage (II).

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure vise à définir un cadre d'aménagement des objectifs triennaux SRU assurant à la fois la soutenabilité du dispositif SRU lorsque les objectifs fixés en référence apparaissent trop élevés au regard des capacités à produire et des contraintes observées, tout en fixant des contreparties et des garanties (avis de la commission nationale SRU, suivi régulier des engagements) évitant d'altérer l'atteinte de l'objectif de mixité sociale fixé par la loi.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le maintien du dispositif existant en matière d'aménagement des obligations SRU a été écarté, celui-ci apparaissant très lourd dans sa mise en oeuvre (mobilisation de la commission départementale et de la commission nationale qui entend les maires des communes, décision ministérielle suite à l'avis de la commission nationale). Par ailleurs, la décision d'aménager les objectifs a lieu actuellement dans un délai pouvant aller jusqu'à un an et demi après le démarrage de la période triennale, ce qui peut impacter la programmation engagée pour la période triennale en cours, si la décision est défavorable.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue consiste à prévoir, au II de l'article L. 302-8 du CCH, dans le cadre d'un contrat de mixité sociale, un abaissement temporaire des objectifs de rattrapage des communes rencontrant des difficultés avérées pour remplir leurs obligations si les objectifs fixés sont manifestement décorrelés de leur capacité à produire. Les communes, avec l'accord de leur EPCI de rattachement, proposent au représentant de l'Etat dans le département, la signature d'un tel contrat.

Les taux déterminant les objectifs de rattrapage (33%, 50% ou 100%, selon la situation de la commune) peuvent être abaissés, de manière dérogatoire et pour une durée limitée (deux périodes triennales consécutives au maximum) sans pouvoir être inférieurs à un seuil plancher fixé par la loi (25%, 40% ou 80% selon le taux de la commune).

Ces taux dérogatoires sont définis par un contrat de mixité sociale conclu entre le préfet, la commune et l'intercommunalité, pour une durée maximale de six ans. Il est proposé que ces contrats portant abaissement de l'objectif triennal soient soumis à l'avis préalable de la commission nationale SRU, afin d'assurer une homogénéité de traitement entre les territoires et un niveau ambitieux de production.

Ce contrat, qui a vocation à être conclu en amont de la période triennale pour laquelle un abaissement des objectifs est envisagé, assure l'engagement de la commune dans une démarche volontariste de rattrapage de son retard, avec l'appui de l'EPCI qui mobilise ses différentes compétences au service de l'atteinte des objectifs contractuels. La mise en oeuvre des actions du contrat est en outre évaluée et prise en compte dans le cadre de la procédure de carence, ainsi que le prévoit la modification proposée à l'article L. 302-9-1.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Un article L. 302-8-1 est créé dans le code de la construction et de l'habitation pour instituer les contrats de mixité sociale et prévoir la procédure encadrant l'adaptation des objectifs de rattrapage, dans le cadre d'un contrat de mixité sociale. Corrélativement à la mise en oeuvre de ce nouveau dispositif, la procédure d'aménagement des obligations prévue à l'article L. 302-9-1-1 est supprimée. Dans le même temps, cet article prévoit que la commission nationale SRU émet des avis sur les projets de contrats de mixité sociale portant abaissement des objectifs triennaux.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. Cette mesure, qui ne peut porter que sur six ans au maximum, pour les communes qui le nécessitent, n'impactera pas l'appareil de production, et donc l'économie du bâtiment.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. Cette mesure, qui ne peut porter que sur six ans au maximum, pour les communes qui le nécessitent, n'impactera pas l'appareil de production, et donc l'économie du bâtiment.

4.2.3. Impacts budgétaires

Sans présenter d'impact budgétaire, la mesure proposée contribuera à poursuivre l'orientation majoritaire des aides à la pierre vers les territoires assujettis à l'article 55 de la loi SRU.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les communes ayant des difficultés avérées à respecter les taux de rattrapage de référence fixés par la loi pourront, pour une période de six ans, disposer d'objectifs de rattrapage en phase avec leur capacité de production et mieux anticiper leur production pour remplir leurs objectifs triennaux.

Cette mesure permettra de donner au mécanisme SRU la souplesse nécessaire à la prise en compte des réalités locales, et permettra aux communes de continuer à se mobiliser pour développer une offre de logement social.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Le contrat de mixité sociale existe déjà depuis 2015. Cette mesure n'induit qu'un prolongement d'une pratique administrative existante, assurée aujourd'hui par les services de l'État, sans impliquer nécessairement de renforcement des moyens consacrés.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Cette mesure maintient une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables pour tous les publics, dont les personnes en situation de handicap puisque ces logements sont soumis aux règles de droit commun en matière d'accessibilité. L'impact de la mesure est donc positif pour les personnes en situation de handicap, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

Cette mesure maintient une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables pour tous les publics, dont les jeunes. L'impact de la mesure est donc positif pour ces derniers, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Cette mesure maintient une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables, auxquels 72 % des ménages sont éligibles. L'impact de la mesure est donc positif pour les particuliers, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cette mesure maintient une forte incitation à produire des logements locatifs sociaux neufs, répondant aux normes environnementales en vigueur voire au-delà, principalement collectifs, majoritairement dans les secteurs bien desservis par les réseaux de transport publics des agglomérations urbaines. La mesure induit ainsi une incitation au développement d'une offre de logement particulièrement performante au regard des critères de développement durable.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Cette proposition est issue des recommandations rendues le 27 janvier 2021 par la commission nationale SRU, dans le cadre de la mission confiée par la ministre chargée du logement à son président le 3 décembre 2020. Cette mission avait pour objectif de réfléchir à des propositions d'évolution des dispositions législatives relatives au dispositif issu de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000. La commission nationale SRU comprend des représentants des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales, des, parlementaires, des associations pour le logement des personnes défavorisées et des personnalités qualifiées.

Par ailleurs, des réunions ont eu lieu entre la ministre du logement et les associations représentatives des collectivités locales, et se poursuivront d'ici le dépôt du projet de loi au Parlement.

Le Conseil national d'évaluation des normes ainsi que le Conseil national de l'habitat seront consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble des territoires de la République soumis à l'article 55 de la loi SRU modifiée.

5.2.3. Textes d'application

Un décret d'application en Conseil d'Etat sera à prendre pour définir le contenu du contrat de mixité sociale, ses modalités d'élaboration et d'adoption, notamment, en cas d'adaptation des objectifs triennaux de rattrapage.

Article 19 : Prise en compte dans la procédure de bilan triennal des objectifs définis par le contrat de mixité sociale et renforcement des sanctions financières applicables aux communes carencées par l'instauration de taux de majorations « plancher »

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Chaque commune soumise à la loi SRU et déficitaire au regard de cette obligation est soumise à un rythme de rattrapage triennal devant lui permettre d'atteindre le taux légal en 2025.

En application de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH), le représentant de l'Etat dans le département engage la procédure de bilan triennal et de constat de carence, à l'encontre de toute commune n'ayant pas atteint, au terme de la période triennale échue, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser en application du I de l'article L. 302-8 du même code (objectifs quantitatif) ou n'ayant pas respecté l'objectif de production équilibrée (quota minimal de 30% de prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) et maximal de 30% (ou 20% selon les cas) de prêts locatifs sociaux (PLS)).

Suite à une procédure contradictoire conduite avec la commune et en tenant compte du taux de réalisation des objectifs, et le cas échéant, des difficultés rencontrées par la commune et des projets de logements sociaux en cours de réalisation, le représentant de l'Etat dans le département peut prononcer la carence de la commune, après avis du comité régional de l'habitat et de l'hébergement et de la commission nationale SRU. A cet effet, il prend un arrêté de carence à l'encontre de la commune qui emporte le transfert de certaines prérogatives du maire au préfet, soit automatiquement (droit de préemption urbain, utilisation du contingent de réservation communal), soit de manière optionnelle (délivrance des permis de construire). Le préfet peut également majorer le prélèvement financier de la commune, jusqu'au quintuplement, sans toutefois dépasser 5% ou 7,5% des dépenses réelles de fonctionnement.

L'article comporte deux mesures se rapportant à cette mise en carence des communes.

Tout d'abord, la mesure propose d'indiquer que les objectifs du contrat de mixité sociale se substituent aux objectifs légaux, dès lors que le contrat de mixité sociale est conclu dans les conditions prévues au IX de l'article L. 302-8 (du présent projet de texte) et servent de référence dans le cadre de la procédure de bilan triennal et de carence. Il s'agit d'une mesure de mise en cohérence avec l'article 17.

En second lieu, les sanctions financières applicables aux communes carencées par l'instauration de taux de majorations « plancher » sont renforcées.

En effet, depuis la loi du 18 janvier 2013, lorsqu'une commune fait l'objet d'un arrêté de carence défini à l'article L. 302-9-1 du CCH, le préfet fixe la majoration du prélèvement applicable à la commune, dans la limite de cinq fois le montant du prélèvement, sans que la somme totale du prélèvement majoré ne puisse dépasser 5% des dépenses réelles de fonctionnement de la commune, voire 7,5% de ces dernières pour les communes dont le potentiel fiscal est supérieur de 150% au potentiel fiscal médian des communes soumises à prélèvement.

En cohérence avec les adaptations significatives du rythme de rattrapage proposé aux articles L. 302-8 et L. 302-8-1 du CCH (rythme de rattrapage glissant de 33% par période triennale et possibilité de diminuer les obligations dans le cadre d'un contrat de mixité sociale), et afin de maintenir l'équilibre général du dispositif SRU, la mesure proposée vise à instaurer un plancher minimum de majoration du prélèvement afin d'inciter les communes carencées à produire du logement social.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La mesure est conforme à la Constitution et s'inscrit dans le cadre défini par le Conseil constitutionnel lors de ses précédentes décisions puisqu'elle ne remet pas en cause la période d'échange contradictoire entre le préfet et la commune précédant la décision de carence. Cette mesure vise à introduire un plancher dans les taux de majoration applicables, afin de sanctionner plus efficacement les communes ne respectant pas la loi. Ces taux planchers restent gradués et modérés, notamment au regard du plafond de majoration (quintuplement du prélèvement) d'ores et déjà prévu dans la loi. En outre, le plafond à 5% (ou 7,5% selon les cas) des dépenses réelles de fonctionnement assure que la majoration ne porte pas atteinte à la libre administration des communes. Cette mesure vise également à inciter les communes à produire du logement social.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les deux mesures projetées modifient le deuxième alinéa de l'article L. 302-9-1 du CCH afin :

- d'une part, de prévoir que les objectifs définis dans le cadre du contrat de mixité sociale (dès lors qu'il est approuvé dans les conditions prévues par le présent projet de texte) servent de référence lors de la mise en oeuvre de la procédure de bilan triennal et de mise en carence des communes ayant conclu ledit contrat ;

- d'autre part, de préciser les taux de majorations plancher applicables aux communes carencées pour la première fois (qui correspondrait au rapport entre le nombre des logements sociaux non réalisés et l'objectif de la commune) et à celles carencées au titre de deux périodes triennales consécutives (qui correspondrait au doublement de la majoration). Cette modification portant sur la sanction des communes placées en constat de carence par le préfet, il est nécessaire de légiférer pour la mettre en oeuvre.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La première mesure (se référer à l'objectif du contrat de mixité sociale en lieu et place de l'objectif théorique dès lors qu'un contrat réduisant les objectifs triennaux est signé) relève de la mise en cohérence avec les dispositions du II de l'article L. 302-8 (article 17 du présent projet de loi) qui prévoit cette possibilité de réduction temporaire des objectifs.

En contrepartie des adaptations significatives du rythme de rattrapage proposé aux articles L. 302-8 et L. 302-8-1 du CCH (rythme de rattrapage glissant de 33% par période triennale et possibilité de diminuer les obligations dans le cadre d'un contrat de mixité sociale), le Gouvernement souhaite par ailleurs renforcer le niveau de sanction pris à l'encontre des communes qui ne respectent pas leurs objectifs de rattrapage sans raison objective valable. Cette mesure vise donc à encadrer les taux de majoration du prélèvement en fixant un taux de majoration plancher.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

Le présent projet de loi propose que les objectifs du contrat de mixité sociale puissent dans certaines conditions se substituer aux objectifs légaux. La seule option possible est d'inscrire, à l'article L. 302-9-1 du CCH, que ces objectifs ainsi définis dans les contrats de mixité sociale servent de référence dans le cadre du bilan triennal (comparaison des réalisations avec les objectifs notifiés).

L'instauration d'un plancher minimum de majoration des prélèvements pour les communes carencées faisant partie des sanctions liées à l'arrêté de carence, il est nécessaire de modifier l'article L. 302-9-1 du CCH pour définir des taux de majoration plancher.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie le deuxième alinéa de l'article L. 302-9-1 du CCH.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. L'ajout d'un critère supplémentaire d'appréciation de la décision de carence et l'instauration de taux de majoration plancher pour les communes SRU renforcent l'efficience d'application de la loi SRU dans sa globalité, contribueront à développer l'offre sociale et apporteront un soutien à l'appareil de production, et donc à l'économie du bâtiment.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. L'ajout d'un critère supplémentaire d'appréciation de la décision de carence et l'instauration de taux de majoration plancher pour les communes SRU renforcent l'efficience d'application de la loi SRU dans sa globalité, apporteront un soutien à l'appareil de production et donc à l'économie du bâtiment.

4.2.3. Impacts budgétaires

La mesure « renforcement des sanctions » aura un impact sur le prélèvement des communes qui ne construisent pas assez de logements sociaux puisqu'elle vise à augmenter le taux de majoration du prélèvement. Toutefois, si ces communes s'engagent dans des politiques actives de développement de l'offre sociale, leurs dépenses pourront venir en déduction du prélèvement et de la majoration. Ainsi, sur les 1 100 communes actuellement soumises à obligations de rattrapage, 326 communes ne font pas l'objet d'un prélèvement au titre de l'année 2020 grâce à leurs dépenses déductibles.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure « renforcement des sanctions » a un impact sur les finances des communes mises en carence pour la première fois ou pour la seconde fois consécutive, puisqu'elle définit des taux de majoration plancher. Toutefois, il convient de rappeler que le prélèvement SRU a toujours été conçu en tant qu'outil incitatif pour la production de logement social puisque les dépenses des communes en faveur de la production de logement social viennent en déduction du prélèvement et de la majoration.

Parmi les 126 communes carencées en 2020, sans l'avoir été en 2017 suite au bilan 2014-2016, 49 communes verraient leur taux de majoration augmenter en appliquant la règle du différentiel entre les réalisations de la commune et leurs objectifs. Cela représenterait près de 2,9 M€ de prélèvement brut supplémentaire pour ces communes pour un prélèvement brut total de 9,5 M€ (soit un total de 12,4 M€).

Parmi les 146 communes carencées pour la seconde fois consécutive, 82 communes ont un taux de majoration inférieur à 100%. L'instauration de ce plancher représenterait environ 10 M€ de prélèvement brut supplémentaire pour ces communes pour un prélèvement brut total de 25,5 M€ (soit un total de 35,5 M€).

A noter toutefois qu'il s'agit du prélèvement brut et que les dépenses des communes favorisant le développement de l'offre sociale viennent en déduction dudit prélèvement.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'instauration d'un taux plancher minimum de majoration en cas de carence sera sans impact sur les services déconcentrés de l'Etat. En effet, les services du préfet (DDT(M) et DEAL et DDFIP) définissent chaque année le montant du prélèvement majoré et recouvrent les sommes perçues pour les reverser aux bénéficiaires locaux et au fonds national des aides à la pierre (FNAP). L'encadrement des taux de majoration n'aura aucun effet sur l'activité des services déconcentrés.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Ces mesures doivent contribuer à maintenir une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables pour tous les publics, dont les personnes en situation de handicap puisque ces logements sont soumis aux règles de droit commun en matière d'accessibilité. L'impact de ces mesures est donc positif pour les personnes en situation de handicap, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues (notamment l'Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'azur, départements littoraux du sud) où l'accès au logement est le plus difficile.

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

Ces mesures doivent contribuer à maintenir une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables pour tous les publics, dont les jeunes. L'impact de ces mesures est donc positif pour ces derniers, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Ces mesures doivent contribuer à maintenir une forte incitation à produire des logements locatifs à loyers abordables, auxquels 72 % des ménages sont éligibles. L'impact de ces mesures est donc positif pour les particuliers, d'autant que près de 70 % des communes soumises à l'article 55 de la loi SRU sont situées dans les zones de marché les plus tendues, où l'accès au logement est le plus difficile.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Ces mesures doivent contribuer à maintenir une forte incitation à produire des logements locatifs sociaux neufs, répondant aux normes environnementales en vigueur voire au-delà, principalement collectifs, majoritairement dans les secteurs bien desservis par les réseaux de transport publics des agglomérations urbaines. Les mesures induisent ainsi une incitation au développement d'une offre de logement particulièrement performante au regard des critères de développement durable.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Ces propositions sont issues des recommandations rendues, le 27 janvier 2021, par la commission nationale SRU, dans le cadre de la mission confiée par la ministre chargée du logement à son président le 3 décembre 2020. Cette mission avait pour objectif de réfléchir à des propositions d'évolution des dispositions législatives relatives au dispositif issu de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000. La commission nationale SRU comprend des représentants des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales, des parlementaires, des associations pour le logement des personnes défavorisées et des personnalités qualifiées.

Par ailleurs, des réunions ont eu lieu entre la ministre du logement et les associations représentatives des collectivités locales, et se poursuivront d'ici le dépôt du projet de loi au Parlement.

Le Conseil national d'évaluation des normes ainsi que le Conseil national de l'habitat seront consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les mesures proposées s'appliquent à l'ensemble des territoires de la République soumis à l'article 55 de la loi SRU modifiée.

Article 20 : Suppression de la procédure d'aménagement des objectifs triennaux et des commissions départementales

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, en instituant, à l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH), la procédure d'aménagement des objectifs triennaux de rattrapage des obligations de logement social (et en créant par la même occasion la commission nationale SRU), a apporté de la souplesse au dispositif SRU en permettant l'aménagement des obligations triennales.

Ainsi, lorsque la commission départementale a jugé qu'il n'était pas possible à la commune de respecter ses obligations, le préfet peut saisir la commission nationale (cette saisine intervenant avant le 31 décembre de l'année de conduite du bilan triennal).

Cette dernière peut soit déterminer un échéancier de réalisation si elle estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder un aménagement, soit recommander au ministre en charge du logement un aménagement des objectifs triennaux. L'avis de la commission nationale est rendu avant le 31 mars de l'année suivant la conduite du bilan, alors que le ministre chargé du logement formule sa décision quant à la demande d'aménagement, avant le 30 juin de cette même année.

Depuis l'existence de cette possibilité, les commissions départementales ont saisi la commission nationale pour moins de 2% des communes soumises, en vue d'un aménagement de leurs objectifs triennaux.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de se prononcer sur la constitutionnalité du dispositif SRU (notamment les décisions n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000 et n° 2012-660 DC du 17 janvier 2013). Ce dernier a été jugé conforme à la Constitution car poursuivant un objectif de mixité sociale, défini avec suffisamment de précision par l'article 55 de la loi SRU.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La mesure projetée tire les conséquences de l'instauration par l'article 14 quater du présent projet de loi, d'un contrat de mixité sociale, pouvant permettre une adaptation temporaire du rythme de rattrapage. Par conséquent, il apparait nécessaire de supprimer la procédure d'aménagement des obligations existant actuellement et définie à l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation, qui serait redondante et dont la mise en oeuvre est complexe.

Dans ce cadre, il est prévu de supprimer le rôle des commissions départementales, qui ont vocation à examiner la situation de toutes les communes n'ayant pas atteint leur objectif triennal, afin que celles-ci exposent les difficultés rencontrées et statuent sur la pertinence de la saisine de la commission nationale SRU en vue d'un aménagement des objectifs. Cette suppression clarifierait le rôle des différentes instances dans le cadre de la procédure de bilan triennal (commission départementale, comité régional de l'habitat et de l'hébergement, commission nationale). Pour rappel, la consultation des commissions départementales sur les projets d'arrêtés de carence a été supprimée par la loi « Egalité et citoyenneté », tout en conservant un rôle dans la procédure d'aménagement, emportant une confusion quant à leur rôle dans la procédure de bilan triennal.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

En cohérence avec l'instauration par l'article 14 quater du présent projet de loi d'un contrat de mixité sociale pouvant permettre une adaptation temporaire du rythme de rattrapage, et afin de simplifier les procédures et d'assurer une bonne compréhension et lisibilité du dispositif SRU, il est proposé de supprimer la procédure d'aménagement des obligations existantes et, en corollaire, la commission départementale.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le maintien du dispositif existant en matière d'aménagement des obligations SRU a été écarté, celui-ci apparaissant très lourd dans sa mise en oeuvre (mobilisation de la commission départementale et de la commission nationale qui entend les maires des communes, décision ministérielle suite à l'avis de la commission nationale) et redondant avec le dispositif de contrat de mixité sociale pouvant adapter le rythme de rattrapage.

3.2. OPTION RETENUE

En cohérence avec l'instauration par l'article 14 quater du présent projet de loi d'un contrat de mixité sociale pouvant permettre une adaptation temporaire du rythme de rattrapage, et afin de simplifier les procédures et d'assurer une bonne compréhension et lisibilité du dispositif SRU, il est proposé de supprimer la procédure d'aménagement des obligations existante et, en corollaire, la commission départementale.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. La suppression de la procédure d'aménagement à laquelle se substitue le contrat de mixité sociale pouvant adapter le rythme de rattrapage, est sans impact macro-économique.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Près de la moitié de la production locative sociale nouvelle s'opère dans les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU, confirmant le rôle déterminant joué par le dispositif. La suppression de la procédure d'aménagement à laquelle se substitue le contrat de mixité sociale pouvant adapter le rythme de rattrapage, est sans impact pour les entreprises.

4.2.3. Impacts budgétaires

La suppression de la procédure d'aménagement à laquelle se substitue le contrat de mixité sociale pouvant adapter le rythme de rattrapage, est sans impact sur le plan budgétaire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure projetée tire les conséquences de l'instauration par l'article 14 quater du présent projet de loi, d'un contrat de mixité sociale, pouvant permettre une adaptation temporaire du rythme de rattrapage.

Tout d'abord, il peut être rappelé que le nombre de demandes d'aménagement examinées par la commission nationale SRU dans le cadre de la procédure existante est faible : les commissions départementales ont saisi la commission nationale pour moins de 2% des communes soumises, en vue d'un aménagement de leurs objectifs triennaux.

La suppression des commissions départementales (qui en l'état du droit examinent la situation de toutes les communes n'ayant pas atteint leur objectif triennal et constituent en ce sens une instance de dialogue dans le cadre du bilan triennal) ne portera pas atteinte au dialogue entre le maire et l'Etat local qui existe au travers de la procédure contradictoire obligatoire et prévue par le code de la construction et de l'habitation, en amont de l'examen des propositions de carence. Par ailleurs, les collectivités auront l'initiative de proposer au préfet l'élaboration d'un contrat de mixité sociale permettant d'adapter le rythme de rattrapage.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Cette mesure aura un impact sur l'activité des services déconcentrés de l'Etat. En effet, la suppression des commissions départementales allègera fortement la charge relative à l'organisation et à la gestion de ces commissions (arrêté de nomination, instruction des demandes, rédaction des avis). Pour rappel, cette commission examine la situation de toutes les communes n'ayant pas atteint leur objectif triennal (soit environ 500 commissions départementales réunies en 2020).

La suppression de cette procédure allégera également la charge de travail de l'administration centrale du ministère du logement, quant à la mise en oeuvre de la procédure nationale d'aménagement (organisation des réunions de la commission nationale SRU, dont la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) assure le secrétariat, préparation des décisions ministérielles d'aménagement des obligations) Toutefois, en corollaire, les services déconcentrés de l'Etat et l'administration centrale auront à assurer l'instruction et le suivi des contrats de mixité sociale, notamment ceux ayant pour objet d'adapter le rythme de rattrapage des obligations.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Cette proposition est issue des recommandations rendues, le 27 janvier 2021, par la commission nationale SRU, dans le cadre de la mission confiée par la ministre chargée du logement à son président le 3 décembre 2020. Cette mission avait pour objectif de réfléchir à des propositions d'évolution des dispositions législatives relatives au dispositif issu de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000. La commission nationale SRU comprend des représentants des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales, des parlementaires, des associations pour le logement des personnes défavorisées et des personnalités qualifiées.

Par ailleurs, des réunions ont eu lieu entre la ministre du logement et les associations représentatives des collectivités locales, et se poursuivront d'ici le dépôt du projet de loi au Parlement.

Le Conseil national d'évaluation des normes ainsi que le Conseil national de l'habitat seront consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures proposées entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble des territoires de la République soumis à l'article 55 de la loi SRU modifiée.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat fixe la composition de la commission prévue à l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation.

Article 21 : Elargissement de l'objet social de l'Association Foncière Logement

1. ETAT DES LIEUX

La lutte contre le mal logement et l'habitat indigne ou insalubre est un enjeu majeur de politique publique aussi bien dans les zones urbaines que dans les territoires ruraux. Le contexte économique et social, mais aussi la récente médiatisation d'événements dramatiques, comme l'effondrement de deux immeubles à Marseille en 2018, ont replacé cette question au coeur du débat public.

Les collectivités territoriales, en particulier les communes, sont en première ligne, aux côtés des autorités déconcentrées de l'État, face à cette problématique. Les maires sont ainsi, avec le préfet, l'autorité compétente pour exercer les pouvoirs de police de lutte contre l'habitat indigne, conformément au nouvel article L. 511-4 du code de la construction et de l'habitation (CCH), créé par l'ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l'harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations. L'article 1-1 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 (modifiée) définit l'habitat indigne comme « les locaux ou les installations utilisés aux fins d'habitation et impropres par nature à cet usage, ainsi que les logements dont l'état, ou celui du bâtiment dans lequel ils sont situés, expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé ». Néanmoins, sur le terrain, les municipalités, en particulier les plus petites, rencontrent des difficultés pour lutter contre l'habitat indigne qui recouvre une réalité complexe et protéiforme et reste donc difficile à recenser.

Dans ce contexte, le groupe Action Logement a prévu, dans le cadre de son plan d'investissement volontaire (PIV) signé en avril 2019 avec l'État 50 ( * ) , la mise en place du dispositif Digneo dédié à la lutte contre l'habitat indigne. Au sein du groupe, l'Association Foncière Logement (AFL) a été identifiée comme l'opérateur pour la réhabilitation de logements indignes, insalubres, en péril ou anciens dégradés dans les centres villes, forte de son expérience en matière de création de mixité sociale par le levier du logement des salariés dans les opérations de rénovation urbaine. Le programme, qui a fait l'objet d'un abondement à l'occasion du plan de relance de février 2021 concerté entre l'État et Action Logement, prévoit l'investissement de 400 M€ de ressources d'Action Logement.

En revanche, le cadre juridique actuel limite le champ d'intervention de l'association à la mixité sociale dans les quartiers concernés par la rénovation urbaine, ce qui constitue un frein aux collaborations de l'AFL avec les collectivités territoriales.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'objet social de l'AFL est défini à l'article L. 313-34 du CCH. Celui-ci limite l'intervention de l'AFL, pour la réalisation de logements locatifs libres ou destinés à l'accession, aux programmes dans les quartiers faisant l'objet d'opérations de rénovation urbaine, à des fins de mixité sociale. Une modification législative est donc nécessaire pour permettre à l'AFL de répondre aux projets portés par les collectivités territoriales dans le cadre de la lutte contre l'habitat indigne sur l'ensemble du territoire.

Le renforcement du dispositif par l'évolution de l'objet social de l'AFL permettrait ainsi d'atteindre plus facilement un objectif de 4 000 logements indignes acquis et réhabilités d'ici 2022. La majorité des projets potentiels se trouvent, en effet, en dehors des zones de rénovation urbaine. Ainsi, sur les 900 logements actuellement à l'étude par l'AFL, 60% sont situés hors des quartiers prioritaires de la ville (QPV) 51 ( * ) .

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La présente mesure poursuit les objectifs suivants :

- étendre le champ des projets de réhabilitation de logements indignes portés par l'AFL en lien avec les collectivités territoriales, en ciblant l'ensemble des logements faisant l'objet d'un arrêté de police lié à l'habitat indigne au titre des articles L. 511-1 et suivants du CCH. Ainsi, selon les données de l'enquête annuelle 2017 de la DIHAL sur l'organisation locale et les procédures de traitement de l'habitat indigne, 2 758 arrêtés préfectoraux et 1 011 arrêtés de maire pour péril ont été pris en 2016 52 ( * ) ;

- sécuriser juridiquement les conditions d'intervention de l'AFL au titre de la lutte contre l'habitat indigne 53 ( * ).

3. DISPOSITIF RETENU

Il est proposé de modifier l'article L. 313-34 du CCH qui définit l'objet social de l'AFL pour étendre le champ d'intervention de l'association aux immeubles frappés par un arrêté de police administrative sur le fondement des articles L. 511-1 à L. 511-3 du CCH et aux îlots ou ensembles cohérents d'îlots comprenant un tel immeuble. La possibilité d'intervenir à l'échelle de l'îlot ou de l'ensemble d'îlots permet de renforcer la cohérence des opérations menées par l'AFL, en ne se restreignant pas à des immeubles pris isolément, et de l'inscrire dans une démarche plus globale d'aménagement et de réhabilitation et répond aux demandes remontées par les collectivités 54 ( * ) .

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La mesure proposée conduit à modifier l'article L. 313-34 du code de la construction et de l'habitation (CCH) relatif à l'objet social de l'AFL. Aucune autre modification législative ou réglementaire n'est nécessaire. Les modalités précises du déploiement de Digneo sont régies par les directives internes au groupe Action Logement, textes approuvés par le conseil d'administration en application des stipulations de la convention quinquennale entre l'État et Action Logement.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

La montée en puissance du programme Digneo aura un effet positif sur l'activité des entreprises du secteur de la rénovation, qui représentait en 2017 près de 75 milliards d'euros 55 ( * ) et sur la création d'emplois 56 ( * ) .

Par ailleurs, l'impact du renforcement du programme est neutre pour les finances publiques, car le financement est d'ores-et-déjà prévu par Action Logement et inscrit au titre des emplois de la participation des employeurs à l'effort de construction dans la convention quinquennale 2018-2002 État-Action Logement telle que modifiée par avenant en février 2021.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure proposée aura un impact positif sur les collectivités territoriales. En effet, le programme Digneo repose sur une démarche partenariale associant l'AFL et les collectivités territoriales dans l'acquisition et la réhabilitation des logements indignes, via la signature de conventions. Cette approche permet aux collectivités de s'inscrire dans un modèle économique assurant la production de logements locatifs libres et en accession destinés aux salariés de leurs territoires. Elle favorise ainsi le développement d'une offre immobilière adaptée aux contextes locaux.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure, portée par le groupe Action Logement, n'a pas dans l'immédiat d'impact sur les administrations.

Toutefois, l'AFL souhaite à moyen terme pouvoir signer des conventions avec les Établissements Publics Fonciers (EPF) d'État afin de permettre la rénovation des logements indignes dont elles sont détentrices.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

Le programme permet de renforcer l'offre de logements diversifiés et abordables pour les salariés des zones d'emploi voisines des opérations immobilières développées. Il contribue ainsi à accroître la mixité sociale, à l'échelle de l'immeuble, dans les centres anciens dégradés en attirant de nouveaux publics plus favorisés. La réhabilitation des logements indignes répond également à des impératifs sociaux de salubrité et de sécurité. Par ailleurs, l'AFL demeure propriétaire et gestionnaire pour une durée de dix ans des immeubles rénovés dans le cadre de Digneo, permettant ainsi de se prémunir contre les phénomènes de copropriétés dégradées.

4.6. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La rénovation et la reconstruction de logements indignes permet de limiter le coût environnemental des opérations d'aménagement, en privilégiant la réhabilitation, même lourde, du bâti existant par rapport à la construction neuve. Digneo répond également à des enjeux environnementaux de préservation du patrimoine architectural et urbain en centre-ville, de la lutte contre l'artificialisation des terrains et d'amélioration de la performance environnementale des logements, compte tenu notamment de l'étroite corrélation entre habitat indigne et précarité énergétique 57 ( * ) .

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article R. 361-2 du CCH, la disposition envisagée a été soumise au conseil national de l'habitat.

Par ailleurs, l'élaboration de l'article proposé a fait l'objet d'une concertation avec l'AFL et Action Logement Groupe.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions de l'article s'appliqueront aux opérations menées par l'AFL à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République. Les dispositions de l'article ont vocation à s'appliquer aux collectivités d'outre-mer, sans adaptation particulière.

5.2.3. Texte d'application

Aucun texte d'application n'est nécessaire.

Article 22 I et II : Renforcement des dispositifs de mixité sociale dans le logement social et accès au logement des travailleurs des secteurs essentiels

1. ÉTAT DES LIEUX

Le législateur a, dans les territoires à enjeux 58 ( * ) en matière de logement, fixé des objectifs de mixité sociale, à partir de la géographie prioritaire de la politique de la ville, afin de contrecarrer le processus constaté, lié souvent à la constitution du par cet à l'attractivité des quartiers, de concentration systématique des ménages les plus défavorisés toujours dans les mêmes quartiers et les mêmes programmes (article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation - CCH).

La politique d'attribution des logements est encadrée par la législation qui définit des critères d'attribution en fonction des plafonds de ressources et des critères de priorités d'attribution en fonction de difficultés rencontrées par les ménages. Il s'agit en premier lieu des personnes bénéficiant d'une décision favorable au titre du droit au logement opposable, puis en second lieu des ménages considérés prioritaires dont la liste est fixée à l'article L. 441-1 du CCH. Cette politique d'attribution fixe par ailleurs des objectifs de mixité sociale.

Le législateur, via principalement les trois dernières lois « logement 59 ( * ) », a positionné puis conforté l'échelon intercommunal comme chef de file en matière d'attributions. Cohérente avec la politique de l'habitat menée et les compétences qui lui sont dévolues, c'est à cette échelle que sont fixées les grandes orientations du territoire en matière de politique de peuplement, priorités locales qui déclinent les politiques nationales pour les attributions et mixité sociale. Il s'agit pour ces territoires de se doter d'une gouvernance intercommunale et partenariale pour répondre aux enjeux de la politique de l'habitat et du logement.

Ainsi, sur ces territoires 60 ( * ) :

- au moins 25% des attributions annuelles, suivies de baux signés, de logements sociaux situés en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), doivent être consacrées à des demandeurs du premier quartile de ressources, ou à des personnes relogées dans le cadre d'une opération de renouvellement urbain ou de requalification de copropriétés dégradées ;

- au moins 50% des attributions annuelles de logements situés dans les QPV doivent être consacrées à des demandeurs autres que ceux du premier quartile de ressources.

Le recours aux quartiles permet d'ordonner une distribution des ressources des demandeurs de logement social en quatre parties égales et de ne se référer qu'à un seul indicateur, celui des ressources, pour définir la mixité attendue. Définis par unité de consommation, ces quartiles sont calculés sur la base des ressources renseignées par les demandeurs de logement social. Ainsi, le premier quartile de ressources concerne les 25% des demandeurs les plus modestes sur chaque établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et sur le territoire régional pour l'Île-de-France. Le ministre du logement arrête chaque année le seuil de ressources des demandeurs du premier quartile pour chaque EPCI et la région Île-de-France 61 ( * ) .

Le support de la politique intercommunale d'attributions 62 ( * ) est la conférence intercommunale du logement (CIL), rendue obligatoire par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté (Égalité et Citoyenneté) sur le territoire des EPCI précités. Cette conférence élabore les orientations soumises à l'approbation du préfet et du président de l'EPCI 63 ( * ) , déclinées dans une convention intercommunale d'attribution (CIA), document contractuel et opérationnel fixant les engagements des principaux acteurs en matière d'attributions de logements sociaux dont le contenu est décrit à l'article L.441-1-6 du CCH.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les objectifs de mixité sociale en faveur des publics les plus modestes ne sont pas atteints

En 2017 64 ( * ) , en moyenne 18,9% des logements sociaux attribués et situés hors quartiers prioritaires de la ville (QPV) l'ont été au bénéfice des 25% des ménages demandeurs les plus pauvres (premier quartile), soit 6 points de moins que le seuil fixé. En 2018, ce taux atteint 16%, en baisse de 3 points.

Seuls 17% des EPCI atteignent le seuil de 25% en 2017. Cette proportion baisse à 6% en 2018. 68% des EPCI ont connu une baisse de leur taux d'attribution entre 2017 et 2018 65 ( * ) .

Taux d'attribution de logements hors QPV aux ménages les plus modestes

2017

2018

Moyenne

18,9%

16%

Médiane

17,6%

15,5%

En 2017, les territoires, dont les logements sont majoritairement localisés en zone très tendue (zones A bis et A) 65 ( * ) , ont les taux d'attributions de logements sociaux situés hors QPV aux ménages les plus modestes les moins élevés : deux tiers ont un taux inférieur à 15%. À l'inverse, les territoires situés en zone détendue présentent les taux d'attribution les plus élevés : 27% de ces territoires atteignent le seuil des 25% (contre 17% sur l'ensemble).

Les objectifs sont en revanche largement dépassés s'agissant des objectifs d'attributions pour les demandeurs des quartiles 2, 3 et 4 66 ( * ) en QPV (taux minimal de 50% fixé par la loi) et ne sont manifestement pas suffisamment ambitieux :

Taux d'attribution en QPV pour les demandeurs des quartiles 2, 3 et 4 67 ( * )

2017

2018

Au niveau national

70%

75%

Un faible nombre de conventions intercommunales d'attribution

Depuis l'entrée en vigueur de la loi Egalité et Citoyenneté, les territoires précités 68 ( * ) ont l'obligation de se doter d'une CIA, sans délai. En l'état des textes, aucune disposition n'est prévue en l'absence de conclusion d'une CIA.

Or au 30 octobre 2020 69 ( * ) , sur les 421 territoires concernés, seuls 98 disposent d'une CIA signée.

Le faible nombre de CIA signées à ce jour constitue un frein à la mise en oeuvre de la mixité sociale dans les territoires et au rééquilibrage des villes et des quartiers. En l'absence de telles conventions, les objectifs d'attributions en faveur du logement des plus modestes en dehors des QPV ne sont pas répartis entre les bailleurs sociaux.

En outre, la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19 a mis en lumière le caractère essentiel de certaines professions pour la vie de la nation dont les missions doivent être assurées en continue alors même qu'elles ne peuvent s'exercer par le recours au télétravail. Il est donc nécessaire que les demandeurs qui exercent ces missions bénéficient d'un logement à proximité de leur lieu de travail et soient donc pris en compte dans la politique d'attribution des logements sociaux. Cela concourra par ailleurs au développement de la mixité sociale.

Au regard de l'enjeu majeur consistant à développer la mixité sociale dans les villes et les quartiers, il apparaît nécessaire de modifier le cadre juridique actuel. Ainsi, les mesures envisagées modifieront et compléteront des dispositions législatives existantes au sein du CCH.

Dans ce contexte, compte tenu des difficultés pour atteindre les objectifs de mixité sociale dans les villes et les quartiers et de la nécessité d'intégrer les demandeurs de logement social, exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail dans un secteur essentiel pour la continuité de la vie de la Nation, dans la politique d'attribution, il apparait nécessaire de modifier le cadre juridique actuel. Ainsi, les mesures envisagées modifient et complètent l'article L. 441-1 du CCH.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif des mesures envisagées est de favoriser la mixité sociale des villes et des quartiers et de prendre en compte la situation des demandeurs exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail dans un secteur essentiel pour la continuité de la vie de la Nation.

À cet effet, le dispositif proposé vise à renforcer les mesures dédiées et le portage intercommunal des attributions, en conférant une portée accrue aux CIA et en précisant le rôle des différents acteurs des politiques d'attribution. Il s'agit, notamment, de sécuriser la mise en oeuvre des objectifs de mixité sociale dans le cadre de ces conventions et, le cas échéant, en l'absence de conclusion de celles-ci dans un délai raisonnable, adapté à la situation des collectivités concernées à la date d'entrée en vigueur de la loi, ainsi que de permettre l'identification et la prise en compte des besoins propres aux travailleurs essentiels ainsi définis.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

L'objectif des mesures envisagées est de favoriser la mixité sociale des villes et des quartiers en renforçant les mesures dédiées. À cet effet, elles ont pour objet de :

- fixer un délai de signature de la CIA de deux ans pour les territoires entrant dans le périmètre de la réforme défini au 23° alinéa de l'article L. 441-1 du CCH ;

- donner compétence à l'EPCI à fiscalité propre ou l'établissement public territorial de la métropole du Grand Paris, ou à la Ville de Paris, en l'absence de signature de la CIA, de fixer des objectifs en matière d'attribution aux bailleurs sociaux et réservataires du territoire. La signature d'une CIA ou, pour la Ville de Paris, d'une convention d'attribution se substitue aux objectifs notifiés aux bailleurs sociaux et réservataires par l'EPCI ou l'établissement public territorial de la métropole du Grand Paris, ou à la Ville de Paris ;

- fixer un taux légal uniforme d'attribution en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville par bailleur social en cas d'absence de CIA ou d'objectifs notifiés par la collectivité ;

- ajouter, dans les CIA et dans la convention d'attribution de la Ville de Paris, un objectif d'attribution aux demandeurs de logements exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail, dans un des secteurs essentiels à la vie de la Nation ;

- prévoir que les CIA et la convention d'attribution de la Ville de Paris détermineront l'objectif d'attribution en faveur des demandeurs de logements exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail, dans un des secteurs essentiels à la vie de la Nation, selon des modalités qui seront définies par voie réglementaire ;

- donner pouvoir au préfet de procéder aux attributions de logements sociaux lorsque les objectifs d'attribution fixés pour chaque bailleur - en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville, comme en faveur des demandeurs de logements exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail, dans un des secteurs essentiels à la vie de la Nation - ne sont pas atteints ;

- préciser que les modalités d'attribution des logements sociaux par le préfet lorsque les bailleurs sociaux n'ont pas atteint les objectifs fixés ainsi que les modalités d'information, par les bailleurs de l'atteinte des objectifs qui leur sont assignés sont définies par voie réglementaire ;

- prévoir que les conditions dans lesquelles il est rendu compte aux conseils d'administration des bailleurs concernés des attributions annuelles de logements locatifs sociaux sont définies par voie réglementaire ;

- fixer un délai de signature de la CIA de huit mois pour les territoires déjà dans le périmètre de la réforme mentionné défini au 23° alinéa de l'article L. 441-1 du CCH à l'entrée en vigueur de la présente loi.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les dispositions envisagées modifient et complètent des dispositions législatives codifiées dans le CCH à l'article L. 441-1.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

Que les bailleurs se voient assigner des objectifs de mixité sociale, par la CIA, par l'EPCI ou par le législateur, ils devront rendre compte de l'atteinte de ces objectifs. Ce rendu compte sera formalisé selon des modalités qui seront fixées par voie réglementaire. Il ne générera qu'un impact faible par rapport au suivi habituel de l'activité des bailleurs.

Il est proposé de fixer des objectifs d'attribution de logements aux « travailleurs-clés », afin de faciliter leur implantation à proximité de leur lieu de travail, ce qui aura un impact positif sur la capacité des entreprises concernées à fonctionner même en période de crise.

4.2.2. Impacts budgétaires

Les mesures n'ont pas d'impact budgétaire, ni économique direct. Il est en revanche attendu des gains d'efficacité dans l'action publique mais qui ne peuvent être évalués à ce stade.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les EPCI devront, en l'absence de CIA signée, notifier les objectifs d`attribution en termes de mixité sociale en dehors des QPV, en faveur des personnes reconnues prioritaires au titre du droit au logement opposable (DALO) et des catégories de personnes prioritaires définies à l'article L. 441-1 du CCH, ainsi qu'un objectif d'attribution aux demandeurs de logement exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail dans un secteur essentiel pour la vie de la Nation.

Il n'est pas possible à ce jour de préjuger du nombre d'EPCI qui auront éventuellement à s'acquitter de cette notification qui doit intervenir dans un délai d'une année à compter de l'entrée en vigueur de la loi (dans les huit mois suivant l'entrée en vigueur de la loi, ils constatent l'absence de CIA signée et disposent de quatre mois pour notifier ces objectifs). Notons toutefois qu'environ un quart seulement des EPCI concernés ont aujourd'hui signé une CIA, ce qui porte à un maximum de 300 le nombre d'EPCI qui devront fixer des objectifs hors du cadre privilégié par la loi.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Il ne peut être préjugé des mesures qui pourraient être appliquées et de leur nombre. Toutefois, les services de l'État dans le département seront amenés à assurer le suivi de l'adaptation des CIA aux nouvelles dispositions (engagements relatifs aux travailleurs essentiels notamment).

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

En permettant une plus grande efficacité des politiques d'attribution des logements locatifs sociaux envers les plus modestes et les travailleurs des secteurs essentiels, ces mesures auront un impact positif sur les demandeurs de logements locatifs sociaux, et sur les territoires en contribuant à renforcer la mixité sociale des villes et des quartiers.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Elle pourra être examinée par le Conseil national de l'habitat.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les mesures entreront en vigueur dès l'entrée en vigueur de la loi nonobstant celles faisant l'objet de textes d'application réglementaires.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions sont applicables sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion.

5.2.3. Textes d'application

Deux décrets en Conseil d'État et un décret simple seront pris, respectivement pour :

- préciser les modalités de mise en oeuvre des dispositions relatives aux objectifs d'attribution au bénéfice des travailleurs exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail dans un secteur essentiel pour la continuité de la vie de la Nation ;

- préciser les modalités par lesquelles le préfet procède à l'attribution des logements en cas de non-respect des engagements et objectifs fixés, en particulier les modalités d'information par les bailleurs de l'atteinte de ces engagements et objectifs ;

- fixer les modalités de présentation du bilan annuel des attributions au conseil d'administration de chaque bailleur social.

Article 22 III : Prolongation des délais de mise en oeuvre de la cotation de demande de logement social et de la gestion en flux des droits de réservation des logements locatifs sociaux

1. ÉTAT DES LIEUX

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) ajoute deux nouveaux outils au service de la politique du logement : la cotation de la demande de logement social et la gestion en flux des réservations de logements sociaux. Les échéances pour leur mise en oeuvre sont proches, respectivement le 1 er septembre 2021 et le 24 novembre 2021.

La loi ELAN rend obligatoire un système de cotation sur le territoire des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) tenus de se doter d'un Plan local de l'habitat (PLH) ou ayant la compétence en matière d'habitat et au moins un quartier prioritaire de la politique de la ville, de la métropole de Lyon, de la Ville de Paris et des établissements publics territoriaux (EPT) de la métropole du Grand Paris (MGP), soit plus de 400 territoires.

En outre, la loi ELAN généralise la gestion en flux des droits de réservation des logements locatifs sociaux. Sont concernées toutes les réservations de logements sociaux hormis celles au bénéfice des personnels en charge de la défense nationale et de la sécurité intérieure qui demeurent identifiées.

L'USH, Action logement, l'ADCF et l'AMF ont toutefois fait part des difficultés liées à la mise en oeuvre de ces deux outils, du fait notamment de la crise sanitaire et du renouvellement des exécutifs locaux.

Sur les territoires, les travaux avancent en mobilisant l'ensemble des acteurs, le principe de ces réformes n'étant pas contesté. Il est proposé de reporter la date butoir de ces deux mesures à la fin d'année 2023 afin d'être assuré que ces deux dispositifs puissent être mis en oeuvre dans les meilleures conditions, et considérant que les années 2020 et 2021 n'auront pas pu être pleinement exploitées pour ce faire.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

- S'agissant de la cotation de la demande de logement social : la loi ELAN avait laissé le soin à un décret de fixer une date butoir qui ne pouvait excéder le 31 décembre 2021 pour la mise en oeuvre d'un système de cotation. L'article 111 de la loi ELAN dispose : " III.- Le I entre en vigueur à une date fixée par le décret prévu à l'article L. 441-2-9 du code de la construction et de l'habitation, et au plus tard le 31 décembre 2021 ".

L'objet de la présente mesure est de reporter la date butoir de la mise en oeuvre de la cotation au plus tard au 31 décembre 2023.

- S'agissant de la gestion en flux des droits de réservation de logements sociaux : toutes les conventions passées depuis la loi ELAN sont en flux ; il s'agit ici de modifier la date butoir pour la conversion en flux des conventions passées en stock avant la loi ELAN. A ce titre, l'article 114 de la loi ELAN dispose : " IV.- Les conventions de réservation conclues entre les bailleurs et les réservataires (...) avant la publication de la présente loi et ne portant pas exclusivement sur un flux annuel de logements doivent être mises en conformité (...) dans des conditions précisées par décret en Conseil d'Etat et, au plus tard, dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi ".

L'objet de la présente mesure est de reporter de deux ans la date butoir de mise en oeuvre de la gestion en flux, soit au 24 novembre 2023.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le report de la date butoir de mise en oeuvre des dispositifs susmentionnés vise à tenir compte des difficultés rencontrées par les acteurs de terrain pour tenir le calendrier fixé initialement par la loi ELAN, dans le contexte exceptionnel des années 2020 et 2021. Le report de deux ans est de nature à permettre un déploiement des deux dispositifs de manière plus efficiente et concertée sur le territoire.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Compte tenu des difficultés rencontrées pour tenir le calendrier de mise en oeuvre de la cotation de la demande de logement social et de la gestion en flux des droits de réservation prévu initialement dans la loi ELAN, en particulier du fait de la crise sanitaire et du renouvellement des exécutifs locaux, aucune option autre que la prolongation du délai de mise en oeuvre des dispositifs précités n'est envisageable.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le Gouvernement propose de reporter de deux ans le délai de mise en oeuvre des dispositifs de cotation de la demande de logement social et de gestion en flux des droits de réservation, portant respectivement ces délais au plus tard au 31 décembre 2023 et au 24 novembre 2023.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les dispositions envisagées modifieraient les articles 111 et 114 de la loi ELAN.

4.2. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

Le report des délais de mise en oeuvre permettra aux bailleurs d'assurer un déploiement des dispositifs dans les meilleures conditions possibles.

4.3. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Un report des délais de mise en oeuvre des dispositifs de cotation et de gestion en flux, améliorant la qualité de mise en oeuvre de ces dispositifs complexes, permettra de renforcer l'efficience des politiques d'attribution de logements locatifs sociaux et d'avoir un impact significatif envers les ménages les plus modestes et la mixité sociale des villes et des quartiers sur l'ensemble du territoire.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article R. 361-2 du CCH, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national de l'habitat.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le délai de mise en oeuvre des dispositifs est prolongé de deux ans, soit jusqu'au 24 novembre 2023 pour la disposition relative à la gestion en flux des droits de réservation de logements sociaux et jusqu'au 31 décembre 2023 au plus tard pour la disposition relative à la cotation de la demande de logement social. L'ensemble des dispositions envisagées entrent en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La disposition envisagée est sans incidence sur le champ d'application territoriale de la disposition modifiée.

5.2.3. Textes d'application

Deux décrets en Conseil d'Etat devront faire l'objet d'une modification pour tenir compte du report de la date butoir de mise en oeuvre des dispositifs :

- Décret n° 2020-145 du 20 février 2020 relatif à la gestion en flux des réservations de logements locatifs sociaux ;

- Décret n° 2019-1378 du 17 décembre 2019 relatif à la cotation de la demande de logement social.

Article 23 : Prolongation de l'expérimentation sur l'encadrement des loyers

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'encadrement des loyers est un dispositif qui vise à réguler les augmentations de loyer afin d'éviter les abus et fluidifier le marché locatif français. Un dispositif expérimental d'encadrement du niveau des loyers a été institué par l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN). La durée de l'expérimentation a été fixée à cinq ans à compter de la publication de la loi ELAN, soit jusqu'au 23 novembre 2023 inclus. Il s'est substitué au dispositif pérenne d'encadrement du niveau des loyers, organisé par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, issu de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR).

Le dispositif issu de la loi ALUR prévoyait que l'encadrement du niveau des loyers s'applique automatiquement sur l'ensemble des zones dites de tension locative 70 ( * ) , définies à l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 précitée 71 ( * ) . Le dispositif mis en place dans le cadre de l'article 140 de la loi ELAN concerne également les « zones tendues » mais est restreint à celles qui présentent une candidature à l'expérimentation.

Les candidatures pouvaient être déposées par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière d'habitat ou une des collectivités à statut particulier nommément visées par la loi : la ville de Paris, les établissements publics territoriaux (EPT) de la métropole du Grand Paris, la métropole de Lyon et la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Les collectivités territoriales ou leurs groupements disposent d'un délai de deux ans à compter de la publication de la loi ELAN pour déposer leur candidature, échu par conséquent le 24 novembre 2020.

Le périmètre, proposé par les collectivités territoriales ou leurs groupements pour la mise en place de l'expérimentation est délimité par décret et doit réunir quatre critères cumulatifs fixés par la loi :

1° un écart important entre le niveau moyen de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social ;

2° un niveau de loyer médian élevé ;

3° un taux faible de logements commencés, rapporté aux logements existants sur les cinq dernières années ;

4° des perspectives limitées de production pluriannuelle de logements inscrites dans le programme local de l'habitat (PLH) et de faibles perspectives d'évolution de celles-ci.

Sur ce périmètre, le préfet arrête chaque année un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, pour chaque secteur géographique et catégorie de logement :

- le loyer de référence est égal au loyer médian calculé à partir des niveaux de loyer constatés par l'observatoire local des loyers ;

- le loyer de référence majoré est égal au loyer de référence augmenté de 20% ;

- le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30%.

Les niveaux de loyer sont constatés par un observatoire local des loyers agréé dans les conditions déterminées par l'article 16 de la loi du 6 juillet 1989 précitée.

Lorsque le loyer, fixé au contrat de location conclu ou renouvelé sous l'empire du dispositif expérimental d'encadrement du niveau des loyers, excède, hors complément de loyer dûment justifié, le loyer de référence majoré, le locataire peut exercer une action en diminution. Par ailleurs, le préfet peut mettre en demeure le bailleur de mettre en conformité le contrat de location et de rembourser au locataire les loyers trop-perçus. En cas d'inexécution de la mise en demeure, le préfet peut prononcer une amende administrative à l'encontre du bailleur.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil Constitutionnel permet au législateur d'apporter aux conditions d'exercice du droit de propriété des personnes privées, protégé par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et à la liberté contractuelle qui découle de son article 4, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi (décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014, considérant 7).

L'article 37-1 de la Constitution permet au législateur de prévoir des dispositions à caractère expérimental « pour un objet et une durée limitée » . Le Conseil d'État, dans son avis relatif au projet de loi ELAN, a estimé que l'expérimentation du dispositif d'encadrement du niveau des loyers était précisément limitée dans son objet et dans sa durée, conformément à l'article 37-1 de la Constitution.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

2.1.1. Délai de candidature et durée de l'expérimentation

Le législateur avait envisagé une durée totale d'expérimentation de cinq ans. Toutefois, une fois qu'est délimité par décret le périmètre de la collectivité ou de l'EPCI à fiscalité propre demandeur soumis à l'expérimentation, le préfet doit disposer des niveaux de loyers constatés par un observatoire local des loyers agréé pour fixer les loyers de référence par arrêté et que le dispositif soit effectivement mis en oeuvre.

Cinq candidatures ont été déposées en Ile-de-France, dont celle de Paris, et cinq autres en province. En février 2021, les dispositifs sont en place à Paris et à Lille. L'instruction des autres demandes se poursuit ; tant que ce processus n'est pas achevé, il est impossible d'évaluer avec certitude à combien il pourra être donné suite, ni dans quel délai de mise en oeuvre. Les candidatures n'ont pas non plus vocation à être rendues publiques. Par ailleurs, le déploiement du dispositif sur un périmètre particulier implique le dépôt de la candidature, la publication d'un décret délimitant ce périmètre puis la publication d'un arrêté préfectoral. Afin de laisser un temps suffisant de mise en oeuvre du dispositif sur les territoires éligibles, à son observation et à son évaluation, il est nécessaire de prolonger la durée totale de l'expérimentation. L'allongement de la durée de l'expérimentation permettra par ailleurs de réaliser l'évaluation du dispositif avec le recul nécessaire à l'étude d'un dispositif dont les effets s'inscrivent nécessairement dans un temps long, eu égard notamment à la durée des baux.

Au 24 novembre 2020, à l'issue du délai de candidature de deux ans ouvert par l'article 140 de la loi ELAN, l'encadrement des loyers a pu être mis en oeuvre sur le territoire de deux communes : Paris (décret n° 2019-315 du 12 avril 2019 fixant le périmètre du territoire de la ville de Paris sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers) et Lille (décret n° 2020-41 du 22 janvier 2020 fixant le périmètre du territoire de la métropole européenne de Lille sur lequel est mis en place le dispositif d'encadrement des loyers).

Le dispositif ne sera ainsi pleinement déployé qu'au cours de l'année 2021, alors que le rapport d'évaluation de l'expérimentation doit être, au regard des dispositions actuelles de l'article 140 précité, remis au Parlement au plus tard en mai 2023.

Le Gouvernement estime donc nécessaire d'allonger la durée totale de l'expérimentation.

2.1.2. Compétence de la commission départementale de conciliation (CDC)

Dans le dispositif expérimental d'encadrement du niveau des loyers, lorsque le loyer fixé au contrat excède le loyer de référence majoré, hors cas de complément de loyer, le locataire peut exercer une action en diminution à deux moments distincts.

Au renouvellement du bail (VI de l'article 140 de la loi ELAN), il peut proposer au bailleur la mise en conformité du contrat de location et, à défaut d'accord entre les parties, la saisine de la CDC constitue un préalable obligatoire à la saisine du juge.

Par ailleurs, le locataire peut engager une action en diminution lorsqu'il vient de conclure un contrat de location dont le loyer de base (hors complément de loyer) excède le loyer de référence majoré qui est applicable au logement (A du III de l'article 140). Dans ce cas précis, la procédure de l'action en diminution n'est pas déterminée ; elle est donc plus libre que l'action en diminution exercée au renouvellement du bail et la saisine de la CDC ne constitue pas un préalable à la saisine du juge. Dans le cas où le contrat de bail prévoit un complément de loyer au-delà donc du loyer de référence majoré, le B du III de l'article 140 prévoit en revanche que la contestation éventuelle de ce complément par le locataire passe par la saisine obligatoire de la CDC.

Même lorsque la loi ne le prévoit pas expressément, les parties ont la possibilité de saisir la CDC si le litige qui les oppose entre dans le champ de compétence de cette dernière. Le champ de compétence des CDC est déterminé par l'article 20 de la loi du 6 juillet 1989 précitée pour les logements loués vides et par l'article 25-11 de la même loi pour les logements loués meublés.

Pour les logements loués meublés, la CDC est compétente pour « l'examen des litiges [...] résultant de l'application des dispositions relatives aux loyers... ». Cette formulation générale permet donc aux parties de saisir la CDC dans le cadre d'une action en diminution consécutive à la signature du bail, hors cas de la contestation du complément de loyer.

A l'inverse, pour les logements loués vides, la CDC est compétente pour connaître des « litiges résultant de l'application des articles 17, 17-1, 17-2 et 18 » de la loi du 6 juillet 1989 précitée. Si ces articles encadrent l'évolution des loyers et, si sous l'empire de la loi ALUR, l'article 17 organisait le dispositif d'encadrement du niveau des loyers, la loi ELAN a substitué à cet ancien dispositif celui qui figure désormais à son article 140. Il en résulte que, contrairement au cas des logements loués meublés, pour les logements loués vides, la CDC n'est pas compétente pour concilier les parties dans le cadre d'une action en diminution consécutive à la signature d'un bail.

Il est donc nécessaire de remédier à cette différence selon la catégorie de logement, loué meublé ou vide, en précisant le champ de compétence de la CDC dans le cadre de ce dispositif expérimental.

2.1.3. Encadrement du loyer des colocations à baux multiples

Le régime de la colocation est organisé par l'article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989. La loi ALUR, en créant ce nouvel article, avait notamment prévu que : « Le montant de la somme des loyers perçus de l'ensemble des colocataires ne peut être supérieur au montant du loyer applicable au logement en application des articles 17 ou 25-9. Les articles 17-1 et 17-2 sont applicables. ». Préalablement à l'entrée en vigueur de la loi ELAN, le dispositif pérenne d'encadrement du niveau des loyers était organisé par les articles 17 et 17-2 de la loi du 6 juillet 1989 précitée.

Il découlait donc de la lecture conjointe des articles 8-1 et 17 de cette loi que la somme des loyers perçus par l'ensemble des colocataires ne pouvait pas être supérieure au loyer de référence majoré applicable au logement, hors complément de loyer. Le dispositif d'encadrement des loyers s'appliquait donc indépendamment du fait que chaque colocataire dispose de son propre contrat de location (colocation à baux multiples) ou qu'un unique contrat de colocation régisse l'ensemble de la location (colocation à bail unique).

La loi ELAN n'a pas modifié le régime de la colocation sur ce point, notamment pour tenir compte de ce que le régime d'encadrement du niveau des loyers figure désormais sous forme expérimentale à son article 140. Dès lors, dans une colocation à baux multiples, si le loyer de chaque colocataire ne peut effectivement pas excéder le loyer de référence majoré hors complément de loyer, il est loisible au bailleur de louer son logement en colocation pour des loyers dont la somme excéderait le loyer de référence majoré.

Le Gouvernement entend clarifier l'articulation entre le dispositif expérimental d'encadrement du niveau des loyers et la colocation à baux multiples.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La prolongation de la durée totale de l'expérimentation vise à renforcer la pertinence de l'évaluation à venir, préalable à une éventuelle pérennisation. Elle assure une durée suffisante d'effectivité du dispositif, dans la mesure où, compte tenu de la procédure d'instruction des candidatures, dont le dépôt s'est échelonné sur les deux années suivant la publication de la loi ELAN, et de mise en oeuvre effective du dispositif après publication de l'arrêté préfectoral, le délai effectif d'application de l'encadrement s'avère trop bref pour procéder à l'évaluation.

La précision apportée au champ de compétence de la CDC vise à ce que la saisine de la commission, au titre d'une action en diminution consécutive à la signature du contrat, puisse s'appliquer aux logements loués vides et pas seulement aux logements meublés.

Enfin, l'amélioration de l'articulation entre le dispositif expérimental d'encadrement du niveau des loyers et la colocation à baux multiples vise à prévenir le contournement de ce dispositif par le recours à cette forme de colocation. Le Gouvernement entend également sanctionner le respect de tels manquements par l'amende administrative déjà prévue par le VII de l'article 140 de la loi ELAN.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La pérennisation du dispositif d'encadrement du niveau des loyers a pu être envisagée. Le législateur, lors de la loi ELAN, a cependant souhaité transformer le dispositif pérenne qui préexistait en dispositif expérimental. L'évaluation de ce dispositif est prématurée à ce stade et l'option d'une pérennisation a donc été écartée au profit d'une prolongation de l'expérimentation afin d'en permettre une évaluation dans les meilleures conditions.

3.2. OPTION RETENUE

Le Gouvernement propose de prolonger la durée totale du dispositif de trois ans afin de permettre une plus grande pertinence de l'évaluation. Il propose également de renforcer l'accès à la CDC et d'améliorer l'articulation du dispositif avec le cas de la colocation à baux multiples.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Seul l'article 140 de la loi ELAN est modifié par les dispositions envisagées. Il s'agit de respecter la spécificité du caractère expérimental du dispositif qu'il prévoit, dans son articulation avec celles de la loi n° 1989-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les adaptations proposées ne modifient pas substantiellement le dispositif existant et l'impact économique reste inchangé. L'extension de la durée totale de l'expérimentation a pour seul effet l'allongement dans le temps de cet impact. Les autres mesures visent avant tout à mettre en cohérence le dispositif et à clarifier le droit.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure envisagée permettra aux collectivités territoriales et EPCI à fiscalité propre concernés de mettre en oeuvre ce dispositif sur une durée plus significative.

Cela sera particulièrement pertinent dans le cas des collectivités territoriales et EPCI à fiscalité propre ayant candidaté au cours du dernier semestre 2020 à la suite des élections municipales et communautaires. Ces candidatures en cours d'instruction sont précisées supra au point 2.1.1.

En outre, la ville de Paris et la métropole européenne de Lille, dont les candidatures ont d'ores et déjà été retenues, pourront bénéficier de cet allongement de délai permettant de renforcer l'évaluation qui sera menée à l'issue de l'expérimentation en vue de son éventuelle pérennisation.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les dispositions proposées ne font pas évoluer le rôle du représentant de l'État dans le département et de ses services ni dans les procédures de fixation des niveaux de loyers ni pour les procédures de contrôle et de suivi.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

Comme le précisait l'étude d'impact du projet de loi ELAN, les jeunes sont les plus exposés au risque de détournement du dispositif d'encadrement des loyers. Sans qu'ils ne soient visés directement par ces nouvelles mesures, ils bénéficieront d'une meilleure articulation du dispositif d'encadrement des loyers avec la situation de la colocation à baux multiples à laquelle ils sont susceptibles d'avoir recours en qualité de locataires.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les adaptations proposées ne modifient pas substantiellement le dispositif existant et l'impact sur les particuliers reste inchangé dans les territoires qui y sont déjà soumis. L'extension de la durée totale de l'expérimentation a pour seul effet l'allongement dans le temps de l'application de l'encadrement des loyers, sans que la pérennisation soit envisagée à la date initialement prévue.

L'amélioration de l'accès aux CDC leur permettra néanmoins de saisir ces commissions lors de l'action en diminution exercée après signature d'un bail non meublé, ce qui ne leur était pas possible jusqu'à présent. Enfin ils bénéficieront en tant que locataires d'une mise en cohérence de la colocation avec le dispositif d'encadrement du niveau des loyers.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La durée totale de l'expérimentation est prolongée de trois ans, soit jusqu'au 23 novembre 2026. L'ensemble des dispositions envisagées entrent en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure envisagée s'applique aux zones tendues énumérées par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts, sous réserve de la délimitation du périmètre d'éligibilité par décret sur proposition de la collectivité compétente.

5.2.3. Textes d'application

Les périmètres sur lesquels cette expérimentation est conduite sont déterminés par décret. Les modifications apportées par la présente disposition ne nécessitent toutefois pas de texte d'application, étant sans incidence sur les périmètres retenus.

Article 24 : Prolongation du délai de mise en conformité des règlements de copropriété

1. ÉTAT DES LIEUX

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) a consacré dans la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis plusieurs notions issues de la jurisprudence.

D'une part, l'article 206 a défini les lots transitoires, issus de la pratique et dont le contenu avait été précisé par la Cour de cassation. L'alinéa 3 du I de l'article 1 er de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dans sa rédaction actuelle issue de l'ordonnance n° 2019-1101 du 30 octobre 2019 portant réforme du droit de la copropriété des immeubles bâtis, dispose ainsi que le lot transitoire est « formé d'une partie privative constituée d'un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu'il permet de réaliser et d'une quote-part de parties communes correspondante ». L'alinéa suivant ajoute que « La création et la consistance du lot transitoire sont stipulées dans le règlement de copropriété ».

Compte tenu de cette obligation de prévoir ces lots dans le règlement de copropriété, le II de l'article 206 de la loi ELAN avait aménagé une période transitoire de trois ans pour procéder à la mise en conformité de ces documents à compter de la promulgation de cette loi, soit jusqu'au 23 novembre 2021.

D'autre part, l'article 209 de la loi ELAN a défini les parties communes spéciales et parties communes à jouissance privative, ces deux notions ayant été précédemment consacrées par la jurisprudence. Dans sa rédaction actuelle, issue de l'ordonnance précitée du 30 octobre 2019, l'article 6-2 de la loi précitée du 10 juillet 1965 dispose que : « Les parties communes spéciales sont celles affectées à l'usage ou à l'utilité de plusieurs copropriétaires. Elles sont la propriété indivise de ces derniers. / La création de parties communes spéciales est indissociable de l'établissement de charges spéciales à chacune d'entre elles ». L'article 6-3 de la même loi définit les parties communes à jouissance privative : il s'agit des « parties communes affectées à l'usage ou à l'utilité exclusifs d'un lot. Elles appartiennent indivisément à tous les copropriétaires. / Le droit de jouissance privative est nécessairement accessoire au lot de copropriété auquel il est attaché. Il ne peut en aucun cas constituer la partie privative d'un lot ».

L'article 6-4 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit en outre que « L'existence des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété ». À cet effet, le II de l'article 209 de la loi ELAN a également aménagé une période transitoire de mise en conformité des règlements de copropriété de trois ans, expirant le 23 novembre 2021.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les lots transitoires, les parties communes spéciales et les parties communes à jouissance privatives, telles que consacrées par la loi ELAN, doivent être mentionnés dans le règlement de copropriété, document conventionnel défini par l'article 8 de la loi précitée du 10 juillet 1965. Leur inscription permet de définir les droits et obligations des propriétaires de ces lots ou titulaires des droits sur lesdites parties communes, et notamment la quote-part des tantièmes afférant à ces lots.

L'insertion des stipulations concernées dans les règlements de copropriété requiert toutefois de suivre la procédure de modification de ces règlements, telle que définie par la loi précitée du 10 juillet 1965. Cette modification nécessite, en particulier, au regard du dispositif concerné, deux assemblées générales des copropriétaires successives :

- La première au cours de laquelle est examinée la question de la mise en conformité du règlement de copropriété ;

- La seconde, après réalisation des opérations rendues nécessaires, notamment en cas de modification de l'état descriptif de division, qui doit être opérée conformément aux articles 71-1 à 71-15 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pour l'application du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, et avant publication au fichier immobilier, pour l'adoption des modifications en résultant.

Compte tenu de cette nécessité de réunir deux assemblées générales de copropriétaires successives, en général séparées d'une année, et des difficultés qui ont résulté de la crise sanitaire liée au Covid-19, le délai de trois ans fixé par la loi ELAN s'est avéré insuffisant pour procéder aux opérations de mise en conformité prévues par la loi. Or, l'expiration de ce délai fixé par les II des articles 206 et 209 de cette loi ELAN fait naître une incertitude juridique sur la situation des lots et parties concernés en l'absence de mise en conformité des règlements de copropriété concernés, compte tenu de l'obligation légale de les y faire figurer.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La prolongation de la période de mise en conformité vise à tenir compte du délai nécessaire à la réalisation de cette opération et à éviter l'incertitude juridique résultant de l'expiration du délai accordé par la loi ELAN. Elle assure une durée suffisante pour permettre le bon déroulement des procédures appropriées.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Compte tenu des difficultés rencontrées pour procéder à la mise en conformité des règlements de copropriété, en particulier du fait de la crise sanitaire et des conditions dans lesquelles les assemblées générales des copropriétaires ont pu se tenir en 2020 et 2021, aucune option autre que la prolongation de la période transitoire prévue n'est envisageable.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le Gouvernement propose de prolonger la durée accordée aux syndicats de copropriété pour procéder à la mise à jour de leurs règlements de trois ans, soit un total de six ans, portant ce délai au 23 novembre 2024.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Seule la période de mise en conformité des règlements de copropriété est concernée par la mesure concernée. Les définitions retenues par la loi reprenant celles consacrées par la jurisprudence, elle n'emporte pas de modification substantielle de la situation des personnes.

4.2. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les adaptations proposées ne modifient pas substantiellement le dispositif existant et l'impact sur les copropriétaires reste inchangé. L'extension de la durée accordée pour mettre en conformité les règlements de copropriété a pour seul effet l'allongement dans le temps de la période transitoire au cours de laquelle les assemblées générales des copropriétaires doivent examiner la question.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières sera consulté.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La durée totale accordée pour procéder à la mise à jour des règlements de copropriété est prolongée de trois ans, soit jusqu'au 23 novembre 2024. L'ensemble des dispositions envisagées entrent en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La disposition envisagée est sans incidence sur le champ d'application territoriale de la disposition modifiée.

5.2.3. Textes d'application

Aucun texte d'application n'est requis.

- Article 25 : Renforcement des dispositifs de délégation de compétences de l'État aux intercommunalités en matière de logement social et d'hébergement

1. ÉTAT DES LIEUX

La politique du logement est une politique partagée entre l'État et l'ensemble des collectivités territoriales et leurs groupements. La légitimité de l'intervention publique a été reconnue par le juge administratif qui considère que le logement social constitue une activité de service public (CE 4 déc. 1931, Demoiselle Dumy) et par le juge constitutionnel qui a déduit du principe de dignité de la personne humaine un objectif constitutionnel d'accès à un logement décent (Cons. const. 19 janv. 1995, no 94-359 DC).

Les différents actes de décentralisation ont permis de doter progressivement les collectivités territoriales de plus de compétences dans ce domaine, sans renoncer aux objectifs nécessaires au bien vivre ensemble, comme le maintien de la mixité sociale sur l'ensemble du territoire, l'égalité d'accès au logement ou encore la rénovation des logements. La loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences (loi Defferre) a ainsi attribué aux collectivités territoriales certaines compétences dans ce domaine. Elles sont notamment appelées à définir « dans le cadre de leurs compétences respectives leurs priorités en matière d'habitat » (Loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, article 76).

Dans ce contexte, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre se sont vus confier un rôle croissant, notamment en matière de planification. L'échelon intercommunal est la maille territoriale de définition et de mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat, intégrant les enjeux d'aménagement, de déplacements et de développement d'équipements et de services. Les EPCI à fiscalité propre, à savoir les métropoles, la métropole du Grand Paris, la métropole Aix-Marseille-Provence, la métropole de Lyon, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les communautés de communes, sont chargés d'élaborer et de mettre en oeuvre le programme local de l'habitat (PLH) (article L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation - CCH), principal document stratégique de programmation en matière de politique du logement dont l'objectif est de participer au développement de l'offre de logements sur leur territoire en favorisant la construction ou la réhabilitation de logements afin de répondre aux besoins des habitants. La politique locale de l'habitat tend également vers la revitalisation des centres-villes et la maîtrise de la consommation foncière.

Pour accompagner la mise en oeuvre du PLH, les EPCI à fiscalité propre se sont vus doter de compétences supplémentaires. Depuis la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, ils peuvent être délégataires, s'ils le souhaitent, des aides financières dédiées au logement et détenues originellement par l'État, en application de l'article L. 301-5-1 du CCH.

Dans les conditions prévues à l'article L. 301-5-2 du CCH, les départements peuvent également bénéficier d'une délégation.

Largement réformées par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, les délégations de compétences aux EPCI à fiscalité propre permettent à l'intercommunalité qui en a fait la demande d'exercer, de manière insécable, l'attribution des aides à la pierre et des aides de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). De manière complémentaire, elles peuvent aussi prévoir l'exercice, de manière insécable, du droit au logement opposable (DALO) et de la gestion des réservations de l'État, et de manière séparée des réquisitions avec attributaires, de la gestion de la veille sociale, de l'accueil, de l'hébergement et de l'accompagnement au logement.

Les délégations ainsi conclues peuvent être prorogées pour une durée d'un an, renouvelable une fois, permettant ainsi aux EPCI à fiscalité propre de sécuriser leur cadre d'intervention lors du renouvellement de la convention de délégation qui peut être retardé en raison de difficultés rencontrées dans le cadre de l'adoption du PLH, préalable obligatoire à la conclusion d'une nouvelle convention.

S'agissant des métropoles, les conventions de délégations en la matière sont encadrées par des régimes juridiques spécifiques, définis dans le code général des collectivités territoriales (CGCT).

Concernant les métropoles, les articles L. 3641-5, L. 5218-2 et L. 5217-2 du CGCT prévoient, respectivement pour la métropole de Lyon, la métropole d'Aix-Marseille-Provence et les autres métropoles, la possibilité de conclure une convention de délégation avec l'État, dans les mêmes conditions que celles prévues pour les autres EPCI à fiscalité propre. Le régime spécifique des conventions conclues par les métropoles prévoit la possibilité de leur déléguer la délivrance des autorisations d'aliénation de logements sociaux aux organismes HLM.

Concernant la métropole du Grand Paris (article L. 5219-1 du CGCT), la convention de délégation avec l'État lui permet d'exercer, de manière insécable, l'attribution des aides à la pierre et la gestion de la veille sociale, de l'accueil, de l'hébergement et de l'accompagnement au logement. De manière complémentaire, elle peut aussi prévoir l'exercice, de manière insécable, du DALO et de la gestion des réservations de l'État, et, de manière séparée, des réquisitions avec attributaires.

Parallèlement à ces délégations de compétences qui ont trait notamment aux logements sociaux, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté confie la gouvernance de la politique d'attribution des logements sociaux aux EPCI à fiscalité propre compétents en matière de PLH. Les EPCI concernés doivent ainsi obligatoirement mettre en place une conférence intercommunale du logement, conformément à l'article L. 441-1-5 modifié du CCH et définir des orientations de la stratégie d'attributions, à l'échelle de l'EPCI et plus spécifiquement sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui seront déclinées dans des conventions intercommunales d'attribution, à signer avec les organismes HLM.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La politique du logement, notamment la participation à son financement, est partagée entre l'Etat 72 ( * ) , la région 73 ( * ) , le département 74 ( * ) et le bloc communal 75 ( * ) . La multiplication des acteurs n'a pas contribué à la lisibilité de la politique du logement. En outre, la diversité des conventions de délégation conclues entre l'État et les EPCI à fiscalité propre contribue au manque de lisibilité des dispositifs de délégation. Les modalités de délégations figurent actuellement dans deux codes différents et sont définies dans des termes et articles propres selon les groupements concernés :

- l'article L. 301-5-1 du CCH s'agissant de l'ensemble des EPCI dotés d'un PLH, à l'exception des métropoles ;

- l'article L. 5219-1 du CGCT s'agissant de la métropole du Grand Paris ;

- l'article L. 3641-5 du CGCT s'agissant de la métropole de Lyon ;

- l'article L. 5218-2 du CGCT s'agissant de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ;

- l'article L. 5217-2 du CGCT s'agissant des autres métropoles.

La clarification du partage des compétences relatives à l'habitat et l'harmonisation des conventions de délégation conclues entre l'État et les EPCI à fiscalité propre apparaissent donc nécessaires.

S'agissant de la prorogation des conventions de délégation, les régimes spécifiques, définis par le CGCT, applicables à l'ensemble des métropoles, y compris la métropole de Lyon, la métropole d'Aix-Marseille et la métropole du Grand Paris, ne permettent pas cette faculté, contrairement à ce qui est prévu pour les autres EPCI à fiscalité propre au II de l'article L. 301-5-1 du CCH. Or cette différence de régime applicable n'apparaît pas justifiée et pose des difficultés. En effet, la prorogation des délégations pour une durée d'un an, renouvelable une fois, vise à permettre de pallier l'absence de caractère exécutoire du PLH, préalable obligatoire à la signature d'une nouvelle convention de délégation. Lors de la révision du PLH, divers motifs (désaccord sur le contenu du document, retard dans l'étude, échéances électorales, etc.) peuvent retarder la procédure, le PLH révisé n'étant alors pas exécutoire lorsque la convention de délégation initiale arrive à échéance. L'harmonisation du régime de délégation permettra donc aux métropoles de pouvoir proroger leurs conventions et ainsi de sécuriser l'exercice des compétences prévues par leur convention de délégation.

Par ailleurs, si les EPCI à fiscalité propre se sont emparés progressivement des compétences en matière d'aides financières, ils n'ont pas souhaité, pour la très grande majorité, élargir le champ des compétences déléguées à la gestion du DALO et de l'attribution des logements, ou au domaine de la veille sociale, de l'accueil et de l'hébergement d'urgence.

En 2020, moins de 4% des délégataires avaient inclus, dans la convention de délégation, les compétences en matière de gestion du DALO et de réservation de logements sociaux (4 sur 110 EPCI à fiscalité propre délégataires). Aucune convention conclue entre l'État et un EPCI à fiscalité propre ne portait sur les compétences relatives à la veille sociale, l'accueil et l'hébergement d'urgence.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Face aux enjeux persistants et nouveaux de la politique du logement et de l'hébergement, le Gouvernement souhaite que les moyens dédiés à la politique du logement et de l'hébergement soient au plus près de ceux qui en exercent les compétences.

L'harmonisation du régime des conventions de délégations conclues en matière de logement permettra de clarifier la répartition des compétences entre l'État et les collectivités territoriales ou leurs groupements et permettra aux métropoles de pouvoir proroger leurs conventions de délégation.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Afin de donner plus de cohérence et de moyens aux collectivités territoriales dans la mise en oeuvre d'une politique locale du logement, il pouvait être envisagé de mettre en place, à titre expérimental, un transfert, en un bloc insécable, de l'ensemble des compétences qui pouvaient jusqu'à présent être déléguées de manière obligatoire ou facultative.

De même, il pouvait être envisagé de maintenir le système actuel de délégation, mais en autorisant une délégation différenciée entre les aides à la pierre du parc social et du parc privé, et en conditionnant la délégation des aides du parc public à celle de la gestion du DALO et du contingent de logements réservés.

3.2. OPTION RETENUE

Afin de permettre une harmonisation des régimes de délégation de compétences en matière de logement et d'hébergement, il est prévu de rendre l'ensemble de l'article L. 301-5-1 du CCH applicable à l'ensemble des EPCI à fiscalité propre, notamment aux métropoles. Ainsi, il est proposé de prévoir que cet article du CCH soit la seule disposition applicable pour les conventions de délégation de compétences des EPCI, y compris aux métropoles, ce qui leur permettra de pouvoir proroger leurs conventions.

Toutefois, cette disposition n'est pas applicable à la métropole du Grand Paris, qui dispose d'un dispositif de délégation de compétences insécable (aides à la pierre et gestion de l'hébergement 76 ( * ) ) définie à l'article L. 5219-1 du CGCT.

Il convient de rappeler que les EPCI ont la possibilité de solliciter à titre optionnel, la délégation de garantie du droit à un logement décent 77 ( * ) , d'attribution des logements sociaux du contingent préfectoral 78 ( * ) et de gestion de l'hébergement d'urgence 79 ( * ) .

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 301-5-1 du CCH, ainsi que les articles L. 3641-5, L. 5217-2 et L. 5218-2 du CGCT.

4.2. IMPACTS BUDGÉTAIRES

Depuis 2014, les aides à la pierre du parc privé et du parc social peuvent être déléguées aux départements et aux EPCI à fiscalité propre. Les conséquences financières des délégations conclues à titre expérimental dans le cadre de la présente loi sont identiques à celles existantes dans le système précédemment en vigueur.

Les programmes budgétaires concernés sont les crédits du logement social relevant du budget opérationnel de programme (BOP) n°135 et du fonds national des aides à la pierre), ainsi que les crédits de l'ANAH et enfin, s'agissant de l'hébergement d'urgence, les crédits relevant du BOP n°177.

S'agissant du logement social, en 2019 (source QPB pour PLF 2021), plus de la moitié des dotations (224,5 millions d'euros sur 403,5 millions d'euros, soit 56%) est actuellement gérée dans le cadre des délégations et près de la moitié des crédits ANAH (547,5 millions d'euros sur 1118,65 millions d'euros, soit 49%).

S'agissant de l'hébergement, aucune délégation de compétence n'existe actuellement. Toutefois, il peut être précisé que le programme « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » représente 2,17 milliards d'euros d'autorisations d'engagement en 2021 80 ( * ) .

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La présente mesure permettra aux métropoles de pouvoir proroger leurs conventions de délégation de compétences, ce qui facilitera la mise en oeuvre de ces délégations.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article R. 361-2 du CCH, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national de l'habitat.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, et notamment à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion, Mayotte et Saint-Martin.

Article 26 : Opérations de revitalisation du territoire dans les agglomérations polycentrées 81 ( * )

1. ETAT DES LIEUX

L'article 157 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (dite loi ELAN) procède à la création des « opérations de revitalisation du territoire » (ORT) 82 ( * ) , codifiées à l'article L. 303-2 du code de la construction et de l'habitation. L'objet de ce dispositif est de lutter contre toutes les formes de fractures territoriales, qu'elles touchent les quartiers de la politique de la ville, les territoires ruraux, les petites villes et les villes moyennes 83 ( * ) . En effet, la dévitalisation des centres-villes et centres-bourgs n'est pas un phénomène circonscrit localement mais concerne dorénavant la quasi-totalité des villes et bourgs de France.

L'ORT vise en particulier à remédier à la dévitalisation des centres-villes ou centres-bourgs, phénomène en expansion ces dernières années 84 ( * ) . Cette dévitalisation résulte d'une accumulation de vulnérabilités que l'on peut mesurer par un panel d'indicateurs à suivre sur le temps long : potentiels fiscal et financier de la commune, taux d'équipement, capacité d'autofinancement, capacité de désendettement, classement dans des dispositifs zonés de soutien du développement économique et de l'emploi (ZRR, QPV, ZFU-TE, BUD, BER...). Certains territoires sont représentatifs de ces fragilités multifactorielles, tels les anciens bassins miniers du nord et de l'est de la France qui souffrent d'un déficit d'attractivité, d'un taux de chômage élevé et d'un recul du dynamisme de leur centre-ville.

Pour accompagner la rénovation des centres-villes dégradés des villes moyennes, une « opération de revitalisation de territoire » peut ainsi mobiliser localement tous les acteurs publics et privés pour la rénovation des logements et améliorer le cadre de vie des habitants. L'implantation de commerces est également facilitée dans le centre et régulée à la périphérie.

La convention ORT constitue le cadre juridique de mise en oeuvre du programme gouvernemental de revitalisation des centres-villes dénommé « Action coeur de ville » (ACV). L'établissement de cette convention a également été facilité pour les villes bénéficiant du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain (NPNRU) ou du programme national de Requalification des Quartiers Anciens Dégradé s (PNRQAD) dont l'avancée du projet de territoire permettait un déploiement rapide de l'ORT. Elle constitue également l'outil réglementaire des programmes ACV, lancé en mars 2018 et « Petites villes de demain » (PVD) 85 ( * ) , lancé le 1 er octobre 2020, et portés par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour accompagner en ingénierie les territoires dans leurs projets : tandis que le programme ACV est destiné à renforcer et développer l'attractivité des villes « moyennes », le programme PVD s'adresse à des communes de moins de 20 000 habitants exerçant des fonctions de centralité et à leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

En application de l'article L. 1232-2 du code général des collectivités territoriales, les préfets de département sont les délégués territoriaux de l'agence. Ils jouent un rôle pivot dans le déploiement des missions de l'ANCT dans les territoires. Leur rôle a été précisé par l'instruction du 15 mai 2020 relative aux modalités d'intervention de l'ANCT. Le délégué territorial, avec le ou les délégués territoriaux adjoints qu'il désigne, est le point d'accès unique pour les collectivités territoriales qui souhaitent bénéficier de l'intervention de l'agence. Il recueille les demandes d'intervention et recherche les solutions qui pourraient exister au niveau local afin qu'elles soient mobilisées en priorité, avec ou sans accompagnement de l'Etat. Concernant le programme PVD, les préfets de département sont chargés de recueillir les candidatures et de désigner les bénéficiaires .

Ces deux programmes, pilotés par l'ANCT, confortent le rôle de ces villes dans le développement de leur territoire. Ils sont issus du constat de la perte d'attractivité d'un grand nombre de centres-villes et de villes centres, avec une démographie en baisse et des commerces en déshérence, au sein d'aires urbaines dont la population et l'activité économique sont, au contraire, en augmentation. Ils visent à ramener des habitants et des commerces dans les coeurs de ville désertés. Les deux programmes poursuivent donc le même objectif, à savoir la revitalisation des centralités, et partagent une même méthode partenariale.

Les conventions ORT sont des contrats dont la vocation est de regrouper les démarches contractuelles existantes, qui se sont substitués aux conventions d'opérations de requalification de quartiers anciens dégradés (ORQAD) créées par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, qui n'ont pas connu de mise en oeuvre effective.

La convention ORT vise à moderniser et adapter non seulement le parc de logement et de commerce, mais plus généralement le tissu urbain. La convention intègre l'Etat, l'EPCI dont est membre la commune principale et tout ou partie des communes membres de cet établissement, et peut aussi intégrer les établissements publics de l'Etat et toute personne publique ou privée susceptible d'apporter son soutien ou de prendre part à des opérations prévues par la convention.

La convention, qui définit un projet urbain, économique et social global, délimite des secteurs d'intervention parmi lesquels en premier lieu et nécessairement le centre-ville de la ville principale du territoire de l'EPCI à fiscalité propre. Ce périmètre peut également inclure un ou plusieurs centres-villes d'autres communes membres de cet établissement. Compte tenu des enjeux territoriaux de la revitalisation du coeur de l'agglomération, notamment en matière d'urbanisme et d'implantation des activités et des commerces, de la répartition des compétences et des portages d'actions, il est essentiel que le projet de la ville principale soit engagé en parfaite cohérence avec la stratégie et les moyens d'intervention de l'EPCI.

L'ORT est un cadre partenarial proposant une logique intégratrice reposant sur :

- une approche intercommunale permettant de penser la répartition des fonctions urbaines (habitat, commerce, services...) de façon harmonieuse entre le/les centres et leurs périphéries, dans un projet global de territoire ;

- un projet d'intervention coordonné, formalisé dans la convention, qui intègre des actions multisectorielles et transversales, disposant d'un portage politique et d'une visibilité auprès de la population. Ce projet doit obligatoirement inclure au moins une action portée sur l'habitat.

Au 11 février 2021, date du dernier bilan réalisé par l'ANCT, 229 conventions ORT ont été signées, parmi lesquelles 59 conventions sont de dimension pluri-communales 86 ( * ) . La dimension pluri-communale, qui concerne presque un quart des ORT et plus de la moitié des communes signataires, est à prendre en compte dans les projets de territoires portés par les EPCI pour répondre aux besoins spécifiques de chaque territoire.

Ces 229 conventions concernent 374 communes, dont 188 sont accompagnées par le programme ACV (3/4 des conventions signées). Pour l'heure, les villes signataires se situent essentiellement dans le Grand Est (57), en Nouvelle-Aquitaine (51), en Auvergne-Rhône-Alpes (48) et dans une moindre mesure en Centre-Val de Loire (29), Occitanie (25) et Hauts-de-France (24).. Le nombre d'ORT devrait connaître une forte progression dans les mois à venir, signe d'un réel intérêt de la part des élus locaux. 566 communes ont en effet un projet, ce qui inclut la plupart des villes ACV non encore couvertes mais aussi des centralités lauréates du programme PVD.

La mise en place d'une ORT s'accompagne en effet d'un certain nombre d'outils mis à disposition des collectivités pour faciliter leur projet de revitalisation : défiscalisation de la réhabilitation avec le dispositif « Denormandie dans l'ancien » 87 ( * ) , dispositif d'intervention immobilière et foncière (DIIF), dispositif de vente d'immeuble à rénover (VIR), possibilité de suspendre les autorisations d'exploitation commerciale (AEC) en périphérie, dispense de ces mêmes AEC en centre-ville, droit de préemption urbain renforcé, permis d'aménager multi-sites et permis d'innover.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le dispositif des ORT a été conçu pour des territoires très ciblés, ce qui a permis un essor rapide et le déploiement de mesures attractives pour les collectivités territoriales concernées. Cependant, il apparaît aujourd'hui qu'un certain nombre de communes se trouvent exclues du dispositif du fait de leur taille trop petite ou de leur situation en proximité d'une métropole.

Ainsi, certains territoires et communes vulnérables de petite taille, de montagne ou en outre-mer, en situation de discontinuité territoriale vis-à-vis de la ville principale du territoire, particulièrement vulnérables aux aléas (notamment sanitaires et climatiques), tireraient bénéfice de leur inscription dans une ORT.

On constate en outre que dans certains EPCI à fiscalité propre, des communes peuvent exercer une fonction de centralité secondaire, en présentant une discontinuité géographique, une accessibilité limitée, ou un éloignement manifeste par rapport à la ville principale de l'EPCI à fiscalité propre.

Il convient donc d'élargir l'éligibilité aux ORT à certaines communes des EPCI à fiscalité propre, sans inclure dans le périmètre de l'ORT le centre-ville de la ville principale du territoire, dès lors que le représentant de l'Etat dans le département a constaté que ces communes présentent également des caractéristiques de ville principale.

La mise en oeuvre des ORT ayant été définie au niveau législatif, de même que le sont les programmes de rénovation urbaine (dispositif ORQAD, loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine), il est apparu nécessaire que l'extension de leur périmètre soit prévue au niveau législatif.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif de la mesure est de permettre à des territoires vulnérables de pouvoir bénéficier du dispositif actuel des ORT, sans que le centre-ville de la ville principale du territoire de l'EPCI figure nécessairement dans le périmètre des secteurs d'intervention de la convention.

Cet article permet d'introduire la possibilité pour des ORT d'être signées à l'échelle d'une zone présentant un éloignement et une difficulté d'accessibilité par rapport à la ville-centre de l'EPCI, mais sans présence obligatoire de la ville principale, si cela pose problème localement. Les signataires de ces ORT sont au minimum la commune exerçant des fonctions de centralité commerciale, de services ou d'équipements, l'EPCI à fiscalité propre afin que ce dernier puisse garantir la cohérence globale de la stratégie à l'échelle intercommunale, et enfin l'Etat.

A titre d'illustration, s'agissant de la métropole de Nice, pourrait être concernée la zone de montagne située au nord de la métropole, celle-ci étant en situation d'éloignement et d'accessibilité limitée.

S'agissant de Marseille, la mise en oeuvre de cet article permettrait d'envisager l'élaboration d'ORT adaptées. Ainsi, seraient signataires a minima la ville principale de la zone concernée, la métropole pour garantir la cohérence globale de la stratégie à l'échelle de l'EPCI, et l'Etat.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Dans un premier temps, il a été envisagé d'ouvrir ce dispositif dérogatoire aux seules métropoles (notamment Nice et Aix-Marseille) pour lesquelles la signature d'une ORT sans la ville principale de l'EPCI à fiscalité propre est une demande fréquente des acteurs locaux. Il a également été envisagé d'étendre cette dérogation aux départements et régions d'outre-mer caractérisés par de fortes discontinuités territoriales. Conformément au principe d'égalité devant la loi, il a finalement été choisi d'étendre le dispositif ORT à tous les EPCI à fiscalité propre sur l'ensemble du territoire national.

3.2. OPTION RETENUE

L'option choisie est d'ouvrir ce dispositif dérogatoire à l'ensemble des EPCI à fiscalité propre et ce afin de garantir le respect du principe d'égalité devant la loi. Cet ORT, sans la signature de la ville principale de l'EPCI, n'a toutefois pas vocation à s'étendre sur l'ensemble du territoire national mais à cibler des zones spécifiques, notamment celles qui ont fait l'objet de signalements par les services de l'Etat dans les territoires. En effet, la cohérence de la loi Elan, imposant une seule ORT par EPCI, afin de préserver le rôle de l'EPCI à fiscalité propre dans le portage d'un projet territorial cohérent à l'échelle du territoire, pourra être garantie avec la mise en place d'un double filtre, celui de la loi et du préfet de département.

L'article L. 303-3, qu'il est proposé d'ajouter après l'article L. 303-2 du code de la construction et de l'habitation, vise donc à corriger certaines difficultés identifiées localement pour signer une ORT dans le cas d'EPCI à fiscalité propre caractérisés par un fort polycentrisme, avec des situations de discontinuité urbaine et d'éloignement entre les pôles.

Ainsi, une opération de revitalisation de territoire peut être conclue sur le périmètre d'une ou de plusieurs communes d'un EPCI à fiscalité propre sans en intégrer la ville principale, au sens de l'article L. 303-2, par dérogation accordée par le représentant de l'État dans le département, et sous réserve de répondre aux deux conditions suivantes :

- présenter une situation de discontinuité territoriale ou d'éloignement par rapport à la ville principale de la métropole ;

- identifier en son sein une ou des villes présentant des caractéristiques de centralité appréciées notamment au regard de la diversité des fonctions urbaines exercées en matière d'équipements et de services vis-à-vis des communes alentours.

A titre d'exemple, l'application de ces critères permettra en particulier de prévoir une ORT à l'échelle de la zone de montagne intégrée à la métropole de Nice, particulièrement touchée par la tempête Alex, et qui permettra à ses communes d'enclencher un processus de revitalisation de long terme.

La convention d'opération de revitalisation de territoire est signée par l'EPCI à fiscalité propre, la commune concernée et l'État. La convention peut être signée par toute autre commune de cet EPCI à fiscalité propre ou organismes publics ou privés susceptibles d'apporter un soutien ou de prendre part à la réalisation de l'opération de revitalisation.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les dispositions envisagées permettent d'étendre le champ d'application des conventions d'opérations de revitalisation du territoire et les dispositifs législatifs dérogatoires qui leur sont associés ; un nouvel article L. 303-3 du code de la construction et de l'habitation est créé, à la suite de l'article L. 303-2 sur les ORT.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Les conséquences liées à la conclusion de ces ORT dérogatoires ont vocation à se faire ressentir davantage au niveau local, étant ciblées sur des territoires spécifiques, qu'à un niveau macroéconomique, le champ de l'extension du périmètre étant restreint.

Les impacts économiques attendus localement pour les collectivités impactées sont positifs sachant que les effets juridiques de l'ORT facilitent les projets de réhabilitation des logements anciens et d'installation de commerces de taille importante en centre-ville. Ils visent également à faciliter les démarches en matière d'urbanisme (permis d'aménager multi-sites, mise en cohérence des documents d'urbanisme), propice au développement de l'activité économique en général, et à la revitalisation des centres-villes en particulier.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les investissements réalisés par le biais de la convention d'ORT et les financements publics afférents sont un gage d'attractivité pour les entreprises, notamment les petites entreprises ainsi que les commerces de grande taille dispensés d'AEC, ayant vocation à réintégrer les centres-villes. Des opportunités seront également offertes aux entreprises de bénéficier de nouveaux marchés de construction et de réhabilitation.

Au-delà, les possibilités de suspension d'ouvertures de commerces en dehors des centres-villes conforte leur attractivité, sans pour autant déstabiliser le tissu économique local, car ces décisions font l'objet d'une mise en oeuvre très circonstanciée, liées notamment à l'analyse des données existantes sur la zone de chalandise, au regard notamment du niveau et de l'évolution des taux de logements vacants, de vacance commerciale et de chômage dans les centres-villes et les territoires concernés.

4.2.3. Impacts budgétaires

L'extension du dispositif d''ORT n'induit pas de dépenses budgétaires à l'entrée en vigueur de la loi.

Lorsque les projets de revitalisation de territoire seront élaborés et contractualisés, des investissements publics pourront être envisagés.

Les ORT sont propices à l'émergence de projets d'intervention coordonnés, multi-dimension, formalisés dans une convention unique, favorisant la mobilisation accrue des financements publics.

Toutefois, la part des dépenses prises en charge par l'Etat n'est pas identifiable a priori, ayant vocation à être modulée en fonction des difficultés du territoire et ne conduira en tout état de cause pas à une augmentation des enveloppes de crédits de droit commun mais à une plus grande priorisation de ces derniers.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Selon les barèmes établis au niveau national, l'impact de la mise en oeuvre d'une ORT évalué par collectivité, au-delà des investissements financiers à réaliser dans les projets, s'élève à 1 à 2 ETP par ORT (direction de projet) faisant pour une part non négligeable l'objet d'un accompagnement financier de l'Etat et des partenaires institutionnels.

Pour une collectivité qui bénéficie déjà d'un accompagnement « sur mesure » comme dans le cadre du programme ACV, AMI centre-bourg ou celui du PNRQAD de l'ANRU, le coût est presque nul. Pour les autres collectivités, l'ETP correspond à la rémunération d'un chef de projet ACV ou PVD soit 40 000 euros par an, avec une prise en charge par l'Etat ou l'Anah pouvant aller jusqu'à 75% du poste sur 2 ans.

Au-delà, la signature de conventions ORT confère aux collectivités de nouveaux droits juridiques et fiscaux.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La négociation de ces contrats mobilisera les services déconcentrés de l'Etat, notamment des directions départementales des territoires, qui ont déjà des effectifs dédiés et disposent des compétences requises. L'élaboration et le suivi (pilotage et animation) des conventions d'ORT est estimé à 1 à 2 ETP de niveau cadre (catégorie A), par département (et un par région). Le programme Action coeur de ville estime la durée de cette mission à maximum 1 an pour l'élaboration et le suivi du déploiement de la convention.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Le développement des ORT peut faciliter les opérations de réhabilitations pouvant donner lieu à la création de logements sociaux adapté au handicap ou plus généralement destiné aux personnes dépendantes en centre-ville, soit les personnes qui, nonobstant les soins qu'elles sont susceptibles de recevoir, ont besoin d'être aidées pour l'accomplissement des actes essentiels de la vie ou requiert une surveillance régulière 88 ( * ) . Aujourd'hui en France, seuls 6% du parc locatif social ont été aménagés en fonction des besoins des seniors. Selon les projections, il faudrait que le taux atteigne 20% pour répondre aux demandes de tous 89 ( * ) .

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

Le développement des ORT peut faciliter les opérations de réhabilitations pouvant donner lieu à la création de logements étudiants en centre-ville.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Ces ORT permettront de contribuer à la modernisation du parc de logements, la lutte contre la vacance des logements et contre l'habitat indigne, réhabiliter l'immobilier de loisir, valoriser le patrimoine bâti et réhabiliter les friches urbaines, dans une perspective de mixité sociale et d'innovation.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les actions prévues par les conventions d'ORT s'inscrivent dans le cadre du projet urbain, économique et social de revitalisation de territoire concerné qui s'attache à favoriser notamment le développement durable.

L'approche intercommunale des stratégies urbaines, commerciales et de l'habitat qui caractérise les ORT vise à remettre le centre-ville au coeur du projet et permettre un développement harmonieux de sa périphérie.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article R-361-2 du code de la construction et de l'habitation, le Conseil national de l'habitat peut être consulté « sur les mesures destinées à favoriser la mixité sociale ou à réhabiliter l'habitat existant ainsi que sur les modifications des régimes d'aides directes ou indirectes de l'Etat à l'accession à la propriété ». Ce cadre correspond à l'ambition portée par la signature d'une convention ORT qui vise notamment la rénovation des logements et l'amélioration du cadre de vie des habitants des centres-villes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 27 : Biens sans maître et biens en état d'abandon manifeste

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le projet d'article vise à lutter contre le phénomène des biens non entretenus ou abandonnés en modifiant les régimes des biens sans maître et des biens en état d'abandon manifeste afin de faciliter l'acquisition de ces biens, notamment dans le cadre d'une grande opération d'urbanisme (GOU) ou d'une opération de revitalisation du territoire (ORT).

L'objet du dispositif d'ORT, prévu à l'article L. 303-2 du code de la construction et de l'habitation (CCH), est d'accompagner la rénovation des centres-villes dégradés des villes moyennes. L'ORT pourra ainsi mobiliser localement tous les acteurs publics et privés pour la rénovation des logements et améliorer le cadre de vie des habitants. L'implantation de commerces sera également facilitée dans le centre et régulée à la périphérie.

La convention d'ORT constitue le cadre juridique de mise en oeuvre du programme gouvernemental de revitalisation des centres-villes dénommé « Action coeur de ville » (ACV). Elle constitue également l'outil réglementaire du programme « Petites villes de demain » (PVD), lancé en octobre 2020 : tandis que le programme ACV est destiné à renforcer et développer l'attractivité des villes « moyennes », PVD est destiné à des communes de moins de 20 000 habitants exerçant des fonctions de centralité et à leur EPCI. Ces deux programmes, pilotés par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), confortent le rôle de ces villes dans le développement de leur territoire. Ces deux programmes sont issus du constat de la perte d'attractivité d'un grand nombre de centres-villes et de villes centres, avec une démographie en baisse et des commerces en déshérence, au sein d'aires urbaines dont la population et l'activité économique sont, au contraire, en augmentation. Ils visent à ramener des habitants et des commerces dans les coeurs de ville désertés. Les deux programmes poursuivent donc le même objectif, à savoir la revitalisation des centralités, et partagent une même méthode partenariale.

Les conventions d'ORT sont des contrats intégrateurs qui se sont substitués aux conventions d'opérations de requalification de quartiers anciens dégradés (ORQAD) créées par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, qui n'ont pas connu de mise en oeuvre effective.

La convention d'ORT vise à moderniser et adapter non seulement le parc de logement et de commerce, mais plus généralement le tissu urbain. La convention intègre l'Etat, l'établissement public de coopération intercommunale dont est membre la commune principale et tout ou partie des communes membres de cet établissement, et peut aussi intégrer les établissements publics de l'Etat et toute personne publique ou privée susceptible d'apporter son soutien ou de prendre part à des opérations prévues par la convention. La convention, qui définit un projet urbain, économique et social global, délimite des secteurs d'intervention parmi lesquels en premier lieu et nécessairement le centre-ville de la ville principale du territoire de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre signataire. Ce périmètre peut également inclure un ou plusieurs centres-villes d'autres communes membres de cet établissement. Compte tenu des enjeux territoriaux de la revitalisation du coeur de l'agglomération, notamment en matière d'urbanisme et d'implantation des activités et des commerces, de la répartition des compétences et des portages d'actions, il est essentiel que le projet de la ville principale soit engagé en parfaite cohérence avec la stratégie et les moyens d'intervention de l'EPCI.

L'ORT est un cadre partenarial intégrateur reposant sur :

- une approche intercommunale permettant de penser la répartition des fonctions urbaines (habitat, commerce, services...) de façon harmonieuse entre le/les centres et leurs périphéries, dans un projet global de territoire ;

- un projet d'intervention coordonné, formalisé dans la convention, qui intègre des actions multisectorielles et transversales, disposant d'un portage politique et d'une visibilité auprès de la population. Ce projet doit obligatoirement inclure au moins une action portée sur l'habitat.

Au 11 février 2021, date du dernier bilan réalisé par l'ANCT, 229 opérations de revitalisation du territoire ont été signées, parmi lesquelles 59 conventions sont de dimension pluri-communales 90 ( * ) . La dimension pluri-communale, qui concerne presque un quart des ORT et plus de la moitié des communes signataires, est à prendre en compte nécessairement dans les projets de territoire portés par les EPCI, pour répondre aux besoins spécifiques de chaque territoire.

Ces 229 conventions concernent 374 communes, dont 188 sont accompagnées par le programme « Action coeur de ville » (3/4 des conventions signées). Pour l'heure, les villes signataires se situent essentiellement dans le Grand Est (57), en Nouvelle-Aquitaine (51), en Auvergne-Rhône-Alpes (48) et dans une moindre mesure en Centre-Val de Loire (29), Occitanie (25) et Hauts-de-France (24). Le nombre d'ORT devrait connaître une forte progression dans les mois à venir, signe d'un réel intérêt de la part des élus locaux. 566 communes ont en effet un projet, ce qui inclut la plupart des villes ACV non encore couvertes mais aussi des centralités lauréates du programme « Petites Villes de demain ».

La loi ELAN a également prévu que, dans le cadre d'une ORT et à titre expérimental (pour une durée de cinq ans), il est possible de déposer une demande de permis d'aménager portant sur plusieurs unités foncières non contiguës. Ce permis d'aménager multi-sites expérimental vise à répondre au défi d'équilibre économique d'une opération de renouvellement urbain. Il s'agit de trouver un équilibre entre plusieurs opérations au sein d'un même projet, le bénéfice des unes équilibrant le déficit des autres.

Prévue dans le contrat de projet partenarial d'aménagement (PPA), le périmètre de la GOU est délimité par un acte de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunal (EPCI) compétent, après avis conforme des communes concernées et accord du représentant de l'État dans le département (article L. 312-4 du code de l'urbanisme).

Ce dispositif entraîne de nombreux effets juridiques (article L. 312-5 du même code), parmi lesquels le transfert de compétences à l'intercommunalité, comme la délivrance des permis de construire et autres actes d'utilisation du sol, la maîtrise d'ouvrage voire la gestion d'équipements publics. L'acte créant la GOU peut aussi valoir pour tout ou partie création d'une zone d'aménagement différé (ZAD) avec un droit de préemption pouvant être exercé pendant une période de dix ans (article L. 312-6 du même code). Les EPA peuvent intervenir pour mener des opérations d'aménagement, s'ils sont titulaires d'une concession d'aménagement en situation de quasi-régie (article L. 321-23 du même code).

Par ailleurs, une procédure intégrée pour l'adaptation des documents d'urbanisme dans le cadre d'une GOU (PIGOU) a été créée (article L. 300-6-1 du même code). L'objectif de cette mesure est de permettre, dans le cadre d'une procédure unique et de délais resserrés, la mise en compatibilité d'un ou de plusieurs documents d'urbanisme mais aussi, le cas échéant, l'adaptation de certains plans/programmes de rang supérieur ou de certaines servitudes d'utilité publique.

Une circulaire du 4 février 2019 de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et du ministre chargé de la ville et du logement, relative à l'accompagnement par l'État des projets d'aménagement des territoires, fait suite à la promulgation de la loi ELAN et revient plus précisément sur le contrat de PPA et l'opération de revitalisation du territoire (ORT).

Aujourd'hui, douze contrats de PPA ont été signés ou sont en cours de signature et une quinzaine sont en préparation. Il s'agit par exemple de projets de rénovation de centres urbains ou de quartiers constitués à Mulhouse et à Argenteuil, de résorption de l'habitat privé dégradé à Marseille ou de transformations de friches militaires au Mans. A Toulouse et Bordeaux, le PPA accompagne des projets d'intensification de tissus urbains existants. Sur les vallées du Gier et de l'Ondaine au sud de Saint-Etienne, il permet de mettre en place un projet de revitalisation de centralités urbaines et pôles structurants. A Strasbourg, il anticipe la transformation des abords d'une infrastructure majeure en organisant les réflexions des nombreuses parties prenantes pour faire converger leurs objectifs. Au Teil, en Ardèche, il coordonne les efforts de chacun pour accélérer la reconstruction de la ville suite au séisme du 11 novembre 2019.

Pour ces opérations, le délai d'acquisition d'un bien sans maître est ramené de trente à dix ans. La réduction importante de ce délai s'accompagne de garanties du respect du droit de propriété. Il est également prévu de mettre fin à une différence entre le traitement des immeubles bâtis et celui des immeubles non bâtis, née d'une modification législative aux mesures de coordination incomplètes. S'agissant des biens en état d'abandon manifeste, il est proposé d'élargir le champ de la procédure à un double titre : extension du périmètre d'acquisition de l'agglomération de la commune à l'ensemble de son territoire d'une part, possibilité d'acquérir afin de constituer une réserve foncière d'autre part.

1.1.1. Les biens sans maître (BSM)

Les biens sans maître sont des biens immobiliers dont le propriétaire est inconnu ou décédé avec une succession ouverte depuis 30 ans. Pour éviter le délaissement de ces biens et leur détérioration, les collectivités publiques disposent de la faculté de les acquérir et les incorporer dans leur domaine privé, en principe, sans contrepartie financière.

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a décentralisé la procédure d'acquisition de ces biens aux communes. Ce n'est qu'en cas de renoncement de ces dernières, que les biens reviennent à l'État.

La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) est venue ouvrir aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI) la possibilité d'acquérir les biens sans maître. Depuis lors, ces biens appartiennent à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés, sauf si elle y renonce au profit de l'EPCI dont elle est membre. A la suite de cette réforme, l'État ne peut acquérir le bien qu'à la suite du double renoncement de la commune et de l'EPCI.

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a introduit une distinction entre la procédure d'incorporation applicable aux biens bâtis et celle concernant les biens non-bâtis. Cette distinction crée des modalités d'acquisition spécifiques en fonction de la nature du bien.

L'article L. 1123-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) définit deux catégories de biens sans maître :

- les biens faisant partie d'une succession ouverte depuis plus de trente ans et pour laquelle aucun successible ne s'est présenté : acquisition de plein droit par la commune ou l'EPCI (article L. 1123-1 1°) ; il s'agit des biens définitivement sans maître ;

- les biens qui n'ont pas de propriétaire connu et pour lesquels la taxe foncière sur les propriétés bâties (article L. 1123-1 2°) ou non-bâties (L. 1123-1 3°) n'a pas été acquittée depuis plus de trois ans ou a été acquittée par un tiers : la revendication par le propriétaire avec restitution ou indemnisation reste ouverte pendant 30 ans ; il s'agit des biens présumés sans maître.

A - Les biens définitivement sans maître

L'article L. 1123-2 du CG3P prévoit que « les règles relatives à la propriété des biens mentionnés au 1° de l'article L. 1123-1 sont fixées par l'article 713 du code civil » .

En vertu de l'article 713 du code civil, les biens visés au 1° de l'article L. 1123-1 du CG3P appartiennent de plein droit à la commune sur le territoire de laquelle ils sont situés, ou à défaut à l'EPCI dont elle est membre, ou à défaut et suivant les cas à l'État, au conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ou au conservatoire régional d'espaces naturels.

La loi ne prévoit aucune formalité particulière pour l'appréhension de cette catégorie de biens. La commune ou l'EPCI adopte une délibération pour formaliser l'acquisition et, concernant le transfert dans le domaine de l'État, il est constaté par arrêté préfectoral (article R. 1123-2 du CG3P).

Il est proposé de réduire à 10 ans au lieu de 30 ans le délai d'acquisition de plein droit des biens sans maître pour les immeubles faisant partie d'une succession vacante.

L'importance de cette contraction temporelle doit être mise en perspective avec la réforme du droit des successions par la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 qui a également réduit à 10 ans contre 30 ans auparavant le délai pour les héritiers à exercer leur option successorale. Selon l'article 780 du code civil, « la faculté d'option se prescrit par dix ans à compter de l'ouverture de la succession ». Au-delà de ce délai décennal, l'héritier est réputé renonçant, ce qui signifie qu'il perd tout droit dans la succession. Ainsi, passés 10 ans, bien que la succession ne puisse plus être revendiquée, elle ne peut relever du régime des biens sans maître que 20 ans plus tard, une fois atteint le délai trentenaire prévu au 1° de l'article L. 1123-1 du CG3P.

Ce décalage de 20 ans, injustifié et incohérent doit être revu.

Pour les successions ouvertes à compter du 1 er janvier 2007, date d'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006 précitée, si le point de départ du délai de 10 ans est en principe le jour de l'ouverture de la succession, ce délai est susceptible de suspension ou d'interruption. La minorité de l'héritier est une cause classique de suspension. L'article 780 du code civil prévoit par ailleurs trois cas dans lesquels la prescription ne court pas :

- contre l'héritier dont les biens héréditaires sont laissés en jouissance au conjoint survivant, le délai ne commence qu'à l'ouverture de la succession de ce dernier ;

- contre l'héritier subséquent d'un héritier dont l'acceptation est annulée, le délai ne commence qu'à compter de la décision définitive constatant cette nullité ;

- tant que le successible a des motifs légitimes d'ignorer la naissance de son droit, notamment l'ouverture de la succession s'il ignorait le décès.

Un héritier peut donc revendiquer la succession plus de 10 ans après le décès.

En réduisant à 10 ans le délai au terme duquel la propriété des immeubles composant la succession est transférée automatiquement à une collectivité publique, il est donc possible que surviennent des contentieux en revendication de la propriété entre la personne publique nouvellement titrée et les héritiers.

Pour pallier cette difficulté, la mesure proposée duplique le dispositif existant à l'article L. 2222-20 du CG3P relatif au droit du propriétaire à restitution ou indemnisation s'il se manifeste avant 30 ans. Ce droit est applicable à ce jour uniquement aux biens bâtis présumés sans maître et non, par erreur, aux biens non bâtis (cf. infra, point 1.1.1.2 sur la nécessité d'une mesure corrective).

En application de l'article L. 2222-20 du CG3P, le propriétaire ou ses ayants-droits, revendiquant la propriété des immeubles litigieux dans le délai de 30 ans à compter du décès, seront en droit d'exiger la restitution du bien. Si cette restitution s'avère impossible, la mesure leur ouvre droit à une indemnisation à la valeur de l'immeuble dans son état de conservation au jour de l'acte d'aliénation ou, le cas échéant, du procès-verbal constatant la remise effective de l'immeuble. A défaut d'accord amiable entre les parties, il est prévu que l'indemnité sera fixée par le juge de l'expropriation.

Le projet de réduction à 10 ans du délai d'acquisition est ainsi contrebalancé par une absence d'acquisition définitive du bien par la collectivité territoriale permettant de préserver les droits légitimes des héritiers.

Pour les successions ouvertes avant le 1 er janvier 2007, le délai de prescription demeure de 30 ans. Le délai décennal ne s'applique que pour les successions ouvertes à compter du 1 er janvier 2007. La Cour de cassation a confirmé récemment que la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription n'a pas modifié ce délai trentenaire pour les successions ouvertes avant le 1 er janvier 2007 (Cass. 1 ère civ., 12 févr. 2020, n° 19-11.668).

Ainsi, les héritiers de successions antérieures à 2007 bénéficient d'un droit acquis à un délai trentenaire pour lever leur option, sans courir le risque, durant ce délai, d'une appropriation du bien par une personne publique en vertu du droit actuel. Si le projet de modification du délai devait s'appliquer aux successions ouvertes avant 2007, la réduction du délai d'acquisition des biens sans maître par la personne publique porterait une atteinte excessive à ce droit acquis des héritiers concernés. C'est pourquoi le projet d'article ne prévoit l'application du délai décennal que pour les biens issus de successions ouvertes à compter du 1 er janvier 2007.

B - Les biens présumés sans maître

Les 2° et 3° de l'article L. 1123-1 du CG3P visent respectivement l'acquisition des propriétés bâties et non bâties. Le critère d'appropriation pour le bâti et le non bâti est commun : les immeubles sans propriétaire connu et pour lesquels depuis plus de trois ans, la taxe foncière n'a pas été acquittée ou l'a été par un tiers. En revanche, les modalités d'acquisition de ces biens divergent et sont précisées aux articles L. 1123-3 pour le bâti et L. 1123-4 pour le non bâti.

La procédure relative aux immeubles bâtis commence par un arrêté du maire après avis de la commission communale des impôts directs (article R. 1123-1 du CG3P) ou un arrêté du président de l'EPCI, constant qu'un bien remplit les conditions pour être qualifié de sans maître. L'arrêté est affiché, publié et notifié aux derniers domiciles connus du propriétaire ainsi qu'à l'habitant ou à l'exploitant de l'immeuble et au représentant de l'État dans le département. Ce n'est qu'à l'expiration d'un délai de six mois après l'accomplissement de la dernière mesure de publicité que le bien est présumé sans maître. Dans les six mois suivants, le conseil municipal peut décider par délibération d'incorporer le bien dans le domaine communal, sinon le bien est attribué à l'État ou au conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ou encore au conservatoire régional d'espaces naturels.

La loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a institué une procédure propre aux biens non-bâtis en créant l'article L. 1123-4 du CG3P. Les différences sont légères : le début de la procédure n'est plus à l'initiative de la commune ou de l'EPCI, mais du préfet qui communique à ces derniers la liste des biens non bâtis présumés sans maître sur leur territoire au vu des informations annuelles transmises par les centres des impôts fonciers. Cette nouvelle procédure vise à faciliter l'identification des biens par les communes, notamment les terres agricoles et les massifs forestiers.

La dualité de la procédure d'acquisition présente toutefois une insuffisance. Le droit de restitution ou d'indemnisation du propriétaire se manifestant avant la prescription acquisitive de 30 ans décrit précédemment et prévu à l'article L. 2222-20 du CG3P ne s'applique selon cette disposition que « lorsque la propriété d'un immeuble a été attribuée dans les conditions fixées à l'article L. 1123-3 (...) ». La loi du 13 octobre 2014 précitée a en effet omis d'étendre le régime de garantie du droit de propriété aux biens non bâtis, créant involontairement et vraisemblablement une atteinte disproportionnée au droit de propriété. Il est ainsi proposé de rétablir la protection du droit de propriété quelle que soit la nature du bien en rendant applicable L. 2222-20 à l'article L. 1123-4 relatif aux biens non bâtis.

1.1.2. Biens en état d'abandon manifeste

Lorsqu'une parcelle privée supporte des bâtiments inhabités ou laissés à l'abandon par leurs propriétaires, soit par désintérêt, soit en cas d'indivision persistante, elle constitue bien souvent un obstacle à la politique d'urbanisme menée par la commune et un risque de dégradation de l'environnement.

L'article L. 2243-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que dans une commune où des immeubles, parties d'immeubles, voies privées assorties d'une servitude de passage public, installations et terrains sans occupant à titre habituel ne sont manifestement plus entretenus, le maire engage, sans qu'une demande du conseil municipal soit nécessaire, la procédure de déclaration de la parcelle concernée en état d'abandon manifeste.

Le projet d'article vise à faciliter l'acquisition des biens en état d'abandon manifeste dans la perspective de la mise en oeuvre des grandes opérations d'urbanisme et des opérations de revitalisation du territoire. Le périmètre d'acquisition des biens est ainsi élargi au territoire de toute la commune et non plus seulement à celui de l'agglomération (article L. 2243-1 alinéa 2 du CGCT) et il est ajouté aux fins poursuivies, le chef de constitution de réserves foncières (article L. 2243-3 alinéa 1 er du CGCT). Ces aspects sont exposés au point 2.2 (objectifs poursuivis).

Il est ici nécessaire de détailler la procédure relative aux biens abandonnés afin de s'assurer de sa constitutionnalité au regard du droit de propriété.

La procédure se décline en deux phases. La première a pour objectif d'amener les propriétaires à reprendre en main leurs biens. La constatation de l'état d'abandon manifeste par le maire est avant tout un outil incitatif d'exécution de travaux. A défaut de réaction du propriétaire, dans une seconde phase, les biens concernés peuvent faire l'objet d'une expropriation en vue de la mise en oeuvre d'un projet d'intérêt collectif relevant d'une opération de restauration, de rénovation ou d'aménagement. La procédure d'expropriation est alors simplifiée par l'exemption d'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique (DUP) sur le modèle du régime communément appelé « Loi Vivien » relatif aux immeubles insalubres.

A - Constatation de l'état d'abandon manifeste

En premier lieu, le maire constate, par procès-verbal provisoire, l'abandon manifeste d'une parcelle, après avoir procédé à la détermination de celle-ci et à la recherche des propriétaires, des titulaires de droits réels et autres intéressés dans le fichier immobilier ou le livre foncier (article L. 2243-2 al.1 er du CGCT). Ce procès-verbal détermine et précise par ailleurs la nature des désordres qui affectent le bien et auxquels il convient de remédier.

Ce procès-verbal doit faire l'objet d'un affichage pendant trois mois à la mairie et sur les lieux concernés, d'une publication dans deux journaux régionaux ou locaux (article L. 2243-2 al. 2 du CGCT) et d'une notification aux propriétaires, titulaires de droits réels ou autres intéressés. Cette notification doit reproduire les termes des articles L. 2243-1 à L. 2243-4 du CGCT, à peine de nullité.

En deuxième lieu, après la réalisation de ces formalités, deux options sont possibles :

- soit les propriétaires interviennent dans les trois mois suivant l'exécution des mesures de publicité et de notification et mettent fin à l'état d'abandon ou ont manifesté leur intention d'y mettre fin en débutant des travaux ou en s'engageant à les réaliser dans un délai fixé en accord avec le maire, et la procédure d'abandon manifeste ne peut plus être poursuivie. Cette procédure pourra toutefois être reprise si les engagements des propriétaires, notamment sur les délais, ne sont pas tenus ;

- soit les propriétaires n'ont effectué aucune action pour mettre fin à l'état d'abandon, n'ont manifesté aucune intention d'y mettre fin ou n'ont pas tenu leurs engagements, le maire prend alors un procès-verbal définitif de constatation de l'état d'abandon manifeste qui est tenu à la disposition du public (article L. 2243-3 al. 1 er du CGCT).

B - Expropriation de la parcelle en état d'abandon manifeste

Une fois le procès-verbal définitif pris, le maire saisit le conseil municipal qui délibère s'il y a lieu de déclarer la parcelle en état d'abandon manifeste et d'en poursuivre l'expropriation au profit de la commune, d'un organisme y ayant vocation ou d'un concessionnaire d'une opération d'aménagement visée à l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme, en vue soit de la construction ou de la réhabilitation aux fins d'habitat, soit de tout objet d'intérêt collectif relevant d'une opération de restauration, de rénovation ou d'aménagement (article L. 2243-3 du CGCT).

Une fois cette délibération prise, l'expropriation doit être poursuivie selon les règles prévues par l'article L. 2243-4 du CGCT. Ainsi, le maire doit constituer un dossier présentant un projet simplifié d'acquisition publique, ainsi que l'évaluation sommaire de son coût. Ce dossier est tenu à la disposition du public pendant une durée minimale d'un mois, afin que le public puisse formuler des observations dans les conditions précisées par la délibération du conseil municipal.

Sur demande du maire ou à défaut de présentation d'un dossier par celui-ci dans un délai de six mois suivant la délibération du conseil municipal déclarant la parcelle en état d'abandon manifeste, le président de l'EPCI compétent en matière d'habitat, ou le président du conseil départemental, peut constituer un dossier dans les mêmes conditions.

Ensuite, et par dérogation aux dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le représentant de l'État dans le département, au vu du dossier et des observations du public, par arrêté :

- déclare l'utilité publique du projet et détermine la liste des immeubles ou parties d'immeubles, des parcelles ou des droits réels immobiliers à exproprier ainsi que l'identité des propriétaires ou titulaires de ces droits réels ;

- déclare cessibles ces immeubles ou parcelles ;

- indique la collectivité publique ou l'organisme au profit duquel est poursuivie l'expropriation ;

- fixe le montant de l'indemnité prévisionnelle allouée aux propriétaires, celle-ci ne pouvant être inférieure à l'évaluation effectuée par le service chargé des domaines ;

- fixe la date à laquelle il pourra être pris possession de l'indemnité ou consignation de celle-ci en cas d`obstacle au paiement. Cette date doit être postérieure d'au moins deux mois à la publication de l'arrêté déclaratif d'utilité publique.

Le projet ne peut être déclaré d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'il comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'il présente (ex. CE, 25 fév. 2015, n° 375775). Il s'agit des règles habituelles applicables à la procédure d'expropriation.

L'arrêté portant DUP est publié au recueil des actes administratifs du département et affiché à la mairie du lieu de situation du bien et notifié aux propriétaires et titulaires de droits réels.

Dans le mois qui suit la prise de possession, l'autorité expropriante est tenue de poursuivre la procédure dans le respect des dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Ainsi, le transfert de propriété peut se faire par cession amiable ou, à défaut, est opéré par ordonnance du juge judiciaire de l'expropriation.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le Conseil constitutionnel rappelle qu'il résulte de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les atteintes portées au droit de propriété doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi.

Les changements envisagés concernant les biens en état d'abandon manifeste ne présentent pas de risques d'inconstitutionnalité car les garanties de la procédure d'expropriation demeurent inchangées et cette expropriation ne peut avoir lieu qu'en cas de carence du propriétaire après une phase administrative s'étendant bien souvent sur près d'une année. En outre, l'ajout du but de la réserve foncière est une modification mineure et l'extension de la procédure à tout le territoire de la commune n'empêchera pas que les biens situés en zone rurale resteront soumis à la poursuite de fins d'intérêt général (cf. infra , point 2.2).

En revanche, la réduction du délai de 30 à 10 ans pour l'acquisition des biens sans maître concerne directement le droit de propriété.

La Cour de cassation a jugé que le délai de 30 ans ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété au regard de l'utilité publique que peut représenter l'appropriation par une commune de terrains délaissés pendant une telle durée (Cass. 3e civ., 12 juil. 2018, n° 17-16103). Sa position rejoint celle du Conseil d'État qui avait refusé de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) concernant l'acquisition de plein droit du bien par une commune (CE, 21 mars 2011, n° 345979). Le Conseil d'État a estimé que « ces biens sont, ainsi qu'il a été dit, ceux dont le propriétaire, identifié, est décédé depuis plus de trente ans sans héritier ou en laissant des héritiers n'ayant pas accepté, expressément ou tacitement, la succession pendant ce délai et qui doivent être regardés, de ce fait, comme y ayant renoncé dès lors que l'expiration de ce délai a éteint leur droit de recueillir ces biens conformément à la prescription applicable aux successions ». Le Conseil d'État considère ainsi que dès lors qu'un bien ne peut plus être revendiqué par un héritier, son acquisition par une collectivité territoriale ne peut être contraire au droit de propriété.

La loi du 23 juin 2006 portant réforme du droit des successions n'a pas été déférée devant le Conseil constitutionnel qui n'a donc pas été saisi du nouveau délai de 10 ans accordé aux héritiers pour exercer leur option successorale.

En tout état de cause, le dispositif mis en place dans le présent projet de loi comprend des garanties suffisantes du droit de propriété.

Premièrement, la réduction du délai ne concerne que les biens situés dans le périmètre d'une GOU ou d'une ORT, ces dernières poursuivant des objectifs d'intérêt général et pouvant s'accompagner, le cas échéant, de projets d'aménagement spécifiques déclarés d'utilité publique.

Deuxièmement, l'éventuel droit de propriété des héritiers qui revendiqueraient leur bien au-delà du délai de 10 ans et avant la prescription acquisitive trentenaire est entièrement reconnu par le droit de restitution ou d'indemnisation organisé à l'article L. 2222-20 du CG3P précédemment exposé.

Troisièmement, le dispositif prévoit qu'il ne s'appliquera pas aux successions ouvertes avant le 1 er janvier 2007 (date d'entrée en vigueur de la loi du 23 juin 2006 portant réforme successorale), pour lesquelles le délai de prescription est resté de 30 ans. Il est ainsi garanti le droit acquis des héritiers de disposer d'une option successorale pendant 30 ans.

Le Conseil constitutionnel a plusieurs fois affirmé que s'il est loisible au législateur de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant d'autres dispositions, il méconnaîtrait la garantie des droits proclamée par l'article 16 de la Déclaration de 1789 s'il portait aux situations légalement acquises une atteinte non justifiée par un motif d'intérêt général impérieux (déc. n° 2013-366 QPC du 14 février 2014). La volonté de prévoir des conditions favorables pour les opérations d'aménagement du territoire ne semble pas constituer un motif d'intérêt général suffisamment « impérieux » pour justifier l'adoption d'une mesure rétroactive portant atteinte au droit acquis des héritiers d'une succession ouverte avant 2007.

Quatrièmement, il est précisé que l'application du nouveau délai de 10 ans ne fait pas obstacle à l'application des règles de droit civil relatives à la prescription, ce qui permet notamment de ménager en toutes hypothèses les droits des possesseurs susceptibles de faire valoir un droit de propriété par usucapion sur le bien sans maître.

Il n'est pas ainsi attendu que la réduction du délai de 10 ans soit considéré comme inconstitutionnelle.

Enfin, le projet, comme précédemment développé, prévoit d'étendre le droit à restitution ou à indemnisation de l'article L. 2222-20 du CG3P aux propriétaires des biens non bâtis afin de mettre en conformité l'article L. 1123-4 du CG3P avec le droit de propriété.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Le Conseil constitutionnel est attentif à accorder une protection du droit de propriété, si ce n'est identique, du moins équivalente à celle du standard de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). La conformité du projet à la jurisprudence du Conseil constitutionnel assure ainsi que le dispositif soit également compatible avec l'article 1 er du protocole n°1 à la CEDH garantissant le droit de propriété.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La modification des régimes des biens sans maître et des biens en état d'abandon manifeste concerne l'acquisition par des personnes publiques de biens privés, parfois sans contreparties financières. Ces régimes relèvent du droit de propriété et ne peuvent être régis que par le législateur.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Parmi les modifications proposées, le seul point d'attention a été que la réduction du délai à 10 ans soit conforme au droit de propriété. Pour ce faire, il a été choisi de reconduire le système déjà en place pour les biens présumés sans maître, à savoir les garanties de l'article L. 2222-20 du CG3P.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. LES BIENS SANS MAÎTRE

Le délai d'acquisition est ramené de 30 à 10 ans pour les biens situés dans le périmètre d'une GOU ou d'une ORT afin de ne pas entraver ces opérations d'aménagement sachant qu'en principe, un héritier dispose de 10 ans pour exercer ses droits successoraux et que de nombreux biens sont dès lors susceptibles de rester indisponibles pendant 20 ans.

L'acquisition de ces biens, ainsi que ceux abandonnés, doit permettre aux collectivités territoriales qui le souhaitent de porter un projet de valorisation des biens tourné vers toute une palette de politiques publiques : revitalisation du centre-ville de l'agglomération et lutte contre l'étalement urbain ; lutte contre l'habitat dégradé ou indigne ; production de logements attractifs et adaptés pour les personnes âgées ; maintien de l'offre de commerces, de services et d'équipement ; valorisation du patrimoine et des paysages ; développement des mobilités.

Le droit de restitution et d'indemnisation des propriétaires des biens non bâtis est reconnu pendant 30 ans, à l'instar de la situation des propriétaires des biens bâtis et conformément aux exigences constitutionnelles du droit de propriété.

3.2. BIENS EN ÉTAT D'ABANDON MANIFESTE

Le projet prévoit deux éléments d'extension du champ de la procédure relative aux biens en état d'abandon manifeste.

Aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 2243-1 du CGCT, « la procédure ne peut être mise en oeuvre qu'au sein du périmètre d'agglomération de la commune ». Or les biens situés à l'extérieur de ce périmètre peuvent également être abandonnés et des projets d'intérêt collectif peuvent tout autant être poursuivis dans les zones rurales.

En outre, une GOU ou une ORT peut se développer en partie hors agglomération.

Enfin, bien que le but de la législation sur les biens abandonnés soit différent de celui de la réglementation relative à la menace de péril, les immeubles non entretenus sont susceptibles de tomber en ruine, risque qu'il conviendra pour le maire de prévenir (article L. 511-1 et s. du CCH). De même, les biens abandonnés, notamment dans les zones rurales, peuvent être sources de pollution avec de nouveau une action en dernier ressort de la commune. Pour l'ensemble de ces cas, il est utile que la commune dispose d'un levier pour « contraindre » le propriétaire à s'occuper de son bien, ou à défaut, puisse s'en saisir en amont afin d'éviter une intervention ultérieure qui peut être coûteuse et l'inscrire dans un projet d'intérêt collectif.

Le second point d'extension vise indirectement à permettre une mise en oeuvre d'une GOU ou ORT dans les meilleures conditions. Les GOU et les ORT s'inscrivent dans le temps long. La constitution de réserves foncières ne peut dès lors qu'être adaptée à ces opérations. L'article L. 2243-1-1 du CGCT, issu de la loi Élan du 23 novembre 2018, permet déjà d'engager la procédure relative aux biens abandonnés sur une partie d'un immeuble situé dans le périmètre d'une ORT, lorsque des travaux ont condamné l'accès à cette partie. En pratique, cela permet de faire entrer dans le périmètre de la procédure des locaux inutilisés et inaccessibles en étage lorsque le propriétaire en a condamné les issues (appartements au-dessus de commerces, par exemple).

De plus, si l'alinéa 1 er actuel de l'article L. 2243-3 du CGCT prévoit que l'expropriation peut être poursuivie pour tout objet d'intérêt collectif relevant d'une opération de restauration, de rénovation ou d'aménagement, mentionner expressément le but de la constitution de réserve foncière permettra une action en amont sans risque contentieux de l'interprétation du champ de la notion d'aménagement. Le juge se montre en effet attentif au projet concret justifiant l'expropriation du bien (nécessité pour le conseil municipal d'exposer précisément la destination du bien, CAA Douai, 11 déc. 2013, n° 13DA00030).

Par ailleurs, les dispositions relatives aux biens en état d'abandon manifeste ont été étendues aux collectivités d'outre-mer (COM) de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. Cela correspond à une demande locale, notamment à Saint-Martin où le nombre de biens abandonnés demeure important à la suite de l'ouragan IRMA qui a dévasté les deux îles. Ainsi, ces deux collectivités uniques disposeront des mêmes prérogatives que les communes.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Dans la mesure où la réduction du délai d'acquisition des biens sans maître n'aura pour effet que de rendre applicable un dispositif existant, l'ordre juridique interne ne connaîtra d'autres changements que l'introduction des nouvelles dispositions envisagées sans incidences sur les cadres juridiques actuels.

Les articles L. 1123-1 et L. 2222-20 du CG3P, les articles L. 2243-1, l'article L. 2243-3, l'article L. 6213-7 et l'article L. 6313-7 du CGCT sont modifiés.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts budgétaires

Les mesures ont pour objet le recours aux instruments d'acquisition des biens sans maître et des biens en état d'abandon manifeste et n'ont pas ainsi en tant que telles d'incidence budgétaire directe.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

Les seuls impacts envisagés pour les entreprises sont l'opportunité de bénéficier de nouveaux marchés de construction et de réhabilitation.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les mesures permettront aux collectivités territoriales de faciliter leur action en matière de cadre de vie et d'aménagement de leur territoire.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Dès lors que les procédures des biens sans maître et abandonnées existent déjà et qu'il n'est pas apporté de changements sur le contenu même de ces procédures, il n'est pas attendu d'implications sur les services administratifs.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Très indirectement, le traitement des biens abandonnés facilite les opérations de réhabilitations pouvant donner lieu à la création de logements sociaux adaptés au handicap ou plus généralement destinés aux personnes dépendantes en centre-ville.

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

Très indirectement, le traitement des biens abandonnés dans les villes facilite les opérations de réhabilitation pouvant donner lieu à la création de logements étudiants.

4.6. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les biens sans maître ou abandonnés, sources potentielles de pollution, seront avantageusement réhabilités ou remplacés dans une opération d'aménagement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article R.361-2 du code de la construction et de l'habitation, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national de l'habitat.

Les organes délibérants des COM de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ont été consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les modifications des régimes des biens sans maître et des biens en état d'abandon manifeste s'appliqueront le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

La réduction du délai d'appropriation des biens sans maître à dix ans ne concernera que les successions ouvertes depuis le 1 er janvier 2007.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions relatives aux biens sans maître sont applicables dans les départements et régions d'outre-mer (DROM) et dans la COM de Saint-Pierre et Miquelon, tant pour le domaine de l'État que des communes et de la COM (articles L. 5411-1 et L. 5421-3 du CG3P).

En revanche, ces dispositions ne sont pas applicables dans les COM de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, les biens sans maître relevant du domaine de ces collectivités (articles L.O. 6214-6 et L.O. 6314-6 du CGCT).

Ces dispositions ne sont pas non plus applicables dans les COM de Wallis-et-Futuna et de la Polynésie française, ni en Nouvelle-Calédonie. Les biens sans maître relèvent en effet du domaine de Wallis-et-Futuna (article 40, 6° du décret n°57-811 du 22 juillet 1957), du domaine de la Polynésie française (article 47 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française) et du domaine de la Nouvelle-Calédonie (article 44 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie).

Les dispositions relatives aux biens en état d'abandon manifeste sont applicables dans les DROM et les communes de Saint-Pierre et Miquelon en vertu du principe d'identité législative.

En revanche, elles ne sont pas applicables en Polynésie française (le droit des biens relève de la compétence locale) et à Wallis-et-Futuna (le droit des biens relève de la coutume).

Elles ne sont pas applicables dans les COM de Saint-Barthélemy, de Saint Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon car le chapitre III du titre IV du livre II de la 2 ième partie du CGCT, où se trouvent les articles modifiés par le projet, n'est pas applicable à ces collectivités (selon l'article L. 6213-7 pour Saint-Barthélemy, l'article L. 6313-7 pour Saint-Martin et l'article L. 6413-6 pour Saint-Pierre-et-Miquelon).

Il est proposé d'étendre les articles L. 2243-1 à L. 2243-4 du CGCT à Saint-Barthélemy et Saint-Martin avec une adaptation pour supprimer les références au droit de l'urbanisme pour les raisons mentionnées au point 3.2 (option retenue).

Article 28 I : Renforcer les compétences des organismes de foncier solidaires (OFS) et prévoir des adaptations pour certains organismes pouvant être agréés OFS

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le dispositif organisme foncier solidaire (OFS) et bail réel solidaire (BRS) a été créé en 2016 dans le cadre de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) et de l'ordonnance n° 2016-985 du 20 juillet 2016 relative au bail réel solidaire. L'activité des OFS et leur agrément sont régis par les articles L. 329-1 et R. 329-1 à R. 329-17 du code de l'urbanisme ; le BRS est régi par les articles L. 255-1 à L. 255-19 et R. 255-1 à R. 255-9 du code de la construction et de l'habitation (CCH).

Ce dispositif est pleinement opérationnel depuis 2017 à la suite de la publication du décret n° 2017-1037 du 10 mai 2017 relatif aux organismes de foncier solidaire. Il a été renforcé par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN). Le champ des structures pouvant être agréées comme OFS a été élargi aux organismes d'habitations à loyer modéré (L. 411-2 du CCH) et ouvert aux entreprises sociales pour l'habitat (ESH), coopératives HLM, sociétés d'économie d'économies mixtes (SEM) agréés habitat (L. 481-1 du CCH) par la loi ELAN. Le cadre d'exercice est prévu aux articles L. 443-7, L. 421-4, L. 422-2 et L. 422-3 du CCH. De plus, la loi ELAN permet l'intégration des logements sous BRS au décompte des logements sociaux prévus par l'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). Enfin, les logements sous BRS sont également pris en compte dans le calcul de la décote dite « Duflot » (article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques) visant la cession de fonciers publics pour la construction de logements.

Le dispositif des OFS/BRS bénéficie de mesures fiscales incitatives : taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à taux réduit, abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), éligibilité des ménages acquéreurs au prêt d'accession sociale et au prêt à taux zéro.

Le dispositif OFS/BRS vise le développement d'une offre de logements en accession sociale à la propriété et contribue à lutter contre la spéculation immobilière. Son principe repose sur la dissociation entre la propriété du sol détenue par l'OFS et la propriété du logement détenue par les ménages. Les OFS sont des structures sans but lucratif (association de loi 1901, Société coopérative d'intérêt collectif, Groupement d'intérêt public), des organismes de logement social ou des sociétés d'économie mixte, agréés par le préfet de région.

Les propriétaires des logements sont ainsi locataires du terrain et bénéficient du droit d'usage par le biais d'un bail emphytéotique rechargeable.

Les relations entre le ménage et l'OFS sont régies par le BRS. Conclu pour une durée comprise entre dix-huit et quatre-vingt-dix-neuf ans, renouvelable à chaque cession du logement, le BRS fixe le prix et les conditions de cession du logement, ainsi que le montant de la redevance foncière dont le ménage doit s'acquitter mensuellement. Chaque vente fait l'objet d'un agrément par l'OFS qui vérifie les conditions de ressources du ménage acquéreur. L'acquisition de ces logements est subordonnée au respect de conditions de ressources qui sont identiques à celles du prêt social logement accession (PSLA), mais des seuils inférieurs peuvent être appliqués par les OFS.

Dans le paysage des dispositifs d'accession sociale à la propriété, le BRS présente deux avantages majeurs :

- la dissociation de la propriété permet d'ôter la valeur du foncier au prix de commercialisation des logements, ce qui induit une diminution des prix d'acquisition de 20 à 50% par rapport au marché immobilier libre ;

- l'investissement public consenti dans la mise en place de ce parc de logement est cristallisé à long terme : le caractère rechargeable du bail ne permet pas qu'ils soient vendus avec plus-value sur le marché immobilier libre et les propriétaires successifs du logement doivent satisfaire aux conditions de ressources fixées dans le bail. A contrario, l'acquéreur d'un logement dans le cadre du prêt social location accession revend son logement au marché libre et peut espérer une plus-value à la revente.

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Source : fiche Un nouveau dispositif pour produire du logement abordable : les organismes de foncier solidaire et le bail réel solidaire , CEREMA, octobre 2019

Dans le cadre de la lutte contre la spéculation immobilière, ce dispositif suscite ainsi un fort engouement au regard de sa capacité à produire des logements à des prix sensiblement inférieurs à ceux du marché libre (de 30 à 50%). Le dispositif est mobilisé par de nombreuses collectivités pour apporter une réponse à l'inflation des prix de l'immobilier et pour maintenir les ménages modestes dans les zones où le marché immobilier est tendu et les prix élevés. Ainsi, la création d'une offre de logement sous BRS fait partie des objectifs des politiques locales de l'habitat à Rennes, Nantes, Paris, Lille, Lyon. De nombreux OFS émergent également dans les zones balnéaires (Pays Basque, Iles de l'Atlantique, Var...) afin de sédentariser les ménages modestes.

Les organismes de logement social sont également très intéressés par le BRS. Il leur permet de céder du patrimoine immobilier amorti tout en conservant dans la durée la maîtrise de la population ciblée et des prix de vente. L'OFS étant membre de droit des copropriétés, il peut également agir en prévention de situation de dégradation du patrimoine.

Enfin la dissociation de la propriété foncière et bâtie offerte par le dispositif OFS/BRS offre l'opportunité de nouveaux montages financiers pour la réalisation d'opérations de réhabilitation de logement, et de mobiliser l'investissement privé pour des opérations dont la rentabilité est incertaine.

Témoin de cette attractivité, la création d'OFS connaît une progression quasi exponentielle. A ce jour (avril 2021), on dénombre cinquante-quatre OFS agréés et plus de trente projets dont une dizaine en cours d'instruction, contre dix en 2019 et dix pour la période 2017-2018.

Le suivi des OFS est réalisé dans le cadre du contrôle des agrément OFS par les services déconcentrés de l'Etat et permet d'apprécier la dynamique de production de logement sous BRS. Si actuellement le nombre de logements sous BRS est limité à moins d'une centaine de lots, le rythme de mise en production de certains OFS (Paris, Nantes, Rennes, Lyon) offre la perspective d'un parc de plus de 20 000 unités en 2024.

La rédaction actuelle de l'article L. 329-1 du code de l'urbanisme n'est pas suffisamment explicite quant à la capacité d'intervention des OFS sur du patrimoine immobilier ancien, en particulier pour des opérations de rénovation.

Enfin, la vente HLM dans le régime du BRS n'est pas explicitement prévue par le code de la construction et de l'habitation, ce qui limite les opportunités offertes par le BRS aux organismes de logement social.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le dispositif OFS et BRS doit respecter le principe constitutionnel de protection du droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789.

Le Conseil constitutionnel est attentif à accorder une protection du droit de propriété, si ce n'est identique, du moins équivalente à celle du standard de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). La conformité du projet à la jurisprudence du Conseil constitutionnel assure ainsi que le dispositif soit également compatible avec l'article 1 er du protocole n°1 à la CEDH garantissant le droit de propriété.

Le droit de propriété des OFS est limité à deux titres : ces organismes ont l'obligation de dissocier la propriété du foncier du bâti et ils ne peuvent pas céder le foncier affecté aux logements régis par BRS. Le droit de propriété des preneurs de BRS - opérateur et occupant - est également limité au stade de la revente du droit réel immobilier : clause anti-spéculative, respect de plafond de ressource, agrément.

La mise en oeuvre d'un bail réel solidaire, en ce qu'il prévoit un encadrement des prix de cession du bail, est de nature à constituer une atteinte à l'exercice du droit réel du preneur à bail.

La CEDH considère sur le fondement de l'article 1 er du Premier protocole additionnel de la CESDH que la réglementation de « l'usage » d'un bien n'est admise que conformément à l'intérêt général. Pour la CEDH, les atteintes à un droit ne peuvent être justifiées que s'il existe un juste équilibre entre les intérêts de l'individu et l'intérêt général. Par ailleurs, pour être légitime, une ingérence dans l'exercice du droit au respect des biens doit satisfaire à des conditions de légalité, de finalité et de proportionnalité (CEDH, 28 juin 2018, n° 1828/06, G.I.E.M. S.R.L. et a. c/ Italie, Jurisdata n° 2018-012586, § 293 exigeant un « juste équilibre » entre « les exigences de l'intérêt général » et « l'intérêt de la société concernée » ainsi qu'un « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé »).

Poursuit ainsi un but d'intérêt général une politique du logement conduisant à la mise en place d'une législation réduisant les loyers (CEDH, 19 décembre 1989, Mellacher et a. c/ Autriche, n° 10522/83, § 47) ou une législation sur l'aménagement du territoire (CEDH, 21 février 2008, Anonymos Touristiki Etairia Xenodocheia Kritis c/ Grèce, n° 35332/05, § 45).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Nombre d'OFS disposent de logements anciens et projettent des opérations de rénovation lourdes puis de les céder dans le régime du BRS. Cela permet de produire des logements conformes aux dernières exigences de performances environnementales, et présente l'avantage d'une intervention à l'échelle du bâti. Le dispositif OFS/BRS permet de développer un modèle économique alternatif pour ces opérations. L'investissement consenti par l'OFS dans la réhabilitation des logements est « cristallisé » dans la propriété foncière. Cela permet d'une part de céder des logements réhabilités à des coûts maîtrisés, mais également de lutter contre les effets de spéculation immobilière sur des logements dont la qualité a été améliorée. Pour l'ensemble de ces raisons, il est nécessaire de préciser que les OFS peuvent agir dans le cadre de travaux de réhabilitation de logements.

Enfin, la loi ELAN a élargi le champ des structures pouvant être agréées comme OFS aux entreprises sociales pour l'habitat (ESH), coopératives HLM, sociétés d'économies mixtes (SEM) (articles L.443-7, L. L.421-4, L.422-2 et L.422-3 du CCH). Cette ouverture est imparfaite. D'une part, elle ne permet pas de prendre en compte la réalité des organismes de logements sociaux, qui disposent déjà d'un patrimoine (et qui n'ont donc pas besoin d'acquérir) et d'un statut. D'autre part, elle ne permet pas aux organismes de logement social agréés OFS de céder des logements sous le régime du BRS dans le cadre de la vente HLM. Cette faculté permettrait de cristalliser à long terme l'investissement public consenti pour ces logements et d'enrayer le risque de spéculation immobilière au cours des reventes successives. Il convient donc d'adapter ces dispositions.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

D'une part, la mesure envisagée vise à sécuriser l'activité des OFS en précisant qu'ils peuvent agir dans le cadre de travaux de réhabilitation de logements.

D'autre part, elle a pour objectif d'adapter les dispositions relatives à l'ouverture aux structures pouvant être agréées comme OFS aux entreprises sociales pour l'habitat (ESH), coopératives HLM, sociétés d'économies mixtes (SEM) (articles L. 443-7, L. 421-4, L. 422-2 et L. 422-3 du CCH), pour tenir compte de leurs spécificités.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a été envisagé de préciser que l'OFS pouvait acquérir ou gérer des terrains en vue de réaliser ou réhabiliter des logements, mais il est apparu plus cohérent d'indiquer que les travaux de réhabilitation pouvaient constituer une partie de la réalisation.

L'option de conserver seulement la notion de « réalisation » a également été envisagée, mais pour les raisons susmentionnées, elle ne permettait pas de répondre à la nécessité de sécuriser les activités actuelles des OFS.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Cet article modifie tout d'abord l'article L. 329-1 du code de l'urbanisme pour expliciter le fait que les OFS peuvent intervenir sur le bâti existant afin de pouvoir mener des opérations de réhabilitation et cela pourra être possible sans qu'il soit nécessaire que les OFS se rendent acquéreurs du bien (pour couvrir les cas où les OFS sont déjà propriétaires avant d'être agréés).

Par ailleurs, cet article complète l'article L. 302-5 du CCH pour préciser que les seuls logements décomptés au titre de cet article sont les logements cédés dans le cadre d'un BRS dont les conditions de prix et de ressource des ménages définis par décret satisferont aux critères de l'accession sociale à la propriété. Il s'agit en effet de les distinguer des autres logements cédés sous BRS, dans les zones les plus tendues, pour lesquels les niveaux de ressources des ménages bénéficiaires pourront être supérieures aux plafonds de l'accession sociale à la propriété. Ces autres logements ne pourront pas être intégrés au décompte SRU.

Enfin, cet article modifie l'article L.443-7 du CCH pour permettre aux organismes de logement social de céder leur patrimoine immobilier dans le régime du BRS en restant propriétaires du terrain. Cette faculté n'est toutefois possible que dans les communes qui ont atteint leur obligation de mixité sociale au titre de l'article L. 302-5 du CCH (article 55 de la loi SRU).

Il s'agit d'une demande forte des organismes d'HLM qui voient dans cette possibilité une modalité opérationnelle de vendre une partie de leur patrimoine tout en conservant une capacité de contrôle de leur occupation, notamment via le respect des plafonds de ressources des ménages occupants, l'encadrement des prix de cessions, le droit de préemption en cas de mutation et la participation à la copropriété en tant que propriétaire du foncier.

A cette occasion, il est également proposé de modifier la rédaction des articles L. 421-4, L. 422-2 et L. 422-3 du CCH relatifs à l'objet des organismes d'HLM pour ce qui concerne leur agrément OFS. En effet, l'article L. 329-1 du code de l'urbanisme prévoit sur peuvent « être agréés pour exercer les activités d'organisme de foncier solidaire définies à l'article L. 329-1 du code de l'urbanisme, lorsque les activités définies dans les statuts de l'organisme créé font partie du service d'intérêt général défini à l'article L. 411-2 du présent code (...) » , soit les organismes d'habitations à loyer modéré.

Cette rédaction, issue d'amendements de la loi ELAN n'est pas opérante. En effet, « l'activité définie dans les statuts de l'organisme créé » n'existe pas puisque l'organisme HLM préexiste à son agrément OFS, il n'est donc pas créé. Par ailleurs, les OPH, qui sont des établissements publics, ne disposent pas de statuts, ce qui ne permettrait pas légalement aux OPH d'être agréés OFS.

La modification rédactionnelle proposée vise à simplifier les dispositions concernées au CCH et à éviter toute ambiguïté en vue d'assurer la sécurité juridique de l'agrément OFS de ces acteurs.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie les dispositions suivantes :

- l'article L. 329-1 du code de l'urbanisme ;

- les articles L. 302-5, L. 443-7, L. 421-4, L. 422-2, L. 422-3, et L. 443-7 du code de la construction et de l'habitation.

4.2. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

Les vingt-quatre organismes de logement social actuellement agréés OFS pourront céder leur patrimoine immobilier dans le cadre d'une vente HLM dans le régime du BRS en restant propriétaires du terrain. Dans l'équilibre des finances de ces structures, ils auront en crédit le produit des ventes et des redevance d'occupation du terrain dans le régime du BRS et en débit les éventuels investissements pour porter la charge foncière.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure proposée n'a pas d'impact en soi sur les collectivités locales.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les services déconcentrés de l'Etat sont déjà chargés de l'agrément des OFS, en particulier les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (12 DREAL, DRIHL, DEAL Martinique, DEAL Guadeloupe, DGTM Guyane, DEAL Réunion, DGTM Mayotte).

La mesure ne devrait pas avoir de conséquences significatives sur la charge de travail de ces services : si la croissance du nombre d'OFS est importante depuis la création du dispositif, les OFS les plus pertinents eu égard aux enjeux locaux sont en place ou en passe de l'être. L'activité d'instruction d'agrément devrait se stabiliser et décroitre à moyen terme.

Toutefois, l'activité d'instruction à la création des OFS sera progressivement reportée sur l'activité de suivi des OFS et de contrôle du parc de logement sous BRS. Le suivi et le contrôle de l'activité des OFS et le développement du parc de logements et de locaux d'activité nécessitera une implication croissante des DREAL et de l'agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS).

Une attention particulière devra être portée à la distinction entre les logements relevant de l'accession sociale à la propriété et décomptés au titre de la loi SRU. Les services centraux du ministère en charge du logement ont d'ores et déjà structuré cette activité afin de fluidifier cette tâche et de limiter la charge de travail des services déconcentrés.

In fine, l'impact de l'élargissement des compétences des OFS devrait donc être marginale pour les services au regard du parc attendu à court terme.

4.5. IMPACTS SUR LA JEUNESSE

Les impacts sont difficilement mesurables, mais les effets indirects pourraient être positifs puisque l'objectif de cette mesure consiste, en particulier, à développer une offre de logement et de locaux d'activité accessibles aux personnes qui ne disposent pas de ressources suffisantes actuellement, dont peuvent faire partie les jeunes.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les particuliers bénéficieront de la mesure en tant qu'acquéreur des droits réels en vue de leur accession à la propriété.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Du point de vue de la performance énergétique des logements, non seulement les programmes BRS en construction neuves respecteront nécessairement les dernières exigences de performance environnementale (RE 2020), mais en plus l'élargissement de l'activité des OFS à des opérations de réhabilitation permet d'accélérer l'effort de rénovation thermique des logements et de réduire ainsi les émissions de gaz à effets de serre du secteur du logement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national de l'habitat et le Conseil national d'évaluation des normes ont été consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La disposition entrera en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure est applicable sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guyane, Guadeloupe et Martinique, à La Réunion et Mayotte.

5.2.3. Textes d'application

Aucun texte d'application ne sera nécessaire.

Article 28 II : Extension du champ de compétence des organismes de foncier solidaire (OFS)

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le dispositif organisme de foncier solidaire (OFS), bail réel solidaire (BRS) tel qu'il est construit (article L. 329-1 du code de l'urbanisme, articles L. 255-1 à L. 255-19 du code de la construction et de l'habitation) présente cependant plusieurs limites.

En premier lieu, il est exclusivement réservé au logement. Or, dans le cadre d'opérations de promotion immobilière, en particulier en zones urbaines, les collectivités imposent la réalisation de locaux d'activité en pied d'immeuble pour favoriser la mixité fonctionnelle. Le fait que le BRS soit réservé à du logement ne permet pas de vendre des cellules commerciales ou des locaux d'activité dans le régime de la dissociation de la propriété foncière ou bâtie. Dans un programme en BRS, les montages juridiques permettant de céder une fraction de lots en dehors du BRS sont particulièrement complexes. La cession de tous les lots selon un régime de dissociation de la propriété favoriserait le développement de programmes neufs et d'opérations de réhabilitation de commerces. En outre, cela permettrait de favoriser la reconquête de la diversité commerciale dans certains centres-villes.

En second lieu, les plafonds de ressource assignés au BRS cible exclusivement des ménages modestes. Dans certaines circonstances, notamment dans les secteurs particulièrement tendus (Paris et communes limitrophes, genevois français), dans une logique de mixité sociale, il est opportun de faciliter l'accession à la propriété de ménages qui, sans être éligibles à l'accession sociale à la propriété, ne disposent pas du capital nécessaire pour entrer sur les marchés immobiliers. Ces populations ont tendance à délaisser les zones urbaines les plus onéreuses faute de disposer des moyens nécessaires pour s'y installer. L'extension du principe de la dissociation de la propriété foncière et bâti à des logements exclus de l'accession sociale à la propriété tout en encadrant les prix de cession à l'instar du BRS permettrait de favoriser la mixité sociale tout en évitant les phénomènes de spéculation immobilière.

Au plan opérationnel, l'objectif est de faciliter la création d'opérations dans le régime de la dissociation de la propriété/foncière et bâtie.

La mise en copropriété d'un immeuble comprenant des lots en BRS et des lots « classiques » est une difficulté importante soulignée par de nombreux notaires. Elle a été également mise en lumière dans le cadre d'une étude de la DREAL PACA relative à l'intervention des OFS pour la rénovation de co-propriétés dégradées.

D'une part, les PLU et les PLH, peuvent, sur certains secteurs, fixer des objectifs de mixité fonctionnelle. Ils imposent alors que les immeubles comprennent des locaux d'activité, notamment en pied d'immeuble. L'ouverture de l'activité des OFS et du régime de la dissociation de la propriété foncière et bâtie viserait à faciliter ce type d'opération mixte (logement et locaux d'activité), et sa gestion d'ensemble par un OFS.

D'autre part, il pourrait être opportun, en application des objectifs de mixité sociale d'un PLU ou d'un PLH, de favoriser l'emménagement de ménages de catégories sociales différentes au sein d'une opération sous BRS. C'est la raison pour laquelle l'intention du Gouvernement serait de permettre aux OFS, à l'échelle d'une opération, de céder une fraction de logements sans plafonds de ressources, mais avec un encadrement des prix de cession. L'OFS serait libre de fixer le prix de cession. Cette faculté nouvelle, pourrait améliorer l'équilibre de l'opération immobilière, ces logements pouvant être vendus plus chers que ceux destinés à l'accession sociale. En favorisant ainsi l'équilibre de l'opération, il serait attendu un gain en termes de niveaux de prix ou de niveaux de redevance pour les logements de l'opération qui seraient cédés dans le cadre de l'accession sociale.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le dispositif OFS et BRS doit respecter le principe constitutionnel de protection du droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789.

Le Conseil constitutionnel est attentif à accorder une protection du droit de propriété, si ce n'est identique, du moins équivalente à celle du standard de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). La conformité du projet à la jurisprudence du Conseil constitutionnel assure ainsi que le dispositif soit également compatible avec l'article 1 er du protocole n°1 à la CEDH garantissant le droit de propriété.

Le droit de propriété des OFS est limité à deux titres : ces organismes ont l'obligation de dissocier la propriété du foncier du bâti et ils ne peuvent pas céder le foncier affecté aux logements régis par BRS. Le droit de propriété des preneurs de BRS - opérateur et occupant - est également limité au stade de la revente du droit réel immobilier : clause anti-spéculative, respect de plafond de ressource, agrément.

Aussi, la mesure prévoirait des contreparties aux atteintes à ce droit, notamment de poursuivre un objectif de mixité sociale ou un objectif de mixité fonctionnelle en fonction du type de biens concernés.

La mise en oeuvre d'un bail réel solidaire, en ce qu'il prévoit un encadrement des prix de cession du bail, est de nature à constituer une atteinte à l'exercice du droit réel du preneur à bail.

La CEDH considère sur le fondement de l'article 1 er du Premier protocole additionnel de la CESDH que la réglementation de « l'usage » d'un bien n'est admise que conformément à l'intérêt général. Pour la CEDH, les atteintes à un droit ne peuvent être justifiées que s'il existe un juste équilibre entre les intérêts de l'individu et l'intérêt général. Par ailleurs, pour être légitime, une ingérence dans l'exercice du droit au respect des biens doit satisfaire à des conditions de légalité, de finalité et de proportionnalité (CEDH, 28 juin 2018, n° 1828/06, G.I.E.M. S.R.L. et a. c/ Italie, Jurisdata n° 2018-012586, § 293 exigeant un « juste équilibre » entre « les exigences de l'intérêt général » et « l'intérêt de la société concernée » ainsi qu'un « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé »).

Poursuit ainsi un but d'intérêt général une politique du logement conduisant à la mise en place d'une législation réduisant les loyers (CEDH, 19 décembre 1989, Mellacher et a. c/ Autriche, n° 10522/83, § 47) ou une législation sur l'aménagement du territoire (CEDH, 21 février 2008, Anonymos Touristiki Etairia Xenodocheia Kritis c/ Grèce, n° 35332/05, § 45).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Certains territoires particulièrement tendus (Ville de Paris, Genevois français...) ont exprimé le besoin d'un dispositif élargi face aux constats que les prix de l'immobilier évincent les ménages aux revenus intermédiaires, supérieurs aux seuils du PSLA.

Le champ d'activité des OFS et le régime du BRS sont régis par des dispositions législatives. Pour modifier ou étendre et ainsi viser à enrayer les phénomènes spéculatifs et réduire les prix des logements et des locaux à usage professionnel ou commercial, plus particulièrement pour poursuivre des objectifs de mixité sociale et fonctionnelle, les dispositions afférentes du code de l'urbanisme et du CCH doivent être modifiées.

Il en est de même plus spécifiquement pour les adaptations nécessaires des dispositions résultant de la loi ELAN, sur l'agrément OFS des organismes de logement social.

Dans ce cadre, il pourrait être proposé, sur le même principe de dissociation du foncier et du bâti à l'oeuvre dans le régime du BRS, de permettre aux OFS, dans le cadre d'une activité subsidiaire à l'accession sociale à la propriété, de conclure des baux de longue durée avec encadrement des prix de cession, avec des ménages dont les revenus sont supérieurs aux plafonds du PSLA, à la condition que cette offre de logements satisfasse un objectif de mixité sociale. Les logements cédés dans ces conditions ne seraient pas décomptés au titre de l'inventaire de l'article 55 de la loi SRU.

Dans ces territoires tendus mais également dans le cadre d'opération de revitalisation des centres-villes (Bizitegia porté par l'établissement public foncier locale (EPFL) du Pays Basque par exemple), les OFS ont également exprimé le souhait de pouvoir étendre le principe de dissociation du foncier et du bâti aux locaux d'activité et aux locaux commerciaux afin de promouvoir la mixité fonctionnelle ainsi qu'une certaine qualité des commerces à l'échelle du quartier.

Dans son rapport d'octobre 2019 sur « la maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction » , le député Jean-Luc Lagleize indique que face à l'envolée des prix du foncier et de l'immobilier, de nombreux ménages ne parviennent pas à réaliser leur souhait d'accéder à la propriété dans des conditions d'endettement et de localisation satisfaisantes. Il considère également que le dispositif des OFS, bien que récent, est utile mais que sa principale limite vient du fait qu'il est aujourd'hui limité à l'accession sociale à la propriété. De ce fait, il est trop restreint pour avoir un véritable impact sur les prix du foncier.

Dans cette perspective, il serait proposé, sur le même principe de dissociation du foncier et du bâti à l'oeuvre dans le régime du BRS, de permettre aux OFS, dans le cadre d'une activité subsidiaire à l'accession sociale à la propriété de logements, de conclure des baux de longue durée avec encadrement des prix de cession en vue de l'accession à la propriété de locaux à usage professionnel ou commercial.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure envisagée viserait à étendre, à titre subsidiaire l'activité des OFS, tout en consacrant l'accession sociale à la propriété comme élément principal. Il s'agirait ainsi de leur conférer la possibilité de conclure des baux de longue durée pour des logements à destination de ménages dont les ressources sont supérieures à celles du plafond de l'accession sociale, et celle de conclure des baux de longue durée pour des locaux d'activité. Cette ouverture du dispositif poursuit le double objectif de mixité sociale et fonctionnelle.

Afin de rendre cette ouverture du champ d'activité des OFS opérante, il s'agirait d'adapter le régime du BRS ou de créer des baux de longue durée adaptés.

Cette mesure permettrait le développement d'une offre de logement et de locaux d'activité accessibles aux personnes qui ne disposent pas de ressources suffisantes actuellement, tout en prévenant les phénomènes de spéculation immobilière.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Dans la proposition de loi visant à « réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français », enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 octobre 2019, le député Jean-Luc Lagleize proposait, pour stopper définitivement la spéculation foncière, un article 2 qui prévoyait de généraliser la dissociation entre le foncier et le bâti en permettant aux collectivités territoriales de créer un office foncier libre (OFL), qui leur permettrait de proposer des baux réels libres (BRL) sur les fonciers qu'elles aménagent (domaine privé des collectivités, de l'État ou de ses établissements publics). Ces baux seraient rechargeables, transmissibles et cessibles et les prix de cession seraient préconisés par l'observatoire du foncier, sur le modèle du dispositif d'encadrement des loyers.

Toutefois, cette proposition ne permettait pas de satisfaire pleinement les objectifs poursuivis. En effet, il est déjà possible pour un acteur public ou privé de se porter acquéreur de biens, de faire construire, de vendre des droits réels et de passer un bail emphytéotique avec des propriétaires pour l'usage du foncier. De plus, le caractère anti spéculatif recherché n'est pas satisfait si le prix des droits réels n'est pas encadré à la revente. En effet, la spéculation sur les terrains sera de toute façon « transférée » sur les logements si le prix des logements n'est pas encadré. D'ailleurs, la séparation existante en droit anglo-saxon entre la propriété du terrain et la propriété des murs n'a pas pour autant empêché une hausse de l'immobilier en zone tendue (ex : Londres). Enfin, la proposition ne définissait pas le caractère rechargeable du bail pour permettre la mutation des droits réels sans limite de durée.

En outre, la proposition formulée envisageait la création d'une nouvelle structure, les OFL. Non seulement les processus d'agrément auraient retardé l'effectivité de la mesure, mais en plus, la multiplication des structures est susceptible de renforcer la concurrence sur les gisements fonciers et d'avoir un effet contre-productif sur la spéculation immobilière.

Cette proposition n'a donc pas été retenue, mais a largement inspiré le présent article.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Eu égard à la technicité des dispositions à prendre et à la multiplicité des concertations à mener, le Gouvernement propose que l'élargissement du champ d'activité des OFS et la mise en place de nouveaux régimes de bail soient définis dans le cadre d'une ordonnance en application de l'article 38 de la Constitution. Ce chantier nécessiterait de modifier l'article L. 329-1 du code de l'urbanismes ainsi que de modifier et créer plusieurs articles législatifs du code de la construction et de l'habitation, notamment du titre V, du livre II, intitulé « Statuts des constructeurs ». Il s'agirait en effet de déconnecter cette nouvelle activité d'accession à la propriété de logement pour la distinguer de l'accession sociale à la propriété et des mesures d'incitation fiscales et réglementaires afférentes : aides à la pierre, TVA à taux réduit, décompte SRU. S'agissant des locaux d'activité professionnelle et commerciale, une attention particulière pourrait être accordée à l'articulation de ce nouveau régime de bail avec le bail commercial.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

L'analyse précise des conséquences attendues de la mesure sera effectuée dans la fiche d'impact exposant les dispositions de l'ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation.

Néanmoins, il peut d'ores et déjà être fait état des impacts suivant s'agissant en particulier des collectivités territoriales. Le dispositif OFS/BRS est un outil dont elles peuvent être à l'initiative de la mise en place, certaines d'entre-elles étant partie prenante de la gouvernance des OFS (voir tableau infra )

Certaines collectivités font de l'OFS un outil stratégique de leur politique d'habitat et de peuplement et déclinent l'offre BRS dans le cadre de leur programme local de l'habitat et de leur plan local d'urbanisme. L'enjeu du développement du parc de logement sous BRS est la mobilisation de foncier. A cette fin les collectivités peuvent mobiliser leurs outils de maîtrise foncière et faciliter l'acquisition des fonciers par les OFS. Par ailleurs, sans impact sur les finances locales, les OFS peuvent mobiliser pour leurs acquisitions, le prêt Gaïa de la banque des territoires qui permet d'amortir le coût du foncier sur 60 à 80 ans.

De plus, indépendamment de leur statut et de leur gouvernance, les OFS sont des acteurs des politiques locales de l'habitat.

Région

Nom de l'organisme

Statut

membres de l'OFS

Auvergne-Rhône-Alpes

La Foncière de Haute-Savoie

GIP

CC Pays d'Evian Vallée d'Abondance
CC Annemasse - Les Voirons Agglomération
CC du Rochois
CA du Grand Annecy
CC d'Arve et Saleve
CC Rumilly Terre de Savoie
CC Fier et Usses
CC des sources du Lac d'Annecy
CC de la vallée de Thones
Association des organismes de logement social en Haute-Savoie
Caisse d'Epargne et de prévoyance en Rhône-Alpes
EPFL de Haute-Savoie

Auvergne-Rhône-Alpes

Métropole de Lyon

Associatif

Métropole de Lyon
Est Métropole habitat
Grand Lyon Habitat
Lyon Métropole Habitat
Action Logement
CDC

Auvergne-Rhône-Alpes

OFS Grenoble Alpes Métropole

GIP

Grenoble Alpes Métropole
EPFL du Dauphiné

Bourgogne Franche-Comté

OFS du Grand Besançon

GIP

Ville de Besançon
Grand Besançon

Bretagne

OFS Rennes Métropole

Associatif

Aiguillon Construction
Aiguillon Résidences
Archipel Habitat
Cap Accession
Coop de Construction
Coopération d'Habitation de Bretagne
Coopérative Immobilière de Bretagne
Espacil Habitat
Socobret
Keredes
Néotoa
OP'ACCESSION 35
Rennes Métropole
SA Les Foyers
SECIB
Territoires & Developpement

Grand Est

La Coopérative Foncière de l'Ill

SCIC SAS

Habitat de l'Ill
Coop HLM Devloppement
Ville d'Illkirch-Graffenstaden

Hauts-de-France

OFS de la métropole lilloise

Associatif

Ville de Lille
La Fondation de Lille
FPI France

Ile-de-France

Foncière Ville de Paris

GIP

Ville de Paris
Paris Habitat OPH
Régie Immobilière de la Ville de Paris
ELOGIE-SIEMP

Pays de la Loire

Vendée Foncier Solidaire

GIP

EPF de Vendée
Conseil départemental de Vendée

Pays de la Loire

OFS Atlantique Accession Solidaire

SCIC SAS

14 membres de l'USH des Pays de la Loire
CD44
Nantes Métropole
CARENE

Provence-Alpes-Côte-d'Azur

OFS Bouc-Bel-Air
"Tous propriétaires"

Associatif

Ville de Bouc Bel Air

Cet élargissement des compétences des OFS offrirait des possibilités supplémentaires aux collectivités territoriales pour mettre en oeuvre les objectifs de mixité sociale et de mixité fonctionnelle, qui s'inscrit en particulier dans le cadre des documents de planification urbaine (PLU via les servitudes de mixité sociale notamment, PLH...).

S'agissant des entreprises, l'élargissement de cet outil au bénéficie des territoires devrait faciliter l'émergence, la mise en oeuvre et l'acceptation des opérations d'aménagement, de revitalisation et de production de logements. De ce fait, l'impact sur les entreprises serait positif, pas seulement pour celles qui participent directement à la réalisation des opérations, mais également pour les bailleurs et les entreprises, notamment commerciales, qui auraient plus d'opportunités pour s'installer notamment dans quelques centres-villes où certains types de commerces sont évincés compte-tenu du prix des locaux d'activité.

5. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Le délai d'habilitation, à compter de la publication de la loi est d'un an. Ce délai de douze mois apparaît nécessaire afin de faire aboutir cette réforme, en associant les parties prenantes à la rédaction de l'ordonnance.

Le projet de loi de ratification de l'ordonnance sera déposé devant le Parlement au plus tard trois mois après la publication de l'ordonnance.

Article 29 : Appui du département à l'élaboration du programme local de l'habitat

1. ÉTAT DES LIEUX

La politique du logement est partagée entre l'État et l'ensemble des collectivités territoriales. Les collectivités territoriales ont acquis une part de responsabilité croissante dans le cadre des politiques de décentralisation qui ont permis de répondre au plus près des territoires aux besoins recensés sans renoncer aux objectifs de mixité sociale et d'égalité d'accès au logement.

Dans ce contexte, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre se sont vus confier un rôle croissant en matière d'habitat. L'échelon intercommunal est la maille territoriale de définition et de mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat, intégrant les enjeux d'aménagement, de déplacements et de développement d'équipements et de services. Les EPCI à fiscalité propre sont chargés d'élaborer et de mettre en oeuvre le programme local de l'habitat (PLH) (article L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation - CCH), qui est un instrument établi pour une durée de six ans, leur permettant de déterminer sur leur territoire les actions prioritaires en matière d'habitat. Le PLH constitue le principal document stratégique de programmation en matière de politique du logement dont l'objectif est de participer au développement de l'offre de logements sur leur territoire en favorisant la construction ou la réhabilitation de logements afin de répondre aux besoins des habitants. La politique locale de l'habitat tend également vers la revitalisation des centres-villes et la maîtrise de la consommation foncière.

Au niveau départemental, un plan départemental de l'habitat (PDH) est élaboré conjointement par l'État, le département et les EPCI à fiscalité propre ayant adopté un PLH ou ayant engagé la procédure en vue de son adoption (article L. 302-10 à L. 302-12 du CCH) ; il vise à coordonner les politiques de l'habitat et à définir des orientations sur les territoires dépourvus de PLH.

Par ailleurs, conformément à l'article L. 3232-1-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la loi donne la faculté aux départements de fournir une assistance technique aux communes ou aux EPCI à fiscalité propre qui ne bénéficient pas des moyens suffisants pour l'exercice de leurs compétences. Définie par le législateur comme une aide à l'équipement rural, elle est délivrée pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire. À ce titre, l'assistance technique est actuellement réservée aux communes rurales et aux EPCI à fiscalité propre de moins de 40 000 habitants 91 ( * ) . L'assistance technique, qui s'assimile à un service d'intérêt économique général (SIEG), est assurée par convention en contrepartie d'un prix visé à l'article R. 3232-1-3 du CGCT.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les EPCI à fiscalité propre se sont largement emparés de leurs compétences en matière d'habitat. Ainsi, sur un total de 1 254 EPCI à fiscalité propre, 1 189 se sont dotés de l'un des items du bloc de compétences « logement et habitat », et 906 ont opté pour l'item «  PLH 92 ( * ) ». Toutefois, il convient de rappeler que le choix de cet item n'est pas obligatoire pour pouvoir ou devoir élaborer un PLH.

En outre, la responsabilité des EPCI à fiscalité propre dans l'élaboration de ce document s'est affirmée au fil du temps, passant d'une simple incitation à une obligation pour les plus importants d'entre eux.

Ainsi, l'article L. 302-1 du CCH prévoit que l'élaboration d'un PLH est obligatoire dans les métropoles, les communautés urbaines (CU) et les communautés d'agglomération (CA) qui exercent obligatoirement la compétence en matière d'habitat, ainsi que dans les communautés de communes (CC) dotées de la compétence en matière d'habitat, qui comptent plus de 30 000 habitants et qui comprennent au moins une commune de plus de 10 000 habitants. En l'absence de PLH, les EPCI concernés ne s'exposent à aucune sanction mais se privent de la possibilité de conclure une convention de délégation de compétences, prévue à l'article L. 301-5-1 du CCH, pouvant porter sur l'attribution des aides à la pierre et des aides de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), sur la gestion du droit au logement opposable (DALO) et des réservations de l'État, sur les réquisitions, et enfin sur la gestion de la veille sociale, de l'accueil, de l'hébergement et de l'accompagnement au logement.

Il ressort des dernières enquêtes réalisées au 1 er janvier 2020, que parmi les 659 EPCI à fiscalité propre qui ne se sont pas dotés d'un PLH (que l'élaboration soit facultative ou obligatoire), figurent 645 CC. En outre, parmi les 359 EPCI à fiscalité propre pour lesquels l'adoption d'un PLH est une obligation légale, 38 ne l'ont pas adopté, dont 24 CC 93 ( * ).

Il ressort ainsi de la lecture de ces données que les principaux freins à l'élaboration des PLH se situent au niveau des CC. On peut en effet considérer que l'adoption d'un PLH nécessite de pouvoir disposer de moyens humains et techniques pouvant assurer le suivi de l'élaboration de ce document.

Ce constat justifie de prévoir un accompagnement spécifique des CC sur le volet ingénierie de l'élaboration de leur PLH.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Face aux enjeux persistants ou nouveaux de la politique du logement (par exemple : développement de l'offre de logement social, remise sur le marché de logements vacants, maîtrise de la consommation foncière, revitalisation des centres-villes, etc.), le Gouvernement souhaite que les CC, qui ne disposeraient pas des moyens suffisants pour mettre en oeuvre une politique locale du logement, puissent être mieux accompagnées et disposer d'une assistance technique délivrée par le département. L'objectif sera de renforcer la couverture du territoire en termes de planification de l'habitat, sans toutefois déposséder les CC de leur compétence en la matière.

Au-delà de l'assistance technique fournie par le département en matière d'élaboration du PLH, un objectif de renforcement de la stratégie locale de l'habitat est poursuivi.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Afin d'apporter un appui aux EPCI à fiscalité propre dans l'exercice de leur compétence relative à l'habitat, plusieurs niveaux de soutien peuvent être envisagés. La mesure proposée résulte de la recherche d'un équilibre entre les différentes options suivantes allant d'un soutien ponctuel à une substitution du département :

- permettre au département de fournir une aide ponctuelle aux EPCI à fiscalité propre dans le cadre de l'élaboration des PLH en développant les outils dont il disposerait pour mettre en cohérence les différentes politiques locales de l'habitat, menées par les EPCI à fiscalité propre présents sur son territoire. Toutefois, il n'apparaît pas nécessaire de multiplier les outils, mais plutôt de rendre les outils existants, tels que les PLH, véritablement efficients ;

- permettre au département, à titre expérimental, de se substituer à l'EPCI à fiscalité propre ne s'estimant pas en mesure d'élaborer son PLH. Cette option a été écartée en raison des conséquences qu'elle emporte en matière de répartition des compétences et de risque constitutionnel de tutelle sur les communes. En effet, l'objectif poursuivi est de renforcer la mise en oeuvre des compétences relatives à l'habitat et au logement exercées par les EPCI à fiscalité propre, qui sont l'échelon territorial le plus adapté pour la définition et la mise en oeuvre des politiques locales de l'habitat, en leur offrant des possibilités d'accompagnement, et non de modifier la répartition des compétences entre les différents échelons locaux ou de porter atteinte à la libre administration des collectivités territoriales ;

- permettre à tous les EPCI à fiscalité propre de confier l'élaboration de leur PLH au département, sous réserve de son accord. Cependant, le besoin d'accompagnement est supérieur au sein des CC qui représentent la majorité des EPCI à fiscalité propre ne s'étant pas conformés à leur obligation de se doter d'un PLH. En outre, les CC sont les structures de coopération intercommunale les moins intégrées, ce qui justifie de concentrer l'aide du département sur un dispositif d'appui à leur profit.

3.2. OPTION RETENUE

Afin de renforcer la couverture du territoire en termes de planification de l'habitat, il est prévu de permettre aux CC, qui en exprimeraient le besoin, de confier l'élaboration du PLH au département, s'il l'accepte. L'appui du département prendra la forme d'une assistance pour assurer le suivi opérationnel de cette élaboration (consultation de bureaux d'étude, passation des marchés, suivi des travaux du bureau d'études, organisation de réunions et d'échanges avec les partenaires, consultations, etc.) afin de conserver la répartition actuelle des compétences qui prévoit que seul l'EPCI à fiscalité propre est compétent pour adopter son PLH. L'organe délibérant de l'EPCI continuera d'être l'instance décisionnelle pour les différentes phases de la procédure d'élaboration d'un PLH (engagement du PLH, arrêt du projet de PLH et adoption).

L'échelon départemental, par sa bonne appréhension du territoire et sa proximité avec l'échelon intercommunal, est le plus adapté pour apporter un soutien et répondre au besoin d'accompagnement des CC, qui sont les EPCI à fiscalité propre les moins intégrés. En outre, certains départements ont mobilisé l'ensemble des outils à leur disposition pour s'engager dans une politique volontaire en matière d'habitat. Il est ainsi proposé de renforcer leur rôle et leur positionnement dans la construction d'une stratégie en matière d'habitat, qui sera complémentaire de celles définies par les intercommunalités.

Afin d'assurer une vision partagée des enjeux et des actions à porter en matière de logement et d'hébergement, entre le département et l'EPCI à fiscalité propre, le présent dispositif prévoit que la CC soit pleinement associée à l'élaboration du PLH, qui sera applicable sur son territoire, et reste la seule compétente pour l'adopter.

Une convention signée entre le département et l'EPCI à fiscalité propre déterminera les modalités précises de mise à disposition de l'assistance technique en vue de l'élaboration du PLH (organisation et fréquence de réunions avec les élus, etc.).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article prévoit la création d'un article L. 302-2-1 du CCH.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La présente mesure vise à soutenir et accompagner les CC, régies à l'article L. 5214-1 du CGCT, qui en expriment le besoin dans la mise en oeuvre de leur politique locale de l'habitat.

Les départements exercent une compétence en matière de planification de l'habitat, à travers le PDH, qui sera ainsi complétée par l'assistance fournie aux CC. Cette disposition permettra de renforcer l'engagement des départements là où c'est nécessaire, en faveur de la mise en place d'une stratégie locale de l'habitat.

La CC reste la seule compétente pour adopter le PLH propre à son territoire. Il n'existe donc pas d'impact en matière de répartition des compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La présente mesure impliquera pour les services du conseil départemental qui souhaitent apporter cet appui, de s'organiser pour mettre à disposition les moyens nécessaires à l'accompagnement des CC. Le coût de l'élaboration d'un PLH varie fortement selon la taille de l'EPCI, d'un point de vue démographique et spatiale, notamment pour le volet foncier du PLH instauré par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, mais aussi en fonction de l'existence d'un précédent PLH ou d'études préalables sur le territoire. La durée d'élaboration d'un PLH pourrait être estimée à deux mois au minimum.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les modifications du CCH entreront en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 30 : Renforcement des outils mobilisables dans le cadre des projets partenariaux d'aménagement (PPA) et des grandes opérations d'urbanisme (GOU)

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) a permis de faciliter la réalisation de grandes opérations d'aménagement en créant deux nouveaux outils aux articles L. 312-1 à L.312-7 du code de l'urbanisme : le projet partenarial d'aménagement (PPA) et la grande opération d'urbanisme (GOU).

Le PPA est un outil contractuel à l'initiative du niveau intercommunal et qui associe l'État et potentiellement les communes, les départements, les régions, toutes les parties prenantes publiques et même, sous certaines conditions, des acteurs privés. Il permet de constituer un partenariat fort dans la durée pour assurer la gouvernance et le pilotage d'opérations d'aménagement complexes dont il accompagne la conception et la mise en oeuvre concrète (appui méthodologique, outils, calendrier, modalités de la gouvernance, moyens financiers et humains, etc.).

Le contenu est libre et dépend tant de la négociation locale menée et des acteurs impliqués que du caractère opérationnel nécessaire pour le ou les projets visés. Les établissements publics d'aménagement (EPA) de l'État peuvent également mener des études préalables à sa formation, même en dehors de leur périmètre d'intervention. Sa signature emporte certains effets juridiques, comme une procédure permettant à l'État de céder en bloc et à l'amiable des terrains bâtis ou non bâtis de son domaine privé, pour la réalisation d'opérations d'aménagement prévues par le contrat (article L. 3211-6 du code général de la propriété des personnes publiques - CG3P).

Mais le PPA présente plus particulièrement l'intérêt de pouvoir prévoir la réalisation d'une opération d'aménagement susceptible d'être qualifiées de « grande opération d'urbanisme » (GOU) dès lors qu'elle requiert, en raison de ses dimensions ou de ses caractéristiques, un engagement conjoint spécifique de l'Etat et d'une collectivité territoriale ou d'un EPCI (article L. 312-3 du code de l'urbanisme). Prévue dans le contrat de PPA, son périmètre est délimité par un acte de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou l'établissement public de coopération intercommunal (EPCI) compétent, après avis conforme des communes concernées et accord du représentant de l'État dans le département (article L. 312-4 du code de l'urbanisme). Afin d'en faciliter la réalisation, il s'applique au sein de la GOU, un régime dérogatoire au droit commun. Ce dispositif entraîne de nombreux effets juridiques (article L. 312-5 du même code), parmi lesquels le transfert de compétences à l'intercommunalité, comme la délivrance des permis de construire et autres actes d'utilisation du sol, la maîtrise d'ouvrage voire la gestion d'équipements publics. L'acte créant la GOU peut aussi valoir pour tout ou partie création d'une zone d'aménagement différé (ZAD) avec un droit de préemption pouvant être exercé pendant une période de dix ans (article L. 312-6 du même code). Les EPA peuvent intervenir pour mener des opérations d'aménagement, s'ils sont titulaires d'une concession d'aménagement en situation de quasi-régie (article L. 321-23 du même code).

Par ailleurs, une procédure intégrée pour l'adaptation des documents d'urbanisme dans le cadre d'une GOU (PIGOU) a été créée (article L. 300-6-1 du même code). L'objectif de cette mesure est de permettre, dans le cadre d'une procédure unique et de délais resserrés, la mise en compatibilité d'un ou de plusieurs documents d'urbanisme mais aussi, le cas échéant, l'adaptation de certains plans/programmes de rang supérieur ou de certaines servitudes d'utilité publique.

Une circulaire du 4 février 2019 de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et du ministre chargé de la ville et du logement, relative à l'accompagnement par l'État des projets d'aménagement des territoires 94 ( * ) , fait suite à la promulgation de la loi ELAN et revient plus précisément sur le contrat de PPA et l'opération de revitalisation du territoire (ORT).

Aujourd'hui, treize contrats de PPA ont été signés. Il s'agit par exemple de projets de rénovation de centres urbains ou de quartiers constitués à Mulhouse et à Argenteuil, de résorption de l'habitat privé dégradé à Marseille ou de transformations de friches militaires au Mans. A Toulouse et Bordeaux, le PPA accompagne des projets d'intensification de tissus urbains existants. Sur les vallées du Gier et de l'Ondaine au sud de Saint-Etienne, il permet de mettre en place un projet de revitalisation de centralités urbaines et pôles structurants. Au Teil, en Ardèche, il coordonne les efforts de chacun pour accélérer la reconstruction de la ville suite au séisme du 11 novembre 2019. Environ 70 territoires se sont portés candidats et à ce jour une vingtaine de PPA est en cours d'élaboration active.

Un nouvel appel à manifestation d'intérêt a été lancé le 24 juillet 2020, pour une seconde génération de PPA, en particulier sur les enjeux de recyclage foncier, de résilience territoriale (notamment face au changement climatique et à l'érosion du trait de côte), ainsi que de revitalisation territoriale (notamment dans les coeurs de petites centralités ou en périphéries urbaines).

La loi ELAN a également prévu que dans le cadre d'une ORT et à titre expérimental (pour une durée de cinq ans), il est possible de déposer une demande de permis d'aménager portant sur plusieurs unités foncières non contiguës. Ce permis d'aménager multi-sites expérimental vise à répondre au défi d'équilibre économique d'une opération de renouvellement urbain. Il s'agit de trouver un équilibre entre plusieurs opérations au sein d'un même projet, le bénéfice des unes équilibrant le déficit des autres.

En matière d'urbanisme, pour faciliter certains projets urbains dans le cadre de la politique du logement, il existe des dérogations au plan local d'urbanisme. Elles peuvent être accordées sur le fondement de l'article L. 152-6 du code de l'urbanisme aux demandeurs pour la construction de logements, notamment dans un objectif de mixité sociale. Ces dérogations sont précisément définies en fonction de la nature des projets et ne concernent que les zones qui connaissent une situation tendue en termes de logement, pour le gabarit, la densité ou les règles de stationnement applicables.

Parmi les acteurs incontournables en matière de stratégie foncière et d'aménagement, dix établissements publics fonciers (EPF) de l'État accompagnent les collectivités territoriales et leurs groupements et couvrent parfois l'ensemble de territoires régionaux. Actuellement, la procédure d'extension d'un EPF d'État définie à l'article L. 321-2 du code de l'urbanisme prévoit en particulier une phase de consultation des collectivités territoriales, des EPCI à fiscalité propre compétents en matière de plan local d'urbanisme (PLU), des communes de 20 000 habitants et plus non membres de ces établissements et des comités régionaux de l'habitat et de l'hébergement compétents, et l'intervention d'un décret en Conseil d'État pour le nouveau périmètre.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

La démarche contractuelle d'opérations d'aménagement par des PPA et dans le cadre d'une GOU s'inscrit dans un partenariat fort entre l'État et les collectivités concernées et dans le respect du principe de libre administration consacré par l'article 72 de la Constitution.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le PPA, complété d'une GOU, est un cadre privilégié pour favoriser l'émergence et conduire des projets d'ensemble et durables, avec souvent des interventions complexes et/ou lourdes, sur des territoires à enjeux, à l'initiative de l'EPCI à fiscalité propre, en partenariat avec l'État, et nécessitant des dérogations aux règles de droit commun et à celles fixées par les documents d'urbanisme. Il encourage le développement d'une stratégie à l'échelle intercommunale avec des leviers d'intervention renforcés.

Si ces dispositifs permettent déjà aux collectivités territoriales et à leurs groupements en partenariat avec l'État de disposer d'un cadre propice à des projets ambitieux voire complexes, il s'avère nécessaire d'apporter des améliorations et des mesures complémentaires aux dispositions législatives en vigueur pour en renforcer les effets positifs et qu'ils puissent ainsi bénéficier à d'autres types de projets et d'opérations. Ces dispositifs doivent s'inscrire en faveur de l'utilisation des capacités d'urbanisation et de recomposition du foncier situé en zone urbaine sur des terrains déjà artificialisés pour la réalisation d'opérations d'aménagement permettant la réalisation de quartiers sobres et désirables et transformer les formes urbaines existantes. En ce sens, les PPA et GOU doivent pleinement s'inscrire dans les enjeux de sobriété foncière, en particulier quant aux aspects de densité des constructions.

Actuellement, s'il y a bien un régime dérogatoire au droit commun au niveau de la GOU qui emporte des transferts automatiques ou facultatifs au niveau intercommunal pour conduire une opération d'aménagement, le droit de préemption qui est pourtant incontournable en matière de maîtrise foncière n'est pas concerné.

Si le droit en vigueur prévoit des outils d'urbanisme et d'aménagement en faveur du renouvellement urbain et de l'amélioration du cadre vie, ils sont parfois limités à certains dispositifs ou certains secteurs, et ne sont donc pas possibles en PPA et/ou GOU alors même qu'ils visent à répondre à des situations rencontrées et appréhendées par ces dispositifs de contractualisation.

C'est le cas aussi du permis d'aménager multi-sites, dont l'expérimentation est prévue par la loi ELAN. Le permis d'aménager multi-sites est un outil actuellement seulement mobilisable dans le cadre d'une ORT. Or, compte tenu de la complexité de certaines opérations d'aménagement qui peuvent faire l'objet d'un PPA et notamment de leur équilibre économique en cas de « recyclage urbain », son champ pourrait être élargi.

D'autre part, des dérogations aux règles d'urbanisme relatives au gabarit, à la densité ou au stationnement sont prévues pour des autorisations d'urbanisme, mais elles sont limitées à certaines zones urbaines et ne sont donc pas forcément possibles en GOU.

Enfin, les EPF de l'État, qui sont des acteurs majeurs, interviennent dans des périmètres qui ne couvrent pas forcément certaines opérations en PPA et GOU, mais la procédure de droit commun pour leur extension est complexe et longue et peut être aménagée pour ce cas spécifique.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cet article vise à renforcer les dispositifs contractuels entre l'État et les collectivités territoriales et leurs groupements pour faciliter le renouvellement urbain sur des secteurs spécifiques, en faisant évoluer le dispositif du projet partenarial d'aménagement et de la grande opération d'urbanisme.

Il s'agit d'encourager la revitalisation des coeurs de ville (petites centralités), valoriser les friches, réinventer les périphéries (zones pavillonnaire, zones d'activité économique) et permettre d'intensifier les quartiers de gare. Sur ces secteurs, le but est de lever les freins au « recyclage foncier » qui nécessite une forte ingénierie territoriale et l'émergence d'opérateurs experts, et justifie des pouvoirs dérogatoires pour mener les procédures à leur terme.

Pour y parvenir, il est proposé de capitaliser sur les dispositifs de projet partenarial d'aménagement (PPA) et de grande opération d'urbanisme (GOU), notamment pour favoriser cette démarche entre l'État et les collectivités territoriales et leurs groupements et le recours par ces dernières à des moyens d'interventions renforcés, comme l'activation de dérogations au droit de l'urbanisme ou d'outils spécifiques et adaptés d'aménagement, notamment les procédures de maîtrise et d'ingénierie foncières ou l'exercice du droit de préemption.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il avait été envisagé de modifier la dénomination des PPA et GOU, en y ajoutant le qualificatif de "durable" (projets partenariaux d'aménagement durable et grande opération d'urbanisme durable) mais une telle modification n'aurait pas de portée juridique.

Concernant le permis d'aménager multi-sites et son extension aux PPA et GOU, il était envisagé de passer par une expérimentation pour une période cinq ans, comme pour les opérations de revitalisation du territoire (ORT). Toutefois compte tenu de l'intérêt de développer cet outil et notamment de la nécessité que cette mesure puisse s'inscrire dans la durée afin qu'il puisse être pleinement mobilisé par les acteurs de l'aménagement, la codification, sans durée d'application, a été jugée préférable. Il n'a pas été retenu non plus de limiter son champ à la GOU pour qu'il puisse couvrir les opérations d'aménagement faisant déjà l'objet de PPA et nécessitant ce mécanisme.

3.2. OPTION RETENUE

Pour pouvoir conduire des projets d'aménagement notamment en matière de recyclage urbain, comme dans le cadre des ORT, il est prévu la faculté de mobiliser un permis d'aménager multi-sites dans le cadre d'un PPA. La disposition est codifiée sans durée d'application. Elle est subordonnée à ce que l'opération d'aménagement garantisse l'unité architecturale et paysagère des sites concernés et s'inscrive dans le respect des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) du PLU.

Concernant le renforcement de la grande opération d'urbanisme, à l'instar de ce qui est prévu pour les autorisations d'urbanisme et afin que l'établissement public de coopération intercommunale compétent puisse disposer de l'ensemble des moyens d'action pour conduire une ou des opérations d'aménagement dans le périmètre de la GOU, l'exercice du droit de préemption et du droit de préemption renforcé lui est transféré automatiquement, avec une possibilité de le déléguer à l'aménageur, et notamment aux EPA et EPF.

Parmi les dérogations permises dans le périmètre de la GOU, il est prévu de permettre celles relatives aux règles d'urbanisme (gabarit, stationnement et densité) pour les autorisations d'urbanisme en y faisant référence dans l'article L. 312-5 du code de l'urbanisme qui fixe les dispositions particulières dans le périmètre d'une GOU.

Enfin, pour permettre l'intervention d'un établissement public foncier d'État en dehors de son périmètre initial et donc faciliter son extension en ce sens sur le périmètre d'une GOU, et lorsqu'il n'est pas couvert par un EPF local, il est prévu que cela soit possible pour une grande opération d'urbanisme par décret en Conseil d'État après simple délibération de la collectivité co-contractante et du conseil d'administration (en simplifiant la consultation de toutes les autres collectivités du territoire). En contrepartie d'un tel assouplissement, la composition du conseil d'administration ne peut être modifiée.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Cet article modifie plusieurs dispositions du code de l'urbanisme :

- L'article L. 211-2 ;

- L'article L. 214-1-1 ;

- Création d'un article L. 312-2-1 ;

- Les articles L. 312-5 et L. 312-7.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Les mesures envisagées doivent permettre de faciliter la réalisation d'opérations d'aménagement, comprenant la production de logements, de locaux d'activités économiques notamment de commerces, des équipements collectifs et d'infrastructures, d'espaces verts et de loisirs mais également la préservation et la réduction de la consommation de certains espaces non artificialisés et le renouvellement urbain. L'ampleur de ces opérations est significative pour le marché local du logement et plus généralement pour le développement de la collectivité locale concernée. Ces mesures vont donc contribuer à la dynamique des territoires et à leur développement économique.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

L'émergence et la réalisation de nouvelles opérations d'aménagement auront un impact positif sur les entreprises, d'une part, en ce qui concerne l'activité directe générée par les études, les travaux et l'exploitation des projets, en particulier pour les acteurs du bâtiment et de la construction et, d'autre part, en ce qui concerne la dynamique économique qui sera créée dans les territoires concernés par la démarche de PPA et de GOU.

4.2.3. Impacts budgétaires

Ces mesures n'entraînent aucune dépense budgétaire supplémentaire directe.

Cependant, le développement de PPA et de GOU pourra nécessiter que l'État et ses établissements publics partenaires, les collectivités territoriales et leurs groupements et le cas échéant d'autres acteurs publics impliqués, prévoient des participations financières dans ces contrats. Ces participations sont néanmoins difficiles à évaluer, car elles dépendent de chaque opération et le dispositif est très libre pour s'adapter à chaque contexte et à différents niveaux d'engagement des partenaires.

L'État consacre de l'ordre de 14 M€ par an en moyenne de subventions aux PPA (programme 135 « urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat ». Les préfets sont encouragés à contractualiser des PPA dans le cadre des contrats de plan État-Région (CPER) 2021-2027. Une mesure complémentaire exceptionnelle de 10 M€ a été annoncée pour 2021 et 2022 dans le cadre du plan de relance (programme dédié), en faveur de l'accompagnement de PPA de recomposition littorale, en réponse au phénomène de recul du trait de côte.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le renforcement de ces dispositifs permet aux collectivités territoriales et leurs groupements de faciliter ou de poursuivre leur action en matière d'amélioration du cadre de vie et d'aménagement de leur territoire, avec le soutien de l'État, en particulier pour des opérations stratégiques et complexes.

Les collectivités territoriales et leurs groupements pourront réaliser des investissements en matière de réalisation d'équipements, de maîtrise d'ouvrage, d'acquisition foncière, d'études, et de capitalisation de société d'aménagement. Mais l'État étant partenaire et d'autres acteurs pouvant l'être également, la réalisation de ces opérations d'aménagement sera moins coûteuse pour les collectivités territoriales et leurs groupements que dans le cadre du droit commun.

Cette évolution du dispositif, notamment pour le droit de préemption, accentue aussi un transfert de compétence en faveur de l'EPCI à fiscalité propre à l'initiative et qui pilote la GOU.

Elle mobilise aussi davantage la compétence « urbanisme » dans le cadre de l'exercice de la compétence de délivrance des autorisations d'urbanisme, avec la faculté d'un permis d'aménager multi-sites, il est également permis de déroger au règlement du plan local d'urbanisme dans le périmètre d'une GOU et dans la limite de certaines conditions fixées par l'article L. 152-6 du code de l'urbanisme. Cet encadrement strict des dérogations doit permettre de favoriser la stabilité des PLU.

Enfin des collectivités territoriales et leurs groupements qui ne sont actuellement pas dans le périmètre d'un EPF de l'État pourront plus aisément dans le cadre d'une GOU l'intégrer et ainsi bénéficier de son appui, sans que cela ne bouleverse pour autant la gouvernance, notamment des autres collectivités, au sein de cet établissement.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'émergence, la négociation et le suivi des PPA et GOU mobilisera les services des collectivités territoriales et de leurs groupements, les services déconcentrés du préfet et les services centraux des ministères de la transition écologique et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Cette évolution peut également mobiliser davantage les services instructeurs en matière d'urbanisme, avec la faculté d'un permis d'aménager multi-sites, et plus particulièrement dans le cadre d'une GOU de ceux de niveau intercommunal dans le cadre de l'exercice de la compétence de délivrance des autorisations d'urbanisme avec les dérogations éventuelles au plan local d'urbanisme.

Les services de l'État seront enfin impliqués plus particulièrement pour accompagner et permettre de potentielles extensions de périmètres des EPF dont ils assurent la tutelle.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

De façon très indirecte, les mesures du présent article contribueront au développement de l'offre de logements ou d'équipements et d'infrastructures, ainsi que d'activités de service, pouvant permettre de répondre à des enjeux propres à la protection et aux conditions de vie et d'accès des personnes en situation de handicap.

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

Ces mesures contribueront à l'émergence d'opérations d'aménagement en faveur de l'amélioration du cadre de vie et notamment au développement de l'offre de logements et de service. Ces mesures peuvent en particulier avoir un effet bénéfique sur la capacité d'accueil des étudiants et des jeunes actifs dont les ressources sont souvent insuffisantes pour se loger dans les zones les plus tendues.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les actions et opérations d'aménagement, prévues dans un cadre contractuel entre l'État et les collectivités territoriales et leurs groupements, ainsi qu'avec d'autres acteurs variés, et les outils mobilisés pour répondre aux différents enjeux du développement durable en matière d'urbanisme et d'aménagement contribuent au développement économique des territoires, à l'amélioration de la qualité du cadre de vie et en particulier au développement de l'offre de logements et d'équipements collectifs. Ces dispositifs s'inscrivent donc dans une démarche en faveur du logement, de l'habitat, de la construction mais également de l'emploi tant par les activités générées pour la réalisation de ces opérations, que pour celles qui sont soutenues ou qui en résulteront sur les territoires concernés.

4.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Le renforcement du cadre des projets partenariaux d'aménagement et des grandes opérations d'urbanisme permettront de favoriser le renouvellement urbain et de poursuivre des enjeux de sobriété foncière, contribuant ainsi à la préservation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, à la lutte contre l'étalement urbain et la lutte contre l'artificialisation des sols.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

La présente disposition a également été transmise pour avis au Conseil national de l'habitat.

Une consultation a été menée au printemps 2020, dans le cadre d'un groupe de travail partenarial mis en place par les ministères en charge de l'écologie et de l'urbanisme. Ces propositions ont reçu un accueil favorable.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'ensemble des mesures du présent article entre en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

Les nouvelles dispositions sont applicables aux PPA signés et aux GOU créées avant l'entrée en vigueur de la présente loi.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion.

5.2.3. Textes d'application

Pour la mise en oeuvre éventuelle de la dérogation prévue à l'article L. 321-2 du code de l'urbanisme, des décrets en Conseil d'État seront pris.

TITRE IV - LA SANTE, LA COHESION SOCIALE, L'ÉDUCATION ET LA CULTURE

CHAPITRE IER - LA PARTICIPATION À LA SÉCURITÉ SANITAIRE TERRITORIALE

Article 31 : Réforme de la gouvernance des agences régionales de santé (ARS)

1. ÉTAT DES LIEUX

Les agences régionales de santé (ARS) ont été créées par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) dans une volonté de modernisation des structures de l'État.

Chargées du pilotage régional du système de santé, les ARS sont des établissements publics de l'État à caractère administratif placés sous la tutelle des ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées, tels que définis par l'article L. 1432-1 du code de la santé publique (CSP).

Selon l'article L. 1432-1 du CSP, un directeur général et un conseil de surveillance présidé par le préfet de région sont placés à la tête des ARS. En effet, le directeur général de l'ARS exerce des compétences au nom de l'État (police sanitaire, il arrête le projet régional de santé, délivre les autorisations d'équipement ...). Il agit à ce titre en tant que dépositaire d'un pouvoir d'État. En vertu de l'article L 1432-2 du CSP, le DG ARS exerce au nom de l'État les compétences mentionnées à l'article L 1431-2. Cela concerne notamment la mise en oeuvre au niveau régional de la politique de santé, la régulation, l'orientation et l'organisation de l'offre de services de santé de manière à répondre aux besoins en matière de prévention, de promotion de la santé, de soins et de services médico-sociaux, aux besoins spécifiques de la défense et à garantir l'efficacité du système de santé. De même, il est habilité à conclure pour le compte de l'État des conventions avec les collectivités territoriales pour le déploiement de programmes de santé publique. Il prépare et exécute, en tant qu'ordonnateur, le budget de l'agence (article L. 1432-2 précité). Il arrête le compte financier. Il arrêté le projet régional de santé et après concertation avec les caisses locales d'assurance maladie et avec les organismes complémentaires d'assurance maladie, le plan pluriannuel régional de gestion du risque prévu à l'article L. 182-2-1-1 du code de la sécurité sociale. Il délivre une licence pour toute création, transfert, regroupement d'officines pharmaceutiques.

L'emploi de directeur général est un emploi supérieur de l'État laissé à la discrétion du Gouvernement. Le directeur général de l'ARS est nommé par décret du Président de la République sur rapport du Premier Ministre et des ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées.

Conformément à l'article L. 1432-3 du CSP, le conseil de surveillance, présidé par le préfet de région, est notamment composé de représentants de l'État, des organismes locaux d'assurance maladie et de collectivités territoriales. Il a pour mission d'approuver le budget de l'agence sur proposition du directeur général et le compte financier ainsi que d'émettre un avis sur le projet régional de santé, le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens de l'ARS et sur ses résultats.

Auprès de chaque ARS, le CSP prévoit également quatre instances:

- une conférence régionale de la santé et de l'autonomie, à l'article L. 1232-4, chargée de :

• faire toute proposition au directeur général de l'ARS sur l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation de la politique de santé dans la région et sur les territoires émettre un avis sur le projet régional de santé ;

• organiser l'expression des représentants des usagers du système de santé ;

• procéder en lien notamment avec les conseils territoriaux de santé, à l'évaluation, d'une part, des conditions dans lesquelles sont appliqués et respectés les droits des personnes malades et des usagers du système de santé et, d'autre part, de la qualité des prises en charge et des accompagnements ;

• organiser le débat public sur les questions de santé de son choix ;

- trois commissions de coordination des politiques publiques de santé, prévues à l'article L. 1432-1, chargées de coordonner les actions déterminées et conduites par leurs membres, notamment les départements, dans les domaines :

• de la prévention et de la promotion de la santé, de la santé scolaire, de la santé au travail et de la protection maternelle et infantile ;

• des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux

• de l'organisation territoriale des soins.

Les collectivités territoriales sont représentées au sein de ces instances territoriales.

Pour rappel, l'organisation du système de santé reste largement centralisée. En matière de santé, la commune n'exerce pas de compétence obligatoire, en dehors des mesures spécifiques que peuvent être amenés à prendre les maires dans le cadre de leur pouvoir de police. La commune et les groupements de communes ont également la possibilité d'attribuer des aides en matière sanitaire, par exemple pour l'installation ou le maintien de professionnels de santé dans les zones déficitaires en offre de soins, pour financer des structures participant à la permanence des soins.

Quant aux départements, en supprimant la clause générale de compétence, la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a circonscrit leur champ d'intervention, dans le domaine sanitaire, au financement des laboratoires départementaux d'analyse, dans le cadre du dispositif de prévention des risques et de gestion des crises sanitaires. Une action forte des départements en matière de santé, prévue par le CSP, concerne la prévention et la promotion de la santé, tout particulièrement dans le champ maternel et infantile. Le département est en outre responsable des actions de planification familiale. Il intervient à ce titre en matière de périnatalité, de suivi de la santé et de la vaccination des bébés et des jeunes enfants, de bilan de santé à l'école maternelle, de conseil et de suivi en matière de contraception. Il peut, par délégation de l'État, conduire des actions de vaccination pour les adultes. Le département est enfin compétent pour l'évaluation des plans d'aides pour le grand âge et l'évaluation des situations de handicap en lien avec les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), conduites par ses équipes médicales spécialisées dans ces deux domaines.

Ces actions s'inscrivent en lien avec la compétence des départements chefs de file dans le domaine de l'action sociale, conformément au rôle que leur confère l'article 3 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), confirmé par l'article 94 de la loi NOTRe.

Les départements sont à ce titre membres des commissions des ARS. C'est également le cas des autres collectivités, et notamment du bloc communal, au titre des actions conduites dans le cadre des centres communaux d'action sociale (CCAS), en particulier dans le domaine du grand-âge.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La crise sanitaire a montré le rôle clé des ARS pour l'organisation de la réponse sanitaire sur les territoires. Elle a également modifié profondément les attentes à leur égard. Elle a interrogé la coordination des différents acteurs pour agir dans l'urgence et a souligné la nécessité de placer les ARS en plus grande proximité des territoires et de renforcer l'association des élus locaux à la conduite des politiques de santé dans les territoires. Un engagement a été pris en ce sens par le Gouvernement en juillet 2020 dans le cadre des conclusions du Ségur de la Santé.

Il apparaissait notamment nécessaire de faire évoluer la gouvernance des ARS. Ainsi, il est proposé de réformer le conseil de surveillance, principal organe de gouvernance des ARS, afin notamment de renforcer le poids des élus en leur sein et d'élargir les sujets sur lesquels l'instance est amenée à se prononcer.

La gouvernance des ARS étant définie aux articles L. 1432-1 à 1432-4 puis L. 1433-1 du CSP, les modifications envisagées nécessitent de légiférer.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Il s'agit d'adapter le fonctionnement de la principale instance de gouvernance des ARS en renforçant le poids des élus en leur sein et d'élargir les sujets sur lesquels le conseil est amené à se prononcer.

La mesure envisagée s'inscrit dans le cadre d'une politique plus globale visant à mobiliser deux leviers qui paraissent de nature à répondre aux attentes des élus, à les impliquer et à les engager dans la mise en oeuvre des politiques de santé sur leur territoire, en tant que partenaires de l'ARS. Ces deux leviers sont très liés :

- promouvoir une politique contractuelle ambitieuse (les contrats locaux de santé sont, dans nombre de territoires de bons exemples) ;

- simplifier la gouvernance du système de santé, en définissant les attributions de chaque instance. Le constat actuel est en effet celui d'un nombre important d'instances où les élus sont représentés avec, dans nombre d'entre elles, une faible présence. Le dialogue effectif avec les élus s'effectue souvent en marge d'instances que certains peuvent juger complexe ou trop dense. Il est donc nécessaire de redonner du sens à la présence des élus au sein des instances.

3. DISPOSITIF RETENU

Cet article vise à renforcer les compétences du conseil de surveillance des ARS en le transformant en un conseil d'administration et d'augmenter le poids des élus en son sein.

La transformation du conseil de surveillance en conseil d'administration est accompagnée d'une part d'une modification de sa composition, d'autre part d'une extension de ses missions.

Aux côtés du président, soit le représentant de l'État dans la région, prendraient place en effet trois vice-présidents dont deux désignés parmi les membres représentant les collectivités territoriales.

Le conseil d'administration reprendra les missions du conseil de surveillance. Il fixera également les grandes orientations de la politique contractuelle de l'ARS sur proposition de son directeur général.

En plus des documents déjà prévus dans le cadre du conseil de surveillance, le directeur général transmettra au conseil d'administration deux rapports :

- sur les conventions conclues avec les collectivités territoriales pour la mise en oeuvre du projet régional de santé ;

- sur les actions financées par le budget annexe de l'ARS.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les articles L. 1432-1, L. 1432-2 et L. 1432-3 du CSP seront modifiés.

L'intitulé de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre III du livre IV de la première partie du CSP sera modifié.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le poids des collectivités territoriales sera renforcé au sein du conseil d'administration et leurs représentants occuperont deux sièges de vice-présidents.

Les élus locaux pourront ainsi directement faire valoir leurs avis au sein de l'instance de pilotage et participer à la prise des décisions de l'agence.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article L. 200-3 du code de la sécurité sociale, les dispositions envisagées ont été soumises à la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM).

En application de l'article L.723-12 du code rural et de la pêche maritime, les dispositions envisagées ont été soumises à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA).

En application de l'article L. 182-2 du code de la sécurité sociale, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil de l'union nationale des caisses d'assurance maladie (CUNCAM).

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera à compter de la publication des décrets d'application.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

Un décret sera nécessaire pour modifier la partie réglementaire du CSP afin de fixer la composition et les modalités de fonctionnement du conseil d'administration.

Article 32 : Financement des établissements de santé par les collectivités territoriales

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le terme d'établissement de santé est issu de la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière. Il permet de désigner les établissements publics et privés et s'inscrit en cela dans la volonté législative qui, depuis 1970 et la première loi de planification hospitalière, tend à soumettre les deux secteurs à des règles communes. Ce rapprochement des règles juridiques, régissant les établissements de santé publics et privés, est renforcé par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Cette loi élargit, en effet, les missions communes des établissements de santé quel que soit leur statut (prise en charge des soins palliatifs notamment, article L. 6111-1 du code de la santé publique).

Les établissements de santé se caractérisent par des statuts juridiques et modes de financements variés. Les établissements de santé sont les suivants :

- les établissements publics de santé ;

- les hôpitaux des armées ;

- les établissements de santé privés à but non lucratif ;

- les établissements de santé privés à but lucratif ;

- les hôpitaux de proximité, qui peuvent être de statut public ou privé.

L'ensemble des structures répondant à la qualification d'établissement de santé peut remplir des missions de proximité et notamment les missions mentionnées à l'article L. 6111-1 et suivant du code de la santé publique (CSP) :

- assurer le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes et mener des actions de prévention et d'éducation à la santé ;

- délivrer des soins, le cas échéant palliatifs, avec ou sans hébergement, sous forme ambulatoire ou à domicile, le domicile pouvant s'entendre du lieu de résidence ou d'un établissement avec hébergement relevant du code de l'action sociale et des familles (CASF) ;

- participer à la coordination des soins en relation avec les membres des professions de santé exerçant en pratique de ville et les établissements et services médico-sociaux, dans le cadre défini par l'agence régionale de santé (ARS) en concertation avec les départements pour les compétences qui les concernent ;

- participer à la mise en oeuvre de la politique de santé et des dispositifs de vigilance destinés à garantir la sécurité sanitaire ;

- mener, en leur sein, une réflexion sur l'éthique liée à l'accueil et la prise en charge médicale.

L'article L. 1511-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent attribuer des aides destinées à favoriser l'installation ou le maintien de professionnels de santé dans les zones carencées en offre de soins. Il prévoit également la possibilité pour ces collectivités et groupements d'attribuer « des aides visant à financer des structures participant à la permanence des soins, notamment des maisons médicales. ». La jurisprudence administrative définit le champ de la mission de permanence des soins comme recouvrant « l'organisation de la régulation des appels des patients et de l'accès à ceux-ci à un médecin de permanence, qui peut être libéral, la continuité des soins devant être assurée par la mise à disposition de moyens » (CAA de Paris, 10 novembre 2011, n°11PA01228).

De ce fait, il existe une incertitude juridique quant au fait que les établissements de santé soient visés par ce texte et qu'ils relèvent de « la mission de service public de permanence des soins », notamment dès lors qu'ils ne sont pas siège d'un service d'urgence.

En l'état actuel du droit, s'agissant des établissements de santé, il n'existe donc pas de base légale permettant, aux communes et leurs groupements, aux départements et aux régions de contribuer au financement des actions et opérations du programme d'investissement, notamment immobilières, de mise aux normes de sécurité ou d'investissements mobiliers importants en lien avec ces objectifs ou ceux d'adaptation ou de transformation de l'offre de soin, prévues dans le cadre de ces programmes.

Or, des circonstances locales peuvent amener les collectivités territoriales et groupements à souhaiter intervenir en appui d'un établissement de santé qui conduit des missions de santé publique de proximité, perçues comme essentielles à soutenir localement.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la
libre administration des collectivités territoriales.

La détermination de nouvelles compétences pour les communes, les départements et les régions ressort donc du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le financement du programme d'investissement des établissements de santé ne saurait faire l'objet d'une incertitude juridique. A titre d'exemple, s'était posée la question en 2019 95 ( * ) de la capacité de trois intercommunalités (Thonon Agglomération, communauté de communes du Haut-Chablais, communauté du Pays d'Evian vallée d'Abondance) d'accorder une subvention aux hôpitaux du Léman dans le cadre de la rénovation partielle du service des urgences. La solution avait résidé dans le fait que la participation à la permanence des soins constitue un levier mobilisable pour fonder l'intervention des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre en faveur de l'opération.

La mesure proposée a donc pour objectif de sécuriser juridiquement la possibilité pour les communes et leurs groupements, les départements ainsi que les régions de participer au financement du programme d'investissement des établissements de santé notamment dans le cadre des transformations et de l'amélioration de l'offre de soins de ces établissements, pour répondre aux besoins de la population sur les territoires.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les opérations prévues au programme d'investissement des établissements de santé recouvrent des enjeux importants et notamment l'exigence de pérenniser la qualité du service rendu aux usagers, la sécurité des soins et l'adaptation de l'offre aux besoins identifiés sur chaque territoire, et ce en adéquation avec la politique conduite par les ARS, les programmes d'investissement des établissements étant partie intégrante du dialogue de gestion conduit entre ces agences et les établissements de santé.

Par cette mesure législative, les communes et leurs groupements, les départements et les régions pourront financer des projets prévus au programme d'investissement de ces établissements de santé et apporter leurs concours à une politique de santé performante et à la hauteur des attentes des citoyens.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a été envisagé de créer dans le CGGT des articles ad hoc sur le financement des investissements des établissements de santé mais cette option a été écartée pour plusieurs raisons.

Pour ce qui concerne la commune, il s'agirait d'ajouter une intervention supplémentaire dans un titre (5 eme ) qui comporte déjà des pans de compétence variés et obéissant à des régimes juridiques bien distincts (développement économique, logement social...), ce qui ne contribue pas à faciliter la compréhension des dispositions concernées et pourrait aboutir à la mise en oeuvre d'actions publiques locales peu lisibles pour les usagers. En outre, cette option peut être considérée comme déjà satisfaite par les dispositions du CGCT en vigueur puisque la commune peut intervenir sur le fondement de sa clause de compétence générale, dès lors que l'opération envisagée répond à un intérêt local.

S'agissant du département et de la région, cette mesure ne peut être introduite aux articles L. 3211-1 et L. 4221-1 du CGCT, qui traitent respectivement des attributions générales du conseil départemental et du conseil régional, auxquelles il est difficile d'intégrer une disposition consistant en une simple faculté de financement.

3.2. OPTION RETENUE

Le dispositif retenu consiste à compléter le code de la santé publique par l'insertion de trois articles et la modification d'une disposition afin de permettre aux communes et leurs groupements, aux départements ainsi qu'aux régions de financer le programme d'investissement des établissements de santé.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Dans cette logique de clarification et de sécurisation du financement par les communes et leurs groupements, les départements et les régions des projets inscrits dans les programmes d'investissement des établissements de santé, le CSP est modifié tel que :

- l'intitulé du chapitre II du titre II du livre IV de la première partie est modifié ;

- s'agissant des communes et de leurs groupements : après l'article L. 1422-2, un article L. 1422-3 est inséré ;

- s'agissant des départements : après l'article L. 1423-2 est inséré un article L. 1423-3 ;

- s'agissant des régions : après l'article L. 1424-1, est inséré un article L. 1424-2.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

Les établissements de santé privés à but lucratif et à but non lucratif pourront dorénavant voir leurs programmes d'investissement financés par les communes et leurs groupements, les départements et les régions.

4.2.2. Impacts budgétaires

Cet article ne crée pas de charges supplémentaires obligatoires pour les collectivités territoriales et leurs groupements. En effet, il s'agit non d'une obligation d'intervention mais d'une faculté offerte aux exécutifs locaux, de financer le programme d'investissement des établissements de santé au regard de ce qu'ils estiment cohérent de porter sur leur territoire.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cet article permettra aux communes et leurs groupements, aux départements et aux régions d'avoir une capacité d'intervention renforcée en leur permettant participer au financement des programmes d'investissement des établissements de santé publics et privés. Comme indiqué ci-dessus, cet article ne crée pas de charges supplémentaires. En effet, il s'agit non d'une obligation d'intervention mais d'une faculté.

4.4. IMPACTS SOCIAUX

Potentiellement, le financement des établissements de soin de proximité pourra permettre de favoriser l'accessibilité des personnes en situation de handicap.

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Potentiellement, le financement des établissements de soin de proximité pourra permettre de favoriser la qualité de l'accès au soin pour la population. Les élus, qui ont fait valoir l'intérêt d'une telle disposition lors des échanges et concertations préalables à la rédaction du projet de loi, ont souligné l'intérêt pour les collectivités de pouvoir soutenir localement des structures identifiées comme déterminantes pour le service public local, du fait de leur connaissance fine du territoire, des besoins et des attentes de la population.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion.

Article 33 : Recrutement des personnels de centre de santé

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les centres de santé, définis à l'article L. 6323-1 du code de la santé publique (CSP), sont des structures sanitaires de proximité chargées de pratiquer des soins de premier recours et, le cas échéant, de second recours et qui peuvent également dispenser des activités de prévention et de diagnostic, dans les locaux du centre ou à l'extérieur. Le 31 décembre 2019, plus de 2 000 centres de santé (dont 428 pluri-professionnels) sont recensés 96 ( * ) .

La compétence pour créer et gérer des centres de santé est actuellement prévue à l'article L. 6323-1-3 du CSP. Cette compétence est notamment reconnue aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Elle est exercée par les communes au titre de la clause de compétence générale qui leur donne la capacité d'intervention sans qu'il soit nécessaire que la loi procède à une énumération de leurs attributions et dès lors que la loi n'a pas attribué la compétence à une autre collectivité. Cette clause repose sur les « affaires de la commune » ou l'intérêt public local. Découlant de la loi municipale de 1884, elle avait été étendue en 1982 aux autres collectivités territoriales (départements, régions). La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a supprimé la clause de compétence générale pour les départements et les régions, ne la conservant qu'au seul bénéfice des communes (article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales - CGCT).

L'écriture de l'article L. 6323-1-3 du CSP n'a cependant pas pris en compte les conséquences de la suppression de la clause de compétence générale des départements et des régions. Ainsi les départements et les régions ne peuvent créer et gérer des centres de santé à la différence des communes. La mise en oeuvre de cet article relative à la création et à la gestion des centres de santé s'est trouvée limitée parce que sa rédaction ne suffit pas à fonder une compétence des départements en ce domaine.

A cet égard, le présent projet de loi précise, dans son article relatif aux facultés pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire, que la compétence pour créer et gérer des centres de santé relève des communes, des EPCI et des départements. Cette clarification de compétence à destination des départements se justifie par la volonté de contribuer à remédier à la désertification médicale, en articulation avec les compétences déjà développées par le département sur son territoire, notamment via le service public de protection maternelle et infantile. En outre, il s'agit d'améliorer le service aux publics les plus vulnérables et de mettre en place des actions d'accompagnement visant à prévenir la dégradation actuelle de leur situation et donc la sensibilité future de celle-ci. Enfin, cette mesure vise à consolider la situation juridique des centres de santé qui ont déjà été ouverts à l'initiative des départements et, par voie de conséquence, pérenniser leur existence. Le corollaire est de permettre aux communes, aux EPCI et aux départements qui créent ces centres de santé de recruter les personnels qui y travailleront.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. La détermination de nouvelles compétences pour les collectivités ressort donc du domaine de la loi.

2. NECESSITE DE LEGIFERER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le présent projet de loi précise, dans son article relatif aux facultés pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire, que la compétence pour créer et gérer des centres de santé relève explicitement des communes, des EPCI et des départements.

Afin de renforcer la bonne mise en oeuvre de cette compétence, il convient de renforcer la base légale permettant aux communes, aux EPCI et aux départements d'assurer le recrutement du personnel afin de l'affecter à l'exercice des missions des centres de santé dont elles sont gestionnaires. Les centres de santé emploient des professionnels médicaux, des auxiliaires médicaux (psychologues, ostéopathes, pharmaciens de laboratoire...) et des personnels administratifs. Ainsi, le projet de loi entend donner aux communes, aux EPCI et aux départements la possibilité de recruter et de mettre à disposition des centres de santé, toute catégorie de personnels nécessaire à leur bon fonctionnement.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La nécessité de légiférer réside dans la volonté de permettre aux communes, aux EPCI et aux départements de renforcer le maillage sanitaire du territoire en permettant aux collectivités gestionnaires de centres de santé de recruter le personnel (professionnels médicaux, auxiliaires médicaux et personnels administratifs) et de l'affecter à l'exercice des missions de ces centres.

Cette disposition vient en complément du I de l'article du présent projet de loi, relatif à la faculté pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire, le I visant à préciser au premier alinéa de l'article L. 6323-1-3 du code de la santé publique, que les communes, les EPCI et les départements sont compétents pour créer et gérer des centres de santé. L'attribution spécifique de cette compétence aux communes, aux EPCI et aux départements s'appuie sur leur compétence déjà développée en matière de santé : le département intervenant au titre de la prévention maternelle et infantile, l'accompagnement du grand-âge et du handicap, est en outre un échelon de proximité complémentaire du bloc communal en matière de cohésion sociale et médico-sociale. A titre d'illustration, le conseil départemental de Saône-et-Loire a créé un centre de santé, institué le 21 septembre 2017, disposant d'antennes territoriales. Le conseil départemental de l'Orne a prévu de se lancer dans une démarche similaire.

3. DISPOSITIF RETENU

Les attentes étant fortes, à l'image du département de Saône et Loire, et les besoins constants, il a été décidé de faire évoluer les textes. L'option retenue consiste à fixer explicitement la capacité pour les communes, les EPCI et les départements, compétents pour créer et gérer un centre de santé au titre de l'article L. 6323-1-3 du code de la santé publique, de recruter des professionnels médicaux, auxiliaires médicaux et personnels administratifs, affectés aux centres de santé dont ils sont gestionnaires. Ces personnels, recrutés par les communes, les EPCI et les départements peuvent être des personnels titulaires de la fonction publique ou des professionnels contractuels.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'option retenue consiste à modifier le premier alinéa de l'article L. 6323-1-5 du CSP publique afin de permettre le recrutement des professionnels médicaux, auxiliaires médicaux et personnels administratifs par les communes, les EPCI ou les départements, pour exercer au sein des centres de santé dont ils sont gestionnaires.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette disposition permettra aux communes, aux EPCI et aux départements d'avoir un cadre juridique sécurisé leur permettant de recruter tout professionnel appelé à exercer dans les centres de santé dont ils sont gestionnaires.

Le recrutement de ces professionnels mobilisera les services de ressources humaines à la charge de la collectivité qui assurera le recrutement.

4.3. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La disposition conforte l'efficacité des centres de santé de proximité, profitant à l'ensemble de la population concernée.

5. CONSULTATIONS ET MODALITES D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 34 : Facultés pour les départements de contribuer à la politique publique de sécurité sanitaire

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le département « est compétent pour mettre en oeuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité, au développement social, à l'accueil des jeunes enfants et à l'autonomie des personnes. Il est également compétent pour faciliter l'accès aux droits et aux services des publics dont il a la charge. Il a compétence pour promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale sur le territoire départemental, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des régions et des communes » aux termes de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a supprimé la clause de compétence générale des départements. De ce fait, les départements ne détiennent plus la compétence pour intervenir dans certaines matières relevant du domaine sanitaire et plus particulièrement s'agissant des laboratoires d'analyses départementaux, des organismes à vocation sanitaire (et notamment les groupements de défense sanitaire), de la lutte contre les zoonoses et des centres de santé. Or, les départements sont intervenus dans ces domaines de longue date. Au regard des besoins observés en matière de politiques publiques locales et à la demande des élus et des acteurs locaux, il est nécessaire de prévoir, dans les textes, la compétence du département au plan sanitaire en particulier pour quatre matières.

A - Laboratoire d'analyses départementaux (LAD)

La veille sanitaire est définie par l'article L. 1413-15 du code de la santé publique (CSP) comme l'obligation de « signaler sans délai au directeur général de l'agence régionale de santé les menaces imminentes pour la santé de la population dont ils 97 ( * ) ont connaissance ainsi que les situations dans lesquelles une présomption sérieuse de menace sanitaire grave leur paraît constituée ».

La compétence des départements en matière de veille sanitaire est prévue par l'article L. 201-10 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) 98 ( * ) , dans les termes suivants : « Les départements participent à la veille sanitaire par l'intermédiaire des laboratoires d'analyse départementaux ».

La possibilité d'étendre la compétence des départements aux champs couverts par les laboratoires au-delà de la seule veille sanitaire n'est pas établie par la loi.

En outre, l'article 3 de la loi NOTRe dispose que les régions sont seules compétentes pour « définir les régimes d'aides et pour décider de l'octroi des aides aux entreprises dans la région », cette compétence ne pouvant être déléguée aux départements. Or, les aides financières que peuvent accorder les départements aux laboratoires publics d'analyse (LPA) 99 ( * ) s'assimilent à des aides ayant pour objet la création ou l'extension d'activités économiques 100 ( * ) . Les départements ne sont donc plus habilités à soutenir financièrement les laboratoires publics d'analyse depuis la suppression de la clause de compétence générale par la loi NOTRe du 7 août 2015.

B - Organismes à vocation sanitaire (OVS) et notamment les Groupements de défense sanitaires (GDS)

En matière de politique publique de sécurité sanitaire, les organismes à vocation sanitaire (OVS) sont régis par les articles L.201-9 à L.201-13 du code rural et de la pêche maritime (CRPM). Ils désignent « toute personne morale dont l'objet essentiel est l'amélioration de l'état sanitaire des animaux, des végétaux, des produits végétaux, des aliments pour animaux ou des denrées alimentaires d'origine animale dans le secteur d'activité et l'aire géographique sur lesquels elle intervient » ( Article R201-1 du CPRM).

Plus particulièrement, les GDS reconnus en qualité d'organisme à vocation sanitaire sont des associations départementales d'éleveurs des différentes espèces animales de rente participant à la surveillance sanitaire des animaux et à la prévention des maladies, mission qu'ils exercent parallèlement à des activités de conseil et formation, par exemple à destination des éleveurs récemment installés.

Les GDS se structurent au sein de fédérations régionales qui constituent des interlocuteurs de l'État depuis la reconnaissance de leur statut d'organisme à vocation sanitaire multi espèces. « GDS France » constitue la fédération nationale, chargée plus spécifiquement de missions extérieures.

A titre d'exemple, dans la région Nouvelle-Aquitaine qui constitue la première région agricole française avec 54% des 185 000 exploitations consacrées à l'élevage, l'action des GDS permet de couvrir près de 2,5 millions de bovins, 2,1 millions d'ovins et caprins, 865 000 porcins, 34,3 millions de volailles, 176 000 ruchers, 70 000 équins et 12 000 tonnes de production aquacole. Leur rôle est donc d'autant plus déterminant en matière de santé animale que le maillage territorial des vétérinaires a tendance à se distendre.

Le financement des GDS repose sur une participation forfaitaire des éleveurs majorée d'une cotisation par tête de cheptel et de frais divers. Par ailleurs, si les GDS sont très majoritairement financés par leurs adhérents 101 ( * ) , ils se sont vus confier, par l'État, des missions d'organisation et de contrôle des prophylaxies dans certaines zones d'élevage sensibles (grippe aviaire, brucellose bovine, ...).

La suppression de la clause de compétence générale des départements introduite par la loi NOTRe a mis fin à leur possibilité de soutien historique aux GDS, que les départements demandent à retrouver compte-tenu de leur expérience et de leur expertise reconnue en la matière.

C - Lutte contre les zoonoses

L'ELIZ (Entente de Lutte interdépartementale contre les Zoonoses) a été créée le 1 er septembre 1973 sous le nom d'Entente Interdépartementale de Lutte Contre la Rage.

La constitution de l'Entente est liée à l'épidémie de rage vulpine qui sévissait depuis 1968, affectant 80% des renards roux qui contaminaient à leur tour des animaux domestiques et d'élevage. Elle a été éradiquée depuis 1998 (dernier cas recensé), notamment en raison des campagnes de prophylaxie et des évolutions apportées à ces techniques, qui ont été conduites à l'initiative de l'Entente. L'Entente intervient désormais sur d'autres zoonoses : la leptospirose, l'échinococcose alvéolaire et la fièvre hémorragique avec syndrome rénal (FHSR). Ses missions sont donc, notamment pour ces zoonoses, de coordonner et d'harmoniser les différentes mesures prises en matière de prophylaxie contre les zoonoses (maladies transmissibles de l'animal à l'humain), de concourir à l'information du public, de mettre au point de nouvelles méthodes de prophylaxie et de contribuer à la réalisation d'études écologiques et épidémiologiques pour une meilleure connaissance de la propagation et de la lutte contre différentes zoonoses.

Si sept départements ont constitué l'Entente à l'origine (Ardennes, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Haut-Rhin, Haute-Saône, Territoire de Belfort, Vosges), environ une trentaine de départements en sont aujourd'hui adhérents. Ses actes sont soumis au contrôle de légalité de la préfecture de Meurthe-et-Moselle, lieu d'établissement de son siège social.

Le conseil d'administration du 25 avril 2019 a arrêté les comptes 2018 dont près de 75% des recettes sont issus de la participation des départements. Le concours financier des départements est indispensable à l'équilibre financier de l'ELIZ et, par voie de conséquence, à la pérennité de ses missions.

Le recentrage des compétences des départements, issu de la loi NOTRe, pose une difficulté juridique à la poursuite de l'adhésion à des structures du type de l'Entente de Lutte d'Intervention contre les Zoonoses (ELIZ) .

D - Centres de santé

Les centres de santé sont définis à l'article L. 6323-1 du code de la santé publique, comme des structures sanitaires de proximité chargées, dans une approche parfois pluri professionnelle, de pratiquer des soins de premier et second recours ainsi que des activités de prévention et de diagnostic, dans les locaux du centre ou à l'extérieur.

De même, l'article L. 6323-1-1 du même code leur permet de «  [...]1° Mener des actions de santé publique, d'éducation thérapeutique du patient ainsi que des actions sociales, notamment en vue de favoriser l'accès aux droits et aux soins des personnes les plus vulnérables ou à celles qui ne bénéficient pas de droits ouverts en matière de protection sociale ; 2° Contribuer à la permanence des soins ambulatoires ; [...] 4° Pratiquer des interruptions volontaires de grossesse dans les conditions prévues aux articles L. 2212-1 à L. 2212-9, selon des modalités définies par un cahier des charges établi par la Haute Autorité de santé, dans le cadre d'une convention conclue au titre de l'article L. 2212-2 ;[...] ».

Ils élaborent un projet de santé transmis à l'agence régionale de santé (ARS) et concluent le cas échéant avec celle-ci un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens préalablement à tout versement d'une aide financière. On compte aujourd'hui plus de 2 200 centres de santé (dont près de 430 centres pluriprofessionnels).

A l'exception des centres de soins infirmiers, ils sont implantés majoritairement en milieu urbain. Les professionnels de santé y sont salariés.

Nonobstant les dispositions de l'article L. 6323-1-3 du CSP, selon lesquelles les centres de santé peuvent être créés et gérés par des collectivités locales 102 ( * ) , il existe une certaine incertitude juridique quant à la capacité des départements à le faire. En effet, cette compétence n'apparaît pas explicitement parmi celles prévues à l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) ( « mettre en oeuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité » ; « promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale » ). Il résulte de la suppression de leur clause de compétence générale que leur champ d'intervention est limitativement défini par la loi.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. La détermination de nouvelles compétences, pour les départements et les communes, ressort du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le département s'est vu attribuer un rôle de chef de file en matière sociale qu'il apparaît opportun de compléter de compétences au plan sanitaire pour lui permettre d'agir plus efficacement et de manière transversale dans les champs sanitaire et social.

Il est ainsi proposé de préciser l'action des départements en matière de laboratoires d'analyse départementaux, de soutien aux groupements de défense sanitaire, de lutte contre les zoonoses et de création et gestion des centres de santé.

A - Laboratoire d'analyses départementaux (LAD)

Le législateur n'a pas formellement reconnu de compétence aux départements s'agissant des LAD mais, les dispositions d'autres textes tendent à justifier une telle compétence, sans pour autant que cette convergence soit de nature à constituer une base juridique suffisamment solide. Ainsi :

- d'une part, la compétence des départements en matière de solidarité territoriale, qui ressort de l'article L. 3211-1 du CGCT précité, peut justifier qu'ils apportent leur soutien financier à des LAD qui réalisent une partie de leurs missions sur des territoires excentrés, présentant une rentabilité insuffisante pour les laboratoires privés exerçant des missions similaires ;

- d'autre part, la compétence des départements en matière de surveillance de la qualité de l'environnement au sein des espaces naturels sensibles issue de l'article L. 113-8 du code de l'urbanisme précité, poursuit des objectifs similaires à ceux des « laboratoires publics d'analyse » mentionnés à l'article L. 2215-8 du CGCT en matière de santé végétale et de qualité environnementale, cette dénomination renvoyant en réalité aux laboratoires d'analyses départementaux.

Dès lors que les missions des LAD recoupent celles reconnues par le législateur aux départements, il convient donc d'expliciter dans la loi la pleine compétence des départements pour gérer ces laboratoires.

B - Groupements de défense sanitaire et lutte contre les zoonoses

Là encore, la compétence reconnue par le législateur aux départements en matière de solidarité territoriale justifie de permettre aux départements de palier l'éloignement géographique de certains territoires en assurant, par le biais du soutien aux GDS, un maillage suffisamment étroit et équitable en matière de surveillance sanitaire. De surcroît, une telle extension des compétences départementales permettrait, si elle est articulée avec les deux autres volets de cette disposition (LDA et ELIZ) de faire des départements les acteurs centraux des politiques de prévention des risques sanitaires.

L'approche est identique s'agissant des ELIZ, qui s'inscrivent pleinement dans l'articulation envisagée des compétences en matière sanitaire. Les départements ont, comme d'ailleurs les services de l'État et d'autres collectivités territoriales, l'obligation de signaler sans délai les menaces imminentes pour la santé de la population dont ils ont connaissance ainsi que les situations dans lesquelles une présomption sérieuse de menace sanitaire grave leur paraît constituée (art. L. 1413-15 du CSP) ; il convient donc de les doter des moyens nécessaires à leur action.

C - Centres de santé

La rédaction actuelle de l'article L. 3211-1 du CGCT ne permet pas de déduire de façon sécurisée la compétence du département pour ouvrir et gérer des centres de santé.

Toutefois une proximité réelle existe entre les champs de compétences respectifs des départements et des centres de santé, qui justifie la clarification apportée par ces dispositions :

- les missions prévues à l'article L. 6323-1 du CSP répondent, pour certaines d'entre elles, aux attributions des départements en matière de protection maternelle et infantile telles qu'elles ressortent de l'article L. 2112-2 du CSP (notamment des 1°, 2°, 4° et 4°bis relatifs aux actions de prévention médico-sociale en faveur des enfants de zéro à six ans, des femmes enceintes et des parents) mais la difficulté réside dans ce que les centres de santé peuvent accueillir tout type de public , ce qui excède donc les compétences reconnues par la loi aux départements en matière de santé publique ;

- la mission prévue à l'article L. 6323-1-1 du CSP, consistant à « favoriser l'accès aux droits et aux soins des personnes les plus vulnérables » , peut être rapprochée de la compétence du département en matière de prise en charge des publics en situation de fragilité (2 ème alinéa de l'article L. 3211-1 du CGCT) mais sous la réserve que les centres de santé accueillent tout public, y compris ceux qui ne sont pas à la charge du département ;

- de même, la pratique d'interruptions volontaires de grossesse prévue au 4° de l'article L. 6323-1-1 du CSP peut être rapprochée d'une compétence du département dans le cadre des centres de planification et d'éducation familiale (CPEF) en application de l'article L. 2212-2 du CSP ;

- enfin, une lecture très extensive de la référence à la « solidarité territoriale » mentionnée à l'article L. 3211-1 du CGCT autoriserait à considérer les départements fondés à soutenir financièrement les centres de santé, compte tenu de l'importance des missions qu'ils exercent et de leur capacité budgétaire réduite par rapport à d'autres structures financées par les agences régionales de santé - ARS (ex : maisons de santé).

Ainsi, trois arguments soutiennent la nécessité de permettre aux départements d'ouvrir et créer des centres de santé (« centres départementaux de santé ») :

- en opportunité, l'ouverture en priorité aux publics habitant dans des secteurs marqués par la désertification médicale ;

- les centres de santé contribuent à la mise en oeuvre des compétences départementales (PMI, handicap, grand-âge, personnes en situation de grande précarité) ;

- l'article L. 6323-1-3 du CSP, en renvoyant uniformément aux « collectivités territoriales » se positionne à rebours de la logique clarificatrice de la loi NOTRe et doit, par conséquent, être précisé.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le premier objectif, commun à l'ensemble des mesures de l'article, est de parfaire la décentralisation et de poursuivre la clarification des compétences dans la continuité de la loi NOTRe.

Les dispositions relatives au triptyque LAD, GDS et ELIZ visent à garantir aux départements les moyens nécessaires à la mise en place d'une politique globale en matière de sécurité sanitaire :

- d'une part, le financement des LAD et le soutien aux GDS leur permettront, au niveau local, de pouvoir s'appuyer sur des expertises complémentaires (les laboratoires et les agriculteurs) et une connaissance accrue du territoire pour prévenir la survenance de crises sanitaires et faciliter leur prise en charge le cas échéant ;

- d'autre part, l'adhésion à l'ELIZ leur permettra de bénéficier des retours d'expériences et des bonnes pratiques d'autres départements français ayant affronté des crises similaires.

Il s'agit donc d'assurer la pérennité de ces structures pour garantir leur pleine opérabilité.

Les dispositions relatives aux centres de santé visent, quant à elles, à renforcer la capacité des départements et des collectivités exerçant les compétences relevant des départements, et du bloc communal à intervenir en matière de santé de proximité en ce qu'elles leur permettent de :

- remédier à la désertification médicale comme c'est le cas avec l'initiative du département de Saône-et-Loire de constituer un réseau de centres de santé départementaux destinés prioritairement aux usagers qui sont géographiquement éloignés des points d'accès aux soins (5 centres de santé et 44 antennes permettent de couvrir les territoires les plus exposés avec un effectif de 30 médecins) ;

- améliorer la détection des publics les plus vulnérables et de mettre en place des actions d'accompagnement visant à prévenir la dégradation actuelle de leur situation et donc la sensibilité future de celle-ci ;

- consolider la situation juridique des centres de santé qui ont été ouverts à l'initiative de ces deux niveaux de collectivités territoriales et pérenniser leur existence et donc la situation des personnels médicaux qui ont accepté de les rejoindre.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a été envisagé de maintenir la situation en l'état pour conserver la clarification des compétences apportées par la loi NOTRe et permettre aux départements de se concentrer sur leurs missions de solidarité. Toutefois, ce choix n'aurait pas permis de tenir suffisamment compte de l'importance que revêtent les politiques sociales et sanitaires dans les attentes exprimées par nos concitoyens et la nécessaire territorialisation de ces politiques publiques.

S'agissant des seuls centres de santé, il aurait pu être envisagé d'en permettre également l'ouverture et la gestion par les régions mais cette hypothèse a été écartée, d'une part, pour conserver la logique clarificatrice apportée par la loi NOTRe et, d'autre part, pour éviter toute logique concurrentielle entre collectivités et toute forme d'asymétrie dans les moyens déployés, qui nuiraient en outre à la lisibilité de l'action publique.

Il a également été envisagé de ne modifier que les codes relatifs aux missions pour lesquelles ces dispositions entendent renforcer le rôle du département (CRPM, CSP, etc.) sans toucher au CGCT. Toutefois, il est apparu souhaitable de saisir cette occasion pour renforcer les compétences du département, dans une perspective de lisibilité du droit.

3.2. OPTION RETENUE

Le dispositif retenu consiste à :

- renforcer les compétences du département en y intégrant explicitement la possibilité de conduire une politique de sécurité sanitaire à travers la gestion de LAD, le soutien de GDS et la possibilité de rejoindre l'ELIZ. De même, il est explicitement prévu que le département a compétence pour promouvoir l'accès aux soins de proximité ;

- renforcer le maillage territorial en points d'accès aux soins de proximité identifiant le bloc communal et les départements comme niveaux de collectivités compétents pour ouvrir et gérer des centres de santé.

Dès lors, ces dispositions permettent un gain d'efficacité dans la mise en place de politiques publiques de proximité, sans altérer la logique clarificatrice apportée par la loi NOTRe.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Dans cette logique de clarification, le premier alinéa de l'article L. 6323-1-3 du CSP est modifié pour remplacer la référence générale aux collectivités territoriales par une référence précise aux communes et aux départements.

En outre, l'article L. 3211-1 du CGCT est modifié :

- d'une part, au dernier alinéa les mots : « et la cohésion territoriale » sont remplacés par les mots : « la cohésion territoriale et l'accès aux soins de proximité » ;

- d'autre part, il est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Il contribue à la politique de sécurité sanitaire dans les conditions prévues à l'article L. 201-10-1 du code rural et de la pêche maritime ».

Enfin, le code rural et de la pêche maritime est modifié :

- d'une part, le V de l'article L. 201-10 est abrogé ;

d'autre part, il est créé un article L. 201-10-1 ainsi rédigé : « Art. L. 201-10-1. - Les départements participent à la politique publique de sécurité sanitaire par l'intermédiaire des laboratoires d'analyse départementaux, de l'organisme à vocation sanitaire et de l'organisation vétérinaire à vocation technique mentionnés à l'article L. 201-9 et de leurs sections départementales ainsi que des organismes de lutte et d'intervention contre les zoonoses ».

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

L'intervention et le soutien financier des départements sont nécessaires pour le maintien de la plupart des GDS et donc de l'activité agricole.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le département voit ses compétences en matière sanitaire et sociale renforcées avec la possibilité de gérer des LAD, d'intervenir en faveur des GDS et de rejoindre des ententes de lutte interdépartementale contre les zoonoses.

Par ailleurs, la compétence pour créer et gérer des centres de santé - reconnue actuellement par le CSP uniformément à l'ensemble des collectivités territoriales - est précisée pour les communes et les départements.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La compétence reconnue au bloc communal et aux départements pour ouvrir et gérer des centres de santé va permettre le renforcement du maillage territorial en points d'accès aux soins de proximité au bénéfice des particuliers.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, notamment dans les collectivités d'Outre-mer qui ont choisi d'appliquer le code de la santé publique, le code rural et de la pêche maritime.

CHAPITRE II - COHÉSION SOCIALE

Article 35 : Expérimentation de la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA)

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 a initié le principe de chef de filât des collectivités dans certains domaines à l'alinéa 5 de l'article 72 de la Constitution : « Aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre. Cependant, lorsque l'exercice d'une compétence nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales, la loi peut autoriser l'une d'entre elles ou un de leurs groupements à organiser les modalités de leur action commune. »

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a traduit ce principe dans le champ de l'action sociale, en son article 49, en confiant au département la définition et la mise en oeuvre de la politique d'action sociale : « Le département définit et met en oeuvre la politique d'action sociale, en tenant compte des compétences confiées par la loi à l'Etat, aux autres collectivités territoriales ainsi qu'aux organismes de sécurité sociale. Il coordonne les actions menées sur son territoire qui y concourent. »

L'article 3 de la loi n°2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) a désigné ensuite clairement le département comme chef de file dans ce domaine : « III. Le département est chargé d'organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l'action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l'exercice des compétences relatives à : 1° L'action sociale, le développement social et la contribution à la résorption de la précarité énergétique ; 2° L'autonomie des personnes ; 3° La solidarité des territoires. »

L'article 94 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a réaffirmé les compétences du département en matière d'action sociale en modifiant l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) et en disposant que : « le conseil départemental règle par ses délibérations les affaires du département dans les domaines de compétences que la loi lui attribue. Il est compétent pour mettre en oeuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité, au développement social, à l'accueil des jeunes enfants et à l'autonomie des personnes. Il est également compétent pour faciliter l'accès aux droits et aux services des publics dont il a la charge. Il a compétence pour promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale sur le territoire départemental, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des régions et des communes. »

Les départements sont donc consacrés par la loi chefs de file en matière d'action sociale.

La loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion a institué le revenu de solidarité active (RSA) 103 ( * ) , en remplacement du revenu minimum d'insertion (RMI), de l'allocation de parent isolé (API) et de différents mécanismes d'intéressement à la reprise d'activité.

Selon l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles (CASF), le RSA « a pour objet d'assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, de lutter contre la pauvreté et de favoriser l'insertion sociale et professionnelle ». Il constitue un dernier filet de sécurité pour les personnes totalement dépourvues de ressources ou avec des ressources très faibles.

Conformément à l'article L. 262-13 du CASF, le RSA est attribué par le président du conseil départemental du département dans lequel le demandeur réside ou a élu domicile. Le conseil départemental peut toutefois déléguer l'exercice de tout ou partie de cette compétence.

Dans les faits, l'instruction du RSA peut donc être effectuée par les organismes suivants, conformément aux articles L. 262-15 et L. 262-16 du CASF :

- les services du département ou l'organisme chargé du service du RSA, à savoir les caisses d'allocations familiales (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (MSA) pour leurs ressortissants ;

- le centre communal ou intercommunal d'action sociale (CCAS/CIAS) du lieu de résidence du demandeur (lorsqu'il a décidé d'exercer cette compétence) ;

- des associations ou des organismes à but non lucratif (lorsque le président du conseil départemental leur a délégué cette compétence par le biais d'une convention) ;

- Pôle Emploi, dès lors que son conseil d'administration a décidé d'instruire les demandes de RSA, selon les modalités précisées dans une convention conclue entre Pôle emploi, la Caisse nationale des allocations familiales et la Caisse centrale de la mutualité agricole.

De même, le versement du RSA est assuré par les CAF et, pour leurs ressortissants, par les caisses de MSA, selon l'article L. 262-16 du CASF. Une convention conclue entre le département et ces organismes précise les conditions de ce versement.

L'article L. 262-24 du CASF confie le financement du RSA aux départements. L'article L. 262-25 du CASF prévoit une convention entre le département et les CAF et les caisses de MSA pour définir notamment les conditions dans lesquelles le RSA est servi et contrôlé et dans lesquelles est assurée la neutralité des flux financiers pour la trésorerie de ces caisses.

Conformément à l'article L. 262-29 du CASF, le président du conseil départemental est chargé de l'orientation des bénéficiaires du RSA, en fonction de leur situation personnelle (disponibilité pour occuper un emploi, difficultés de logement ou de santé) et de leur insertion

1,95 millions de foyers sont bénéficiaires du RSA, (3,87 millions de personnes couvertes) [1] , pour un coût annuel de 11,263 milliards d'euros sur le programme 304, correspondant à une dépense des collectivités territoriales en 2019 à hauteur de 11,08 milliards d'euros . Depuis 2014, la dépense moyenne annuelle de RSA exposée par les départements s'élève à près de 10,6 milliards d'euros.

La recentralisation du financement et du service du RSA, ainsi que de l'orientation des bénéficiaires, est déjà intervenue en Guyane et Mayotte au 1 er janvier 2019 (article 81 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019) et à La Réunion à compter du 1 er janvier 2020 (article 77 de la loi de finances pour 2020 du 28 décembre 2019 pour 2020) en raison de leurs spécificités territoriales, sur le fondement de l'article 73 de la Constitution. Les modalités financières du dispositif de recentralisation, axées autour du principe de neutralité budgétaire de la mesure pour l'Etat, sont détaillées aux articles de loi de finances précitées.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Selon l'article 37-1 de la Constitution, « la loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental ».

Les expérimentations ainsi envisagées interviennent dans le domaine de compétence normative de l'État, quand bien même elles peuvent être mises en oeuvre tant par ce dernier que par les collectivités territoriales.

L'expérimentation portant sur la recentralisation du RSA a pour objet de confier des compétences aujourd'hui exercées par les départements, aux caisses d'allocations familiales, agissant pour le compte de l'État. Elle s'inscrit donc dans le cadre de l'article 37-1 de la Constitution.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le poids du RSA dans les finances départementales constitue une préoccupation pour certains départements confrontés à une concentration d'allocataires sur leur territoire.

La crise sanitaire et économique actuelle risque d'étendre ces difficultés. Avec les confinements et la dégradation du marché du travail, le nombre de demandeurs a crû de manière importante sur l'année 2020, conduisant à une augmentation du nombre de bénéficiaires. Le nombre d'allocataires du RSA atteint 2,1 millions en octobre 2020, soit une augmentation de 8,5 % par rapport à octobre 2019 104 ( * ) .

Cette augmentation s'explique tant par l'augmentation du nombre de demandes que par un maintien conséquent de bénéficiaires dans le dispositif. Les mesures de maintien de droit prises dans le cadre de la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 ont, en parallèle, permis de conserver le filet de sécurité pour les bénéficiaires empêchés, par le confinement et la fermeture des services publics, de mettre à jour leur déclaration trimestrielle de ressources (DTR). Elles n'ont pas de conséquences sur le nombre de bénéficiaires à terme, les bénéficiaires devant mettre à jour leur DTR après les confinements.

Le poids du financement du RSA dans le budget des départements a un impact significatif sur les actions menées au titre de leur rôle de chef de file de l'action sociale. Il contraint fortement leur budget de fonctionnement, réduisant de facto leurs marges financières pour développer des propositions d'insertion aux bénéficiaires du RSA.

En outre, l'efficacité des politiques d'insertion est régulièrement interrogée.

Ainsi, le 15 juin 2018, dans le cadre de l'élaboration de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, le Premier Ministre a adressé une lettre de mission à Mathieu KLEIN, président du conseil départemental de Meurthe et Moselle, afin d'identifier les bonnes pratiques de terrain permettant une insertion efficace des bénéficiaires du RSA. Le Premier Ministre déplorait alors l'échec de notre modèle « à ramener à l'activité les bénéficiaires de minima sociaux », constatant alors que « les dépenses actives d'accompagnement ont été réduites de 40% depuis 2008 alors que les dépenses passives d'allocation ont presque été multipliées par deux depuis 2008 ».

En conséquence, le Gouvernement s'est engagé dans le déploiement d'un Service Public de l'Emploi et de l'Insertion (SPIE), à la suite d'une concertation nationale, lancée le 9 septembre 2019. Le 13 septembre 2018, à l'occasion de la présentation de la stratégie pauvreté, le Premier ministre avait en effet souhaité « repenser en profondeur l'organisation de l'ensemble de nos politiques en [matière d'insertion] en visant un objectif majeur : la création d'un véritable service public de l'insertion, dont l'État serait le garant. »

Dans le cadre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, le SPIE a pour ambition de renforcer la coopération des acteurs pour rendre effectif le droit à un accompagnement personnalisé vers l'activité et l'emploi. Son déploiement s'appuie sur le volontariat des territoires, en premier lieu des départements, sur la base d'une expérimentation, lancée en 2020 sur 14 territoires, et sur un appel à manifestation d'intérêt, qui concernera 30 nouveaux territoires en 2021.

Les départements étant compétents sur l'ensemble du dispositif RSA, il est nécessaire de passer par la loi pour permettre l'expérimentation de sa recentralisation.

Cette recentralisation du RSA est partielle. Elle concerne l'instruction, l'attribution et le financement du RSA. L'orientation et l'accompagnement des bénéficiaires demeurent de la compétence du département.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure proposée permettra aux départements volontaires de ne plus avoir la charge de l'instruction, de l'attribution et du financement du RSA. En contrepartie, ces derniers pourraient mobiliser les moyens ainsi dégagés sur l'orientation et l'accompagnement des bénéficiaires dans le cadre de leur compétence en matière d'insertion.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a été envisagé de :

- recentraliser le RSA pour tous les départements. Cette hypothèse n'a pas été retenue, de nombreux départements souhaitant conserver cette compétence qui relève du bloc de compétences sociales des départements ;

- recentraliser le RSA de la phase d'instruction des demandes à celle de suivi des bénéficiaires. Cette piste a été écartée en raison du rôle de chef de file des départements dans le champ de l'action sociale. Leur compétence en matière d'insertion des bénéficiaires demeure à ce titre une compétence essentielle pour l'ensemble de leur action dans le champ social.

3.2. OPTION RETENUE

Il est proposé d'expérimenter, dès le 1er janvier 2022 et pour une durée de cinq ans, avec les départements volontaires qui se détermineront au regard des indicateurs précisés par décret en Conseil d'Etat le transfert, pour le compte de l'État, aux CAF et pour leurs ressortissants, aux caisses de MSA de l'instruction administrative de la demande, de la décision d'attribution, de l'examen des éventuelles réclamations et recours contentieux, du contrôle administratif, du recouvrement des indus portant sur le versement et du financement du RSA.

Pour ce faire, il est dérogé aux règles de gestion et de financement du RSA définies aux articles L. 262-13, L. 262-15, L. 262-22, L. 262-24, L. 262-25 et L. 262-26 du CASF.

L'orientation des bénéficiaires, prévue à l'article L. 62-29 du même code, continuera de relever de la compétence des départements.

Cette expérimentation fera l'objet, préalablement à sa mise en oeuvre, d'une convention entre le représentant de l'État dans le département et le président du conseil départemental du département volontaire, convention qui déterminera notamment les modalités du renforcement du service public de l'orientation des bénéficiaires ainsi que des dispositifs d'insertion mis en oeuvre par le département. Dans le cadre de cette convention, le président du conseil départemental remettra annuellement au représentant de l'État dans le département un rapport de suivi de la mise en oeuvre de cette convention et des résultats en matière d'insertion notamment en matière d'accès des bénéficiaires à l'emploi et à la formation. Ce rapport est soumis à l'approbation préalable de l'assemblée délibérante du département.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les modalités financières de l'expérimentation seront précisées en loi de finances.

4.2. IMPACTS BUDGÉTAIRES

La disposition aura pour effet d'augmenter les charges de l'État. Outre la reprise du financement du stock par symétrie avec le financement des transferts de compétences lorsqu'ils s'opèrent de l'Etat vers les collectivités territoriales, l'État devra également prendre à sa charge la dynamique de la dépense de RSA propre à chaque département volontaire.

En 2019, la dépense nette totale de RSA exposée par les collectivités territoriales s'élevait à 11,08 milliards d'euros. A titre de comparaison, la dépense de RSA prise en charge par l'État cette même année dans les territoires ultra-marins de Mayotte et de Guyane s'élevait à 171,4 millions d'euros.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La reprise du financement du RSA par l'État va conduire à diminuer les dépenses de fonctionnement des départements volontaires pour conduire cette expérimentation et donc à améliorer leur situation financière.

En 2019, les dépenses de RSA représentent en moyenne 15,74 % des recettes réelles de fonctionnement (RRF) des collectivités territoriales, avec cependant d'importantes disparités en fonction des territoires. Les RRF sont un indicateur fiable pour mesurer les ressources dont disposent les collectivités territoriales. Le ratio s'établit à 26,70 % pour la Seine-Saint-Denis (+ 11 points par rapport à la moyenne).

Pour illustration, le tableau ci-dessous présente les 10 départements présentant le ratio de dépenses le plus important par rapport à leurs RRF :

Pour ces départements, le poids des dépenses de RSA dans les RRF est supérieur à la moyenne nationale.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article L. 200-3 du code de la sécurité sociale, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales.

En application de l'article L. 723-12 du code rural et de la pêche maritime, les dispositions envisagées ont été soumises à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions envisagées s'appliqueront dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions s'appliquent en métropole et dans les Départements d'Outre-mer pour lesquels la recentralisation du RSA n'a pas encore eu lieu.

5.2.3. Textes d'application

Les modalités de l'expérimentation et le contenu de la convention seront déterminés par décret en Conseil d'Etat.

Article 36 : Compétence du département en matière d'habitat inclusif

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La question de la perte d'autonomie, liée à l'âge ou au handicap 105 ( * ) , nécessite d'adapter les logements, dans un contexte où 21 millions de personnes auront plus de 60 ans en France en 2030 106 ( * ) , et de rechercher des solutions adaptées aux personnes âgées ou handicapées en dépassant le caractère binaire de l'offre, classiquement séparée entre le logement totalement autonome et l'hébergement dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

C'est pourquoi l'habitat inclusif a été introduit par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite « ELAN », afin de répondre à cette problématique.

L'habitat inclusif est destiné aux personnes handicapées et aux personnes âgées qui font le choix, à titre de résidence principale, d'un mode d'habitation regroupé, entre elles ou avec d'autres personnes, et il est assorti d'un projet de vie sociale et partagée, défini par un arrêté du 24 juin 2019. Ce projet de vie sociale et partagée, qui a pour objet de favoriser le « vivre ensemble » et de limiter le risque d'isolement des habitants en leur permettant de s'insérer dans la vie du quartier, se traduit par des activités de convivialités, ludiques ou culturelles, au sein ou à l'extérieur de l'habitat inclusif. Il est construit en lien avec les habitants, et un animateur salarié peut intervenir pour le mettre en oeuvre.

À ce jour, plus de 170 projets sont recensés sur l'ensemble du territoire, et le déploiement de cette nouvelle forme d'habiter devrait continuer à s'accélérer grâce aux nouvelles mesures mises en oeuvre, telle que l'expérimentation de l'aide à la vie partagée issue de la loi n° 2020-1576 de financement de la sécurité sociale de 2021 du 14 décembre 2020.

Pour financer l'animation du projet de vie sociale et partagée, un forfait « habitat inclusif » a été créé par l'article 129 de la loi ELAN. Le décret n°2019-629 du 24 juin 2019 en précise les conditions et modalités de versement. Ainsi, le forfait est attribué par l'agence régionale de santé à un porteur de projet ayant répondu à un appel à candidatures, pour toute personne éligible au forfait résidant au sein de l'habitat inclusif. Le forfait varie selon le degré de prise en charge prévue par le projet de vie sociale et partagée, notamment évalué en fonction de la durée de présence du professionnel en charge de l'animation de la vie sociale et partagée, de la nature et des caractéristiques des actions identifiées, et des partenariats conclus avec les acteurs locaux.

Le montant individuel varie entre 3000€ et 8000€ par an et par habitant, dans une limite de 60 000€ par habitat inclusif.

Une instruction du 4 juillet 2019 à destination des Agences régionales de santé et des services de l'Etat en charge des questions de logement et de cohésion sociale précise les modalités de mise en oeuvre de ce décret.

En outre, les besoins exprimés au niveau local sont pris en compte dans les programmes locaux de l'habitat (PLH), élaborés par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, qui doivent préciser « les réponses apportées aux besoins particuliers des personnes en situation de perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap, par le développement d'une offre nouvelle et l'adaptation des logements existants », en application de l'article L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH).

Au niveau départemental, l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que le département « est compétent pour mettre en oeuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité, au développement social, à l'accueil des jeunes enfants et à l'autonomie des personnes ». Il intervient de différentes façons en matière d'habitat ou d'adaptation du logement au vieillissement de la population :

- à travers la mise en place d'une conférence des financeurs de l'habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées qui recense les initiatives locales et définit un programme coordonné de financement de l'habitat inclusif, dont le financement par le forfait mentionné à l'article L. 281-2 du code de l'action sociale et des familles (CASF) ;

- en octroyant de manière expérimentale dans les départements volontaires, pour la période 2021-2022, une nouvelle aide relative à l'« aide à la vie partagée » (AVP) à tout habitant d'un habitat inclusif dont la personne morale porteuse du projet a conclu, pour cet habitat, une convention avec le département ;

- grâce au plan départemental de l'habitat (PDH), prévu aux articles L. 302-10 à L. 302-12 du CCH, qui assure la cohérence entre les politiques d'habitat menées dans les territoires couverts par un PLH et celles menées dans le reste du département.

1.2. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Lors de la concertation « grand âge et autonomie » pilotée par Dominique Libault à l'automne 2018 107 ( * ) , des expériences étrangères ont été présentées au cours d'un atelier consacré au cadre de vie et à l'inclusion sociale, sans pour autant qu'elles soient immédiatement transposables.

Ainsi, les pays nordiques (Suède, Danemark, Finlande et Norvège) se sont fixés des priorités dans le cadre de la mise en oeuvre des politiques publiques destinées à faire face au vieillissement de la population :

- le maintien à domicile, qui nécessite des normes relatives au logement adapté ainsi qu'une grande diversité de solutions (centre d'accueil de jour, centre de répit, logements groupés, logements avec des services collectifs, logements médicalisés de courte durée en proximité, maisons de retraite) ;

- l'organisation d'activités sportives adaptées et d'activités culturelles avec un accès facilité ;

- l'organisation de la vie citoyenne par l'intermédiaire des conseils des séniors qui font l'objet d'une consultation obligatoire pour toutes les mesures les concernant.

D'autres projets sont également développés en Allemagne à l'échelle des quartiers (« Viertel »). Ces projets s'appuient sur les bailleurs sociaux qui prennent en charge le coût d'une antenne de service d'aide et d'assistance 24H/24, et d'un dispositif de télémédecine. Ils prévoient également un espace de rencontres « Wohn Café » ainsi que des chambres d'hôtes pour l'accueil de la famille et des proches.

A Hambourg, le programme mis en place par la ville pour répondre à la problématique de la démence concerne ainsi plus de 700 personnes, accueillies en colocation au sein d'une quarantaine d'immeubles dédiés aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Ces habitations sont pleinement intégrées dans l'organisation du quartier, fonctionnant avec l'appui d'une cellule de coordination constituée d'un politologue et d'un gérontologue. Par ailleurs, le dispositif d'accompagnement des personnes atteintes d'Alzheimer est assuré par la caisse d'assurance des soins de longue durée.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le vieillissement de la population française se poursuit, avec une progression de 4 points en vingt ans de la part des personnes âgées d'au moins 65 ans, et nécessite d'adapter les solutions de prise en charge, y compris sous l'angle du logement 108 ( * ) . Le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans augmentera de 42% entre 2015 et 2030 et le nombre de personnes très dépendantes (groupe iso-ressources 1 et 2) sera multiplié par 2 entre 2010 et 2060. Il est donc nécessaire d'engager un changement profond du modèle d'accompagnement à domicile des personnes âgées et des personnes handicapées.

Les départements font face à des situations très hétérogènes 109 ( * ) , ce qui est particulièrement visible en matière de besoins en logement ou hébergement spécifiques, liés aux problématiques sociales ou de vieillissement de la population. Le fait de pouvoir rester chez soi ou de bénéficier de son propre logement, indépendamment de son âge ou de son handicap, pourrait constituer une solution commune à ces problématiques.

L'accroissement des situations de dépendance et la montée du risque d'isolement conduisent à mettre en place des solutions innovantes qui répondent à la fois à l'impératif de l'accès au logement et à l'objectif de la mixité sociale. Le dispositif de l'habitat inclusif, qui constitue l'une de ces solutions, souffre toutefois d'un manque de visibilité. Un appui institutionnel permettrait à ce dispositif de se déployer plus largement.

Le rapport Piveteau-Wolfrom 110 ( * ) relatif à une stratégie de déploiement à grande échelle de l'habitat inclusif, remis au Premier ministre en juin 2020, souligne les insuffisances de la conférence des financeurs de l'habitat inclusif et la nécessité de renforcer le dispositif de planification stratégique. Pour ce faire, il préconise notamment de prendre acte de la pluralité des acteurs compétents à l'échelon local et de mettre en place, au niveau de chaque territoire départemental, une coordination des politiques qui concourent à la prise en charge des publics concernés.

De même, le rapport Libault, issu de la concertation « grand âge et autonomie » et remis au Premier ministre le 28 mars 2019, mentionne le nécessaire appui au développement de l'habitat inclusif, en tant que réponse au besoin de construire une nouvelle offre d'accompagnement et de soins recentrée sur le domicile et de garantir le libre choix de la personne âgée.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le dispositif proposé consiste à favoriser, en le coordonnant, le développement de l'habitat inclusif ainsi que l'adaptation du logement au vieillissement de la population, sous l'impulsion du département.

Il s'inscrit dans la logique de la réforme du grand âge envisagée actuellement qui a notamment pour objectif de favoriser le maintien à domicile et de créer un droit à vieillir chez soi. Dominique Libault rappelait les objectifs poursuivis par cette réforme en ces termes : « Aider nos parents à vivre debout, avec les autres, dans la dignité, ne doit pas être une préoccupation marginale mais être au coeur de notre pacte social car elle engage, non seulement le bien-être des personnes qui nous sont chères, mais la vision que nous avons de notre société, de l'égalité femme/homme, de notre vivre ensemble, de notre vie individuelle et collective. Atteindre les objectifs du « bien-être du grand âge pour tous » et la prise de conscience de la très grande majorité de nos concitoyens, pour beaucoup confrontés à ce sujet avec leurs proches, de la nécessité d'agir et de transformer notre façon de faire. Transformation des liens intergénérationnels, transformation de l'offre qui ne peut se réduire à l'isolement chez soi ou en établissement (...) » 111 ( * ).

Au cours de la concertation « grand âge et autonomie » précitée, les participants ont fait part de leurs attentes en matière de maintien à domicile, qui est vécu comme une manière d'éviter le déracinement associé à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et apparaît comme une façon de préserver une sphère d'autonomie et de liberté (rythme de sommeil, d'alimentation, etc.). Il permet aussi de limiter les coûts de la prise en charge par rapport à l'établissement.

Le développement de l'habitat inclusif participe ainsi aux réponses apportées en faveur du maintien à domicile des personnes âgées, de l'inclusion des personnes handicapées en milieu ordinaire ainsi que du développement de la mixité des publics, notamment intergénérationnelle, dans le cadre des politiques de l'habitat. Il s'agit également d'un levier d'évolution et/ou de transformation de l'offre sociale et médico-sociale qui s'inscrit en complémentarité de l'offre existante. Le développement d'offres variées d'habitat permet également de mieux répondre aux différents types de situations, l'habitat inclusif permettant d'élargir les choix d'accompagnement de ces personnes qui ne se résument plus uniquement au domicile seul ou à l'établissement.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Concernant la coordination du développement de l'habitat inclusif, seule l'option législative était envisageable dans la mesure où il s'agit de l'ajouter aux compétences des départements, définies à l'article L. 3211-1 du CGCT.

Plusieurs options ont en revanche été envisagées pour disposer d'un outil départemental de planification et de programmation en matière d'habitat inclusif :

- prévoir un volet habitat inclusif au sein des plans départementaux d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées (PDALHPD) ;

- créer un volet habitat inclusif au sein des schémas départementaux de l'organisation sociale et médico-sociale ;

- renforcer la prise en compte de l'habitat inclusif au sein des plans départementaux de l'habitat.

3.2. OPTION RETENUE

Pour répondre au besoin de coordination du développement de l'habitat inclusif et de l'adaptation du logement au vieillissement de la population, l'échelon départemental, par sa bonne appréhension de ses territoires et sa connaissance des besoins spécifiques en matière de dépendance, apparaît le plus adapté.

La faculté pour le département de coordonner le développement de l'habitat inclusif et l'adaptation du logement au vieillissement de la population est le corollaire de ses compétences en matière d'« aide à la vie partagée » ou issues de la conférence des financeurs.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 3211-1 du CGCT.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La présente disposition vise à soutenir la mise en oeuvre de la politique locale de l'habitat, en tenant compte des besoins en matière d'habitat inclusif. Elle étend le champ des compétences des départements en matière d'action sociale et d'habitat, et nécessitera, à ce titre, que les départements s'organisent pour mettre à disposition les moyens utiles à la coordination du développement de l'offre de logements adaptés. Cet article constitue un outil à la disposition du département, complémentaire de la conférence des financeurs de l'habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées ainsi que des conventions, rédigées entre les conseils départementaux et les porteurs de projet, visant à mettre en oeuvre l'aide à la vie partagée.

4.3. IMPACTS SOCIAUX

La présente mesure permettra d'accélérer le développement de l'habitat inclusif, c'est-à-dire de solutions pour les personnes handicapées qui ne souhaitent pas être hébergées en établissement, veulent conserver un logement propre, mais qui ne sont pas assez autonomes pour vivre seules ou ne souhaitent pas se retrouver isolées.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mise en oeuvre de la mesure permettra de répondre aux attentes des personnes handicapées et des personnes âgées en terme d'aide, d'accompagnement, et de services associés au logement, dans un environnement adapté et sécurisé qui garantisse conjointement inclusion sociale et vie autonome tout en restant au domicile.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes. Le Conseil national de l'habitat a également été consulté.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La modification du CGCT entrera en vigueur dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'appliquera sur le territoire métropolitain ainsi qu'en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à la Réunion.

Article 37 : Centres intercommunaux d'action sociale pour les communautés urbaines et les métropoles

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Aux termes des articles L. 123-4 et L. 123-5 du code de l'action sociale et des familles (CASF), un centre communal d'action sociale (CCAS) est créé par une commune et exerce une action générale de prévention et de développement social dans la commune. Ainsi, il participe à l'instruction des demandes d'aide sociale et transmet les demandes dont l'instruction incombe à une autre autorité. Il peut également :

- intervenir sous forme de prestations remboursables ou non remboursables ;

- créer et gérer en services non personnalisés les établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés à l'article L. 312-1 du CASF ;

- exercer les compétences que le département a confiées à la commune dans le domaine de l'action sociale dans les conditions prévues par l'article L. 121-6 du même code.

L'article L. 123-4-1 du CASF précise qu'un centre intercommunal d'action sociale (CIAS) peut être créé par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre exerçant une compétence d'action sociale d'intérêt communautaire.

Les modalités de création d'un CIAS sont distinctes selon les compétences susceptibles d'être exercées par le CIAS. S'il s'agit uniquement de compétences qui relèvent de l'action sociale d'intérêt communautaire, seule la délibération de l'organe délibérant est requise pour sa création. Par contre, en cas d'exercice d'une compétence qui ne relève pas de l'action sociale communautaire, des délibérations concordantes de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et des conseils municipaux doivent être prises dans les conditions de majorité qualifiée requises pour la création de l'EPCI.

Enfin, les délibérations des organes délibérants des EPCI sont en principe prises à la majorité absolue des suffrages exprimés, conformément aux dispositions de l'article L. 2121-20 du code général des collectivités territoriales (CGCT), applicable par renvoi de l'article L. 5211-1 du CGCT aux EPCI.

Lorsqu'un CIAS a été créé, les compétences relevant de l'action sociale d'intérêt communautaire de l'EPCI à fiscalité propre et des CCAS des communes membres lui sont transférées de plein droit.

Tout ou partie des compétences des CCAS des communes membres de l'EPCI à fiscalité propre qui ne relèvent pas de l'action sociale d'intérêt communautaire peuvent être transférées au CIAS. Ce transfert est décidé par délibérations concordantes de l'organe délibérant de l'EPCI à fiscalité propre et des conseils municipaux, dans les conditions de majorité qualifiée requises pour la création de l'EPCI à fiscalité propre.

Le transfert au CIAS de l'ensemble des compétences exercées par un CCAS d'une commune membre de l'établissement public de coopération intercommunale EPCI entraîne la dissolution de plein droit du CCAS.

Le service ou la partie de service des CCAS des communes membres de l'EPCI à fiscalité propre chargé de la mise en oeuvre des attributions d'action sociale d'intérêt communautaire sont transférés au CIAS. Ce transfert s'effectue dans les conditions prévues au I de l'article L  5211-4-1 du CGCT .

Le transfert des biens appartenant aux CCAS des communes membres de l'EPCI à fiscalité propre et nécessaires à la mise en oeuvre des attributions transférées au CIAS s'effectue dans les conditions prévues aux articles L. 1321-1 à L. 1321-5 du même code.

Le CIAS peut par ailleurs être dissous par délibération de l'organe délibérant de l'EPCI à fiscalité propre. Ses attributions sont alors directement exercées par l'EPCI et les compétences qui ne relèvent pas de l'action sociale d'intérêt communautaire sont restituées aux communes ou aux CCAS compétents en application de l'article L. 123-4 du CASF.

Les CCAS et CIAS sont des établissements publics, administrés par un conseil d'administration. Celui-ci est constitué paritairement de membres élus et de membres nommés parmi les personnes participant à des actions de prévention, d'animation ou de développement social menées dans la commune ou les communes considérées.

Les communautés urbaines, regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave qui forment, à la date de sa création, un ensemble de plus de 250 000 habitants selon l'article L. 5215-1-du CGCT, et les métropoles, regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave qui forment, à la date de sa création, un ensemble de plus de 400 000 habitants selon l'article L. 5217_1-du CGCT, sont des EPCI à fiscalité propre. Toutefois, en application des articles L. 5215-20 et L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), elles ne disposent pas d'une compétence d'action sociale d'intérêt communautaire, comme cela peut être le cas pour les communautés de communes (5° du II de l'article L. 5214-16 du CGCT) et les communautés d'agglomération (6° du II de l'article L. 5216-5 du CGCT).

Par conséquent, les communautés urbaines et les métropoles ne remplissent pas les conditions prévues à l'article L. 123-4-1 du CASF leur permettant de créer un CIAS.

Elles peuvent pourtant exercer des compétences sociales par différents moyens :

- Par l'exercice d'une compétence d'action sociale facultative :

L'article L. 5211-17 du CGCT précise que les communes membres d'un EPCI peuvent à tout moment transférer, en tout ou partie, à ce dernier, certaines de leurs compétences dont le transfert n'est pas prévu par la loi. Ainsi, bien que l'action sociale ne fasse pas partie des compétences des communautés urbaines prévues à l'article L. 5215-20 du CGCT, ni de celles des métropoles prévues par l'article L. 5217-2 du CGCT, celles-ci peuvent l'exercer par transfert des communes membres. Cette compétence sera alors une compétence facultative.

- Par délégation de l'État et par délégation ou transfert du département pour les métropoles :

Les II et III de l'article L. 5217-2 du CGCT, tels qu'issus de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), précisent les compétences pouvant être déléguées par l'État à la métropole, telles que celles relatives à la politique du logement.

De même, le IV de l'article L. 5217-2 du CGCT, issu de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), vient préciser les compétences que le département peut déléguer ou transférer à la métropole. Les compétences listées du 1° au 6° sont des compétences relevant de l'action sociale au sens de l'article L. 116-1 du CASF (missions confiées au service public départemental d'action sociale, adoption, adaptation et mise en oeuvre du programme départemental d'insertion...).

L'État et le département exerçant ces compétences directement, la délégation de ces compétences à la métropole n'implique pas la création d'un CIAS.

L'article L. 5217-1 du CGCT relatif à la création des métropoles précise que toutes les compétences acquises par un EPCI antérieurement à sa transformation en métropole sont transférées de plein droit à la métropole. Toutefois, l'exercice de ces compétences sociales ne donne pas lieu à création d'un CIAS. La métropole exerce directement ses compétences d'action sociale.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. La modification de la répartition de compétences exclusives entre les collectivités et leurs groupements ressort du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les dispositions législatives du CASF régissant les modalités de création d'un CIAS, il est nécessaire de recourir à une modification de l'article L. 123-4-1 afin de permettre aux EPCI à fiscalité propre (métropoles et communautés urbaines) qui ne peuvent actuellement pas créer de CIAS de pouvoir le faire lorsqu'ils exercent une compétence d'action sociale facultative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Il s'agit de permettre aux EPCI à fiscalité propre, faisant le choix d'exercer des compétences sociales de manière facultative, de le faire via la création d'un CIAS.

L'exercice de compétences sociales par un CIAS plutôt que directement par l'EPCI permet de le faire via un conseil d'administration et un budget distinct. Un CIAS est doté d'une personnalité juridique propre. Il permet notamment d'intégrer dans la prise de décision des membres nommés par le président de l'EPCI parmi les personnes non membres de l'organe délibérant de l'EPCI et qui participent à des actions de prévention d'animation et de développement social menées dans les communes considérées. Cela permet ainsi d'associer des acteurs associatifs et des personnes qualifiées à la détermination de l'action sociale de la collectivité.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il a été envisagé de confier une compétence d'action sociale d'intérêt communautaire aux métropoles et communautés urbaines, afin de leur permettre de remplir les conditions prévues à l'article L. 123-4-1 du CASF pour la création d'un CIAS. Toutefois imposer l'exercice d'une nouvelle compétence est apparu trop contraignant.

3.2. OPTION RETENUE

Il est proposé de permettre aux EPCI à fiscalité propre, exerçant une compétence d'action sociale de manière facultative, de créer un CIAS pour l'exercice de celles-ci.

Ceci permet de n'imposer aucune nouvelle compétence aux métropoles et communautés urbaines. Seules celles qui exercent une compétence d'action sociale de manière facultative auront la possibilité de créer un CIAS.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 123-4-1 du CASF est modifié.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La présente mesure permettra à l'ensemble des EPCI à fiscalité propre de créer un CIAS.

Elle ouvrira la possibilité de créer un CIAS aux 21 métropoles et aux 14 communautés urbaines présentes sur le territoire (chiffres 2020) 112 ( * ) .

4.3. IMPACTS SOCIAUX

La possibilité de création d'un CIAS métropolitain pourra permettre d'adapter l'action publique sociale au plus près des besoins des personnes en situation de handicap.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La possibilité de création d'un CIAS métropolitain pourra permettre de mutualiser les moyens d'action sociale au niveau intercommunal.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions envisagées s'appliqueront dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 38 : Transfert aux départements de la tutelle des pupilles de l'État

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les pupilles de l'État sont les enfants pour lesquels l'État exerce la tutelle, dès lors que leur filiation n'est pas établie ou que leurs parents ne sont plus titulaires de l'autorité parentale. Le tuteur et le conseil de famille des pupilles de l'État exercent les attributions conférées à ces organes selon le régime de la tutelle de droit commun. Toutefois, la tutelle ne comporte ni subrogé tuteur, ni juge des tutelles 113 ( * ) .

En application des dispositions de l'article L.224-4 du code de l'action sociale et des familles (CASF), sont ainsi admis en qualité de pupille dans les six hypothèses suivantes :

1. les enfants dont la filiation n'est pas établie ou est inconnue , recueillis par le service de l'aide sociale à l'enfance (ASE) depuis plus de deux mois ;

2. les enfants dont la filiation est établie et connue, expressément remis au service de l'ASE en vue de leur admission comme pupilles de l'État par les personnes qui ont qualité pour consentir à leur adoption , depuis plus de deux mois ;

3. les enfants dont la filiation est établie et connue, expressément remis au service de l'ASE depuis plus de six mois par leur père ou leur mère en vue de leur admission comme pupilles de l'État et dont l'autre parent n'a pas fait connaître au service, pendant ce délai, son intention d'en assumer la charge ; avant l'expiration de ce délai de six mois, le service s'emploie à connaître les intentions de l'autre parent ;

4. les enfants orphelins de père et de mère pour lesquels la tutelle n'est pas
organisée selon la section II du chapitre I du titre X du livre Ier du code civil et qui
ont été recueillis par le service de l'ASE depuis plus de deux mois ;

5. les enfants dont les parents ont fait l'objet d'un retrait total de l'autorité parentale en vertu des articles 378 et 378-1 du code civil et qui ont été recueillis par le service de l'ASE en application de l'article 380 dudit code ;

6. les enfants recueillis par le service de l'ASE en application des articles 381-1 et 381-2 du code civil.

L'enfant est admis en qualité de pupille de l'État par arrêté du président du conseil départemental (cela concerne les enfants sans filiation établie, remis par le ou leurs parents ou pour lesquels une tutelle de droit commun ne peut être ouverte) ou par décision du juge (en cas de retrait total de l'autorité parentale ou de déclaration judiciaire de délaissement parental).

En application de l'article L. 224-8 du CASF, l'arrêté d'admission est notifié aux parents de l'enfant, en l'absence de déclaration judiciaire de délaissement parental ou d'un retrait total de l'autorité parentale. Il est également notifié, s'ils ont manifesté auprès de l'aide sociale à l'enfance un intérêt pour l'enfant avant la date de cet arrêté :

- aux membres de la famille de l'enfant ;

- au père de naissance ou aux membres de la famille du père ou de la mère de naissance des enfants dont la filiation n'est pas établie ou est inconnue ;

- à toute personne ayant assuré la garde de droit ou de fait de l'enfant.

L'arrêté peut être contesté auprès du tribunal judiciaire dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception de sa notification.

La prise en charge des pupilles de l'État par les services de l'aide sociale à l'enfance est à distinguer de celle des autres mineurs qui peut se faire au titre :

- de la protection administrative, sur décision du président du conseil départemental, avec l'accord du titulaire de l'autorité parentale et selon les modalités convenues avec lui ;

- de la protection judiciaire, sur décision du juge des enfants et selon les modalités qu'il prescrit.

Au 31 décembre 2018, 3 035 enfants bénéficiaient du statut de pupille de l'État en France, soit un ratio de 20,7 pour 100 000 mineurs (extrait du rapport sur la situation des pupilles de l'État au 31 décembre 2018 de l'Observatoire national de la protection de l'enfance - ONPE 114 ( * ) ) selon la répartition suivante :

Source : ONPE - Rapport sur la situation des pupilles de l'État au 31 décembre 2018.

L'article L. 224-1 du CASF confie l'exercice conjoint de la tutelle des pupilles de l'État :

- au préfet de département, qui exerce la fonction de tuteur. Dans la pratique, ce sont les directions départementales de la cohésion sociale, services déconcentrés de l'État, qui exercent la fonction de tuteur ;

- à un conseil de famille spécifique (le conseil de famille des pupilles de l'État). A la différence du conseil de famille de droit commun, celui des pupilles de l'Etat est composé exclusivement de personnes tiers par rapport à l'enfant (cf. infra).

Le tuteur est le représentant légal du pupille de l'État. Il veille à la bonne exécution des décisions prises par le conseil de famille, gère le patrimoine du mineur, le représente légalement, prend les mesures que commande l'urgence.

Le pupille reste à la charge financière du département qui a admis l'enfant dans le statut par arrêté ; le service de l'ASE reste son gardien.

Le conseil de famille des pupilles de l'État est composé de huit membres (représentants du conseil départemental, membres d'associations familiales, d'assistants familiaux et de pupilles de l'Etat ou anciens pupilles de l'Etat ainsi que de personnes qualifiées) nommés par le préfet. Le mandat des membres est de six ans renouvelable une fois. Il élit en son sein un président. Le conseil de famille est réuni à la diligence et en présence du tuteur, qui fixe son ordre du jour.

Dans la pratique, le pupille est pris en charge par le service départemental de l'ASE, qui le confie, avec l'accord du tuteur et du conseil de famille, à un assistant familial ou un établissement relevant de l'ASE.

L'admission en tant que pupille de l'État permet au mineur de bénéficier d'un statut de protection et de la définition d'un projet de vie qui peut être l'adoption si tel est son intérêt. En cas d'adoption, la définition du projet au regard des besoins de l'enfant et le choix des adoptants sont assurés par le tuteur avec l'accord du conseil de famille. À cet effet, le président du conseil départemental présente au tuteur et au conseil de famille la liste des personnes agréées pour l'adoption du département qu'il estime susceptibles d'offrir les conditions les plus favorables pour l'accueil du mineur concerné. S'il n'est pas en mesure de présenter un dossier, le tuteur peut demander au conseil départemental tous les dossiers des personnes agréées du département ou solliciter l'appui du préfet de tout autre département. Le tuteur fixe, en accord avec le conseil de famille, la date du placement en vue d'adoption.

1.2. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Il n'existe pas de statut similaire à celui de la tutelle des pupilles de l'État dans d'autres pays européens.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les missions relatives aux pupilles de l'État sont partagées entre le préfet de département et le conseil de famille qui assurent la tutelle des pupilles, et le conseil départemental, via l'ASE, qui assure la fonction de gardien des pupilles.

Si le préfet exerce aujourd'hui la fonction de tuteur des pupilles de l'État, les enfants concernés sont confiés aux services de l'ASE, sur décision du président du conseil départemental (ou bien du juge), qui gèrent leur quotidien et notamment :

- exercent les actes usuels de l'autorité parentale (c'est le tuteur qui exerce les actes non usuels, avec l'accord du conseil de famille des pupilles de l'État) ;

- sont responsables civilement des dommages causés par le pupille de l'État (article 1242 du code civil) ;

- prennent en charge financièrement le quotidien du pupille (article L.228-3 du CASF), ce qui recouvre notamment les frais de scolarité, l'habillement, les loisirs et les frais de santé.

Le service départemental de l'ASE confie le pupille, avec l'accord du tuteur et du conseil de famille, à :

- un assistant familial ;

- un établissement relevant de l'ASE (pouponnière à caractère social, maison d'enfants à caractère social, foyer de l'enfance, village d'enfants, lieu de vie et d'accueil...) ;

- un établissement spécifique relevant de l'enfance handicapée (institut médico-éducatif...) ;

- un tiers, dans le cadre d'un accueil durable et bénévole.

Les services de l'ASE, parce que pivot de la mise en oeuvre de la protection de l'enfance, exercent un rôle prépondérant dans la vie et le quotidien du pupille de l'État, rôle qui débute avant même la reconnaissance juridique de ce statut jusqu'à sa sortie du statut par la majorité ou par la voie de l'adoption ou encore la restitution à la famille.

Dans une logique de cohérence et de simplification de la gestion, il apparaît de bonne administration de transférer la tutelle des pupilles de l'État, le préfet de département au président du conseil départemental dont les services ont des ressources étoffées comparé au moyens fragiles dont disposent les services de l'État.

Dans une logique d'équilibre et de préservation des droits du mineur, en l'absence de subrogé tuteur et d'intervention du juge aux affaires familiales, il convient de supprimer la présence du département au sein du conseil de famille.

Pour ce faire, il convient de modifier les articles L. 224-1 et L. 224-2 du CASF.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cette décentralisation de la tutelle de pupilles de l'État au profit des départements a souvent été évoquée. Elle est en cohérence avec les missions du département, chef de file en matière d'action sociale, responsable du service de l'ASE et de la mise en oeuvre des mesures de protection de l'enfance, administratives et judiciaires.

Elle revient à faire porter par le département à la fois la tutelle et la gestion du parcours du pupille. Ainsi, la mesure proposée permet de mettre fin à un fonctionnement bicéphale qui n'est pas gage d'efficacité de l'action des services concernés.

Elle vient en fait concrétiser une réalité de fait, à savoir que le conseil de famille est le plus souvent organisé et alimenté par les services de l'ASE.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

L'option retenue consiste à transférer la tutelle des pupilles de l'État au président du conseil départemental, qui devient ainsi tuteur et gardien des pupilles. Le conseil de famille conserve ses compétences aux côtés du président du conseil départemental dans le respect des droits de l'enfant. Le représentant de l'État, qui n'est pas membre du conseil de famille, continue de proposer la désignation, au sein du conseil de famille, des membres d'associations et des personnalités qualifiées prévues à l'article L.224-2 du CASF.

Afin de garantir un équilibre en faveur des droits des mineurs admis comme pupilles de l'État sous la responsabilité du département, il est proposé que les représentants du département ne soient plus membres du conseil de famille. Le rôle du département auprès du conseil de famille demeure néanmoins essentiel puisqu'il prépare les dossiers, argumente les propositions faites pour le parcours de l'enfant, présente le bilan de la mise en oeuvre des décisions prises par le conseil de famille et éclaire autant que de besoin le conseil de famille au plan juridique, technique, psychoaffectif ou sur tout autre aspect en lien avec les besoins de l'enfant.

Le conseil de famille comprendra par conséquent :

- des membres d'associations à caractère familial, notamment issus de l'union départementale des associations familiales, d'associations d'assistants maternels et d'associations de pupilles et anciens pupilles de l'État choisis par le représentant de l'État dans le département sur des listes de présentation établies par lesdites associations ;

- des personnalités qualifiées désignées par le représentant de l'État dans le département.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les articles L. 224-1, L. 224-2, L. 224-3-1 et L. 224-9 du code de l'action sociale et des familles seront modifiés. Les autres modifications à apporter relèvent de dispositions réglementaires en Conseil d'État.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Ce transfert de compétence de l'Etat vers les départements aura des impacts financiers marginaux pour les collectivités territoriales. Les services du département n'auront en effet pas de charge financière plus lourde que celle qu'ils assurent dans le cadre du droit actuel (secrétariat du Conseil de famille, présentation des dossiers, préparation des décisions), ils devraient en revanche avoir plus de souplesse pour l'organisation et la tenue des conseils de famille, n'ayant plus à préparer cette organisation avec les représentants du préfet.

Ces éventuels surcoûts, seront en tout état de cause évalués et compensées dans les conditions prévues à l'article 43 de la présente loi, conformément aux dispositions de l'article 72-2 de la Constitution.

Les services du préfet (la direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités et de la protection des populations (DDETS-PP) gagneront également du temps en n'exerçant plus la tutelle et en n'ayant plus en responsabilité l'organisation et le secrétariat des conseils de famille (convocation, fixation de l'ordre du jour, rédaction des procès-verbaux) dont le nombre et le rythme sont variables selon les départements et le nombre de pupilles.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le département, qui voit ses prérogatives et sa responsabilité accrues, prend la charge de la tutelle des pupilles de l'État dans son ensemble. Il assurera les fonctions de tuteur et gèrera à ce titre le secrétariat du conseil de famille de manière directe, sans avoir à assurer le lien avec le représentant de l'État. Un gain de temps de travail, modeste mais réel, peut être attendu à ce niveau.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'État, en l'espèce la direction départementale de la cohésion sociale, n'aura plus à assurer la tutelle des pupilles de l'État. Un gain de temps de travail sera observé pour les services de l'État qui mobilisaient, en 2018, pour cette mission 56,28 ETP dont 0,92 en direction régionale, 54,03 en direction départementale et 1,33 en direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

Les pupilles suivis depuis longtemps par leur tuteur changeront de représentant légal. Le président du conseil départemental verra ses prérogatives accrues et un suivi plus direct de la préparation et du suivi des décisions prises par le conseil de famille.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure est applicable à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

La partie réglementaire du CASF relative à la tutelle des pupilles de l'Etat, et plus particulièrement les articles R. 224-3 à R.224-5, R. 224-8 à R. 224-11, R. 224-17, R.2 24-19 et R. 224-22 devra être modifiée en conséquence.

Article 39 : Recours obligatoire au traitement automatisé d'appui à l'évaluation de la minorité pour l'évaluation de la minorité et de l'isolement des personnes se déclarant mineurs non accompagnés

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le décret du 30 janvier 2019 115 ( * ) a autorisé la création du fichier d'appui à l'évaluation de la minorité (AEM) et les dispositions de l'article L. 142-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ont permis l'enrôlement dans ce fichier des données biographiques et biométriques des personnes se disant mineurs non accompagnés. Une fois saisies dans le traitement AEM, les données sont transmises au service en charge de la protection de l'enfance afin de concourir à l'identification de la personne se disant mineur non accompagné. Une fois l'évaluation réalisée, le résultat de celle-ci est transmis au préfet et saisi dans AEM.

En l'état actuel du droit et conformément aux dispositions réglementaires du code de l'action sociale et des familles (CASF, article R. 221-11), il appartient au président du conseil départemental de décider s'il souhaite ou non solliciter le concours du préfet dans l'évaluation de la minorité et de l'isolement de la personne qui se dit mineur non accompagné. Il lui est donc possible de procéder à des évaluations de minorité sans avoir recours à l'appui du préfet et au traitement AEM.

Depuis sa mise en oeuvre effective au 1 er mars 2019, la présentation en préfecture des personnes se disant mineurs non accompagnés aux fins d'enregistrement dans le traitement AEM a été mise en place dans 78 collectivités (77 départements et la métropole de Lyon) et le sera prochainement dans trois autres départements. Quinze départements refusent d'organiser cette présentation. Or, parmi ces départements, certains d'entre eux, notamment en région francilienne, accueillent un nombre important de mineurs non accompagnés. Le refus de ces départements fait que près de 40% des personnes se prétendant mineurs non accompagnés ne sont pas enregistrées dans le traitement.

Dès lors que les objectifs poursuivis par le traitement AEM visent à dissuader le détournement du dispositif de protection de l'enfance par de faux mineurs et à lutter contre le nomadisme entre départements (réitération par des personnes majeures de demandes de protection qui ont déjà donné lieu à une décision de refus en tant que majeur), la pleine efficacité du dispositif est conditionnée à son déploiement sur l'ensemble du territoire métropolitain.

Ainsi, pour faciliter l'action des autorités en charge de la protection des mineurs en favorisant la détection des faux mineurs en amont, il apparaît nécessaire de rendre obligatoire l'enregistrement des personnes se déclarant mineurs non accompagnés dans le traitement AEM, sauf si la minorité est manifeste.

La minorité est manifeste quand elle ne fait aucun doute. Ainsi, en 2019, parmi les 16 760 mineurs non accompagnés placés auprès des services de l'aide sociale à l'enfance, moins de 10% des mineurs placés avaient moins de 14 ans (rapport annuel de la Mission MNA du ministère de la justice).

Pour rendre obligatoire le concours du préfet et le recours au traitement AEM, il est nécessaire d'élever au niveau législatif les dispositions du CASF relatives à l'accueil provisoire d'urgence et à la procédure d'évaluation des personnes se disant mineurs non accompagnés.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Dans sa décision n° 2019-797 QPC du 26 juillet 2019, le Conseil Constitutionnel a estimé que les dispositions de l'article L. 142-3 du CESEDA sont conformes à la Constitution en précisant qu'elles « n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier les règles relatives à la détermination de l'âge d'un individu et aux protections attachées à la qualité de mineur, notamment celles interdisant les mesures d'éloignement et permettant de contester devant un juge l'évaluation réalisée .

À cet égard, la majorité d'un individu ne saurait être déduite ni de son refus opposé au recueil de ses empreintes ni de la seule constatation, par une autorité chargée d'évaluer son âge, qu'il est déjà enregistré dans le fichier en cause ou dans un autre fichier alimenté par les données de celui-ci. Elles ne méconnaissent pas l'exigence constitutionnelle de protection de l'intérêt supérieur de l'enfant.

La disposition présentée s'inscrit dans ce cadre : l'évaluation de minorité résulte d'un faisceau d'indices qui repose sur les entretiens d'évaluation et sur d'autres informations recueillies au cours du processus d'évaluation, et notamment le recours au traitement AEM qui ne peut, à lui seul, fonder une décision d'évaluation en tant que majeur.

1.3. CADRE DU DROIT COMMUNAUTAIRE ET CONVENTIONNEL

La jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne n'envisage, jusqu'à présent, la situation des mineurs non accompagnés étrangers qu'en tant qu'ils sont demandeurs de la protection internationale.

Dans l'affaire M.D. c. France (Requête n° 50376/13), la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), dans son arrêt du 10 octobre 2019, considère que la minorité est une condition d'accès au dispositif de protection de l'enfance et qu'en cas de majorité avérée d'un étranger s'étant présenté comme mineur isolé, les autorités françaises sont déliées de toute obligation spécifique de prise en charge et de protection attachée spécifiquement à l'état de minorité.

A ce jour, le contrôle de la CEDH porte donc sur la violation de l'article 3 de la CEDH notamment en cas de défaut d'hébergement, de prise en charge ou de placement en rétention d'un mineur non accompagné mais pas sur les modalités de détermination de sa minorité ou de sa majorité par les autorités compétentes.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'article 72 alinéa 3 de la Constitution dispose que « dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences » .

L'aide sociale à l'enfance relevant, depuis les lois de décentralisation de 1982, de la compétence des départements, seule la loi peut modifier les conditions d'exercice de cette compétence par les collectivités territoriales concernées.

Pour permettre une effectivité du traitement AEM, il est nécessaire que le préfet ait connaissance de l'ensemble des décisions prises par le président du conseil départemental concernant les personnes s'étant présentées comme mineurs non accompagnés et puisse croiser ces décisions avec les personnes figurant dans le traitement AEM.

L'article L. 221-2-2 du CASF, qui renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les conditions d'évaluation des mineurs non accompagnés, ne permet pas au pouvoir réglementaire de rendre obligatoire le concours du représentant de l'Etat dans l'exercice de cette mission.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cette mesure est de nature à sécuriser le dispositif d'évaluation de la minorité et de l'isolement des personnes se disant mineurs non accompagnés et à uniformiser les modalités de cette évaluation sur tout le territoire, garantissant par là même une égalité de traitement entre les usagers concernés.

Le recours obligatoire au traitement AEM permettra au département de vérifier si la personne qui se déclare mineure a déjà fait l'objet d'une évaluation dans un autre département et quelles en ont été les conclusions. Si comme l'a jugé récemment le Conseil d'Etat (Conseil d'État, juge des référés, n° 445089, 12 octobre 2020), le simple constat que l'intéressé est connu du traitement AEM ne dispense pas le département d'examiner sa demande et ne lui permet pas de prendre une décision de refus de prise en charge pour ce seul motif, il contribue néanmoins au faisceau d'indices sur lequel se fonde le président du conseil départemental pour évaluer la minorité du demandeur.

En ce sens, le recours obligatoire au traitement AEM permettra à l'ensemble des départements d'être destinataires des données enregistrées dans un fichier centralisé et de vérifier pour chaque personne se disant mineur non accompagné s'il a déjà été évalué dans un autre département, objectivant ainsi les critères de détermination de la minorité sans remettre en cause la compétence du président du conseil départemental pour évaluer la personne se déclarant mineure.

3. DISPOSITIF RETENU

L'article rend obligatoire, hormis en cas de minorité manifeste, lors de l'évaluation d'une personne se prétendant mineur non accompagné, la saisine du préfet pour le recueil par des agents spécialement habilités de toute information utile à son identification et au renseignement du traitement AEM.

Il rend également obligatoire la transmission par le département au représentant de l'Etat, chaque mois, des décisions prises à la suite de l'évaluation par ses services de la situation de l'ensemble des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de sa famille.

Le dispositif prévoit de conditionner le versement de la contribution forfaitaire de l'Etat pour la phase d'évaluation des personnes concernées au respect par le département des obligations précitées. Cette contribution forfaitaire s'élève actuellement à 500 € par personne évaluée.

Sans modifier l'état du droit, la disposition reprend les dispositions actuelles, jusqu'ici de niveau réglementaire, prévoyant le concours du préfet pour l'authentification des documents d'identité détenus par la personne évaluée ainsi que le recours aux examens radiologiques osseux, qui restent facultatifs.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

Au 31 décembre 2019, 16 760 personnes ont intégré le dispositif national de protection de l'enfance au cours de l'année 2019 (rapport annuel de la Mission MNA du ministère de la justice). 37 200 demandes de remboursement du forfait « évaluation » ont été adressées au ministère des solidarités et de la santé par les départements.

Si un département n'organise pas la présentation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille auprès des services de l'Etat afin qu'elles communiquent toute information utile à leur identification et au renseignement, par les agents spécialement habilités à cet effet, du traitement AEM et ne transmet pas tous les mois les décisions individuelles prises à l'issue des évaluations, tout ou partie de la contribution forfaitaire de l'Etat pour la phase d'évaluation des personnes concernées ne lui sera pas versée.

A titre d'exemple, la contribution forfaitaire pour 100 personnes évaluées représente un montant de 50 000€.

Un comité de suivi du dispositif national de mise à l'abri, d'évaluation et d'orientation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille co-présidé par le ministre de la justice et le ministre chargé de la famille a notamment pour mission de suivre la mise en oeuvre de l'entier dispositif. Il est notamment destinataire une fois par an d'un bilan du fonctionnement du dispositif et du financement forfaitaire prévu à l'article R. 221-12 du CASF.

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie l'article L. 221-2-2 du CASF et insère, dans ce même code, un article L. 221-2-3.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

La mesure contribue à identifier les personnes se déclarant mineures en vue de leur placement à l'aide sociale à l'enfance dont une proportion importante est en fait majeure. En sécurisant les modalités de l'évaluation des personnes se disant mineures, la mesure aura un effet dissuasif sur les personnes déjà évaluées majeures dans un département qui n'hésitaient pas à solliciter une protection dans d'autres départements. Elle allègera ainsi non seulement la charge financière des départements qui pourront concentrer leurs moyens sur les personnes réellement mineures mais aussi celle de l'Etat au titre de ses contributions forfaitaires pour les phases d'évaluation et de mise à l'abri des mineurs non accompagnés.

4.3. IMPACTS ADMINISTRATIFS

La disposition vise à sécuriser les modalités d'évaluation des personnes se disant mineures et à permettre une mise en commun des informations entre l'ensemble des collectivités concernées, ce qui devrait conduire à une réduction des coûts administratifs liés à l'évaluation (effectifs de travailleurs sociaux dédiés, recours devant les juridictions...).

4.4. IMPACTS SOCIAUX

Cette mesure vise tout d'abord à prévenir la saturation des structures de l'aide sociale à l'enfance qui font actuellement face à une augmentation importante du nombre de mineurs non accompagnés placés (8 054 en 2016, 14 908 en 2017, 17 022 en 2018, 16 760 en 2019) dont une partie serait en fait majeure, ce qui empêche les collectivités de protéger efficacement les mineurs en danger et induit une cohabitation entre mineurs et majeurs dans les structures d'accueil.

La mesure, en favorisant un échange d'informations et une centralisation des données au niveau national, permettra aux services en charge de l'aide sociale à l'enfance d'assumer leur mission de protection des mineurs dans de meilleures conditions.

4.5. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les impacts cités aux points 4.2 à 4.4 sont globalement favorables aux départements en ce que la mesure permet de rendre plus rapidement efficiente la phase d'évaluation de la situation des personnes se présentant comme mineurs non accompagnés, limitant par conséquent les coûts de prise en charge.

Cette mesure implique néanmoins que les départements organisent l'accompagnement des personnes se présentant comme mineures non accompagnées pour l'usage du traitement AEM et qu'ils introduisent cet accompagnement dans leurs procédures.

Elle aura également un impact financier pour les départements qui feraient le choix de ne pas présenter les personnes se présentant comme mineures non accompagnées auprès des services de l'Etat, afin que ces dernières communiquent toute information utile à leur identification et au renseignement, par les agents spécialement habilités à cet effet, du traitement AEM, l'État pouvant dans ce cas diminuer en tout ou partie sa contribution forfaitaire pour la phase d'évaluation des personnes concernées.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS

Le Conseil national d'évaluation des normes a été consulté.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Cette disposition entrera en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception de Wallis et Futuna, de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, où les dispositions modifiées du CASF ne s'appliquent pas, du fait des compétences des collectivités en matière d'aide sociale à l'enfance.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat est nécessaire pour modifier l'article R. 221-11 du CASF.

Article 40 : Rattachement des directeurs des établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance dans la fonction publique territoriale

1. ÉTAT DES LIEUX

Les établissements publics départementaux de l'aide sociale à l'enfance sont des établissements sociaux et médico-sociaux au sens de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles (CASF). Si ces établissements sont des services non personnalisés relevant de la compétence du conseil départemental, chef de file de l'aide sociale à l'enfance, le président du conseil départemental ne dispose pas de pouvoir de gestion administrative (recrutement et nomination) des directeurs de ces établissements, lesquels relèvent du corps des directeurs d'établissement sanitaire, social et médico-socio (D3S) de la fonction publique hospitalière.

En effet, les directeurs d'établissement sanitaire, social et médico-social exercent les fonctions de chef d'établissement ou de directeur adjoint dans certains établissements publics de santé (ne comportant pas de service de chirurgie ou d'obstétrique ou d'hospitalisation sous contrainte notamment), et principalement dans les maisons de retraites publiques et les établissements publics, sociaux et médico-sociaux.

Les D3S, dont le statut est régi par le décret n° 2007-1930 du 26 décembre 2007 modifié portant statut particulier du corps des directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, relèvent de la fonction publique hospitalière (FPH). Les D3S sont recrutés par concours organisés au niveau national par le Centre national de gestion et ouverts par un arrêté du ministre chargé de la santé.

Parmi les 1 400 D3S en exercice en 2019, environ 9%, soit 120 exercent des fonctions de direction d'établissement de l'aide sociale à l'enfance, dont 70 chefs d'établissement et 50 directeurs adjoints.

En vertu des dispositions du 4° de l'article 2 et de l'article 3 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la FPH, les D3S exercent leurs fonctions (de chef d'établissement ou de directeur adjoint) notamment dans les établissements publics locaux mentionnés au 1° du I de l'article L. 312-1 du CASF et dans les établissements non dotés de la personnalité morale relevant des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Les établissements publics locaux mentionnés au 1° du I de l'article L.312-1 du CASF sont des établissements ou services prenant en charge habituellement, y compris au titre de la prévention, des mineurs et des majeurs de moins de vingt et un ans relevant des articles L. 221-1, L. 222-3 et L. 222-5 du même code.

Aux termes de l'article L. 221-1 du CASF, les services départementaux de l'ASE sont chargés des missions de protection de l'enfance, politique publique décentralisée dont les départements sont les chefs de file, conformément à l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Les établissements relevant de l'ASE sont des établissements sociaux et médico-sociaux au sens de l'article L. 312-1 du CASF. Lorsqu'ils ne sont pas dotés de la personnalité morale, ils constituent des services non personnalisés des départements.

L'article L. 315-8 du CASF dispose que, lorsqu'ils ont le statut d'établissement public, les établissements relevant de l'ASE et les maisons d'enfants à caractère social mentionnés (MECS) au 4° de l'article 2 du chapitre Ier du titre IV du statut général des fonctionnaires de l'État et des collectivités territoriales sont administrés par un conseil d'administration assisté d'un directeur nommé, après avis du président du conseil d'administration, par l'autorité compétente de l'État. Lorsqu'ils n'ont pas la personnalité morale, ils sont dotés d'une commission de surveillance nommée par le président du conseil départemental et d'un directeur nommé, après avis du président du conseil départemental, par l'autorité compétente de l'État.

Les établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance sont dirigés par des D3S issus de la FPH.

Le décret n°2007-1930 du 26 décembre 2007 modifié portant statut particulier du corps des directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux prévoit que les D3S sont nommés par le directeur général du centre national de gestion des praticiens hospitaliers (CNG). Cette consultation est précédée de la consultation :

- du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) pour les établissements médico-sociaux relevant des 3° (établissements pour personnes âgées) et 4° (établissements pour personnes handicapées) de l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 précitée et les établissements publics de santé (1° du même article 2) ;

- du préfet de département pour les établissements énumérés au 4° ( établissements relevant de l'ASE, et MECS) et au 6° (-centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) de l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986.

Dans le cas des établissements relevant de l'ASE, disposant du statut d'établissement public, le préfet de département (ou le directeur départemental de la cohésion sociale sur délégation expresse) examine et auditionne les candidats et arrête une liste (parmi les noms de la liste arrêtée par le directeur du CNG) qui doit comporter au moins trois noms. Pour les établissements relevant de l'ASE, non dotés de la personnalité morale, le représentant de l'État doit consulter préalablement l'assemblée délibérante du département. Toutefois, cet avis n'oblige pas le préfet.

Dans un souci de parallélisme des procédures entre les deux catégories d'établissements, l'évaluation annuelle des directeurs d'établissements relevant de l'ASE, disposant du statut d'établissement public, est assurée par le représentant de l'État dans le département après avis simple du président de l'assemblée délibérante qui assure par ailleurs le management fonctionnel de ce directeur.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Alors que depuis les lois de décentralisation de 1983, le département s'est vu confier une compétence de droit commun en matière d'aide sociale légale et de prévention sanitaire, que la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM) est venue conforter en désignant le département comme chef de file en matière d'aide sociale, d'autonomie des personnes et de solidarité des territoires, il ne se voit reconnaître aucune compétence en ce qui concerne les actes de gestion des D3S qui relèvent de la FPH 116 ( * ) .

Les difficultés de gestion administrative des directeurs des établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance ont été soulevées à plusieurs reprises et de longue date par des présidents de conseils départementaux, les préfets, l'Assemblée des départements de France et l'association nationale des directeurs d'action sociale et de santé des départements et métropole (ANDASS), rappelés notamment lors des échanges préparatoires au présent projet de loi. Un courrier signé de 12 présidents de conseils départementaux dont le président de l'ADF, a été adressé en ce sens à la ministre des solidarités et de la santé le 2 avril 2019. En effet, le système actuel prive les départements de l'autorité hiérarchique à l'égard des directeurs, à défaut de compétence en matière de choix d'affectation et d'évaluation.

L'enjeu de l'évaluation s'est accru avec l'instauration de la prime de fonction et de résultat (PFR) ,

C'est le représentant de l'État qui est chargé de déterminer la cotation de chaque emploi des personnels de direction afin d'établir le montant de la part fixe liée à la fonction et de fixer le montant de la part liée à la manière de servir, alors que l'État n'intervient pas dans le fonctionnement de ces établissements qui relèvent du département.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif est de permettre aux départements, financeurs de l'ASE, de disposer du pouvoir de nomination et de l'autorité hiérarchique sur les directeurs des établissements des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance, établissements dont ils ont la responsabilité en termes de fonctionnement et de financement.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il avait tout d'abord été envisagé, tout en conservant aux directeurs des IDEF leur statut actuel dans la FPH, de donner plus de prérogatives aux départements en renforçant notamment leur pouvoir dans le processus de nomination des directeurs (les directeurs auraient été nommés sur proposition de l'assemblée délibérante). L'option du transfert de l'évaluation de ces directeurs au président du conseil départemental, avec transmission au CNG a été également envisagée. La révision de la procédure d'évaluation supposerait une modification de l'article 65-2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions relatives à la FPH.

Toutefois, ces options ont été écartées car elles ne simplifient pas la question de leur nomination et de leur gestion.

Enfin, l'option du transfert de l'ensemble des agents des IDEF aux départements a été abandonnée, cette option s'avérant lourde et complexe, et le rapport coût/bénéfice étant défavorable en termes d'action publique.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue est un élargissement de la compétence des départements concernant le personnel de direction des établissements publics départementaux de l'aide sociale à l'enfance non pourvu de la personnalité morale. Cela ne concerne pas les directeurs adjoints.

Il est ainsi proposé que les fonctionnaires (D3S) exerçant les fonctions de directeurs soient détachés dans les cadres d'emplois équivalents de la fonction publique territoriale (FPT) dans les conditions prévues par la loi du 26 janvier 1984 susvisée. En cas d'absence de cadre d'emplois équivalent, ils sont détachés sur contrat dans les conditions prévues par la même loi.

Les fonctionnaires concernés conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable.

A compter du 1 er janvier 2022, les agents contractuels exerçant la fonction de directeur relèvent de plein droit des conseils départementaux dans les conditions d'emploi qui sont les leurs. Ils conservent, à titre individuel, le bénéfice des stipulations de leur contrat.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les dispositions envisagées prévoient de transférer la nomination des directeurs des établissements de l'ASE aux départements, ce qui conduit à sortir ces emplois de la FPH pour les transférer à la FPT. Le champ d'application de la loi du 9 janvier 1986 s'en trouve ainsi modifié pour les seuls emplois de chef d'établissement de l'ASE, les établissements eux-mêmes demeurant dans la FPH.

Il sera également nécessaire de modifier l'article L. 315-8 du CASF qui prévoit que les établissements relevant des services départementaux de l'aide sociale à l'enfance :

- lorsqu'ils n'ont pas la personnalité morale, soient dotés d'une commission de surveillance nommée par le président du conseil départemental et d'un directeur nommé, après avis du président du conseil départemental, par l'autorité compétente de l'État ;

- lorsqu'ils constituent des établissements publics, soient administrés par un conseil d'administration assisté d'un directeur nommé, après avis du président du conseil d'administration, par l'autorité compétente de l'État.

Dans les deux cas la modification consistera à remplacer l'autorité compétente de l'Etat (CNG), autorité de nomination actuelle, par le président du conseil départemental (nouvelle autorité de nomination).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les personnels concernés étant rémunérés actuellement par les départements ou les établissements publics mentionnés à l'article L. 315-8 du CASF, la mesure est sans impact sur les finances publiques.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les personnels concernés étant d'ores-et-déjà rémunérés actuellement par les conseils départementaux ou les établissements publics mentionnés à l'article L. 315-8 du CASF, la mesure est sans impact significatif pour les collectivités concernées.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La modification opérée constitue un changement de position statutaire pour 120 fonctionnaires de la fonction publique hospitalière mais n'a pas d'impact direct sur les services.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes, le Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière et le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ont été consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure sera mise en oeuvre dans l'année suivant la date de publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure concerne l'ensemble du territoire de la République.

CHAPITRE III - L'ÉDUCATION

Article 41 : Renforcement du lien des gestionnaires de collèges et lycées avec les collectivités territoriales

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'organisation de l'enseignement du second degré est fortement décentralisée depuis la première vague de décentralisation intervenue au début des années 1980. Le législateur, depuis presque quatre décennies, a choisi de mettre en place une organisation singulière, basée sur le partage et la complémentarité des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales.

A la faveur des lois de décentralisation de l'acte I, les collèges et les lycées, auparavant établissements publics nationaux d'enseignement gérés par l'Etat, sont devenus des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), créés par arrêté du représentant de l'Etat, sur proposition du département, s'agissant des collèges, et des régions s'agissant des lycées 117 ( * ) .

Catégorie d'établissement public créée en application de l'article 34 de la Constitution par la loi du 22 juillet 1983 modifiée 118 ( * ) , l'EPLE est doté d'une autonomie, inhérente au statut d'établissement public. Opérateur à la croisée du partage de compétences entre l'État et la collectivité de rattachement, l'EPLE se situe en conséquence à la charnière du local et du national 119 ( * ) .

La relation entre la collectivité de rattachement et l'EPLE, y compris le chef d'établissement, est actuellement régie par le II de l'article L. 421-23 du code de l'éducation. La collectivité, qui s'adresse directement au chef d'établissement, fait connaître à ce dernier les objectifs qu'elle fixe à l'établissement et les moyens qu'elle alloue à cet effet. Le chef d'établissement, quant à lui, « est chargé de mettre en oeuvre ces objectifs et de rendre compte de l'utilisation de ces moyens. » Une convention dite bilatérale, passée entre l'établissement et la collectivité, sans que l'autorité académique ait à en connaître, précise les modalités d'exercice de leurs compétences respectives 120 ( * ) .

Les EPLE sont les espaces de convergence et de mise en oeuvre des politiques définies par l'Etat et par la collectivité de rattachement.

1.1.1. Les relations entre l'EPLE et la collectivité de rattachement

A - La relation entre le chef d'établissement et la collectivité de rattachement

Avec les premières lois de décentralisation, collectivités territoriales et établissements ont appris à se connaître et à travailler ensemble dans une forme d'équilibre qui s'est stabilisé avec le temps. Les collectivités territoriales ont fait l'apprentissage d'une culture différente, avec ses spécificités - celles de l'éducation nationale - à travers un champ de gestion initialement axé, pour l'essentiel, sur le patrimoine immobilier et le fonctionnement. Les chefs d'établissement et les gestionnaires ont dû s'approprier des modes de relation non hiérarchiques avec les élus et les services territoriaux, tranchant avec le mode souvent plus directif des services de l'Etat. De fait, s'est instaurée une relation souple, parfois distante, entre les équipes des EPLE et la collectivité de rattachement, dispensée des contraintes de gestion des ressources humaines et d'organisation au sein de l'établissement.

Auparavant réduite à des compétences matérielles de planification et de programmation immobilière (construction, grosses réparations, fonctionnement) et à des compétences de financement, la collectivité opère son « entrée » au sein de l'EPLE, au contact quotidien de la communauté éducative, à l'occasion des transferts prévus par la loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (acte II). La décentralisation de missions de service public (restauration, entretien, hébergement, accueil) connexes du service public d'enseignement et le transfert aux départements et aux régions des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) ont modifié en profondeur la nature et la fréquence des rapports entre la collectivité de rattachement et les EPLE.

Les transferts de l'acte II accentuant significativement les pouvoirs des collectivités territoriales sur l'organisation de certaines missions au sein des établissements scolaires, de nouvelles relations entre la direction de l'EPLE et la collectivité de rattachement se sont faits jour et de nouveaux instruments de dialogue et de pilotage ont émergé.

On ne perçoit véritablement la portée de l'évolution des modalités de dialogue entre l'EPLE et la collectivité consécutive à la loi du 13 août 2004 précitée qu'à la lecture des textes antérieurs d'application des premières lois décentralisatrices. Les liens entre le chef d'établissement et la collectivité de rattachement ont été définis bien avant la mise en oeuvre de l'acte II. Leur champ était toutefois alors strictement encadré et la relation relativement symétrique. La rédaction du II de l'article L. 421-23 du code de l'éducation, modifié par l'article 82 de la loi du 13 août 2004, illustre à cet égard cette évolution.

Le II de l'article L. 421-23 121 ( * ) , dans sa rédaction antérieure au 1 er janvier 2005, date d'entrée en vigueur de la loi du 13 aout 2004, précise ainsi que « pour l'exercice des compétences incombant à la collectivité de rattachement, en matière de construction, de reconstruction, d'extension, de grosses réparations, d'équipement et de fonctionnement matériel de l'établissement, le président du conseil général ou régional peut s'adresser directement au chef d'établissement. » Les circulaires de décembre 1985 et janvier 1986 122 ( * ) mettent très clairement l'autorité académique au centre de la relation entre la collectivité de rattachement et l'EPLE.

Non seulement, l'acte II instaure un dialogue direct entre le chef d'établissement et la collectivité de rattachement, sans intercession ni même, en réalité, information de l'autorité académique, mais encore il place le chef d'établissement dans une relation asymétrique vis-à-vis de la collectivité. Ainsi, le II du L. 421-23 prévoit désormais que pour l'exercice des compétences incombant à la collectivité de rattachement, l'exécutif de la collectivité s'adresse directement au chef d'établissement et lui fait connaître les objectifs fixés et les moyens alloués à cet effet à l'établissement, tandis que « le chef d'établissement est chargé de mettre en oeuvre ces objectifs et de rendre compte de l'utilisation de ces moyens ».

Pour mémoire, l'article initial du projet de loi relatif aux responsabilités locales 123 ( * ) d'octobre 2003 ne prévoyait pas de dispositions régissant les relations entre l'exécutif de la collectivité et le chef d'établissement, mais uniquement des dispositions portant sur les relations entre l'exécutif de la collectivité et le conseil d'administration, auquel doit être soumis la convention bilatérale 124 ( * ) .

En première lecture du projet de loi, la commission des Lois du Sénat a cependant admis que le dispositif prévu « ne garantit pas de façon suffisante aux départements et régions qu'ils disposeront d'une réelle maîtrise sur la gestion matérielle des établissements, et l'organisation des services de leurs agents affectés dans les collèges et lycées » , leur permettant un « exercice satisfaisant et entier de leurs compétences. Le transfert en l'état des personnels TOS pourrait se révéler source de dérives et confronter les élus locaux à des pressions, si les collectivités ne disposent pas d'une réelle autorité sur l'organisation des services de leurs agents et la gestion matérielle et financière réalisées au sein des établissements ».

C'est pourquoi un amendement sénatorial a proposé d'« instituer un lien direct entre le président du conseil général ou régional et le chef d'établissement, autorité exécutive de l'établissement » , ayant pour objet d'organiser un mode de relation spécifique et direct entre les collectivités de rattachement « et les chefs d'établissements, appelés à l'avenir à travailler ensemble de façon plus étroite ». Le chef d'établissement est ainsi « chargé de mettre en oeuvre les objectifs que lui assigne la collectivité de rattachement, dans la limite des moyens que celle-ci alloue à cet effet. Puis il rend compte de l'utilisation de ces moyens, qui concernent notamment les moyens humains en personnels TOS ». Cela permet ainsi à la collectivité d'exercer « une autorité directe sur le chef d'établissement, et un pouvoir de direction et d'orientation dans les domaines qui relèvent de sa compétence » 125 ( * ) .

Bien que la notion d' « autorité » de la collectivité ne soit pas expressément mentionnée à l'article L. 421-23, cette évolution incitera des observateurs du système éducatif, en accord avec l'objectif de la commission des affaires culturelles du Sénat d'octobre 2003, à considérer que les termes de la loi semblent installer, « à côté de la hiérarchie de l'autorité académique sur le chef d'établissement, une seconde ligne hiérarchique « directe » du président de la collectivité territoriale vers le principal ou le proviseur, sans employer le terme mais en y plaçant tous les éléments (fixation d'objectifs par la collectivité, mise en oeuvre et compte rendu par le chef d'établissement) » 126 ( * ) .

B - Le conventionnement entre l'EPLE et la collectivité de rattachement

La seconde novation de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales réside dans la procédure de conventionnement entre la collectivité de rattachement et chacun des établissements scolaires dont elle assure la gestion en vertu de ses compétences. La convention entre l'EPLE et la collectivité apparaît comme un dispositif, qui caractérise, dans l'absolu, un mode de relation partenariale entre l'opérateur délégué et l'autorité territoriale de tutelle.

Par cette convention dite bilatérale, l'établissement et la collectivité précisent les modalités d'exercice de leurs compétences respectives, en fonction des objectifs fixés par cette dernière et des moyens qu'elle alloue à l'établissement à cet effet.

Le dernier alinéa de l'article L. 421-23 du code de l'éducation 127 ( * ) , qui n'a été suivi d'aucune mesure réglementaire 128 ( * ) et qui n'indique ni le périmètre ni le contenu de la convention, n'a pas eu pour effet d'imposer l'adoption de cette convention, soumise à l'accord du conseil d'administration de l'EPLE (article R. 421-20 du code de l'éducation). Le défaut de présentation de la convention en conseil d'administration ou d'approbation par ce dernier, s'il met le chef d'établissement dans l'incapacité de signer et d'appliquer la convention, n'a pas pour effet d'empêcher l'exercice par le président de la collectivité et le chef d'établissement de leurs compétences respectives, telles qu'elles sont précisées par la loi 129 ( * ) . Telle a en effet été l'intention du législateur, qui n'a pas souhaité que l'absence de convention entrave l'action de la collectivité et du chef d'établissement 130 ( * ) : « Il ne s'agit pas de soumettre à l'appréciation du conseil d'administration de l'établissement les moyens que le président de la collectivité de rattachement aura notifiés. En effet, il ne serait évidemment ni souhaitable ni admissible que les moyens accordés aux établissements puissent être remis en question lorsqu'ils seront notifiés par la collectivité territoriale. Les chefs d'établissement devront mettre en oeuvre ces moyens et les politiques définies par la collectivité de rattachement, comme ils l'ont fait jusqu'à présent, quand la notification émanait du rectorat ou de l'inspection d'académie » 131 ( * ) .

De manière générale, la convention bilatérale doit être le document commun entre l'établissement et la collectivité, dans lequel cette dernière inscrit les actions qu'elle estime prioritaires sur son territoire, en vue de leur application, au niveau local, par l'établissement. Les objectifs retenus par les collectivités peuvent par conséquent aller au-delà de leurs seules obligations légales, et parfois rejoindre ceux du projet d'établissement.

1.1.2. Les missions de l'équipe de direction de l'EPLE entrant dans le champ de compétences de la collectivité de rattachement

Collectivités de rattachement des EPLE, les départements et les régions ont respectivement la charge des collèges et des lycées, dont ils assurent la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement, l'accueil, la restauration, l'hébergement ainsi que l'entretien général et technique 132 ( * ) . Ces collectivités assurent aussi le recrutement et la gestion des personnels ATTEE (adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement) exerçant leurs missions dans les collèges et les lycées 133 ( * ) .

Le positionnement, le rôle et les missions du chef d'établissement et du gestionnaire adjoint du chef d'établissement à l'égard de la collectivité de rattachement, sont précisées par les articles L. 421-23 et R. 421-13 du code de l'éducation.

Le chef d'établissement est assisté des services d'intendance et d'administration. Il encadre et organise le travail des personnels techniciens, ouvriers et de service (dorénavant ATTEE), lesquels sont placés sous son autorité. Il assure la gestion du service de demi-pension conformément aux modalités d'exploitation définies par la collectivité compétente. La relation entre la collectivité et le chef d'établissement vise indirectement le gestionnaire, dans la mesure où celui-ci est placé sous l'autorité du chef d'établissement.

A l'instar de tous les personnels affectés dans l'EPLE, qu'ils relèvent statutairement de l'Etat ou de la collectivité territoriale, l'adjoint gestionnaire, personnel d'Etat membre de l'équipe de direction, est placé sous l'autorité du chef d'établissement qu'il seconde dans ses fonctions de gestion matérielle, financière et administrative. En qualité de représentant de l'Etat au sein de l'établissement, le chef d'établissement fixe notamment, dans le respect de leur statut, le service des personnels (article R. 421-10 du code de l'éducation), et donc celui du gestionnaire d'établissement.

Les missions du gestionnaire ont évolué depuis l'acte II de la décentralisation. Secondant initialement le chef d'établissement « dans ses tâches de gestion matérielle et financière » 134 ( * ) , le gestionnaire, d'une part, voit ses fonctions étendues aux tâches administratives, d'autre part, est réglementairement « chargé (...) des relations avec les collectivités territoriales pour les questions techniques et il organise le travail des personnels techniciens, ouvriers et de service » 135 ( * ) , fonctions jusqu'alors définies par simple voie de circulaire. Un décret de 2011 136 ( * ) lui confère enfin le statut d'adjoint du chef d'établissement et généralise, au-delà des seules questions techniques, son rôle de correspondant des collectivités territoriales. Actuellement, « l'adjoint gestionnaire est chargé, sous l'autorité du chef d'établissement et dans son champ de compétence, des relations avec les collectivités territoriales et il organise le travail des personnels administratifs et techniques affectés ou mis à disposition de l'établissement ». Il peut par ailleurs disposer d'une délégation de signature, voire assurer l'intérim en cas d'absence ou d'empêchement du chef d'établissement en qualité d'ordonnateur suppléant (article R. 421-13 du code de l'éducation).

1.1.3. Effectifs et missions des adjoints gestionnaires et des personnels administratifs de l'Etat exerçant en EPLE

On comptabilise environ 30 000 emplois de personnels administratifs des trois catégories exerçant en EPLE (dont 8 000 assurent le secrétariat du chef d'établissement). On dénombre un adjoint gestionnaire par EPLE 137 ( * ) (5 289 collèges, 2424 lycées et 806 EREA soit 7 791 EPLE en 2019 138 ( * ) ), dont plus de 1200 exercent également la fonction d'agent comptable (95% en lycées).

Les 30 000 agents sont affectés pour quasiment la moitié en collège. Cette répartition des personnels ne reflète pas la structure du réseau des EPLE, les presque 8 000 établissements d'enseignement public du second degré étant constitués de 68% de collèges.

Les gestionnaires d'EPLE exercent leurs fonctions dans le cadre des missions relevant tant des compétences de l'Etat que de la collectivité de rattachement. La partie des tâches consacrée par les gestionnaires aux missions relevant de la collectivité varie selon le type d'établissement (par exemple, entre les « petits » EPLE et les EPLE plus importants en effectifs 139 ( * ) ), mais également en fonction des choix d'organisation des collectivités, certaines ayant repris en gestion directe ou déléguée (externalisation) des missions auparavant assurées par le gestionnaire d'EPLE. On estime, tous EPLE confondus, que les tâches effectuées pour le compte des collectivités représenteraient en moyenne moins de 50% des fonctions des quelques 30 000 personnels administratifs de l'Etat environ exerçant actuellement en EPLE. Une tendance à la diminution de ces activités peut être relevée, qui s'explique par leur reprise en gestion directe par la collectivité ou par leur externalisation.

Les missions des adjoints gestionnaires sont les suivantes :

- le pilotage et l'exécution budgétaire (préparation, mise en oeuvre, suivi, opérations de recrutement, bons de commande, régies, analyse des tableaux de bord, etc.) ;

- la gestion matérielle (fonctionnement de l'EPLE pour les missions non reprises par les collectivités au niveau de la logistique, de la maintenance, de l'entretien, de la sécurité, etc.) ;

- la coordination, la simplification et la sécurisation de l'ensemble des missions administratives (secrétariat, scolarité, finances, etc.) ;

- la relation avec les collectivités de rattachement et avec son environnement ;

- la relation avec les services de l'agence comptable et du rectorat ;

- le renforcement de la communication et de la concertation à tous les niveaux ;

- l'appui aux chefs d'établissement en matière d'administration de la pédagogique ;

- le contrôle interne sur l'ensemble des métiers couvrant son champ de compétences ;

- le contrôle de gestion ;

- la comptabilité analytique en lien avec l'agent comptable.

Les adjoints gestionnaires interviennent dans des domaines très divers, sans lien avec les missions de la collectivité de rattachement : droits constatés, gestion administrative, dont celle des élèves (bourses, aides sociales...), enquêtes administratives, hygiène et sécurité, recrutement des assistants d'éducation, régies de recettes et d'avances, ... N'ayant pas vocation à être exclusivement dédiés à des fonctions logistiques, ils participent à l'activité pédagogique et éducative de l'établissement, s'impliquant dans les projets scolaires à destination des élèves (voyages et sorties scolaires...). Ils disposent également d'une voix délibérative au sein des conseils de discipline 140 ( * ) .

1.1.4. L'évolution des fonctions de l'adjoint gestionnaire au regard des compétences de la collectivité de rattachement

Sur le plan des ressources humaines, le chef d'établissement et le gestionnaire ne disposent pas de l'autorité hiérarchique sur l'ensemble des personnels de l'établissement ; les ATTEE relèvent de la collectivité de rattachement et ne sont placés que sous leur autorité fonctionnelle. Dans un rapport récent, les membres des inspections générales du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports menant une mission sur l'autonomie des EPLE affirment n'avoir « certes pas observé de tensions manifestes, mais les personnels de direction regrettent souvent d'être peu informés des décisions relatives à ces agents (autorisations d'absence, congés, avancement, promotion, mobilité, etc.) » 141 ( * ) . De fait, les pratiques en matière de gestion des ressources humaines des ATTEE et la part d'autonomie laissée en la matière au chef d'établissement, ainsi que la répartition des rôles entre la collectivité et le binôme chef d'établissement-adjoint gestionnaire varient selon la collectivité et le type d'établissement.

Sur le plan de la gestion budgétaire et du fonctionnement de l'établissement, il est observé, dans un récent rapport des inspections générales du ministère chargé de l'éducation nationale, que si les relations entre les collectivités et les établissements sont « très contrastées suivant les territoires et le niveau de collectivité (...) le cadrage de la collectivité respecte souvent le principe de l'autonomie financière de l'EPLE. Les établissements ne perçoivent le plus souvent pas comme une atteinte à leur autonomie le fait que leur collectivité de rattachement prenne en gestion directe des activités de maintenance et d'entretien : selon les cas, maintenance pour le chauffage et l'énergie, approvisionnement en gaz et électricité, chauffage, fluides, téléphonie, viabilisation, restauration, maintenance, entretien » 142 ( * ) .

Il est en effet fréquent que les collectivités de rattachement reprennent en gestion directe des activités (viabilisation, groupements d'achat, contrats de maintenance, restauration, etc.) auparavant du ressort de l'établissement. A cet égard, « le repositionnement en cours des collectivités territoriales sur leurs compétences » a des impacts directs sur la fonction d'adjoint gestionnaire 143 ( * ) .

Même si, a contrario, certaines activités peuvent être déléguées à l'EPLE par la collectivité, ce qui pose, le cas échéant, la question de la formation de l'adjoint gestionnaire dans les domaines concernés 144 ( * ) , il est globalement constaté une évolution du positionnement des gestionnaires d'EPLE et du périmètre de leur action, qui se traduit par un rétrécissement du contenu de leurs fonctions 145 ( * ) . En effet, dans un contexte budgétaire contraint, les collectivités ont tendance, d'une part, à reprendre en gestion directe des missions ou postes de charges qui relèvent de leurs responsabilités (fluides, contrats d'entretien ou de location, etc.) et, d'autre part, pour certaines, à mettre en place des dispositifs d'organisation du travail des équipes. Le rôle d'encadrant des personnels des collectivités territoriales affectés en EPLE tenu par le gestionnaire est quelquefois remis en cause, par exemple quand la collectivité affecte un chef d'équipe chargé de gérer directement le personnel territorial, certaines allant jusqu'à installer en établissement leurs propres personnels d'encadrement.

Certaines collectivités s'engagent dans la gestion « directe » des EPLE en externalisant intégralement à un tiers (secteur privé 146 ( * ) , société d'économie mixte 147 ( * ) ...) un pan complet d'un service. Ce phénomène concerne essentiellement la restauration des élèves 148 ( * ) ou le nettoyage des locaux. En restauration, une gestion externalisée peut intégrer tout à la fois l'achat des denrées alimentaires, la préparation et la livraison des repas, inclure les modalités d'inscription des familles, la facturation et le recouvrement. L'impact sur les missions du chef d'établissement et du gestionnaire est réel : leur rôle est nécessairement reconfiguré par rapport à leur périmètre d'intervention antérieur, tant en qualité d'encadrant qu'en qualité de responsable des achats alimentaires, du matériel de cuisine ou de suivi de la maintenance. Les agents territoriaux passent ainsi sous l'autorité fonctionnelle de la société délégataire et non plus sous celles du principal et du gestionnaire.

Dans une organisation au sein de laquelle la collectivité commande directement pour le compte de l'EPLE et assure elle-même le processus de mandatement et de paiement ou laisse l'EPLE commander auprès du fournisseur (marché à bons de commande) et procéder au mandatement de la dépense, l'établissement n'a pas à se soucier des modalités de mise en concurrence, voire n'a pas non plus à gérer les processus de l'engagement, de la liquidation et de l'ordonnancement 149 ( * ) .

Les départements et les régions disposent par ailleurs des leviers juridiques pour mener à bien leurs politiques au sein des EPLE en matière de mutualisation entre établissements (mise en place d'équipes mobiles, de brigades de remplacement...) y compris avec d'autres départements ou régions (article L. 216-12 du code de l'éducation) 150 ( * ) .

Néanmoins , de manière générale, il ne faut pas sous-estimer le rôle du gestionnaire qui reste en contact direct avec les fournisseurs, en coordonnant et en contrôlant le travail ou la maintenance et en s'assurant que les prestations sont correctement réalisées.

Le mouvement de reprise en gestion directe par les collectivités territoriales, des missions que la loi leur a confiées, est amorcé et devrait logiquement se poursuivre, en premier lieu pour faire face aux contraintes financières auxquelles elles sont exposées. Par ailleurs, cette tendance, dépendante des décisions des collectivités, n'est pas homogène sur l'ensemble du territoire. Les pratiques diffèrent nettement selon les collectivités, notamment selon qu'il s'agit de départements ou de régions. On constate ainsi que la réduction, parfois très marquée, du périmètre de l'activité de la gestion matérielle dans les EPLE affecte plus particulièrement le rôle des adjoints gestionnaires des collèges. Les régions se sont en effet moins engagées dans cette démarche que les départements. Au final, le périmètre de l'activité de gestionnaire est donc très variable en fonction de la catégorie des établissements, de la politique de la collectivité de rattachement, de la mutualisation de certaines fonctions (paye, groupement de commandes 151 ( * ) , etc.), mais également de la qualité d'agent comptable - le plus souvent mutualisateur - qui est par ailleurs dévolue à certains d'entre eux.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux : [...] de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ».

Aux termes de la Constitution, le cadre d'une expérimentation est régi soit par l'article 37-1, en vertu duquel « la loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental. », soit par le quatrième alinéa de l'article 72, propre aux collectivités territoriales, qui indique que « sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnellement garanti, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l'a prévu, déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences. » 152 ( * ) .

Dans les deux cas, il s'agit de pouvoir étudier les effets d'une mesure sur un « échantillon » et évaluer ainsi sa pertinence avant de décider de la suite à lui donner (abandon ou généralisation à tout ou partie du territoire national, le cas échéant avec les modifications jugées nécessaires à la suite de l'évaluation).

Les expérimentations de l'article 72 de la Constitution permettent à des collectivités territoriales de déroger elles-mêmes, dans l'exercice d'une compétence qui leur est déjà attribuée, à une norme législative ou réglementaire : il s'agit d'une délégation, décidée par le législateur ou le pouvoir réglementaire national au profit des collectivités territoriales, du pouvoir d'édicter une norme locale dérogeant à la norme nationale.

En revanche, les expérimentations de l'article 37-1 de la Constitution n'impliquent pas une délégation de la compétence normative, laquelle est toujours exercée par l'État, quand bien même les collectivités territoriales sont concernées par la mise en oeuvre de ces expérimentations. De plus, ces expérimentations ne consistent pas nécessairement en une dérogation à une norme existante. Il peut s'agir de la création d'une norme nouvelle ou d'un dispositif nouveau, ou encore d'un transfert de compétence.

Ainsi, la nature du dispositif testé sur un échantillon donné permet de déterminer si l'expérimentation envisagée relève de l'article 37-1 ou de l'article 72 de la Constitution. En l'espèce, l'expérimentation ayant pour objet de mettre en oeuvre une nouvelle compétence des collectivités, et non une dérogation à des normes nationales dans le cadre de l'exercice d'une compétence déjà confiée aux collectivités, elle est donc régie par l'article 37-1 de la Constitution. Elle permettra de déroger au principe d'égalité devant la loi, en adoptant, pour un objet et une durée limitée, des dispositions applicables exclusivement à l'échantillon de collectivités retenu dans le cadre de l'expérimentation.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Les relations entre la collectivité de rattachement et l'EPLE sont régies par le dernier alinéa de l'article L. 421-23 du code de l'éducation, qui dispose qu'une « convention passée entre l'établissement et, selon le cas, le conseil départemental ou le conseil régional précise les modalités d'exercice de leurs compétences respectives » .

Aucune donnée nationale ne recense le nombre de conventions en vigueur entre les EPLE et les collectivités de rattachement. Lorsqu'elle existe, les services de l'Etat ne sont par ailleurs que rarement associés à la rédaction de cette convention.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La détermination de nouvelles compétences pour les collectivités même à titre expérimental ressort du domaine de la loi.

Il est nécessaire de légiférer afin de permettre qu'à titre expérimental, le président du conseil régional ou du conseil départemental ou le président de toute collectivité territoriale de rattachement des établissements publics locaux d'enseignement, puissent donner des instructions, sous couvert du chef d'établissement, à l'adjoint du chef d'établissement chargé des fonctions de gestion matérielle, financière et administrative, au titre des missions relevant de la compétence de la collectivité concernée.

Néanmoins, cette évolution des relations entre la collectivité et l'adjoint gestionnaire ne doit avoir ni pour objet ni pour effet de restreindre ou de remettre en cause l'autonomie de l'EPLE, telle qu'elle est prévue par le cadre législatif et réglementaire. L'autonomie, sur le plan juridique, peut se définir comme le fait pour un établissement public d'être doté d'organes délibérants, de responsabilités et de pouvoirs de décision dans des domaines définis, ainsi que d'un budget propre.

Le conseil d'administration, par ses délibérations, règle les affaires de l'EPLE, y compris dans les matières relevant de la compétence de la collectivité de rattachement (marchés, tarifs...), et fixe notamment les règles d'organisation de l'établissement (article L. 421-4 du code de l'éducation). Le chef d'établissement doit disposer de l'autorité sur l'ensemble des agents de l'Etat et de la collectivité territoriale affectés dans l'EPLE, notamment en termes d'organisation du service et d'encadrement (article L. 421-23 du même code).

2.1.1. L'organisation issue de l'acte II de 2004

En transférant les personnel TOS à la collectivité de rattachement, l'acte II a modifié la relation hiérarchique à l'intérieur de l'établissement scolaire, et complexifié la gestion des ressources humaines 153 ( * ) mais également l'organisation du travail au sein de l'EPLE. La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a ajouté de la complexité dans le pilotage de l'établissement, perceptible dans l'exercice quotidien de ses missions par le gestionnaire : les collectivités territoriales sont amenées à prendre des décisions mises en oeuvre par des personnels d'Etat (chef d'établissement, gestionnaire) et elles gèrent administrativement des agents - les adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement (ATTEE) - dont elles n'organisent pas directement le service.

Administrés par la collectivité dont ils dépendent statutairement, les ATTEE sont placés sous l'autorité du chef d'établissement, lequel « encadre et organise » leur travail selon les termes de l'article L. 421-23 du code de l'éducation. Les ATTEE sont donc soumis à une double autorité : l'autorité hiérarchique de la collectivité territoriale, qui procède à leur nomination, à leur évaluation, gère leur mobilité, prononce les sanctions (...) et l'autorité dite fonctionnelle du chef d'établissement, qui gère leur travail au quotidien, assisté par le gestionnaire qui « organise le travail » de ces personnels en vertu de l'article R. 421-13.

Par ailleurs, le gestionnaire accomplit au quotidien des fonctions liées aux nouvelles missions de service public de la collectivité territoriale, en matière de restauration, d'hébergement, d'accueil, et d'entretien général et technique. A cet effet, selon le type d'EPLE et les choix d'organisation retenus par la collectivité, une partie plus ou moins grande de son activité concerne des tâches relevant de la compétence de cette dernière.

Tant l'introduction de la dualité d'employeurs (dyarchie) pour les ATTEE que l'accomplissement par les gestionnaires de fonctions liées aux compétences des collectivités territoriales ont conduit à une évolution importante du rôle du gestionnaire d'établissement et à un questionnement quant à son statut de personnel d'Etat.

2.1.2. Les demandes des collectivités territoriales à l'égard des adjoints gestionnaires

Personnels d'Etat, les adjoints gestionnaires sont amenés à agir dans le champ de compétences de la collectivité territoriale, qu'il s'agisse de la gestion au quotidien, de l'encadrement et de l'organisation du service des ATTEE, ou de la mise en oeuvre des politiques de la collectivité au sein de l'EPLE en matière de restauration, d'hébergement, d'accueil, etc.

Du fait d'une activité en grande partie exercée pour le compte de la collectivité de rattachement depuis 2005, mais demeurant sous l'autorité hiérarchique de l'Etat, dont il dépend statutairement (évaluation, formations..), l'ambiguïté du caractère hybride du positionnement du gestionnaire est signalée 154 ( * ) . La double tutelle sur les personnels ATTEE est dénoncée par des collectivités territoriales comme source de difficultés, de confusions et de rigidité dans le travail quotidien, d'autant plus injustifiée que, contrairement aux personnels de direction, les gestionnaires n'exercent selon certaines d'entre elles, aucune activité pédagogique directe, pour le compte des élèves, au nom de l'Etat.

Quoique la réalité des difficultés potentielles varie considérablement en fonction du type d'établissement, du degré d'implication de la collectivité dans la vie de l'EPLE et de son niveau d'exigence, cette situation singulière suscite des interrogations et par conséquent des demandes de la part de certaines collectivités de rattachement qui estiment ne pas avoir suffisamment la maîtrise des politiques qu'elles souhaitent conduire. A ce titre, la question - légitime - du transfert des gestionnaires à la collectivité de rattachement est régulièrement au centre des débats publics, proposée dans divers rapports parlementaires et régulièrement rappelée à l'occasion des projets de loi sur l'éducation ou la décentralisation.

Ainsi, dans le cadre de la préparation du présent projet de loi, les départements et les régions ont défendu le scénario d'un transfert, sous leur autorité, des gestionnaires des collèges et des lycées publics, en lien avec les compétences décentralisées qui leur ont été confiées en matière d'établissements scolaires. C'est notamment ce que préconise le rapport « New Deal départemental » de février 2019, socle de référence de l'Assemblée des départements de France (ADF). Cette dernière estime en effet que le système est aujourd'hui déséquilibré au détriment de la collectivité territoriale, celle-ci ne disposant pas des leviers lui permettant de mener une politique globale de gestion de ses agents territoriaux et de veille technique sur le patrimoine, ou d'organiser une politique d'achat à l'échelle départementale et des mutualisations entre les EPLE de son ressort. Les collectivités regrettent ainsi de n'avoir aucun pouvoir opérationnel sur les agents territoriaux exerçant au sein des EPLE, alors même qu'ils sont nommés et rémunérés par elles et qu'ils exercent des missions relevant de leurs compétences.

L'organisation actuelle semble déséquilibrée et défavorable aux collectivités territoriales. Certaines d'entre elles dénoncent ainsi les difficultés à mener une politique départementale ou régionale globale de gestion des ATTEE, notamment en l'absence d'obligation, pour les adjoints gestionnaires, d'utiliser des référentiels managériaux communs à l'ensemble des collèges d'un même département ou des lycées d'une même région. Des évolutions positives sont souhaitées notamment en matière de flexibilité, de fluidité et de cohérence dans la gestion des personnels ATTEE (recrutements, carrière, évaluation).

Elles déplorent également les éventuels retards dans l'appropriation des approches contemporaines du management, dus à leur incapacité juridique à obliger les adjoints gestionnaires à suivre les formations professionnalisantes appropriées. Un des enjeux, par exemple, est de faire monter en compétence les adjoints gestionnaires, afin qu'ils puissent être en capacité de suivre les travaux et travailler avec les entreprises lorsque la collectivité souhaite, par souci de réactivité, déléguer aux EPLE des petits travaux.

Elles regrettent par ailleurs l'absence de référentiels techniques communs aux EPLE de leur ressort sur la qualité des bâtiments et des équipements, entravant une politique de veille active sur le patrimoine. Elles estiment également qu'il leur est difficile de mener tant une politique d'achat raisonnée à l'échelle départementale ou régionale (développement des approvisionnements locaux, qualité de l'alimentation, massification des achats, application de critères sociaux et environnementaux, etc.) que des mutualisations et des coopérations entre les EPLE de leur ressort, dans un souci de rationalisation de la gestion.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'enjeu de la mesure envisagée est de mieux prendre en compte les attentes des collectivités de rattachement, et ce faisant, d'améliorer leurs relations avec les EPLE dont elles ont la charge, sans pour autant fragiliser ni l'équilibre de la gouvernance ni le fonctionnement de l'EPLE.

L'objectif, pour ce qui concerne les seules missions entrant dans le champ de compétences de la collectivité de rattachement, est, d'une part, de renforcer la capacité de cette dernière à s'adresser directement à l'adjoint gestionnaire et, d'autre part, de faciliter la mise en oeuvre, par les personnels administratifs, des politiques décidées par la collectivité, et de favoriser l'atteinte des objectifs qu'elle aura préalablement fixés.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Décentralisation des personnels administratifs de l'Etat exerçant en EPLE et participant à la mise en oeuvre des compétences de la collectivité de rattachement

L'option d'une décentralisation des personnels administratifs de l'Etat exerçant en EPLE et participant à la mise en oeuvre des compétences de la collectivité de rattachement - c'est-à-dire les adjoints gestionnaires mais également les autres personnels qui travaillent à leurs côtés et sous leur autorité - n'a pas été retenue en raison des forts impacts que cela produirait sur la gouvernance, le pilotage et le fonctionnement de l'établissement scolaire, et plus globalement sur l'ensemble du système éducatif.

Pour mémoire, la question du transfert des gestionnaires et de l'ensemble des agents administratifs intervenant pour le compte de la collectivité de rattachement s'est posée dès la discussion parlementaire sur la loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Cette solution, que ne prévoyait pas le texte initial du Gouvernement, avait alors été rejetée à l'initiative des rapporteurs du texte 155 ( * ) , en raison notamment de la « dyarchie à la tête des établissements, entre le gestionnaire et le chef d'établissement, susceptible de créer des tensions et de nuire à la bonne marche des établissements » 156 ( * ) que cela créerait.

Le transfert des adjoints gestionnaires à la collectivité de rattachement non seulement ne résoudrait pas les potentielles difficultés que relèvent les collectivités territoriales, dès lors que l'EPLE continuerait d'être soumis à la double tutelle de l'Etat et de la collectivité et que le gestionnaire demeurerait sous l'autorité du chef d'établissement 157 ( * ) , mais en outre introduirait une dyarchie au sein de la gouvernance de l'établissement, à même de déstabiliser profondément son mode de fonctionnement et de s'avérer au final préjudiciable.

Par ailleurs, au-delà des plus de 1 200 adjoints gestionnaires exerçant des fonctions d'agent comptable, aucunement transférables aux collectivités territoriales, il importe de rappeler que les adjoints gestionnaires exercent des missions qui ne relèvent pas des compétences de la collectivité, ces fonctions représentant une part significative de leur activité.

Un tel transfert aurait donc de profondes incidences non seulement sur les fonctions des personnels administratifs de l'Etat exerçant en EPLE qui, en tant que membres de la communauté éducative, ont des missions consistant à organiser et à rendre possible l'acte d'enseignement au sein de l'établissement scolaire, mais encore sur le fonctionnement même de l'EPLE. En contradiction avec la logique d'unicité et d'unité de direction de l'EPLE qui prévaut depuis leur création dans les années 1980, l'EPLE risquerait d'être divisé entre une direction axée sur la pédagogie, incarnée notamment par le chef d'établissement et ses adjoints, et une direction exclusivement logistique, assurée par l'adjoint gestionnaire, qui dépendrait directement de la collectivité de rattachement.

Il importe également de signaler que la perspective d'un transfert des adjoints gestionnaires, emporterait nécessairement en parallèle, par cohérence, le transfert de l'ensemble des personnels administratifs d'Etat affectés en collège et en lycée, soit au total environ 30 000 agents 158 ( * ) , et susciterait sans nul doute l'opposition des agents concernés.

Un tel mouvement de décentralisation serait fondamentalement incompatible avec la démarche engagée depuis quelques années par le ministère chargé de l'éducation nationale pour faire des EPLE de véritables « centres de services » ancrés dans les territoires, tournés tant vers les usagers que vers les personnels (missions de gestion des ressources humaines de proximité, fonctions de soutien à la direction d'école notamment dans les territoires urbains sensibles ou en milieu rurale, mise en place des cités éducatives, constitution de pôles en EPLE dans le cadre de l'école inclusive, évaluation des établissements scolaires, ...).

De surcroît, compte tenu de l'hostilité d'une grande partie des 30 000 agents concernés à rejoindre les collectivités territoriales, il en résulterait, au-delà des difficultés certaines en termes de dialogue social, une manoeuvre RH complexe et fortement risquée sur le plan budgétaire. Sur le plan juridique en effet, en application des dispositions de la loi n°2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (loi MAPTAM), les agents qui ne sont affectés que partiellement à l'exercice des compétences transférées ne peuvent être transférés automatiquement à la collectivité. Il est alors procédé à une compensation financière correspondant à la masse salariale du volume d'emplois à transférer, en agrégeant les fractions d'emplois. Les personnels administratifs des EPLE ne consacrant qu'une partie de leurs activités aux missions relevant de la responsabilité des collectivités, il est juridiquement exclu, à droit constant, de les soumettre à un transfert automatique à la collectivité de rattachement 159 ( * ) . Dans l'hypothèse, vraisemblable, d'un contingent réduit de volontaires pour rejoindre les collectivités, le transfert des emplois à ces dernières, sous forme de compensation financière, s'accompagnerait pour l'Etat de l'obligation de maintenir au ministère de l'éducation nationale les effectifs concernés, soit plusieurs milliers d'agents. Cela serait très difficilement supportable en termes budgétaires et se traduirait nécessairement, le temps de réaliser une manoeuvre RH d'ampleur, par d'importants surnombres, probablement sur un temps long.

Pour l'ensemble de ces raisons, les impacts négatifs d'un transfert des personnels administratifs des EPLE étant sans commune mesure avec les avantages qui pourraient être avancés par certaines collectivités en termes de clarté et de fluidité de leur action, cette hypothèse n'a pas été retenue.

3.1.2. Renforcement du lien entre la collectivité de rattachement et l'adjoint gestionnaire

Un second scénario visant à renforcer le lien entre la collectivité de rattachement et l'adjoint gestionnaire et conséquemment mieux prendre en compte les attentes de la collectivité vis-à-vis de l'établissement, consistait à introduire directement dans le texte de loi, notamment à l'article L. 421-23 du code de l'éducation, deux éléments nouveaux en faveur de la collectivité.

D'une part, l'obligation d'un entretien entre l'adjoint gestionnaire et l'autorité de la collectivité de rattachement ainsi que l'avis formel sur l'adjoint gestionnaire rendu par la collectivité suite à cet entretien, en amont de l'entretien professionnel d'évaluation, auraient permis, au-delà du moment de dialogue privilégié :

- de mieux sensibiliser le gestionnaire aux objectifs, aux contraintes et aux attentes de la collectivité ;

- s'agissant de la mise en oeuvre des compétences de la collectivité, de porter un avis formel sur la manière de servir du gestionnaire et sur l'atteinte des objectifs, à même d'alimenter l'entretien d'évaluation professionnel de l'agent et de constituer une partie de cette évaluation.

D'autre part, l'institution d'une obligation de formation des adjoints gestionnaires, à des moments clef de la carrière (prise de fonction, changement de catégorie d'établissement, etc.) et dans des conditions à déterminer (à l'initiative de la collectivité via les centres de gestion ou le CNFPT, dans le cursus de professionnalisation du gestionnaire via les instituts régionaux d'administration, etc.), aurait permis de sensibiliser et former les intéressés aux problématiques territoriales (fonctionnement des collectivités territoriales, management des équipes territoriales, etc.), ainsi que le réclament les collectivités.

Ce choix n'a cependant pas été privilégié.

3.1.3. Renforcement du conventionnement existant entre les différents acteurs

Un troisième scénario avait pour objet de renforcer le conventionnement existant entre les différents acteurs, notamment entre l'EPLE et la collectivité de rattachement, à travers la convention prévue à l'article L. 421-23 du code de l'éducation, mais également entre l'EPLE, l'Etat et la collectivité via le contrat d'objectifs prévu à l'article L. 421-4 du même code conclu entre l'EPLE et l'académie, mais auquel la collectivité peut participer depuis la loi n°2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.

Alors que, au niveau juridique, rien n'impose actuellement que soient pris en compte les objectifs propres de la collectivité en matière éducative lorsque cette dernière est partie prenante dudit contrat, une évolution envisageable était par conséquent de rendre obligatoire l'intégration dans ce document des objectifs communs et partagés entre l'académie et la collectivité de rattachement, aux côtés des objectifs nationaux et académiques.

On rappellera par ailleurs que depuis 2005, la convention entre l'EPLE et la collectivité de rattachement prévue à l'article L. 421-23 a vocation à préciser les modalités d'exercice de leurs compétences respectives. Cette convention doit être l'occasion de résoudre de façon formelle et, si possible, durable, les éventuelles difficultés résultant notamment du double rattachement des agents techniques territoriaux à la collectivité territoriale et à l'établissement d'affectation. Cette convention permettrait, par exemple, l'institutionnalisation d'échanges sur les règles de management et de gestion des personnels en vigueur chez chacun d'entre eux.

La perspective d'un renforcement de la politique de conventionnement tripartite négociée entre l'EPLE et la collectivité de rattachement, avec l'aide des services de l'Etat le cas échéant, est notamment défendue par les personnels des EPLE (chefs d'établissement et gestionnaires.

Cette option n'a pas été retenue.

3.1.4. Reconnaissance d'une autorité fonctionnelle de la collectivité de rattachement sur les personnels administratifs de l'EPLE sous statut d'Etat

Un dernier scénario consistait en la reconnaissance d'une autorité fonctionnelle de la collectivité de rattachement sur les personnels administratifs de l'EPLE sous statut d'Etat, notamment les adjoints gestionnaires, dont une partie seulement des missions relève du champ de compétences de la collectivité.

Le recours à la juxtaposition entre une autorité fonctionnelle et une autorité hiérarchique est devenu assez courant dans le droit positif français, que ce soit entre les services de l'Etat au niveau préfectoral 160 ( * ) ou académique, ou entre un EPCI à fiscalité propre et des communes membres pour la gestion de services communs 161 ( * ) . Mais tant dans ce dernier cas que pour les ATTEE au sein de l'EPLE, l'autorité fonctionnelle est au bénéfice de l'établissement public, pour permettre à l'exécutif de l'établissement d'exercer une autorité sur des agents dont il n'assure pas la gestion et ainsi de disposer des moyens pour piloter l'établissement au titre de missions qui lui ont été confiées et qu'il exerce directement. A défaut d'avoir ses propres personnels en gestion directe, l'octroi d'une autorité fonctionnelle sur des personnels dépendant statutairement d'une autre autorité est en effet un des éléments indispensables à la réalisation de ses missions par l'établissement public.

Or en l'espèce, la reconnaissance d'une autorité fonctionnelle de la collectivité à l'égard des adjoints gestionnaires et de l'ensemble des personnels administratifs d'Etat, exerçant partiellement leurs missions au nom de la collectivité, aurait les conséquences inverses, à même d'affaiblir significativement la notion d'établissement public en permettant de manière inédite à l'une des autorités de tutelle d'exercer un pouvoir direct à l'égard d'un subordonné de l'exécutif de l'établissement. Une telle « innovation » irait par conséquent à l'encontre du principe même d'autonomie de l'EPLE. C'est en vertu de ce principe d'autonomie que la collectivité territoriale se borne à fixer des orientations et des objectifs à l'établissement et au proviseur ou au principal, ce dernier gardant le choix des modalités pour y parvenir, le cas échéant, après approbation par le conseil d'administration, au sein duquel la collectivité est représentée.

Parce que considéré comme étant de nature à affaiblir considérablement le positionnement et les capacités d'action du chef d'établissement et, ce faisant, à remettre en cause l'actuel fonctionnement de l'EPLE, tel qu'il résulte des choix du législateur depuis quatre décennies, ce scénario a donc été écarté. En effet, l'exercice par la collectivité de rattachement d'une autorité fonctionnelle directe sur l'adjoint reviendrait, d'une part, à « contourner » le chef d'établissement mais également à le déposséder, de fait, de tout pouvoir sur l'ensemble de la gestion matérielle de l'EPLE, puisque les personnels ATTE, actuellement placés sous l'autorité fonctionnelle du chef d'établissement, passeraient sous l'autorité fonctionnelle de l'adjoint, donc de la collectivité.

L'autorité du chef d'établissement sur l'ensemble des personnels de l'établissement constitue en effet la nécessaire condition d'un pilotage efficace de l'EPLE, dans toutes ses dimensions, tant pédagogiques et éducatives qu'administratives, et du nécessaire lien entre ces deux sphères. Cette autorité est également la condition de l'exercice des responsabilités qui incombent au chef d'établissement en termes de sécurité et de sûreté. Au final, il est à craindre, dans l'hypothèse d'un tel scénario, que le dispositif envisagé ne conduise à un fonctionnement « en régie » par la collectivité, lequel ferait obstacle à un pilotage global de l'activité par l'exécutif de l'EPLE, au risque, d'une part, que les spécificités et le projet de l'établissement ne soient plus pris en compte et, d'autre part, que cela génère des conflits et des dysfonctionnements.

Ainsi, alors que le chef d'établissement est responsable de l'hygiène, de la santé et de la sécurité au sein de l'établissement, le risque serait que l'exercice de ses compétences en la matière soit subordonné à un accord de la collectivité ou à tout le moins de son adjoint, dès lors que les agents concourant à cette sécurité « matérielle » ne seraient plus sous son autorité directe.

Un tel dispositif serait potentiellement dysfonctionnel. En effet, l'autorité fonctionnelle ne permettra pas à la collectivité de modifier les attributions ou de sanctionner un adjoint gestionnaire, lequel, en sa qualité de personnel d'Etat, demeurera placé sous l'autorité hiérarchique des services académiques et géré conformément aux règles statutaires dont il relève 162 ( * ) . Le risque que des instructions contradictoires soient données à l'adjoint gestionnaire, d'une part, par le chef d'établissement et, d'autre part, par la collectivité ne contribuerait pas à fluidifier et améliorer les relations entre l'établissement et la collectivité, en contradiction avec les objectifs visés. Il s'agit d'éviter de créer des conditions structurelles de possibles injonctions paradoxales permanentes.

Pour toutes ces raisons, il a été estimé préférable de ne pas faire émerger une nouvelle autorité fonctionnelle, mais un simple pouvoir d'instruction, et d'expérimenter, au sens juridique, cette évolution dans des conditions précises.

Enfin, la dernière option, qui a été retenue, consistait à prévoir une expérimentation d'un pouvoir d'instruction du président du conseil régional, du président du conseil départemental ou du président de toute collectivité territoriale de rattachement des établissements publics locaux d'enseignement, sous couvert du chef d'établissement, vis à vis de l'adjoint du chef d'établissement chargé des fonctions de gestion matérielle, financière et administrative, au titre des missions relevant de la compétence de la collectivité concernée.

3.2. OPTION RETENUE

La mesure envisagée consiste à expérimenter, sur une période de trois années, un pouvoir d'instruction de la collectivité de rattachement à l'égard des gestionnaires, sous couvert du chef d'établissement.

L'expérimentation ne concerne pas les gestionnaires des établissements mentionnés à l'article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime.

En tant qu'agents concourant aux missions de service public dont sont chargés tant les départements pour les collèges que les régions pour les lycées, les adjoints gestionnaires pourront recevoir des instructions, sous le couvert du chef d'établissement, de la part des exécutifs des collectivités concernées par l'expérimentation.

Le président du conseil départemental ou du conseil régional ou le président de toute collectivité territoriale de rattachement des établissements publics locaux d'enseignement sera ainsi en capacité de fixer des objectifs aux gestionnaires (i.e. gestion matérielle, financière et administrative), dans les seuls domaines relevant de la compétence de la collectivité. Par exemple, en matière de restauration scolaire, il pourrait être demandé au gestionnaire d'engager le collège ou le lycée dans un groupement de commandes à l'échelle départementale ou régionale. Afin de veiller à l'alignement des gestionnaires vis-à-vis des objectifs définis par les collectivités, celles-ci disposeraient ainsi d'un droit à les réunir et à les former.

Si le pouvoir d'instruction est un des éléments de l'autorité fonctionnelle, il ne la recouvre pas complètement. Ainsi le pouvoir d'instruction n'a pour effet de permettre à la collectivité ni d'encadrer les adjoints gestionnaires, ni d'organiser le travail de ces derniers, lesquels demeurent sous l'autorité fonctionnelle du chef d'établissement, ni de les évaluer.

Ce pouvoir d'instruction s'exercerait ainsi dans le respect de l'autonomie de l'établissement public local d'établissement telle qu'elle est définie à l'article L. 421-4 du code de l'éducation.

Le pouvoir d'instruction ne pourra avoir pour effet de restreindre l'autonomie dont dispose l'EPLE et qui lui est reconnu par les textes ; il devra s'exercer dans le respect de l'autonomie, ainsi qu'elle est définie à l'article L. 421-4 du code de l'éducation. Au titre de cet article, le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires de l'établissement. Notamment dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur et des objectifs définis par les autorités compétentes de l'Etat, il fixe les principes de mise en oeuvre de son autonomie pédagogique et éducative et, en particulier, ses règles d'organisation. Le chef d'établissement, quant à lui, exécute les délibérations du conseil d'administration (article L. 421-3 du code de l'éducation).

L'EPLE dispose d'une autonomie dans quatre grands champs : l'organisation pédagogique, la gestion de ses ressources financières, la gestion de ses moyens horaires et la gestion de ses ressources humaines.

Le pouvoir d'instruction est limité par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Le principe de spécialité, qui régit les EPLE comme tout autre établissement public, interdit notamment aux EPLE de se voir confier des compétences mutualisées au profit d'autres personnels morales. Ainsi, un EPLE n'a pas vocation à produire des repas dans le cadre de groupement de services, au profit d'autres entités administratives que des établissements scolaires.

Par ailleurs, la loi prévoit que l'expérimentation est conditionnée à l'insertion dans la convention bilatérale, prévue à l'article L. 421-23 du code de l'éducation, de dispositions précisant les modalités de l'articulation entre l'autorité du chef d'établissement et le pouvoir d'instruction de la collectivité de rattachement à l'égard de l'adjoint gestionnaire. A défaut de dispositions de ce type dans la convention, l'expérimentation d'un pouvoir d'instruction de la collectivité sur l'adjoint gestionnaire ne sera pas effective.

Outre la conditionnalité des dispositions relatives à l'articulation entre l'autorité du chef d'établissement et le pouvoir d'instruction de la collectivité de rattachement vis-à-vis de l'adjoint gestionnaire prévue par la loi, un décret en Conseil d'Etat devra indiquer « les éléments nécessairement prévus (...) par la convention prévue au L. 421-23 du code de l'éducation », au titre de l'expérimentation.

L'expérimentation doit être un levier pour réactiver la convention bilatérale entre l'EPLE et la collectivité de rattachement. A cet effet, sans que la liste soit exhaustive, la convention bilatérale dans le cadre de l'expérimentation aurait vocation à aborder diverses thématiques parmi les missions exercées par les adjoints gestionnaires : restauration scolaire (circuits courts, nourriture bio, homogénéisation des pratiques, etc.), hébergement, entretien et fonctionnement, veille du patrimoine, développement durable, encadrement et organisation du travail des personnels ATTEE, etc.

L'association de représentants des EPLE et des collectivités de rattachement aux travaux sur la liste des éléments, fixés par le décret en Conseil d'Etat, que devra comporter la convention bilatérale devra être envisagée.

L'expérimentation est prévue pour une période de trois ans, à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat. Cette période correspond au délai minimum utile pour une évaluation efficace de l'expérimentation afin d'en tirer les enseignements nécessaires.

Les conditions et les objectifs de l'expérimentation ainsi que les modalités d'évaluation de ses résultats seront déterminées par un décret en Conseil d'Etat. L'expérimentation est notamment conditionnée à l'insertion, dans la convention prévue à l'article L. 421-23 du code de l'éducation, de dispositions précisant les modalités de l'articulation entre l'autorité du chef d'établissement et le pouvoir d'instruction de la collectivité de rattachement à l'égard de l'adjoint du chef d'établissement. Le décret indiquera les éléments nécessairement prévus, au titre de l'expérimentation, par la convention prévue au L. 421-23 du code de l'éducation, et détermine les conditions de fixation de la liste des collectivités territoriales volontaires concernées par l'expérimentation.

Le ministère chargé de l'éducation et le ministère chargé des collectivités locales s'attacheront, dans une démarche partenariale, à engager une réflexion avec les collectivités territoriales et les EPLE autour des conditions d'évaluation de l'expérimentation, en tirant profit des enseignements du rapport de l'inspection générale de l'administration de juin 2020 sur L'évaluation des politiques partagées entre l'État et les collectivités territoriales .

En effet, si, historiquement, l'Etat mobilise des moyens significatifs pour évaluer ses politiques, et si, plus récemment, de grandes collectivités territoriales se sont également attachées à structurer l'évaluation des responsabilités qui leur ont été confiées par la loi, chaque acteur intervient dans son domaine de compétence propre et « la pratique d'une évaluation partagée entre, d'une part, l'État et, d'autre part, les collectivités apparaît, en creux, comme un manque tant au niveau national que territorial » . L'évaluation des politiques partagées entre l'État et les collectivités territoriales est ainsi considérée « comme le parent pauvre de l'évaluation » alors que les politiques partenariales sont au coeur de l'action publique, beaucoup de politiques publiques associant « aujourd'hui l'État et les collectivités territoriales selon des modalités de plus en plus imbriquées qui rendent difficile l'identification de compétences exclusives » 163 ( * ) .

Le rapport annuel du Conseil d'Etat de 2020 consacré à l'évaluation des politiques publiques préconise également de développer la coopération de l'Etat et des collectivités territoriales pour promouvoir l'évaluation des politiques publiques partagées, point faible de l'évaluation 164 ( * ) .

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS SUR LES GESTIONNAIRES DE COLLÈGES ET LYCÉES

Les adjoints gestionnaires pourront recevoir des instructions de la part des exécutifs des collectivités concernées par l'expérimentation, sous couvert des chefs d'établissement. Des objectifs pourraient leur être fixés dans les seuls domaines relevant de la compétence de la collectivité.

Par exemple, en matière de restauration scolaire, il peut s'agir d'une demande de groupement de commandes à l'échelle départementale ou régionale. Afin de veiller à l'alignement des gestionnaires vis-à-vis des objectifs définis par les collectivités, celles-ci disposeraient ainsi d'un droit à les réunir et à les former.

Il conviendra par ailleurs de veiller à prendre en compte, dans le cadre de cette expérimentation, la dimension psychologique des adjoints gestionnaires, attachés à leur statut de personnels d'Etat.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les impacts de la mise en place d'un pouvoir d'instruction des collectivités sur les adjoints gestionnaires feront l'objet de l'évaluation prévue par la loi, à l'issue de l'expérimentation.

La mise en place d'un pouvoir d'instruction de la collectivité à l'égard des personnels d'Etat que sont les adjoints gestionnaires facilitera la mise en oeuvre des politiques territoriales de la collectivité au sein et par l'EPLE, sous réserve des conclusions qu'apporteront à cet égard les évaluations qui seront effectuées dans le cadre de l'expérimentation, à l'issue de la période des trois années.

L'objectif est bien de faciliter l'articulation entre la mise en oeuvre des objectifs de la collectivité et le fonctionnement des EPLE.

5. CONSULTATIONS ET MODALITES D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES.

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la disposition envisagée a été soumise au Conseil national de l'évaluation des normes.

En application de l'article 34 du décret n°2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat, la disposition envisagée a été soumise au Comité technique ministériel de l'éducation nationale.

En application des articles L. 231-1 et R. 231-1 du code de l'éducation, la disposition envisagée a été soumise au Conseil supérieur de l'éducation.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions envisagées s'appliqueront pour une période de trois ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat.

5.2.2. Application dans l'espace

La disposition est applicable à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception de la Nouvelle Calédonie où les établissements publics locaux d'enseignement sont des établissements publics de la Nouvelle Calédonie et des provinces du fait du transfert de la compétence enseignement secondaire, et de la Polynésie Française où ces établissements relèvent du pays.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'État détermine les conditions et les objectifs de l'expérimentation, en particulier les modalités selon lesquelles les collectivités territoriales portent à la connaissance de l'autorité compétente leur souhait d'y participer, les critères selon lesquels est fixée, par arrêté conjoint des ministres chargés des collectivités territoriales et de l'éducation, la liste des collectivités retenues, les clauses devant figurer dans la convention, les règles de leur transmission aux services académiques et de l'administration centrale ainsi que les modalités de l'évaluation de ses résultats.

CHAPITRE IV - LA CULTURE

Article 42 : Interventions des collectivités territoriales en faveur des établissements de spectacles cinématographiques

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1 CADRE GÉNÉRAL

A la faveur d'une politique déterminée des pouvoirs publics, la France se caractérise par le plus grand parc d'établissements de spectacles cinématographiques en Europe, avec plus de 6 000 écrans pour plus de 2 000 établissements. La densité du parc de salles de cinéma permet de couvrir l'ensemble du territoire ainsi que toutes les tailles d'agglomérations, les plus grandes comme les plus petites : 60 % des cinémas sont situés dans les communes de moins de 10 000 habitants, et les deux tiers dans les communes de moins de 20 000 habitants, ainsi que dans de nombreux territoires ruraux. Ce maillage territorial permet un accès quasi universel à la pratique du cinéma, qui est le loisir culturel préféré des Français. La salle de cinéma est bien souvent, dans les petites agglomérations, le seul équipement culturel présent ; elle est un relais culturel essentiel et un vecteur de lien social déterminant pour ces territoires.

Le parc de salles français est ainsi unique en Europe tant par sa densité que par sa diversité : plus de la moitié des cinémas actifs en France n'a qu'un seul écran, plus de la moitié d'entre eux relève d'une gestion publique ou associative et plus de 60 % des cinémas sont classés art et essai.

Comme l'a relevé l'INSEE (« INSEE Première » n°1677 - novembre 2017), plus de la moitié des établissements cinématographiques (55,9 %) relèvent d'un modèle non lucratif. Ces cinémas peuvent se développer parce que, comme le relève l'INSEE, « de nombreuses municipalités se sont engagées activement dans le domaine de la projection cinématographique pour éviter la fermeture du cinéma local et, partant, une désertification de l'animation sociale et culturelle ».

En réalité et face à la situation économique fragile des cinémas locaux, tous les échelons territoriaux, communes, établissements publics de coopération intercommunale, départements et régions, se sont engagées activement dans le soutien aux salles de cinéma de proximité.

Afin que ces équipements offrent la même qualité de confort et de projection au public que les multiplexes commerciaux, des investissements réguliers et importants sont absolument nécessaires. Dans ce contexte, l'intervention directe des collectivités locales pour financer ces investissements et les dépenses de fonctionnement qui leur sont associées, en complément des aides existant au niveau étatique, notamment les aides alloués par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), apparaît comme indispensable.

L'effet de ces interventions des collectivités est documenté dans l'étude citée : selon l'INSEE, les salles de cinéma relevant du modèle non lucratif se sont développées en raison de ces interventions (+ 4 % d'établissements entre 2005 et 2015) et leur part de marché a crû de deux points sur la même période.

1.2 ÉTAT DU DROIT EN VIGUEUR

Les articles 7 et 8 de la loi n° 92-651 du 13 juillet 1992 relative à l'action des collectivités locales en faveur de la lecture publique et des salles de spectacle cinématographique ont créé la possibilité pour les communes et les départements ainsi que, par renvoi, pour les régions, d'attribuer des subventions aux établissements cinématographiques afin d'en favoriser le maintien et la modernisation.

A l'origine, ce dispositif ouvrait la possibilité d'attribuer aux salles réalisant en moyenne moins de 2 200 entrées hebdomadaires des subventions dont le montant ne devait pas excéder 30 % du chiffre d'affaires de l'établissement ou 30 % du coût du projet, si celui-ci portait exclusivement sur des travaux susceptibles de donner lieu à l'octroi d'un soutien financier de l'Etat.

Le champ des établissements cinématographiques bénéficiaires a été élargi par l'article 110 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.

Ainsi, les articles L. 2251-4, L. 3232-4 et L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales ouvrent désormais la possibilité à tous les niveaux de collectivités territoriales, dans les conditions définies aux articles R. 1511-40 à R. 1511-43 du même code, d'attribuer des subventions aux exploitants de salles de cinémas réalisant en moyenne moins de 7 500 entrées hebdomadaires ou qui font l'objet d'un classement art et essai, dans les limites précitées de 30 %. Conformément à l'article L. 5111-4 du code général des collectivités territoriales, le dispositif est applicable aux groupements de collectivités territoriales, aux autres établissements publics locaux et aux établissements publics de coopération intercommunale.

Ces subventions ne peuvent être attribuées à des établissements spécialisés dans la diffusion des films pornographiques ou d'incitation à la violence.

Ces aides font l'objet d'une convention conclue entre l'exploitant et la commune.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1 NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Dans une décision du 10 mars 2021, Société Royal Cinéma , n° 434564, rendue à l'occasion d'un litige relatif à l'attribution d'une aide accordée par la commune de Mont-de-Marsan à un exploitant pour la création d'un cinéma, le Conseil d'Etat juge que les dispositions de l'article L. 2251-4 du code général des collectivités territoriales ne permettent d'accorder une subvention qu'aux cinémas déjà existants et à eux seuls, ce qui interdit de facto d'accorder des aides pour des projets de création d'établissement.

Selon le troisième point de cette décision, « il résulte des dispositions de l'article L. 2251-4 du code général des collectivités territoriales citées au point 2, éclairées par les travaux parlementaires ayant conduit à l'adoption de l'article 7 de la loi n° 92-651 du 13 juillet 1992 relative à l'action des collectivités locales en faveur de la lecture publique et des salles de spectacle cinématographique, dont ces dispositions sont issues, qu'une commune ne peut attribuer de subvention en vertu de ces dispositions qu'à un établissement de spectacle cinématographique qui réalise, à la date de la demande de subvention, quel que soit le nombre de ses salles, moins de 7 500 entrées en moyenne hebdomadaire ou qui a déjà fait l'objet, à la même date, d'un classement art et essai. Une telle subvention ne peut, en revanche, être attribuée pour permettre la création, par une entreprise existante ayant pour objet l'exploitation de salles de spectacle cinématographique, d'un nouvel établissement de spectacle cinématographique. »

Or, depuis l'entrée en vigueur du dispositif de la loi du 13 juillet 1992, certaines collectivités territoriales, qui attribuent beaucoup de subventions sur son fondement, ont estimé qu'elles pouvaient accorder des subventions à des projets de création de salles et non exclusivement à des travaux de rénovation de salles existantes, dès lors que ces projets émanaient d'entreprises cinématographiques existantes.

Les services de l'Etat ne disposent pas d'informations exhaustives sur les subventions accordées par les collectivités territoriales aux salles. Cependant, il peut être raisonnablement supposé que tous les projets - en dehors des plus modestes - de rénovation, d'extension ou de création de cinémas relevant de la petite et moyenne exploitation (c'est-à-dire les projets portés par des opérateurs réalisant moins de 1 % des entrées nationales) qui sollicitent le dispositif d'aide à la petite et moyenne exploitation du Centre national du cinéma et de l'image animée sont, par ailleurs, soutenus par les collectivités territoriales, le cas échéant, sur la base d'autres dispositions législatives.

Ce dispositif a permis de soutenir 18 projets en 2020, pour un montant total d'investissements de 44,1 M€. Les aides accordées par les collectivités territoriales ont représenté une part globale de 29 % de ce montant, atteignant quasiment le plafond de 30% autorisé. Dès lors, le montant global des aides attribué sur le fondement du dispositif en cause peut être estimé, sur le fondement de ces hypothèses, à 13 millions d'euros environ en 2020.

Précisément, en ce qui concerne la création d'établissements, depuis 2014, 50 nouveaux cinémas (regroupant 240 écrans), gérés par des sociétés commerciales ou des associations, ont été soutenus par les collectivités territoriales aux côtés du Centre national du cinéma et de l'image animée. Les aides cumulées des collectivités se sont élevées à près de 25 millions d'euros, répartis de la manière suivante : 52 % par les communes, communautés de communes ou communautés d'agglomérations, 10 % par les départements et 38 % par les régions.

Les nouveaux équipements en question sont situés dans des villes de toutes tailles et sur tout le territoire.

Compte tenu du fort niveau d'endettement de la petite et moyenne exploitation, il ne fait nul doute que ces projets de création de cinémas n'auraient pu aboutir faute d'aide des collectivités territoriales dès lors que ces aides sont en moyenne trois fois plus importantes que celles attribuées dans le cadre des dispositifs mis en oeuvre par le Centre national du cinéma et de l'image animée.

Par conséquent, afin de permettre aux collectivités territoriales de continuer à soutenir la création de nouveaux établissements relevant de la petite et moyenne exploitation, une modification législative est nécessaire pour sécuriser la pratique engendrée par une interprétation extensive de la norme.

2.2 OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif est de tirer les conséquences de la décision du Conseil d'Etat du 10 mars 2021 en précisant l'objet des subventions que les collectivités territoriales peuvent accorder à la petite et moyenne exploitation afin qu'elles puissent continuer à soutenir la création de nouveaux établissements cinématographiques.

Ce soutien est d'autant plus primordial que sa suspension, dans un contexte de crise sanitaire et économique majeur ayant entraîné plusieurs mois de fermeture administrative des salles de cinéma, pourrait s'avérer particulièrement préjudiciable à la densité et la pérennité du parc cinématographique français.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1 OPTIONS ENVISAGÉES

Les subventions à la création de nouveaux établissements cinématographiques pourraient relever du dispositif de droit commun des interventions économiques des collectivités territoriales et groupements

En effet, les aides prévue aux articles L. 2251-4 et L. 3232-6 ne sont pas exclusives d'autres dispositifs d'aides locales 165 ( * ) qui permettent de soutenir la création d'un établissement. Ainsi, en cas de carence de l'initiative privée dans les communes rurales ou comprenant un ou plusieurs quartiers politique de la ville, un établissement cinématographique paraît bien constituer un « service nécessaire aux besoins de la population » 166 ( * ) de nature à justifier une intervention. En outre, un établissement peut bénéficier des aides prévues à l'article L. 1511-2 ou, pour les investissements immobiliers, L. 1511-3 du CGCT, sous réserve qu'elles se traduisent par la « création ou l'extension d'activités économiques ».

Toutefois, l'application de ces dispositions pose trois difficultés :

- A ce jour, les régions n'aident pas la totalité des projets de création de cinémas. Cette option impliquerait donc nécessairement à court ou moyen terme l'abandon d'un nombre substantiel de projets. A titre d'exemple, sur les 50 cinémas créés depuis 2014 évoqués plus haut, près de 10 n'ont reçu aucune aide régionale ;

- En l'absence de financement régional, les projets seraient en tout état de cause conditionnés à l'accord de la région pour que le bloc communal puisse les soutenir, ce qui serait source de complexité, d'incertitudes et de rallongement des délais. En outre, l'intervention du département n'est pas possible ;

- Ces aides ne peuvent concerner des investissements immobilier, compétence exclusive des communes et de leurs groupements en application de l'article L. 1511-3 du CGCT.

L'article L. 1511-3 du CGCT précise que le bloc communal est seul compétent pour allouer des aides à l'immobilier d'entreprise dans un objectif de création ou d'extension d'activité économique. Là aussi, ces dispositions peuvent compliquer l'action des collectivités :

- Elles sont limitées aux aides immobilières. Par conséquent, leur champ d'intervention est plus étroit que celui des aides spécifiques aux salles de cinéma.

- L'intervention de la région n'est possible que par convention, ce qui serait là aussi source d'incertitudes et de rallongement des délais.

- L'intervention du département n'est possible qu'en cas de délégation d'octroi des aides par le bloc communal.

L'ancrage local de l'implantation cinématographique et son rôle essentiel dans le maillage culturel de proximité rendent nécessaire l'autonomie de la décision communale et départementale en ce qui concerne l'octroi d'une telle subvention. Il s'agit aussi de simplifier l'intervention des collectivités pour le montage du projet en ne distinguant pas ce qui relève de l'immobilier de l'équipement, par exemple.

Comme noté plus haut, le soutien des communes, communautés de communes et communautés d'agglomérations a représenté la majorité des financements accordés par les collectivités locales aux cinémas créés depuis 2014.

3.2 DISPOSITIF RETENU

Le présent article modifie les articles L. 2251-4 et L. 3232-4 du code général des collectivités territoriales afin de prévoir expressément la possibilité pour les communes (article L. 2251-4) et les départements (article L. 3232-4) d'attribuer des subventions à des entreprises existantes ayant pour objet l'exploitation de salles de spectacle cinématographique afin de financer la création d'un nouvel établissement cinématographique. Le renvoi opéré par l'article L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales ouvre cette faculté aux régions.

Les conditions relatives à l'éligibilité des établissements au dispositif en termes de nombre d'entrées ou de classement art et essai demeurent inchangées.

L'article prévoit ainsi une nouvelle hypothèse d'intervention des collectivités territoriales et précise que l'exploitant devra se conformer aux engagements mentionnés au premier alinéa en matière de nombre d'entrées ou de labellisation « art et essai » . Ces conditions seront appréciées sur la base des données prévisionnelles du futur établissement telles qu'explicitées dans la convention conclue avec la collectivité. A ce titre, les dispositions règlementaires seront modifiées pour tenir compte de ce nouveau cas de figure. Un décret en Conseil d'Etat viendra préciser les conditions d'attribution et les modalités de remboursement de ces aides.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1 IMPACTS JURIDIQUES

Les dispositions envisagées appellent la modification des articles L. 2251-4 et L. 3232-4 du code général des collectivités territoriales.

4.2 IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les dispositions envisagées n'auront aucun impact économique et financier par rapport à la pratique actuelle.

Elles auront en revanche un impact positif dès lors qu'elles contribueront au maintien de la dynamique de création de nouveaux établissements cinématographiques sur tout le territoire.

4.3 IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les mesures envisagées devraient contribuer à garantir au public l'accès aux oeuvres cinématographiques sur tout le territoire.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Les dispositions envisagées ont été soumises au conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Ces dispositions entrent en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure envisagée s'applique en France métropolitaine et dans les départements et régions d'outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion, Mayotte), en vertu du principe d'identité législative pour les collectivités de l'article 73.

De même, à Saint-Barthélemy (art. LO6213-1 du code général des collectivités territoriales CGCT), Saint-Martin (art. LO6313-1 du même code) et Saint-Pierre-et-Miquelon (art.
LO6413-1 du même code), les dispositions législatives et réglementaires sont applicables de plein droit, à l'exception de celles intervenant dans les matières qui relèvent de la loi organique en application de l'article 74 de la Constitution ou de la compétence de la collectivité en application des articles LO6214-3 (Saint-Barthélemy), LO6314-3 (Saint-Martin) et LO6414-1 (Saint-Pierre-et-Miquelon), qui ne citent pas les aides concernées dans les compétences propres des collectivités.

En revanche, la mesure ne s'applique pas dans les collectivités du Pacifique (Polynésie française, Wallis et Futuna et Nouvelle-Calédonie), l'attribution de ce type d'aides relevant des compétences locales.

5.2.3. Textes d'application

Les dispositions règlementaires actuelles ne permettent pas de prendre en compte la nouvelle situation prévue par l'article et devront être modifiées. En effet, l'article R. 1511-41 prévoit que l'exploitant doit fournir à l'appui de sa demande « le compte d'exploitation des deux dernières années » ainsi qu'un « relevé d'information » fourni par le CNC. Ces conditions ne peuvent être remplies pour la création d'un établissement.

Enfin, le critère tenant au nombre d'entrées ou au classement art et essai sont un préalable dans le dispositif existant, et un engagement dans le cadre d'une création. Il est donc nécessaire que la convention prévoit des modalités de remboursement en cas de non-respect de ces engagements.

TITRE V - DISPOSITIONS COMMUNES A L'ENSEMBLE DES TEXTES DU PRÉSENT PROJET DE LOI EN MATIÈRE FINANCIÈRE ET STATUTAIRE

Article 43 : Dispositions financières applicables aux transferts

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La compensation financière des charges nouvelles dévolues aux collectivités territoriales dans le cadre de la décentralisation fait l'objet de dispositions constitutionnelles 167 ( * ) et législatives, éclairées par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

Ainsi, les transferts de compétences vers les collectivités territoriales doivent s'accompagner de l'attribution de ressources équivalentes à celles précédemment consacrées par l'Etat à l'exercice des compétences transférées. Ce principe, mis en oeuvre depuis 1983, a été érigé en principe constitutionnel à l'occasion de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, au sein de l'article 72-2 de la Constitution.

La compensation financière des charges répond ainsi à plusieurs principes tendant à assurer la neutralité desdits transferts, tant sur le budget de l'Etat, que sur celui des collectivités territoriales bénéficiaires. Ces principes concernent exclusivement les « transferts de compétence » proprement dits. La compensation doit être :

- intégrale : les ressources transférées sont équivalentes à la totalité des dépenses effectuées par l'Etat au titre des compétences transférées, étant entendu que les modalités de calcul des charges transférées varient en fonction de leur nature 168 ( * ) ;

- concomitante : la compétence n'est valablement transférée que si elle s'accompagne d'une compensation financière concomitante, provisionnelle dans un premier temps, puis ajustée définitivement ensuite (cf. décision DC n° 2003-487 du 18 décembre 2003, considérant 14) ;

- garantie : le montant de la compensation calculé au « coût historique » ne saurait diminuer. Les compensations anciennement indexées, versées sous forme de dotations budgétaires (dotation générale de décentralisation - DGD) ou de prélèvements sur recettes - PSR (dotation régionale d'équipement scolaire - DRES et dotation départementale d'équipement des collèges - DDEC), sont gelées depuis 2009. Les compensations assurées sous forme de fiscalité transférée (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques - TICPE, taxe spéciale sur les conventions d'assurance - TSCA), qui connaissent un dynamisme propre, sont garanties 169 ( * ) ;

- contrôlée : le montant des accroissements de charges résultant des transferts de compétences est constaté par arrêté interministériel, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) 170 ( * ) ;

- conforme à l'objectif d'autonomie financière inscrit à l'article 72-2 de la Constitution 171 ( * ) . Ainsi, la compensation financière s'opère, à titre principal, par l'attribution de ressources propres.

Cette obligation de compensation des transferts de compétences au « coût historique », quelle que soit l'évolution des dépenses effectives après le transfert, a été confirmée par le Conseil constitutionnel (décision n°2011-142/145 du 30 juin 2011 QPC, RSA).

Les principes indiqués ci-dessus ne sont pas tous opposables aux créations et extensions de compétences, à l'égard desquelles la Constitution et le Conseil Constitutionnel reconnaissent au législateur un pouvoir d'appréciation pour déterminer les ressources nécessaires à attribuer, qui doivent cependant être suffisantes pour ne pas porter atteinte au principe de libre administration.

Au-delà de ces principes généraux et sur la base de la jurisprudence, il est possible d'établir la typologie suivante :

Ø Définition des cas d'accroissement de charges ouvrant un droit à compensation :

Cas d'accroissement de charges :

Définition

Textes de référence

Transfert de compétences (loi)

L'exercice d'une compétence préalablement exercée par l'Etat est confié à un niveau de collectivités. Décentralisation d'une compétence.

Art. 72-2 de la Constitution

Art. L. 1614-1 du CGCT

Création de compétences (loi)

On entend par création de compétence l'octroi d'une compétence nouvelle, présentant un caractère obligatoire, dépourvue de tout lien avec une compétence déjà exercée par un niveau de collectivités territoriales et non précédemment exercée par l'Etat ou un autre niveau de collectivités.

Art. 72-2 de la Constitution

Art. L. 1614-1-1 du CGCT

Extension de compétences (loi)

Pour être caractérisée d'extension de compétences, la disposition législative doit conjuguer deux critères cumulatifs : avoir un caractère obligatoire et procéder à un accroissement du périmètre de la compétence (par l'attribution de missions nouvelles au sein des compétences exercées en ce qu'elles remettent en cause la nature ou l'objet même de cette compétence ou par l'élargissement à un nouveau public ou à de nouveaux bénéficiaires).

Art. 72-2 de la Constitution

Art. L. 1614-1-1 du CGCT

Modification ultérieure des règles relatives à l'exercice des compétences transférées (décret ou arrêté, voire loi s'agissant de la compétence « SRV »)

Cas de charges nouvelles résultant de la modification par voie réglementaire des conditions d'exercice des compétences transférées (article L. 1614-2 du CGCT), dès lors que « le règlement a pour objet, en droit ou en fait, de modifier le régime du service ou de la prestation (...) [ou qu'il] modifie des normes qui ne s'imposent à la collectivité compétente que par la référence qu'y font des dispositions propres à ce service ou à cette prestation » et qu'il est obligatoire.

Une exception toutefois : s'agissant de la compétence « services régionaux de voyageurs » des régions, cette définition est valable même lorsque les charges nouvelles résultent d'une loi (article L. 1614-8-1 du CGCT).

Art. L. 1614-2 du CGCT (2e alinéa)

Avis du Conseil d'Etat du 2 mai 1984 (n°334 900)

Art. L. 1614-8-1 du CGCT (9e alinéa) en matière de SRV

Ø Définition des cas d'accroissements de charges n'ouvrant pas un droit à compensation 172 ( * ) :

En l'état actuel du droit, dans deux cas, alors même qu'elles entraînent un accroissement de charges pour les collectivités territoriales concernées, des mesures prises par l'Etat n'imposent pas juridiquement de droit à compensation ou d'accompagnement financier.

Cas

Absence de droit à compensation obligatoire

Textes de références et jurisprudences de principe

Aménagement de compétence (loi)

Une loi qui « affecte » une compétence transférée « sans en modifier le périmètre », et sans en transformer ni la finalité ni la nature n'est pas une extension de compétence, mais un aménagement ou un approfondissement de compétence, et ce même si les charges résultant de l'exercice de la compétence transférée augmentent du fait de cette disposition.

Décisions du Conseil constitutionnel n° 2010-56 QPC du 18 octobre 2010 (MASP) et n° 2010-109 QPC du 25 mars 2011 (FNPE).

Mesures de portée générale (décret ou arrêté)

Cas de charges nouvelles résultant de mesures règlementaires de portée générale, qui n'affectent pas exclusivement des compétences exercées par un niveau spécifique de collectivités territoriales.

Avis du Conseil d'Etat du 2 mai 1984 (n° 334 900) ; Avis CE, 2 mars 2010, région Rhône-Alpes, n°322781 (décret GIPA).

Attribution de missions nouvelles au maire agent de l'Etat (loi)

L'attribution de nouvelles missions aux maires exercées en leur qualité d'agents de l'Etat ne s'analyse pas comme un transfert de compétence au profit des communes.

Toutefois, de tels transferts de charges doivent être mis en oeuvre par la loi en application de l'article L. 1611-1 du CGCT : « aucune dépense à la charge de l'Etat ou d'un établissement public à caractère national ne peut être imposée directement ou indirectement aux collectivités territoriales ou à leurs groupements qu'en vertu de la loi. »

A défaut, l'Etat engage sa responsabilité.

Jurisprudence du Conseil Constitutionnel : Décision du CC n°2010-29 QPC du 22 septembre 2010 (CNI, passeports).

Jurisprudences du CE : Commune de Maisons-Laffitte, 27 juillet 2001 et Commune de Versailles, 5 janvier 2005.

Article L. 1611-1 du CGCT

Les lois LRL, MAPTAM et NOTRe contenaient des dispositions dédiées aux modalités financières de décentralisation.

Les dernières lois portant décentralisation - loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (LRL), loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) -contenaient un titre dédié à la compensation des transferts de compétences, qui prévoyait notamment :

- le principe de la compensation des transferts de compétences au « coût historique », évalué sur une période de trois ans pour les dépenses de fonctionnement et d'au moins cinq ans pour les dépenses d'investissement ;

- la compensation, à titre principal, par l'attribution d'impositions de toute nature.

Alors que la plupart des dotations de compensation des dépenses d'investissement mises en oeuvre dans le cadre des lois de 1982 et 1983 était organisée en concours particuliers, répartis chaque année sur la base de critères objectifs 173 ( * ) prenant en compte les besoins d'investissement (la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) et la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) concours ports et concours bibliothèques), ce qui permettait d'assurer une bonne allocation des ressources à répartir, les précédentes lois de décentralisation ont figé les compensations des dépenses au coût historique constaté.

Ø Le rôle de la CCEC est déterminant dans le calcul des charges de décentralisation

La CCEC s'est affirmée comme la garante du respect des principes de la compensation financière et un acteur incontournable de la décentralisation. Depuis sa mise en place, le 10 mars 2005, à la suite de la modification de sa composition et de son fonctionnement par la loi LRL, la CCEC s'est réunie soit en formation plénière, soit en section des régions, des départements ou des communes, selon que le transfert abordé intéressait l'ensemble des niveaux de collectivités territoriales ou seulement l'une d'entre eux. La CCEC 174 ( * ) a examiné 335 projets d'arrêtés interministériels, dont 313 ont été approuvés à l'unanimité, 12 ont reçu un avis favorable « simple » et 10 un avis défavorable du collège des élus.

Elle a ainsi précisé la portée de la compensation pour un grand nombre de transferts, notamment les transferts de personnels. A cette fin, elle a permis des évolutions de la doctrine en matière d'établissement du droit à compensation afin de :

- définir les contours de l'évaluation de certaines charges transférées lorsque la loi était imprécise ;

- déroger aux règles d'évaluation du droit à compensation à la demande de la parité élus dans un sens favorable pour les collectivités territoriales ;

- permettre au Gouvernement d'arrêter sa position au regard des conclusions des missions d'inspection diligentées pour quelques transferts à la demande des élus de la CCEC.

La CCEC a par conséquent facilité la mise en oeuvre de la décentralisation en faisant de cette commission un espace d'échanges, d'information, d'explication, voire de pédagogie.

Elle a notamment élaboré une doctrine très précise en matière de compensation des transferts de personnels, afin de respecter les principes de concomitance et d'intégralité de la compensation.

Ø Sur les dispositions spécifiques au transfert des routes nationales

S'agissant du transfert des routes nationales, la loi LRL susmentionnée a procédé à des transferts de compétences au profit des départements de métropole et des régions et départements d'outre-mer dans le domaine de la voirie et des grands équipements et infrastructures. Le domaine public routier national relevant de l'Etat est désormais limité aux autoroutes et aux routes d'intérêt national ou européen.

Ainsi qu'il a été présenté précédemment dans l'étude d'impact, les articles 18 et 19 de la loi LRL prévoyaient le transfert, au plus tard le 1 er janvier 2008, des routes classées dans le domaine public routier national ainsi que leurs dépendances et accessoires, à l'exception des routes répondant au critère prévu par l'article L. 121-1 du code de la voirie routière, aux départements de métropole et aux collectivités d'outre-mer.

Historiquement, le transfert aux départements du réseau routier national, ainsi que le transfert des servitudes, droits et obligations, correspondant, s'est opéré en trois vagues :

- l'essentiel de la voirie nationale a été transféré aux départements de métropole et régions d'outre-mer le 1 er janvier 2006. L'arrêté en date du 30 novembre 2006 fixe le montant du droit à compensation à 191,5 millions d'euros ;

- en 2007, le transfert des routes nationales d'intérêt local (RNIL) a concerné le département de Seine-Saint-Denis ainsi que des portions résiduelles de routes pour 17 autres départements. Le montant définitif du droit à compensation afférent au transfert intervenu au 1 er janvier 2007 a été fixé à 5,9 millions d'euros par arrêté en date du 13 mai 2008 ;

- au 1 er janvier 2008, la dernière vague de transfert des RNIL a concerné le département de la Guyane, la région Réunion ainsi que des portions résiduelles de routes pour 15 autres départements. Le montant définitif du droit à compensation afférent a été fixé à 13,9 millions d'euros par arrêté en date du 24 mars 2009.

La loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace (CeA) créant la Collectivité européenne d'Alsace a transféré au nouveau département ainsi qu'à l'eurométropole de Strasbourg les routes et autoroutes non concédées situées sur leurs territoires. L'article 6 de la loi CeA a prévu ce transfert, au plus tard le 1 er janvier 2021, des routes classées dans le domaine public routier national ainsi que leurs dépendances et accessoires.

Par ailleurs, la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers prévoyait le transfert des parcs de l'équipement, outils de coopération et de mutualisation des moyens entre l'Etat et les départements dans le domaine routier. La notion de parc de l'équipement a été définie à l'article 2 de la loi n° 92-1255 du 2 décembre 1992 comme « un élément du service public de la direction départementale de l'équipement ». En outre, le parc est l'outil qui prend en charge l'ensemble des véhicules et engins existant dans le service. Le transfert des parcs s'est organisé en deux vagues sur une base conventionnelle :

- au 1 er janvier 2010, 31 parcs ont été transférés au profit des départements ;

- au 1 er janvier 2011, 68 parcs ont été transférés au profit des départements et/ou des régions.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Les transferts de compétences aux collectivités territoriales s'accompagnent de l'attribution de ressources équivalentes à celles consacrées précédemment par l'Etat à leur exercice. Mis en oeuvre depuis 1983 175 ( * ) , ce principe législatif de neutralité financière des transferts de compétences a été érigé en principe constitutionnel en 2003 176 ( * ) .

La réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 a également permis de préciser les règles applicables au financement des charges transférées par l'Etat aux collectivités territoriales au titre d'une création ou d'une extension de compétence.

Conformément à l'article 72-2 (4 ème alinéa) de la Constitution : « Tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

L'article 72-2 de la Constitution n'impose pas une compensation réévaluée dans le temps en fonction du coût d'exercice des charges transférées 177 ( * ) . La jurisprudence constitutionnelle 178 ( * ) précise que l'application du principe de neutralité financière impose d'arrêter le montant alloué par l'Etat à l'exercice de la compétence transférée au « coût historique ».

Ces dispositions ont été codifiées au code général des collectivités territoriales (CGCT) :

- à l'article L. 1614-1 du CGCT pour les transferts de compétences ;

- à l'article L. 1614-1-1 du CGCT pour les créations et extensions de compétences ;

- à l'article L. 1614-2 du CGCT pour les modifications par voie réglementaire des règles relatives à l'exercice des compétences transférées.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les transferts de compétences de l'Etat aux collectivités locales, à titre expérimental ou de manière définitive, nécessitent l'élaboration de dispositions en vue d'organiser les modalités de la compensation financière, en application de l'article 72-2 de la Constitution. Elles sont fixées par la loi dans la mesure où elles impactent les conditions de l'exercice de la libre administration des collectivités territoriales et touchent à leur autonomie financière.

En outre, le financement des transferts de compétence relève du domaine du législateur en vertu de l'article 34 de la Constitution.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le titre relatif aux dispositions communes à l'ensemble des textes du présent projet de loi en matière financière et statutaire vise à organiser les modalités du respect par l'Etat de ses obligations en matière de compensation financière (cadre juridique rappelé ci-avant) dans la mise en oeuvre de cette loi, et notamment des transferts de compétences qu'elle organise.

A cet effet, les objectifs poursuivis sont notamment les suivants :

- réaffirmer le principe de la neutralité financière des transferts de compétences ;

- encadrer les périodes de référence pour le calcul des droits à compensation respectifs des dépenses de fonctionnement et d'investissement ;

- associer la CCEC à la définition exacte de ces périodes, de façon à ce qu'elles soient cohérentes au regard des charges transférées aux collectivités ;

- conserver le rôle de contrôle de la CCEC sur tous les aspects financiers de la mise en oeuvre des mesures de décentralisation prévues dans la loi ;

- apporter des précisions sur les vecteurs de compensation ;

- ouvrir la possibilité de mettre en oeuvre des modalités de répartition « critérisées » et annuelles entre les collectivités bénéficiaires de la compensation des dépenses d'investissement afin de permettre une meilleure allocation des moyens aux besoins d'investissement constatés sur les biens immobiliers et équipements transférés ;

- organiser la poursuite des contrats de plan Etat-région (CPER) en cours dans les matières faisant l'objet d'un transfert de compétence.

L'objectif de compensation conforme au cadre juridique en vigueur est également valable en matière de transferts de personnels.

A ce titre, constituent des transferts de compétences, les dispositions suivantes :

- le transfert aux régions de diverses attributions de l'autorité administrative en matière de gestion des sites Natura 2000 (pour les sites terrestres) ;

- le transfert aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles des routes nationales ;

- le transfert aux régions, à titre expérimental, des routes nationales ;

- le transfert aux départements de la compétence de gestion de la tutelle des pupilles de l'Etat.

Sur la disposition spécifique au transfert des routes nationales

La disposition envisagée vise à organiser la compensation du transfert des compétences de l'Etat vers les départements, la métropole de Lyon, les métropoles et les régions, et poursuit notamment les objectifs suivants :

- prévoir les modalités de calcul du droit à compensation dû aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), aux départements ou aux régions afin que le montant puisse coïncider avec des besoins financiers liés à l'exercice des compétences transférées ;

- encadrer les périodes de référence pour le calcul du droit à compensation des charges de fonctionnement et d'investissement ;

- préciser le vecteur de compensation à privilégier pour compenser les transferts de compétences opérés par le présent projet de loi.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Modalités de calcul du droit à compensation

Dans ces conditions, la rédaction retenue est largement inspirée des « actes II et III » de décentralisation.

Les modalités de compensation des transferts de compétence sont définies au présent article du projet de loi. Comme mentionné, la compensation des charges résultant des transferts de compétences s'effectue au « coût historique », c'est-à-dire qu'elle doit être équivalente aux dépenses nettes 179 ( * ) consacrées par l'Etat, à la date du transfert, à l'exercice des compétences transférées. Les charges transférées sont évaluées sur la base des moyennes de dépenses de l'Etat, actualisées de l'inflation, sur une période variable : trois ans maximum pour les dépenses de fonctionnement et cinq ans minimum pour les dépenses d'investissement.

Si le montant de la compensation des dépenses d'investissement est évalué au « coût historique », il est préconisé de prévoir par décret des modalités de répartition « critérisées » et annuelles entre les collectivités.

Le présent article précise en outre que la compensation financière des transferts de compétences s'opère, à titre principal, par l'attribution d'impositions de toute nature (TICPE), dans des conditions fixées par la loi de finances, sous le contrôle de la Commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC - article L. 1614-3 du CGCT). Il instaure une garantie de non baisse des compensations en cas de diminution des recettes fiscales.

Il organise la répartition des financements, entre l'Etat et les collectivités territoriales, des opérations des CPER en cours ayant trait à des compétences transférées par la présente loi, ainsi que leur articulation avec le droit à compensation.

Sur la disposition spécifique au transfert des routes nationales

Les ressources correspondant aux charges transférées aux départements, à la métropole de Lyon, aux métropoles et, à titre expérimental, aux régions, doivent être équivalentes aux dépenses effectuées par l'Etat au titre de ces compétences transférées.

La loi LRL 180 ( * ) ainsi que la loi MAPTAM prévoient que le droit à compensation des charges d'investissement transférées à une collectivité territoriale soit calculé « hors fonds de concours ». Les fonds de concours peuvent s'apprécier comme des crédits attribués par une entité autre que l'Etat à destination d'une dépense déterminée de l'Etat. Or il apparaît à la lecture du programme 203 181 ( * ) annexé au projet de loi de finances pour 2020 dans le document retraçant les missions du budget général de l'Etat que la totalité des crédits d'investissement à destination du réseau routier de l'Etat provient de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

L'AFITF étant un établissement public national à caractère administratif sous la tutelle du ministère de la transition écologique prévu par l'article R. 1512-12 du code des transports, les crédits qu'elle verse au programme 203 peuvent être entendus comme des fonds de concours.

Deux options ont été envisagées, la seconde ayant été retenue :

- reprendre l'écriture de la loi LRL 182 ( * ) en matière de transfert de voirie excluant de manière stricte la prise en compte des fonds de concours dans le calcul du droit à compensation ;

- inscrire une précision dans le présent projet de loi précisant que le calcul du droit à compensation se fera hors fonds de concours à l'exception de ceux provenant de l'AFITF.

3.1.2. Périodes de référence

Pour arrêter le montant du droit à compensation, il est nécessaire de se fonder sur les périodes de référence les plus représentatives des charges transférées.

Deux options ont été envisagées, la seconde ayant été retenue :

- reprendre l'écriture de la loi LRL 183 ( * ) en matière de transfert de voirie qui prévoit une période de référence de « 3 ans » pour la compensation des charges de fonctionnement et « d'au moins 5 ans » pour la compensation des charges d'investissement. Ces dispositions ont été précisées par décrets en Conseil d'Etat 184 ( * ) ;

- reprendre l'écriture de la loi MAPTAM qui prévoit une période de référence de « 3 ans maximum » pour la compensation des charges de fonctionnement et « d'au moins 5 ans » pour la compensation des charges d'investissement. Un décret en Conseil d'Etat devait fixer les modalités d'application concernant les périodes de référence pour le calcul du droit à compensation après avis de la CCEC.

3.1.3. Vecteurs de compensation financière

Il existe plusieurs vecteurs de compensation financière :

- les prélèvements sur recettes, opérés sur les recettes du budget général de l'État, qui permettent d'effectuer le versement des crédits aux collectivités territoriales sans recourir à la procédure préalable de délégation ministérielle des crédits aux préfets ;

- les dotations versées par l'Etat sous forme de crédits budgétaires, qui sont libres d'emploi pour les collectivités territoriales (les ressources ne sont pas affectées à une catégorie ou une nature de dépenses). Sauf nouveaux transferts à compenser, le montant de compensation versé au titre de la DGD est gelé depuis 2009 ;

- la fiscalité transférée correspondant aux produits d'impôts d'Etat reversés aux collectivités territoriales. Lorsque le produit de la fiscalité transférée est inférieur au montant du droit à compensation, l'État est tenu de majorer le montant de la fiscalité transférée à due concurrence, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel 185 ( * ) et, s'agissant des transferts mis en oeuvre par la loi LRL, à l'article 119 de cette loi. Le droit à compensation fait ainsi l'objet d'une clause de garantie. Les pertes de produit fiscal résultant de la modification du fait de l'Etat de l'assiette ou des taux de ces impôts, postérieurement à la date de transfert des impôts, sont compensés intégralement, collectivité par collectivité, pour les départements et les régions (article L. 1614-5 du CGCT).

3.2. DISPOSITIF RETENU

3.2.1. Modalités de calcul du droit à compensation retenues

Afin que les transferts de compétences prévus par le présent projet de loi puissent être accompagnés des ressources nécessaires à leur exercice, il a été décidé de retenir une écriture levant toute ambigüité sur la prise en compte des crédits versés par l'AFITF au titre du programme 203 pour le calcul du montant du droit à compensation dû aux collectivités concernés.

Dès lors, le I de l'article envisagé porte la mention « Ces charges d'investissement sont calculées hors taxe et hors fonds de concours autres que ceux en provenance de l'agence de financement des infrastructures de transport en France ».

En outre, tout comme dans la loi CeA précitée, le choix a été fait de calculer le droit à compensation hors taxe pour les dépenses éligibles au fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

3.2.2. Périodes de référence retenues

Il a été décidé de retenir la rédaction adoptée dans le cadre de la loi MAPTAM qui prévoit une période de référence de « 3 ans maximum » pour la compensation des charges de fonctionnement et « au moins 5 ans » pour la compensation des charges d'investissement. Cette rédaction présente l'avantage de fixer une période de référence plus souple que la rédaction de la loi LRL concernant les charges de fonctionnement.

Ces périodes seront fixées par un décret, pris après avis de la CCEC, et s'appliqueront dans le cadre du calcul du droit à compensation, dont le montant sera cristallisé par un arrêté interministériel de compensation.

3.2.3. Vecteur de compensation retenu

Pour les départements et les régions, il a été retenu l'attribution d'une part du produit de la TICPE qui leur garantit un montant de compensation soclé en loi de finances ainsi qu'une dynamique correspondant à l'évolution du produit de la TICPE, ce que ne permet pas la DGD dont le montant des concours n'est plus indexé sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) depuis 2009 et ne fait l'objet d'ajustement qu'en cas d'accroissement ou de diminution de charges.

Pour les EPCI, qui ne bénéficient pas de fiscalité transférée correspondant aux produits d'impôts d'Etat reversés aux collectivités territoriales, ce mode de compensation sous forme de fractions de TICPE ne peut être appliqué. Par conséquent, la compensation financière sera versée annuellement sous la forme d'une dotation budgétaire dont le montant sera garanti.

Le montant de compensation sera définitivement fixé par arrêté pris après avis de la CCEC et versé par l'Etat de manière pérenne.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La présente mesure législative devra s'accompagner de mesures de compensation à inscrire en lois de finances afin de respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel prévoyant que l'entrée en vigueur d'un transfert de compétence est subordonnée à l'adoption concomitante des compensations financières correspondantes.

Les mesures de compensation à inscrire en loi de finances initiale comporteront des montants provisionnels qui devront être ultérieurement ajustés afin d'arrêter les montants de compensation définitifs que l'Etat s'engagera à verser aux collectivités concernées de manière pérenne.

Ces dispositions trouveront à s'appliquer, sous le contrôle de la CCEC, aux transferts, créations et extensions de compétences consacrées par la présente loi, à condition qu'ils soient obligatoires.

Les transferts suivants feront l'objet d'une compensation financière :

- le transfert aux régions de diverses attributions de l'autorité administrative en matière de gestion des sites Natura 2000 (pour les sites terrestres);

- le transfert aux départements, à la métropole de Lyon et aux métropoles des routes nationales ;

- le transfert aux régions, à titre expérimental, des routes nationales dans les conditions prévues à l'article 7 du projet de loi ;

- le transfert aux départements de la compétence de gestion de la tutelle des pupilles de l'Etat.

Aucune création ou extension de compétence obligatoire au sens de l'article 72-2 de la Constitution n'est prévue dans le présent projet de loi.

Les éléments financiers correspondants disponibles figurent dans chaque partie thématique de cette étude d'impact.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Le budget de l'Etat sera diminué de manière pérenne à hauteur du droit à compensation dû aux collectivités concernées.

Les dispositions du présent projet de loi auront pour conséquence d'accroître le montant de la fraction du produit de TICPE actuellement versé aux départements et aux régions et le montant de la dotation budgétaire.

Sur la disposition spécifique au transfert des routes nationales

Conformément aux choix explicités ci-dessus, l'évaluation de la compensation financière du transfert des charges de fonctionnement et d'investissement sera réalisée pour chaque transfert sur la base du « coût historique ». Ainsi, les impacts économiques et financiers ne peuvent pas être évaluées à l'avance, ceux-ci dépendants des transferts effectivement réalisés. Toutefois, à titre d'exemple, pour les 300 km de routes nationales sur le territoire alsacien, un droit à compensation provisionnel a été inscrit en loi de finances pour 2021 à hauteur de 19,9 M€, estimé selon les modalités de calcul de la compensation financière retenues dans le cadre du présent projet de loi.

Il est important de préciser que chaque territoire dispose de spécificités propres pouvant faire varier le droit à compensation financière. Ces spécificités sont notamment l'intensité de la rigueur hivernale, le nombre d'ouvrages d'arts, la proportion de voies rapides ainsi que la nature et l'importance du trafic sur le territoire.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Le présent projet de loi prévoit le transfert des services et parties de service de l'Etat concernés par l'exercice des compétences de gestion de transférées aux collectivités ou aux EPCI en matière de voirie.

Les emplois participant à l'exercice des compétences de l'Etat transférées seront mis à disposition ainsi que les moyens fonctionnels leur permettant d'assurer les prérogatives qui lui sont juridiquement confiées dans l'attente des partages définitifs. Lors de cette mise à disposition, la rémunération des agents restera à la charge de l'Etat.

Dans un délai de deux ans à compter de la date de publication du décret en Conseil d'Etat fixant les transferts définitifs des services, les fonctionnaires de l'Etat exerçant leurs fonctions dans un service ou une partie de service transféré aux départements, à la métropole de Lyon ou aux métropoles pourront opter soit pour le statut de fonctionnaire territorial, soit pour le maintien du statut de fonctionnaire de l'Etat.

L'arrêté de compensation relatif au transfert des personnels, soumis pour avis de la CCEC, sera adopté après détermination d'un nombre entier d'emplois à temps plein susceptibles d'être transférés et valorisation financière des fractions d'emplois ne pouvant donner lieu à transfert.

Sur la disposition spécifique au transfert des routes nationales

A titre d'information le réseau routier national composé de 11 500 km de routes métropolitaines dispose, au titre de l'année 2020, pour sa gestion et son entretien de 7 358 ETP au sein des directions interdépartementales des routes.

L'évaluation des effectifs à transférer aux collectivités territoriales est difficilement réalisable a priori. En effet, l'évaluation dépendra des différentes demandes de transferts par les collectivités territoriales. D'un territoire à l'autre, en fonction des typologies d'infrastructures et de trafic ainsi que des contraintes climatiques comme la viabilité hivernale notamment, le volume d'effectifs moyen peut varier fortement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes a été consulté.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps et dans l'espace

La mesure envisagée entrera en vigueur dès la publication de la présente loi au Journal officiel de la République française mais l'application dans le temps et l'espace de cette mesure se fera au fur et à mesure des demandes des collectivités territoriales.

5.2.2. Textes d'application

Après avis de la CCEC mentionnée à l'article L. 1211-4-1 du CGCT, un décret fixera les modalités d'application concernant les périodes de référence retenues pour le calcul du droit à compensation des charges d'investissement et de fonctionnement transférées par le présent projet de loi.

En application de l'article L. 1614-3 du CGCT, des arrêtés interministériels de compensation, pris conjointement par le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et le ministre de l'action et des comptes publics, établiront :

- le montant du droit à compensation au titre des dépenses de fonctionnement et d'investissement assurées par l'Etat calculés sur la base des périodes de référence retenues à la date des transferts de compétences ;

- le montant du droit à compensation résultant du transfert de personnels ou de la valorisation financière des équivalents temps plein travaillés non transférés aux départements et aux EPCI.

Article 44 : Dispositions relatives à la fonction publique territoriale, applicables aux transferts

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le projet de loi comporte diverses mesures de décentralisation et de clarification des compétences susceptibles d'avoir un impact tant sur les collectivités locales que sur les services de l'État concernés.

En cas de transfert de compétences de l'état aux collectivités territoriales ou à leurs groupements, les articles 80 et suivants de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (loi MAPTAM) fixent les modalités de transfert des services de l'État chargés de leur mise en oeuvre. Il s'agit d'un dispositif désormais éprouvé qui a démontré son efficacité dans l'intérêt du service comme des agents. Il a par exemple été mis en oeuvre dans le cadre du transfert des Délégations Régionales de l'Office National d'Information sur les Enseignements et les Professions (DRONISEP).

Le processus de transfert des services prévu par la loi MAPTAM s'applique à tous les personnels de l'État participant à l'exercice des compétences transférées.

Il est toutefois nécessaire de prévoir des dispositions particulières pour les ouvriers des parcs et ateliers (OPA) afin de prendre en compte les spécificités de leur statut (absence de corps et de cadre d'emplois correspondant) qui ne permet pas de les intégrer directement dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale et de conserver les garanties dont ils bénéficient en matière de retraite et de rémunération. En ce qui concerne les OPA, qui sont des ouvriers d'État contractuels de droit public, il est prévu, compte tenu de la spécificité de leur statut, de leur appliquer les règles qui ont présidé à leur transfert vers les conseils départementaux en application de la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers et de ses décrets d'application du 6 mai 2014 186 ( * ) .

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 72-2 de la Constitution du 4 octobre 1958 pose le principe selon lequel tout transfert de compétence entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les transferts de compétences de l'État aux collectivités territoriales ou à leurs groupements nécessitent l'élaboration de dispositions en vue d'organiser les modalités de transfert des services qui sont chargés de leur mise en oeuvre.

Elles sont fixées par la loi dans la mesure où elles concernent les conditions d'exercice de la libre administration des collectivités territoriales. De même, des dispositions spécifiques en matière de compensation financière des dérogations à la mise en oeuvre de la procédure de transfert de services doivent être inscrites dans la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les collectivités territoriales et leurs groupements doivent disposer des personnels nécessaires à l'exercice des compétences qui leur sont transférées. Le projet de loi prévoit en conséquence des dispositions relatives à la mise à disposition ou au transfert des services de l'État concernés.

De plus, des garanties doivent être apportées aux agents mis à disposition ou transférés, qu'il s'agisse des fonctionnaires, des agents contractuels ou des OPA : c'est l'un des objets du renvoi aux dispositions de la loi MAPTAM ainsi qu'à ses textes d'application 187 ( * ) ou à des dispositions législatives relatives à certains personnels spécifiques (par exemple, les OPA ; cf. infra ).

3. DISPOSITIF RETENU

Il est proposé de faire application des dispositions des articles 80 et suivants de la loi MAPTAM, inspirées des expériences précédentes de décentralisation, qui ont déjà été appliquées à plusieurs reprises à l'occasion de précédents transferts de compétences 188 ( * ) . La procédure de transfert des services comporte trois étapes principales :

- étape n°1 : à la date du transfert de la compétence et dans l'attente de la mise à disposition des services et des agents qui intervient à l'étape n°2 (cf. infra ), l'autorité territoriale donne ses instructions aux chefs des services de l'État chargés des compétences transférées. C'est-à-dire que les chefs des services de l'Etat restent chargés de l'exercice de la compétence sous l'autorité de la collectivité territoriale. Ce dispositif n'a aucune incidence sur la situation statutaire des personnels de l'État concernés qui restent, pendant cette période, affectés au sein de leurs services ;

- étape n°2 : dans un délai de trois mois à compter de la publication d'un décret simple approuvant une convention type, une ou plusieurs conventions, conclues entre l'État et l'autorité territoriale, constatent la liste des services ou parties de service qui sont, pour l'exercice de leurs missions, mis à disposition, à titre gratuit, de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales bénéficiaire du transfert de compétences.

A défaut de signature des conventions dans un délai de trois mois, ces services sont mis à disposition par arrêté interministériel pris après avis motivé d'une commission nationale de conciliation. Les personnels affectés dans ces services ou parties de services sont de plein droit mis à disposition, à titre individuel et gratuit, jusqu'à ce qu'ils exercent leur droit d'option (cf. étape n°3 infra ). Ces conventions comportent en outre le décompte des équivalents temps plein (ETP) au 31 décembre de l'année N-1 qui précède le transfert de compétence et au 31 décembre de l'année N-2 par rapport à l'année N de ce transfert, le décompte le plus élevé déterminant le calcul des compensations financières, mécanisme plus communément qualifié de « clause de sauvegarde » ;

- étape n° 3 : les services mis à disposition en application de ces conventions ou de ces arrêtés interministériels font l'objet d'un transfert définitif par décret en Conseil d'État. La publication de ce décret ouvre un délai de deux ans pendant lequel les fonctionnaires disposent d'un droit d'option entre l'intégration dans la fonction publique territoriale ou la conservation de leur statut de fonctionnaire de l'État. Dans ce dernier cas, ils sont détachés de plein droit sans limitation de durée auprès de la collectivité territoriale ou du groupement.

Les OPA seront mis à disposition de la collectivité territoriale ou du groupement bénéficiaire du transfert de compétence en même temps que les autres agents publics en application des conventions locales. Toutefois, dans le cadre de l'exercice du droit d'option, ils ne pourront pas être placés en position de détachement. Ils resteront mis à disposition sans limitation de durée avec la possibilité de demander leur intégration dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale après avis d'une commission nationale de classement lorsqu'il n'existe pas de cadres d'emplois correspondant, ou de rester dans cette position de mise à disposition.

En ce qui concerne les dispositions du III de l'article, l'option retenue consiste à calculer la compensation financière sur la base de la rémunération du premier échelon du premier grade correspondant aux fractions d'emploi des agents titulaires ou contractuels chargés des compétences transférées.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les dispositions envisagées renvoient, s'agissant des modalités de transfert des services et des agents, à des dispositions législatives déjà existantes dont elles adaptent le cas échéant les modalités et les dates de mise en oeuvre:

- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles ;

- la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers.

Les dates de la clause de sauvegarde (cf. supra ) ont été actualisées.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Il est prévu de transférer ou de mettre à disposition les emplois pourvus au 31 décembre de l'année qui précède l'année du transfert de compétence sous réserve que leur nombre global ne soit pas inférieur à celui constaté deux années auparavant.

Les emplois transférés feront l'objet d'une compensation financière de l'État à la collectivité territoriale ou au groupement.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Ce projet de loi a un impact sur les services des collectivités territoriales et de leurs groupements qui vont devoir accueillir des agents de l'État, tout d'abord mis à disposition et qui pourront ensuite être intégrés dans la fonction publique territoriale ou seront détachés dans la collectivité ou le groupement s'ils souhaitent conserver leur statut.

Les comités sociaux territoriaux compétents devront être consultés sur les projets de conventions de mise à disposition des services, puis ultérieurement en tant que de besoin pour donner leur avis sur les conséquences de ces transferts sur l'organisation des services.

Les dispositions du III de l'article sont sans impact sur les services des collectivités territoriales et de leurs groupements compte tenu de l'absence de transfert de service.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Ce projet de loi a également un impact sur les services de l'État chargés des compétences transférées : ceux-ci vont faire l'objet d'une mise à disposition, avec mise à disposition des agents à titre individuel, puis d'un transfert définitif.

Le nombre d'emplois concernés ne peut être évalué au moment de la publication de la loi.

Des mesures d'accompagnement devront être mises en oeuvre en faveur des agents de l'État concernés, y compris pour ceux, qui n'exerçant qu'en partie les compétences transférées, ne seront pas transférés eux-mêmes mais verront leur poste de travail évoluer.

Les décrets approuvant les conventions type de mise à disposition prévoient généralement des dispositifs de suivi des agents pendant plusieurs années, associant des représentants de l'État, des employeurs territoriaux et des représentants des organisations syndicales représentatives, ainsi que d'évaluation des conditions de mise en oeuvre des transferts.

Les dispositions du III de l'article sont sans impact sur les services de l'État compte tenu de l'absence de transfert de service.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'État et le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ont été consultés.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

A compter de la date du transfert de compétence, s'ouvre la première étape du processus de transfert de service décrit au point 3.2.

La loi MAPTAM ne prévoit pas de condition de délai pour la mise en oeuvre des deux étapes suivantes. Toutefois, dans la mesure où l'achèvement du processus de transfert de services conditionne le transfert des moyens en personnel et le versement des compensations financières aux collectivités territoriales et à leurs groupements, il convient d'en tenir compte dans le calendrier de mise en oeuvre.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

Les dispositions relatives au transfert des services nécessiteront des décrets d'application :

- un décret simple approuvera une convention type de mise à disposition des services ou parties de services ;

- un décret en Conseil d'État fixera la date et les modalités de transfert définitif des services ou parties de services ;

- le cas échéant, un décret instituera une commission nationale de conciliation en cas de désaccord entre l'État et la collectivité territoriale ou le groupement, pendant la phase de préparation des conventions de mise à disposition, sur l'évaluation du nombre d'ETP à transférer.

TITRE VI - MESURES DE DECONCENTRATION

Article 45 : Attribution de la fonction de délégué territorial de l'ADEME au préfet de région

1. ÉTAT DES LIEUX

L'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) 189 ( * ) , dénommée l'agence de la transition écologique, est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial (EPIC), placé sous la tutelle du ministère de la transition écologique et du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. . Celle-ci résulte de la fusion, effective en 1993, de trois établissements publics dont elle a repris les missions. Nonobstant son statut d'établissement public industriel et commercial (EPIC), l'Agence a une activité commerciale concurrentielle marginale.

Elle mène des actions d'orientation et d'animation de la recherche, 190 ( * ) de prestation de services, d'information et d'incitation dans chacun des domaines suivants :

1° la prévention et la lutte contre la pollution de l'air ;

2° la prévention de la production de déchets, dont la lutte contre le gaspillage alimentaire ; la gestion des déchets ; la transition vers l'économie circulaire ; la protection des sols et la remise en état des sites pollués ;

3° le réaménagement et la surveillance d'une installation de stockage de déchets ultimes autorisée après le 14 juillet 1992, lorsque ces opérations sont rendues nécessaires du fait d'une défaillance ou d'une insuffisance des garanties de l'exploitant ;

4° la réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale ;

5° le développement des technologies propres et économes ;

6° la lutte contre les nuisances sonores ;

7° la lutte contre le réchauffement climatique et l'adaptation au changement climatique.

L'agence est administrée par un conseil d'administration de vingt-six membres.

Pour la mise en oeuvre de ses missions, l'agence dispose dans chaque région d'une direction régionale. Les directions régionales peuvent se voir confier des missions à caractère national ou interrégional.

Le préfet de région est le délégué de l'agence pour ce qui est de son action dans la région. A ce titre, il préside le comité régional d'orientation et la commission régionale des aides. Il veille à la cohérence et à la coordination des actions de l'agence avec celles conduites par les administrations et les autres établissements publics de l'État en région, conformément au contrat d'objectifs à caractère pluriannuel signé avec le président de l'agence.

La commission régionale des aides examine les projets de concours financiers de l'agence dans les cas définis par le conseil d'administration. Elle est également saisie de tout projet de concours financier qui lui est soumis par le préfet de région.

Le comité régional d'orientation comprend les préfets de département, le directeur régional de l'agence, les autres membres de la commission régionale des aides, ainsi que le président du conseil régional et les présidents des conseils départementaux ou leur représentant. Ce comité examine l'articulation entre les actions régionales des services de l'État et celles de l'agence ainsi que l'état d'avancement des actions contractualisées entre l'agence et les collectivités territoriales. Il entend par ailleurs le rapport d'activité du directeur régional, fait le bilan des actions entreprises et émet des recommandations, notamment sur les axes prioritaires des actions futures de l'agence dans la région.

L'agence peut entreprendre des actions conjointement avec les collectivités territoriales. Elle conclut alors à cette fin des conventions de programme signées au nom de l'agence par le président, après avis de la commission nationale ou de la commission régionale des aides en fonction du montant global des opérations envisagées. Elles sont cosignées par le préfet de région.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Actuellement, en application de l'article R. 131-16 du code de l'environnement, le préfet de région est affirmé comme le « délégué » de l'ADEME. Cependant, ce statut lui confère des prérogatives moindres que celles d'un délégué territorial. A ce titre, le préfet préside le comité régional d'orientation et la commission régionale des aides de l'ADEME. Il veille également à la coordination des actions de l'ADEME avec les autres services et établissements de l'État.

En revanche, il ne lui permet pas de recevoir une délégation de compétence, ou d'adresser des directives d'action territoriale (article 59-3 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 modifié relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action de l'État dans les régions et départements).

Le décret n°2012-509 du 18 avril 2012 pris en application du décret de 2004 fixe la liste des établissements publics dont le préfet de région ou le préfet de département est délégué territorial.

Initialement, le décret de 2012 avait ajouté l'ADEME à la liste des établissements pour lesquels le préfet était institué comme délégué territorial. Toutefois, cette inscription en 2012 de l'ADEME dans la liste a généré un contentieux ayant conduit le Conseil d'État à compléter sa doctrine sur le préfet délégué territorial. Dans sa décision n° 360307 du 20 février 2013, il a censuré l'ensemble des dispositions du décret de 2012 précité concernant l'ADEME, au motif, que seul le législateur pouvait prévoir la désignation d'un délégué territorial pour un établissement public créé par la loi.

Depuis l'entrée en vigueur du décret n° 2012-509 du 18 avril 2012 pris en application de l'article 59-1 du décret du 29 avril 2004 précité (décret dit « opérateurs »), il n'est plus prévu que le préfet soit de droit le délégué territorial d'un établissement public ayant un échelon territorial mais seulement qu'il soit « le délégué territorial des établissements publics de l'Etat comportant un échelon territorial et figurant sur une liste établie par un décret en Conseil d'État » , à savoir :

- ceux disposant, de par la loi, d'un délégué territorial : l'Agence nationale de l'habitat (article L.321-1 du code de la construction et de l'habitation - CCH), l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (article 11 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003), l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (articleL.121-15 du code de l'action sociale et des familles - CASF) et France AgriMer (article L.621-6 du code rural et de la pêche maritime - CRPM) ;

- auxquels furent ajoutés le centre national pour le développement du sport - CNDS (créé par décret) et l'ADEME (créée par la loi n° 90-1130 du 19 décembre 1990).

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le représentant de l'État, qui représente le Gouvernement et chacun de ses ministres (article 72 alinéa 6 de la Constitution et article 1er, alinéas 1 et 3, du décret du 29 avril 2004 susvisé) veille au respect des orientations de l'État par l'ADEME dans son action publique territorialisée,

Il est non seulement garant des résultats recherchés par la tutelle, mais également de la cohérence de l'action de l'État, les services déconcentrés, dont il assure la direction (article 1 er , alinéa 5, du décret du 29 avril 2004), agissant souvent dans les champs de compétence de l'agence, qui n'a pas le monopole de la matière.

La  désignation du préfet de région comme délégué territorial de l'ADEME permettra de lui conférer un véritable rôle de contrôle de la cohérence de l'action territoriale de l'agence, d'une part avec les objectifs qui lui sont assignés au niveau national, et plus globalement avec les orientations gouvernementales et, d'autre part, avec l'activité des services de l'État, dans l'ensemble des champs d'intervention de l'opérateur, et plus spécifiquement dans deux politiques publiques majeures de la transition énergétique et écologique, que sont le soutien à la chaleur renouvelable et la prévention et gestion des déchets.

En tant que délégué territorial, le préfet de région représentera localement l'établissement, édictera à l'attention du représentant territorial de l'établissement des directives d'action territoriale (DAT) et participera à l'évaluation du responsable territorial de l'établissement.

Cette évolution garantira l'unicité de la parole de l'État notamment dans sa relation avec les collectivités territoriales.

A défaut, les risques de fragiliser la cohérence de l'action territoriale sont importants. Dans son rapport de juillet 2013 sur « l'organisation territoriale de l'État », la Cour des comptes rappelle que l'articulation des compétences entre les établissements publics et les directions régionales ou départementales peut être source de complexité. Mais les difficultés peuvent aussi provenir de la situation inverse, où le représentant de l'État est amené à rappeler à un opérateur la nécessité d'articuler son action avec celle des services déconcentrés avant celle d'une collectivité territoriale.

La généralisation de la fonction de délégué territorial a été proposée par de nombreux préfets dans les travaux préparatoires à Action Publique 2022. Elle est également ressortie à plusieurs reprises comme une demande partagée lors des réunions de concertation sur le projet de loi, organisées en 2020 par la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Les préfets doivent veiller à la coordination entre les actions des services déconcentrés de l'État et celles des établissements publics concourant à la mise en oeuvre des mêmes politiques publiques, dans le respect du principe d'autonomie des établissements publics. Cette coordination peut être assurée par des modalités d'information et de conventionnement pour les établissements publics dont ils ne sont pas délégués territoriaux (article 60 du décret n°2004-374 pour les établissements publics sans relais locaux, article 15 de la charte de la déconcentration pour les établissements publics avec représentation territoriale). Une instruction pour renforcer l'effectivité de cette disposition a semblé insuffisante ; le recours aux prérogatives des préfets en tant que délégués territoriaux paraît bien plus efficace.

3.2. OPTION RETENUE

La mesure vise à rétablir le rôle de délégué territorial de l'ADEME du préfet de région établi par le décret n° 2012-509 du 18 avril 2012, mais censuré par le Conseil d'État dans une décision du 20 février 2013. Ce dernier rappelant que l'ADEME ayant le caractère d'une catégorie d'établissement public au sens de l'article 34 de la Constitution, seul le législateur peut compétemment modifier les dispositions conférant au préfet un pouvoir hiérarchique au sein de l'établissement, lesquelles ont le caractère de règles constitutives de l'ADEME.

L'ADEME est présente sur tout le territoire, en métropole et en outre-mer, mais dispose essentiellement d'un maillage régional (17 directions régionales). Aussi le niveau régional semble adéquat pour la désignation du préfet, délégué territorial.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le IV de l'article L. 131-3 du code de l'environnement est complété par un second alinéa portant dévolution au représentant de l'État dans la région, les collectivités régies par l'article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie, de la fonction de délégué territorial de l'ADEME.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

En tant que délégué territorial de l'établissement, le préfet de région assurera la représentation de l'établissement dans la région. A ce titre, il pourra recevoir délégation de pouvoir de l'organe compétent pour négocier et conclure au nom de l'établissement toute convention avec les collectivités territoriales et leurs groupements. En l'absence d'une telle délégation, il contresigne ces conventions.

Le délégué territorial s'assurera en outre de la cohérence de l'action respective des services de l'État et de l'établissement à l'égard des collectivités territoriales.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Le délégué territorial exercera ses attributions dans le cadre des compétences et des décisions des organes délibérants et exécutifs de l'établissement. La fonction de délégué territorial n'amoindrira donc pas les compétences des instances de gouvernance de l'établissement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Le Conseil national d'évaluation des normes a été consulté.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'applique dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 46 : Renforcement du rôle du préfet dans l'attribution des aides des agences de l'eau

1. ÉTAT DES LIEUX

En application de l'article L.213-8-1 du code de l'environnement, dans chaque bassin ou groupement de bassins, visé à l'article L. 212-1 du même code, une agence de l'eau, établissement public de l'État à caractère administratif doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, met en oeuvre les schémas, visés aux articles L. 212-1 et L. 212-3 du même code, en favorisant une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques, l'alimentation en eau potable, la régulation des crues et le développement durable des activités économiques. Elle peut contribuer à la connaissance, à la protection et à la préservation de la biodiversité terrestre et marine ainsi que du milieu marin, en particulier dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie nationale et des stratégies régionales pour la biodiversité, mentionnées à l'article L.110-3 du même code, ainsi que du plan d'action pour le milieu marin, mentionné à l'article L. 219-9 du même code.

Les six agences de l'eau sont placées sous la tutelle du ministre chargé de l'environnement qui désigne à cet effet un commissaire du gouvernement. Elles sont administrées par un conseil d'administration dont le président est nommé par décret.

En créant les agences de l'eau, la loi n°64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre la pollution a favorisé l'introduction de l'économie dans la gestion de la ressource en eau et l'organisation d'une concertation locale entre tous les partenaires concernés (usagers, élus locaux et Etat). Les agences de l'eau ont ainsi reçu pour mission de contribuer financièrement à la réalisation des diverses actions « d'intérêt commun au bassin » qu'aucun maître d'ouvrage n'avait intérêt à réaliser pour lui-même, à son seul profit.

Plus précisément, l'article L. 213-9-2 du code de l'environnement constitue le fondement de l'action des agences de l'eau. Elles ont pour rôle de faciliter les actions d'intérêt commun aux bassins ou groupements de bassins en vue d'assurer l'équilibre des ressources et des besoins en eau, d'atteindre les objectifs de qualité, d'améliorer et d'accroître les ressources, et d'assurer la protection contre les inondations. Elles collectent des redevances en provenance de tous les usagers de l'eau selon le principe du « pollueur-payeur » et « préleveur-payeur » (article L. 213-9 du code de l'environnement) et attribuent des subventions et des avances remboursables aux personnes publiques et privées pour l'exécution de travaux d'intérêt commun au bassin. Les agences de l'eau participent financièrement à l'élaboration des schémas d'aménagement et de gestion de l'eau (SAGE). Elles peuvent mener des actions de coopération internationale dans le domaine de l'eau et de l'assainissement dans la limite de 1 % de leurs ressources. Elles contribuent financièrement aux actions menées par l'Office français de la biodiversité, en fonction du potentiel économique du bassin hydrographique et de l'importance relative de sa population rurale.

Les interventions des agences de l'eau s'inscrivent dans le cadre d'un programme pluriannuel d'intervention (article L. 213-9-1 du code de l'environnement). Ce programme définit les priorités et sélectionne les dépenses à réaliser sur six ans, notamment dans l'objectif de l'application des directives européennes, en particulier de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau. Le Parlement définit les orientations prioritaires du programme pluriannuel d'intervention des agences de l'eau et fixe le plafond global de leurs dépenses et celui des contributions des agences à l'Office français de la biodiversité. Le conseil d'administration de chaque agence délibère sur le programme pluriannuel d'intervention après avis conforme du comité de bassin.

Sur les onzièmes programmes d'intervention 2019-2024, les six agences de l'eau prévoient d'engager environ 11,5 milliards d'euros auprès des différents bénéficiaires (collectivités, acteurs économiques et non économiques) ; soit environ 1,9 milliards d'euros par an pour une volumétrie d'environ 22 000 dossiers d'aides.

En matière de politique de l'eau, le préfet coordonnateur de bassin est « l'autorité compétente » au sens de la directive cadre sur l'eau 2000/60/CE précitée. Les dispositions de l'article L. 213-7 du code de l'environnement, stipulent, dans son premier alinéa que « Dans chaque bassin, le préfet de la région où le comité de bassin a son siège anime et coordonne la politique de l'État en matière de police et de gestion des ressources en eau afin de réaliser l'unité et la cohérence des actions déconcentrées de l'État en ce domaine dans les régions et départements concernés. En outre, il anime et coordonne la politique de l'État en matière d'évaluation et de gestion des risques d'inondation objet du chapitre VI du titre VI du livre V. » Ainsi le préfet coordonnateur de bassin est notamment chargé d'approuver l'état des lieux et le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), élaborés par le comité de bassin, et d'élaborer le programme de mesures.

Les préfets coordonnateurs de bassin sont membres des comités de bassin et des conseils d'administration des agences de l'eau.

A l'heure actuelle, les présidents de conseil d'administration des agences de l'eau sont désignés par décret du Président de la République. Historiquement, la présidence était partagée de manière égale entre les préfets coordonnateurs de bassin et les ingénieurs généraux du ministère de l'environnement. Ainsi le préfet coordonnateur de bassin est le président du conseil d'administration des agences de l'eau dans les agences de l'eau Artois Picardie, Rhône Méditerranée Corse et Seine Normandie. Dans les autres agences, Rhin-Meuse, Adour-Garonne et Loire-Bretagne, le président du conseil d'administration était un ingénieur général. Suite à un arbitrage du président de la République, pour ces trois agences, les préfets coordonnateurs de bassin ont été désigné présidents des conseils d'administration par décret du 17 février 2021.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'article 34 de la Constitution réserve à la loi la fixation des règles concernant la création des catégories d'établissements publics. Or, les agences de l'eau constituent une catégorie particulière d'établissement public sans équivalent sur le plan national. Le législateur est donc seul compétent pour en fixer les règles constitutives qui comprennent celles définissant les catégories de personnes siégeant dans leurs conseils d'administration ainsi que l'importance relative accordée aux diverses catégories de membres composant ces conseils.

Afin de renforcer l'association des préfets de bassin à l'action des agences de l'eau, le Gouvernement souhaite prévoir que le conseil d'administration de l'agence soit systématiquement présidé par le préfet coordonnateur de bassin où l'agence a son siège. Afin de limiter la charge administrative associée à une nouvelle nomination par décret du président de la République à chaque changement de préfet, il est opportun de modifier la loi.

Par ailleurs, il est proposé que le préfet coordonnateur de bassin joue un rôle plus important dans le processus d'établissement du programme pluriannuel d'intervention de l'agence de l'eau, en lien étroit avec les préfets de département. En ce sens, et dans le cadre de la procédure d'élaboration du programme, il portera à la connaissance des membres du conseil d'administration des informations sur les enjeux de son bassin et les aides d'ores et déjà octroyées.

La présente mesure modifierait en ce sens les mesures constitutives des agences de l'eau et nécessite une modification de nature législative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent projet de loi a pour ambition de transformer les relations entre l'État et les collectivités territoriales.

A l'occasion de l'examen des contributions adressées par les préfets au Premier ministre dans le cadre d'Action publique 2022, plusieurs d'entre eux ont émis le souhait de pouvoir donner un avis sur l'attribution des aides octroyées par les agences de l'eau.

L'objectif de la mesure envisagée est de mieux associer les préfets à l'action menée par les agences de l'eau et aux décisions d'aides in fine prises en confortant l'objectif de simplification des procédures et de rapidité de traitement vis-à-vis des bénéficiaires mais aussi d'optimisation des moyens publics.

Les objectifs poursuivis par la mesure sont cohérents avec les dispositions de l'article L. 213-7 du code de l'environnement, lequel dispose dans son premier alinéa que « Dans chaque bassin, le préfet de la région où le comité de bassin a son siège anime et coordonne la politique de l'État en matière de police et de gestion des ressources en eau afin de réaliser l'unité et la cohérence des actions déconcentrées de l'État en ce domaine dans les régions et départements concernés. En outre, il anime et coordonne la politique de l'État en matière d'évaluation et de gestion des risques d'inondation objet du chapitre VI du titre VI du livre V. »

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

S'agissant de la procédure d'adoption du programme pluriannuel d'intervention, il a été envisagé de recueillir l'avis conforme du préfet coordonnateur de bassin. Cependant, ce dernier ayant vocation à devenir de manière systématique le président du conseil d'administration dont le rôle est de délibérer sur le programme, cette mesure n'a pas été retenue.

S'agissant de la procédure d'attribution des aides, il a été envisagé de recueillir un avis conforme du préfet de département intéressé. Le Gouvernement a cependant considéré que cette mesure alourdirait la procédure d'attribution des aides (environ 22 407 aides octroyées en 2018). Elle n'a donc pas été retenue.

3.2. OPTION RETENUE

S'agissant de la gouvernance des agences de l'eau, il est envisagé d'inscrire dans la loi le fait que le préfet coordonnateur du bassin où l'agence a son siège préside systématiquement le conseil d'administration de l'agence.

Ainsi les agences de l'eau auront respectivement pour présidents de conseil d'administration :

- Adour Garonne : le préfet coordonnateur du bassin Adour Garonne, préfet de la région Occitanie ;

- Artois Picardie : le préfet coordonnateur du bassin Artois Picardie, préfet de la région Hauts de France ;

- Loire-Bretagne : le préfet coordonnateur du bassin Loire-Bretagne, préfet de la région Centre Val de Loire ;

- Rhin-Meuse : le préfet coordonnateur du bassin Rhin-Meuse, préfet de la région Grand Est ;

- Rhône-Méditerranée Corse : le préfet coordonnateur du bassin Rhône Méditerranée, préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes ;

- Seine-Normandie : le préfet coordonnateur du bassin Seine-Normandie, préfet de la région Île de France.

S'agissant du programme d'intervention et des aides octroyées par les agences de l'eau, il est envisagé que le préfet coordonnateur de bassin joue un rôle plus important dans le processus d'établissement du programme pluriannuel d'intervention de l'agence de l'eau, en lien étroit avec les préfets de département. En ce sens, et après avoir recueilli l'avis des préfets de départements, il porte à la connaissance du conseil d'administration les priorités de l'État dans les domaines d'intervention de l'agence de l'eau, ainsi qu'une synthèse des projets des collectivités territoriales et de l'État, en lien avec les enjeux du territoire.

Il convient de noter que cette option ne modifie par le périmètre des bassins.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L.213-8-1 du code de l'environnement est modifié pour inscrire que le conseil d'administration est systématiquement présidé par le préfet coordonnateur du bassin où l'agence a son siège (cette dernière précision permettant d'attribuer clairement cette fonction en ce qui concerne l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse qui couvre deux bassins).

L'article L. 213-9-1 du même code est complété par le rôle nouveau attribué aux préfets coordonnateurs de bassin, en lien avec les préfets de département, vis-à-vis du programme d'intervention des agences de l'eau.

4.2. IMPACTS SUR LES SERVICES DÉCONCENTRÉS DE L'ETAT

La nouvelle mesure ajoute une mission aux six préfets coordonnateur de bassin, et de manière indirecte à ses services (les DREAL de bassin notamment). Ces dernières devront établir un document portant sur les priorités de l'État dans les domaines d'intervention de l'agence de l'eau, ainsi qu'une synthèse des projets des collectivités territoriales et de l'État, en lien avec les enjeux du territoire. Un tel document devra être produit tous les six ans.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées sont soumises à l'avis du Conseil national d'évaluation des normes.

Le présent article n'impose pas de consulter la Mission interministérielle de l'eau s'agissant d'une modification du fonctionnement interne des agences de l'eau.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'applique dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique aux six agences de l'eau : Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée-Corse, Seine-Normandie, et à toute nouvelle agence créée ultérieurement.

Article 47 : Contrats de cohésion territoriale

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article 2 de la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) prévoit la mise en place de « contrats de cohésion territoriale », dont les dispositions sont codifiées au II de l'article L. 1231-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) : « L'agence assure la mise en oeuvre de la politique de l'État en matière d'aménagement durable et de cohésion des territoires en conduisant des programmes nationaux territorialisés et en prévoyant, selon des modalités précisées par décret, la mise en oeuvre déconcentrée de ces programmes au moyen de contrats de cohésion territoriale. Ces contrats s'articulent avec les projets de territoire élaborés par les collectivités territoriales et leurs groupements. Ces contrats peuvent intégrer tout autre contrat, prévu par les lois et règlements en vigueur, relatif à l'aménagement du territoire, à la politique de la ville, au numérique ou à tout autre domaine relevant des compétences de l'agence ».

La création des contrats de cohésion territoriale traduit la mobilisation accrue de l'État, des collectivités territoriales et de leurs groupements à renforcer la cohésion des territoires dans des démarches de long terme, à travers différentes formes de contractualisation. Impliquant tous les niveaux de collectivités territoriales et leurs groupements, ces contrats ont vocation à impliquer l'ensemble des acteurs publics sur un même territoire afin de garantir la cohérence des investissements au niveau local et de générer un effet de levier en croisant les financements de l'État et des collectivités et de leurs groupements, dirigés vers un même projet. Le contrat de cohésion territoriale vise à apporter une réponse différenciée aux enjeux des territoires et à accompagner dans la durée les collectivités territoriales et leurs groupements dans la réalisation de leurs projets.

Il traduit la volonté du Gouvernement de faire du contrat le cadre privilégié des relations entre l'État d'une part, et les collectivités territoriales et leurs groupements d'autre part, et de simplifier la contractualisation en proposant une nouvelle méthode plus souple, fédératrice et adaptée aux problématiques locales, et en permettant une meilleure coordination des moyens des différents partenaires (ministères, opérateurs, collectivités territoriales, acteurs privés) autour d'un projet de développement partagé.

Le contrat est un outil de gestion des politiques publiques au service de l'attractivité des territoires, de la cohésion sociale et territoriale, et du développement économique et de l'emploi, partant du constat que les pratiques verticales et sectorielles ne suffisent plus à répondre aux enjeux des territoires. La contractualisation se révèle surtout en tant que moteur d'un dialogue renforcé entre acteurs en l'inscrivant dans une démarche prospective, en en faisant un moyen d'approfondissement et d'organisation de la décentralisation. Les contrats de cohésion territoriale constituent ainsi des vecteurs essentiels de la mise en oeuvre des priorités du Gouvernement en matière de développement des territoires et permettent de mobiliser les collectivités territoriales et leurs groupements dans une logique de « République contractuelle ». L'État, les collectivités territoriales et leurs groupements y engagent des moyens très importants.

Les critères de sélection des projets ayant vocation à figurer au sein des contrats doivent traduire une cohérence d'ensemble entre le diagnostic, la stratégie du développement du territoire, l'état des lieux de l'ensemble des actions publiques menées en faveur du territoire, et les priorités nationales. Ils tiennent également compte de l'environnement, des partenaires locaux et de la maturité des projets.

Les futurs contrats de relance et de transition écologique (CRTE) constituent une des premières concrétisations des contrats de cohésion territoriale. Les CRTE succèdent aux contrats de ruralité et aux contrats de transition écologique (ex-CTE). En effet, la circulaire du Premier ministre du 20 novembre 2020 relative à l'élaboration des CRTE 191 ( * ) précise les modalités de conception, de négociation et de déploiement des CRTE, qui ont vocation à regrouper les démarches actuelles existantes pour renforcer la lisibilité de l'action sur les territoires et à simplifier et mettre en cohérence les différents programmes d'aides de l'Etat. Leur périmètre ne peut être inférieur à la maille intercommunale, ni supérieur à la maille départementale. Les CRTE, sur l'ensemble du territoire, devront être signés d'ici le 30 juin 2021.

Les contrats de cohésion territoriale ont ainsi vocation à intégrer les contrats conclus avec l'Etat au niveau infrarégional en matière d'aménagement et de cohésion du territoire. Ils visent en particulier à mettre en oeuvre les programmes nationaux de l'ANCT à l'échelon déconcentré. L'articulation entre les programmes nationaux et les besoins spécifiques exprimés au niveau local repose sur ces contrats de cohésion. Les projets inscrits dans ces contrats pourront ainsi bénéficier de son appui pour être mis en oeuvre rapidement. L'ANCT s'appuiera sur l'expérience acquise au travers des pactes territoriaux de développement (Nièvre, Ardennes, Creuse) pour généraliser cette nouvelle méthode de travail avec les territoires. Les collectivités territoriales et leurs groupements pourront bénéficier de l'apport en ingénierie de l'ANCT au cours de l'élaboration du contrat, de sa mise en oeuvre et de son évaluation. Son appui pourra se traduire par un accompagnement méthodologique lors de la réalisation du diagnostic territorial (mise à disposition de données socio-économiques, traitement des données et analyses spatiales, etc.) puis lors de la rédaction du projet de territoire (définition des objectifs stratégiques, prise en compte des transitions écologiques, démographiques et économiques, etc.), ainsi que de son évaluation (définition d'indicateurs de suivi et d'évaluation).

La région a en charge le développement économique, social et culturel sur son territoire (article L. 4221-1 du CGCT). Elle concourt, au même titre que les communes et les départements, à l'aménagement du territoire (L. 1111-2 et L. 4221-3 du même code). Elle a ainsi vocation à être partie prenante non seulement des contrats signés au niveau régional (contrats de plan État-Régions (CPER), accords de relance) mais également au niveau infrarégional afin de mettre en oeuvre ses missions (les contrats de cohésion territoriale ont vocation à constituer une déclinaison du volet territorial des CPER).

Le bloc communal dispose parmi ses compétences historiques de compétences dans les domaines de l'urbanisme et de l'aménagement (articles L. 1111-2, L. 2321-2 du CGCT). Ainsi, il est identifié comme l'échelon à privilégier dans la conclusion de ce type de contrats.

Le département est aussi invité à en être signataire, notamment au titre de ses missions de solidarités territoriales (article L. 3321-1 du CGCT) et de l'article L. 1111-10 du CGCT, en contribuant au financement des projets dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par les communes ou leurs groupements, à leur demande.

La crise sanitaire actuelle et les crédits pour la relance, mobilisés au niveau national pour le soutien de l'économie française, ont favorisé la mise en place d'outils communs permettant de concentrer les investissements au niveau local. Ainsi, l'articulation entre les contrats de plan État-Régions et les accords de relance, mais aussi la réflexion autour de la création des contrats de relance et de transition écologique participent de cet objectif de mise en cohérence des outils locaux. La contractualisation avec les territoires pourrait être ainsi un outil essentiel afin de déployer sur les territoires le plan « France relance ».

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La présente mesure vise à franchir une marche supplémentaire dans la définition des contrats de cohésion territoriale prévus par la loi du 22 juillet 2019.

Si au niveau régional, les CPER représentent un outil unifié de dialogue entre l'État et les régions, faisant l'objet d'un accord interministériel, une multiplicité de contrats existe aujourd'hui au niveau infrarégional, en fonction des spécificités et des caractéristiques du territoire ou de la nature et de l'objet spécifique des projets recensés : contrats de ruralité (circulaire du 23 juin 2016 du ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales), contrats de transition écologique (instruction du Gouvernement du 16 octobre 2019), contrats de ville (loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine), contrats locaux de santé, contrats dans le domaine de la culture, etc. Il apparait nécessaire d'unifier le cadre des contrats territoriaux en prévoyant que les contrats de cohésion territoriale offrent un cadre unifié et lisible pour coordonner les contrats entre l'Etat d'une part, et les collectivités de niveau infrarégional et leurs groupements d'autre part, qui respectent des principes communs. La définition de certains de ces contrats au niveau législatif justifie le recours à la loi.

Le contrat de cohésion territoriale doit également répondre à l'exigence pour l'Etat et ses partenaires de respecter les principes inspirés de la charte interministérielle de la contractualisation entre l'Etat et les collectivités territoriales de 2019. La présence de ces principes dans la loi et leur traduction dans les contrats de cohésion territoriale traduit ainsi la nécessité d'harmoniser la logique des contrats conclus au niveau local, tout en tenant compte des spécificités des territoires des cosignataires.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les contrats de cohésion territoriale, en tant qu'outils intégrateurs, ont pour objectif de conforter et coordonner un ensemble d'opérations d'investissement public au niveau local :

- pour l'État, ils permettent de mieux apprécier les besoins d'investissement à court et moyen termes dans les principaux domaines de développement des territoires ;

- pour les collectivités, leurs groupements et les acteurs partenaires, ils constituent un espace de dialogue, permettant à chacun d'apporter sa contribution technique et/ou financière.

La mise en place de ces contrats doit conjuguer deux impératifs : la prise en compte des initiatives locales et la nécessaire cohérence des politiques. C'est ainsi le moyen d'apporter une réponse différenciée aux enjeux des territoires, au plus près des réalités locales et de mobiliser tous les acteurs d'un territoire autour d'un projet de développement partagé.

Leur caractère intégrateur participe de la volonté de simplification du cadre commun et des procédures pour les rendre plus efficaces, en recherchant la cohérence dans le choix des actions retenues et en contribuant à l'efficience des investissements.

La définition d'un cadre commun de niveau national harmonisé permet l'exercice de la liberté contractuelle au niveau local, permettant la prise en compte des spécificités locales, dans le respect des compétences des cosignataires du contrat et de la cohérence des politiques publiques menées au niveau national et au niveau local.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Les principes guidant la conclusion des contrats de cohésion territoriale figurent initialement dans la charte interministérielle de la contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales de 2019, dont l'objet est de définir les principes qui fondent le nouveau cadre commun de la contractualisation et de guider l'action de l'État. Cet objectif de cohérence, de lisibilité et d'efficacité renforcées aurait pu être réaffirmé par seule voie de circulaire ou d'instruction ministérielle. Toutefois, la volonté de faire des contrats de cohésion territoriale des contrats plus transversaux qui « intègrent » les autres contrats, quel que soit le niveau de norme qui les crée, justifie le recours à une disposition législative précisant les conditions dans lesquelles s'articulent la libre administration des collectivités territoriales et la contractualisation avec l'Etat.

3.2. OPTION RETENUE

Le choix a été fait de conférer une valeur législative aux principes de la charte interministérielle de la contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales de 2019, afin d'affirmer la portée transversale et l'unicité de ce type de contrat intégrateur sur le territoire national. Les contrats de cohésion territoriale respectent ainsi les principes suivants :

1. leur périmètre d'intervention est déterminé au niveau local, en cohérence avec les bassins de vie et d'emploi ;

2. les contrats de cohésion territoriale concourent à la bonne coordination des politiques publiques dans le cadre d'une approche transversale prenant en considération les spécificités et enjeux du territoire ;

3. ils font l'objet d'un pilotage associant les cosignataires et partenaires intéressés et définissent le rôle des collectivités territoriales et de leurs groupements dans la mise en oeuvre des projets contractualisés ;

4. ils précisent les modalités de financement des projets par l'Etat, les collectivités territoriales et les autres financeurs, dans le respect de leurs compétences respectives et de la participation minimale du maître d'ouvrage prévue à l'article L. 1111-10 du CGCT ;

5. ils prévoient les modalités d'association des citoyens et des associations à la définition des projets envisagés ;

6. ils définissent les modalités de coopération avec les autres collectivités territoriales ou groupements de collectivités de l'aire urbaine ou du bassin de vie ;

7. ils favorisent l'innovation et l'expérimentation dans les modes d'intervention retenus ;

8. ils précisent leurs modalités de suivi et d'évaluation

Il est également explicitement mentionné que le représentant de l'État dans la région est le garant de l'articulation des contrats au niveau régional.

Enfin, le présent article définit un cadre commun aux contrats territoriaux, en explicitant leur caractère intégrateur. Ainsi, ces derniers peuvent être conclus pour coordonner les modalités d'intervention et de soutien de l'Etat et des établissements publics nationaux aux projets et politiques portés par les communes et les EPCI dans les domaines de la cohésion des territoires et de l'aménagement du territoire. Est également prévue la faculté qu'ils intègrent d'autres types de contrats afin de jouer pleinement leur rôle d'ensemblier.

S'agissant des parties prenantes au contrat, au-delà de l'Etat et des collectivités, une association des acteurs économiques et sociaux du territoire est envisagée, afin que le contrat soit le socle d'un large partenariat local. La région et le département peuvent également être parties prenantes à ces contrats, de même que des établissements publics nationaux ou locaux.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 1231-2 du CGCT est modifié pour préciser les principes guidant la conclusion des contrats de cohésion territoriale, leurs objectifs et identifier les parties prenantes.

Les contrats de cohésion territoriale constituent une acception générique ayant vocation à être déclinée selon différents types de contrats. Les modalités d'application propres à chaque type de contrat pourront être définies au niveau réglementaire ou infra-réglementaire. Ainsi, les modalités de mise en oeuvre des CRTE font l'objet d'une circulaire spécifique signée du Premier ministre le 20 novembre 2020. Les CRTE sont ainsi la « première génération » de contrats de cohésion territoriale.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

La mesure ne porte pas en elle-même d'impacts économiques, mais les projets portés au sein des contrats de cohésion territoriale ont vocation à créer un effet de levier sur les investissements, en constituant notamment un outil de la relance au niveau local, en associant les acteurs du territoire (collectivités territoriales et leurs groupements, acteurs socio-économiques, associations, habitants, etc.) et en permettant un cofinancement État-collectivités des projets.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La mesure ne bénéficie pas directement aux entreprises, mais l'instauration des contrats de cohésion territoriale a vocation à traduire l'ambition partagée de déployer, dans tous les territoires, le plan de relance à court terme, ainsi que des investissements au profit du territoire sur le plus long terme. Ces nouveaux contrats intégrateurs y contribueront, en favorisant l'investissement public et privé dans les territoires. Ils représentent également un enjeu en termes de lisibilité et de simplification de l'action publique.

4.2.3. Impacts budgétaires

La mesure ne porte pas en elle-même d'impact budgétaire.

En effet, les moyens à mobiliser sont multiples. L'intérêt de la mobilisation collective réside dans l'effet d'entraînement. Ce contrat, par son effet d'amplification des mesures existantes, a pu s'appuyer sur l'ensemble des outils de droits commun : dispositifs, dotations, aides spécifiques, volets territoriaux des CPER, mobilisation des crédits européen (fonds européen de développement régional - FEDER, fonds européen agricole pour le développement durable - FEADER, fonds social européen - FSE), ainsi que les fonds et appels à projets existants sur les thématiques du contrat.

A titre d'exemple, en 2019, 489 contrats de ruralité ont été signés. Ils ont permis de mobiliser 423,8 millions d'euros de crédits de l'État, en légère baisse par rapport à 2018 (- 8%, soit -32 millions d'euros). Le financement par la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) reste stable, passant de 193 millions d'euros en 2017 et en 2018 à 182 millions d'euros en 2019. Cela représente 30 % de l'enveloppe totale de la DSIL. 16 millions d'euros de crédits européens ont également été mobilisés.

Ainsi, la contractualisation intervient également pour apporter une cohérence dans l'utilisation des différents dispositifs de financement existants.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les communes et leurs groupements sont une échelle à privilégier pour la définition des politiques publiques et ce, même si la maîtrise d'ouvrage des projets inscrits dans le contrat de cohésion territoriale, publique et/ou privée, pourra être diversifiée (communale, intercommunale, départementale, régionale ou nationale). En effet, si la signature du contrat se fait à l'échelle d'une ou plusieurs intercommunalités, en cohérence avec les orientations stratégiques qui figurent dans des documents de référence tels que les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), les schémas de cohérence territoriale (SCOT), les plans locaux d'urbanisme (PLUi), les programmes locaux de l'habitat (PLH), les chartes de parcs naturels régionaux (PNR), les projets ou actions pourront être portés en maîtrise d'ouvrage par des communes, notamment sur leur propre patrimoine, ou par d'autres acteurs publics et privés.

A titre d'exemple pour les contrats de ruralité, près de 62 % des EPCI à fiscalité propre et un quart des départements sont intégralement couverts par un tel contrat. Les contrats sont signés prioritairement à l'échelle des pôles d'équilibre territoriaux et ruraux (PETR), ou à défaut des intercommunalités rurales ou périurbaines, pour la période 2017-2020. Sur les 489 contrats de ruralité, 68% sont ainsi portés par des communautés de communes, 19% par des PETR, 12% par des communautés d'agglomération et 1% par des communautés urbaines.

Les régions et les départements sont invités à contribuer à l'élaboration du contrat de ruralité et à en être signataires, en lien avec leurs propres dispositifs de contractualisation. Les autres partenaires naturels et historiques des PETR (ADEME, Caisse des Dépôts et Consignations, établissements publics partenaires tels les chambres consulaires ou les agences de l'eau, bailleurs sociaux, opérateurs publics, associations, Banque de France, etc.) ont également la possibilité d'être associés.

Les régions ont apporté des cofinancements à hauteur de 129 millions d'euros en 2019 (contre 116 millions d'euros entre 2018) ; les départements ont mobilisé 93 millions d'euros en 2019 (contre 97 millions d'euros en 2018).

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La bonne coordination des politiques publiques est une des principales conditions de conclusion du contrat de cohésion territoriale, nécessitant un travail des services administratifs, notamment de l'État, en ce sens. Ce contrat a vocation à faire converger et à mieux articuler l'action des différents ministères au niveau départemental, en faveur du développement d'un territoire. Le représentant de l'État dans la région sera le garant de l'articulation des contrats au niveau régional.

La mesure ne comporte pas d'impact spécifique en termes de moyens sur les services administratifs de l'État.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique sur le territoire métropolitain et en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à La Réunion.

Article 48 : Article d'habilitation autorisant le Gouvernement à agir par ordonnance afin de renforcer le rôle d'expertise et d'assistance du CEREMA au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements

1. ETAT DES LIEUX

1.1. LE CEREMA

Le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) est un établissement public de l'État créé le 1 er janvier 2014 par la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transport. Il regroupe 11 anciens services de l'État 192 ( * ) et s'est vu de plus adjoindre, au 1 er janvier 2021, le centre national des ponts de secours, service à compétence nationale du ministère de la transition écologique.

Placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés du développement durable, de l'urbanisme et des transports, il a vocation à apporter son soutien à l'État et aux collectivités territoriales et leurs groupements en matière d'expertise technique dans ses six grands domaines de compétences : ingénierie des territoires, bâtiments, mobilité, infrastructures de transports, environnement et risques, mer et littoral.

Le Cerema compte 2 500 agents présents sur 29 sites répartis sur l'ensemble du territoire métropolitain. Des projets d'installation d'antennes en Guyane et à la Réunion sont en cours d'étude pour répondre aux besoins des collectivités sur l'arc antillais et sur la zone de l'océan indien.

L'article 45 de la loi précitée précise que « pour l'accomplissement de ses missions, l'établissement assure, essentiellement à la demande de l'État, des activités de conseil, d'assistance, d'études, de contrôle, d'innovation, d'expertise, d'essais et de recherche ».

Son large champ d'intervention offre à l'établissement la capacité d'intégrer ses différentes compétences dans la construction de projets territoriaux, en vue notamment d'aider les acteurs des territoires à relever le défi de la transition écologique. Il s'agit par exemple de prestations de type contrat de relance et de transition écologique, plan biodiversité, contrat action coeur de ville, France mobilité, territoires engagés pour la nature, petites villes de demain...

Le Cerema dispose de compétences transversales et multidisciplinaires qui lui permettent de proposer un panel d'activités qui peuvent intervenir à tous les niveaux de l'élaboration et de la réalisation d'un projet Ce qui correspond à environ 3 000 projets par an.

1.2. Modalités d'action du Cerema

L'essentiel de l'activité du Cerema est réalisée pour son compte propre, tant au bénéfice de l'État que pour le compte des collectivités territoriales et de leurs groupements depuis l'échelon régional jusqu'à communal.

Il intervient également à la demande d'un donneur d'ordre qui peut être l'État, une collectivité territoriale ou un autre acteur.

Vis-à-vis de l'État, le Cerema a été conçu pour intervenir alors dans le cadre de la quasi-régie, ainsi que le précise l'article 45 de la loi n° 2013-431 précitée : « L'État peut faire appel au Cerema dans le cadre du 1° de l'article 3 du code des marchés publics » , dispositions désormais reprises et précisées dans les articles L. 2511-1 à L. 2511-5 du code de la commande publique actuellement en vigueur.

Vis-à-vis des collectivités territoriales et de leurs groupements, lorsqu'il intervient dans le champ de la commande publique, il le fait selon les dispositions du droit de la concurrence, en répondant à leurs appels d'offres notamment pour des activités d'ingénierie de premier niveau. C'est en particulier le cas dans le champ des infrastructures (marchés avec les conseils départementaux notamment). L'article 45 précise que l'activité de prestation du Cerema pour le compte de tiers autre que l'État est réalisée à titre accessoire .

Le texte distingue donc clairement dans sa rédaction actuelle, entre l'État et les collectivités territoriales et leurs groupements, les modalités d'accès à l'expertise du Cerema, ainsi que le caractère principal et accessoire des deux activités.

2. NECESSITE DE LEGIFERER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

Le projet du Gouvernement est d'améliorer l'accès des collectivités territoriales aux capacités d'expertise du Cerema.

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Une analyse des freins existants à l'accès des collectivités territoriales aux capacités d'action du Cerema a été menée 193 ( * ) et un certain nombre de pistes sont envisagées.

Parmi ces freins ont été mentionnées entre autre les dispositions législatives, en particulier le droit de la commande publique qui assimile les interventions du Cerema en appui aux collectivités territoriales à celles des opérateurs privés dans le champ concurrentiel.

Afin d'améliorer l'appui du Cerema au profit des collectivités, le Gouvernement souhaite dès lors rapprocher les modalités d'intervention du Cerema pour le compte de ses deux catégories de bénéficiaires publics. Ceci passe par :

- Retirer aux prestations exécutées pour le compte des collectivités territoriales le caractère accessoire que leur impose la loi,

- Réfléchir aux modalités permettant aux collectivités territoriales qui le souhaitent d'accéder aux prestations du Cerema de façon renforcée et similaire aux modalités dont bénéficie l'Etat, et préciser les conditions qui s'appliqueraient à elles alors, par exemple la nécessité pour les collectivités d'adhérer à l'établissement.

Le Cerema ayant été créé par la loi n°2013-431, à la différence de nombreux autres établissements publics créés et organisés par décret, ses missions, les modalités de sa gouvernance, la nature de ses ressources, la répartition des sièges de son conseil d'administration etc. sont du domaine législatif, d'où la nécessité de légiférer.

Par ailleurs, les dispositions du code de la commande publique précisent les conditions de l'intervention dans le régime de la quasi-régie entre un contractant et un commanditaire, et notamment le fait que le contractant doit réaliser plus de 80 % de son activité pour le compte de la puissance adjudicatrice pour que l'activité relève du régime de la quasi régie.

Il s'ensuit que l'augmentation de l'activité du Cerema pour les collectivités territoriales et leurs groupements, si elle n'est pas accompagnée d'une réflexion sur le régime sous lequel cette activité intervient, pourrait conduire mécaniquement à ce que le Cerema cesse de relever du régime de la quasi régie vis-à-vis de l'État, ce que le Gouvernement ne souhaite pas.

Pour lever cette difficulté, le Gouvernement souhaite définir les modalités d'un régime de quasi -régie conjointe entre l'Etat et les collectivités territoriales concernées, les deux types de bénéficiaires publics du Cerema pouvant alors simultanément bénéficier des prestations du Cerema selon les dispositions des articles L. 2511-1 à L 2511-5 du code de la commande publique. Ceci passe alors par la modification des modalités de gouvernance du Cerema qui, ainsi que précisé plus haut, sont de nature législative. Il s'agit là cependant d'un projet à fort contenu technique, nécessitant la réalisation d'études complémentaires, d'où le souhait du Gouvernement d'obtenir une habilitation à légiférer par ordonnance.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Dès sa création, le Cerema, conformément à ses statuts, a développé son activité d'expertise pour le compte de l'État, à titre principal, et des collectivités territoriales et de leurs groupements. Cette activité en lien avec les collectivités ainsi que la forte valeur ajoutée du Cerema au profit des projets de territoires ont conduit le législateur, avec la loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), à considérer le Cerema comme un partenaire de premier niveau de l'ANCT avec laquelle il a passé convention.

Le Gouvernement souhaite poursuivre cette dynamique et améliorer encore l'accès des collectivités territoriales et de leurs groupements à la capacité d'expertise et d'assistance que représente le Cerema.

3. DISPOSITIF RETENU

Le Gouvernement envisage une solution qui permettrait aux collectivités territoriales et à leurs groupements de faire appel aux capacités d'expertise du Cerema dans le cadre de la quasi-régie conjointe prévue par les dispositions des articles L. 2511-3 et L. 2511-4 du code de la commande publique.

Cependant, eu égard à la technicité des dispositions à prendre et au délai nécessaire pour en préciser exactement le contour, le Gouvernement propose que ces mesures soient définies dans le cadre d'une ordonnance en application de l'article 38 de la Constitution.

La mesure envisagée habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance afin de renforcer, par exemple par la mise en place d'une quasi-régie conjointe une fois les modalités techniques précisément définies, le rôle d'expertise et d'assistance au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).

Il s'agit de prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi tendant à :

- modifier les missions du Cerema, notamment pour supprimer le caractère accessoire des missions réalisées pour le compte des collectivités territoriales ;

- définir les conditions de la participation des collectivités territoriales et de leurs groupements au financement des missions de l'établissement ;

- modifier les règles de gouvernance, d'organisation et de fonctionnement du Cerema.

Il s'agirait notamment de revoir la représentation des collectivités territoriales bénéficiaires dans sa gouvernance, afin que le Cerema devienne un outil partagé entre l'État et les collectivités territoriales.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIFS ENVISAGEES

L'analyse des incidences des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d'impact retraçant les dispositions de l'ordonnance. Les différents impacts (sociaux, économiques et financiers) seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

Cependant, il peut d'ores et déjà être identifié que les dispositions envisagées auront les effets suivants :

4.1. IMPACT JURIDIQUE

L'éventuelle ordonnance est susceptible de porter sur la modification des articles 44, 45, 46 et 47 de la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013. L'application des mesures législatives issues de l'ordonnance pourra nécessiter une modification du décret en Conseil d'État n° 2013-1273 du 27 décembre 2013 relatif au Cerema qui sera élaboré parallèlement à l'ordonnance.

4.2. IMPACT POUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

A partir de 2018, en cohérence avec l'orientation stratégique définie dans le projet Cerem'Avenir dont un des objectifs est de collaborer davantage avec les collectivités territoriales, de nombreux partenariats ont été noués. Cette stratégie s'est appuyée sur un nouveau processus de programmation et la mise en place (en cours) d'une comptabilité analytique des prestations.

Cette politique de développement des partenariats s'est amplifiée en réponse à des besoins d'appui croissants des collectivités sur l'ensemble des domaines d'activité du Cerema. La part de subvention affectée à cet usage est ainsi en augmentation : elle est passée à 3,1 M€ en 2018, 5,6 M€ en 2019, pour s'établir en 2020 à 6,7 M€ 194 ( * ) . Les cofinancements générés dans le cadre de ces partenariats sont aussi en progression constante. Ainsi, en 2019, ces actions ont représenté un peu plus de 4 M€ de recettes, soit environ 40% des recettes issues de collectivités territoriales (qui se montent à près de 10 M€), et elles devraient s'établir en 2020 à environ 7 M€, à un niveau équivalent aux recettes issues du champ concurrentiel.

Cette dynamique de développement des partenariats est illustrée par le graphique ci-dessous et montre l'appétence des collectivités pour ce type d'appui, mais aussi les limites institutionnelles.

Aujourd'hui, le Cerema contractualise avec plus de 350 collectivités territoriales et estime que le besoin, reflétant celui de l'ANCT également, s'établit à plus de 1 000 collectivités à court terme et 2 000 à moyen terme. 195 ( * )

Cet aspect économique figure au 1° et au 2° de l'article d'habilitation en ce qu'ils permettent de modifier les missions du Cerema et de définir les conditions et les modalités, y compris financières, de la participation des collectivités territoriales et de leurs groupements ;

Il est ainsi visé qu'à horizon 2025-2026, environ 25% de l'activité du Cerema puisse s'inscrire dans ce cadre de la quasi-régie, au profit d'une cible évaluée à environ 1 000 à 2 000 collectivités. Cela représenterait environ 60 M€ de prestations d'expertise cofinancée à parité par la dotation et les financements des collectivités adhérentes dans le cadre de la quasi-régie, ceci à la fois sous forme de cotisations et de cofinancements des « prestations approfondies » mises en oeuvre au-delà des journées d'appui gratuits.

5. CONSULTATIONS MENEES ET JUSTIFICATION DU DELAI D'HABILITATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la disposition envisagée a été soumise au conseil national d'évaluation des normes. Le conseil d'administration du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement a également été consulté.

Les autres consultations utiles seront menées lors de l'éventuelle ordonnance prise en application de l'habilitation.

5.2. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Un délai d'habilitation de douze mois est nécessaire compte tenu de la technicité des dispositions à prendre. Le délai introduit sera mis à profit pour la réalisation d'une mission d'inspection, déjà engagée 196 ( * ) , destinée à préciser clairement les freins à lever pour l'amélioration de l'accès des collectivités territoriales et leurs groupements au Cerema.

Un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

Article 49 : France Services

1. ÉTAT DES LIEUX

Avant le déploiement des maisons de services au public (MSAP) et des espaces France services, les maisons de services publics ont, tout d'abord, été créées par l'article 27 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (dite loi DCRA). Selon les termes de la loi, elles visaient à « faciliter les démarches des usagers et [à]améliorer la proximité des services publics sur le territoire en milieu urbain et rural ».

Elles s'inscrivent dans le cadre de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire qui définit, dans son article 1 er , un principe « d'égal accès au savoir et aux services publics sur l'ensemble du territoire ». L'article 2 confère à l'État le rôle d'assurer « la présence et l'organisation des services publics » dans le respect de ce principe. Enfin, l'article 29-1 autorise l'État et les collectivités territoriales ou leurs groupements, ainsi que les organismes chargés d'une mission de service public, à créer des maisons de services publics telles que définies par la loi DCRA, à participer à leur fonctionnement, ou encore à conclure des conventions pour maintenir la présence d'un service public.

Ces maisons de services publics regroupaient des réalités et des projets différents selon la nature de la structure porteuse : Plateformes de Service Public (politique de la ville), Espaces ruraux emploi-formation (EREF), Point publics en milieu rural ou Points Multi-services (POMS)... La participation de l'Etat prenait alors la forme de subventions aux collectivités territoriales qui souhaitaient conduire une telle démarche. Le périmètre de l'offre disponible était plus restreint, avec une vocation sociale ou un accompagnement des associations d'aide au public. Seules des structures publiques pouvaient être habilitées à exercer ces missions.

Les maisons des services publics ont été réformées par l'article 100 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (dite loi NOTRe) et sont devenues les maisons de services au public (MSAP). Une maison de services au public est un lieu dans lequel les habitants peuvent être accompagnés par des agents-médiateurs dans leurs démarches administratives sur de nombreuses thématiques : emploi, retraite, famille, social, santé, logement, énergie, accès au droit, etc. Si les objectifs des MSAP demeurent les mêmes que les maisons de services publics, leur déploiement, l'offre proposée et le niveau de financement des structures porteuses deviennent plus ambitieux.

Au total, au 24 septembre 2018 et avant la labellisation des premiers espaces France services, 1 313 MSAP étaient en place : 616 maisons étaient portées par une collectivité territoriale, 203 par une association et 494 par La Poste 197 ( * ) . A la date de la publication de la circulaire du Premier ministre mettant en place le réseau France Services au 1 er juillet 2019, 715 maisons étaient portées par des collectivités territoriales (dont la moitié par des intercommunalités, le reste étant porté par des communes et des départements), 122 portées par des associations, 503 portées par La Poste (soit 1 340 sur le territoire).

La refonte des MSAP en espaces France Services (FS), annoncée par le Président de la République le 25 avril 2019 à l'issue du Grand débat national, témoigne du souhait d'un nouveau modèle d'accès aux services publics. Ce modèle se caractérise par quatre ambitions afin d'améliorer le dispositif des MSAP :

- le retour du service public au coeur des territoires : chaque Français doit, à termes, pouvoir accéder à un espace France service en moins de 30 minutes ;

- un service public plus moderne : une réponse à visage humain qui exploite également les potentialités du numérique et qui forme les personnes éloignées à l'usage d'internet ;

- un niveau de qualité garanti quel que soit le lieu d'implantation ou la structure porteuse de l'espace France services ;

- un lieu de vie agréable et convivial qui donne accès, au-delà des formalités administratives, à une gamme élargie de services de co-working ;

Le déploiement du dispositif France Services, identifié comme objet de la vie quotidienne (OVQ) dans le cadre de la circulaire du n° 6117/SG du 3 octobre 2019 et repris au titre des réformes prioritaires (cf. circulaire n° 6230/SG du 18 novembre 2020) a été initié le 1 er janvier 2020. Le réseau des structures labellisées « France Services » se compose de guichets uniques de proximité regroupant sur leurs sites plusieurs administrations.

Cette nouvelle ambition s'appuie sur une refonte complète du réseau existant des MSAP ainsi que sur l'ouverture de nouvelles implantations France Services là où sont les besoins, prioritairement dans les cantons ruraux et les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). La charte d'engagement traduit un engagement financier plus important de l'Etat (une aide annuelle de fonctionnement et des aides à l'investissement) et la présence garantie de 10 opérateurs (6 pour les MSAP) : caisses d'allocations familiales (CAF), Pôle Emploi, caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), mutuelle sociale agricole (MSA), délivrance de titres, déclarations fiscales, La Poste et dernièrement AGIRC-ARRCO. Cette garantie assure par ailleurs une certaine homogénéité du panier de l'offre de services publics dans les territoires.

La circulaire Premier ministre du 1er juillet 2019 prévoit que, passé le délai du 31 décembre 2021, les MSAP non labellisées France Services « ne recevront plus de financement de l'Etat ». Néanmoins, une démarche d'accompagnement sera mise en oeuvre pour assurer la labellisation de toutes les structures existantes. Les actuelles MSAP ont un financement garanti par l'Etat, et pour certaines renforcé, jusqu'à fin 2021. En parallèle, dans le cadre des schémas départementaux d'accessibilité des services au public portés avec les conseils départementaux, l'Etat favorisera la création de nouvelles structures, pour parfaire le maillage existant, et développer notamment des solutions itinérantes.

En octobre 2020, 856 structures ont été labellisées France Services en métropole et dans les territoires ultramarins :

- 11 portées par l'État (sous-préfectures) ;

- 153 portées par des associations ;

- 131 portées par le groupe La Poste ;

- 17 portées par la Mutualité sociale agricole (MSA) ;

- 544 portées par des collectivités territoriales ou leurs groupements (communes, intercommunalités ou départements).

Parmi ces 856 structures, 30 espaces France services sont des itinérants (bus France Services) qui ont vocation à assurer une meilleure présence des services publics dans les quartiers prioritaires de la ville. La liste des porteurs de projets sélectionnés a été annoncée par la Ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et la Ministre déléguée chargée de la ville, le 31 juillet 2020 à Noisy-le-Grand.

Concrètement, des agents sillonneront les quartiers et s'installeront de manière temporaire dans les espaces de la vie quotidienne comme au pied des immeubles, sur une place de marché, à proximité de la mairie ou d'un centre commercial. Cofinancés par l'Etat et la Banque des Territoires à hauteur de 90 000 euros par bus, ces France services itinérants sont opérationnels depuis la fin du mois de décembre. Les 30 porteurs de projets sélectionnés vont pouvoir ainsi se déployer dans 23 départements 198 ( * ) .

Un deuxième appel à manifestation d'intérêt a été lancé le 26 octobre 2020 pour labelliser 50 nouvelles structures itinérantes, avec le même cahier des charges que le premier mais un rayonnement territorial plus large : à la fois en QPV et dans les territoires ruraux.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

A l'instar des MSAP qui figuraient dans la loi NOTRe, en succédant aux maisons des services publics de la loi DCRA, l'inscription du réseau France Services dans la loi permet de prendre en compte le changement de dénomination, la nouvelle procédure de labellisation et l'offre en matière d'accès aux services publics qui en découle.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure explicite le rôle et les missions de France Services, et précise la procédure de labellisation des structures.

France Services vise à renforcer l'offre de services publics de qualité en proximité. Les usagers seront accompagnés dans toutes leurs démarches concernant les neuf partenaires clés (caisses d'allocations familiales - CAF, Pôle Emploi, caisse nationale d'assurance maladie - CNAM, caisse nationale d'assurance vieillesse - CNAV, MSA, délivrance de titres, déclarations fiscales, La Poste), auxquels s'ajoute AGIRC-ARRCO depuis 2020. Ce déploiement s'appuie notamment sur la montée en gamme des MSAP d'ici 2022. L'accompagnement des usagers ne consiste pas en une simple réorientation, mais comprend un engagement à la résolution directe des difficultés rencontrées. Le réseau France Services a ainsi pour objet de permettre d'accompagner les usagers dans les principales démarches administratives au plus près du terrain, dans un souci de simplification, mais aussi de regroupement.

La circulaire du Premier ministre du 1 er juillet 2019 199 ( * ) a précisé l'objectif d'ouverture de 2 500 espaces France Services d'ici 2022, soit un peu plus d'une par canton en fonction des besoins. Les remontées des préfectures ont permis d'évaluer à 2086 le total des espaces existants ou en projet d'ici à 2022. Un travail de concertation avec les élus est donc demandé aux préfets pour atteindre l'objectif fixé.

A partir du 1 er janvier 2022 les MSAP, qui n'auront pas atteint les objectifs, ne seront plus labellisées France Services et ne bénéficieront plus de financements de l'État.

La qualité de service est un critère central dans la démarche France Services. L'homologation de chaque structure est ainsi conditionnée au respect de 30 critères obligatoires 200 ( * ) de qualité de service, fidèles à la charte d'engagement France Services, et d'une appréciation du besoin rigoureuse en lien avec les préfets et les acteurs locaux.

Cinq axes président à la labellisation des espaces France Services : la présence de deux agents polyvalents, une amplitude d'ouverture hebdomadaire suffisante, des partenariats approfondis avec les partenaires nationaux, la réalité de l'offre de services proposés, le respect d'un affichage nécessaire à l'identification de la structure.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le lancement du réseau et des espaces France Services s'est opéré par voie de circulaire (circulaire n° 6094-SG du 1 er juillet 2019 relative à la création de France Services). Les premiers espaces France Services ont été mis en place sur cette base textuelle. L'inscription de la mise en place du réseau France Services dans la loi a constitué une nouvelle option afin de clarifier le dispositif et d'acter la suppression du dispositif des MSAP au 31 décembre 2021 au niveau législatif.

3.2. OPTION RETENUE

Afin de clarifier l'état du droit existant et afin de se conformer à l'objectif de lisibilité et d'accès au droit pour les citoyens, le choix a été fait d'inscrire le transfert des MSAP vers les espaces France Services dans la loi.

France Services est un label délivré par l'État à des regroupements de services publics relevant de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements, d'organismes nationaux ou locaux chargés d'une mission de service public, ainsi que de services nécessaires à la satisfaction des besoins de la population, garantissant l'accessibilité et la qualité de ces services.

Pour chaque département, une convention France Services conclue entre les parties mentionnées à l'alinéa précédent définit les services rendus aux usagers, les zones en milieu rural et urbain dans lesquelles les espaces France Services exercent leur activité, les missions qui y sont assurées et les prestations qu'elles peuvent délivrer, dans le respect de l'accord-cadre national France Services et des prescriptions du schéma d'amélioration de l'accessibilité des services au public.

L'offre de services peut être organisée de manière itinérante ou selon des modes d'accès dématérialisés.

Les maisons de services au public peuvent candidater à l'obtention du label France Services. Les conventions-cadres conclues pour chaque maison sont reconduites jusqu'à la date de l'octroi du label ou, à défaut, jusqu'au 31 décembre 2021.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article 27 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (DCRA) est modifié pour prendre en compte la fin du dispositif des MSAP à compter du 1 er janvier 2022 et leur remplacement progressif par des espaces France Services.

Il est également procédé à une mise à jour des textes en remplaçant les mots « maisons de services au public » par « France Services » :

- à l'intitulé du titre IV et à l'article 27-2 de la loi DCR ;

- aux articles 29 et 29-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;

- à l'article 30 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;

- aux articles L. 5214-16 et L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

Chaque structure porteuse d'un projet France Services bénéficie de 30 000 € financés à parité par le fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT ; programme 112) et le fonds inter-partenaires.

En 2020, 131 espaces France Services sont portées par le groupe La Poste.

4.2.2. Impacts budgétaires

En 2019, a été décidée la forfaitisation du financement en fonctionnement des MSAP en cours de montée en gamme vers le nouveau label ainsi que des espaces France Services nouvellement labellisés. Ce forfait a été porté à hauteur de 30 000 € par an par structure répartis entre :

- le fonds postal national de péréquation territoriale (26 000 €) et le fonds national France Services (4 000 €) pour les structures postales ;

- le FNADT à hauteur de 15 000€ par maison et le fonds national France Services (FNFS) à hauteur également de 15 000 € pour les structures non postales.

Compte tenu de l'ambition du dispositif France Services, un renouvellement des modalités de financement des partenaires a été nécessaire. La contribution de chaque partenaire (opérateur ou ministère) au FNFS a été calculée à partir des visites annuelles constatées en accueil physique et de leurs usagers potentiels au niveau national, ce qui conduit à trois blocs de contributeurs finançant chacun à hauteur de :

- 15 % quand il est constaté plus de 12 millions de contacts physiques/usagers potentiels du service public par an ;

- 13 % quand il est constaté entre 5 et 12 millions de contacts physiques/usagers potentiels par an ;

- 6 % quand il est constaté moins de 5 millions de contacts physiques/usagers potentiels par an.

Pour l'année 2020, les contributions de l'État et des opérateurs au FNFS financeront :

- 840 MSAP non-postales ayant vocation à obtenir le label France Services et France Services ;

- 90 créations budgétaires France Services (c'est à dire un projet n'étant pas précédemment financé par le FNFS - précédemment fonds inter-opérateurs (FIO) - au titre des MSAP) hors France Services postales entre les mois de janvier et de février 2020 ;

- 178 créations budgétaires France Services pour les labellisations du second semestre 2020 ;

- 510 MSAP postales et France Services postales.

Pour le FNFS, une contribution à hauteur du public potentiel est maintenue pour l'année 2021.

Le FNADT contribue à hauteur de 18,5 millions d'euros pour l'année 2020 au financement des structures ainsi qu'au financement de l'animation nationale du réseau.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

France Services s'inscrit dans une volonté de proximité et d'amélioration de l'accessibilité des services aux publics de l'État mais aussi de l'ensemble des collectivités territoriales et de leurs groupements. Chaque structure est amenée à collaborer étroitement avec les collectivités pour fournir un service complet à la population. Des possibilités de mutualisation sont recherchées pour tendre le plus possible vers une démarche de guichet unique.

En 2020, 544 structures sont portées par des collectivités territoriales ou leurs groupements (communes, intercommunalités ou départements). Deux équivalents temps plein (ETP) sont prévus pour faire fonctionner chaque structure.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Pour les personnels administratifs, France Services prévoit la mise en place d'un back office des opérateurs pour soutenir les agents en cas de difficulté et un renforcement de la formation et des outils informatiques.

En 2020, 11 structures étaient portées par l'État (sous-préfectures). Deux ETP sont prévus pour faire fonctionner chaque structure.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

4.5.1. Impacts sur les personnes en situation de handicap

Parmi les dix engagements pour « un État inclusif » du troisième comité interministériel du handicap qui s'est tenu le 3 décembre 2019, le Gouvernement souhaite « assurer un accueil accessible et de qualité des personnes en situation de handicap dans les France Services ».

Les observatoires de l'Agence nationale de la cohésion des territoires - l'Observatoire national de la politique de la ville et l'Observatoire des territoires - produisent des données territorialisées qui portent, notamment, sur la situation du handicap dans les territoires fragiles. Elles indiquent que :

- en 2017, 5,2 % des 15-64 ans résidant dans des quartiers prioritaires sont allocataires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), contre 3,2 % des habitants des alentours ;

- dans les communes rurales (très peu denses), la part des allocataires de l'AAH parmi les 20-64 ans représente 2 % de la population.

Les espaces France Services permettront aux usagers de pouvoir y faire leurs principales démarches administratives du quotidien, et proposeront systématiquement une alternative au numérique, notamment au moyen d'un accompagnement humain.

Le bouquet de services, établi avec les partenaires de France Service, prend donc en compte l'accompagnement des personnes en situation de handicap, en particulier en déployant et en confortant les partenariats avec les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

4.5.2. Impacts sur la jeunesse

La délivrance d'informations ciblées sur les usagers jeunes fait partie intégrante du bouquet de services proposés par France Services, afin d'améliorer l'accès aux services destinés à la jeunesse : fourniture d'un accès à une information d'ordre général sur l'ensemble des partenaires, mise en lien avec les structures d'information et d'accompagnement à l'attention de la jeunesse (Points Accueil Ecoute Jeunes, Maisons des adolescents...), le cas échéant mise en relation avec un référent spécialiste partenaire en cas de situation complexe pour un accompagnement direct.

4.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

France Services est un réseau de services publics mutualisés, pour permettre aux usagers de procéder aux principales démarches administratives du quotidien dans un lieu unique, à moins de 30 minutes de leur domicile.

France Services porte un engagement à la résolution des difficultés : l'accompagnement des usagers ne se fait pas via la réorientation, mais comprend un engagement à la résolution des difficultés rencontrées.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique sur le territoire métropolitain et en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à Mayotte et à La Réunion.

TITRE VII - MESURES DE SIMPLIFICATION DE L'ACTION PUBLIQUE

CHAPITRE IER - ACCÉLÉRATION DU PARTAGE DE DONNÉES ENTRE ADMINISTRATIONS AU BÉNÉFICE DE L'USAGER

Article 50 : Accélérer l'échange de données entre administrations au profit de l'usager

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Depuis la loi dite « Madelin » n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, il est tenté de remédier à la pratique administrative consistant à réclamer aux entreprises déclarantes des informations ou des pièces justificatives les concernant et qu'une administration possède déjà (article 32).

Le principe de non redondance des informations demandées aux usagers a par ailleurs été inscrit dans notre droit dans un premier temps par le décret n° 2011-452 du 25 mai 2001 relatif aux simplifications des démarches et formulaires administratifs qui prévoyait qu'une commission pour les simplifications administratives veille à ce que « l'administration émettrice d'un formulaire ne réclame pas aux usagers des informations déjà détenues ou susceptibles de lui être régulièrement communiquées par une autre administration » (article 2).

Ce principe a par la suite été confirmé et renforcé par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (article 4) et par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives (article 62).

Ces mesures s'articulaient autour des principes suivants :

- les autorités administratives échangent entre elles toutes informations ou données strictement nécessaires pour traiter les demandes ou déclarations des usagers, qui ne peuvent être tenus de produire des informations ou données qu'ils ont déjà produites ;

- dès lors que les informations ou données peuvent être directement échangées, la production de pièces justificatives n'est plus exigée.

Lors du comité interministériel pour la modernisation de l'action publique du 18 décembre 2012, le programme « Dites-le-nous une fois » (DLNUF) a été fixé comme une des priorités. La décision n° 27 - « Dites-le-nous une fois » devait être mise en oeuvre dès janvier 2013.

Dans ce cadre, le dispositif a été retouché par l'ordonnance n° 2015-507 du 7 mai 2015 relative à l'adaptation du secret professionnel dans les échanges d'informations entre autorités administratives et à la suppression de la production de pièces justificatives puis la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique (article 90), afin de faciliter sa mise en oeuvre s'agissant des entreprises puis de tous les usagers. En particulier, a été précisé que les administrations ne peuvent plus s'opposer le secret professionnel pour refuser une transmission.

Ces dispositions sont désormais codifiées au sein du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) :

- l'article L. 114-8 fixe le principe d'échange d'informations entre administrations, pour traiter des démarches administratives ;

- l'article L. 114-9 organise les conditions des échanges et renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser les modalités de ces échanges ;

- l'article L. 114-10 permet aux administrations de ne pas mettre en oeuvre cette obligation, quand les échanges prévus aux articles précédents ne sont pas possibles en raison de la nature des informations (secret médical ou secret défense) ou d'une impossibilité technique ;

- l'article L. 113-12 pose le principe de « dites-le-nous une fois » : les usagers ne peuvent être tenus de produire des informations déjà produites auprès de la même administration ou d'une autre et, dans ce cas, doit informer cette dernière des circonstances de la première production du document ;

- l'article L. 113-13 pose le principe d'une liste de pièces justificatives que le public n'a plus à produire dès lors que les échanges de données sont effectifs.

La mise en oeuvre de ce dispositif nécessite la publication d'un décret en Conseil d'État, organisant les échanges de données entre administrations. En outre, un décret fixe la liste des pièces justificatives qui n'auront plus à être produites par les usagers.

C'est dans cet objectif qu'a été publié le décret n° 2019-31 du 18 janvier 2019 201 ( * ) dont les dispositions sont codifiées aux articles R. 114-9-1 et suivants du CRPA.

Depuis lors, les échanges directs entre systèmes d'information se sont généralisés et s'effectuent désormais par des interfaces qui assurent une plus grande fluidité des échanges grâce à une mise à jour régulière des données, tout en garantissant une plus grande protection des données de l'usager, puisque seules les informations nécessaires sont adressées aux administrations et non toutes celles pouvant figurer dans un document.

Ainsi, 364 partages de données entre administrations ont déjà pu être mis en place, à la fois pour des démarches d'entreprise (candidature à un marché public, demande d'aide, dépôt d'un dossier, etc.) ou des démarches de particuliers (inscription à la crèche, demande de tarification préférentielle pour les transports scolaires, demande de bourse étudiante, etc.).

Pour ce qui relève des règles applicables en matière de protection des données à caractère personnel, le principe d'échange d'informations entre administrations posé à l'article L.114-8 du CRPA constitue une obligation légale, dans les conditions prévues à l'article L. 114-9 du même code.

La licéité de ces échanges, au sens du règlement général sur la protection des données (RGPD) 202 ( * ) , repose, d'une part, sur les 3° et 5° de l'article 5 de la loi Informatique et Libertés 203 ( * ) et sur les c) et e) de l'article 6 du règlement qui disposent qu'un traitement est licite s'il « est nécessaire au respect d'une obligation légale à laquelle le responsable du traitement est soumis » et s'il est « nécessaire à l'exécution d'une mission d'intérêt public ou relevant de l'exercice de l'autorité publique dont est investi le responsable du traitement ».

Par ailleurs, le dispositif existant est en conformité avec le chapitre III du RGPD relatif aux droits de la personne concernée, dans la mesure où l'article L. 114-8 du CRPA dispose que l'administration « chargée de traiter une demande ou une déclaration mentionnée à l'alinéa précédent fait connaître à la personne concernée les informations ou données qui sont nécessaires à cette fin et celles qu'elle se procure directement auprès d'autres administrations françaises, qui en sont à l'origine ou qui les détiennent en vertu de leur mission ». Le même article précise que « l e public est informé du droit d'accès et de rectification dont dispose chaque personne intéressée sur les informations et données mentionnées au présent article ».

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi fixe les règles concernant « les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques » et détermine les principes fondamentaux « de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources » . L'accélération du partage de données entre administrations au profit des usagers relève donc du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le cadre juridique actuellement en vigueur limite la portée du dispositif. En effet, chacun des domaines, procédures et données concernés par les échanges nécessite le recours à un décret en Conseil d'Etat.

De plus, les textes fondateurs de ces échanges, rédigés au début des années 2010, sont organisés sur la base des dispositifs techniques connus à l'époque et ne tiennent donc pas compte des très grandes avancées technologiques dans le domaine et la généralisation des interfaces de programmations applicatives (API), notamment la plateforme d'échange api.gouv.fr mise en oeuvre par la direction interministérielle du numérique, qui permettent désormais des échanges dans des conditions de fiabilité et de sécurité optimales.

Dans la mesure où ces dispositions modifient la partie législative du CRPA, le recours à la voie législative est donc nécessaire.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure envisagée vise à accélérer les partages de données entre administrations lorsqu'ils permettent de simplifier les démarches des usagers auprès du service public en instaurant une règle générale de partage d'informations entre administrations. A ce titre, elle vient alléger ce dispositif.

Il est rappelé que la mise en oeuvre d'échanges de données entre administrations demeure limitée aux données strictement nécessaires et doit garantir le respect des droits des personnes ainsi que la sécurité de leurs données.

En outre, un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) visé à l'article L. 114-9 du CRPA fixe :

- les conditions de mise en oeuvre des échanges et notamment les critères de sécurité, de traçabilité et de confidentialité nécessaires pour garantir la qualité et la fiabilité des échanges ;

- les informations ou données qui, en raison de leur nature, notamment parce qu'elles touchent au secret médical et au secret de la défense nationale, ne peuvent faire l'objet de ces échanges entre administrations ;

- le délai de conservation des informations et données applicable à chaque système d'échanges.

Par ailleurs, afin de franchir une nouvelle étape dans l'échange des données entre administrations au service de l'action publique et au-delà des démarches initiées par les usagers, le Gouvernement souhaite ajouter de nouvelles finalités d'échange en autorisant les échanges permettant d'informer proactivement l'usager sur ses droits. Cette évolution vise à accélérer l'échange de données entre administrations au profit de l'usager et à lutter contre le phénomène de non recours aux droits. Ce dispositif est circonscrit à un tel usage, à l'exclusion de tout autre, et ne permet pas, notamment, de détecter d'éventuels cas de fraude au moyen de croisement d'informations.

Parallèlement à la généralisation de l'échange de données et afin d'assurer une pleine information sur les données échangées entre administrations, une diffusion publique des interconnexions ainsi mises en place est instaurée. La mesure envisagée vise ainsi à renforcer la transparence de ces partages de données et la traçabilité des échanges, et contribue à l'équilibre du dispositif puisqu'elle permettra d'avoir une vision exhaustive des systèmes d'échanges mis en place.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il pouvait être envisagé de laisser subsister le dispositif actuel de « Dites-le-nous une fois » , qui se déploie effectivement depuis janvier 2019 et qui permet d'augmenter progressivement, par voie réglementaire, la liste des données à partager. Toutefois, cette mise en oeuvre nécessite la prise d'un décret en Conseil d'Etat après avis de la CNIL pour chaque nouvelle ouverture de données, et ne répond donc pas à l'objectif d'accélérer le partage de données entre administrations.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue vise à supprimer la liste jusqu'alors fixée par décret des domaines, procédures et administrations faisant l'objet de ces échanges, afin d'instaurer la règle du partage par défaut des informations entre administrations en cas de demande ou de déclaration de l'usager.

Elle autorise également les échanges qui permettent d'informer pro-activement l'usager sur ses droits. Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis motivé et publié de la CNIL, déterminera les conditions d'application de cette nouvelle finalité, notamment la durée et les modalités de conservation des données collectées à cette occasion. Afin de préserver l'équilibre entre l'échange de données entre administrations et les droits des usagers, la mesure prévoit qu'au plus tard au moment de la première communication individuelle avec chaque personne concernée, celle-ci est avisée de ses droits d'accès et de rectification ainsi que de son droit de s'opposer à la poursuite du traitement et de la faculté de produire elle-même si elle le souhaite les pièces ou informations requises pour l'attribution d'une prestation ou d'un avantage. La personne doit consentir expressément à ce que le traitement soit poursuivi en vue de cette attribution. En cas d'opposition exprimée par la personne de poursuivre le traitement ou si ce traitement révèle que la personne n'a pas droit à la prestation ou à l'avantage, les informations obtenues à la suite de cet échange de données sont détruites sans délai.

Elle vise enfin à renforcer la transparence de ces partages de données en instaurant la diffusion publique des interconnexions ainsi mises en place.

Ainsi, la liste des administrations qui se procureront directement des données auprès d'autres administrations, les données ainsi échangées et le fondement juridique sur lequel ces échanges s'appuient feront l'objet d'une diffusion publique dans les conditions prévues par le CRPA.

Un arrêté du Premier ministre déterminera, pour chaque type d'informations ou de données, la liste des administrations responsables de leur mise à disposition des autres administrations.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Les articles L. 113-12, L. 113-13, L. 114-8 et L.114-9 du CRPA sont modifiés.

4.2. IMPACTS SUR LE PUBLIC

La suppression des pièces justificatives est perçue comme le meilleur levier de simplification pour les usagers. Elle permet d'envisager une relation à l'administration plus sereine et d'augmenter la confiance de l'usager dans ses services publics. Elle permet la réduction des délais d'instruction des dossiers, la sécurisation des pièces justificatives, la réduction de la fraude par la récolte directe d'information auprès de l'administration productrice. Enfin, elle permet au public d'être informé sur ces droits, afin notamment de lutter contre les cas de non-recours.

L'analyse des gains et des charges repose principalement sur une étude macroéconomique des coûts et bénéfices estimés par une transition numérique fondée sur l'échange de données entre administrations. Cette politique a été étudiée notamment par la Commission européenne, dans son rapport « Study on eGovernment and the Reduction of Administrative Burden » , de 2013. Cette étude souligne que la mise en place du principe « dites-le nous une fois » est la politique publique qui apporte le plus de simplification car les impacts sont rapidement importants pour l'ensemble des parties-prenantes. La Commission indique que cette politique permettrait un allègement qui pourrait représenter jusqu'à 25 % de la charge administrative. Selon l'OCDE, la complexité administrative pourrait chaque année coûter jusqu'à 60 milliards d'euros à l'économie française. Une première estimation, ambitieuse, de l'impact pour le public d'un déploiement plus volontaire du « dites-le-nous une fois » pourrait donc être la génération d'environ 15 milliards d'euros d'économie en charge administrative pour le public.

La transparence sur les échanges de données entre administrations sera renforcée. La liste des administrations, qui se procurent directement des données auprès d'autres administrations françaises dans le cadre du présent article et le fondement juridique sur lesquels repose le traitement des procédures mentionnées au premier alinéa, font l'objet d'une diffusion publique dans les conditions prévues par l'article L. 312-1-1 du CRPA. Cette information est importante et contribue à l'équilibre du dispositif, puisqu'elle permettra au public d'avoir une vision exhaustive des systèmes d'échanges mis en place.

Enfin, afin de garantir les droits des usagers et d'éviter des erreurs dans les données échangées ou la propagation de données inexactes ou non actualisées auprès des administrations, un arrêté fixera la liste des administrations communiquant chaque type de donnée aux autres administrations. Cela permettra de renforcer l'équilibre entre l'obligation d'échange de données entre les administrations et les droits des usagers, d'établir des administrations de référence pour la mise à disposition de chaque donnée recherchée par une administration tierce et de s'assurer que les données sont bien collectées directement auprès de l'administration détentrice de la donnée d'origine, fiable et unique, et non auprès de tout autre administration qui en disposerait également.

4.3. IMPACTS SUR LES ADMINISTRATIONS DE L'ÉTAT

La mesure proposée améliorera la fiabilité des données traitées par les administrations dans la mesure où sera organisé, par voie d'arrêté, un système de « données de référence ». Certaines administrations seront désignées comme référentes pour certains types d'informations (ex : la direction générale des finances publiques et le secteur social, pour les revenus, l'INSEE pour l'identité des entreprises...). De plus, la généralisation de ces échanges permettra de fiabiliser le traitement des dossiers, les données étant obtenues à leur source.

Pour les autres aspects, cette mesure aura des impacts limités sur les administrations de l'Etat. En effet, les principaux détenteurs de données fréquemment demandées dans les procédures administratives les mettent déjà à disposition des autres administrations. L'extension à d'autres données ou à d'autres procédures nécessitera toutefois, à la marge, une adaptation des outils informatiques.

Enfin, l'obligation de diffusion en ligne des interconnexions ainsi mises en place ne s'imposera, en application de l'article L. 312-1-1 du CRPA qu'aux personnes morales dont le nombre d'agents ou de salariés est supérieur à un seuil fixé par décret à 50 agents (article D. 312-1-1-1 du même code).

4.4. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

En tant que demandeurs d'informations détenues par d'autres administrations, les collectivités territoriales seraient les principales bénéficiaires du nouveau dispositif, qui facilitera notamment l'instruction des demandes ou déclarations qui leur sont faites lorsqu'elles nécessitent la production par l'usager d'informations déjà détenues par une autre administration (du fait du recours à des API accélérant la mise à disposition des données et documents concernés).

Les collectivités territoriales pourraient ainsi simplifier les demandes ou déclarations qui leur sont faites si celles-ci nécessitent la production par l'usager d'informations déjà détenues par une autre administration.

En tant que fournisseurs d'informations, les collectivités territoriales pourront en revanche se trouver impactées dès lors qu'elles ne figuraient pas à ce stade dans la liste des administrations devant fournir certains types d'informations à d'autres administrations.

Par ailleurs, l'article L. 114-10 du CRPA vient limiter les obligations issues des dispositions des articles L. 114-8 et L. 114-9 du même code sur l'échange de données entre administrations en permettant aux administrations de ne pas mettre en oeuvre cette obligation, quand les échanges prévus aux articles précédents ne sont pas possibles techniquement.

Enfin, l'obligation de diffusion en ligne des interconnexions ainsi mises en place ne s'imposera, en application de l'article L. 312-1-1 du CRPA qu'aux collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants 204 ( * ) et aux personnes morales dont le nombre d'agents ou de salariés est supérieur à un seuil fixé par décret actuellement à 50 agents (article D. 312-1-1-1 du même code).

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la disposition a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes. Elle a également été soumise à la CNIL.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique aux départements et régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution, où le principe d'identité législative prévaut.

Elle sera par ailleurs applicable à Saint-Barthélemy en application de l'article L. 521-1 du CRPA, à Saint-Martin en application de l'article L. 531-1 du CRPA et à Saint-Pierre-et-Miquelon en application de l'article L. 541-1 du CRPA.

En Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, les dispositions législatives et réglementaires relatives aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l'Etat et de ses établissements publics ou avec celles des communes et de leurs établissements publics sont applicables de plein droit (article 6-2 de la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie ; article 7 de la loi n°2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française).

Cette mesure n'est pas applicable au Pays (Polynésie française), à la Nouvelle-Calédonie et à ses provinces dans la mesure où les relations entre ces collectivités et les administrés relèvent de la compétence locale.

Les relations entre la collectivité de Wallis et Futuna et les usagers relèvent de la compétence du législateur organique.

5.2.3. Textes d'application

La mesure nécessitera de modifier le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 114-9 du CRPA, d'adopter un décret pour fixer les modalités de l'échange des données entre administrations en matière d'information proactive des usagers sur leurs droits, et de prendre un arrêté fixant pour chaque type d'informations ou de données, la liste des administrations responsables de leur mise à disposition des autres administrations.

Article 51 : Simplifier les procédures de mise en demeure et de sanction de la Commission nationale de l'informatique et des libertés - CNIL

1. ETAT DES LIEUX

L'entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données (RGPD) a opéré un changement de paradigme dans le droit de la protection des données personnelles en passant d'un système de formalités préalables à une logique de responsabilisation des acteurs - et notamment des collectivités territoriales - sous le contrôle et avec l'accompagnement du régulateur, la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (CNIL).

L'instruction de plaintes est désormais au coeur du système issu de cette nouvelle réglementation. Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles, la CNIL a ainsi enregistré une augmentation des plaintes de 30% par an, soit un total de 14 000 pour l'année 2019.

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La section 3 du chapitre II du titre Ier de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, dite « loi informatique et libertés » (articles 20 à 23) est consacrée aux mesures correctrices pouvant être prononcées par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (« CNIL), afin d'assurer le respect, par les responsables de traitement et les sous-traitants, de leurs obligations.

En vertu de l'article 20 de la loi n° 78-17, la procédure répressive devant la CNIL s'articule entre les pouvoirs du président de la Commission et les pouvoirs de la formation restreinte, organe collégial composée de six membres élus par leurs pairs.

En cas de non-respect des obligations résultant du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 ou de la loi informatique et libertés, le président de la Commission peut saisir directement la formation restreinte afin que cette dernière prononce une ou plusieurs mesures.

Le prononcé de ces mesures par la formation restreinte est soumis à une procédure qui répond aux conditions d'indépendance, d'impartialité et de respect du contradictoire.

Ces mesures peuvent être rendues publiques à l'initiative de la formation restreinte.

1.2. CADRE CONVENTIONNEL

Le règlement (UE) 2016/679 se caractérise par la mise en place d'une approche de responsabilisation des organismes concernés traitant des données à caractère personnel. Ce règlement prévoit de passer d'un système de contrôle ex ante de la CNIL à un système de contrôle ex post . Ce changement de paradigme permet aux autorités de contrôle dont la CNIL, de concentrer davantage leurs actions sur une mission de sensibilisation et d'accompagnement des responsables de traitement et des sous-traitants et de disposer de mesures correctrices plus conséquentes et dissuasives en cas de violation constatée des règles applicables.

L'article 58 du règlement (UE) 2016/679 et l'article 47 de la directive (UE) 2016/680 énoncent les pouvoirs dont les autorités de contrôle doivent disposer et précisent les mesures correctrices qu'elles peuvent prendre. Toutefois, l'article 58 du RGPD dispose que « Chaque Etat membre peut prévoir, par la loi, que son autorité de contrôle dispose de pouvoirs additionnels à ceux visés aux paragraphes 1, 2 et 3 ». Il est donc possible, par voie législative, de doter la CNIL de pouvoirs additionnels à ceux prévus par le RGPD.

Enfin, l'article 83 du règlement définit les conditions générales selon lesquelles ces autorités peuvent imposer des amendes administratives. Celles-ci peuvent s'élever jusqu'à un montant maximal de 10 millions d'euros ou, dans le cas d'une entreprise, jusqu'à 2 % du chiffre d'affaires annuel mondial total de l'exercice précédent pour les manquements les moins graves, et de 20 millions d'euros ou 4 % du chiffre d'affaires pour les manquements les plus graves.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Deux ans après l'application du règlement (UE) 2016/679, et face à l'augmentation significative du nombre de plaintes (30% par an), la procédure de sanction prévue dans la loi informatique et libertés n'apparaît plus adaptée dès lors qu'elle ne permet à la CNIL que d'adopter environ 50 mises en demeure et une dizaine de décisions de formation restreinte par an.

Ainsi, pour l'année 2019, alors que la CNIL a reçu 14 000 plaintes, elle a prononcé 8 sanctions, dont 7 amendes administratives d'un montant total de 51 370 000 euros et 5 injonctions sous astreinte.

Il est donc devenu nécessaire de fluidifier et de simplifier le déroulé des procédures de sanction devant la CNIL, de doter le président de la CNIL et le président de la formation restreinte de nouveaux pouvoirs, et d'améliorer les modalités permettant le prononcé de mesures correctrices.

Or, les mesures pouvant être prononcées par la formation restreinte de la CNIL, ainsi que les aspects principaux de la procédure suivie en la matière relèvent du domaine de la loi. La mise en place d'une procédure simplifiée de sanction et l'attribution de nouveaux pouvoirs au président du la CNIL et au président de la formation restreinte doivent par conséquent faire l'objet d'une intervention législative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Actuellement, les procédures de sanction ne permettent pas de distinguer les dossiers selon leur « importance » et leur gravité hormis les cas d'urgence. Les dossiers à plus faibles enjeux ou moins complexes se retrouvent dans le même circuit procédural que des dossiers visant des acteurs numériques structurants ou présentant un nombre très important de manquements à la loi informatique et libertés. Cela présente comme inconvénient majeur que le traitement des dossiers plus simples (par exemple comprenant peu de manquements) entraîne un « coût procédural » (délais impartis, ressources humaines, etc.) qui peut sembler inadapté à l'enjeu du dossier et qui nuit tant à l'efficacité de l'action administrative qu'aux intérêts des organismes mis en cause.

Les modifications envisagées visent à remédier à cette rigidité et à cette lourdeur procédurale.

Tout d'abord, il s'agit d'ajouter, au nombre des mesures correctrices pouvant être prises par le président de la CNIL, le rappel aux obligations légales. Cette mesure ne présente pas un caractère répressif et peut donc être prise par le président de la commission.

L'objectif est ici de permettre au président de la CNIL, pour des manquements avérés mais mineurs, d'adopter formellement une mesure correctrice, sans avoir à enclencher la procédure de sanction devant la formation restreinte qui est beaucoup plus lourde.

En outre, afin de pouvoir augmenter le nombre de mises en demeure prises par le président de la CNIL, il est proposé d'alléger leur mécanisme d'instruction. Le président conserverait au cas par cas la possibilité de demander à l'organisme mis en cause de justifier de sa mise en conformité. Ce n'est que dans cette hypothèse, et non pour toutes les mises en demeure, que le président devrait prendre une décision de clôture de la mise en demeure.

Le présent projet de texte vise par ailleurs à créer une procédure « simplifiée », applicable à certains dossiers uniquement, permettant d'augmenter la capacité et l'efficacité de la CNIL dans le prononcé de sanction. Cette procédure simplifiée consiste à permettre le prononcé de sanctions, et singulièrement d'amendes administratives, par un « juge unique », sans la collégialité de la formation restreinte, après une procédure contradictoire accélérée par rapport aux délais d'instruction actuels et sans obligation de tenue d'une audience ou de présentation d'observations orales.

Enfin, il s'agit de doter le président de la formation restreinte de nouvelles prérogatives lui permettant de prendre des décisions de faible portée ne nécessitant pas l'intervention de la formation restreinte réunie.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ÉCARTÉES

S'agissant du I du présent article , a notamment été exclue l'option selon laquelle la mesure de rappel aux obligations légales prononcées par le président de la CNIL puisse être rendue publique. Cette exclusion est liée à la volonté de distinguer clairement cette mesure de police de la mesure de sanction ouverte à la formation restreinte de la CNIL, intitulée « rappel à l'ordre ».

S'agissant du III du présent article , plusieurs options ont également été envisagées puis écartées.

- A tout d'abord été écartée l'option consistant à ne focaliser l'action répressive de la CNIL que sur les seuls dossiers revêtant une importance particulière et de ne sanctionner que les acteurs les plus puissants sur le marché du numérique à travers quelques décisions emblématiques par an. En effet, la CNIL a vocation à défendre toute personne concernée, notamment les milliers de plaignants qui la saisissent chaque année. Elle doit ainsi s'assurer du respect des dispositions du règlement 2016/679 et de la loi informatique et libertés, et donc sanctionner cette absence de respect, pour tout type de responsable de traitement, de sous-traitant conformément aux missions et aux prérogatives qui lui sont conférées.

- D'autres procédures utilisées en matière de sanctions administratives et pénales, comme par exemple la transaction administrative (article L. 423-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration : contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître) ou la composition pénale (articles 41-2 et 41-3 du code de procédure pénale et articles R 15-33-38 à 60 du code de procédure pénale : permet au procureur de la République de proposer une sanction à l'auteur des faits qui reconnaît sa culpabilité pour éviter un procès) ont également été exclues. Ces procédures ont en commun de permettre aux autorités administratives ou judiciaires de poursuite de proposer à l'auteur des manquements ou infractions, dès lors qu'il accepte sa culpabilité ou responsabilité, une sanction inférieure à celle qu'il encourt en cas de jugement. La création de telle procédure modifierait substantiellement les modalités de fonctionnement internes de la CNIL et poserait des difficultés importantes en termes de coopération avec les homologues européens.

- Le choix de l'activation de la procédure simplifiée par le rapporteur de l'affaire, a également été écartée au profit du maintien de la saisine par le président de la CNIL du président de la formation restreinte. En effet, le président de la commission est l'autorité de poursuite des manquements aux règles relatives à la protection des données et c'est donc cet organe décisionnaire qui peut décider, à l'instar du ministère public pour la procédure simplifiée en matière pénale et au vu de la nature du dossier, de saisir le président de la formation restreinte de la CNIL.

- Il a été exclu que le président de la formation restreinte puisse, dans le cadre de cette procédure simplifiée, adopter toutes les mesures correctrices relevant de la compétence de cette formation et qui sont énoncés au III de l'article 20. Sont ainsi exclues, par exemple, la limitation et l'interdiction d'un traitement, ou encore la suspension d'un transfert hors de l'Union européenne. Seuls le rappel à l'ordre, c'est-à-dire la constatation solennelle d'un manquement aux dispositions relatives à la protection des données, l'amende administrative et l'injonction de mettre en oeuvre des mesures de mise en conformité avec les obligations, qui peut être assortie d'une astreinte par jour de retard dans la mise en oeuvre de ces mesures, peuvent être décidés dans le cadre de cette procédure. Ces mesures, plafonnées dans leurs montants, sont les plus appropriées pour des dossiers ne présentant pas un niveau de gravité et de difficulté élevé.

- Il a enfin été exclu que le président statuant seul puisse rendre publiques ces mesures correctrices. Dans la mesure où les dossiers en cause portent sur des faits de faible gravité et sur des questions juridiques bien établie, ils ne se prêtent pas à une mesure publique.

3.2. DISPOSITIF RETENU

En premier lieu, il est prévu d'insérer au II de l'article 20 de la loi informatique et libertés la possibilité pour le président de la Commission de rappeler à ses obligations légales un organisme ne respectant pas le cadre juridique en matière de protection des données personnelles. Le président de la CNIL pourra ainsi rappeler au responsable de traitement ou au sous-traitant les obligations légales qu'ils ont méconnues et qui s'imposent à eux.

Contrairement au I de l'article 20 qui prévoit la possibilité pour le président de la CNIL d'avertir un responsable de traitement, cette mesure pourra être déployée en cas de violation avérée.

En deuxième lieu, il est proposé de clarifier et d'alléger la procédure de clôture des mises en demeure. Il s'agit de préciser, dans le II de l'article 20 de la loi informatique et libertés que le président de la Commission peut, dans le cadre d'une décision de mise en demeure, demander au responsable de traitement ou au sous-traitant de justifier de la mise en conformité, sans que cette demande soit pour autant systématique. Il s'agit en outre d'expliciter le fait que c'est uniquement en cas d'une telle demande que le président de la Commission doit clôturer la mise en demeure si la mise en conformité est constatée.

En troisième lieu, le présent projet de loi prévoit de compléter l'article 20 de la loi informatique et libertés par un nouveau IV portant sur les décisions qui pourront être prises par le président de la formation restreinte. Le président de la formation restreinte pourra ainsi prononcer un non-lieu dans le cas d'une mise en conformité ou d'une transmission de documents à la suite d'injonctions antérieures ou au contraire prononcer des injonctions de produire des éléments et d'assortir cette injonction d'une astreinte (ne pouvant excéder 100 euros par jour de retard).

Enfin, il s'agit de créer un nouvel article 22-1 dans la loi informatique et libertés aux termes duquel le président de la CNIL pourra saisir le président de la formation restreinte afin qu'il examine seul - lui-même ou un autre membre de la formation restreinte qu'il aurait désigné - et selon une procédure simplifiée, un dossier en vue du prononcé de certaines mesures correctrices. Il est proposé que seules les affaires répondant à certains critères seraient éligibles à une telle procédure, à savoir les dossiers qui, d'une part, se caractérisent par un faible niveau de gravité, ce qui se matérialise par des quantums de peine maximale limités, et, d'autre part, ne présentent pas de difficultés particulières, notamment eu égard aux décisions précédemment rendues par la formation restreinte ou à la simplicité des questions de fait ou de droit qu'ils soulèvent.

S'agissant des mesures pouvant être prononcées dans le cadre de cette procédure simplifiée, elles seraient limitées au rappel solennel aux obligations, à l'amende administrative (dont le montant des sanctions serait plafonné à 20 000 euros), aux injonctions de mise en conformité assorties d'une astreinte (dont le montant ne pourrait excéder 100 euros par jour de retard). Ces montants, représentent 0,1% des montants nominaux maximaux prévus par le règlement 2016/679 et la loi informatique et libertés (respectivement 20 millions d'euros pour les amendes et 100 000 euros pour les astreintes). Sont donc exclues les autres mesures correctrices relevant de la compétence de la formation restreinte (exemple : la limitation temporaire ou définitive du traitement, le retrait d'une certification...), ainsi que les violations justifiant la mobilisation de la procédure d'urgence, qui reste inchangée.

S'agissant du déroulé de la procédure simplifiée, il est notamment prévu que la présentation d'observations orales devant le président de la formation restreinte ou le membre désigné par lui ne soit pas systématiquement prévue, mais que la possibilité d'être entendu soit toujours proposée à l'organisme mis en cause, conformément au droit commun en matière de sanctions administratives. Il est par ailleurs proposé que les dossiers soient portés directement par les agents de la Commission, placés sous l'autorité du Président de la CNIL, et non pas par un commissaire désigné par ce dernier au sein du collège plénier (hors membres de la formation restreinte).

Au titre des garanties applicables à une telle procédure, il est proposé que les sanctions prononcées ne puissent être rendues publiques, contrairement à ce que prévoit le cadre actuel pour les sanctions pouvant être prononcées par la formation restreinte au 2 ème alinéa de l'article 22 de la loi informatique et libertés.

Le président de la formation disposera en tout état de cause de la capacité de renvoyer le dossier, par exemple s'il estime que les critères d'engagement de la procédure simplifiée ne sont pas satisfaits, vers la procédure standard prévue à l'article 22 de la loi informatique et libertés.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le présent article modifie l'article 20 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ajoute un nouvel article 20-1 consacré aux mesures pouvant être prises par le président de la formation restreinte de la CNIL, ainsi qu'un nouvel article 22-1 consacré à la procédure simplifiée.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Ces nouvelles mesures s'inscrivent conformément aux pouvoirs qui sont conférés par l'article 58.2 du règlement 2016/679 du 27 avril 2016 aux autorités de contrôle et à la possibilité de prononcer des mesures correctrices.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Seules les dispositions relatives à la possibilité d'imposer des amendes ou des astreintes dans le cadre de procédure simplifiée sont susceptibles d'avoir un impact économique et financier sur les acteurs économiques. Par conséquent, cet impact concerne à titre principal les entreprises, dans la mesure où la CNIL ne peut légalement imposer de sanctions financières s'agissant des traitements mis en oeuvre par l'Etat. Toutes les catégories d'entreprises sont susceptibles d'être concernées par les amendes et astreintes prévues dans le cadre de la procédure simplifiée, dans la mesure où seules la gravité des manquements et la complexité des dossiers, et non, par exemple, la taille de l'entreprise ou son chiffre d'affaires, conditionnent le recours à cette procédure.

Il est difficile d'estimer précisément le nombre de dossiers pouvant faire l'objet de telles sanctions financières. En effet, les dossiers qui remplissent actuellement ces critères ne font pas l'objet aujourd'hui, dans leur grande majorité et sauf exception, de poursuites par la CNIL, du fait précisément de la lourdeur de la procédure classique. Toutefois, et sans qu'il s'agisse d'un indicateur, on peut raisonnablement estimer à date, compte tenu du nombre annuel de plaintes reçues (14 000 en 2019) et de contrôles diligentés (300), de la nature des manquements constatés et des capacités de sanction de la CNIL, que 100 sanctions financières annuelles relevant de cette procédure simplifiée constituent un maximum. Ainsi, ces dispositions permettront une augmentation substantielle de ces sanctions. Dans la mesure où elles se caractérisent par de faibles montants (20 000 euros au maximum pour l'amende, 100 euros par jour de retard pour l'astreinte), l'impact financier sur les acteurs économiques peut néanmoins être qualifié de minime.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les collectivités territoriales sont susceptibles, en tant que responsables de nombreux traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre de leurs compétences, d'être concernées par l'ensemble de ces dispositions.

Le rappel aux obligations légales prononcé par le Président de la CNIL est une mesure dénuée de coloration répressive et n'est d'ailleurs pas rendue publique. Cette mesure s'avère particulièrement adaptée aux cas de constatation avérée d'un manquement minime et ne traduisant pas de défaut global de mise en conformité. La mise en demeure, facilitée par les présentes dispositions législatives, constitue un autre alternatif aux sanctions à disposition du président de la CNIL, lorsque les manquements constatés traduisent un problème plus important de mise en conformité. Le recours à ces deux outils est particulièrement adapté aux associations et personnes morales de droit public, à l'égard desquelles la CNIL ne recourt que très rarement aux sanctions financières.

La procédure simplifiée peut également concerner les collectivités territoriales, s'agissant en particulier des injonctions de mise en conformité.

Dans l'ensemble, l'impact est l'élévation du niveau de conformité globale des collectivités territoriales à l'égard de leurs obligations en matière de protection des données.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Ces dispositions, en allégeant les procédures pour les affaires les « plus simples » ou les « moins graves » devraient permettre à la CNIL de prononcer davantage de mises en demeure et de mesures correctrices, en cohérence avec le volume de plaintes enregistrées.

Elles permettent en effet de ne pas solliciter inutilement les membres de la formation restreinte, ainsi que les autres membres de la CNIL qui peuvent être désignés rapporteurs devant cette formation, et de réserver leur mobilisation aux affaires plus graves ou complexes qui le justifient. Du point de vue des services de la CNIL, ces dispositions allègent également les charges logistiques liées aux réunions de la formation restreinte et diminuent en outre les délais d'instruction des dossiers de sanction.

En revanche, cette simplification n'aura pas pour objet d'alléger la charge de travail des services de la CNIL, mais au contraire d'augmenter, par le nombre de dossiers traités, l'activité répressive de la CNIL et de permettre de mieux adapter l'allocation des ressources en fonction de l'importance des dossiers de sanction. Cette augmentation est nécessaire aux fins du traitement effectif et approprié des plaintes reçues par la CNIL, en très forte croissance depuis trois ans. Elle est cohérente avec les demandes de moyens supplémentaires qu'a formulées la CNIL et qui ont déjà conduit le gouvernement à lui accorder des emplois supplémentaires.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

L'impact des modifications proposées sur les personnes concernées est important car elles vont permettre d'assurer une plus grande effectivité dans le traitement des dossiers en lien avec l'exercice de leurs droits. Elles permettront dès lors d'assurer une meilleure conformité des acteurs du traitement de données personnelles à leurs obligations et une protection accrue des personnes à l'égard du traitement dont elles font l'objet.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article 8 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les dispositions envisagées ont été soumises à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes (CNEN).

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Le I du présent article entrera en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel .

Les II et III du présent article nécessitent l'adoption de mesures réglementaires d'application et leur entrée en vigueur sera donc reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures d'application.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article sera applicable sur l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

Ces dispositions nécessiteront une modification du décret n° 2019-536 du 29 mai 2019 pris en application de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Plus précisément, s'agissant de la mise en oeuvre des nouvelles prérogatives confiées au président de la formation restreinte , ces dispositions nécessitent l'adoption de mesures concernant en particulier la notification aux personnes concernées des décisions adoptées.

De même, une procédure contradictoire spécifique, enserrée dans des délais resserrés au vu de l'absence de complexité de l'affaire, devra également être prévue pour la décision d'assortir une injonction d'une astreinte, qui constitue une sanction.

Enfin, ces nouvelles prérogatives nécessiteront, tout comme celles sur les autres procédures de prononcé de sanction, la prévision de règles relatives au greffe des formations de jugement concernées, qui pourrait être confiée au secrétaire général de la CNIL, dans des conditions similaires à celles prévues pour le greffe des juridictions administratives. De même, les dispositions relatives à la procédure de liquidation des astreintes devront faire l'objet d'aménagements.

S'agissant ensuite de la procédure simplifiée prévue au III du présent article , le décret n° 2019-536 du 29 mai 2019 pris en application de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés devra être modifié pour prévoir notamment les modalités de désignation des agents rapporteurs de chaque dossier, les délais dans lesquels les mis en cause pourront produire des observations en réponse au rapport d'instruction (15 jours), le délai de notification de la tenue d'une audience en cas de demande du mis en cause (idem), ou le déroulé de la séance dans ce cas de figure.

En outre, il semble nécessaire de prévoir des garanties de prévention de tout conflit d'intérêts pour les agents rapporteurs, similaires à celles applicables aux membres du collège de la CNIL, les modalités de renvoi de l'affaire à la formation restreinte sur décision du président de celle-ci ainsi que les modalités de désignation d'un autre membre de la formation restreinte pour statuer seul sur l'affaire.

Article 52 : Accélérer la mise en place des Bases Adresses Locales utiles pour le déploiement du très haut débit

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La dénomination des voies relève aujourd'hui de la compétence générale du conseil municipal (inscrite à l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales - CGCT), comme le confirme régulièrement la jurisprudence administrative, mais n'est pas expressément citée par la loi dans les attributions du conseil. Le numérotage des immeubles relève quant à lui du pouvoir de police générale du maire ; celui-ci peut agir en la matière en vertu du pouvoir qu'il tient de l'article L. 2213-28 du CGCT. L'Etat, les collectivités territoriales, mais également les services d'incendie et de secours (SDIS), les services du cadastre, les services de livraison et bien évidemment La Poste sont directement concernés par ce travail.

Actuellement, la dénomination des rues et le numérotage des immeubles sont indirectement obligatoires pour les communes de plus de 2 000 habitants en application du décret n° 94-1112 du 19 décembre 1994 relatif à la communication au centre des impôts fonciers ou au bureau du cadastre de la liste alphabétique des voies de la commune et du numérotage des immeubles. Les maires de ces communes doivent en effet notifier aux services fiscaux « la liste alphabétique des voies publiques et privées » et « le numérotage des immeubles » (les modifications concernant ces données doivent être notifiées dans le délai d'un mois). Cette obligation d'adressage concerne environ 5 500 communes en France métropolitaine, soit 15 % des communes, représentant environ 51,5 millions d'habitants, soit 77 % de la population 205 ( * ) .

En plus de ces informations communiquées par les communes à la direction générale des finances publiques (DGFiP), il existe une base publique de référence des données voies-adresses :

- La base adresse nationale (BAN), coproduite par la direction interministérielle du numérique (DINUM) avec l'aide de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) diffusée sur data.gouv.fr , est une composante du service public des données de référence qui a été institué à l'article L. 321-4 du code des relations entre le public et l'administration par la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique ; la BAN figure en effet dans la liste des données relevant de ce service public, prévue par l'article R. 321-5 du même code ;

- Cette base est alimentée par les Bases Adresses Locales (BAL), publiées actuellement à l'initiative et sous la responsabilité des communes volontaires, sur le portail data.gouv.fr. Si une commune n'est pas couverte par une BAL, la liste des adresses présentes dans la BAN est générée par un assemblage des meilleures sources disponibles (DGFIP, La Poste, Arcep, IGN, Guichet adresse ...).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ». La clarification de la compétence du conseil municipal dans la dénomination des voies relève donc du domaine de la loi.

Quant à l'accès aux documents administratifs et l'ouverture des données publiques à destination des citoyens, auxquels les « bases adresses locales » participent, ils relèvent de l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ».

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Aujourd'hui, si la dénomination des voies et l'adressage sont bien une compétence des communes, reconnue au travers de l'article L. 2213-28 du CGCT (numérotation) et du décret n° 94-1112 (publicité foncière), ces dispositions sont vagues et n'affirment pas clairement la commune comme seule source compétente des adresses de son territoire. L'utilisation de données non certifiées par les communes, notamment dans le cadre du travail de l'IGN pour la réalisation de la BAN, produit des informations parfois dégradées (se retrouvant par exemple dans les GPS) alors qu'elles sont utilisées par les administrés, les services de secours (SDIS), les entreprises et la justice, tout en laissant la commune responsable de ces erreurs. En outre, le décret n° 94-1112 ne génère d'obligation d'adressage que pour les communes de plus de 2 000 habitants. Il en résulte un adressage défaillant dans de nombreuses communes, notamment rurales. Il apparaît donc nécessaire de légiférer afin d'inscrire dans le code général des collectivités territoriales l'obligation pour toutes les communes de procéder à la dénomination de leurs voies et à la numérotation des immeubles.

Différentes dispositions obligent actuellement les communes concernées à réitérer dans plusieurs dispositifs, pilotés par différents acteurs (DGFIP, services départementaux d'incendie et de secours, La poste, opérateurs de réseaux...), le même contrôle des données voies-adresses, sans concertation d'ensemble, au détriment de l'efficacité globale. Il apparaît donc nécessaire d'envisager un canal direct de transmission de ces informations par les communes, à travers la généralisation des bases adresses locales.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure envisagée vise à accélérer la mise en place des BAL utiles pour le déploiement du très haut débit.

L'objectif de la disposition est de conforter et sécuriser la commune comme seule source d'information officielle sur la dénomination des voies et l'adressage de son territoire, ainsi que de rationaliser son travail au travers d'une remontée officielle et opposable à des tiers. Aucun acteur tiers ne doit pouvoir venir se substituer à la commune et lui imposer des adresses (conservation exacte des libellés, des noms de lieux-dits, du patrimoine linguistique local...).

L'exercice de cette compétence passera par la constitution et le maintien à jour par chaque commune d'une BAL, qui sera intégrée à la BAN. Cette action bénéficiera en premier lieu aux communes elles-mêmes, en facilitant l'accès à divers services (fibre optique, livraisons, secours...). Elle contribuera également à la constitution d'une BAN « gratuite et unifiée », conformément aux orientations données par le Premier ministre le 4 mars 2019, en réponse au Premier président de la Cour des comptes.

Cette mesure, basée sur une proposition portée par l'Association des Ingénieurs Territoriaux de France (AITF), l'Association Finances Gestion Évaluation des collectivités territoriales (Afigese) et France Urbaine, est en partie fondée par la recommandation n° 22 (p. 40) du rapport de la députée Valéria FAURE-MUNTIAN sur les données géographiques souveraines, à savoir : « Étudier, en concertation avec les associations représentatives des communes, l'opportunité de systématiser l'obligation de réaliser des plans d'adressage et de rendre l'adresse opposable ». C'est un premier pas vers l'ambition de faire de la mise en place d'une BAL par une commune une action libératoire de toutes autres formalités de remontées d'adresses vers les administrations : le « dites-le nous une fois » de l'adresse.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il pouvait être envisagé de prévoir la généralisation des BAL, en donnant à la commune le rôle de « garantir l'accès aux informations en matière de dénomination des voies et de numérotation des maisons dans les conditions prévues par un décret », sans clarifier dans la loi la compétence de dénomination des voies qui appartient au conseil municipal, puisque la jurisprudence administrative a déjà consacré cette compétence. Cette option n'a pas été retenue.

En effet, l'option retenue vise à ancrer législativement cette compétence, afin de sécuriser les décisions prises en la matière par les conseils municipaux. Cette clarification juridique relative à l'origine du nom des voies est d'autant plus utile que l'objectif poursuivi par la présente mesure est de permettre la diffusion en accès public de l'ensemble de ces données par les communes.

Par ailleurs, le numérotage des immeubles est laissé sous l'autorité du maire en vertu de l'article L. 2213-28 du CGCT, afin que celui-ci continue de pouvoir exercer son pouvoir de police administrative lui permettant notamment d'assurer une numérotation cohérente et une identification claire des accès donnant sur la voie.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue consiste d'abord à créer une base légale plus explicite pour la compétence du conseil municipal en matière de dénomination des voies. Cette disposition doit ainsi être placée dans la section du CGCT consacrée aux attributions du conseil municipal (section 5 du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie du code). Il est ainsi proposé d'ajouter un II à l'article L. 2121-30 du CGCT, en transformant en I sa disposition préexistante concernant la compétence du conseil municipal relative à la création et l'implantation des écoles et classes élémentaires et maternelles d'enseignement public.

Cette disposition est complétée par une phrase attribuant aux communes le rôle de garantir l'accès aux informations relatives à la dénomination des voies, dont elles ont décidé par délibération, et au numérotage des immeubles. Ces éléments matériels constituent le support des BAL dont la présente mesure vise à la généralisation.

Il est enfin proposé que les conditions d'accès aux informations concernant les voies et adresses soient prévues par un décret.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 2121-30 du CGCT est modifié par la présente mesure.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Le développement d'une base adresse complète permet d'identifier un site sur un système de localisation GPS à partir de son adresse. Elle est ainsi une condition du développement efficace de nombreux services (livraisons, développement touristique...). Elle facilite également le raccordement aux réseaux de fibre optique, permettant ainsi plus facilement le déploiement du très haut débit sur l'ensemble du territoire, ainsi qu'aux autres réseaux (électricité, gaz...). Le renforcement de la qualité de l'adressage contribue ainsi l'attractivité des territoires, notamment dans les zones rurales, où elle est aujourd'hui souvent insuffisante.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

A court terme, les communes devront mettre en place et mettre à jour des BAL 206 ( * ) . Elles peuvent s'appuyer pour cela sur des guides et outils gratuits, simples et efficaces, disponibles sur https://adresse.data.gouv.fr/ 207 ( * ) . Pour les communes de plus de 2 000 habitants 208 ( * ) , la dénomination des rues et le numérotage des immeubles sont déjà indirectement obligatoires en application du décret n° 94-1112 du 19 décembre 1994 relatif à la communication au centre des impôts fonciers ou au bureau du cadastre de la liste alphabétique des voies de la commune et du numérotage des immeubles. Pour ces communes, il conviendra donc de mettre dans le format standard (format « BAL ») les données voie - adresse qu'elles détiennent déjà. Pour les autres communes de moins de 2 000 habitants 209 ( * ) , cette obligation de dénomination des rues et de numérotage des immeubles constituera une charge nouvelle.

A moyen terme, le gain pour les communes est substantiel, en leur permettant de reprendre le contrôle de leur adressage et en évitant les multiples saisies administratives. Par ailleurs, des données adresses correctes permettent aux communes de conserver des données foncières fiables.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Un adressage à jour remonté à l'ensemble des acteurs est une garantie d'accès à tous les services à domicile et en particulier une meilleure efficacité des secours.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République où s'applique le principe d'identité législative.

Elle s'appliquera également aux communes de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon en application de l'article L. 2571-1 du CGCT, et aux collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy en application des articles L.O. 6351-11 et L.O. 6251-11 du CGCT.

Enfin, par le biais de l'ordonnance permettant au gouvernement d'adapter les dispositions du projet de loi à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française, cette mesure pourra être rendue applicable aux communes de la Polynésie française par modification de l'article L. 2573-5 du CGCT et aux communes de la Nouvelle-Calédonie par modification du code des communes de la Nouvelle-Calédonie.

5.2.3. Textes d'application

La mesure nécessitera la publication d'un décret d'application se substituant au décret n° 94-1112. Ce nouveau décret viendra préciser la mise en oeuvre concrète de la transmission des informations par les communes, en particulier concernant la remontée numérique en open data des données adresse au format standard en usage (format « BAL »). Cette remontée alimentera la BAN (point d'accès national), bénéficiant ainsi de données certifiées, afin de remplacer la plupart des remontées actuelles et d'alimenter tous les réutilisateurs.

CHAPITRE II - SIMPLIFICATION DU FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS LOCALES

Article 53 : Simplifier la répartition des tâches entre l'assemblée délibérante et l'exécutif local en déléguant à ce dernier les décisions d'admission en non-valeur de faibles montants

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'une des missions principales des administrations financières est le recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, produits locaux et autres. L'essentiel de ce recouvrement se fait par paiement spontané du redevable, qu'il soit particulier ou professionnel, le cas échéant après relance amiable.

Le recouvrement forcé concerne les sommes résiduelles qui ne rentrent pas spontanément et qui nécessitent des actes de poursuite de l'administration. Si la part des « restes à recouvrer » après la phase de paiement spontanée est marginale en proportion, le cumul du stock de restes à recouvrer représente un nombre élevé de créances.

Pour le secteur public local, on décompte à la date du 24 juin 2020, 24 millions de créances restant à recouvrer antérieures à 2016 , représentant un volume total de 5 Md€ en principal et 14 M€ de frais associés. Ces créances sont déjà admises en non-valeur pour 2,1 Md€, soit 41 % du volume total. L'enjeu financier des créances susceptibles de passer en non-valeur peut ainsi s'établir, en situation nette, à 2,9 Md€ .

Plus de 16,6 millions de dossiers de restes à recouvrer (soit 68 % du total) correspondent à des créances inférieures à 50 € , lesquelles ne représentent que 6 % du volume en montant. Il s'agit, compte tenu des frais de gestion associés et de leur faible enjeu, des candidats les plus naturels à des décisions d'ANV. Les restes à recouvrer supérieurs à 5 000 € représentent en revanche 53 % des enjeux financiers, mais 0,4 % du nombre de dossiers.

Détail des restes à recouvrer antérieurs à 2016

Strate

RAR principal

Dont RAR admis en non-valeur

Dont RAR non admis en non-valeur

Frais

Nombre de dossiers

Inf. 50 €

291 146 422,45

197 898 309,20

93 248 113,21

2 769 947,90

16 643 551

50-100 €

237 303 377,74

138 301 052,37

99 002 325,38

1 562 318,73

3 392 925

100-200 €

294 485 232,69

171 314 239,93

123 170 992,76

1 144 739,87

2 100 865

200-500 €

384 782 774,70

226 381 335,18

158 401 439,52

1 069 877,47

1 265 505

500-1 000 €

294 437 716,01

167 094 840,92

127 342 875,09

817 623,05

421 778

1 000-5 000 €

858 220 412,84

433 365 374,25

424 855 038,59

2 331 744,81

424 680

Sup. 5 000 €

2 701 588 336,25

763 904 533,90

1 937 683 802,35

4 891 241,10

96 085

Total

5 061 964 272,68

2 098 259 685,75

2 963 704 586,90

14 587 492,93

24 345 389

Source : DGFiP. Données en euros

Afin de proportionner aux enjeux (nombre et montant des créances à recouvrer) les moyens qui lui sont consacrés (suivi comptable des créances à recouvrer, gestion et coût humain et financier des actes de poursuite), l'administration adopte de façon pragmatique, et dans la limite des contraintes liées à la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables, une approche sélective priorisant notamment les créances à risque ou les débiteurs de mauvaise foi et à enjeux. Elle évite également des poursuites trop lourdes et coûteuses sur des créances d'un montant trop faible ou dont les perspectives de recouvrement sont ténues.

C'est ainsi que sont régulièrement admises en non-valeur des créances, généralement anciennes, dont les perspectives de recouvrement sont quasi-nulles, de sorte à apurer les stocks et à concentrer l'action des comptables sur les véritables enjeux (les créances à plus fort montant et dont le recouvrement n'est pas encore définitivement compromis). L'admission en non-valeur a pour effet de retrancher les créances des prises en charge du comptable (C. comptes, 26 mai 1976, Cne de Maisons-Alfort, Rec. C. Comptes 34). Elle est un mode d'apurement administratif dont l'objet est de retirer des écritures prises en charge des créances réputées irrécouvrables du fait de causes indépendantes de la gestion et des diligences du comptable (C. comptes, 12 juill. 2013, Université de Corse, no 67387).

Cette mesure administrative d'apurement d'ordre budgétaire et comptable a ainsi vocation à constater l'irrécouvrabilité d'une créance malgré les diligences de l'administration.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le 2 e alinéa de l'article 47-2 de la Constitution dispose que : « Les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères. Ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière. »

Par ailleurs, le 3 e alinéa de l'article 72 de la Constitution dispose que : « Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences. »

C'est en vue de poursuivre l'objectif à valeur constitutionnelle exprimé au 2 e alinéa de l'article 47-2 qu'il est envisagé la présente disposition législative, intervenant en matière d'administration des collectivités territoriales en application du 3 e alinéa de l'article 72.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

En matière de créances locales, l'admission en non-valeur (ANV) requiert l'accord du détenteur de la créance. Cette procédure d'admission en non-valeur aboutit à constater, pour les collectivités concernées, une dépense de la section de fonctionnement, avec en contrepoint son nécessaire « financement » budgétaire (application du principe de l'équilibre réel des budgets des collectivités locales).

Cette procédure, qui représente un coût budgétaire, concourt par là même à la réalisation du principe de sincérité des comptes publics, consacré par l'article 47-2 de la Constitution.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Suivant la proposition n° 260 du rapport « Doligé » de 2011 210 ( * ) , il est proposé un allégement de la procédure, consistant à donner aux assemblées délibérantes la possibilité de déléguer à l'exécutif, sous plafond de montant, la décision d'admission en non-valeur des créances irrécouvrables.

Cette mesure a ainsi pour objet d'ajouter aux choix de délégation déjà ouverts à chaque assemblée délibérante, disposant du pouvoir budgétaire, la faculté juridique de déléguer à l'ordonnateur l'admission en non-valeur des créances irrécouvrables les plus modestes que lui présente le comptable public. Il peut s'agir, par exemple, de créances frappées d'extinction par l'effet d'une procédure de rétablissement personnel à l'issue d'une procédure de surendettement.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une première option serait de ne pas modifier l'état du droit. Elle n'a pas été retenue.

L'autre option est de reprendre les conclusions du rapport Doligé précité. Elle a été privilégiée.

3.2. OPTION RETENUE

La présente mesure a pour objet d'ajouter aux choix de délégation déjà ouverts à chaque assemblée délibérante, disposant du pouvoir budgétaire, la faculté juridique de déléguer à l'ordonnateur l'admission en non-valeur des créances irrécouvrables les plus modestes que lui présente le comptable public. Il peut s'agir, par exemple, de créances frappées d'extinction par l'effet d'une procédure de rétablissement personnel, mais aussi d'autres créances de faible enjeu, pour lesquelles les diligences du comptable se sont révélées infructueuses.

Il convient de rappeler que l'ordonnateur prépare d'ores et déjà les décisions des assemblées délibérantes en ce domaine (instruction préalable des dossiers correspondants par ses services). Dans le dispositif cible, ce dernier prendrait directement la décision concernant les non-valeurs tout en rendant compte ensuite à l'assemblée délibérante (allègement de charge de chacun de ces organes).

Cette délégation facultative serait limitée aux créances de faible montant dont le seuil serait fixé par décret. Chaque assemblée délibérante conserverait le pouvoir de déléguer cette compétence en retenant un montant maximum inférieur à ce plafond national. Elle pourrait également ne déléguer à l'ordonnateur cette compétence que pour certaines catégories de créances, si elle l'estimait opportun.

En outre, l'ordonnateur doit rendre compte à l'assemblée délibérante des décisions prises sur le fondement de la délégation qui lui a été consentie. En plus de l'obligation générale de compte rendu prévue aux articles L. 2122-23, L. 3211-2 et L. 4221-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la délégation visée par le présent article serait encadrée par des dispositions plus précises figurant au décret de fixation des seuils. Ainsi, pour éviter tout détournement de procédure, il pourrait être prévu la présentation à l'assemblée délibérante d'un état détaillé des créances admises en non-valeur comportant des informations sur les types de créances, les montants associés et l'identité des débiteurs.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La mesure modifie la partie législative du CGCT en complétant les articles L. 2122-22, L. 3211-2 et L. 4221-5.

Elle renvoie, pour son application, à un décret venant préciser les modalités de mise en oeuvre de la délégation.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

La mesure poursuit un but exclusif de gestion interne aux collectivités territoriales et à leur comptable public.

Les collectivités sont d'ores-et-déjà tenues par le principe constitutionnel de sincérité des comptes publics, rappelé ci-dessus, d'admettre en non-valeur les créances dont le recouvrement apparaît définitivement compromis. Cette opération a une contrepartie budgétaire, mais la mesure présentée ne vise qu'à faciliter sa mise en oeuvre par l'exécutif local.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les collectivités territoriales sont directement intéressées à la mesure. Celle-ci a en effet pour objet d'ajouter aux choix de délégation déjà ouverts à chaque assemblée délibérante, disposant du pouvoir budgétaire, la faculté juridique de déléguer à l'ordonnateur l'admission en non-valeur des créances irrécouvrables les plus modestes que lui présente le comptable public.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'impact est circonscrit au seul fonctionnement des services administratifs des collectivités territoriales. La mesure, en autorisant la délégation à l'exécutif local, permettra d'alléger l'ordre du jour des assemblées et donc la charge de travail induite pour les services chargés de leur préparation.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

Cette mesure a été validée dès 2010 par un groupe de travail animé par la direction générale des Finances publiques et composé de représentants d'associations d'élus locaux (association des maires de France - AMF, association des départements de France - ADF, association des régions de France - ARF). Elle a ensuite été retenue en 2011 par le sénateur Doligé dans le cadre de sa proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales. Cette mesure avait été votée par le Sénat mais n'a jamais été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Elle a de nouveau été évoquée et acceptée en 2016 par des représentants d'associations d'élus et de collectivités (ville de Paris, ARF, AMF, France urbaine), à l'occasion du bilan de la charte nationale des bonnes pratiques de gestion des recettes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure n'emportant aucune contrainte particulière pour les acteurs en présence, elle peut faire l'économie d'une mesure d'entrée en vigueur différée. Toutefois, un décret d'application apparaissant nécessaire à son application, elle n'entrera en vigueur qu'au moment où ce dernier aura été publié.

5.2.2. Application dans l'espace

Pour les Collectivités de l'article 73 :

Conformément au principe d'identité législative posé par l'article 73 de la Constitution, les lois et règlements s'appliquent de plein droit, donc sans mention spéciale, dans les collectivités de l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte).

Les articles du CGCT modifiés par l'article 43 sont également applicables aux deux collectivités uniques de Guyane et de Martinique régies par le droit commun des régions et des départements sur cet aspect des relations entre l'organe délibérant et l'exécutif :

- pour la Guyane : l'article L. 7161-1 du CGCT dispose que "L'assemblée de Guyane exerce ses compétences dans les conditions fixées au titre Ier du livre II de la troisième partie et au titre II du livre II de la quatrième partie, dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux dispositions de la présente partie."

- pour la Martinique : l'article L. 7261-1 du CGCT dispose que " L'assemblée de Martinique exerce ses compétences dans les conditions prévues au titre Ier du livre II de la troisième partie et au titre II du livre II de la quatrième partie, dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux dispositions de la présente partie. Elle contrôle le conseil exécutif dans les conditions prévues au chapitre V du titre II du présent livre. ".

Pour les Collectivités de l'article 74 :

En ce qui concerne Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon , le fonctionnement des institutions de ces collectivités d'outre-mer relève de la loi organique, ce qui inclut les délégations de l'organe délibérant à l'exécutif (art. LO. 6251-20 pour Saint-Barthélemy, LO. 6351-20 pour Saint-Martin, LO. 6462-10 à LO. 6462-12 pour Saint-Pierre-et-Miquelon). Aussi les modifications de l'article L. 2122-22 du CGCT ne sont pas applicables aux COM de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

En revanche, conformément au principe d'identité législative, les modifications de l'article L. 2122-22 du CGCT relatif aux délégations du conseil municipal au maire sont applicables aux deux communes de Saint-Pierre et Miquelon .

S'agissant de la Polynésie française , la mesure pourra être étendue aux communes par modification de l'article L. 2122-22 du CGCT dans le cadre d'une ordonnance. La mesure est sans objet pour le Pays, pour lequel elle relève du niveau organique.

La mesure est sans objet pour Wallis et Futuna dont les relations entre l'organe délibérant et l'exécutif (administrateur supérieur) relèvent de la loi organique.

Pour la Nouvelle-Calédonie, la mesure pourra être étendue aux communes par modification de l'article L. 122-20 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie dans le cadre d'une ordonnance. La mesure est sans objet pour la Nouvelle-Calédonie et les provinces, pour lesquelles elle relève du niveau organique.

5.2.3. Textes d'application

La mesure, pour entrer en vigueur, nécessite un décret d'application dont l'objet est de fixer :

- le seuil et la nature des créances pouvant faire l'objet de la mesure de délégation ;

- les conditions dans lesquelles le maire, le président du conseil départemental et le président du conseil régional rendent compte à l'assemblée délibérante de l'exercice de leur délégation.

Article 54 : Faciliter les dons de biens mobiliers par les collectivités territoriales

1. ÉTAT DES LIEUX

Les administrations peuvent réaliser des cessions amiables à titre gratuit (appelées couramment dons) de leurs biens mobiliers sous certaines conditions. Depuis le déploiement du site des dons de biens mobiliers de l'Etat 211 ( * ) en novembre 2019, plus de 2 000 biens ont été publiés en 2020 dont un tiers ont trouvé preneurs. Ce résultat est très encourageant pour une 1 ère année.

Concernant l'Etat et ses établissements publics, il est prévu à l'article L. 3212-2 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) qu'ils peuvent céder à titre gratuit :

- des biens meubles à des fondations ou à des associations relevant de la loi du 1 er juillet 1901 relative au contrat d'association visées au 1 b de l'article 238 bis du code général des impôts et dont les ressources sont affectées à des oeuvres d'assistance, notamment à la redistribution gratuite de biens meubles aux personnes les plus défavorisées ;

- des matériels informatiques dont les services de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics n'ont plus l'emploi, aux associations de parents d'élèves, aux associations de soutien scolaire, aux associations reconnues d'utilité publique et aux associations d'étudiants ;

- des matériels et équipements destinés à l'enseignement et à la recherche scientifiques, lorsqu'ils ont été remis, dans le cadre d'une convention de coopération, à un organisme assurant des missions de même nature ;

- des matériels informatiques et des logiciels nécessaires à leur utilisation, dont les services de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics n'ont plus l'emploi, aux personnels des administrations concernées ;

- des biens meubles, dont le ministère de la défense n'a plus l'emploi, à des associations ou organismes agissant pour la préservation ou la mise en valeur du patrimoine militaire, ou contribuant au renforcement du lien entre la Nation et son armée ;

- des biens de scénographie dont l'Etat et ses établissements publics n'ont plus l'usage, au profit de toute personne agissant, à des fins non commerciales, dans le domaine culturel ou dans celui du développement durable ;

- des biens meubles du ministère de la défense, y compris de matériels de guerre et assimilés, au profit d'Etats étrangers, lorsque les cessions contribuent à une action d'intérêt public, notamment diplomatique, d'appui aux opérations et de coopération internationale militaire ;

- des biens archéologiques mobiliers déclassés, dans les conditions prévues à l'article L. 546-6 du code du patrimoine ;

- des constructions temporaires et démontables dont les services de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics n'ont plus l'emploi aux structures définies au II de l'article L. 3332-17-1 du code du travail relevant de l'économie sociale et solidaire dans le but d'en éviter la démolition, conformément aux objectifs mentionnés au II de l'article L. 541-1 du code de l'environnement ;

- des biens meubles dont les services de l'Etat ou ses établissements publics n'ont plus l'emploi à des établissements publics de l'Etat, à des collectivités territoriales, à leurs groupements et à leurs établissements publics.

Les cessionnaires ne peuvent pas procéder à la cession, à titre onéreux, des biens ainsi alloués, à peine d'être exclus du bénéfice de ce type de cessions. La valeur unitaire des biens ne peut pas excéder un plafond fixé par décret.

Concernant les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics, la réglementation actuelle, prévue à l'article L. 3212-3 du CG3P, permet aux collectivités locales de faire uniquement des cessions amiables à titre gratuit de matériels informatiques, de biens archéologiques et de scénographie sous certaines conditions liées à l'objet de l'association bénéficiaire .

Ainsi, l'article précité prévoit que « Les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics sont autorisés à céder gratuitement les matériels informatiques dont ils n'ont plus l'emploi aux mêmes conditions que celles fixées pour l'État au 3° de l'article L. 3212-2. / Ils peuvent également céder gratuitement à leurs personnels les matériels informatiques et les logiciels nécessaires à leur utilisation dont ils n'ont plus l'emploi, aux mêmes conditions que celles fixées pour l'État ou l'un de ses établissements publics au 5° de l'article L. 3212-2 ainsi que les biens archéologiques mobiliers dans les conditions prévues à l'article L. 546-6 du code du patrimoine » .

La modification récente de l'article résulte de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire visant à l'ajout d'un dernier alinéa « Ils peuvent également céder gratuitement les biens de scénographie dont ils n'ont plus l'usage, aux mêmes conditions que celles fixées pour l'État au 7° de l'article L. 3212-2 du présent code. »

Les collectivités territoriales ont moins de possibilité de faire des dons que l'État.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Ainsi, la réglementation actuelle sur les dons des collectivités territoriales est assez restrictive par rapport à celle des dons de l'État puisque les catégories de biens mobiliers des collectivités territoriales pouvant faire l'objet de dons sont très limitativement énumérées. Cette procédure a donc un champ d'application réduit, contrairement à qui est prévu pour les dons de l'État et des établissements publics nationaux.

Le périmètre des possibilités de cessions amiables à titre gratuit de leurs biens mobiliers par les administrations autrement dit l'État ou les collectivités territoriales, relevant du domaine de la loi, il est nécessaire de modifier la loi pour étendre les possibilités de dons des collectivités territoriales.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cet article s'inscrit dans le cadre de la volonté des pouvoirs publics de développer l'économie circulaire en favorisant le réemploi des biens mobiliers des collectivités locales, devenus sans usage et de faible valeur.

Ainsi, les collectivités locales pourraient donner leurs meubles devenus inutiles (chaises, tables, bureaux...) à des associations pour meubler leurs locaux ou pour les redistribuer gratuitement à des personnes défavorisées.

L'article 41 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 poursuit le même objectif de développement des dons de biens mobiliers par l'État. Il permettra notamment aux administrations d'État de donner leurs biens mobiliers réformés et de faible valeur à des fondations, à des collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics.

La mesure envisagée permettra de développer le réemploi des biens réformés de faible valeur au profit d'autres collectivités territoriales ou d'associations ou fondations à but non lucratif.

3. DISPOSITIF RETENU

Il est proposé de rapprocher le régime des opérations d'aliénation du domaine mobilier à titre gratuit des collectivités territoriales de celui applicable à l'Etat.

Ainsi , les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics pourront, en plus des cessions déjà prévues actuellement à savoir les cessions des matériels informatiques (3° et 5°) , de biens archéologiques (9°) et de scénographie (7°), céder à titre gratuit tout type de biens meubles à des associations reconnues d'utilité publique (RUP), à des fondations RUP, à d'autres collectivités territoriales, à leurs établissements publics, à des groupements de collectivités territoriales (2° et 11°), des matériels et d'équipements destinés à l'enseignement et à la recherche scientifiques (4°), et des constructions temporaires et démontables dont les collectivités n'ont plus l'emploi à certaines structures relevant de l'économie sociale et solidaire (10°), dès lors que les biens donnés, dans tous ces cas, ne soient pas cédés et que la valeur unitaire ne dépasse pas un certain seuil fixé par décret.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 3212-3 du CG3P est modifié.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Concernant la transparence des dons, les collectivités territoriales seront autorisées à utiliser le site internet des dons de biens mobiliers de l'État (https://dons.encheres-domaine.gouv.fr/), pour faire leur proposition de dons.

Il n'y aura pas d'incidences sur la concurrence car afin de ne pas la fausser, il est prévu que les organismes bénéficiaires des dons de l'État et des collectivités territoriales ne puissent pas revendre les biens reçus en dons.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Au lieu de jeter des biens ou de payer des prestataires pour évacuer leurs biens mobiliers inutiles, les collectivités territoriales donneront à d'autres collectivités territoriales ou à des associations des biens mobiliers dont elles n'ont plus l'usage, étant précisé que dans ce cadre, les dons porteront sur des biens mobiliers de faible valeur.

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cette mesure va permettre de développer le réemploi des biens réformés de faible valeur des collectivités territoriales au profit d'autres collectivités territoriales ou d'associations ou fondations à but non lucratif et donc diminuer la quantité de déchets produits par les administrations. Elle aura donc un effet positif dans le cadre de la lutte contre le gaspillage et la promotion de l'économie circulaire.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, les dispositions envisagées ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'application sera immédiate le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception des collectivités d'outre-mer - excepté à Saint-Pierre-et-Miquelon .

5.2.3. Textes d'application

Le seuil de valeur unitaire pour les biens cédés gratuitement par l'État est fixé à 300 €. Il est prévu d'appliquer ce même seuil aux collectivités territoriales. Le décret fixant le seuil de valeur pour les biens de l'État donnés devrait s'appliquer également aux dons des collectivités, sans nécessité de rédiger un décret spécifique.

Article 55 : Clarification des dispositions applicables au droit de renonciation du président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre au transfert des pouvoirs de police spéciale

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article 11 de la loi n° 2020-760 du 22 juin 2020 tendant à sécuriser l'organisation du second tour des élections municipales et communautaires de juin 2020 et à reporter les élections consulaires a modifié le dispositif de transfert automatique des pouvoirs de police spéciale du maire au président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) prévu par l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT).

Auparavant, l'élection d'un nouveau président d'EPCI-FP déclenchait automatiquement, à la date de celle-ci, le transfert des pouvoirs de police spéciale du maire visés au A du I de cet article (assainissement, réglementation de la gestion des déchets ménagers, stationnement des résidences mobiles des gens du voyage, circulation et stationnement, autorisation de stationnement des taxis, habitat insalubre) au président de l'EPCI-FP, lorsque ce dernier disposait de la compétence correspondante.

A présent, le maire dispose d'un délai de six mois suivant cette élection pour s'opposer dans chacun de ces domaines au transfert de ses pouvoirs de police ou à la reconduction de ce transfert. Il notifie son opposition au président de l'EPCI-FP ou du groupement de collectivités territoriales.

De plus, en cas d'opposition d'au moins un des maires des communes concernées, le président de l'EPCI-FP dispose d'un délai supplémentaire d'un mois suivant la période de six mois pendant laquelle les maires étaient susceptibles de faire valoir leur opposition à compter de son élection, pour renoncer à l'exercice de ces pouvoirs de police.

Ainsi, la date du transfert effectif des pouvoirs de police intervient six mois après l'élection du président de l'EPCI-FP si aucun maire des communes membres ne s'est opposé au transfert, ou sept mois après, sur le territoire des communes ne s'y étant pas opposées, si au moins un maire a fait valoir son droit d'opposition et si le président de l'EPCI-FP ne renonce pas à l'exercice de ces pouvoirs de police.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que « la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources » . L'encadrement des transferts des pouvoirs de police des maires des communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre au président de cet établissement relève donc du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La modification du III de l'article L. 5211-9-2 du CGCT visait à permettre au président de l'EPCI-FP de renoncer au transfert du pouvoir de police dans un délai d'un mois suivant le délai de six mois laissé aux maires pour faire valoir leur opposition.

Dans l'esprit du texte, ce délai d'un mois était pensé comme un délai additionnel à la période transitoire de six mois laissée aux maires pour faire valoir leur opposition, de sorte qu'une renonciation avant l'expiration de ce délai de six mois restait possible.

Cette interprétation est confortée également par la lecture du troisième alinéa du III de l'article L. 5211-9-2 qui précise qu'en cas d'opposition d'un des maires, le transfert n'est effectif qu'à l'expiration « du délai supplémentaire d'un mois prévu à la première phrase de l'avant-dernier alinéa du présent III » .

Toutefois, une interprétation littérale du texte peut laisser penser que le droit de renonciation du président de l'EPCI-FP ne peut être exercé que dans le seul mois suivant la période de six mois laissée aux maires pour faire valoir leur opposition. Une telle interprétation restrictive conduirait ainsi à invalider les décisions de renonciation des présidents d'EPCI-FP notifiées avant l'expiration du délai de six mois.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Il convient de clarifier la rédaction du quatrième alinéa du III de l'article L. 5211-9-2 du CGCT afin de garantir la sécurité juridique des décisions de renonciation des présidents d'EPCI-FP.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il pourrait être envisagé de ne pas modifier la rédaction actuelle du quatrième alinéa du III de l'article L. 5211-9-2 du CGCT.

Toutefois, cette solution présente le risque de laisser subsister deux interprétations différentes des modalités de renonciation du président de l'EPCI-FP au transfert des pouvoirs de police et donc un doute sur la validité de certaines décisions de renonciation des présidents d'EPCI-FP, et par voie de conséquence sur la compétence des autorités de police dans les domaines concernés.

3.2. OPTION RETENUE

La mesure retenue vise à préciser dans le quatrième alinéa du III de l'article L. 5211-9-2 du CGCT que le président de l'EPCI-FP peut renoncer, dans chacun des domaines mentionnés au A du I de cet article, à ce que les pouvoirs de police spéciale des maires des communes membres lui soient transférés à compter de la réception de la première notification d'opposition et jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la fin de la période pendant laquelle les maires sont susceptibles de faire valoir leur opposition. Ce droit de renonciation reste donc conditionné à l'opposition préalable d'un ou plusieurs maires des communes concernées au transfert de leurs pouvoirs de police.

L'entrée en vigueur rétroactive de cette modification vise à sécuriser juridiquement les décisions de renonciation des présidents d'EPCI-FP prises avant l'entrée en vigueur de la présente loi. L'objectif est ainsi de garantir la validité juridique des décisions de renonciation prises par les présidents d'EPCI-FP entre le premier et le sixième mois suivant leur élection. Cette applicabilité rétroactive est sans incidence sur les décisions de renonciation prises par les présidents d'EPCI-FP entre le sixième et le septième mois suivant leur élection.

La date du 25 mai 2020 correspond à l'entrée en vigueur elle-même rétroactive de l'article 11 de la loi du 22 juin 2020 qui a modifié le III de l'article L. 5211-9-2 du CGCT. Elle correspond à la première date à laquelle des présidents d'EPCI-FP nouvellement désignés auraient pu prendre des décisions en matière de pouvoirs de police administrative.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La mesure retenue modifie le quatrième alinéa du III de l'article L. 5211-9-2 du CGCT.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette mesure n'emporte pas d'impact sur les collectivités territoriales et leurs groupements, si ce n'est qu'elle clarifie l'interprétation des dispositions de l'article L. 5211-9-2 du CGCT.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera rétroactivement au 25 mai 2020.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique aux départements et régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution, où le principe d'identité législative prévaut.

En revanche, elle n'est pas applicable dans les collectivités d'outre-mer suivantes, régies par l'article 74 de la Constitution - Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna - dès lors qu'il n'y existe soit pas de communes, soit pas d'EPCI à fiscalité propre. Elle n'est pas non plus applicable à la Nouvelle-Calédonie, dès lors que la création d'EPCI à fiscalité propre n'y est pas autorisée.

Elle pourra être rendue applicable à la Polynésie française par modification de l'article L.5842-4 du CGCT, par le biais de l'ordonnance permettant au gouvernement d'adapter les dispositions du projet de loi à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française.

Article 56 - Relations entre le conseil métropolitain et les conseils de territoire de la Métropole Aix-Marseille-Provence

1. ÉTAT DES LIEUX

La métropole d'Aix Marseille-Provence (MAMP) a été créée au 1 er janvier 2016 par regroupement de six établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre préexistants : la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, les communautés d'agglomération du Pays d'Aix-en-Provence, du Pays d'Aubagne et de l'Étoile, du Pays de Martigues, de Salon-Étang de Berre-Durance et enfin le syndicat d'agglomération nouvelle d'Ouest Provence.

La MAMP regroupe 92 communes (dont une dans le département du Var et une autre du département du Vaucluse) et plus de 1,8 million d'habitants soit plus de 90% de la population du département des Bouches du Rhône.

Source : MAMP.

Il s'agit d'une métropole soumise au régime des métropoles de droit commun mais qui s'en distingue par des règles spécifiques : le II de l'article L. 5218-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit ainsi que « la métropole d'Aix-Marseille-Provence est soumise aux dispositions du chapitre VII du présent titre, sous réserve des dispositions du présent chapitre » .

Son organisation a été initialement fixée par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MAPTAM), puis précisée par l'ordonnance n° 2015-50 du 23 janvier 2015 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la MAMP et par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe).

Contrairement aux métropoles de droit commun, la MAMP comporte un échelon de déconcentration, les territoires, conformément à l'article L. 5218-3 du CGCT, dont le périmètre reprend celui des anciens EPCI à fiscalité propre qu'elle a regroupés. Si la composition du conseil métropolitain ne présente pas de spécificité particulière, chaque territoire comprend un conseil composé des conseillers de la métropole des communes de son périmètre (article L. 5218-4 du CGCT). Ils sont présidés par un président élu par le conseil, qui désigne également des vice-présidents (article L. 5218-6 du CGCT).

Bien que n'étant pas dotés de la personnalité morale, les conseils de territoire peuvent se voir déléguer des compétences significatives. Le II de l'article L. 5218-7 du CGCT prévoit ainsi jusqu'au 31 décembre 2019 la délégation automatique aux territoires de toutes les compétences de la métropole, à l'exception d'une liste de 15 compétences spécifiques, qui correspondent pour la plupart à des schémas métropolitains n'ayant de sens qu'à l'échelle de l'ensemble de la métropole 212 ( * ) . Pendant cette période, seul un vote à la majorité des deux tiers du conseil métropolitain faisait obstacle à cette délégation automatique. A compter du 1 er janvier 2020, cette délégation automatique est devenue une simple faculté. La délégation de compétence aux territoires se fait par délibération du conseil métropolitain. Le texte ne mentionne pas de durée pour ces délégations, mais le IV de l'article L. 5218-7 précité prévoit que, pour l'exercice des compétences du conseil de territoire, le conseil de la métropole peut lui donner délégation pour passer des marchés qui ne nécessitent pas de formalité préalable en raison de leur montant. Cette dernière délégation prend fin de plein droit à chaque renouvellement du conseil de la métropole.

Pour l'exercice de leurs compétences, les territoires perçoivent une dotation de gestion (articles L. 5218-8 et suivants du CGCT). Le montant des sommes destinées aux dotations de gestion des territoires est fixé par l'organe délibérant de la métropole. Ces sommes sont réparties entre les conseils de territoire en tenant compte des caractéristiques propres du territoire. Elles constituent des dépenses obligatoires pour la métropole. Les dépenses et recettes de fonctionnement et d'investissement de chaque conseil de territoire font l'objet d'un « état spécial de territoire » ; les états spéciaux sont annexés au budget de la métropole.

Dans les faits, les territoires bénéficient de délégations de compétence très étendues. Ils exercent des compétences très substantielles, comme la création, l'aménagement et la gestion de zones d'activité industrielles, commerciales, tertiaires, artisanales et touristiques. Ils gèrent aussi à leur niveau la construction, l'aménagement, l'entretien et le fonctionnement d'équipements culturels, socioculturels, socio-éducatifs et sportifs d'intérêt métropolitain.

Le rapport au Premier ministre de la mission « Devenir de la Métropole Aix-Marseille-Provence et du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône », publié le 13 mars 2019, fait état d'une insatisfaction des élus locaux concernant l'organisation actuelle : « Si les positions exprimées ne sont pas homogènes, il en ressort cependant une attente partagée pour des évolutions institutionnelles. De façon quasi-unanime, les acteurs de ce territoire considèrent que la conjoncture politique, les réalités socio-économiques et la situation institutionnelle sont propices à une évolution à relativement court terme et que cette opportunité doit être saisie : l'échec de la Métropole - qui pourrait résulter d'un fonctionnement institutionnel déficient ou d'une mise en oeuvre insuffisante de ses projets stratégiques - aurait des conséquences politiques graves. »

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Bien que s'agissant d'un échelon de déconcentration, les larges possibilités de délégation de compétence aux conseils de territoire limitent aujourd'hui la capacité de la MAMP à prendre en charge, en propre, un plus grand nombre de politiques publiques à l'échelon métropolitain. Si cette situation perdure sans changement, la valeur ajoutée de la métropole demeurera limitée et la situation relativement comparable à ce qu'elle était avant sa création.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi par cet article est de susciter un approfondissement des compétences directement exercées par la MAMP afin que celle-ci puisse pleinement contribuer à l'amélioration de la qualité de service sur le territoire métropolitain ainsi qu'à une politique d'attractivité, de développement et d'aménagement pleinement concertée et davantage harmonisée afin de générer des économies d'échelle. Un passage en revue des modalités d'exercice des compétences métropolitaines est souhaitable afin que la structure apporte concrètement la valeur ajoutée recherchée lors de sa création.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Le législateur peut agir de différentes manières sur la répartition des compétences au sein de la MAMP :

- compléter explicitement la liste des compétences qui ne peuvent être déléguées aux conseils de territoires, actuellement au nombre de 15 et concernant principalement des stratégies à l'échelle du territoire et non des services rendus directement aux usagers ;

- modifier la répartition des compétences entre la métropole et ses communes membres, définie à l'article L. 5218-2 du CGCT ;

- créer des règles procédurales amenant à interroger périodiquement la répartition des compétences au sein de la métropole, en particulier les délégations de compétence aux conseils de territoire.

3.2. DISPOSITIF RETENU

L'option retenue consiste à mettre en place un réexamen obligatoire des délégations consenties par la MAMP aux conseils de territoire à mi-mandat, soit trois ans après le renouvellement du conseil métropolitain. Cette échéance obligatoire, plus respectueuse des initiatives locales qu'une révision, par le législateur, des possibilités de délégation, est susceptible de participer au renforcement de la métropole.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le projet d'article modifie l'article L. 5218-7 du CGCT relatif aux modalités de délégation de compétence de la MAMP aux conseils de territoire.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le texte a un impact uniquement sur la MAMP, dont le conseil devra délibérer sur les délégations consenties aux territoires trois ans après son renouvellement. Le prochain réexamen aura donc lieu en 2023.

Indirectement, le texte pourra contribuer à modifier les délégations de compétences aux conseils de territoire dont les conditions sont définies à l'article L. 5218-7 du CGCT.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La disposition envisagée a été soumise au conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française mais ne produira réellement d'effet qu'en 2023, au moment du premier réexamen des délégations de compétences.

5.2.2. Application dans l'espace

Le texte ne concerne que la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

5.2.3. Textes d'application

Cet article ne nécessite pas de texte d'application.

CHAPITRE III - COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE

Article 57 : Coopération sanitaire transfrontalière

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'organisation et l'accès aux soins sont des enjeux qui se sont faits de plus en plus pressants comme l'illustre la multiplication des outils (carte sanitaire des hôpitaux en 1970, observatoires régionaux de santé en 1974, schémas régionaux d'organisation sanitaire en 1991 ou encore programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins en 1998). Instaurés par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, sous la forme d'un plan stratégique régional de santé et amplement remanié par la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, les projets régionaux de santé (PRS) ont notamment vocation à territorialiser la politique de santé.

En application de l'article L. 1434-1 du code de la santé publique (CSP), « le projet régional de santé définit, en cohérence avec la stratégie nationale de santé et dans le respect des lois de financement de la sécurité sociale, les objectifs pluriannuels de l'agence régionale de santé dans ses domaines de compétences, ainsi que les mesures tendant à les atteindre. » Il est arrêté par le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) et est soumis à l'avis du conseil de surveillance de l'agence (articles L. 1432-2 et L. 1432-3 du CSP).

A cet effet, le PRS est constitué en vertu de l'article L. 1434-2 du CSP :

- d'un cadre d'orientation stratégique, qui détermine des objectifs généraux et les résultats attendus à dix ans ;

- d'un schéma régional de santé, établi pour cinq ans sur la base d'une évaluation des besoins sanitaires, sociaux et médico-sociaux, qui détermine, pour l'ensemble de l'offre de soins et de services de santé, y compris en matière de prévention, de promotion de la santé et d'accompagnement médico-social, des prévisions d'évolution et des objectifs opérationnels ;

- d'un programme régional relatif à l'accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies.

Il est également prévu à cet article que « dans les territoires frontaliers et les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, le projet régional de santé organise, lorsqu'un accord cadre international le permet, la coopération sanitaire et médico-sociale avec les autorités du pays voisin. »

Depuis la loi du 26 janvier 2016 précitée, les différents schémas régionaux relatifs à la santé ont donc été regroupés, dans le cadre du PRS, en un schéma régional de santé (SRS).

Les SRS ont vocation, sur la base d'une évaluation des besoins sanitaires, sociaux et médico-sociaux, à déterminer des prévisions d'évolution et des objectifs opérationnels pour cinq ans sur l'ensemble de l'offre de soins et de services de santé, y compris en matière de prévention, de promotion de la santé et d'accompagnement médico-social. Leur mise en oeuvre est encadrée à l'article L. 1434-3 du CSP. Les SRS peuvent, le cas échéant, comporter un volet spécifique au regard des particularités du territoire couvert par l'ARS. Un SRS peut ainsi avoir un volet consacré aux besoins de santé spécifiques des populations des zones de montagne, notamment en termes d'accès aux soins urgents et d'évacuation des blessés, et tenant compte des spécificités géographiques, démographiques et saisonnières de ces territoires.

1.2. CADRE CONVENTIONNEL

Dans le prolongement de la territorialisation de l'offre de soin opérée par les PRS et les SRS, et pour parachever l'intégration en droit interne de la jurisprudence communautaire relative à la libre prestation de services et à la libre circulation des marchandises en matière de soins de santé, des accords-cadres concernant des zones frontalières ont été mis en place et signés entre la France et les pays frontaliers. Ces accords-cadres fixent les conditions de séjour dans les établissements de malades bénéficiaires de la prise en charge des frais de santé ou de personnes qui leur sont rattachées au sens des règlements européens, qui ne peuvent recevoir en France les soins appropriés à leur état, ainsi que les modalités de remboursement des soins dispensés. Ils sont encadrés par l'article R. 160-3 du CSP 213 ( * ) . A ce jour, plusieurs accords-cadres existent entre la France et l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, l'Espagne ou encore la Suisse.

À la suite de ces accords-cadres, des conventions de coopération sanitaire ou médico-sociale existent également. Elles peuvent être conclues entre les organismes de sécurité sociale et certains établissements sanitaires ou médico-sociaux établis dans un État-membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou la Suisse, après autorisation des autorités compétentes ou de l'ARS. Ces conventions permettent, sur des sujets précis (réanimation, chirurgie cardiaque, coopération sanitaire transfrontalière...) et un territoire frontalier donné, d'identifier les acteurs et les processus pour accéder aux soins. Il existe actuellement plusieurs accords-cadres avec l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne et la Suisse.

Au niveau européen, la coopération sanitaire s'est progressivement développée entre les États-membres de l'Union européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen ou la Suisse. Cette volonté a pris corps avec la directive n° 2011/24/UE du 9 mars 2011 relative à l'application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers, qui vise à garantir la mobilité des patients et la libre prestation de services de santé et précise en son article 10-3 que la Commission encourage les États-membres à coopérer en matière de prestations de soins de santé transfrontaliers dans les régions frontalières.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

La crise de la Covid-19 a mis en lumière les enjeux de coopération sanitaire au niveau transfrontalier, notamment entre la France et l'Allemagne. Il a été identifié comme piste d'amélioration la possibilité de renforcer les outils existants par une meilleure prise en compte de l'aspect transfrontalier au niveau législatif. Ces enjeux spécifiques sont cohérents avec l'objectif de territorialiser l'offre de soin et de favoriser la différenciation au niveau des territoires, en l'occurrence ceux qui sont frontaliers.

Si de bonnes pratiques peuvent déjà s'observer au travers, par exemple, de la signature en 2019 de la convention de coopération transfrontalière MOSAR qui vise à faciliter les relations sanitaires franco-allemandes et notamment la mobilité et l'accès aux soins des habitants du périmètre transfrontalier, il apparaît nécessaire de formaliser au sein des SRS des ARS frontalières un volet, s'appuyant sur les accords-cadres, notamment en termes d'accès aux soins urgents, d'évacuation des blessés ainsi que de coordination en cas de crise sanitaire. En effet, la dimension transfrontalière dans l'accès aux soins est actuellement très inégale selon les territoires et les thématiques couvertes par les conventions. Il existe ainsi plusieurs champs qui ne sont pas pris en compte comme les accidents vasculaires cérébraux notamment du côté allemand au niveau de la frontière avec la collectivité européenne d'Alsace. Enfin, la crise de la Covid-19 a démontré le besoin d'une meilleure préparation et organisation de la coopération transfrontalière en cas de crise sanitaire majeure.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIFS RETENUS

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

La mise en place d'un nouveau schéma régional transfrontalier de coopération sanitaire a été envisagée. Cependant, afin d'éviter la multiplication de nouveaux schémas, de conserver la cohérence du SRS et de laisser de la flexibilité aux ARS des régions frontalières, il a été privilégié le fait d'intégrer directement ce sujet comme un volet des SRS.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue vise à consolider le SRS par une meilleure prise en compte de la question de la coopération sanitaire transfrontalière. En effet, si le PRS permet actuellement dans les territoires frontaliers, lorsqu'un accord-cadre international l'autorise, la coopération sanitaire et médico-sociale avec les autorités du pays voisin, les SRS ne font aucune mention de cette question.

L'objectif est donc de rendre plus aisées :

- la mise en oeuvre opérationnelle des accords-cadres ;

- la cohérence de la territorialisation des soins avec une meilleure prise en compte des différentes conventions de coopération sanitaire ou médico-sociale ;

- la coopération sanitaire et médico-sociale avec les autorités du pays voisin ;

- la prise en compte du droit existant et de la territorialisation des soins, au travers notamment du 6° de l'article L. 1434-3.-I du CSP qui consacre un volet dédié aux besoins de santé spécifiques des populations des zones de montagne, en particulier en termes d'accès aux soins urgents et d'évacuation des blessés, et tenant compte des spécificités géographiques, démographiques et saisonnières de ces territoires.

L'option retenue permettra, en fonction des territoires, d'assurer un meilleur accès aux soins dans les bassins de vie frontaliers, notamment pour les urgences médicales, de garantir une continuité des soins pour les populations frontalières, d'optimiser l'organisation de l'offre de soins en facilitant l'utilisation ou le partage des moyens humains et matériels, et d'améliorer l'organisation et la coopération.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

Le I de l'article L. 1434-3 du CSP, relatif aux SRS, sera complété par un 7° rédigé comme suit : « 7° Comporte, le cas échéant, un volet consacré à la mise en oeuvre des accords-cadres de coopération sanitaire applicables dans les régions frontalières ou dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, qui porte notamment sur l'accès aux soins urgents, l'évacuation des blessés ainsi que sur la coordination en cas de crise sanitaire . ».

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La disposition permettra de décliner les accords internationaux en leur donnant une réalité concrète et opérationnelle.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure envisagée ne crée pas d'obligation pour les collectivités territoriales.

4.3. IMPACTS SOCIAUX

La disposition permettra d'assurer un meilleur accès aux soins dans les bassins de vie frontaliers, notamment pour les urgences médicales et de garantir une continuité des soins pour les populations frontalières.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, la disposition envisagée a été soumise au conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique aÌ l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

Aucune mesure d'application n'est prévue.

Article 58 : Développer la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Aborder l'aménagement de l'espace dans un espace transfrontalier conduit nécessairement à confronter des systèmes de gestion de l'espace (planification, zonage, autorisations de construire...) différents de part et d'autre de la frontière. Chaque État a élaboré un droit et une pratique de l'aménagement qui lui sont propres et qui laissent une marge de manoeuvre plus ou moins importante aux différents niveaux de collectivités pour gérer et organiser le développement de leurs territoires.

Par ailleurs, les acteurs engagés dans la coopération transfrontalière ne possèdent pas toujours une connaissance fine des différents modes d'organisation institutionnels et administratifs à l'oeuvre chez leurs voisins.

Dans ce cadre, développer la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement s'avérerait utile. Cette coordination locale peut trouver sa source dans des démarches non-réglementaires (charte, livre blanc, stratégie...) mais peut également conduire à définir dans chaque État des règles juridiques dédiées.

Actuellement, les dispositions qui gouvernent la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement sont jugées comme étant insuffisantes.

Ainsi, si l'article L. 4251-5 III du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit déjà la possibilité de consulter les régions limitrophes et tout autre organisme ou personne sur tout ou partie du projet de schéma 214 ( * ) , il n'existe pas à ce jour de disposition sur la coopération transfrontalière en matière de SRADDET.

Il s'agira donc de compléter les dispositions de l'article L. 4251-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) qui précise les modalités d'élaboration du SRADDET.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le développement de la coopération transfrontalière en matière de documents d'aménagement s'insère dans le cadre de l'article 72 de la Constitution qui consacre le principe de libre administration des collectivités locales. En effet, les dispositions proposées n'imposent aucune obligation aux autorités locales responsables. Ainsi le conseil régional, en charge de l'élaboration du SRADDET, pourra sans obligation, consulter ou associer les collectivités territoriales étrangères limitrophes à l'élaboration de ce document.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les dispositions législatives actuelles du CGCT doivent être précisées afin d'encourager la coopération transfrontalière en matière d'aménagement.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La présente mesure vise à améliorer le dispositif juridique existant, en permettant expressément de consulter ou d'associer les collectivités territoriales étrangères limitrophes à l'élaboration des SRADDET.

3. DISPOSITIF RETENU

Le dispositif retenu consiste à compléter les dispositions existantes du CGCT afin de prévoir que les autorités locales en charge du SRADDET pourront consulter ou associer les collectivités territoriales étrangères limitrophes à l'élaboration de ce document.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La présente mesure modifie le III de l'article L. 4251-5 du CGCT.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

La mesure n'aura pas d'impact économique et financier direct sur les entreprises. Pour autant, la plus grande pertinence des documents qui fixent les règles d'aménagement et d'urbanisme applicables au plan local permettront de développer des projets d'aménagement qui amélioreront le développement économique local.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La présente mesure va permettre aux conseils régionaux, en charge de l'élaboration des SRADDET, de développer au plan local une coopération avec les collectivités territoriales étrangères limitrophes.

Ceci permettra de prendre en compte l'ensemble des composantes, y compris transfrontalières, d'un bassin de vie et améliorer ainsi la pertinence des documents d'aménagement.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure n'aura pas d'impact direct sur les particuliers. Pour autant, la plus grande pertinence des documents qui fixent les règles d'aménagement permettront de développer des projets d'aménagement qui amélioreront le cadre de vie des populations concernées.

4.5. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les SRADDET doivent déjà intégrer de nombreuses problématiques liées à l'environnement. La consultation des collectivités territoriales étrangères et limitrophes permettra donc de prendre en compte, via les remarques de ces collectivités, les éléments transfrontaliers liés à ces préoccupations.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique au seul territoire métropolitain s'agissant des dispositions liées au SRADDET.

5.2.3. Textes d'application

Aucune mesure d'application n'est prévue.

Article 59 : Possibilité pour les collectivités territoriales et groupements étrangers de participer au capital des sociétés publiques locales (SPL)

1. ETAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les entreprises publiques locales (EPL) ne constituent pas une spécificité française puisqu'il est dénombré quelques 30 000 EPL 215 ( * ) sur l'ensemble du territoire des Etats-membres.

Les sociétés publiques locales (SPL), introduites par la loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales, sont des sociétés anonymes régies par le livre II du code de commerce auxquelles les collectivités territoriales peuvent recourir sans publicité ni mise en concurrence. Elles interviennent ainsi pour le compte de leurs actionnaires dans le cadre de prestations intégrées, également dénommées contrats de « quasi-régie » ou « in house ».

Cette faculté est offerte par le dispositif instauré par l'article L. 1531-1 du code général des collectivités (CGCT), issu de la loi précitée. En effet, ces sociétés, dont le capital est exclusivement détenu par les collectivités ou leurs groupements, « exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements qui en sont membres ». Ces dispositions reprennent les principes de la jurisprudence européenne en matière de prestations intégrées.

La Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a reconnu l'existence des contrats de quasi-régie en 1999 216 ( * ) . Les conditions d'existence de ces contrats ont depuis été formalisées par la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession, respectivement transposées en droit interne par l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession.

Ces deux ordonnances posent trois conditions cumulatives à la reconnaissance d'une relation de quasi-régie :

- le contrôle exercé par le ou les pouvoirs adjudicateurs sur le ou leur cocontractant doit être analogue à celui qu'ils exercent respectivement sur leurs propres services ;

- l'activité du cocontractant doit être principalement consacrée à ce(s) pouvoir(s) adjudicateur(s) ;

- la personne morale contrôlée ne comporte, en principe, pas de participation directe de capitaux privés.

Les sociétés d'économie mixte locale (SEML) peuvent, en application de l'article L. 1522-1 du CGCT, comprendre des collectivités territoriales étrangères actionnaires.

Si les SPL sont soumises par renvoi au régime des SEML, « sous réserve des dispositions » qui leurs sont applicables en vertu de l'article L. 1531-1 du CGCT, cette faculté dont bénéficient les sociétés à capitaux mixtes ne leur est pas ouverte. L'article L. 1531-1 prévoit en effet que les collectivités territoriales et leurs groupements instituant une SPL doivent en détenir la totalité du capital.

Par ailleurs, ce même article est présenté tant par la doctrine que par le législateur comme portant spécifiquement sur les règles applicables à la prise de participation dans les SEML 217 ( * ) . Le renvoi de l'article L. 1531-1 aux dispositions sur les SEML n'en apparaît que plus inopérant.

A l'heure actuelle, la législation n'autorise donc pas la participation des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements au capital des SPL.

La normalisation européenne du cadre applicable aux prestations « in house », conduisent à faire évoluer la loi pour autoriser la participation de collectivités territoriales étrangères et leurs groupements au capital des SPL et favoriser les projets transfrontaliers communs. La création de ces sociétés demeurera entre les mains des collectivités territoriales françaises et de leurs groupements.

La constitution de ces sociétés doit cependant répondre à un besoin précis des collectivités. Alors que les sociétés publiques locales d'aménagement (SPLA) relevant des articles L. 327-1 et suivants du code de l'urbanisme ont un objet exclusif limité aux opérations d'aménagement, les SPL ont un champ d'intervention très large. Au regard des risques financiers encourus par les collectivités qui participent au capital de telles sociétés et de l'exclusion des règles de la commande publique, l'objet social des SPL à capitaux étrangers a vocation à être limité à la gestion d'un service public d'intérêt commun transfrontalier pouvant comprendre la construction des ouvrages ou l'acquisition des biens nécessaires au service.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. Les entreprises publiques locales étant des entités créées et contrôlées par les collectivités territoriales et leurs groupements, les règles régissant leur fonctionnement relèvent du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La dérogation aux règles de composition du capital des SPL fixées par l'article L. 1531-1 du CGCT qu'il est envisagé d'instaurer est de niveau législatif.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure proposée vise à autoriser les collectivités territoriales françaises à constituer des SPL avec des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements dont l'objet porte exclusivement sur un service public d'intérêt commun transfrontalier.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

L'introduction des SPL transfrontalières par circulaire interprétative, indiquant que la loi l'autorise déjà - demandée par certains acteurs du secteur des EPL - n'a pas été retenue car insuffisamment sécurisée d'un point de vue juridique, le renvoi au régime des SEML étant estimé inopérant.

3.2. OPTION RETENUE

Il est proposé de permettre la participation des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements au capital des SPL en limitant cette faculté aux sociétés dont l'objet social porte exclusivement sur la gestion d'un service public d'intérêt commun transfrontalier pouvant comprendre la construction des ouvrages ou l'acquisition des biens nécessaires au service.

Ce service public devra se situer sur le territoire de la collectivité territoriale ou le groupement français, détenant la compétence en lien avec l'objet social, et sur le territoire de la collectivité territoriale étrangère et leurs groupements.

Les collectivités territoriales étrangères et leurs groupements ne pourront détenir, ensemble ou séparément, plus de la moitié du capital ou des droits de vote dans l'assemblée délibérante de la société.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 1531-1 du CGCT est modifié.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette simple faculté offerte aux collectivités territoriales frontalières vise notamment à faciliter la réalisation de services de transports ou de réseaux transfrontaliers et d'en mutualiser les coûts.

A l'inverse, les pertes subies par les EPL peuvent se reporter sur les finances des collectivités territoriales, qu'elles soient françaises ou étrangères, de trois manières.

Dans l'hypothèse d'une liquidation, les collectivités territoriales en tant qu'actionnaires sont susceptibles de faire l'objet d'une action en comblement de passif de la société au prorata du capital détenu, tandis que l'insolvabilité d'une EPL à l'égard des banques créancières peut aboutir à la mise en jeu des garanties d'emprunt accordées par les collectivités. La cessation d'activités de la société peut conduire à l'interruption d'un service public concédé ou d'une opération réalisée sous mandat. Dans ce dernier cas, la collectivité peut être placée en situation de reprendre elle-même le service public ou l'opération inachevée, générant ainsi d'importantes charges financières.

Ce risque financier n'est pas négligeable, d'autant que l'article L. 1524-4 du CGCT prévoit qu'aucune subvention exceptionnelle de l'État ne peut être attribuée à une commune en cas de difficultés financières nées de sa participation au capital d'une EPL ou de la garantie qu'elle a pu accorder aux emprunts contractés par une telle société.

4.3. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

Les critères de la relation « in house » entre les actionnaires et la SPL devront être respectés par l'ensemble des collectivités territoriales actionnaires pour permettre à ces dernières de s'affranchir du code des marchés publics dans leur relation avec la société.

En tout état de cause, si les collectivités peuvent recourir aux SPL, ou aux SPLA, sans se soumettre aux règles issues des ordonnances de 2015 et 2016 précitées, ces sociétés revêtent, en principe, la qualité de pouvoir adjudicateur 218 ( * ) et doivent ainsi appliquer pour leurs achats les mesures de publicité et de mise en concurrence prévues par les ordonnances précitées pour la réalisation de leurs missions.

Ces conditions, qui s'ajoutent à celles d'un objet exclusif et encadré, visent à limiter l'atteinte au droit de la concurrence.

Ces dispositions n'entrainent pas de charges supplémentaires pour les entreprises.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La Fédération des élus des Entreprises publiques locales (FedEPL) demande cette évolution législative.

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La mesure s'applique dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre et Miquelon.

La mesure ne s'applique pas aux SPL de Wallis et Futuna, de la Polynésie française, de la Nouvelle Calédonie et de ses provinces dont les règles relèvent du législateur organique.

Conformément au principe de spécialité législative, la mesure ne s'applique pas non plus aux SPL des communes de la Polynésie française et des communes de la Nouvelle-Calédonie.

CHAPITRE IV - MESURES DE SIMPLIFICATION DE L'ACTION PUBLIQUE LOCALE EN MATIÈRE D'AMÉNAGEMENT ET D'ENVIRONNEMENT

Article 60 : Elargissement du droit de préemption des terres agricoles sur les aires d'alimentation des captages d'eau potable

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article 118 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique (articles L. 218-1 à L. 218-14 du code de l'urbanisme) crée un droit de préemption pour la préservation des ressources en eau destinées à la consommation humaine. Les droits de préemption permettent à des personnes publiques d'acquérir en priorité les biens mis en vente par leurs propriétaires sur certaines zones de leurs territoires. Les objectifs dont la réalisation peut justifier la mise en oeuvre du droit de préemption sont définis par la loi.

Il permet à la commune ou au groupement de communes compétent pour assurer le service d'eau potable (tel que défini par l'article L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales - CGCT), de préempter les surfaces agricoles situées sur l'aire d'alimentation des captages qu'il exploite.

Il est institué par l'autorité administrative, à la demande de la commune ou du groupement de communes concerné.

Les biens acquis sont intégrés dans le domaine privé de la commune ou du groupement de communes. Ils ne peuvent être utilisés qu'en vue d'une exploitation agricole. Celle-ci doit être compatible avec l'objectif de préservation de la ressource en eau.

Les terrains acquis peuvent être cédés, loués ou concédés temporairement, sous réserve du respect d'un cahier des charges qui prévoit les mesures nécessaires à la préservation de la ressource en eau.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Lors de l'examen du projet de décret d'application prévu par l'article L. 218-14 du code de l'urbanisme, le Conseil d'Etat a mis en évidence des lacunes dans la rédaction actuelle de la loi car elle ne permet pas la mise en oeuvre effective de mesures assurant, dans la durée, la protection de la ressource en eau, alors que cela est l'objectif de la préemption (ce qui a conduit le Conseil d'Etat à émettre un avis défavorable sur le projet de décret et le Gouvernement à retirer le texte). Le Conseil d'Etat a recommandé au Gouvernement de déposer un projet de loi afin de préciser le régime des biens acquis. En l'absence de ces modifications, le droit de préemption pour la préservation des ressources en eau destinées à la consommation humaine est inopérant.

Par ailleurs, le droit de préemption prévu aux articles L. 218-1 à L. 218-14 du code de l'urbanisme ne peut être institué qu'au bénéfice des communes ou groupements de communes compétents pour assurer le service d'eau potable, tel que défini par l'article L. 2224-7 du CGCT. Or, cette compétence peut également être exercée par des syndicats mixtes et ceux-ci ne peuvent pas bénéficier du droit de préemption susmentionné.

De plus, les régies dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière visées à l'article L. 2221-10 du CGCT peuvent se voir confier l'exploitation du service d'eau potable (la population alimentée par ces régies dépasse 6,2 millions d'habitants). Il est souhaitable que ces régies puissent exercer directement le droit de préemption s'il est instauré : leur connaissance des enjeux relatifs à la qualité de l'eau les rend plus aptes à identifier les parcelles qu'il est pertinent de préempter. La préemption reste théoriquement possible mais elle peut s'avérer complexe à mettre en oeuvre car elle nécessite l'intermédiaire de la commune ou du groupement de communes qui lui a confié le service d'eau potable.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent article précise le régime des biens acquis, afin de garantir la mise en oeuvre effective dans la durée des mesures nécessaires à la protection de la ressource en eau, en mobilisant les dispositifs suivants :

• Les obligations réelles environnementales prévues par l'article L. 132-3 du code de l'environnement, en cas de cession des terrains par la collectivité (ou le groupement de collectivités),

• Les baux ruraux à clauses environnementales prévus par l'article L. 411-27 du code rural et de la pêche maritime, en cas de mise en location des terrains.

Le présent article étend par ailleurs le bénéfice du droit de préemption prévu aux articles L. 218-1 à L. 218-14 du code de l'urbanisme aux syndicats mixtes compétents pour assurer le service d'eau potable.

Il permet également de déléguer l'exercice de ce droit de préemption aux régies dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière visées à l'article L. 2221-10 du CGCT, lorsque ceux-ci se sont vu confier l'exploitation du service d'eau potable.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Ne rien faire. Dans la mesure où la rédaction actuelle de la loi ne permet pas de garantir la mise en oeuvre des mesures nécessaires pour assurer la protection de la ressource en eau, ce droit de préemption s'avère inopérant.

Se limiter aux modifications visant à clarifier le régime des biens acquis. Cette option conduirait à exclure du bénéfice du droit de préemption les territoires sur lesquels le service d'eau potable est assuré par un syndicat mixte. Elle empêcherait les régies dotées de la personnalité morale et de l'autonomie d'exercer directement ce droit (la préemption resterait théoriquement possible mais serait plus complexe car l'intermédiaire de la commune ou du groupement de communes serait nécessaire).

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue consiste à :

- autoriser la mise à bail des biens acquis à condition que les baux nouveaux comportent des clauses environnementales au sens du troisième alinéa de l'article L. 411-27 du code rural et de la pêche maritime, de manière à garantir ma préservation de la ressource en eau. Dans le cas où le bien acquis est grevé d'un bail, imposer à l'acquéreur de proposer au preneur l'introduction de clauses environnementales dans le bail, au plus tard lors du renouvellement du bail ;

- autoriser la cession des biens acquis à condition que les nouveaux acquéreurs se conforment à un cahier des charges comportant des obligations réelles environnementales au sens de l'article L. 132-3 du code de l'environnement destinées à préserver la ressource en eau ;

- - étendre le bénéfice du droit de préemption prévu aux articles L. 218-1 à L. 218-14 du code de l'urbanisme aux syndicats mixtes compétents pour assurer le service d'eau potable ;

- permettre aux communes, groupements de communes et syndicats mixtes compétents pour assurer le service d'eau potable de déléguer le bénéfice de ce droit de préemption à une régie dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière visée à l'article L. 2221-10 du code général des collectivités territoriales à laquelle est confiée l'exploitation du service d'eau potable.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie les articles L. 218-1, L. 218-3, L. 218-4, L. 218-8, L. 218-11, L. 218-12 et L. 218-13 du code de l'urbanisme.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

L'impact financier lié à l'acquisition devrait être limité pour les syndicats mixtes et les régies dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière visée à l'article L. 2221-10 du CGCT, par rapport à la situation actuelle. Ceux-ci peuvent dès à présent acquérir des terrains (soit à l'amiable, soit par l'intermédiaire des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural). Le projet d'article ne fait que leur octroyer une facilité nouvelle pour l'acquisition des terrains dans l'optique d'une meilleure protection de la ressource en eau.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les services de l'État sont en charge de l'instruction des demandes d'instauration du droit de préemption.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Lorsque le droit de préemption est instauré par l'autorité administrative à la demande d'un syndicat mixte, les particuliers, qui souhaitent vendre des terres agricoles, doivent transmettre au préalable une déclaration d'intention d'aliéner au titulaire de ce droit ou à son délégataire (cette obligation existe déjà lorsque le droit de préemption est institué au bénéfice d'une commune ou d'un groupement de communes).

4.5. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Cet article permet de rendre opérant le droit de préemption pour la préservation des ressources en eau destinées à la consommation humaine. Il renforce les capacités à agir des syndicats mixtes et des régies dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière (article L. 2221-10 du CGCT) pour protéger les ressources en eau destinées à la production d'eau potable.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION.

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article R. 213-13 du code de l'environnement, ces dispositions ont été soumises pour avis à la Mission interministérielle de l'eau.

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, ces mêmes dispositions ont été soumises au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. 5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Ces dispositions (de même que l'ensemble des dispositions de l'article 118 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique) pourront s'appliquer dès le lendemain de la publication du décret précisant les modalités d'applications.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

La mesure envisagée, de même que l'ensemble des dispositions de l'article 118 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, requiert un décret en Conseil d'État pour venir en préciser les modalités d'application. Ce décret d'application est prévu à l'article L. 218-14 du code de l'urbanisme.

Article 61 : Clarifier l'application de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière afin de permettre à toute personne publique ou privée intéressée d'apporter un concours financier aux ouvrages et aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutière

1. ÉTAT DES LIEUX

L'article L. 122-4 du code de la voirie routière, tel qu'interprété par la jurisprudence du Conseil d'État, prévoit que les contributions des tiers au financement d'ouvrages ou d'aménagements des réseaux ne sont possibles que par l'intermédiaire des collectivités territoriales ou de l'État.

Cette interprétation complexifie la structuration des projets.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Lors de sa séance du 10 juillet 2020 organisée à l'occasion de l'examen du projet de 19 ème avenant au contrat de concession entre l'État et la société COFIROUTE, la section des Travaux publics du Conseil d'État a livré une interprétation nouvelle du 4 ème alinéa de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière en vigueur depuis 2016, en considérant que cet article excluait tout financement par une personne privée d'ouvrages ou d'aménagements apportés à une infrastructure autoroutière concédée. Cette interprétation fait une application stricte de la rédaction du code qui indique que l'Etat et les collectivités territoriales intéressées peuvent à titre exceptionnel apporter des concours. Elle considère en effet que seules ces deux catégories de personnes publiques ont cette faculté, à l'exclusion de toute autre catégorie de co-financeur. Or, dans le cadre de précédents avenants à des contrats de concession, notamment ceux découlant du plan d'investissement autoroutier de 2018, le Conseil d'Etat ne s'était pas opposé à la réalisation d'investissements faisant appel à des financements privés ou d'établissements publics.

Cependant, cette restriction pose des difficultés car certains ouvrages ou aménagements autoroutiers, tels que les diffuseurs 219 ( * ) , peuvent concerner des personnes privées (aménageurs, industriels, carriers...) ou des personnes publiques autres que l'État et les collectivités territoriales (établissements publics d'aménagement, grands ports maritimes...) dont la contribution serait légitime en tant qu'acteurs intéressés au premier plan par leur utilisation. Il peut s'agir par exemple de diffuseurs réalisés ou complétés afin d'assurer ou d'améliorer la desserte d'une nouvelle zone commerciale ou d'activités, d'une opération d'aménagement ou de tout autre équipement générateur de trafic.

Sans être courantes, de telles contributions ont déjà été mises en oeuvre dans le passé. Deux projets du plan d'investissement autoroutier de 2018 retiennent ainsi de tels schémas de financement, et des projets en cours d'études sont susceptibles de bénéficier du concours financier de tels acteurs.

Il est donc nécessaire de corriger la formulation actuelle de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière de manière à sécuriser juridiquement de telles contributions au financement d'ouvrages ou d'aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutiers, pour réduire l'impact sur les finances publiques ou sur les péages.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La disposition qu'il est envisagé de modifier a été introduite par l'article 20 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. L'intention du législateur n'était pas d'interdire le financement d'ouvrages ou d'aménagements des réseaux concédés par des tiers mais, au contraire, de réduire le recours à l'usager et aux contribuables, ce qui est le but recherché par la modification proposée au travers du présent article.

3. DISPOSITIF RETENU

Le présent article prévoit explicitement que la contribution financière des tiers au financement d'ouvrages ou d'aménagements nécessaires et utiles au réseau autoroutier concédé est possible.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article clarifie l'article L. 122-4 du code de la voirie routière et sécurise les cofinancements apportés par les tiers intéressés, privés (carriers, industriels, etc...) ou publics (collectivités locales étrangères par exemple), aux projets d'ouvrages ou d'aménagements du réseau autoroutier concédé. Il n'y a pas de nécessité de prévoir des ajustements sur d'autres articles en partie législative.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

Cette mesure est sans impact sur les sociétés concessionnaires, en ce qu'elle est sans incidence sur le montant des investissements utiles et nécessaires à l'aménagement du réseau. Elle ne vise qu'à réduire la participation des collectivités territoriales et des usagers (cf. partie 4.3).

4.2.2. Impacts budgétaires

S'il n'y a pas d'impact pour l'État, celui-ci ne participant pas sous forme de concours budgétaire aux ouvrages ou aménagements du réseau autoroutier concédé, il est en revanche non négligeable pour les collectivités territoriales (cf. partie 4.3).

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Si la disposition est générale, elle vise en pratique des aménagements tels que les diffuseurs, les plus à même de concerner l'ensemble des acteurs des territoires.

Pour ce type d'aménagement, la clé de financement est classiquement, pour la partie non « auto-financée » par les recettes propres de l'aménagement, la suivante :

- financement répercuté sur le péage de l'ensemble des usagers : entre 0 et 50% ;

- financement pris en charge par les collectivités territoriales intéressées : entre 50 et 100%.

On peut donc retenir comme clé de financement moyenne : usagers = 25% / collectivités = 75%.

Le coût d'un diffuseur dépend de manière très sensible de son environnement, du niveau de trafic et de sa complexité. On peut toutefois retenir pour les besoins de la présente étude un coût médian de 25 M€.

Sur la base d'un autofinancement de 20%, le coût net pour les collectivités territoriales et l'ensemble des usagers s'élève à 20 M€, soit une prise en charge par les collectivités de 15 M€ (75%).

En considérant que les acteurs économiques du territoire, personnes privées (aménageurs, carriers, industriels...) ou publiques (établissement public, grand port maritime...), participeraient - grâce à la mesure proposée - au tour de table à hauteur de 25%, la part des collectivités territoriales qui en résulterait serait ramenée à 11,25 M€.

Pour un aménagement normalisé sur le réseau autoroutier concédé répondant à l'expression de besoins locaux susceptible d'intéresser des personnes publiques ou privées tierces aux collectivités territoriales, l'économie pour les collectivités intéressées au projet pourrait donc être de l'ordre de3,75 M€, soit un montant équivalent à 16% du coût total de l'aménagement, celui-ci s'élevant à 25 M €.

A toutes fins utiles, il peut être rappelé qu'en tout état de cause, la participation des tiers au financement d'opérations d'aménagement du réseau concédé est facultative.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Sur la base de l'exemple chiffré développé supra au point 4.3, d'un coût médian d'un diffuseur de 25 M€ et d'un autofinancement de 20%, le coût net pour les collectivités et l'ensemble des usagers s'élève à 20 M€, soit une prise en charge par les usagers de 5 M€ (25%).

En considérant que les acteurs économiques du territoire, personnes privées (aménageurs, carriers, industriels...) ou publiques (établissement public, grand port maritime...) participeraient - grâce à la mesure proposée - au tour de table à hauteur de 25%, la part des usagers qui en résulterait serait ramenée à 3,75 M€.

Pour un aménagement normalisé sur le réseau autoroutier concédé répondant à l'expression de besoins locaux susceptible d'intéresser des personnes publiques ou privées tierces aux collectivités territoriales, l'économie pour les usagers pourrait donc être de l'ordre de 1 M€, soit un montant équivalent à 4% du coût total de l'aménagement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'application sera immédiate le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République - s'agissant d'une modification concernant le réseau autoroutier concédé.

Article 62 : Clarifier le régime de protection des alignements d'arbres

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Actuellement, le régime juridique de protection des allées et alignements d'arbres qui bordent les voies de communication est prévu à l'article L. 350-3 du code de l'environnement, issu des dispositions de l'article 172 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

L'article L. 350-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction actuelle, pose le principe de la protection des allées d'arbres et alignements d'arbres qui bordent les voies de communication et prévoit que le fait d'abattre, de porter atteinte à l'arbre, de compromettre la conservation ou de modifier radicalement l'aspect d'un ou de plusieurs arbres d'une allée ou d'un alignement d'arbres est interdit 220 ( * ) , sauf lorsqu'il est démontré que l'état sanitaire ou mécanique des arbres présente un danger pour la sécurité des personnes et des biens ou un danger sanitaire pour les autres arbres ou bien lorsque l'esthétique de la composition ne peut plus être assurée et que la préservation de la biodiversité peut être obtenue par d'autres mesures.

L'article prévoit également que des dérogations peuvent être accordées par l'autorité administrative compétente pour les besoins de projets de construction, l'autorité administrative compétente n'étant pas précisée dans les textes. A cet égard, il convient de noter qu'il est de jurisprudence constante que ces arbres constituent une dépendance ou un accessoire de la voie publique et appartiennent au domaine public routier (CE, 28 juillet 1999, n°194385 ; CAA de Lyon, 18 novembre 1999, n° 96LY20384 ; CAA de Bordeaux, 20 décembre 2007, 05BX00736).

L'article L. 350-3 dans sa rédaction actuelle précise enfin que l'abattage ou l'atteinte à un arbre doit donner lieu à des mesures compensatoires comprenant un volet en nature (plantations) et un volet financier destiné à assurer l'entretien ultérieur.

Le régime de protection des allées et alignements d'arbres tel que prévu par l'article L. 350-3 du code de l'environnement comporte des ambiguïtés rédactionnelles et pose des difficultés d'application. Cette situation conduit à des incertitudes juridiques donnant lieu à des recours contentieux, ralentissant inutilement les délais de réalisation des infrastructures routières faute d'un régime clair et précis, comme l'illustre l'ordonnance du 20 septembre 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg (n°1805601) qui a suspendu une décision du préfet au titre de doute sérieux sur la compétence de l'auteur de l'acte. Aujourd'hui, l'ensemble des acteurs souligne la nécessité de clarifier le régime applicable et par là même de sécuriser les porteurs de projets.

En effet, l'article L. 350-3, dans sa rédaction actuelle, manque de précision dans les champs réglementés et il ne désigne pas explicitement l'autorité administrative compétente en charge de délivrer des dérogations permettant des abattages d'arbres pour les besoins de projets de construction (même si la fiche de présentation de cet article, diffusée en novembre 2017 par le ministère chargé de l'environnement désignait le gestionnaire des voies de communication concernée comme « l'autorité administrative compétente » ; ainsi, pour illustration, le président du conseil départemental pourrait être considéré comme compétent pour accorder des dérogations sur les allées et alignements d'arbres bordant les routes départementales et le maire pour les routes communales). Il contient des contradictions sur les procédures nécessaires pour pouvoir porter atteinte aux alignements protégés (existence dans certains cas d'exceptions au principe de protection et, pour les projets de construction, nécessité d'une dérogation accordée par l'autorité administrative). Il ne précise pas non plus les mesures compensatoires attendues en cas d'abattage d'arbres ni la notion de voie de communication.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Confier au préfet le soin de délivrer des autorisations pour permettre à un propriétaire ou un gestionnaire d'alignement ou d'allée d'arbres de procéder à son abattage porte une atteinte au droit de propriété qui, pour être constitutionnelle, doit être proportionnée à l'objectif recherché. La limitation du droit de propriété est en effet constitutionnellement possible si elle repose sur un objectif d'intérêt général et si elle est proportionnée à cet objectif.

En effet, la propriété figure au nombre des droits de l'Homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789. Si la protection des alignements d'arbres n'a pas pour effet de déposséder le propriétaire des arbres, force est de constater qu'elle constitue une limite à l'exercice de son droit de propriété.

Or, le Conseil Constitutionnel considère qu'en l'absence de privation du droit de propriété, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les limites apportées à son exercice doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi (2010-60 QPC, 12 novembre 2010, Cons. 3, Journal officiel du 13 novembre 2010, Rec. p. 321).

En l'espèce, il ressort bien des débats parlementaires lors de l'examen de l'adoption de cet article dans le cadre de la loi du 8 août 2016 précitée et du premier alinéa de l'article L. 350-3 du code de l'environnement, qui dispose que « Les allées d'arbres et alignements d'arbres qui bordent les voies de communication constituent un patrimoine culturel et une source d'aménités, en plus de leur rôle pour la préservation de la biodiversité et, à ce titre, font l'objet d'une protection spécifique. Ils sont protégés, appelant ainsi une conservation, à savoir leur maintien et leur renouvellement, et une mise en valeur spécifiques », que le régime de protection des alignements d'arbres mis en place par cet article est bien justifié par un motif d'intérêt général. Les restrictions au droit de propriété qu'il institue apparaissent proportionnées à l'objectif poursuivi, puisqu'elles peuvent être levées sur autorisation spéciale pour des raisons sanitaires, de sécurité, tenant à l'esthétique de la composition ou pour les besoins de projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Seule une loi peut permettre de modifier le régime de protection des allées et alignements d'arbres qui bordent les voies de communication, dont les grands principes sont actuellement prévus à l'article L. 350-3 du code de l'environnement.

En outre, pour maintenir la cohérence d'un permis unique environnemental au travers de la procédure d'autorisation environnementale prévue par l'article L. 181-1 du code de l'environnement, il est prévu que l'autorisation spéciale de porter atteinte aux allées et alignements d'arbres puisse être délivrée à l'occasion de cette procédure, dès lors que l'aménagement à réaliser requiert une autorisation environnementale.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La présente mesure vise à améliorer le dispositif juridique existant ; elle n'allège pas le niveau de protection attaché aux allées et alignements d'arbres qui bordent les voies de communication tel que voulu par les parlementaires lors de son instauration par la loi du 8 août 2016 précitée.

Elle prévoit en parallèle une simplification procédurale pour le porteur de projet qui doit obtenir une autorisation environnementale pour la réalisation de son aménagement. Cette procédure pourra également permettre de délivrer l'autorisation spéciale requise par l'article L. 350-3 du code de l'environnement, au travers de l'arrêté préfectoral portant autorisation environnementale.

3. DISPOSITIF RETENU

Afin d'améliorer la protection des allées et alignements d'arbres qui font partie du patrimoine naturel et culturel, la présente mesure désigne le préfet de département comme l'autorité administrative compétente qui se prononcera à l'avenir sur les atteintes éventuelles auxdits arbres, ce qui impliquera que le préfet se prononce sur les cas où les alignements d'arbres bordent les routes des collectivités territoriales.

Il clarifie la procédure en ne retenant qu'une autorisation spéciale et en précisant que les mesures compensatoires doivent être proposées par le pétitionnaire. Il remplace enfin la notion de « voie de communication » par celle de « voie ouverte à la circulation publique » déjà utilisée par le code de l'environnement pour la publicité (L. 581-2 et R. 581-1). Si, au regard des débats parlementaires lors de la loi du 8 août 2016, l'idée initiale était de protéger les allées et alignements d'arbres qui bordent les routes, cette notion de "voie ouverte à la circulation publique" est toutefois plus large que les seules routes puisqu'elle peut aussi concerner des allées et alignements d'arbres bordant des voies navigables ou des voies privées ouvertes à la circulation. Le champ de la loi n'est pour autant pas modifié.  Toutefois, cette mesure peut avoir pour conséquence de soumettre à autorisation du préfet l'abattage d'arbres situés sur le domaine privé d'une personne privée. Se posera ainsi la justification apportée à la restriction du droit de propriété pour ces propriétaires même si cette restriction du droit de propriété peut être justifiée par un intérêt général. Ainsi, dans une décision de 2011, le Conseil d'État a considéré que l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme ( qui prévoit également une autorisation préalable ) apporte effectivement des restrictions à l'exercice du droit de propriété, tout en jugeant qu'elles étaient justifiées par l'intérêt général qui s'attache à la préservation des espaces boisés et étaient proportionnées à l'objectif poursuivi (CE, 17 février 2011, n° 344445, publié au Recueil Lebon).

Ces clarifications sont de nature à renforcer, sous l'égide d'une autorité unique, l'effectivité du régime de protection de ces allées et alignements d'arbres tout en permettant d'obtenir des autorisations lorsque des abattages sont nécessaires, dans des conditions objectivées et donc de nature à réduire les contentieux. En effet, la demande d'autorisation spéciale comprend l'exposé des mesures de compensation des atteintes portées aux alignements et allées d'arbres que le pétitionnaire s'engage à mettre en oeuvre. Le préfet de département apprécie le caractère suffisant de ces mesures avant de délivrer l'autorisation. En cas de danger imminent pour la sécurité des personnes, la demande d'autorisation spéciale n'est pas requise, sous réserve d'en informer sans délai le préfet et de lui présenter pour approbation les mesures de compensation.

Les modalités prévues s'inspirent des régimes de protection prévus au livre III du code de l'environnement qui nécessite une autorisation spéciale de travaux délivrée par le représentant de l'État dans le département.

Ces modifications répondent aux échanges parlementaires en 2016 devant une situation d'atteinte trop forte aux alignements d'arbres par des gestionnaires de voiries.

Il est enfin précisé que les dérogations accordées pour les besoins de projets de construction correspondent aux projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La présente mesure modifie l'article L. 350-3 du code de l'environnement et sécurise les projets d'infrastructures.

L'autorisation sera délivrée par le préfet de département selon des modalités qui pourront être prévues par décret.

Le champ des autorisations couvertes par l'autorisation environnementale est complété pour pouvoir délivrer également l'autorisation spéciale requise par l'article L. 350-3 du code de l'environnement.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La présente mesure, en désignant le préfet de département comme autorité compétente pour délivrer l'autorisation, a pour conséquence de limiter très fortement les cas dans lesquels cette autorité compétente se retrouve à la fois juge et partie dans la mesure où, par exemple, elle serait en tant que gestionnaire de voirie à l'origine des projets d'aménagements, de travaux ou d'ouvrages justifiant d'obtenir ces autorisations. En effet, la grande majorité des routes sont désormais la propriété des collectivités territoriales et non de l'Etat. Cette mesure permet aux collectivités territoriales de solliciter le préfet de département pour être autorisées à procéder à des abattages d'arbres bordant leurs voies dans le cadre des dispositions de l'article L. 350-3 du code de l'environnement. Si cela peut en première lecture restreindre la capacité de décision des collectivités territoriales qui résulte du régime juridique actuel et entrainer un allongement des délais liés à la nécessité de solliciter une demande d'autorisation auprès du préfet, cette mesure permet en réalité, en limitant les contentieux actuellement induits par les ambiguïtés rédactionnelles de l'article L. 350-3, de réduire les délais en évitant que les autorisations soient attaquées en justice par la voie du référé.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les demandes d'autorisation seront instruites par les services déconcentrés du ministère de la Transition écologique.

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La présente mesure permet d'assurer la bonne mise en oeuvre de l'article L. 350-3 du code de l'environnement en limitant les contentieux du fait de l'imprécision de la loi. Il permet également au préfet de département d'apprécier le caractère suffisant des mesures compensatoires à mettre en oeuvre.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera à compter du premier jour du deuxième mois après la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Textes d'application

Cette mesure pourra nécessiter un décret simple afin de préciser les modalités d'application du dispositif.

Article 63 : Sécurité des réseaux - simplifier la répartition des compétences en matière d'entretien des réseaux de distribution de gaz

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Il existe actuellement des situations disparates sur le statut des canalisations de gaz situées à l'amont du compteur (aussi appelées conduites d'immeubles / conduites Montantes - CICM). En effet, la majorité d'entre elles appartient à la concession et de ce fait leur surveillance et leur entretien sont à la charge du gestionnaire du réseau public de distribution de gaz mais certaines d'entre elles peuvent appartenir à la copropriété ou au propriétaire du logement, notamment dans le cas des « bouts parisiens » (à l'intérieur du logement avant compteur). A Paris, pour des raisons historiques, ce sont 12 000 des 70 000 CICM, parties situées entre le robinet de coupure générale en pied d'immeuble et les installations intérieures au sein des immeubles d'habitats collectifs qui demeurent sous la responsabilité des copropriétés. Par ailleurs, pour les immeubles desservis en gaz basse pression avant le 1 er janvier 1994, la partie d'installation gazière comprise entre le robinet de coupure situé sur le palier et le compteur individuel de gaz est à Paris sous la surveillance du propriétaire de l'immeuble et non de l'autorité du gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel, conformément au contrat de concession pour le service public de la distribution de gaz naturel à Paris.

Il est rappelé qu'en application de l'article L. 432-1 du code de l'énergie, les autorités organisatrices d'un réseau public de distribution sont définies à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales (CGCT), les réseaux publics de distribution de gaz appartenant ainsi aux collectivités territoriales ou à leurs groupements. Le I de l'article L. 2224-31 dispose en particulier que « sans préjudice des dispositions de l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics de coopération, en tant qu'autorités concédantes de la distribution publique d'électricité et de gaz en application de l'article 6 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie et de l'article 36 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée, négocient et concluent les contrats de concession, et exercent le contrôle du bon accomplissement des missions de service public fixées, pour ce qui concerne les autorités concédantes, par les cahiers des charges de ces concessions. Les autorités concédantes précitées assurent le contrôle des réseaux publics de distribution d'électricité et de gaz. »

Cette diversité de situation conduit à une forte complexité préjudiciable à la sécurité, comme l'ont souligné le conseil général de l'économie et le conseil général de l'environnement et du développement durable 221 ( * ) , ainsi qu'à une inégalité de traitement entre des clients, dont les ouvrages sont intégrés à la concession, et des consommateurs de gaz, dont les ouvrages sont sous le régime de propriété privée. Ces derniers doivent, en plus de souscrire au tarif de distribution du gaz, supporter financièrement l'entretien, directement ou par leurs charges de copropriétés, de ces ouvrages. Alors que les consommateurs dont les ouvrages sont propriété publique, intégrés au domaine concédé, ne paient que le tarif d'acheminement.

Sur un champ plus large que la distribution publique de gaz qui est néanmoins le principal sujet concerné, les modalités de prise en charge des coûts de réparation des ouvrages de transport et de distribution (gaz, électricité, eau, télécommunication...), en cas d'endommagement au cours de travaux effectués à proximité, ne sont actuellement pas définies dans la loi. Il peut en résulter une iniquité notamment lorsque les entreprises, alors même qu'elles ont respecté l'ensemble de leurs obligations, endommagent un réseau pour lequel les informations sur leur localisation, fournies par leur exploitant, étaient erronées.

En matière de transfert de propriété d'ouvrages à l'intérieur des bâtiments, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) a clarifié le statut des installations électriques. Ainsi, elle précise que les colonnes montantes électriques font désormais partie du réseau public de distribution électrique et a instauré le transfert de propriété de ces installations durant une période donnée.

Dans le cadre des dix propositions pour améliorer l'avenir en liaison avec son rapport annuel 2019, le médiateur national de l'énergie propose dans sa recommandation n°10 qu'une disposition législative procède au transfert de propriété et à l'intégration au réseau de distribution de gaz de l'ensemble de l'installation située en amont du compteur, comme cela a été fait pour les colonnes montantes en électricité, afin de lever les incertitudes sur les responsabilités potentielles en cas d'accident.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Afin de pallier les difficultés exposées, il apparaît souhaitable de légiférer pour harmoniser, dans la partie législative du code de l'énergie, le statut des canalisations de gaz situées entre le réseau public de distribution et l'amont du compteur.

L'orientation retenue est un transfert de ces canalisations à la concession, sauf opposition du propriétaire, de manière à pouvoir assurer, par le gestionnaire de réseau de distribution de gaz, la surveillance et l'entretien de ces ouvrages afin d'en garantir la sécurité. En effet, les gestionnaires de réseau de distribution disposent d'une expertise certaine et de méthodes de contrôle et d'entretien éprouvées [I].

Néanmoins, dans certains bâtiments collectifs, les canalisations d'alimentation en gaz traversent des parties communes et des parties privatives. Il peut, par conséquent, arriver que les accès à ces différentes zones ne soient pas rendus possibles pour effectuer les contrôles réglementaires ou des opérations d'entretien. Il est donc nécessaire de modifier également les dispositions législatives du code de l'environnement qui permettent à un gestionnaire de réseau de distribution d'interrompre la livraison du gaz en cas de danger grave et immédiat, pour y intégrer le cas où un contrôle de ces ouvrages n'a pas pu être effectué du fait de l'opposition du propriétaire [2° du II].

En effet, la loi fixe les cas où un exploitant de réseau peut interrompre l'alimentation en gaz à un consommateur final, notamment en cas de danger grave et immédiat ou dans le cas des opérations de changement de gaz. Le cas où le propriétaire d'un bâtiment, dans lequel est présent une canalisation appartenant au réseau, s'oppose à un contrôle de cette canalisation n'est toutefois pas encore prévu.

[1° II] De même, concernant la prise en charge des coûts de réparation des ouvrages en cas d'endommagement au cours de travaux effectués à proximité, il est nécessaire de modifier les dispositions législatives du code de l'environnement, pour déroger aux présomptions de responsabilité de droit commun 222 ( * ) .

La responsabilité du fait personnel est une responsabilité pour faute prouvée. En effet, il appartient à la victime de démontrer la faute de celui qu'elle prétend rendre responsable, le lien de causalité et le dommage.

C'est sur la condition de la faute que la disposition prévue vient clarifier le droit, car autant la faute de l'entreprise réalisant les travaux est légitimement présumée lorsque le dommage est localisé dans la bande où les précautions particulières (définie suivant la cartographie des réseaux), autant elle est présumée absente lorsque le dommage est au-delà. Il est donc nécessaire de préciser que dans cette hypothèse et en l'absence d'autre indice, d'imprudence ou de négligence caractérisée, la faute n'est pas présumée être celle de l'entreprise réalisant les travaux. Tel est l'objet du 1° du II.

À l'inverse, le 3° du II prévoit des sanctions lorsque le fonctionnement du réseau est volontairement dégradé, restaurant une disposition qui préexistait et qui a été involontairement supprimée par une ordonnance.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent projet d'article entend, par conséquent :

- harmoniser le statut des canalisations de gaz situées en amont du compteur pour restaurer une cohérence globale [I] ;

- préciser les cas où un distributeur de gaz peut interrompre la livraison du gaz en cas de danger grave et immédiat [2° II] ;

- clarifier les modalités de prise en charge des coûts de réparation des ouvrages de transport et de distribution (gaz, électricité, eau, télécommunication...) en cas d'endommagement au cours de travaux effectués à proximité [1° II] ;

- restaurer un mécanisme de sanction pénale en cas d'atteinte volontaire au bon fonctionnement du réseau [3° II].

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Une option serait de procéder au transfert des canalisations de gaz situées entre le réseau public de distribution et l'amont du compteur avant une échéance donnée. Toutefois, une telle mesure ne prendrait pas en compte les situations disparates actuelles sur le statut de ces canalisations, notamment les parties de canalisation se situant à l'intérieur de la partie privative du logement jusqu'au dispositif de comptage, lorsque ce dernier est à l'intérieur du logement. Ces parties d'installations ne sont pas connues par les exploitants de réseaux de distribution. Il semble, par conséquent, nécessaire qu'avant leur intégration, les exploitants puissent procéder à une visite de ces parties d'installations afin de vérifier leur bon état de fonctionnement.

3.2. OPTION RETENUE

Pour le transfert des canalisations de gaz situées entre le réseau public de distribution et l'amont du compteur, le dispositif suivant est prévu.

À compter de la publication de la loi, toute nouvelle canalisation située en amont des dispositifs de comptage appartiendra au réseau public de distribution de gaz.

Pour les canalisations existantes situées en amont des dispositifs de comptage, qui ne seraient pas déjà intégrées à la concession, jusqu'au 30 juin 2023, leurs propriétaires pourront revendiquer la propriété de ces canalisations. A défaut, les parties de ces canalisations extérieures au logement seront transférées sans contrepartie au réseau public de distribution de gaz à cette date.

Pour les parties de canalisation se situant à l'intérieur du logement jusqu'au dispositif de comptage, le transfert ne prendra effet qu'après une visite de l'installation, effectuée sous la responsabilité du gestionnaire de réseau. Si le gestionnaire du réseau n'a pas procédé à cette visite avant le 1er juillet 2026, les parties de canalisations sont réputées transférées au réseau public de distribution à cette date.

Il est enfin prévu pour les propriétaires ayant revendiqué la propriété des ouvrages la possibilité de les transférer ultérieurement, mais dès lors qu'ils sont dans un bon état de fonctionnement (la remise en état étant, le cas échéant, à leur charge) et non plus de plein droit.

Les coûts associés aux contrôles liés à ces transferts de canalisations seront couverts par les tarifs d'utilisation des réseaux de distribution. Ces dispositions limitent l'impact économique du transfert des colonnes montantes pour les gestionnaires de réseaux de distribution de gaz. »

Concernant la prise en charge des coûts de réparation des réseaux endommagés, il est prévu que sauf si le dommage résulte directement d'une imprudence ou d'une négligence caractérisées, dès lors que l'endommagement intervient au-delà d'une certaine distance par rapport aux données de localisation fournies par l'exploitant, ils ne puissent être imputés ni au responsable de projet ni à l'exécutant des travaux.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Une nouvelle section « Canalisations en amont des dispositifs de comptage » sera créée dans le chapitre II du titre III du code de l'énergie et l'article L. 452-1-1 de ce même code sera modifié.

Les articles L. 554-1 et L. 554-10 du code de l'environnement seront modifiés et un nouvel article L. 554-12 sera créé.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

[I, 2° II] Le transfert des canalisations situées en amont du compteur sera effectué à titre gratuit, sans contrepartie pour le gestionnaire de réseau.

Les dispositions prévoient que le coût des opérations de transfert et notamment la visite préalable pour les parties de canalisation se situant à l'intérieur de la partie privative du logement (estimées à environ 120 euros par tronçon en tout, avec de l'ordre de 750 000 tronçons concernés, soit environ 90M€) sera répercuté dans le tarif d'utilisation des réseaux de gaz, et non pas facturé directement aux particuliers concernés. Afin de limiter l'impact économique pour les gestionnaires de réseau de distribution de gaz, une disposition est prévue pour préciser que le transfert de propriété des canalisations ne conduit pas à la constitution de provisions pour le renouvellement de ces canalisations.

[1° et 3° II] Les dispositions relatives à la prise en charge des coûts de réparation des ouvrages ne conduisent pas à de nouveaux impacts. Elles viennent uniquement clarifier la répartition des coûts entre les différents acteurs, sans préjudice d'actions civiles intervenant entre eux et les dispositions relatives aux atteintes volontaires à leur fonctionnement viennent restaurer un mécanisme de sanction pénale.

4.3. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

[I, 2° II] En clarifiant le statut des canalisations de gaz situées entre le réseau public de distribution et l'amont du compteur, ces dispositions participent à l'égalité de traitement de l'ensemble des consommateurs raccordés à un réseau de distribution de gaz. Le coût moyen annuel d'entretien d'une conduite d'immeuble et d'une conduite montante hors concession s'élève à 250 euros.

4.4. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

[I, 2° II] Dans la majorité des cas, les contrats de concession pour le service public de la distribution de gaz s'appliquent déjà aux canalisations situées entre le réseau de distribution et jusqu'à l'amont du compteur.

Dans de rares cas particuliers, certaines collectivités territoriales effectuant l'entretien et la gestion des réseaux de distribution public de gaz pourraient être concernées par ces mesures sous réserve que l'entretien du réseau ne soit actuellement effectué que jusqu'à l'organe de coupure générale du bâtiment. A titre d'exemple, REGAZ (ELD bordelaise) applique déjà ces mesures et effectue l'entretien des CICM, à ses frais.

Dans tous les cas et quel que soit l'ELD ces opérations seront couvertes par le tarif d'acheminement du gaz.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

[I, II] Ces dispositions sont issues de plusieurs amendements déposés et votés dans le cadre du projet de loi relative à l'accélération et à la simplification de l'action publique (ASAP). Elles ont cependant été censurées par le Conseil Constitutionnel qui a considéré que celles-ci ne présentaient pas de lien, même indirect, avec celles du projet de loi initial.

[I, 2° II, 3° II] Les dispositions concernant le transfert des canalisations et les atteintes volontaires à leur fonctionnement ont fait l'objet d'échanges avec les gestionnaires de réseau de distribution de gaz.

[1° II] Les dispositions relatives à la prise en charge des coûts de réparation des ouvrages en cas de dommage ont fait l'objet d'une consultation préalable du public. En effet, il avait été initialement envisagé d'intégrer ces dispositions dans la partie réglementaire du code de l'environnement et la consultation du public a été effectuée dans ce cadre 223 ( * ) . Toutefois, lors de l'examen du projet de décret par le Conseil d'État, celui-ci, sans remettre en cause le bien-fondé des dispositions envisagées, a considéré que ces dispositions relevaient du niveau législatif et non réglementaire.

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

[I, 2° II] Le transfert de propriété des canalisations interviendra, sauf revendication contraire du propriétaire, au plus tard le 1 er juillet 2023. Toutefois, des conditions particulières de transfert sont prévues pour les parties de canalisation se situant à l'intérieur de la partie privative du logement jusqu'au dispositif de comptage, lorsque ce dernier est à l'intérieur du logement. En effet, à l'inverse des conduites d'immeubles et conduites montantes situées dans les parties communes, ces parties d'installations ne sont pas connues par les exploitants de réseaux de distribution. Par conséquent, il semble nécessaire qu'avant leur intégration dans la concession, les exploitants puissent procéder à une visite de ces parties d'installations. Compte tenu du nombre d'installations concernées, il est nécessaire de pouvoir rationaliser ces visites et donc de laisser un délai. Ainsi, pour ces parties de canalisations et sauf revendication contraire du propriétaire, le transfert interviendra au plus tard le 1 er juillet 2026.

[1° et 3° II] Les dispositions relatives à la prise en charge des coûts de réparation des dommages aux réseaux et aux atteintes volontaires à leur fonctionnement entreront en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 64 : Permettre aux collectivités d'exiger des propriétaires la réalisation d'un diagnostic de leurs raccordements aux réseaux publics d'assainissement au moment de la vente d'un bien immobilier

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Dans l'état actuel du droit, l'article L. 1331-1 du code de la santé publique dispose que les immeubles doivent obligatoirement être raccordés aux réseaux publics d'assainissement établis sous la voie publique à laquelle ils ont accès soit directement, soit par l'intermédiaire de voies privées ou de servitudes de passage. Les propriétaires de ces immeubles disposent d'un délai de deux ans pour se raccorder à ces réseaux.

Au titre de leur compétence en matière d'assainissement, les collectivités doivent contrôler que ces raccordements sont correctement réalisés. L'exercice de cette mission serait largement facilité par le fait de rendre obligatoire la réalisation d'un diagnostic du raccordement des immeubles aux réseaux publics d'assainissement au moment de leur vente ou de tout appartement le composant. La vente d'un bien immobilier est en effet le moment le plus propice pour engager ce type de diagnostic et, le cas échéant, les travaux de mise en conformité des raccordements.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Pas de disposition constitutionnelle particulière.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les mauvais raccordements aux réseaux publics d'assainissement (eaux usées rejetées dans le réseau d'eaux pluviales et non dans le réseau d'assainissement ou eaux pluviales rejetées dans le réseau d'assainissement alors qu'il existe un réseau séparatif) sont à l'origine de pollutions importantes des milieux du fait de rejets directs d'eaux usées via les réseaux d'eaux pluviales ou de dysfonctionnement des systèmes d'assainissement via l'apport d'eaux pluviales. Il a été estimé à un peu plus d'un tiers la part de raccordements non conformes sur les 350 000 branchements concernés dans le cadre du plan d'action baignade en vue des Jeux Olympiques organisés à Paris en 2024 (35 000 seraient non conformes pour des eaux usées allant dans des réseaux d'eaux pluviales qui rejoignent directement les rivières et 88 000 seraient non conformes pour les eaux pluviales allant dans les réseaux d'eaux usées provoquant des déversements du mélange vers les rivières lors des pluies).

Pour répondre aux enjeux sanitaires pour le bon déroulement des épreuves olympiques prévues en Seine, il apparaît nécessaire qu'un diagnostic technique du raccordement au réseau public d'assainissement soit réalisé au moment des ventes immobilières.

Ce diagnostic est souhaité par les collectivités d'Ile de France car il permettra de compléter leur boite à outils pour l'exercice de leur compétence assainissement et ainsi assurer un bon fonctionnement de leur système d'assainissement et réduire les pollutions rejetées en Seine et en Marne.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent article entend modifier le 8° de l'article L. 271-4 et le 8° de l'article L. 126-23 du code de la construction et de l'habitation afin que le diagnostic demandé pour les installations d'assainissement non collectif porte également sur le raccordement au réseau public de collecte des eaux usées.

Il est également proposé de compléter le premier alinéa du II de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales pour préciser que le contrôle de raccordement au réseau public doit donner lieu à l'établissement et la transmission au propriétaire de l'immeuble d'un document décrivant le contrôle réalisé et évaluant la conformité du raccordement au regard des prescriptions réglementaires. Cet article est également complété afin de préciser la durée de validité de ce document (dix ans) ainsi que le délai maximum dans lequel la collectivité doit réaliser ce contrôle lorsque celui-ci est pris à l'initiative du propriétaire (un mois).

Afin de mieux articuler le code général des collectivités territoriales ainsi modifié et le code de la santé publique sur ce sujet, il est également proposé de modifier l'article L. 1331-4 du code de la santé publique.

Par ailleurs, il est proposé de modifier l'article L. 1331-11-1 pour que le document prévu au II de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales soit joint au dossier technique élaboré dans le cadre d'une vente immobilière dans les territoires ayant une incidence sur la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine. La loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 est également modifiée pour indiquer que les travaux prescrits par le document établi à l'issue du contrôle prévu au II de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales sont réalisés dans un délai de deux ans suivant la notification de ce document dans les territoires ayant une incidence sur la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine.

Enfin, il est proposé de prendre en compte le cas des copropriétés en créant pour le syndicat des copropriétaires une obligation de faire réaliser le contrôle du raccordement au réseau public d'assainissement. Il est précisé que le syndic doit tenir le document établi à l'issue de ce contrôle à la disposition des copropriétaires qui en ont la demande, notamment au moment de la vente de leur lot.

Il est proposé une entrée en vigueur échelonnée entre l'obligation pour la collectivité de produire un document à la suite du contrôle réalisé sur le raccordement au réseau public d'assainissement et six mois plus tard l'obligation que ce document soit joint aux diagnostics fournis au moment de la vente d'un bien immobilier.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTION ENVISAGÉE

Une seule option a été proposée et est donc retenue.

3.2. DISPOSITIF RETENU

- modifier le 8° de l'article L. 271-4 et le 8° de l'article L. 126-23 du code de la construction et de l'habitation afin que le diagnostic « assainissement » demandé au moment de la vente d'un bien immobilier équipé d'une installation d'assainissement non collectif concerne également les immeubles raccordés au réseau public d'assainissement ;

- compléter le premier alinéa du II de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales pour préciser que le contrôle de raccordement au réseau public, intervenant ou non à la demande d'un propriétaire, doit donner lieu à l'établissement et la transmission au propriétaire de l'immeuble d'un document décrivant le contrôle réalisé et évaluant la conformité du raccordement au regard des prescriptions réglementaires. Cet article est également complété afin de préciser la durée de validité de ce document (10 ans) ainsi que le délai maximum dans lequel la collectivité doit réaliser ce contrôle lorsque celui-ci est pris à l'initiative du propriétaire (1 mois) ;

- modifier l'article L. 1331-4 du code de la santé publique pour mieux articuler le code général des collectivités territoriales et le code de la santé publique sur la question du contrôle des raccordements au réseau public ;

- modifier l'article L.1331-11-1 du code de la santé publique, d'une part pour que le document prévu au II de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales soit joint au dossier technique élaboré dans le cadre d'une vente immobilière dans les territoires ayant une incidence sur la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine et, d'autre part, afin que le notaire adresse aux autorités compétentes concernées, au plus tard un mois après la signature de vente, une attestation contenant la date de la vente, les informations nécessaires pour identifier l'immeuble vendu ainsi que les nom et adresse de l'acquéreur ;

- modifier la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 pour indiquer que les travaux prescrits par le document établi à l'issue du contrôle prévu au II de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales sont réalisés dans un délai de deux ans suivant la notification de ce document dans les territoires ayant une incidence sur la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine ;

- modifier la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis pour prendre en compte le cas des copropriétés en créant pour le syndicat des copropriétaires une obligation de faire réaliser le contrôle du raccordement au réseau public d'assainissement.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

- Modification du code général des collectivités territoriales, en complétant l'article L. 2224-8, du code de la construction et de l'habitation, en modifiant le 8° de l'article L. 271-4 et le 8° de l'article L. 126-23, du code de la santé publique, en modifiant les articles L. 1331-4 et L. 1331-11-1 ;

- Modification de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ;

- Modification de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les modifications envisagées pourraient conduire à une augmentation du nombre de contrôles réalisés par les collectivités situées sur les territoires ayant une incidence sur la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine et pourraient donc avoir un impact budgétaire pour ces collectivités. Néanmoins, celui-ci pourrait être en tout ou partie compensé par un financement des propriétaires devant réaliser le diagnostic de raccordement et par les économies induites par une meilleure gestion et donc un meilleur fonctionnement de leurs systèmes d'assainissement.

Ces dispositions pourraient également avoir un impact financier pour les propriétaires concernés pour la réalisation du diagnostic et, le cas échéant, des travaux de mise en conformité. S'agissant de la réalisation des diagnostics, tout ou partie de ces dépenses pourrait être pris en charge par les collectivités conformément au règlement de service pris en application du L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales. S'agissant des éventuels travaux de mise en conformité, les programmes d'intervention de l'agence de l'eau Seine-Normandie prévoit déjà des aides financières pour les propriétaires qui doivent mettre en conformité leur raccordement au réseau public d'assainissement. De plus, il est proposé de faire réaliser ce diagnostic au moment de la vente des biens immobiliers et donc que son coût et celui, le cas échéant, de la réalisation des travaux de mise en conformité soient intégrés dans la négociation du prix de vente du bien immobilier, comme cela se fait déjà pour l'assainissement non collectif.

Ces dispositions pourraient également entraîner une augmentation d'activité pour les bureaux d'étude et entreprises réalisant ce type de diagnostic et les travaux de mise en conformité.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Ces dispositions permettent d'améliorer l'exercice des missions prévues au titre de la compétence assainissement.

4.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Ces dispositions auraient un impact positif sur l'environnement en réduisant le nombre de mauvais raccordements aux réseaux publics d'assainissement (eaux usées rejetées dans le réseau d'eaux pluviales et non dans le réseau d'assainissement ou eaux pluviales rejetées dans le réseau d'assainissement alors qu'il existe un réseau séparatif) qui sont à l'origine de pollutions importantes des milieux du fait de rejets directs d'eaux usées via les réseaux d'eaux pluviales ou de dysfonctionnement des systèmes d'assainissement via l'apport d'eaux pluviales. Elles permettront d'améliorer la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article R. 213-13 du code de l'environnement, la disposition envisagée a été soumise pour avis à la mission interministérielle de l'eau qui s'est réunie le 1 er décembre.

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, les dispositions envisagées ont été soumises au conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions de cet article entrent en vigueur le 1 er janvier 2023 à l'exception des dispositions prévoyant que le diagnostic « assainissement » soit joint au moment de la vente d'un bien immobilier (I du projet d'article) qui entrent en vigueur le 1 er juillet 2023. Par ailleurs, pour les territoires dont les rejets d'eaux usées et pluviales ont une incidence sur la qualité de l'eau pour les épreuves olympiques de nage libre et de triathlon en Seine, les dispositions du présent article entrent en vigueur le 1 er janvier 2022 à l'exception des dispositions prévoyant que le diagnostic « assainissement » soit joint au moment de la vente d'un bien immobilier (I du projet d'article) qui entrent en vigueur le 1 er juillet 2022.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat, prévu à l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, viendra préciser les modalités d'application de ces dispositions.

Article 65 : Habiliter le Gouvernement à réformer le droit de la publicité foncière par voie d'ordonnance

1. ÉTAT DES LIEUX

La publicité foncière est l'« ensemble des règles destinées à faire connaître aux tiers intéressés la situation juridique des immeubles par le moyen d'un fichier immobilier et la publicité des privilèges, des hypothèques et des autres droits portant sur ces immeubles » 224 ( * ) . Elle a pour principale finalité de rendre opposables aux tiers les transferts de propriété et de porter à leur connaissance les actes juridiques susceptibles de modifier la situation des immeubles. Elle constitue du reste un levier fiscal si l'on considère les taxes prélevées à l'occasion des formalités (taxe de publicité foncière, contribution de sécurité immobilière [CSI]) et, plus généralement, l'ensemble des impôts fonciers dont le recouvrement est rendu plus efficace grâce aux données du cadastre et du fichier immobilier.

Ainsi, « la publicité foncière - tout comme les sûretés réelles d'ailleurs- joue un rôle-clé, mais discret, dans l'efficacité des droits immobiliers, essentielle à la sécurité juridique, elle-même indispensable au développement économique. De là l'intérêt que lui portent aujourd'hui les pouvoirs publics » 225 ( * ) .

Cela étant, l'institution d'un véritable régime de la publicité foncière est relativement récente, celle-ci s'étant longtemps heurtée au refus de l'opinion publique de rendre transparentes les transactions et les opérations de crédit immobilières. A cet égard, encore plus qu'aujourd'hui, sous l'Ancien Régime, le patrimoine était essentiellement composé de biens immobiliers. Pendant longtemps, le secret des fortunes comme élément de liberté individuelle et de la vie privée prédomina sur le besoin de sécurité juridique et la noblesse s'opposa à l'instauration d'un système général de publicité de crainte que les hypothèques grevant leurs biens soient révélées. Une véritable opposition s'instaura entre les partisans de la transparence et les tenants du secret. Par la suite, les auteurs du code civil optèrent pour un système de compromis en consacrant le secret des transactions immobilières à titre onéreux et la publicité des hypothèques.

Surtout, l'absence d'identification précise des propriétés foncières sur le plan cadastral a longtemps été un frein à l'instauration d'un régime de publicité foncière fiable. A cet égard, la mauvaise connaissance des sols avait conduit à la mise en oeuvre d'un système de publication 226 ( * ) dont la documentation était fondée sur l'identité du propriétaire, du titulaire de droit réel ou du grevé et non sur l'identification de l'immeuble. Il en résultait que les immeubles étaient répartis dans de nombreux volumes sous le nom des personnes concernées, de sorte que le système de publicité foncière ne permettait pas d'avoir une connaissance certaine et rapide de la situation juridique de l'immeuble, objet des actes soumis à publicité.

Ce n'est qu'après la rénovation progressive du cadastre par les lois du 17 mars 1898 tendant à rendre plus rapide et plus économique la révision du cadastre, du 16 avril 1930 227 ( * ) et 7 décembre 1941 228 ( * ) , qu'un régime complet de la publicité foncière a pu être institué, avec la création d'un fichier immobilier, par le biais du décret-loi n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière et du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pris pour son application.

Ce corpus fondateur est également complété par diverses dispositions contenues dans différents codes, tels que le code des procédures civiles d'exécution et surtout le code civil, notamment dans ses articles 2426 à 2457 qui fixent le régime de l'inscription aux services de la publicité foncière des sûretés immobilières.

Initialement confié à un conservateur des hypothèques, sous sa responsabilité civile personnelle, le service public de la publicité foncière a été attribué, à compter de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2010-638 du 10 juin 2010 portant suppression du régime des conservateurs des hypothèques, aux services chargés de la publicité foncière (SPF), placés sous l'autorité de la direction générale des finances publiques (DGFIP).

Outre cette importante transformation organisationnelle, la publicité foncière fait l'objet d'une dématérialisation et d'une informatisation progressive qui a débuté en 1998 par la mise en place d'un fichier informatisé. Par la suite, Télé@ctes 229 ( * ) , logiciel permettant la transmission des données juridiques entre les notaires et les services de la publicité foncière, a permis de dématérialiser les échanges entre les services de la publicité foncière et les notaires, qui constituent les principaux usagers des SPF déposant 90% des formalités.

Le reliquat des formalités, non dématérialisées, est déposé par les avocats, les huissiers ou l'administration.

La mission de publicité foncière se décompose en deux tâches distinctes, strictement encadrées par les dispositions du code civil et les décrets de 1955 :

- la tenue du fichier immobilier qui passe par la distinction de la formalité de publication des actes et des inscriptions des sûretés immobilières ;

- la délivrance des renseignements détenus au fichier immobilier.

Concrètement, les 300 services de publicité foncière placés sous l'autorité de la DGFIP ont effectué en 2019 plus de 12 millions d'opérations, parmi lesquelles 1,7 millions de publications de transactions, 1 million d'autres publications (donations, partages et attestations après décès essentiellement), 1,5 million de sûretés (dont essentiellement des inscriptions de privilèges et des hypothèques) et plus de 7,1 millions de réponses à des demandes de renseignements hypothécaires d'usagers 230 ( * ) .

Contrairement à d'autres régimes de publicité foncière prévalant en Europe, la publicité foncière, telle qu'elle découle des décrets de 1955 précités et telle qu'elle est appliquée sur le territoire français à l'exception des cas particuliers de l'Alsace-Moselle 231 ( * ) et de Mayotte 232 ( * ) , n'est pas créatrice ou attributive de droits réels, mais simplement confortative de ces droits. A cet égard, la publicité de l'acte n'est ni une condition, ni une garantie de la validité du droit réel, objet de l'acte publié, et qui préexiste à sa publication.

Aussi la fonction première de la publicité est-elle d'assurer l'opposabilité aux tiers des droits sur les immeubles, de régler les conflits entre tiers concurrents, et ainsi de donner aux actes juridiques portant sur des immeubles leur pleine efficacité juridique. A cet égard, font notamment l'objet d'une publication obligatoire à peine d'inopposabilité aux tiers tous les actes portant ou constatant entre vifs, mutation ou constitution de droits réels immobiliers, ou encore les attestations notariées constatant la transmission ou la constitution par décès de droits réels immobiliers 233 ( * ) .

La publicité foncière joue ainsi un rôle fondamental dans la sécurisation des transactions immobilières mais également des financements bancaires, par l'inscription des sûretés immobilières garantissant ces financements 234 ( * ) .

Par ailleurs, le régime de la publicité foncière poursuit également un objectif d'information des usagers. A cet égard, la publication de certains actes, qu'elle ait été rendue facultative ou obligatoire, a pour seul objet l'information des tiers et ne sert donc pas, dans ce cadre-là, à régler un conflit de droits réels. Tel est le cas par exemple des actes qui consolident un droit précédemment publié, des demandes en justice ou encore des documents purement informatifs comme le règlement de copropriété ou le classement en monument historique 235 ( * ) . L'étendue des actes et documents publiés au fichier immobilier permet ainsi d'obtenir une photographie de la situation juridique de l'immeuble quasi-exhaustive.

Enfin, la publicité foncière joue un rôle fiscal important puisque « dès sa création, il a été décidé de confier la gestion de la publicité foncière à un service de l'administration fiscale 236 ( * ) ». L'exécution de la formalité de publicité foncière est l'occasion pour le service de la publicité foncière de percevoir les taxes et droits dus en la matière à savoir la taxe de publicité foncière (qu'elle tienne lieu ou non de droit d'enregistrement) et la contribution de sécurité immobilière. Au fil du temps, le rôle fiscal des services de la publicité foncière s'est étendu puisqu'ils perçoivent également la TVA immobilière des redevables non-assujettis, l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux dus au titre des plus-values immobilières des particuliers ou encore la taxe sur les terrains devenus constructibles.

Au regard de ces fonctions déterminantes tant pour les particuliers que pour l'Etat, le régime de la publicité foncière a été conçu pour répondre à un impératif de sécurité juridique, imposant d'assurer la fiabilité des informations publiées au fichier immobilier.

Sur le plan procédural , le régime de publicité foncière obéit à un formalisme très rigoureux tant en ce qui concerne la publication des actes que les inscriptions des sûretés immobilières.

Un certain nombre de mentions sont exigées. Dès lors que l'acte ou l'inscription d'une sûreté immobilière ne répond pas à ces règles formelles, le service de la publicité foncière est tenu d'opposer les sanctions prévues par les textes selon la gravité du manquement.

Les manquements les plus graves encourent le refus de dépôt. L'acte ou la sûreté faisant l'objet d'un refus n'est pas enregistré et ne peut donc prendre rang, il est réputé n'avoir jamais été présenté.

Les manquements pouvant être régularisés a posteriori et ne compromettant pas la sécurité juridique du fichier, font l'objet d'une procédure en deux temps de rejet de la formalité. La différence fondamentale avec la sanction du refus réside dans le fait que la formalité est enregistrée et prend rang dans l'attente de sa régularisation par le déposant.

Toutefois, certaines causes de refus ou de rejet établies du temps où le fichier était tenu manuellement n'apparaissent plus remplir l'objectif initial de sécurité juridique dans un contexte où l'informatisation et la dématérialisation ont modifié les travaux des services de la publicité foncière et ses relations avec les usagers.

Sur le fond , la formalité de publicité foncière repose sur deux conditions essentielles pour assurer la fiabilité du fichier immobilier, le principe d'authenticité et la condition de publication préalable de l'acte antérieur, dénommée « condition d'effet relatif ».

Le principe de l'authenticité des actes soumis à la publicité foncière, consacré dès 1955, a été introduit dans le code civil en 2011 237 ( * ) , avec la création au livre II relatif aux biens, d'un titre V intitulé « De la publicité foncière » où figure le seul article 710-1 qui dispose que « tout acte ou droit doit, pour donner lieu aux formalités de publicité foncière, résulter d'un acte reçu en la forme authentique par un notaire exerçant en France, d'une décision juridictionnelle ou d'un acte authentique émanant d'une autorité administrative».

La « condition d'effet relatif », quant à elle posée à l'article 3 du décret du 4 janvier 1955, impose, pour la publication d'un acte, que le titulaire du titre précédent ait été publié préalablement ou concomitamment. Ce principe permet d'établir un lien entre les formalités successives et permet d'assurer une continuité rigoureuse dans la chaîne des transmissions de droits réels.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NECESSITE DE LEGIFERER

Dès la publication du décret du 4 janvier 1955, la doctrine appelait de ses voeux une refonte des textes relatifs à la publicité foncière. On pouvait lire à l'époque que « le décret du 4 janvier 1955, s'il est un texte important, n'est pas la grande loi sur la publicité foncière que l'on pouvait souhaiter. [...] Il conviendra de refondre plus tard les textes relatifs à la publicité foncière » 238 ( * ) .

Pourtant, et alors qu'il a dû faire face à d'importantes évolutions techniques et organisationnelles, le droit de la publicité foncière est toujours essentiellement régi par ces mêmes textes, qui ont été très peu remaniés depuis soixante ans.

De fait, le décret du 4 janvier 1955 se révèle être un texte d'une grande technicité, ne respectant pas la hiérarchie des normes et comprenant aujourd'hui de nombreuses dispositions obsolètes ou difficilement appréhendables tant pour l'usager que pour les professionnels du droit.

Par ailleurs, la mission est actuellement confrontée à une dégradation de la qualité du service rendu par les services de la publicité foncière puisque les délais de publication sont quatre fois plus long qu'il y a dix ans.

Les causes sont multiples mais tiennent essentiellement à la conjugaison de la croissance du marché immobilier et de la baisse des effectifs, malgré la dématérialisation croissante des échanges.

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

11/2020

Délai (en jours au 31/12)

35

56

53

56

60

73

86

112

123

130

144

Cette dégradation du délai de traitement des publications 239 ( * ) n'est pas sans conséquence, d'une part, sur la sécurité juridique des transactions immobilières, et, d'autre part, sur l'attractivité de la France, les délais de réalisation de la publicité foncière ayant une incidence sur le rang de la France dans certains classements internationaux comme le « Doing Business » de la Banque Mondiale. Au titre du classement 2020 (diffusé fin 2019), la France figurait à la 32ème place 240 ( * ) .

Confrontés aux défis de l'informatisation et à la nécessité d'accélérer les processus tant de publication et d'inscription, que de délivrance des renseignements hypothécaires, l'idée d'une nécessaire modernisation du régime de la publicité foncière s'est imposée.

Partant de ces constats et guidés par une volonté commune de simplification et de modernisation du droit de la publicité foncière, le ministère de la Justice et le ministère de l'Economie, des Finances et de la Relance ont conjointement engagé une réflexion sur une possible rationalisation du régime de la publicité foncière.

Dans le prolongement de ce travail commun, le directeur des affaires civiles et du sceau et le directeur général des finances publiques ont confié au Professeur Laurent Aynès, Université Paris I Panthéon-Sorbonne, par lettre de mission en date du 2 novembre 2017, la présidence d'un groupe de travail pluridisciplinaire chargé d'élaborer un avant-projet de texte modernisant le régime de la publicité foncière 241 ( * ) . Une quinzaine de réunions ont été tenues par ce groupe, permettant notamment les auditions de parties prenantes qui ont manifesté une réelle attente d'une réforme de la publicité foncière pour en moderniser le fonctionnement et en faciliter l'accessibilité. Les conclusions de cette commission à la suite d'un travail dense et très technique sont présentées dans le rapport « Pour une modernisation de la publicité foncière », remis au ministre de la justice, garde des Sceaux, le 12 novembre 2018, par le Professeur Aynès.

En outre, il s'est également avéré nécessaire d'articuler la réforme de la publicité foncière avec le projet de réforme par voie d'ordonnance du droit des sûretés. Ce projet, en cours d'élaboration en application du 12° de l'article 60 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), s'appuie sur les conclusions du rapport rendu en mars 2005 par le Professeur Grimaldi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

S'appuyant sur les travaux de la Commission de réforme de la publicité foncière, l'objectif de la réforme envisagée n'est pas de remettre en cause les principes fondateurs de l'actuel système de publicité foncière ou d'en bouleverser le fonctionnement. Il s'agit plutôt de lui offrir un régime modernisé, simplifié et rationnalisé, par la création d'une théorie générale de la publicité foncière, codifiée dans le code civil, afin d'améliorer son accessibilité et de renforcer son efficacité juridique.

2.2.1. Moderniser et améliorer l'accessibilité au droit de la publicité foncière

Cette réforme présente avant tout un caractère très technique et formel, de codification du décret du 4 janvier 1955, nécessitant un travail minutieux d'expertise des 56 articles qui le composent.

Sur le plan formel et sur la base des conclusions de la Commission de réforme de la publicité foncière, il est envisagé de rassembler les dispositions de valeur législative régissant la publicité foncière contenues dans le décret du 4 janvier 1955 afin de poursuivre l'intégration du régime de la publicité foncière dans le code civil.

Celles-ci trouveront naturellement leur place au titre V « De la publicité foncière » du livre II du code civil. Ce regroupement permettra également de simplifier et de moderniser le langage utilisé pour rendre le droit de la publicité foncière plus accessible.

Il est envisagé de découper ce titre V en trois chapitres, le premier traitant des « actes soumis aux formalités de publicité foncière et des conséquences de leur accomplissement ».

Le deuxième, portant sur « l'exécution des formalités de publicité foncière », serait consacré aux conditions nécessaires à l'accomplissement de la formalité et à l'effectivité de cette dernière. Le principe de l'authenticité et celui de « l'effet relatif » seront réaffirmés par les nouveaux textes. La condition dite de « l'effet relatif » fera également l'objet d'une réécriture afin de rendre ce concept plus lisible et pour éviter la confusion avec l'effet relatif des contrats.

Le troisième chapitre, relatif au « fonctionnement de la publicité foncière », reprendrait les textes prévoyant le registre des dépôts ainsi que la délivrance de renseignements.

Il serait également proposé de modifier le titre II du livre IV du code civil relatif aux sûretés réelles et plus particulièrement, son chapitre IV portant sur l'inscription des privilèges et hypothèques, afin d'énoncer clairement les principes gouvernant l'inscription des sûretés réelles immobilières en tenant compte de l'acquis jurisprudentiel, sans en bouleverser les règles.

Par ailleurs, certaines règles, sources de complexité, seraient abandonnées. A cet égard, par exemple, dans un souci de clarification des règles d'opposabilité, l'abrogation de l'article 941 du code civil, devenu inutile, permettrait d'aligner l'opposabilité de la publication des donations immobilières sur le droit commun et de rejoindre ainsi la jurisprudence en la matière.

Enfin, les règles de refus de dépôt et de rejet de la formalité de publicité foncière auraient vocation à être rationnalisées et modernisées afin d'en améliorer la lisibilité. Les règles de refus de dépôts (170 000 refus par an ; 4 % des dépôts annuels) et de rejets de formalités (270 000 rejets par an ; 6 % des dépôts annuels) seraient ainsi simplifiées, avec l'objectif de passer d'une centaine à une trentaine de causes de refus et d'une centaine à une trentaine également de causes de rejets. Ce toilettage permettrait de simplifier les tâches de contrôle des services de publicité foncières et par là, de concourir à réduire le délai de publication. Il en est attendu un gain d'efficacité.

2.2.2. Renforcer l'efficacité du droit de la publicité foncière

D'un point de vue plus substantiel, la réforme devrait permettre de rationaliser le fonctionnement de la publicité foncière, en la recentrant sur ses objectifs primordiaux et en simplifiant son fonctionnement.

Cet effort de rationalisation permettra aux SPF de fluidifier leurs travaux et, par-là, d'oeuvrer à la réduction du délai actuel de publication.

Le rassemblement des textes autour des principes directeurs du droit de la publicité foncière s'accompagnera d'une révision tant des actes soumis à publication, que des règles de publication, afin de renforcer l'efficacité de ce droit.

Ø Recentrer le rôle de la publicité foncière autour de sa fonction d'opposabilité, en révisant la liste des actes soumis à publication

Le rôle de la publicité foncière sera recentré autour de sa finalité principale d'opposabilité aux tiers, et par conséquent, autour de sa fonction de sécurisation juridique de la propriété et des droits réels.

A cet effet, la liste des actes soumis à publication serait clarifiée et simplifiée autour des actes susceptibles de créer un conflit de droit réel ou encore autour des actes et des décisions de nature à modifier l'exercice ou le contenu d'un droit réel.

Serait ainsi abandonnée l'exigence de publication des actes portants sur des droits personnels, la formalité étant recentrée sur les seuls actes relatifs aux droits réels. Près de 20 000 baux de plus de douze ans ne seraient ainsi plus publiés 242 ( * ) .

En outre, ne feraient plus l'objet d'une publication au fichier immobilier, les formalités à simple vocation informative des tiers ou de l'administration, comme les limitations administratives au droit de propriété 243 ( * ) ou encore les classements en monument historique 244 ( * ) , lesdites réglementations faisant en tout état de cause l'objet de publicité ad hoc . Un peu moins de 10 000 autres actes de droits personnels seraient concernés.

Si moins d'1 % des actes ne seraient plus publiés, il s'agit là d'actes souvent complexes dégageant de forts gains de productivité.

La publicité foncière retrouverait ainsi sa fonction première d'opposabilité des actes et de prévention des conflits de droits réels.

Ø Améliorer la sécurité juridique du fichier immobilier en renforçant le principe dit « de l'effet relatif »

Outre la clarification des termes, il sera également proposé de renforcer le principe dit de « l'effet relatif », c'est-à-dire la condition de publication préalable de l'acte antérieur et d'en préciser la portée.

A cet égard, conformément aux préconisations de la Commission de réforme de la publicité foncière, et afin de mettre un terme à des pratiques divergentes, il pourrait être procédé à la généralisation de la publication du titre antérieur même lorsque le droit résulte d'un effet de la loi, que ce soit dans l'hypothèse par exemple d'un transfert légal de propriété immobilière ou encore en cas d'acquisition de la propriété par l'effet de l'usucapion.

En outre, la solution jurisprudentielle établie par un arrêt de la 3 ème chambre civile de la Cour de cassation, en date du 12 juin 1996, dit « arrêt Hédreul » 245 ( * ) , serait consacrée et étendue à toutes les publications, afin que le service de publicité foncière vérifie non seulement la publication du titre antérieur, mais également que ce titre n'a pas perdu son effet juridique, et ce afin d'éviter le risque d'une double chaine de propriété.

Avant cet arrêt, et en application du 2 ème alinéa du 2 de l'article 34 du décret du 14 octobre 1955, les conservateurs des hypothèques admettaient la publication d'un acte, même « lorsque le titre de la personne indiquée comme disposant ou titulaire au sens du 1 de l'article 32 a cessé, postérieurement à la publication au fichier immobilier, de produire tout ou partie de ses effets en raison d'un acte ou d'une décision judiciaire ultérieurement publié ».

Ainsi, pouvait-on publier un acte du disposant, même s'il n'était plus le dernier titulaire du droit, dès lors qu'il a eu, à un moment donné, cette qualité au fichier immobilier.

La Cour de Cassation a estimé que le dernier titulaire, au sens du 2 ème alinéa du 2 de l'article 34 précité tel qu'il apparaissait au fichier immobilier, était celui dont le titre n'avait pas cessé de produire ses effets postérieurement à sa publication, c'est-à-dire le propriétaire actuel.

Cette solution de la Cour de Cassation limitée au strict domaine des inscriptions des privilèges et hypothèques serait étendue à toute type de publication.

Ainsi que l'a relevé la Commission de réforme de la publicité foncière, la solution jurisprudentielle précitée « permet de restaurer l'effet de sécurité juridique initialement recherché par cette règle » 246 ( * ) .

Le nouveau texte dédié au principe de « l'effet relatif » permettrait ainsi d'éviter la formation de plusieurs chaînes de propriété et renforcerait la sécurité juridique du fichier immobilier.

Ø Renforcer la sécurité juridique du fichier immobilier en supprimant la notion de bonne foi dans les règles de conflit entre acquéreurs successifs d'un même immeuble

Traditionnellement, en application des règles d'opposabilité en matière de publicité foncière, lorsque deux acquéreurs successifs de droits portant sur un même immeuble tiennent leur droit d'une même personne, celui qui a le premier accomplit la formalité de publicité foncière est préféré, même si son droit est postérieur . Classiquement, cette règle n'était écartée qu'en cas de collusion frauduleuse.

Cependant, cette règle de conflit, source de sécurité juridique, a été modifiée par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, qui a introduit la notion de bonne foi en édictant au deuxième alinéa de l'article 1198 du code civil que « lorsque deux acquéreurs successifs de droits portant sur un même immeuble tiennent leur droit d'une même personne, celui qui a, le premier, publié son titre d'acquisition passé en la forme authentique au fichier immobilier est préféré, même si son droit est postérieur, à condition qu'il soit de bonne foi ».

Comme l'a indiqué la Commission de réforme de la publicité foncière, l'institution de la publicité foncière « a pour but d'instaurer un système d'opposabilité des droits, afin de prévenir puis de régler les conflits entre titulaires de droits concurrents sur un même bien. En particulier, elle vise à satisfaire à une exigence de sécurité juridique, en instaurant un instrument unique et objectif. Or, force est de constater que la solution choisie par le législateur de 2016 brise cette unité, puisqu'elle aboutit à la mise en place d'un « double système d'opposabilité », l'un fondé sur la règle de conflit foncière (ordre des publications), l'autre sur la connaissance effective (psychologie). » 247 ( * )

Afin de redonner de la cohérence et de la fiabilité à notre système de publicité foncière, la notion de bonne foi introduite au second alinéa de l'article 1198 du code civil par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats sera supprimée.

3. DISPOSITIF RETENU

Compte tenu des contraintes en cause (corpus de règles d'une grande technicité, obsolètes, dispersées entre de nombreux textes dont le code civil incluant des dispositions de valeur législative) et du délai nécessaire de 18 mois pour moderniser le dispositif existant, le recours à une habilitation permettant au Gouvernement de mener à bien cette réforme par voie d'ordonnance a été retenu.

Ainsi, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnance les mesures pour simplifier le droit de la publicité foncière, et à cette fin :

1° Améliorer la lisibilité du droit de la publicité foncière, notamment en réunissant et en adaptant, au sein du même livre du code civil, l'ensemble des règles législatives relatives à la publicité foncière ;

2° Moderniser le régime de la publicité foncière et renforcer son efficacité, notamment en précisant et adaptant les conditions de mise en oeuvre et les effets du principe de publication du titre antérieur, en affirmant le principe de la préférence au primo publiant indépendamment de sa bonne ou mauvaise foi, en recentrant la liste des actes soumis à la publicité foncière sur ceux seuls relatifs à des droits réels ou susceptibles d'en faire naître, en améliorant les sanctions des publications, en harmonisant le régime d'opposabilité des actes publiés, en rationalisant le cadre juridique des décisions de refus de dépôt et de rejet de la formalité ;

3° Moderniser et clarifier le régime de l'inscription des privilèges immobiliers et des hypothèques, notamment en dégageant les principes directeurs gouvernant cette inscription et en mettant les dispositions du régime de l'inscription des privilèges immobiliers et des hypothèques en cohérence avec les modifications apportées au régime de la publicité foncière par les ordonnances prévues au présent article ;

4° Tirer les conséquences, avec le cas échéant les adaptations législatives nécessaires, des modifications apportées par les ordonnances prévues au présent article, notamment dans la loi du 1 er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et dans le livre V du code civil.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

L'analyse précise des conséquences attendues de la mesure sera effectuée dans la fiche d'impact exposant les dispositions de l'ordonnance prise sur le fondement de la présente habilitation.

Néanmoins, il peut d'ores et déjà être fait état des impacts suivants :

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 sera fortement concerné puisque les règles de valeur législative qui y sont contenues feront l'objet d'une codification dans le code civil, au Titre V du Livre II. Le code civil sera ainsi augmenté de plusieurs articles fixant le régime de la publicité foncière.

Les articles 2449 à 2448 du code civil relatifs au fonctionnement des services de la publicité foncière et à la responsabilité de l'Etat en la matière seront également impactés par leur transfert avec les dispositions dédiées au droit de la publicité foncière au Titre V du livre II du code civil.

Les articles 2426 à 2435 du code civil seront modifiés.

Le second alinéa de l'article 1198 du code civil sera supprimé.

L'article 941 du code civil sera abrogé.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

A terme, la réforme de la publicité foncière, en recentrant le champ des actes soumis à publication et en rationnalisant la formalité de publicité foncière, devrait permettre aux services de la publicité foncière, de réduire leurs délais de traitement.

Outre la sécurisation des transactions immobilières qui en résulterait et qui profiterait à tous les usagers de la publicité foncière (particuliers, notaires, administrations, etc.), la réduction des délais de publication des actes translatifs de propriété immobilière serait de nature à améliorer le classement de la France dans certains classements internationaux comme le « Doing Business » de la Banque Mondiale, et partant son attractivité.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les collectivités territoriales bénéficieront de la modernisation et de la clarification du dispositif de publicité foncière.

Par ailleurs, l'objectif poursuivi étant de réformer le régime de la publicité foncière issu du décret-loi n°55-22 du 4 janvier 1955, les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle ainsi que le département de Mayotte seront uniquement concernés par d'éventuelles mesures d'adaptation et de coordination.

S'agissant des collectivités territoriales relevant de l'article 74 de la Constitution, le droit de la publicité foncière est actuellement soumis au principe d'identité législative à Saint Pierre-et-Miquelon (articles LO 6413-1, LO 6414-1 à LO 6414-6 du code général des collectivités territoriales), Saint-Barthélemy (articles LO 6213-1, LO 6214-1 à LO 6214-8 du même code) ainsi qu'à Saint-Martin (article LO 6313-1, LO 6314-1 à LO 6314-10 du même code).

Il résulte de la lecture combinée des articles 7, 13 et 14 de la loi organique du 27 février 2014 définissant le statut d'autonomie de la Polynésie française que cette collectivité est compétente pour légiférer sur son territoire en matière de publicité foncière. Cette collectivité est par conséquent hors du champ de l'habilitation.

Il en va de même s'agissant de la Nouvelle-Calédonie. Le transfert des compétences de l'Etat à la Nouvelle-Calédonie en matière de droit civil étant effectif depuis le 1 er juillet 2013, les dispositions étendues à la Nouvelle-Calédonie, relatives à la publicité foncière, par l'ordonnance n° 2013-516 du 20 juin 2013 portant actualisation du droit civil applicable en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna ne seront pas reprises dans le projet de réforme.

Enfin, le décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière n'ayant jamais été étendu aux îles Wallis et Futuna, cette collectivité sera hors du champ de l'habilitation.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les différents services administratifs concernés bénéficieront de la modernisation et de la clarification du dispositif de publicité foncière.

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Les particuliers bénéficieront de la modernisation et de la clarification du dispositif de publicité foncière.

5. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

Compte tenu des contraintes en cause (corpus de règles d'une grande technicité, obsolètes, dispersées entre de nombreux textes dont le code civil incluant des dispositions de valeur législative) et du délai nécessaire de 18 mois pour moderniser le dispositif existant, le recours à une habilitation permettra au Gouvernement de mener à bien cette réforme.

L'ordonnance sera publiée dans un délai de 18 mois à compter de la publication de la présente loi au Journal officiel de la République française. Un projet de loi de ratification sera déposé devant le Parlement dans un délai de 3 mois suivant la publication de l'ordonnance.

CHAPITRE V - MESURES DE SIMPLIFICATION DU FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS

Article 66 : Possibilité pour les établissements publics de l'État de mutualiser leurs fonctions support

1. ÉTAT DES LIEUX

L'article 34 de la Constitution pose le principe selon lequel le législateur est compétent pour fixer les règles concernant la création de catégories d'établissements publics.

En application de cet article, le législateur est compétent pour fixer les règles constitutives des catégories d'établissements publics. Ont été reconnus comme faisant partie de ces règles constitutives :

- la spécialité de la catégorie de l'établissement concerné (CC n° 66-7 FNR, 21 décembre 1966, Agence de défense des biens et intérêts des rapatriés, R. p. 37) ;

- le cadre général des missions de l'établissement (CC n° 67-47 L, 12 décembre 1967, Syndicat des transports parisiens, R p. 34).

Le principe de spécialité se définit comme l'impossibilité pour un établissement public « de se livrer à des activités excédant le cadre des missions qui lui ont été assignées par les textes qui l'ont institué » (CE, sect, 3 décembre 1993, n°139021). Ce principe invite, pour déterminer la nature des activités confiées à l'établissement, à se reporter à ses règles constitutives, telles qu'elles ont été définies par les lois et règlements (CE, avis, 7 juillet 1994, EDF-GDF, n°356089).

Les dispositions transversales, applicables à l'ensemble des établissements publics, ou du moins à une grande partie d'entre eux, sont consignées dans des textes non codifiés (loi n°83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et ses textes d'application, décret n°2010-1035 du 1 er septembre 2010 relatif à la durée des mandats des dirigeants et au fonctionnement des organes de direction de certains des établissements publics de l'Etat, etc.).

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

De nombreux établissements publics de l'État sont engagés aujourd'hui ou souhaitent s'engager dans une démarche de rationalisation de moyens, comme en témoigne la diminution du nombre d'opérateurs qui est passé de 649 en loi de finances initiale 2008 à 437 en projet de loi de finances pour 2021.

Si la rationalisation de moyens peut se faire sous la forme d'une fusion d'établissements publics, cette procédure n'est pas exempte de lourdeurs et ne correspond pas nécessairement à des volontés de rapprochements seulement partiels et « à la carte ». La fusion entre deux établissements induit nécessairement un impact irréversible sur leur gouvernance. Elle ne permet pas le maintien d'établissements distincts dotés de leur conseil d'administration et de leurs missions propres. Or, certains établissements publics de l'État sont territorialisés et leur gouvernance associe largement les acteurs locaux (élus locaux, usagers, acteurs économiques et non économiques).

Par ailleurs, si des coopérations peuvent être mises en oeuvre entre ces établissements publics, elles ne permettent pas la mutualisation des fonctions dites « support ». En effet, ils sont soumis au principe de spécialité, le cas échéant géographique. Aussi, les établissements publics de l'Etat situés sur un périmètre géographique différent ne peuvent mutualiser leurs fonctions support sans contrevenir au principe de spécialité.

Sans aller jusqu'à la fusion, le présent article permet à plusieurs établissements publics de l'État relevant de la même spécialité de mutualiser des moyens techniques et humains : un établissement peut avoir recours aux moyens d'un autre établissement pour la réalisation de tout ou partie de ses missions.

La mutualisation de fonctions support nécessite donc une assise législative pour permettre à un établissement public d'agir hors de son ressort géographique.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent article vise à favoriser une meilleure mutualisation de fonctions support entre établissements publics de l'Etat (qu'ils soient administratifs - EPA - ou industriels et commerciaux - EPIC) exerçant les mêmes missions sur des périmètres géographiques distincts.

Cette faculté de mutualisation est de nature à permettre la réalisation d'économies d'échelle mais aussi à améliorer la qualité du service rendu par ces fonctions support grâce à un partage des compétences, des moyens et des expertises dans un cadre budgétaire contraint. Elle pourra à cet égard favoriser le développement des compétences professionnelles des agents en améliorant l'expertise rendue.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Aucune alternative à l'intervention du législateur n'a pu être envisagée puisqu'elle n'aurait pas permis de répondre aux objectifs poursuivis.

3.2. OPTION RETENUE

La disposition retenue consiste à ouvrir, par la loi, la possibilité pour les établissements publics de l'Etat de mutualiser leurs fonctions support sans les y contraindre.

Il est ainsi envisagé que les établissements publics de l'État exerçant les mêmes missions sur des périmètres géographiques différents puissent mutualiser les fonctions dites support, c'est-à-dire la gestion de fonctions et moyens nécessaires à la réalisation de ces missions.

La mesure envisagée s'inspire du dispositif mis en place par la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain pour les établissements publics d'aménagement et fonciers de l'État. Ce dispositif a été inséré à l'article L.321-41 du code de l'urbanisme, qui prévoit que « les statuts d'un établissement public mentionné au présent chapitre peuvent prévoir qu'il recourt, pour l'exercice de tout ou partie de ses compétences, aux moyens d'un autre établissement public mentionné au présent chapitre. »

La possibilité d'une mutualisation des fonctions support est ainsi généralisée, mais circonscrite aux seuls établissements relevant de la même catégorie et exerçant les mêmes missions sur des périmètres géographiques différents. Il est en effet apparu que la mesure pourrait être utilement mise à profit par des établissements jumeaux ou voisins intervenant dans des champs géographiques différents comme les agences de l'eau, les parcs nationaux, mais aussi les ports maritimes.

Cette mutualisation sera réalisée essentiellement sur la base du volontariat, soit par la constitution d'un groupement d'intérêt public (GIP), créé dans le respect des règles de droit commun relatives au GIP, soit par la conclusion d'une convention de coopération, approuvée par les conseils d'administration respectifs des établissements publics.

Cette mutualisation choisie permet de respecter pleinement le principe d'autonomie des établissements publics et ainsi de parvenir par la voie contractuelle aux mesures les plus adaptées en matière de mutualisation des fonctions support.

Toutefois, la rédaction permet également au Gouvernement, à défaut de mutualisation réalisée selon l'une des deux modalités précitées, de recourir par décret, pris après avis des conseils d'administration des établissements concernés, à une mutualisation imposée.

La disposition retenue précise que la convention de coopération pourra notamment désigner l'un des établissements publics comme établissement support chargé d'assurer, pour le compte des autres établissements, la gestion des fonctions et moyens mutualisés.

Cette précision vise à permettre de manière expresse les deux options de mutualisation identifiées à ce jour, à savoir :

- d'une part, la délégation de gestion, sur le modèle de ce qui existe déjà entre administrations de l'État (décret n°2004-1085 du 14 octobre 2004 relatif à la délégation de gestion dans les services de l'État),

- d'autre part, le transfert d'activités plein et entier.

La rédaction retenue permet toutefois d'envisager que d'autres formules de coopération soient envisagées. Dans cette hypothèse, il conviendra de s'interroger sur la nécessité ou non de l'inscrire dans le cadre de ce dispositif, car l'atteinte au principe de spécialité ne sera pas nécessairement matérialisée.

Il a également été souhaité de préciser que cette mutualisation s'effectuerait à titre non onéreux afin d'interdire aux établissements publics toute mutualisation réalisée dans une logique de profit et d'éviter d'enfreindre les règles de la commande publique.

La rédaction précise aussi que l'établissement support pourra prendre des actes pour le compte des autres établissements publics et assurer la gestion des crédits associés.

Ces précisions, qui n'ont rien d'exhaustif, permettent à la fois d'encadrer le dispositif envisagé tout en laissant le soin à la décision de mutualisation de préciser d'autres éléments relatifs aux modalités et conditions financières de cette mutualisation.

Un décret en Conseil d'État précisera par ailleurs les conditions d'application du présent article, notamment en identifiant les fonctions support concernées (ressources humaines, services informatiques, comptabilité) et en définissant la procédure à suivre pour une telle mutualisation.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Il s'agit d'une disposition générale, dans la mesure où elle a vocation à s'appliquer à l'ensemble des établissements publics de l'État.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

La mesure n'a pas d'impact général sur les entreprises. Si les EPIC sont susceptibles d'en bénéficier, c'est en leur qualité d'établissement public et non en tant qu'ils constituent des entreprises du secteur public.

Il est rappelé que la part des EPIC dans le total des opérateurs de l'Etat est relativement faible puisqu'elle s'élève à 8%, contre 51% pour les établissements publics administratifs 248 ( * ) .

4.2.2. Impacts budgétaires

Le projet n'a pas d'impact budgétaire direct et immédiat puisqu'il a pour seul effet de rendre juridiquement possible la mutualisation des fonctions support.

Il ne crée pas de charge mais est susceptible de créer les conditions d'une diminution des coûts de fonctionnement des établissements qui s'engageront dans la voie d'une mise en commun de leurs moyens.

Aucune quantification n'est envisageable avant la mise en oeuvre effective de la mesure. Il conviendra d'apprécier l'impact ex post.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure n'a aucun impact sur les collectivités territoriales ni leurs groupements dès lors que seuls les établissements publics de l'Etat sont concernés. Les établissements locaux n'entrent donc pas dans son champ d'application.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La disposition a un impact sur l'organisation de certains services des établissements publics de l'Etat, dans la mesure où ils en sont précisément l'objet. Cet impact reste en l'état difficile à identifier puisque la mesure impliquera un décret d'application puis une décision actant le choix de procéder au cas par cas à une mutualisation et précisant les domaines concernés.

En revanche, compte tenu de son objet, les services déconcentrés et les administrations centrales ne sont pas concernés.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES.

La mesure envisagée ne nécessite pas de consultation.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La disposition envisagée entre en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel. Elle ne sera toutefois effectivement en vigueur que lorsque le décret d'application aura été publié.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article est applicable à l'ensemble du territoire de la République française.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat viendra préciser les fonctions support susceptibles d'être mutualisées ainsi que la procédure pour décider d'une mutualisation.

Article 67 : Réforme des statuts de l'établissement public industriel et commercial (EPIC) La Monnaie de Paris

1. ETAT DES LIEUX

Les missions de l'établissement public à caractère industriel et commercial Monnaie de Paris (« EPIC Monnaie de Paris ») sont définies à l'article L. 121-3 du code monétaire et financier (CMF), à savoir :

- 1° monopole de la frappe de la monnaie courante ;

- 2° monnaie de collection française ayant cours légal et libératoire ;

- 3° lutte contre le faux monnayage ;

- 4° activités commerciales types instruments de marque et poinçons de garantie des matières précieuses ;

- 5° prestations à caractère patrimonial dont la gestion de l'Hôtel des Monnaies, propriété de l'État ;

- 6° productions artistiques liées au savoir-faire.

Le Code monétaire et financier traite de l'émission des billets de banque par la Banque de France à l'article L 141-5 (monopole d'autorisation d'émission de billets de banque) 249 ( * ) .

La Monnaie de Paris est un établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial. Cet établissement est chargé à titre exclusif, de fabriquer pour le compte de l'Etat les pièces métalliques mentionnées à l'article L. 121-2 du CMF.

En tant qu'Etablissement Public, la Monnaie de Paris est soumise au principe de spécialité. Cela signifie que la personnalité juridique lui a été conférée pour lui permettre de remplir une mission spécifique décrite dans son objet social. Le principe de spécialité applicable aux établissements publics limite son champ d'intervention à ces missions précises. L'Etat et le législateur ont entendu confier une certaine souplesse dans la gestion par l'EPIC Monnaie de Paris des biens qui lui ont été remis en dotation. Toutefois, pour ce qui concerne des biens qui ne sont plus affectés aux missions de l'EPIC, il est nécessaire de faire figurer plus explicitement dans les statuts le développement d'activités d'investissement immobilier ou de valorisation immobilière de son patrimoine, afin de ne pas s'exposer à un risque de méconnaissance du principe de spécialité.

Or, conformément au contrat pluriannuel entre l'État et la Monnaie de Paris, conclu sur le fondement des dispositions de l'article R. 121-6 du CMF pour la période 2018-2022, la Monnaie de Paris a aujourd'hui pour objectif de « rendre l'établissement plus agile et pérenniser le modèle économique de l'établissement, en le tournant vers des activités concurrentielles durablement profitables, alors que l'activité monopolistique devrait connaître une décroissance structurelle ». Dans ce but, il ressort que « l'usine de Pessac, au positionnement géographique attractif, constitue un actif à valoriser ».

Par conséquent, à l'image de nombreux autres établissements publics et dans le cadre de son principe de spécialité, l'EPIC Monnaie de Paris doit pouvoir diversifier ses activités et mener des opérations immobilières sur le foncier valorisable entourant le site de l'usine de Pessac dont il est propriétaire.

2. NECESSITE DE LEGIFERER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Créé par l'article 36 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 et succédant à la Direction des Monnaies et des médailles, l'EPIC Monnaie de Paris constitue en soi une catégorie particulière d'établissement public. Dès lors, en vertu du principe de spécialité, l'élargissement de son champ d'activités ne peut être opéré que par un texte de niveau législatif s'agissant d'une règle constitutive de l'établissement.

La définition actuelle des missions de l'EPIC figurant au CMF ne permet pas à l'établissement de développer les nouvelles activités de valorisation immobilière envisagées sans risque juridique (voir en ce sens l'avis du Conseil d'État rendu à propos du principe de spécialité de VNF et la possibilité pour cet établissement de mener des opérations de valorisation immobilière - avis n° 369299 du 16 décembre 2003).

Il convient, sur le modèle de ce qui a été fait pour d'autres établissements publics comme les établissements publics d'enseignement supérieur 250 ( * ) ou la SNCF 251 ( * ) lorsqu'elle était encore un EPIC, de prévoir explicitement dans les statuts de la Monnaie de Paris les missions lui permettant d'exercer en toute sécurité juridique des activités de valorisation immobilière qui ne concerneraient pas des biens directement liés à l'exercice de ses missions régaliennes et de lui permettre de diversifier ses activités commerciales.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

De plus, l'objet de l'article relatif à la diversification des missions de La Monnaie de Paris se rattache directement aux objectifs de la loi, à savoir déconcentrer et décomplexifier la prise de décision de l'État, pour la rendre plus proche du terrain et mieux adaptée aux réalités locales. Il s'inscrit dans l'objectif de favoriser l'implantation de nouveaux projets dans une zone industrielle qui constitue un enjeu important d'attractivité.

Cet article élargissant le champ d'intervention de l'EPIC a pour objectif de permettre à la Monnaie de Paris d'investir notamment sur le site de Pessac où se trouve son usine, dans un projet immobilier de nature mixte (activités, services, bureaux), créateur de valeur avec un positionnement et un rayonnement régional.

3. DISPOSITIF RETENU

En l'absence de modification législative, et en vertu des limites fixées par le principe de spécialité applicable aux établissements publics, il serait juridiquement risqué pour la Monnaie de Paris de réaliser ces projets de diversification de ses activités que ce soit directement ou par le biais de filiales.

L'article vient préciser et modifier les statuts de l'établissement en prévoyant ainsi la possibilité pour la Monnaie de Paris :

- de valoriser le patrimoine immobilier dont il est propriétaire, notamment par le biais d'opérations immobilières ou d'activités d'investissement immobilier ;

- d'exercer, lui-même ou par le biais de filiales et participations, toutes activités connexes y compris commerciales qui se rattachent directement ou indirectement à ses missions.

La rédaction proposée permettra donc à l'EPIC de diversifier ses activités soit directement, soit par la création de filiales soit en partenariat avec d'autres opérateurs économiques. En matière immobilière, il est recommandé de cloisonner les activités et de créer spécifiquement des entités pour une fonction bien précise. C'est la raison pour laquelle la rédaction de l'article prévoit la possibilité de créer une filiale de la Monnaie de Paris notamment pour ce qui concerne la valorisation immobilière du site de Pessac.

Le présent article prévoit également que l'établissement public puisse en complément de ses autres missions, fabriquer et commercialiser tous produits en lien avec ses activités.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

4.1. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Dans le cadre de la diversification de ses activités permises par la réforme législative, l'EPIC souhaite notamment valoriser le site de Pessac aux fins de générer des ressources stables et récurrentes, et constituer ainsi un relais de croissance durable. Les perspectives financières escomptées pour la première phase immobilière prévoient un chiffre d'affaires prévisionnel de 2 M€ bruts annuels et une contribution positive au résultat net de l'EPIC. L'élaboration du budget d'opération et du compte d'exploitation a été établie sur la base des informations techniques et économiques obtenues par les études de marché et de qualification confiées en 2019 et 2020 à deux commercialisateurs (Cbre 252 ( * ) , Poste Immo 253 ( * ) ) et à l'agence d'architecture Hobo 254 ( * ) qui a proposé également un schéma directeur de programmation et

Une étude comparative, réalisée entre juin et septembre 2019 auprès d'autres établissements publics tel que le Port maritime de Bordeaux 255 ( * ) , leurs filiales immobilières tels que RATP Real Estate 256 ( * ) ou SNCF Immo 257 ( * ) , et auprès d'autres sociétés à participation publique telles que Poste Immo, a montré que ces entreprises publiques ont engagé une diversification réussie dans l'immobilier pensé comme un relais de croissance stratégique.

Concernant plus précisément le site de Pessac, une étude d'opportunité conduite entre avril et novembre 2019 a mis en évidence la pertinence d'une diversification dans l'immobilier qui s'avère accessible et rentable pour la Monnaie de Paris.

Le site de Pessac bénéficie d'une implantation stratégique au sein d'un bassin économique dynamique : l'opération d'intérêt métropolitaine (OIM) Bordeaux InnoCampus 258 ( * ) . Alimenté par la croissance des sociétés informatiques et des sièges sociaux de PME, le territoire est également le débouché naturel des start-ups incubées sur le campus, qui créent une demande très forte de locaux mixtes destinés aux PME et PMI.

Le secteur continue d'attirer des entreprises aux activités classiques et fidélise un foisonnant entrepreneuriat dans les hautes technologies : 80% des start-ups de la Région Nouvelle Aquitaine, 10 000 salariés attendus d'ici 2030. Or, l'offre immobilière actuellement disponible ne répond pas à la demande croissante et soutenue du secteur 259 ( * ) .

En fonction du périmètre retenu, la surface valorisable offre un droit à construire pouvant atteindre 46 000 m² de surface de plancher (SDP), dans l'état actuel des discussions avec la mairie de Pessac et Bordeaux Métropole.

Ce projet constituerait également un levier de modernisation au service de la Monnaie de Paris en lui permettant de favoriser les échanges avec les entreprises innovantes sur les sujets technologiques intéressant la mutation de l'entreprise et son processus industriel.

4.2. IMPACTS BUDGÉTAIRES

Aucun impact budgétaire ne devrait découler de la modification des statuts de l'EPIC. Toutefois, l'État, par l'entremise de l'Agence des participations de l'État, pourrait être sollicité dans le cadre de la levée de fonds nécessaires à la réalisation d'opérations d'investissements. Cela pourrait, par exemple, prendre la forme d'une absence de remontée de dividendes vers l'actionnaire afin de financer le ou les projets.

4.3. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La modification des statuts de la Monnaie de Paris devrait permettre en tout premier lieu de mettre en valeur l'emprise foncière de l'entreprise à Pessac. Ce projet devrait faire l'objet d'un aménagement urbain éco-exemplaire à travers une forte végétalisation du site, des bâtiments « bioclimatiques », des solutions en énergies renouvelables et des pratiques de mobilités alternatives.

5. CONSULTATIONS ET MODALITES D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Le Conseil d'administration de la Monnaie de Paris a été consulté et a donné mandat à son Président-Directeur général pour mener à bien ces projets. Le Comité social et économique de l'entreprise a également été consulté.

Des échanges réguliers sont organisés avec les collectivités territoriales et plus particulièrement avec la Commune de Pessac et Bordeaux Métropole 260 ( * ) .

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions sont applicables en France métropolitaine. Il n'y a pas d'adaptation particulière à prévoir dans les collectivités d'outre-mer au regard des dispositions existantes.

CHAPITRE VI - MESURES LIÉES À L'APPEL À PROJETS FRANCE EXPÉRIMENTATION AU SERVICE DE LA RELANCE ET DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES INNOVANTES

Article 68 : Prolonger la durée des expérimentations menées par les chambres d'agriculture

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GENERAL

1.1.1. Un système de conseil agricole à compléter pour permettre aux agriculteurs d'appréhender une règlementation complexe

L'exercice du métier d'agriculteur induit l'appréhension et l'appropriation d'une réglementation conséquente, établie au niveau européen ou nationale, notamment ayant trait à la politique agricole commune, à la santé et protection animales, à la santé des végétaux ou encore à la protection de l'environnement., Dans ces conditions, la nécessité d'une meilleure information et d'un plus grand accompagnement des exploitants agricoles pour assurer le respect de cette réglementation a été mise en évidence.

Selon le recensement agricole 2010, la France compte 604 000 chefs d'exploitations et co-exploitants agricoles et 514 800 exploitations agricoles françaises (DOM compris). Chacun d'entre eux doit appréhender aujourd'hui une législation issue de domaines divers (sanitaire, environnemental...), qui peut apparaître complexe et donner lieu à une méconnaissance des obligations qui s'imposent à lui. Par ailleurs, l'agriculteur est aujourd'hui en demande de service pour assurer au mieux la conduite de son exploitation, dans le respect de la réglementation en vigueur.

Pour répondre à ces besoins, il existe un système de conseil agricole chargé de conseiller les agriculteurs sur les exigences réglementaires en matière de gestion et les normes relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales, ou encore sur les mesures concernant les exploitations agricoles prévues dans le programme de développement rural et relatives à la modernisation des exploitations, au renforcement de la compétitivité, à l'intégration dans les filières et à l'innovation.

Le droit de l'Union européenne exige en effet la mise en place par les États-membres d'un « système de conseil agricole » (SCA), géré par des organismes publics ou privés, et portant au moins sur certaines obligations réglementaires (article 12 du règlement n° 1306/2013 du 17 décembre 2013 relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) n° 352/78, (CE) n° 165/94, (CE) n° 2799/98, (CE) n° 814/2000, (CE) n° 1200/2005 et n° 485/2008 du Conseil).

Ce système a donc été institué en France en 2015 par instruction technique.

Le dispositif du système de conseil agricole, tel qu'issu de la réglementation européenne, ne couvre toutefois qu'une partie de la réglementation opposable à l'agriculteur dans la conduite de son exploitation au quotidien.

1.1.2. Un mouvement de régionalisation du réseau des chambres d'agriculture en cours

Les chambres d'agriculture, au nombre de 102 aujourd'hui, sont historiquement organisées autour d'un réseau départemental, comme l'a récemment rappelé le rapport d'information de la mission d'information commune relative aux chambres d'agriculture et à leur financement (Assemblée nationale), rendu public le 17 décembre 2020. À ce titre, les dispositions législatives en vigueur attribuent des missions différentes aux chambres départementales, plutôt tournées vers la consultation et l'animation et le développement des territoires ruraux, et aux chambres régionales, plutôt orientées vers la coordination et l'exercice de missions dites « supports ». Certaines missions peuvent être exercées par les chambres départementales et les chambres régionales, soit à titre facultatif (ex : collecte et traitement de données relatives aux exploitants agricoles), soit par délégation de l'État (ex : mission de service public liée à la politique d'installation). D'autres missions sont attribuées conjointement aux chambres départementales et les chambres régionales dans leur ressort territorial respectif (ex : élaboration de programmes d'intérêt général). Enfin, certaines missions sont attribuées à titre exclusif aux seules chambres départementales par les dispositions législatives en vigueur. C'est le cas pour l'association aux décisions prises en application du code de l'urbanisme ou à la création et à la gestion du centre de formalités des entreprises (articles L. 511-3 et L. 511-4 du code rural et de la pêche maritime).

Le renforcement des compétences des chambres régionales s'inscrit dans un mouvement initié par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, avec le transfert aux chambres régionales des missions juridiques, administratives et comptables ainsi que des actions de communication, missions dites « support ». Ainsi, selon l'article L. 512-1 du code rural et de la pêche maritime, les chambres régionales assurent les missions suivantes :

« (...) - elles assurent l'harmonisation des conditions d'emploi des personnels des chambres d'agriculture de la région, dans le respect des dispositions statutaires et dans un cadre négocié avec les organisations représentatives du personnel ;

« - elles orientent, structurent et coordonnent les actions des chambres départementales d'agriculture, en définissant une stratégie régionale, dans le respect des orientations nationales, et en adoptant le budget nécessaire à la mise en oeuvre de cette stratégie, et assurent à leur bénéfice, dans des conditions définies par décret, des missions juridiques, administratives et comptables ainsi que des actions de communication ; (...) ».

En application de ces dispositions, le décret n° 2016-610 du 13 mai 2016 modifié relatif au réseau des chambres d'agriculture a prévu que la chambre régionale exerce, au bénéfice des chambres départementales (et interdépartementales) de sa circonscription, certaines missions, notamment des missions d'appui juridique, administratif et comptable (dites missions « support »), telles que visées aux articles D. 512-1-2 et D. 512-1-3 du code rural et de la pêche maritime.

Pour autant, certains groupes de chambres d'agriculture, notamment celles de Bretagne, Pays de la Loire et Normandie, ont souhaité que leur chambre régionale exerce davantage de compétences dans le cadre d'un nouveau schéma d'organisation consistant à transférer des missions jusqu'ici exercées par les chambres départementales vers les chambres régionales, chargées de les exercer à titre exclusif. En pratique, les chambres précitées ont délibéré entre 2017 et 2020 pour acter et organiser le transfert de l'essentiel des missions et du personnel qui y est affecté des chambres départementales vers la chambre régionale. En conséquence, la chambre régionale est devenue dans ces régions employeuse et quasi-employeuse unique de l'ensemble du personnel de la région, chargée de l'exercice d'une très grande partie des missions dévolues aux chambres départementales. Les chambres départementales ont toutefois conservé une mission consulaire, inhérente à leur statut d'établissement consulaire, et celle d'animer les collectifs d'agriculteurs au niveau local.

1.1.3. Le dispositif mis en place par la loi ESSOC

Pour répondre à ces besoins, l'article 38 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance (ESSOC) a, sur le fondement des articles 37-1 et 38 de la Constitution, autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnances, à titre expérimental et pour une durée de trois ans :

- D'une part sur la dévolution de nouvelles missions aux établissements du réseau des chambres relatives à l'information sur la réglementation nationale et européenne applicable aux exploitants agricoles et aux contrôles susceptibles d'être réalisés à ce titre, à l'appui au dépôt des demandes d'aides par ces exploitants et l'assistance à leur mise en conformité avec la réglementation ;

- D'autre part, les modalités suivant lesquelles les chambres régionales d'agriculture qui le souhaitent peuvent exercer à titre exclusif tout ou partie des missions (à l'exception de la mission consulaire) en lieu et place des établissements de leur circonscription et les conditions d'affectation du personnel attaché à ces missions.

L'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 relative à l'exercice et au transfert, à titre expérimental, de certaines missions dans le réseau des chambres d'agriculture, prise en application de ces dispositions, prévoit, d'une part, les nouvelles missions d'information et de conseil exercées au bénéfice des exploitants par les chambres (inter)départementales ou de région et, d'autre part, les missions susceptibles d'être transférées aux chambres régionales sur la base du volontariat ainsi que les modalités d'un tel transfert, après avis favorable d'au moins deux tiers des chambres départementales et interdépartementales de la circonscription.

L'expérimentation, prévue pour une durée de trois ans à compter de la publication de ladite ordonnance (article 1 er ), arrive à son terme le 30 janvier 2022.

A - Renforcer le rôle des chambres d'agriculture dans l'information et l'appui aux exploitants agricoles

L'objectif du dispositif est d'aller au-delà du système de conseil agricole, qui ne porte que sur une partie de la réglementation de la politique agricole commune, en confiant aux chambres d'agriculture des missions nouvelles de nature à prévenir à la source le risque d'erreurs de la part des exploitants agricoles. En effet, le dispositif de système de conseil agricole (SCA) en vigueur porte sur un champ réduit par rapport à l'ensemble de la réglementation opposable aux exploitants agricoles, correspondant aux exigences de la conditionnalité de la réglementation PAC (exigences réglementaires en matière de gestion, bonnes conditions agricoles et environnementales des terres) auxquelles s'ajoutent les thèmes obligatoires et certains thèmes optionnels mentionnés dans le règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) n° 352/78, (CE) n° 165/94, (CE) n° 2799/98, (CE) n° 814/2000, (CE) n° 1200/2005 et n° 485/2008 du Conseil.

Les thèmes obligatoires couvrent les mesures concernant les exploitations agricoles prévues dans le programme de développement rural et relatives à la modernisation des exploitations, au renforcement de la compétitivité, à l'intégration dans les filières, à l'innovation, à l'orientation vers le marché et à la promotion de l'entrepreneuriat, les exigences définies au niveau de l'exploitation provenant de l'application de la Directive Cadre sur l'Eau (DCE) et les exigences définies au niveau de l'exploitation provenant de l'application de la Directive 2009/128/CE à la lutte intégrée contre les organismes nuisibles aux cultures. Parmi les thèmes optionnels inscrits dans le règlement précité, les autorités françaises ont retenu la promotion des conversions d'exploitation (y compris à l'agriculture biologique) et la diversification de leurs activités économiques et les informations sur les actions relatives à l'atténuation du changement climatique ou l'adaptation de celui-ci et celles relatives à la biodiversité et à la protection des eaux.

Il s'agit de mieux organiser et diffuser, au bénéfice des exploitants agricoles, l'information sur la réglementation qui leur est applicable quelle qu'en soit l'origine (nationale ou européenne) ainsi que sur les contrôles qui peuvent être effectués sur les exploitations, et de leur fournir un appui pour le dépôt des demandes d'aides. Une aide à la mise en conformité, en tant que de besoin, doit également être proposée dans ce cadre. Ces missions doivent permettre une meilleure connaissance par les agriculteurs de la réglementation qui leur est opposable et, conséquemment, une réduction des erreurs susceptibles d'être commises. Elles visent aussi à permettre aux agriculteurs de mieux appréhender les contrôles susceptibles d'être diligentés par l'administration en application de la réglementation et, en cas d'identification d'anomalies dans le cadre de ces contrôles, à accompagner ensuite l'exploitant (formation, conseil...) dans sa mise en conformité avec la réglementation.

B - Poursuivre la régionalisation du réseau des chambres d'agriculture

L'objectif est de permettre aux chambres régionales d'exercer, à titre expérimental, en tout ou partie, des missions relevant actuellement de la compétence des chambres départementales en se substituant à celles-ci.

Le décret n° 2016-610 du 13 mai 2016 modifié prévoit déjà le transfert de certaines fonctions « support » (appui juridique, administratif et comptable) ou « métier » (analyse des politiques publiques, suivi des marchés agricoles...) aux chambres régionales, exercées au bénéfice des établissements du réseau des chambres d'agriculture de leur circonscription de compétence.

Le but de la mesure expérimentale est d'aller plus loin en permettant à la chambre régionale, dans un mouvement plus intégré fondé sur un principe de volontariat, d'exercer l'essentiel des compétences confiées au réseau des chambres, notamment celles qui peuvent actuellement être assurées de manière concomitante pour les chambres départementales et les chambres régionales.

Par souci de cohérence et de bon exercice de ces missions, cette expérimentation donne lieu à un transfert ou une mise à disposition du personnel des chambres départementales affecté à ces missions vers la chambre régionale, qui a vocation à devenir l'employeur principal (sinon unique) du groupe des chambres à l'échelle régionale.

A ce jour, trois régions se sont engagées dans l'expérimentation de la loi ESSOC, selon des calendriers et des modalités différentes.

La Bretagne a mis en place ce nouveau schéma d'organisation dès le 1 er janvier 2017. En dehors de la mission de représentation, toutes les missions sont assurées par la chambre régionale. Le directeur général reste l'unique employé des chambres départementales de la région, mais il est affecté, pour une partie de son temps de travail, à la chambre régionale. Tout le reste du personnel a été transféré à la chambre régionale.

Dans les Pays de la Loire, le nouveau schéma a été mis en place au 1 er janvier 2018. Tout le personnel des chambres de la région (y compris les directeurs) a été transféré à la chambre régionale, devenue ainsi employeur unique à l'échelle de la région. Toutes les missions d'intervention (sauf la mission consulaire) ont été transférées à la chambre régionale. A noter que la chambre de la Mayenne n'est actuellement pas partie prenante à l'expérimentation, dès lors qu'elle n'a pas émis de délibération favorable en ce sens dans les délais impartis.

En Normandie, le nouveau schéma d'organisation a été mis en place en plusieurs temps, pour la quasi-totalité des chambres départementales de la région au 1 er janvier 2019, rejointes par la chambre du Calvados au 1 er janvier 2020 (avec un an d'avance par rapport au calendrier prévisionnel).

En dehors des trois régions précitées, il n'y a pas eu de manifestation d'intérêt pour cette expérimentation dans les autres régions, dont certaines envisagent actuellement de s'inscrire dans un schéma alternatif fondé sur la création de chambres de région.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'expérimentation en cours pour les chambres d'agriculture est mise en oeuvre en application de l'article 38 de la loi ESSOC qui a autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnance, à titre expérimental, dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution et sur le fondement de l'article 37-1 de cette même Constitution.

En application de ces dispositions, l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 relative à l'exercice et au transfert, à titre expérimental, de certaines missions dans le réseau des chambres d'agriculture a été adoptée.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

A ce stade, l'évaluation de cette expérimentation paraît délicate en raison de l'impact de la crise sanitaire actuelle.

S'agissant des nouvelles missions d'information et de conseil, elles s'exercent au contact direct des agriculteurs et leur déploiement a été affecté par les mesures de confinement adoptées pour lutter contre la propagation de la COVID 19. A l'inverse, de nouvelles modalités dématérialisées d'accompagnement des agriculteurs ont été déployées pendant l'année 2020 par les chambres d'agriculture, en particulier pour l'accompagnement des agriculteurs à la télédéclaration des aides de la politique agricole commune.

S'agissant de la régionalisation des missions, sa mise en place apparaît assez récente en particulier en Normandie et il convient par ailleurs de disposer de recul pour apprécier l'impact des contraintes particulières subies pendant l'année 2020 sur le fonctionnement et le mode d'organisation des chambres concernées.

Une prolongation de l'expérimentation est nécessaire pour disposer du recul suffisant afin d'apprécier l'impact des choix effectués en termes d'organisation du réseau dans certaines régions et d'exercice des nouvelles missions.

L'expérimentation, prévue par la loi, déroge aux missions dévolues aux chambres d'agriculture fixées par les chapitre I et II du livre Ier du titre V de la partie législative du code rural et de la pêche maritime. Seule une mesure législative peut permettre sa prorogation.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif est de proroger de trois ans, à compter de la publication du présent projet de loi, le dispositif afin de permettre la poursuite et l'achèvement de l'expérimentation en cours, en vue de pouvoir procéder à une évaluation documentée de ses résultats.

3. DISPOSITIF RETENU

La mesure envisagée vise à prolonger d'une durée de trois ans à compter de la publication de la présente loi les expérimentations prévues par l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 relative à l'exercice et au transfert, à titre expérimental, de certaines missions dans le réseau des chambres d'agriculture.

Il s'agit de prolonger les mesures expérimentales prises dans le cadre de la loi ESSOC et de son ordonnance d'application pour tirer tous les enseignements de cette expérimentation. Ces mesures portent à la fois sur la dévolution aux chambres d'agriculture de nouvelles missions d'information et d'assistance aux exploitants agricoles et sur la mise en place d'un nouveau schéma d'organisation au sein de groupes de chambres d'agriculture construit sur le transfert de l'essentiel des missions et du personnel des chambres départementales vers la chambre régionale de sa circonscription.

En dehors de l'information sur le dispositif expérimental, les autorités de tutelle ne disposent pas de levier pour inciter ou obliger les établissements du réseau des chambres d'agriculture à s'engager dans l'expérimentation, engagement qui résulte d'un choix volontaire de chaque établissement. Du reste, le délai donné aux chambres (inter)départementales pour se prononcer sur le schéma expérimental proposé par la chambre régionale de leur circonscription est désormais forclos (II de l'article 7 de l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 précitée).

Aucune autre option n'a été envisagée.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

Les dispositions envisagées ne devraient pas susciter d'impact nouveau, dès lors que les mesures expérimentales en question sont d'ores et déjà en place.

Un rapport d'évaluation devra mesurer les incidences et la plus-value apportée par ce schéma expérimental et, à l'aune de ce rapport et du contexte relatif à l'organisation du réseau des chambres d'agriculture, cette expérimentation est appelée à être abandonnée, prolongée ou inscrite dans le code rural et de la pêche maritime comme un nouvel modèle d'organisation mis à la disposition du réseau.

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La mesure envisagée modifie le délai prévu à l'article 1 er de l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 relative à l'exercice et au transfert, à titre expérimental, de certaines missions dans le réseau des chambres d'agriculture.

S'agissant des impacts juridiques, il est envisagé de déroger aux articles L. 511-3 et suivants du code rural et de la pêche maritime relatifs aux missions des chambres départementales d'agriculture et aux articles L. 512-1 et suivants relatifs aux missions des chambres régionales d'agriculture.

4.2. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

Au titre de l'expérimentation, les chambres d'agriculture sont tenues de fournir de nouveaux services aux exploitants agricoles, certains à titre gratuit, d'autres à titre onéreux.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La disposition envisagée, visant à prolonger l'expérimentation prévue pour les chambres d'agriculture, ne doit s'accompagner d'aucun impact sur les collectivités territoriales. Les mesures expérimentales ont pour objectif de confier de nouvelles missions aux chambres au bénéfice des exploitants agricoles, dans lesquelles les collectivités territoriales n'interviennent pas (ex : assistance aux exploitants à la mise en conformité avec la réglementation). Par ailleurs, pour ce qui est du volet organisationnel de l'expérimentation, le transfert de missions des chambres départementales vers la chambre régionale induit un possible changement d'interlocuteur pour les collectivités territoriales mais sans effet sur les services et prestations qu'elles sont susceptibles de demander à ces établissements.

Les incidences concernent en effet le réseau des chambres d'agriculture en premier lieu.

Le II de l'article 4 de l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 précitée prévoit ainsi que les chambres régionales d'agriculture peuvent exercer, à titre expérimental, tout ou partie des missions attribuées aux chambres départementales et interdépartementales par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur (y compris les nouvelles missions mentionnées au titre I de ladite ordonnance), à l'exclusion des fonctions de représentation mentionnées à l'article L. 511-1 du code rural et de la pêche maritime. La mission consulaire continue donc d'être remplie par les chambres (inter)départementales, notamment à l'encontre des collectivités territoriales. En revanche, comme indiqué plus haut, les prestations de services associées à l'exercice de certaines missions, notamment celles à destination des collectivités territoriales, peuvent être assurées par la chambre régionale en lieu et place des chambres (inter)départementales de sa circonscription.

La mise en oeuvre des mesures expérimentales doit s'accompagner, le cas échéant, d'une réorganisation des effectifs du réseau ou de nouvelles embauches au regard des nouvelles missions qu'il est prévu d'accorder au réseau et d'un transfert du personnel des chambres départementales vers les chambres régionales pour ce qui est du nouveau modèle d'organisation du réseau.

L'exercice, à titre expérimental, de missions nouvelles prévues au titre I de l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 doit s'accompagner de nouvelles ressources financières pour les chambres d'agriculture concernées au titre des prestations rendues dans le cadre de cet exercice.

Le transfert d'une partie des missions des chambres (inter)départementales vers les chambres régionales est par ailleurs susceptible de donner lieu à des économies d'échelle.

En cas d'engagement dans l'expérimentation au titre des dispositions du titre II de l'ordonnance n° 2019-50 du 30 janvier 2019 susmentionnée, il est prévu que la part du produit de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti (mentionnée au premier alinéa du III de l'article 1604 du code général des impôts) correspondant aux missions transférées par les chambres (inter)départementales vers la chambre régionale soit reversée à la chambre régionale par les chambres départementales et interdépartementales, pour la durée de l'expérimentation. En fonction du volume des missions transférées, ce reversement peut atteindre jusqu'à 90% du produit de la taxe précitée perçue par les chambres (inter) départementales. En conséquence, le montant du budget des chambres (inter)départementales peut être fortement réduit. A l'inverse, le budget des chambres régionales est susceptible d'être revalorisé pour lui permettre d'assurer l'exercice des missions qui lui seraient transférées par les chambres (inter)départementales de sa circonscription.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

L'engagement de nouvelles chambres d'agriculture dans l'expérimentation, en cas de prolongation de cette dernière, peut s'accompagner de l'exercice de nouvelles missions par ces chambres et demander donc une attention particulière des autorités de tutelle (préfets) de ces établissements quant à l'exercice desdites missions.

Par ailleurs, le transfert de tout ou partie des missions des chambres (inter)départementales vers la chambre régionale de leur circonscription dans le cadre de l'expérimentation est susceptible de donner lieu à un renforcement des moyens des services déconcentrés (préfecture, direction régionale de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt) dévolues à l'exercice de la tutelle des chambres régionales.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Des échanges ont eu lieu entre les services du ministère chargé de l'agriculture et l'Assemblée permanente de chambres d'agriculture (APCA), tête de réseau des chambres, chargée de l'animation du réseau et du suivi de l'organisation du réseau, sur l'opportunité de porter une mesure de prolongation de l'expérimentation en cours pour les chambres d'agriculture dans le cadre du présent projet de loi. L'APCA a émis un avis favorable.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La disposition envisagée entre en vigueur au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

L'objectif est de prolonger l'expérimentation pour une durée de trois ans à compter de la publication du présent projet de loi. Dans l'hypothèse où il serait adopté dans le courant de l'année 2021, le nouveau terme de l'expérimentation interviendrait donc en 2024. L'expérimentation, débutée le 30 janvier 2019, se déroulerait ainsi sur une période d'au moins cinq ans.

5.2.2. Application dans l'espace

La prolongation de l'expérimentation a vocation à s'appliquer à tous les établissements du réseau des chambres d'agriculture pour ce qui est des dispositions du titre I de l'ordonnance n° 2019-59 du 30 janvier 2019 précitée et aux seules chambres d'agriculture de métropole pour ce qui est des dispositions du titre II de cette même ordonnance (les territoires ultra-marins ne disposent pas de chambres régionales).

Article 69 : Élargir les possibilités de mise à disposition des fonctionnaires de l'État auprès des associations agissant dans les territoires

1. ETAT DES LIEUX

L'élargissement des possibilités de mise à disposition des fonctionnaires de l'État auprès des associations et fondations est un moyen d'ouvrir aux employeurs publics la possibilité de pratiquer le mécénat de compétence.

Encouragé par la loi n°2003-709 du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, le mécénat de compétence a connu un fort développement dans le secteur privé. Il consiste pour une entreprise à mettre à disposition un salarié sur son temps de travail au profit d'un projet d'intérêt général. Il peut prendre la forme d'une prestation de service ou d'un prêt de main d'oeuvre à titre gratuit et ouvre droit à une réduction d'impôt.

Selon les données de l'association Admical, le mécénat de compétence représentait 11% des dépenses de mécénat des entreprises en 2019 261 ( * ) . Il est mobilisé en priorité pour améliorer l'expérience des collaborateurs de l'entreprise et soutenir des projets socialement innovants comme le développement de parcours de formation à l'IA destinées à des demandeurs d'emploi ou la création d'une plateforme destinez à mettre en relation des candidats éloignés de l'emploi et des employeurs. Il contribue à répondre aux défis du monde associatif et à diversifier les parcours de carrière des employés. Il s'inscrit dans la volonté des entreprises de mieux intégrer les enjeux sociaux et environnementaux dans leur activité.

Les raisons qui expliquent le succès du mécénat de compétence dans le secteur privé ne sont pas directement transposables au secteur public dont les missions s'articulent déjà autour de l'intérêt général. Il apparaît cependant que la mise à disposition de fonctionnaires de l'État auprès d'associations ou de fondations reconnues d'utilité publique répond à des enjeux importants.

La mesure s'inscrit dans une volonté de compléter les liens qui existent entre les acteurs qui travaillent au service de l'intérêt général, d'ouvrir aux fonctionnaires de l'Etat la possibilité de mettre leurs compétences au service de causes auxquelles ils tiennent particulièrement et de permettre aux administrations de l'État d'expérimenter de nouvelles approches au service des territoires.

La mise à disposition des fonctionnaires de l'État (3500 agents / an) est aujourd'hui encadrée par l'article 42 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires de la fonction publique de l'État qui prévoit notamment la possibilité de mise à disposition au profit « d'organismes contribuant à la mise en oeuvre d'une politique de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics administratifs, pour l'exercice des seules missions de service public confiées à ces organismes » . Ce type de mise à disposition donne systématiquement lieu à un remboursement de l'administration d'origine de l'agent par l'organisme qui bénéficie de la mise à disposition.

2. NECESSITE DE LEGIFERER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le cadre juridique actuel de la mise à disposition limite la mise à disposition des fonctionnaires de l'État auprès d'associations ou de fondations reconnues d'utilité publique aux seuls organismes qui contribuent à la mise en oeuvre d'une politique de l'État et pour l'exercice des seules missions de service public confiées à ces organismes. Il ne répond donc pas à la volonté de développer le renfort des associations ou des fondations par des fonctionnaires de l'État sur des missions larges et sans contrepartie financière.

L'évolution des règles applicables en matière de mise à disposition des fonctionnaires de l'État se rapportant à la mise en oeuvre des dispositions statutaires de la fonction publique de l'État, elles ne peuvent être modifiées que par l'intervention du législateur.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure envisagée vise à offrir aux administrations la possibilité de pratiquer, à titre expérimental, le mécénat de compétence en élargissant les possibilités de mise à disposition de fonctionnaires de l'État auprès d'associations ou de fondations reconnues d'utilité publique.

Le dispositif s'inscrit dans le projet du Gouvernement d'associer étroitement tous les acteurs au service de l'intérêt général et de développer des approches nouvelles portées conjointement pour les univers associatif et administratif.

Il répond aux souhaits des agents d'expérimenter de nouvelles approches pour les missions d'intérêt général qu'ils servent déjà au quotidien. Ils y trouveront de nouvelles possibilités de mobiliser leurs compétences au service de missions essentielles, de tester de nouvelles organisations du travail ou d'enrichir les compétences qu'ils possèdent déjà. Il ne doit pas seulement s'envisager comme un dispositif de facilitation des fins de carrières mais comme un levier de motivation ouvert à la communauté des fonctionnaires de l'État dans son ensemble.

Les administrations de l'État y trouveront la possibilité d'enrichir les parcours et les compétences de leurs agents. Elles pourront également mobiliser le dispositif pour nouer de nouvelles relations avec les associations, les fondations et les territoires, expérimenter de nouvelles approches et proposer des réponses plus adaptées à chaque contexte territorial et social.

Cette mesure renforce donc les liens avec les acteurs associatifs, ouvre de nouvelles perspectives aux fonctionnaires de l'État. Elle porte un message de proximité, d'utilité sociale et de solidarité des fonctionnaires de l'État avec le reste de la société.

3. DISPOSITIF RETENU

La mesure envisagée étend significativement le champ des associations et des fondations pouvant bénéficier d'une mise à disposition (actuellement limité à celles qui contribuent à la mise en oeuvre d'une politique de l'État pour l'exercice des seules missions de service public) et supprime l'obligation de remboursement du coût de l'agent mis à disposition. Elle apporte également des précisions sur l'articulation du dispositif avec le cadre déontologique, qui s'applique aux fonctionnaires de l'État.

La mise à disposition est la situation de l'agent qui demeure dans son corps d'origine, est réputé occuper son emploi, continue à percevoir la rémunération correspondante, mais qui exerce ses fonctions hors du service où il a vocation à servir. Elle est utilisée par 3,1% des agents en position de mobilité (soit 3 500 agents en 2018).

Appuyer le mécénat de compétence sur cette position statutaire permet de sécuriser la situation de l'agent et d'encadrer avec précision les obligations respectives de l'employeur d'origine et du bénéficiaire, notamment en matière de responsabilité, de rémunération ou de retour dans l'administration d'origine.

Pour ne pas distendre le lien entre le fonctionnaire et son administration d'origine, il est proposé de limiter la période de la mise de la mise à disposition à 18 mois renouvelables.

La mesure envisagée permettra à des agents d'expérimenter de nouvelles approches pour les missions d'intérêt général qu'ils servent déjà au quotidien et permettra aux administrations d'enrichir les parcours et les compétences de leurs agents et mobiliser le dispositif pour nouer de nouvelles relations avec les associations, les fondations et les territoires, expérimenter de nouvelles approches et proposer des réponses plus adaptées à chaque contexte territorial et social.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le dispositif s'inscrit dans le cadre des dispositions de la loi relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations du 12 avril 2000 qui encadrent le régime des subventions et prévoient notamment l'obligation, lorsqu'une subvention dépasse un seuil défini par décret, de conclure une convention avec l'organisme de droit privé qui en bénéficie, définissant l'objet, le montant, les modalités de versement et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée.

L'assimilation de la mise à disposition d'un fonctionnaire de l'État à titre gratuit à une subvention vise donc à préciser le régime juridique applicable et place les associations et les fondations subventionnées en situation d'être contrôlées par la Cour des comptes ou les chambres régionales et territoriales des comptes.

La mise à disposition à titre gratuit s'inscrit également dans le cadre du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l'application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Il conviendra notamment de veiller aux obligations liées aux seuils applicables et d'obtenir du bénéficiaire une information sur les éventuelles autres aides relevant du régime des aides de minimis . Ces dispositions ont vocation à être détaillées par décret d'application.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES, FINANCIERS ET BUDGÉTAIRES

La mise à disposition de fonctionnaires de l'État auprès d'associations ou de fondations reconnues d'utilité publique a vocation à leur ouvrir l'accès à des compétences de haut niveau et à faciliter la conduite de projets socialement innovants dans les territoires. L'impact économique de ces projets reste cependant difficile à estimer.

Le fonctionnaire mis à disposition reste rémunéré par son administration d'origine 262 ( * ) . Il peut entraîner un surcoût en cas de remplacement du fonctionnaire sur les missions qu'il cesse d'exercer. Le coût occasionné correspond alors au coût de la solution de remplacement. Ce coût est difficile à estimer parce que tous les employeurs ne choisiront pas de mobiliser des solutions de remplacement et qu'il est directement lié au succès du dispositif

4.3. IMPACTS SUR LES ASSOCIATIONS ET FONDATIONS AGISSANT DANS LES TERRITOIRES

Le renfort en compétences accélérera la conduite des projets et des politiques portés par les associations et les fondations dans les territoires. L'exemple du secteur privé montre que le mécénat de compétence est souvent utilisé comme un moyen pour développer des projets en interne en évitant le recours à des prestataires extérieurs. Au vu du caractère très nouveau du dispositif il est difficile d'identifier les compétences qui seront mises à disposition et de chiffrer le bénéfice pour les associations et les fondations.

4.4. IMPACTS SUR LES ADMINISTRATIONS

L'utilisation du mécénat de compétence dans le secteur privé montre une appropriation croissante du dispositif par les entreprises et des bénéfices en matière de motivation, de développement de nouvelles compétences et d'acquisition d'une vision plus fine des enjeux territoriaux.

Le cadrage proposé du dispositif ouvre une nouvelle possibilité aux administrations de l'État. Elles restent libres de construire une doctrine d'utilisation compatible avec leurs enjeux et leurs missions.

Il n'existe pas de données permettant d'estimer l'impact pour les administrations. Plusieurs usages sont possibles :

- l'administration peut autoriser la mise à disposition d'un agent deux journées par mois pendant un an sans remplacer l'agent. Dans cette situation le coût financier du dispositif porte uniquement sur la moindre activité de l'agent sur son poste et reste faible ;

- un employeur peut accepter la demande d'un cadre senior d'être mis à disposition d'une association ou d'une fondation partenaire pendant une année. Le coût financier pour l'employeur correspond au montant de la rémunération annuelle et des cotisations.

Le dispositif ne pouvant être imposé à l'employeur, celui-ci reste juge du coût financier qu'il est prêt à consentir.

5. CONSULTATIONS ET MODALITES D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La disposition a été soumise au Conseil supérieur de la fonction publique de l'État.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'entrée en vigueur de ces dispositions intervient au lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

5.2.3. Texte d'application

Un décret en Conseil d'État précisera notamment l'articulation avec le régime des aides d'état et les dispositions devant apparaître dans la convention signée entre l'administration de l'Etat concernée et l'association ou la fondation bénéficiaire. Il précisera également le contenu et les modalités d'évaluation de la présente mesure ainsi que les règles selon lesquelles les administrations de l'Etat informent les services du ministre chargé de la fonction publique de la mise en oeuvre de cette disposition.

CHAPITRE VII - TRANSPARENCE DES ENTREPRISES PUBLIQUES LOCALES

Le terme d'entreprise publique locale regroupe l'ensemble des structures de droit privé dont l'actionnariat est composé au moins en partie par des collectivités locales ou des groupements de collectivités territoriales, créées afin de réaliser des opérations d'aménagement, de construction, pour exploiter des services publics à caractère industriel et commercial ou pour toute autre activité d'intérêt général, dans le cadre d'au moins une compétence de chaque collectivité ou groupement actionnaire.

Les entreprises publiques locales (EPL) regroupent les sociétés d'économie mixte locales (SEML), les sociétés publiques locales (SPL), les sociétés publiques locales d'aménagement (SPLA), les sociétés publiques locales d'aménagement d'intérêt national (SPLA-IN), les sociétés d'économie mixte à opération unique (SEMOP) et les sociétés d'économie mixte d'aménagement à opération unique (SEMAOU).

Elles sont essentiellement régies par le titre II, III et IV du livre V de la première partie du code général des collectivités locales (CGCT) et par le titre II du livre III du code de l'urbanisme 263 ( * ) (CU).

En 2020, 1 332 EPL, dont 887 SEML et 417 SPL, sont recensées 264 ( * ) . 60 EPL ont été créées entre 2019 et 2020 265 ( * ) .

Entre 2014 et 2020, le nombre de SEML a diminué, passant de 997 à 887 (-11%), tandis que le nombre de SPL a fortement augmenté passant de 217 à 417 (+92%). Les SEML restent donc majoritaires mais il se crée davantage de SPL (par création ou transformation de SEML) 266 ( * ) .

Les EPL représentent ensemble près de 5,5 milliards d'euros de capital social et emploient 62 100 agents. Elles disposent de 409 filiales. En moyenne, une EPL sur trois aurait une filiale. La filialisation ne concerne en principe que les SEML 267 ( * ) .

Les principaux secteurs d'activité des SEML 268 ( * ) sont :

- le tourisme, la culture et loisirs (23% des SEML exercent cette activité) ;

- l'habitat et l'immobilier (19,5%) ;

- l'aménagement (18,5%) ;

- l'environnement et les réseaux (17,5%).

Les principaux secteurs d'activité des SPL en 2018 sont :

- l'aménagement (36%) ;

- le tourisme, la culture et les loisirs (32%) ;

- l'environnement et les réseaux (12%).

En 2018, un tiers des SEML étaient mono-activité et deux tiers d'entre elles exerçaient plusieurs activités.

Enfin, concernant l'actionnariat des SEML en 2018, le capital de celles-ci était en moyenne détenu à 63% par les collectivités et leurs groupements, à 12% par les institutions financières, à 7% par la Caisse de dépôts et consignation, à 5% par les entreprises, à 4% par l'État ou des organismes publics, à 4% par d'autres SEM et les 5% restant notamment par les acteurs du logement et les organismes professionnels et consulaires 269 ( * ) .

Les règles de participation au capital des EPL qui s'appliquent aux collectivités territoriales et à leurs groupements ont été récemment assouplies par la loi n° 2019-463 du 17 mai 2019 tendant à sécuriser l'actionnariat des entreprises publiques locales. Celle-ci dispose que la réalisation de l'objet d'une EPL concourt à l'exercice d'au moins une compétence de chacune des collectivités ou chacun des groupements actionnaires, et revient ainsi sur la jurisprudence du Conseil d'État du 14 novembre 2018 270 ( * ) selon laquelle la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales actionnaire doit exercer l'ensemble des compétences sur lesquelles porte l'objet social de la société.

En tant qu'actionnaires, les collectivités ou groupements doivent s'assurer de la bonne gestion de l'EPL. Les articles L. 1524-1 et suivants du CGCT mettent en place différentes mesures de contrôle dans ce but 271 ( * ) . Or, la gestion de ces EPL a fait l'objet de plusieurs rapports récents soulignant tous la nécessité de renforcer la transparence de leur action tant au regard des enjeux juridiques de responsabilité, et aux enjeux financiers que de l'impératif de bonne gestion des services publics locaux dont elles ont la charge.

La Cour des comptes a publié en mai 2019 un rapport intitulé « Les sociétés d'économie mixte locales (SEML), un outil des collectivités à sécuriser » . Il a été produit à la suite d'un référé de la Cour en 2017 sur les insuffisances du cadre juridique et comptable applicable aux EPL, ainsi qu'à une revue de dépenses des corps d'inspection, également en 2017, sur la maîtrise des risques par les EPL 272 ( * ) , qui concluent tous deux à une insuffisance de contrôle et de transparence de ces structures et formulent diverses recommandations afin de modifier le régime qui leur est applicable.

Le rapport de la Cour des comptes de 2019 met en lumière plusieurs types de risques juridiques et financiers pour les collectivités territoriales et leurs groupements, actionnaires des SEML, liés notamment à leur pluriactivité ainsi qu'à leur filialisation.

A l'occasion des débats sur la loi n° 2019-463 du 17 mai 2019 tendant à sécuriser l'actionnariat des entreprises publiques locales, le besoin de réguler le secteur des EPL a été évoqué. Le Sénat s'est alors prononcé en faveur d'« une réforme ambitieuse dans un futur proche » afin que les recommandations de la Cour des comptes puissent être retranscrites dans la loi. Selon les termes du rapport législatif de M. Philippe Latombe, « dès lors que trois rapports en trois ans auront dressé des constats convergents quant à la nécessité de mieux garantir la transparence au sein des entreprises publiques locales, il serait normal que le législateur en soit saisi. Il y aurait d'ailleurs quelque logique à ce que les libertés réaffirmées par la proposition de loi aient, pour atténuer les risques pesant sur les collectivités, des contreparties en termes de transparence et de responsabilité ». Le rapporteur conclut en préconisant une concertation préalable d'envergure.

De son côté, la fédération des élus des EPL a présenté son livre blanc sur l'économie mixte locale en octobre 2019, qui présente plusieurs propositions en faveur de la transparence de l'action des EPL et de l'encadrement du statut des élus et dirigeants concernés.

Article 70 : Renforcement du contrôle par les assemblées délibérantes

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Concernant le renforcement des dispositions sur le rapport du mandataire

L'article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que « les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires se prononcent sur le rapport écrit qui leur est soumis au moins une fois par an par leur représentant au conseil d'administration ou au conseil de surveillance, et qui porte notamment sur les modifications des statuts qui ont pu être apportées » aux EPL.

Le droit actuel prévoit une procédure permettant à la collectivité territoriale ou au groupement actionnaire de disposer d'informations sur l'EPL dans laquelle elle détient des parts. Le contenu de ce rapport n'est cependant pas normé et ne donne pas nécessairement lieu à débat avant la délibération de l'organe délibérant.

Tant la Cour des comptes que la revue des dépenses sur les EPL de 2017 précités préconisent de renforcer la procédure, dite du rapport du mandataire, qui est « essentielle pour assurer un retour d'information global sur la situation de l'EPL (...) Eu égard aux risques que les EPL font potentiellement courir aux collectivités territoriales, il est important que les élus soient saisis en amont. Il paraît donc souhaitable de solenniser cette procédure par un vecteur législatif qui puisse ainsi attester son importance en renforçant sa portée . »

La Cour des comptes, dans son rapport de mai 2019 susmentionné, réitère dans sa recommandation n° 6 de « modifier le CGCT en vue d'enrichir le rapport du mandataire à l'assemblée qui l'a désigné de données relatives à l'activité passée et à venir de la SEM ainsi que sur les risques correspondants pesant sur la collectivité actionnaire ».

Le référé de 2017 précité préconise la mise en place d'une procédure d'information des assemblées délibérantes sur les éléments de rémunération de toute nature des mandataires sociaux des EPL et de leurs filiales directes et indirectes, non élus.

Concernant l'extension du type d'organismes pour lesquels une prise de participation d'une EPL nécessite l'accord préalable de la collectivité actionnaire

Actuellement, l'avant-dernier alinéa de l'article L. 1524-5 du CGCT dispose que les collectivités territoriales et leurs groupements actionnaires d'une SEML disposant d'un siège au conseil d'administration doivent donner leur accord exprès préalablement à toute prise de participation de la SEML dans le capital d'une « société commerciale ».

Or, on constate en pratique que les SEML prennent des parts ou participent à des organismes qui ne sont pas nécessairement des sociétés commerciales, tels que les sociétés civiles immobilières (SCI) et les groupements d'intérêt économique (GIE).

L'absence de mention de ces sociétés non commerciales par l'article L. 1524-5 du CGCT fait peser un doute sur la nécessité ou non d'un accord préalable des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires de la SEML pour des prises de participation dans ces organismes.

En outre, la notion de prise de participation est générale et ne permet pas d'avoir de précision sur les prises de participation indirectes, lorsque la société dans laquelle la SEML détient des parts prend elle-même des parts dans une autre société.

Enfin, la rédaction actuelle de l'article ne prévoit pas de sanction en cas d'absence d'accord de la collectivité territoriale ou du groupement actionnaire sur la prise de participation de la SEML. Ce point est également relevé par la Cour des comptes dans son rapport de 2019 précité.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. Les entreprises publiques locales étant des entités créées et contrôlées par les collectivités territoriales et leurs groupements, les règles régissant leur fonctionnement relèvent du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les dispositions qu'il est envisagé de renforcer afin d'améliorer la nature du contrôle des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires sur la gestion de leurs EPL sont de niveau législatif.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure renforçant le contenu du rapport dit du mandataire vise à améliorer la transparence de la gestion des EPL vis-à-vis de leurs collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires en :

- s'assurant que l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou du groupement actionnaire prenne connaissance et se prononce par délibération sur le rapport du mandataire ;

- s'assurant de la qualité de l'information que fait remonter le mandataire dans son rapport auprès de l'assemblée de la collectivité territoriale ou du groupement.

L'extension du type d'organismes pour lesquels une prise de participation d'une EPL nécessite l'accord préalable de la collectivité territoriale ou du groupement actionnaire à tout type de société, qu'elles soient françaises ou étrangères, et dont le défaut est sanctionné par une clause de nullité, permet de renforcer le contrôle des assemblées délibérantes sur les choix stratégiques opérés par l'EPL ainsi que le respect de ces dispositions.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Concernant le rapport du mandataire, ni le code de commerce ni le code général des collectivités territoriales ne précisent les informations qui doivent être contenues dans le rapport du mandataire, exception faite de la mention dans l'article L.1524-5 du CGCT de la modification des statuts de la SEML.

De simples recommandations à l'attention des collectivités territoriales et de leurs groupements ne sont pas apparues suffisantes au regard de l'importance que revêtent ces informations pour assurer l'effectivité et l'efficacité du contrôle des SEML par ces actionnaires.

Concernant les prises de participation soumises à l'accord préalable de la collectivité territoriale ou du groupement actionnaire, la question s'est posée de savoir si seules les prises de participation directes devaient être concernées ou s'il convenait de prévoir la situation où la société, dans laquelle l'EPL détient une participation, prend elle-même une participation dans une autre société. Ces prises de participation en cascade sont toutefois susceptibles d'avoir un impact financier sur l'EPL.

3.2. OPTION RETENUE

Il est proposé que le rapport du mandataire fasse l'objet d'un débat préalable à la délibération au sein de l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou du groupement actionnaire et que son contenu soit étendu à l'évolution de la situation financière, le cas échéant consolidée de la société et les éléments de rémunération et avantages en nature des mandataires sociaux de la société et de ses filiales directes et indirectes.

Il est proposé de renvoyer à un décret simple la liste des informations attendues dans ce rapport, telles que précisées dans le point 5.2.3. ci-dessous.

La modification retenue rend l'accord préalable à toute prise de participation de l'EPL applicable à tout type de société et aux GIE et à tout type de participation, directe ou indirecte. A défaut, cette prise de participation sera frappée de nullité.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L.1524-5 du code général des collectivités territoriales est modifié.

Par renvoi des dispositions législatives relatives aux SPL, SPLA, SPLA-IN, SEMOP et SEMAOU, le régime juridique des SEML leur est applicable, sauf dispositions contraires.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Concernant l'extension des informations à faire apparaître dans le rapport du mandataire, la mesure est susceptible d'augmenter la charge de travail du représentant de la collectivité territoriale ou du groupement actionnaire.

4.3. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

La mesure instaurant la nullité des actes non transmis a un impact pour toutes les entreprises publiques locales et les sociétés dans lesquelles elles prennent des participations.

Les conséquences de la nullité en droit des sociétés sont cependant à relativiser car celle-ci n'est pas rétroactive, et des procédures de régularisation permettent d'éviter l'annulation de l'acte en cause.

En outre, la nullité d'une délibération sociale doit être prononcée par le juge.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La Fédération des élus des Entreprises publiques locales (FedEPL) 273 ( * ) s'est montrée favorable, dans son livre blanc présenté en octobre 2019 274 ( * ) , au renforcement du contenu du rapport du mandataire, ainsi qu'à l'accord préalable de la collectivité actionnaire avant toute prise de participation de l'EPL dans une autre société. Sur ce dernier point, la FedEPL le limite aux prises de participation majoritaires.

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

En vertu des dispositions de la circulaire du Premier ministre du 17 juillet 2013 relative à la mise en oeuvre du gel de la réglementation, et afin de permettre aux entreprises de s'adapter aux nouvelles dispositions, le présent article prévoit une entrée en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre et Miquelon.

Cette mesure ne peut pas être étendue au contrôle de l'assemblée de la Polynésie française sur les SEM du Pays, ce domaine relevant de la loi organique.

Elle n'est pas non plus applicable à Wallis et Futuna, qui a la compétence sur les participations du territoire au capital de sociétés d'Etat ou d'économie mixte et, exceptionnellement, de sociétés privées qui concourent au développement économique du territoire (article 46, k) du décret n° 57-811 du 22 juillet 1957).

Conformément au principe de spécialité législative, cette mesure n'est pas applicable aux SEM des communes de la Polynésie française (article L. 1862-1 du CGCT) ni aux SEM de la Nouvelle-Calédonie, de ses provinces et de ses communes (article 8-1 de la loi ordinaire n° 99-210 du 19 mars 1999). Ces dispositions pourront le cas échéant leur être étendues et adaptées dans le cadre de l'ordonnance prévue à l'article 65 de la loi.

5.2.3. Textes d'application

Un décret d'application précisant les mentions que doit contenir le rapport du mandataire visé à l'article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales.

Les informations attendues seraient les suivantes :

I.- Les informations générales sur la société

1° La présentation des missions ;

2° Les modifications de statuts ;

3° L'évolution de l'actionnariat ;

4° L'état de l'ensemble des prises de participation directes et indirectes de la société au capital d'autres sociétés ou groupements d'intérêt économique ;

5° La description des principaux risques et incertitudes auxquels la société est confrontée ;

6° L'explication des votes et des positions qui ont été prises par les administrateurs mandataires de la collectivité ;

7° Les principales caractéristiques des procédures de contrôle interne et de gestion des risques mises en place par la société.

II. - Les informations financières

1° La situation financière de la société, le cas échéant consolidée, analysée au regard d'indicateurs clés de performance, et son évolution prévisible ;

2° Les éléments fixes, variables et exceptionnels de la rémunération ainsi que les avantages de toute nature des mandataires sociaux de la société et de ses filiales directes et indirectes ;

3° La répartition du chiffre d'affaires par compétence mise en oeuvre pour la collectivité territoriale ou le groupement ;

4° La répartition du chiffre d'affaires distinguant la part imputable aux actionnaires, la part rattachable à des activités exercées pour d'autres personnes publiques ou privées non-actionnaires et les opérations pour compte propre ;

5° Les relations entre la collectivité territoriale ou le groupement et la société et notamment la part de capital en numéraire, les apports en compte courant, les garanties d'emprunt.

Article 71 : Renforcement du rôle des commissaires aux comptes

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Concernant les règles de nomination des commissaires aux comptes (CAC)

Jusqu'à l'adoption de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), les sociétés anonymes (SA) et les sociétés en commandite (SAC) par actions étaient tenues de désigner un CAC dans tous les cas, à la différence des autres formes de sociétés commerciales, qui n'étaient tenues à cette obligation que lorsqu'elles dépassaient certains seuils.

Afin d'harmoniser les obligations des sociétés commerciales, l'article 20 de la loi PACTE introduit des seuils pour la désignation d'un CAC par les SA et les SCA. Ces seuils sont définis par un décret du 24 mai 2019 275 ( * ) et sont alignés sur les seuils européens : 4 millions d'euros (M€) de total de bilan, 8 M€ de chiffre d'affaires et 50 salariés. Sont tenues de désigner au moins un CAC les sociétés qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, les seuils de deux de ces trois critères.

L'article 30 de la loi PACTE crée un nouvel article L. 1524-8 du code général des collectivités territoriales qui maintient l'obligation de désigner au moins un CAC pour l'ensemble des EPL. Les sociétés que ces dernières contrôlent sont soumises aux dispositions de droit commun.

Concernant les obligations d'information pesant sur les commissaires aux comptes

Les CAC ont l'obligation de transmettre, à leur initiative et dans le cadre de leur mission de certification des comptes un signalement :

- en cas de détection d'inexactitudes ou d'irrégularités à la plus prochaine assemblée générale ou réunion de l'organe compétent (article L. 823-12 du code de commerce) ;

- en cas de procédure d'alerte : le CAC de la société doit attirer l'attention du président du conseil d'administration ou du directoire des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation (article L. 234-1 du code de commerce). A défaut de réponse, il invite par écrit, dont copie est transmise au président du tribunal de commerce, les dirigeants à faire délibérer le conseil d'administration ou de surveillance. Il peut demander à être entendu par le président du tribunal de commerce ;

- en cas de faits délictueux dont ils ont connaissance, et qu'ils révèlent au procureur de la République (même article L. 823-12).

Des obligations pèsent également sur eux auprès de TRACFIN en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, ou auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en cas de doute sérieux concernant la continuité d'exploitation d'une entité contrôlée dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé.

Ces mesures d'information sont destinées à l'autorité judiciaire ou aux autorités publiques chargées de procédures pénales ou de discipline.

Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport de 2019, les CAC n'ont donc « aucune obligation d'informer le Préfet ou la chambre régionale des comptes, pour ce qui concerne les risques financiers que fait peser une SEM sur les collectivités et groupements actionnaires ». Ce constat faisait déjà l'objet d'une recommandation de la Cour à l'occasion de son référé de 2017.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales. Les entreprises publiques locales étant des entités créées et contrôlées par les collectivités territoriales et leurs groupements, les règles régissant leur fonctionnement relèvent du domaine de la loi.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Au regard des deux constats relatifs au champ d'intervention des commissaires aux comptes et de leur pouvoir, la législation doit être complétée afin d'améliorer les contrôles sur l'activité des EPL et de leurs filiales.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif de cet article est d'assurer la qualité de la gestion des sociétés contrôlées par les EPL, ainsi que de faciliter des signalements d'activités frauduleuses ou mettant en péril les EPL et les sociétés qu'elles contrôlent en :

- imposant la nomination d'au moins un commissaire aux comptes aux sociétés contrôlées par une EPL au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, sans condition de seuil, et l'inciter dans les sociétés non contrôlées ;

- étendant certaines obligations d'information du CAC.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

L'extension de l'obligation de se doter d'un CAC pouvait concerner :

- soit uniquement les filiales des EPL, donc les sociétés dont le capital est détenu à plus de 50% par les EPL, selon les termes de l'article L. 233-1 du code commerce ;

- soit les sociétés contrôlées par les EPL, au sens de l'article L. 233-3 du même code qui précise qu'une société en contrôle une autre lorsqu'elle détient (directement ou indirectement) une fraction du capital lui assurant la majorité des droits de vote à l'assemblée générale (AG), lorsqu'elle a la majorité des droits de vote après accord avec les associés, lorsqu'elle détermine, par ses droits de vote, les décisions de l'AG ou lorsqu'elle dispose du pouvoir de nommer ou révoquer la majorité des membres des organes de direction 276 ( * ) ;

- soit l'ensemble des sociétés dans lesquelles les EPL détiennent des participations ;

- soit l'ensemble des sociétés dans lesquelles les EPL détiennent des participations ainsi que les GIE.

3.2. OPTION RETENUE

L'obligation de désignation d'un CAC est limitée aux sociétés contrôlées au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, sans condition de seuil, dans la mesure où la responsabilité de l'EPL y est par nature prépondérante. Les collectivités territoriales ou leurs groupements actionnaires auront également la possibilité de conditionner leur autorisation à la prise de participation d'une EPL au capital d'une société non contrôlée ou d'un GIE, à la désignation d'un CAC. Dans ces deux cas, un même commissaire au compte pourra être désigné pour l'EPL et la société contrôlée ou non.

La mesure proposée étend, d'autre part, les obligations d'information en cas de détection d'irrégularités ou inexactitudes dans les comptes d'une société d'économie mixte locale ou d'une société qu'elle contrôle, aux collectivités territoriales et à leurs groupements actionnaires, à la chambre régionale des comptes et au représentant de l'État dans le département. L'information relative à la procédure d'alerte est, par ailleurs, étendue à ces mêmes destinataires.

Dans les deux cas précités, il est dérogé de façon expresse à l'article L. 822-15 du code de commerce relatif au secret professionnel, en ce qu'il prévoit que « sous réserve des dispositions de l'article L. 823-12 et des dispositions législatives particulières , les commissaires aux comptes (...) sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance à raison de leurs fonctions » .

Afin de permettre un renouvellement régulier des CAC plus propice à la transparence, la durée de la mission est de trois ans, par dérogation à l'article L. 823-3 du code de commerce.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 1524-8 du code général des collectivités territoriales est modifié.

4.2. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

Ces mesures ont un impact sur les entreprises contrôlées par des EPL, ainsi qu'éventuellement, sur celles dans lesquelles les EPL détiendraient une participation. Ces entreprises se verraient dans l'obligation de se doter d'un CAC, indépendamment des seuils d'activité susvisés.

Les mesures envisagées sont également de nature à augmenter la charge de travail des CAC, ne serait-ce qu'à hauteur des quelques 400 filiales d'EPL.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La FedEPL s'est montrée favorable, dans son livre blanc présenté en octobre 2019, à l'obligation de désignation d'un CAC pour les filiales de SEM.

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

En vertu des dispositions de la circulaire du Premier ministre du 17 juillet 2013 relative à la mise en oeuvre du gel de la règlementation, et afin de permettre aux entreprises de s'adapter aux nouvelles dispositions, le présent article prévoit une entrée en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République, à l'exception de la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et Wallis et Futuna.

En effet, la règlementation commerciale est une compétence locale pour la Polynésie française (article 13 de la loi organique du 27 février 2004), la Nouvelle-Calédonie (article 26 de la loi organique du 19 mars 1999) et Wallis et Futuna (article 40, 8° du décret du 22 juillet 1957).

Article 72 : Extension du contrôle de l'Agence française anticorruption (AFA)

1. ÉTAT DES LIEUX

L'Agence française anticorruption (AFA) est un service à compétence nationale créé par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

Placée auprès du Garde des Sceaux, ministre de la justice et du ministre en charge du budget, elle aide les autorités compétentes et les personnes qui y sont confrontées à prévenir et à détecter les faits de corruption, de trafic d'influence, de concussion, de prise illégale d'intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme.

Actuellement, conformément au 3° de l'article 3 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, l'AFA « contrôle, de sa propre initiative, la qualité et l'efficacité des procédures mises en oeuvre au sein des administrations de l'État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et sociétés d'économie mixte , et des associations et fondations reconnues d'utilité publique pour prévenir et détecter les faits de corruption, de trafic d'influence, de concussion, de prise illégale d'intérêt, de détournement de fonds publics et de favoritisme. »

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La revue des dépenses IGA-CGEFI de juin 2017 préconise l'extension du contrôle de l'AFA aux SPL et SPLA. Leur exclusion de l'actuel article 3 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 résulterait d'un simple oubli ou de divergences d'interprétation.

Par ailleurs, le deuxième alinéa du 3° de l'article 3 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 prévoit la possibilité de saisine de l'AFA par certaines autorités publiques 277 ( * ) .

La présente mesure nécessite de modifier la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 et est donc de nature législative.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La mesure proposée vise à permettre à l'AFA de contrôler l'ensemble des EPL.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Aucune autre option n'a été envisagée pour assurer cette mise en cohérence du champ d'application de la loi.

3.2. OPTION RETENUE

Le dispositif retenu étend le contrôle de l'AFA à toutes les sociétés dont le régime relève du titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales, soit aux SEML, aux SPL, aux SEMOP, aux SPLA et SPLA-IN et aux SEMAOU.

Elle modifie également le deuxième alinéa du 3° de l'article 3 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 pour permettre au préfet de saisir l'AFA pour contrôler toutes les EPL, et non uniquement les SEML.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article 3 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique est modifié.

4.2. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

Cette mesure n'aurait d'impact que sur les sociétés publiques locales, désormais susceptibles d'être contrôlées par les services de l'AFA.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Les facultés de contrôle de l'AFA sont étendues. La mesure élargit le champ du contrôle mais n'entraîne pas nécessairement de charge de travail supplémentaire. L'AFA pourra contrôler une SPL en lieu et place d'une autre structure.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La FedEPL s'est montrée favorable, dans son livre blanc présenté en octobre 2019, à étendre le pouvoir de contrôle de l'AFA à l'ensemble des EPL.

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La mesure envisagée s'appliquera dès le lendemain de la promulgation de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique à l'ensemble du territoire de la République.

Article 73 : Nullité des actes non transmis

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

L'article L. 1524-1 du CGCT instaure un contrôle spécifique sur les actes des EPL, reposant sur l'information du préfet et non sur le contrôle de légalité. Ainsi, sont transmis au préfet, dans un délai de 15 jours suivant l'adoption :

- les délibérations du conseil d'administration ou du conseil de surveillance et des assemblées générales ;

- les contrats de concession d'aménagement ;

- les comptes annuels ;

- le rapport général et le rapport spécial sur ces comptes établis annuellement par le commissaire aux comptes.

Le représentant de l'État dispose ainsi d'informations sur la gestion des entités satellites des collectivités territoriales et de leurs groupements qui ont un impact sur les finances de ces derniers. Ces informations lui permettent d'évaluer la nécessité de saisir, le cas échéant, la chambre régionale des comptes, en vertu de l'article L. 1524-2 du CGCT.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 34 de la Constitution dispose que la loi détermine les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le défaut éventuel de transmission des actes listés à l'article L. 1524-1 du CGCT n'est assorti d'aucune sanction.

Dans son relevé d'observations provisoire (ROP) sur les SEML en date du 13 mars 2019, la Cour des comptes relevait que « de manière générale, le préfet n'a aucune certitude que les actes de gestion des SEM lui sont transmis. Il s'ensuit un vide juridique par effet de la pratique qui remet en cause la portée du contrôle de légalité » 278 ( * ) .

En conséquence, la Cour recommandait d'instituer une clause légale de nullité des actes soumis à l'obligation de transmission au Préfet, au titre du contrôle de légalité ou du droit d'information, en cas de défaut de transmission (recommandation n°2).

Dans son rapport définitif de mai 2019, elle a fait évoluer cette recommandation : « aligner le régime juridique de transmission des actes des SEML relevant du droit à l'information de l'autorité préfectorale sur celui des actes de leurs collectivités ou groupements actionnaires afin que ces actes ne soient exécutoires que s'ils ont été transmis au représentant de l'État ».

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif de la mesure est de rendre la transmission des actes au préfet effective, afin d'assurer la bonne information du représentant de l'État dans le département concernant la gestion des EPL de son territoire.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Deux options pouvaient être envisagées : assortir la non-transmission d'un acte soit de sa nullité, soit de l'absence de caractère exécutoire.

Dans le premier cas, l'acte non transmis produira ses effets immédiatement, et s'il n'a pas été transmis dans le délai de 15 jours prévu par l'article L. 1524-1 du CGCT, il sera considéré comme nul. Dans le second cas, l'acte ne produira pas ses effets tant qu'il n'aura pas été transmis.

3.2. OPTION RETENUE

L'option de la clause de nullité a été retenue.

La transmission au préfet prévue par l'article L. 1524-1 du CGCT constitue une spécificité pour les EPL. Elle est présentée comme un droit à l'information du Préfet et se distingue du contrôle de légalité.

Si, aux fins de renforcer l'effectivité de la transmission, le choix est fait de conditionner l'effet exécutoire de l'acte à cette dernière, cela conduit à instaurer un contrôle de légalité.

Au regard du statut des EPL, qui sont des SA et pour le fonctionnement desquelles il est renvoyé au code du commerce, le régime de contrôle de légalité renverrait de façon excessive au droit public.

La sanction de la nullité, qui, elle, renvoie au droit commercial est plus adaptée.

En prévoyant une telle nullité, les EPL seraient les seules entreprises privées dont les actes perdraient leur caractère exécutoire s'ils n'étaient pas transmis dans les quinze jours au Préfet.

Toutefois, celles-ci se trouvent d'ores et déjà dans une situation différente de celle des autres SA, dans la mesure où leur capital est majoritairement, voire intégralement public, ce qui justifie qu'on leur applique un régime différent.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 1524-1 du code général des collectivités territoriales est modifié.

4.2. IMPACTS SUR LES ENTREPRISES

La mesure a un impact pour toutes les entreprises publiques locales.

Elle vise à avoir un caractère fortement incitatif pour les EPL quant à leurs obligations de transmission des actes au représentant de l'État.

La conséquence de la nullité est cependant à relativiser car d'une part celle-ci n'est pas rétroactive en droit des sociétés, et d'autre part, ce même droit laisse une large place aux procédures de régularisation afin d'éviter l'annulation de l'acte en cause. La transmission a posteriori de l'acte serait de nature à permettre de lever la nullité.

En outre, en droit commercial, la constatation de la nullité d'une société ou d'une délibération sociale implique nécessairement une décision de justice.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

La FedEPL s'est montrée favorable, dans son livre blanc présenté en octobre 2019, à l'instauration d'un « dispositif affirmant le non-effet des actes relevant du droit à l'information de l'autorité préfectorale qui seraient non transmis par les EPL ».

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

En vertu des dispositions de la circulaire du Premier ministre du 17 juillet 2013 relative à la mise en oeuvre du gel de la réglementation, et afin de permettre aux entreprises de s'adapter aux nouvelles dispositions, le présent article prévoit une entrée en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi.

5.2.2. Application dans l'espace

Cette mesure s'applique aux collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre et Miquelon.

Cette mesure ne s'applique pas dans les collectivités où le droit des sociétés relève de la compétence locale en Polynésie française (article 13 de la loi organique du 27 février 2004) en Nouvelle-Calédonie (article 26 de la loi organique du 19 mars 1999) et à Wallis et Futuna (article 40, 8° du décret du 22 juillet 1957).

CHAPITRE VIII - MODERNISATION DES MISSIONS DES CHAMBRES RÉGIONALES DES COMPTES

Article 74 : Evaluation des politiques publiques territoriales

1. ETAT DES LIEUX

L'article L. 132-6 du code des juridictions financières prévoit que « la Cour des comptes peut être saisie d'une demande d'évaluation d'une politique publique par le président de l'Assemblée nationale ou le président du Sénat, de leur propre initiative ou sur proposition d'une commission permanente dans son domaine de compétence ou de toute instance permanente créée au sein d'une des deux assemblées parlementaires pour procéder à l'évaluation de politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente » .

Dans le cadre de l'élaboration du projet stratégique de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes (CRTC) pour 2025, l'atelier consacré au fait territorial, qui a pu s'appuyer sur de nombreuses consultations interne et externe, a relevé une prise en compte insuffisante de la dimension territoriale des politiques publiques et, de ce fait, un défaut dans l'appui à la décision publique locale, ce qu'un panel d'élus locaux a pu confirmer. L'étude annuelle du Conseil d'Etat pour 2020 formulait déjà une proposition à cet égard 279 ( * ) .

Au plan local, les CRTC sont en effet une autorité reconnue mais concentrée sur les missions fixées par le code des juridictions financières, qui comprennent le jugement des comptes, le contrôle des comptes et de la gestion et le contrôle des actes budgétaires et d'actes spécifiques. L'analyse de leurs observations par la Gazette des communes illustre le fait que plus de 60% portent sur des questions de régularité et de suivi de leurs recommandations 280 ( * ) .

Or, peu de domaines aujourd'hui, jusque dans le régalien (polices nationale et municipales), échappent à un schéma dans lequel l'État et les collectivités territoriales sont indissolublement liés. Les juridictions financières n'ont pas suffisamment pris en compte cette évolution et les procédures de formations inter juridictions permettant de fédérer Cour des comptes et CRTC dans leur contrôle sont encore peu nombreuses au regard du champ des politiques partagées. L'étude annuelle du Conseil d'Etat pour 2020 relevait qu'il était important que les collectivités territoriales, du moins celles qui en ont les moyens, s'impliquent dans l'évaluation des politiques publiques car il s'agit d'un outil de pilotage très utile pour la conduite des politiques publiques relevant de leurs compétences propres.

Par ailleurs, l'évaluation de la performance des politiques décentralisées est insuffisamment développée dans les travaux des CRTC, qui font davantage apparaître les dimensions organique ou budgétaire.

Au final, l'évaluation des politiques publiques ou de leur mise en oeuvre ne couvre pas tout leur champ, voire le couvre de moins en moins du fait des transferts de compétences de l'État aux collectivités territoriales. Ce constat doit inciter les juridictions financières à faire évoluer le droit applicable pour offrir aux collectivités un droit à une évaluation publique des politiques qu'elles définissent et mettent en oeuvre.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Il est proposé de faire évoluer le rôle des CRC, à l'instar de celui déjà joué par la Cour des comptes au bénéfice du Parlement, en ouvrant la possibilité au conseil régional ou au conseil départemental, de saisir la Chambre du ressort d'une demande d'évaluation d'une politique publique relevant de leur compétence, à une reprise au cours du mandat, par exemple dans les domaines de la formation professionnelle, de l'aide sociale à l'enfance ou encore de la construction, de l'entretien et de l'équipement de s collèges et lycées.

Les compétences des CRC sont fixées par la loi. Le code des juridictions financières doit être complété afin de leur confier une nouvelle mission d'évaluation des politiques publiques territoriales.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Cette mission nouvelle vise à transformer les relations entre l'État et les collectivités territoriales concernées en fournissant à ces dernières la faculté de bénéficier d'une assistance des CRC dans l'évaluation d'une politique publique de leur choix.

Les modalités envisagées dans le présent article sont identiques à celles qui gouvernent les demandes émanant des commissions compétentes des assemblées parlementaires vis-à-vis de la Cour des comptes, fixées aux articles L. 132-5 à L. 132-6 du code des juridictions financières.

3. DISPOSITIF RETENU

S'agissant du périmètre de cette nouvelle compétence des CRC, il a été retenu de la limiter, dans un premier temps, aux politiques publiques conduites par les conseils régionaux et départementaux.

Dans le dispositif proposé, il n'est en effet pas prévu que la CRC concernée puisse refuser la demande d'évaluation formulée à l'instar de la procédure appliquée entre la Cour des comptes et les commissions parlementaires mais qu'un échange intervienne pour préciser le sujet et le calendrier de remise du rapport d'évaluation.

Un droit de saisine au profit des conseils régionaux et départementaux représente en effet un défi important de mise en oeuvre à moyens constants pour les CRC. Alors que le nombre de magistrats de CRTC en activité reste modeste (366 en 2020), cette nouvelle compétence viendra s'ajouter à l'ensemble de celles déjà exercées par les Chambres, qui ont produit, sur les trois dernières années, une moyenne annuelle de 615 rapports d'observations définitives, 559 avis budgétaires, 366 jugements, 1 113 ordonnances et 320 communications administratives.

Par ailleurs, la disponibilité et la dimension des échantillons de données permettant de mesurer l'effet causal des politiques publiques devant être évaluées plaident pour centrer, dans un premier temps, cette nouvelle mission sur les collectivités les plus importantes.

Ainsi que le relevait l'étude annuelle du Conseil d'Etat en 2020, la fourniture de ce service public gratuit aux profit de ces deux catégories de collectivités viendrait leur offrir un choix complémentaire alors qu'elles « se sont dotés de capacités d'évaluation, soit en interne, soit en faisant appel à des prestataires extérieurs, soit encore en recourant à l'évaluation interne et à l'évaluation extérieure ».

Suite à cette phase de préfiguration, après une évaluation de la réalité du besoin et des conditions de mise en oeuvre de cette faculté nouvelle, une extension à d'autres catégories de collectivités pourra être envisagée.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

La présente mesure modifie la partie législative du code des juridictions financières en insérant les articles L. 211-15, L. 235-1 et L. 245-1.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Cette disposition ne fait peser aucune obligation nouvelle sur les conseils régionaux et départementaux mais leur ouvre la possibilité de bénéficier d'une évaluation par les CRC des politiques publiques qu'elles définissent et mettent en oeuvre.

4.3. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Cette nouvelle compétence viendra s'ajouter à celles déjà exercées par les CRC en application des dispositions du code des juridictions financières.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au conseil national d'évaluation des normes.

En application de l'article L. 220-12 du code des juridictions financières, la disposition envisagée a été soumise au Conseil supérieur des chambres régionales des comptes.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La disposition envisagée s'appliquera à compter de l'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat.

5.2.2. Application dans l'espace

La disposition envisagée sera applicable dans les ressorts des CRC (métropole, Réunion et Mayotte, Antilles-Guyane), les chambres territoriales étant elles régies par des dispositions organiques (Polynésie Française, Nouvelle Calédonie).

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application de cet article afin de prévoir la procédure de définition des sujets et les délais de réalisation des enquêtes avec les collectivités demanderesses, la méthodologie applicable aux évaluations de politiques publiques locales et l'élargissement de la formation délibérante à l'instar des dispositions prévues à l'article R. 143-24 du code des juridictions financières pour les évaluations conduites par la Cour.

TITRE VIII - DISPOSITIONS RELATIVES A L'OUTRE-MER

Article 75 : Création à titre expérimental d'un état de calamité naturelle exceptionnelle en Outre-mer

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Le terme de « calamité » peut être regardé comme, désignant un malheur collectif, un désastre, un fléau, c'est-à-dire un événement particulièrement grave par sa nature et/ou ses conséquences. Les collectivités ultramarines sont comparativement beaucoup plus exposées aux risques naturels d'une ampleur exceptionnelle que le territoire de la France métropolitaine.

Les Antilles (Guadeloupe, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et la Martinique) sont confrontées à une conjonction de risques. Au niveau sismique, elles sont classées au plus haut niveau possible (niveau 5). On peut citer notamment le séisme de 1843 en Guadeloupe, le séisme des Saintes en 2004 (magnitude 6,3) et celui de Martinique en 2007 (magnitude 7). Les séismes sous-marins peuvent également générer un risque de tsunamis. S'y ajoute un risque cyclonique majeur, qui est récurrent. En 2017, les Antilles, ont été victimes de trois cyclones majeurs : Irma, José et Maria. Le premier a frappé avec une intensité exceptionnelle les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Enfin, il n'est guère nécessaire de rappeler le risque d'éruptions volcaniques, avec en particulier le massif de La Soufrière en Guadeloupe, dont la dernière éruption remonte à 1976-77.

La Guyane est notamment exposée aux glissements de terrain (13 morts en 2004), aux inondations par ruissellement ou débordement de cours d'eau, mais également à des évolutions du trait de côte, qui peuvent atteindre et dépasser 100 m par an sur certaines parties du littoral.

L'ile de La Réunion cumule différents risques naturels d'ampleur. Au passage des cyclones, fréquents dans cette partie de l'océan indien, on peut atteindre des niveaux record de pluviométrie qui conduisent à un risque d'inondations exceptionnelles, qui se conjuguent aux destructions par les vents. Les phénomènes de mouvements de terrain concernent la quasi-totalité de l'île, avec une ampleur parfois considérable. Enfin, le piton de la Fournaise est un massif volcanique qui demeure fortement actif.

De même, Mayotte est exposée aux risques cycloniques, mais surtout aux glissements de terrains en particulier dans les ravines de plus en plus peuplées. Elle est aussi sujette au risque sismique (séismes répétés en 2018). L'apparition d'un volcan sous-marin au large de l'archipel en mai 2018 fait craindre un phénomène de tsunami, qui a donné lieu à la mise en place d'un dispositif d'alerte de la population, très concentrée sur la bande littorale.

Les collectivités de Polynésie française et de Wallis et Futuna sont confrontées au risque cyclonique, ainsi qu'au risque de submersion marine par Tsunami.

Outre le risque cyclonique récurrent, la Polynésie française est régulièrement touchée par des inondations et des mouvements de terrains liés à des pluies diluviennes et crues torrentielles.

Wallis et Futuna se trouvent à proximité de zones de contact entre les plaques tectoniques de l'Australie et du Pacifique, sujettes à une activité tectonique, sismique et volcanique intense.

Enfin, la collectivité de Saint-Pierre et Miquelon est soumise à des conditions climatiques extrêmes en hiver, avec des vents forts, des marées élevées et des tempêtes. Saint-Pierre et Miquelon-Langlade ont connu des phénomènes de submersion importants au cours de leur histoire.

Confrontées à ces situations de crises extrêmes, les différentes autorités publiques se doivent d'apporter une réponse rapide et adaptée qui, souvent, s'accommode mal des contraintes et délais procéduraux fixés par les différentes législations. En outre, les autorités elles-mêmes (collectivités territoriales, services déconcentrés de l'État, etc.) peuvent, du fait de l'événement par nature imprévisible qui s'est abattu sur un territoire, être dans l'impossibilité pratique de faire fonctionner normalement les institutions.

Ainsi, lorsque le cyclone IRMA a frappé l'ile de Saint-Martin en septembre 2017, les voies de transports et les moyens de communications ont été coupés, le bâtiment de la préfecture a été détruit et les services de la collectivité territoriale ont été très fortement impactés.

C'est pour ces motifs que les différentes législations offrent de longue date, face à des situations d'urgence impérieuse ou en cas de force majeure, des outils permettant d'apporter une réponse plus rapide aux difficultés majeures rencontrées par les populations et aux troubles à l'ordre public qui sont susceptibles de naître dans les jours suivant une catastrophe naturelle de grande ampleur. Ainsi, à la suite du passage du cyclone Irma à Saint-Martin en septembre 2017, la circulation sur les voies publiques, les transports maritimes et les télécommunications fixes ou mobiles ont été presque totalement interrompues. Le bâtiment de la préfecture a été entièrement détruit. Les services de la collectivité territoriale ont été également lourdement impactés et n'ont pu fonctionner correctement. Cette situation de confusion a conduit à de nombreux actes de pillage des commerces ou entrepôts en divers points, que les forces de l'ordre ont tenté de contenir.

Parmi ces procédures dérogatoires, utiles au rétablissement immédiat des institutions et à la prévention des troubles à l'ordre public, on peut relever, de manière non-exhaustive :

Ø En matière de police administrative

Depuis la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, le préfet dispose de pouvoirs spécifiques fondés sur les dispositions du 4° de l'article 2215-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) selon lequel « en cas d'urgence, lorsque l'atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publique l'exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il possède ses pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service et prescrire toute mesure utile jusqu'à ce que l'atteinte à l'ordre public ait pris fin ».

Pour l'exercice de ces pouvoirs, le préfet peut prescrire toute mesure utile jusqu'à ce que l'atteinte à l'ordre public ait pris fin, y compris sur une seule commune. Il ne s'agit donc pas d'un pouvoir exercé au nom des communes, au motif que le ressort de la mesure excéderait le ressort de l'une d'entre elles, mais d'un pouvoir propre du préfet, qu'il exerce en dernier recours et dans le cadre duquel la méconnaissance des mesures prescrites est d'ailleurs assortie de sanctions plus lourdes. En effet, le refus d'exécuter les mesures prescrites par l'autorité requérante constitue un délit puni de six mois d'emprisonnement et 10 000 € d'amende, ce qui, sans être aussi dissuasif que les peines prévues par l'état d'urgence, l'est davantage que les simples contraventions aux arrêtés municipaux.

Ø En matière de commande publique

L'article R. 2122-1 du code de la commande publique dispose que : « l'acheteur peut passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables lorsqu'une urgence impérieuse résultant de circonstances extérieures et qu'il ne pouvait pas prévoir ne permet pas de respecter les délais minimaux exigés par les procédures formalisées. Tel est notamment le cas des marchés rendus nécessaires pour l'exécution d'office, en urgence, des travaux mentionnés aux articles L. 1311-4, L. 1331-24, L. 1331-26-1, L. 1331-28, L. 1331-29 et L. 1334-2 du code de la santé publique et des articles L. 123-3, L. 129-2, L. 129-3, L. 511-2 et L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ainsi que des marchés passés pour faire face à des dangers sanitaires définis aux 1° et 2° de l'article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime. Le marché est limité aux prestations strictement nécessaires pour faire face à la situation d'urgence ».

La jurisprudence et la Commission européenne identifient trois conditions cumulatives pour retenir la condition de « circonstances imprévisibles pour l'acheteur et n'étant pas de son fait » : l'existence d'un événement imprévisible, une urgence incompatible avec les délais exigés par d'autres procédures et un lien de causalité entre l'événement imprévisible et l'urgence qui en résulte 281 ( * ) . Eu égard à son caractère dérogatoire, cette disposition doit faire l'objet d'une interprétation stricte 282 ( * ) .

L'urgence impérieuse est circonscrite aux phénomènes extérieurs, imprévisibles et irrésistibles pour l'acheteur, par exemple une catastrophe naturelle (tempête Xynthia en 2009, ouragan Irma en 2017, inondations ou séismes), une telle circonstance pouvant justifier, d'une part, la nécessité d'actions immédiates pour assurer la continuité du service ou assurer la sécurité des biens et des personnes et, d'autre part, l'impossibilité, pour des raisons de délai ou pour des raisons pratiques, de mettre en oeuvre les procédures classiques (par exemple, indisponibilité des réseaux permettant d'organiser une consultation).

S'agissant des délais, la situation doit rendre impossible le respect des délais exigés par les autres procédures. Une appréciation, au cas par cas, du degré d'urgence de chaque marché doit être effectuée afin de déterminer si une simple réduction des délais de la procédure ne suffit pas pour obtenir la prestation souhaitée dans un délai jugé utile. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) rappelle régulièrement que la situation de force majeure doit faire l'objet d'une interprétation stricte 283 ( * ) , chaque pouvoir adjudicateur devant par exemple prouver qu'il lui aurait été matériellement impossible de recourir à la procédure accélérée, en lieu et place d'une procédure d'attribution de gré à gré.

Par la suite, à mesure que la date des évènements imprévisibles s'éloigne, la nécessité de réaliser les prestations présente de moins en moins le caractère d'urgence impérieuse, motivée par des circonstances imprévisibles. La jurisprudence permet d'apprécier l'écart de temps admis entre la survenance de l'événement imprévisible et la passation de marchés sans mise en concurrence et sans publicité au motif de l'urgence impérieuse. Ainsi, des délais de six mois et de trois mois ont été jugés excessifs respectivement par la décision du Conseil d'État du 26 juillet 1991 n° 117717 et l'arrêt de la CJUE du 2 août 1993, aff. C-107/92.

Par ailleurs, dans la mesure où ces marchés répondent à un besoin immédiat, ils doivent être limités aux seules prestations strictement nécessaires pour faire face à la situation d'urgence. Il convient d'apprécier pour chaque marché, au regard de son objet, s'il répond à un besoin né à la suite de la survenance des évènements imprévisibles et dont la satisfaction relève de l'urgence impérieuse.

A ce titre, les acheteurs peuvent passer des marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence pour, par exemple :

- entreprendre la réfection des voies gravement endommagées ;

- consolider les ouvrages menaçant de s'effondrer ;

- entreprendre des actions de secours aux personnes sinistrées (solutions d'hébergement provisoire, distribution de repas...) ;

- rétablir le fonctionnement des réseaux.

En revanche, l'urgence impérieuse ne saurait justifier la passation de marchés négociés sans mise en concurrence pour, par exemple :

- reconstruire de manière pérenne des bâtiments publics effondrés ;

- assurer le relogement pérenne de sinistrés ;

- réaliser de nouveaux ouvrages 284 ( * ) .

Ø En matière environnementale

En matière de gestion des déchets, le III de l'article L. 541-3 du code de l'environnement prévoit que : « II. -- En cas d'urgence, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente fixe les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l'environnement ». En cas de carence de l'autorité municipale dans l'exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, le préfet doit prendre sur le fondement des dispositions des articles L. 541-2 et L. 541-3 du code de l'environnement, à l'égard du producteur ou du détenteur des déchets, les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement 285 ( * ) .

S'agissant de la sécurité des ouvrages souterrains, aériens ou subaquatiques de transport ou de distribution, l'article R. 554-32 du code de l'environnement prévoit que les travaux non prévisibles effectués en cas d'urgence justifiée par la sécurité, la continuité du service public ou la sauvegarde des personnes ou des biens, ou en cas de force majeure, sont dispensés de déclaration de projet de travaux et peuvent être effectués sans que leur exécutant n'ait à faire de déclaration d'intention de commencement de travaux.

La situation de force majeure permet notamment de proroger le délai de trois ans au terme duquel un arrêté d'enregistrement ou une déclaration d'installation classée pour la protection de l'environnement devient caduc si l'installation n'a pas été mise en service (article R. 512-74 du code de l'environnement). Elle permet également de proroger le délai de validité d'une déclaration de projet (article R. 214-40-3 du même code) et d'une autorisation environnementale (article R. 181-48 dudit code).

Eu égard aux dispositions de l'article R. 436-12 du code de l'environnement enfin, en cas de force majeure, une personne responsable de l'abaissement des eaux dans les parties de cours d'eau, canaux ou plans d'eau dont le niveau est abaissé artificiellement peut s'abstenir, lorsqu'elle décide de l'abaissement du niveau de l'eau, d'avertir la gendarmerie, la fédération départementale des associations agréées de pêche et de protection des milieux aquatiques et le service chargé de la police de la pêche.

Ø En matière de sécurité sanitaire

L'article L. 3131-1 du code de la santé publique (CSP) prévoit qu'en cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population. Le ministre peut également habiliter le représentant de l'Etat territorialement compétent à prendre toutes les mesures d'application de ces dispositions, y compris des mesures individuelles. L'indemnisation des dommages résultats de la mise en oeuvre de ces mesures est prévue aux articles R. 3131-1 et suivants du même code.

Dans le même domaine, les articles R. 6152-33 et R. 6152-225 du CSP prévoient que tout praticien qui est dans l'impossibilité de rejoindre son poste ou d'exercer sa fonction doit en aviser immédiatement le directeur de l'établissement et lui communiquer son adresse. A défaut, il est radié des cadres ou licencié sans indemnité pour abandon de poste. Ces dispositions ne sont toutefois pas applicables en cas de force majeure.

Ø En matière de transports et de secours aux populations

Tout atterrissage ou décollage d'un aéronef exploité par une entreprise de transport aérien est, sauf cas de force majeure, subordonné à l'attribution préalable du créneau horaire correspondant par l'autorité en charge de la coordination de l'aéroport (article R. 132-1 du code de l'aviation civile). Cette disposition ne s'applique pas aux atterrissages d'urgence, aux atterrissages ou décollages de vols d'État ou de vols humanitaires (article R. 132-4 du code de l'aviation civile).

De même, s'agissant des hélicoptères, l'article D. 132-6 du code de l'aviation civile rappelle, qu'en application de l'article R. 132-1 du même code, les hélicoptères peuvent atterrir ou décoller ailleurs que sur un aérodrome lorsqu'ils effectuent des transports publics à la demande, du travail aérien, des transports privés ou des opérations de sauvetage. Ces emplacements sont dénommés « hélisurfaces ». En cas de force majeure, peuvent utiliser les hélisurfaces y compris des pilotes qui ne sont pas titulaires d'une habilitation en ce sens valable sur le territoire national.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Cet article est pris sur le fondement de l'article 37-1 de la Constitution. Il est limité dans son objet (la création d'un état de calamité naturelle exceptionnelle) et dans le temps (5 ans). Il est également limité dans l'espace car ne s'appliquant qu'aux outre-mer.

A l'issue de l'expérimentation, le Gouvernement fera l'évaluation de ce dispositif afin de voir s'il convient de le pérenniser, de le limiter aux outre-mer au titre de l'article 73 de la Constitution ou éventuellement l'étendre dans l'espace.

Cette évaluation sera effectuée avant le terme des cinq années sur la base des documents de retour d'expérience (RETEX) des situations de crise ayant justifié une déclaration d'état de catastrophe naturelle exceptionnelle. Elle dressera l'inventaire des procédures d'urgence ou d'extrême urgence qui auront été mises en oeuvre par les autorités publiques nationales et locales, ainsi que par les personnes privées chargées d'une mission de service public pour chacun de ces évènements naturels. Elle s'attachera à identifier avec précision le jour de déclenchement de ces procédures, la date de fin de leur application ainsi que, dans la mesure du possible, l'inventaire des actes individuels pris dans ce cadre. Elle détaillera également les motifs qui ont été pris en compte par le Gouvernement pour procéder à la déclaration de l'état de calamité naturelle exceptionnelle, au regard des caractéristiques de l'évènement naturel, notamment de son intensité et de son caractère difficilement prévisible.

Dans l'hypothèse où la déclaration d'état de calamité naturelle exceptionnelle aura été renouvelée au-delà d'un délai d'un mois, l'évaluation s'attachera à analyser en détail les raisons qui ont justifié de ce maintien, notamment les obstacles qui ont pu perdurer au fonctionnement normal des autorités publiques locales.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Les diverses hypothèses de mise en oeuvre de procédures dérogatoires ou d'urgence font peser sur les différentes autorités publiques en charge de leur mise en oeuvre la charge de la preuve de la situation justifiant légalement cette dérogation.

Or, lors de la survenance d'un aléa naturel majeur, les autorités publiques sont confrontées dans un premier temps à la nécessité impérieuse de protéger les populations, de rétablir le fonctionnement des institutions et de préserver l'ordre public.

Les autorités publiques peuvent alors, par la suite, être soumises à un important risque contentieux, notamment indemnitaire, leur imposant de justifier, au cas par cas, que la condition légale posée à la mise en oeuvre des procédures dérogatoires était bien remplie.

Par ailleurs, même lorsque le recours à ces procédures est licite, les autorités sont également confrontées à la nécessité de déterminer, au fur et à mesure que l'on s'éloigne de l'évènement, la pertinence du recours à ces procédures dérogatoires.

Cette situation d'insécurité juridique est de nature à entraver l'action des personnes publiques dans ces situations de crise qui nécessite pourtant une rapidité dans la prise de décision et une sérénité de l'action publique.

En outre, l'intensification des aléas (cyclones, séismes, submersions, éruptions, etc.) et la naissance de phénomènes majeurs nouveaux (évènement sismique continu depuis mai 2018 à Mayotte avec 6 000 secousses et un séisme de magnitude 5,8 ; tempête tropicale Fakir en avril 2018, passée proche de La Réunion, présentant une intensité pluvieuse exceptionnelle dépassant les valeurs décennales enregistrées), conjugués à l'isolement des territoires, à l'insularité, à l'enclavement ou à la concentration des populations sur le littoral, font des territoires ultramarins des espaces particulièrement exposés et vulnérables aux risques naturels.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Si les textes actuels permettent de faire face aux principales situations évoquées, la mise en oeuvre de ces procédures est conditionnée à l'existence de troubles à l'ordre public et à une situation d'urgence.

En effet, c'est l'objectif de sauvegarde de l'ordre public, objectif à valeur constitutionnelle, qui justifie qu'il soit porté atteinte aux règles de compétences entre autorités de police.

La mesure envisagée a donc pour objectif, dans l'immédiat après crise, lorsque le besoin de protéger les populations, de rétablir le fonctionnement des institutions et de préserver l'ordre public est impérieux, sur un territoire qui peut être précisément délimité, de pouvoir présumer une telle situation d'urgence ou de force majeure afin de « centraliser » le débat relatif à l'existence de cette condition légale sur un seul et unique acte.

Dans ces conditions, la légalité de l'acte présumant la situation d'urgence ou de force majeure rendra inopérante, dans le cadre de chaque contentieux ponctuel, la critique portant sur la condition légale tenant à l'existence de cette situation.

La présomption d'une situation d'urgence ou de force majeure n'offre toutefois pas un blanc-seing aux personnes publiques qui en bénéficient. En effet, cette présomption ne doit jouer qu'autant qu'elle justifie la mise en oeuvre des procédures dérogatoires aux seules fins de rétablir le fonctionnement normal des institutions, la sécurité des populations, l'ordre public, pris en ses différentes composantes, l'approvisionnement en biens de première nécessité et de mettre fin aux atteintes à la santé publique.

3. DISPOSITIF RETENU

A titre expérimental, il est institué, pour une durée de cinq ans, dans les collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution, un état de calamité naturelle exceptionnelle (ECNE). Cette expérimentation est limitée à l'outre-mer en raison d'une plus forte exposition de ces territoires au risque de calamité naturelle exceptionnelle et de l'impossibilité, résultant de leur insularité et de leur éloignement par rapport à la métropole, d'activer des mécanismes de solidarité en provenance de territoires proches immédiatement après la calamité.

Différant du régime de l'état de catastrophe naturelle instauré dans le seul but d'actionner, a posteriori, un mécanisme assurantiel particulier, l'état de calamité naturelle exceptionnelle permet de présumer l'existence d'une situation d'urgence permettant de recourir aux procédures dérogatoires figurant dans diverses réglementations devant être mise en oeuvre aux fins de protéger les populations, de rétablir le fonctionnement normal des institutions et de préserver l'ordre public.

- La déclaration d'état de calamité naturelle exceptionnelle est limitée aux situations dans lesquelles les territoires ont été confrontés à un phénomène naturel d'une exceptionnelle intensité de nature à compromettre la sécurité des populations, l'ordre public et la permanence des institutions. C'est donc eu égard à la fois à l'intensité du phénomène naturel et à ses conséquences hors norme que la possibilité de déclarer l'état de calamité naturelle exceptionnelle devra être appréciée ;

- L'état de calamité naturelle exceptionnelle est déclaré par décret qui détermine la ou les parties de territoires à l'intérieur desquelles il s'applique, au regard des critères précités ;

- Eu égard aux circonstances dans lesquelles s'inscrira une déclaration l'état de calamité naturelle exceptionnelle, est regardée comme remplie la condition d'urgence prévue à l'alinéa 2 de l'article 1 er du code civil permettant l'entrée en vigueur du décret déclarant l'état de calamité naturelle exceptionnelle dès la date qu'il fixera ;

- La durée de l'état de calamité naturelle exceptionnelle est encadrée : un mois, renouvelable dans les mêmes formes tant que les conditions ayant justifié son instauration continuent d'être remplies. Il n'est toutefois pas nécessaire, contrairement à l'état d'urgence par exemple, que cette prolongation soit décidée au niveau législatif dès lors que la déclaration d'état de calamité naturelle exceptionnelle n'a pas pour effet de restreindre l'exercice de libertés fondamentales ;

- Enfin, au plus tard six mois avant le terme de l'expérimentation, il est prévu que le Gouvernement en réalise l'évaluation afin de déterminer les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation.

Il convient d'observer qu'un tel mécanisme de présomption existe déjà s'agissant de telles procédures, l'urgence se déduisant de leur objet même. Ainsi, en application de l'article R. 2122-1 du code de la commande publique, la condition d'urgence impérieuse permettant de passer des marchés négociés se trouve remplie lorsque sont en cause les « marchés rendus nécessaire pour l'exécution d'office de certains travaux », mentionnés dans le CSP et dans le code de la construction et de l'habitation (CCH) :

- en cas de danger ponctuel imminent pour la santé publique (article L. 1311-4 du CSP) ;

- lorsque l'utilisation qui est faite de locaux ou installations présente un danger pour la santé ou la sécurité de leurs occupants (article L. 1331-24 du CSP) ;

- en cas de danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d'insalubrité d'un immeuble (article L. 1331-26-1 du CSP) ;

- lorsqu'à la suite d'une déclaration d'insalubrité irrémédiable, le préfet ordonne la démolition de l'immeuble, ou, s'il est possible de remédier à l'insalubrité, tous les travaux adéquats (article L. 1331-28 du CSP) ;

- lorsqu'un immeuble a fait l'objet d'une déclaration d'insalubrité irrémédiable, l'autorité administrative peut réaliser d'office les mesures destinées à écarter les dangers immédiats pour la santé et la sécurité des occupants ou des voisins (article L. 1331-29 du CSP) ;

- lorsqu'une commune procède d'office aux travaux pour faire cesser la situation d'insécurité constatée par la commission de sécurité, dans le cas où un établissement recevant du public est à usage total ou partiel d'hébergement (article L. 123-3 du CCH) ;

- lorsque, du fait de la carence du ou des propriétaires, des équipements communs d'un immeuble collectif à usage principal d'habitation présentent un fonctionnement défectueux ou un défaut d'entretien de nature à créer des risques sérieux pour la sécurité des occupants ou à compromettre gravement leurs conditions d'habitation, et que le maire fait procéder d'office à l'exécution des travaux (article L. 129-2 du CCH) ;

- en cas d'urgence ou de menace grave et imminente, lorsque le maire fait exécuter d'office les mesures préconisées par un expert de nature à mettre fin à l'imminence du danger lié à l'article L. 129-2 du CCH (article L. 129-3 du CCH) ;

- lorsque le maire fait procéder d'office aux travaux nécessaires d'un immeuble menaçant ruine (article L. 511-2 du CCH) ;

- en cas de péril imminent, lorsque le maire fait exécuter d'office les mesures préconisées par un expert de nature à mettre fin à l'imminence du péril lié à un immeuble menaçant ruine (article L. 511-3 du CCH).

Toutefois, cette présomption n'est pas bornée dans le temps puisque cantonnée à une situation particulière. Elle ne saurait être totalement transposable aux situations résultant d'une calamité naturelle qui peuvent affecter durablement plusieurs secteurs et amener les pouvoirs publics à déroger, tout aussi durablement aux réglementations en vigueur.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Comme relevé, la plupart des législations visant à la protection des populations, au rétablissement de l'ordre public (pris dans l'ensemble de ses composantes, notamment sécurité et salubrité publiques) ou encadrant le fonctionnement des institutions comporte des dispositions permettant, face à des situations d'urgence ou de force majeure, de recourir à des procédures allégées ou dérogatoires (cf. exemples cités au §1.1).

Le présent projet de loi ne vient pas modifier ces procédures dérogatoires, mais prévoit que, lorsque l'état de calamité naturelle exceptionnelle est déclaré, la condition légale tenant à l'urgence ou à la force majeure telle qu'elle est définie dans chaque législation concernée, est présumée remplie.

En outre, cette présomption d'urgence ou de force majeure n'offre pas un blanc-seing aux personnes publiques qui en bénéficient pour s'affranchir des règles prévues par chacune des procédures auxquelles elles ont recours. En effet, cette présomption ne joue qu'autant qu'elle vise la mise en oeuvre de procédures dérogatoires aux seules fins de protéger les populations, rétablir le fonctionnement normal des institutions et préserver l'ordre public, pris en ses différentes composantes.

4.2. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Le déclenchement de l'état de calamité naturelle exceptionnelle permet aux services administratifs de ne pas avoir à justifier de la situation d'urgence ou de force majeure quand ils recourent aux procédures dérogatoires pour répondre à la crise. Cela présente un double avantage : une meilleure réactivité dans la prise de décision et une diminution du risque contentieux lié à cette justification.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Les collectivités de l'article 73 et de l'article 74 de la Constitution ont été consultées sur ce projet de texte.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

La mesure entre en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel. L'état de calamité naturelle exceptionnelle est, pour une durée de 5 ans, expérimenté uniquement dans les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution.

Article 76 : Report de la date de transfert au bloc local de la zone des cinquante pas géométriques et de la fin de vie des agences des cinquante pas géométriques

1. ÉTAT DES LIEUX

La zone dite des « cinquante pas géométriques » (ZPG) est une bande de terre de 81,20 mètres de profondeur, bordant le littoral au-delà de la limite du rivage, dans les territoires d'Outre-mer. Son existence, pour des motivations stratégiques de défense côtière, remonte au XVII ème siècle. Sa superficie se répartit aujourd'hui entre zones urbanisées et secteurs d'urbanisation diffuse, d'une part, et zones naturelles, d'autre part :

Occupation des sols

Guadeloupe

Martinique

Zones urbanisées et secteurs d'urbanisation diffuse

887 ha

124 km de linéaire côtier

21 %

970 ha

124 km de linéaire côtier

28 %

Espaces naturels, autres

3 391 ha

476 km de linéaire côtier

79 %

2 560 ha

326 km de linéaire côtier

72 %

Total ZPG

4 278 ha

600 km de linéaire côtier

3 530 ha

450 km de linéaire côtier

Territoire à enjeux, cette réserve foncière a fait l'objet de longue date d'une occupation massive et inorganisée, sans droit ni titre, en contradiction depuis des décennies avec les objectifs de protection du littoral, de maintien de la biodiversité, ainsi que l'affectation aux activités balnéaires. Une urbanisation allant jusqu'au développement de quartiers d'habitat spontané est en effet ancrée dans la mémoire collective depuis l'ancien régime, bénéficiant alors d'une tolérance dans cet espace dit « des cinquante pas du roi » pour accueillir les travailleurs et artisans contribuant à l'économie de ces îles, qui s'est amplifiée avec la fin de l'esclavage et s'est poursuivie au XXème siècle avec l'exode rural.

Depuis la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « littoral », la ZPG relève du domaine public maritime naturel (DPMn) de l'État et les terrains sont inaliénables, insaisissables et imprescriptibles.

Pour mettre un terme aux problèmes liés à ces occupations sans titre, constitutives de contraventions de grande voirie, la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la ZPG dans les départements d'outre-mer a mis en place des mécanismes de régularisation au profit des occupants historiques (8 000 en Guadeloupe, 15 000 en Martinique), par cession des terrains du DPMn sur les seuls secteurs déjà urbanisés.

La loi du 30 décembre 1996 précitée a créé les agences des cinquante pas géométriques pour une durée qui ne pouvait excéder initialement dix ans. Les agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la ZPG ont pour mission d'aménager cette zone littorale et de régulariser les occupations sans titre (construites avant 1995) notamment en Guadeloupe et Martinique. L'échéance à 10 ans a été régulièrement repoussée du fait de la difficulté à réaliser la régularisation. Aujourd'hui, force est de constater que la procédure permettant les régularisations des 8 000 occupants sans titre en Guadeloupe et des 15 000 occupants sans titre en Martinique, ainsi que la programmation et la réalisation des travaux de voirie et réseaux divers (VRD) par les communes n'ont pu être menées dans les délais prévus. La capacité de ces mêmes communes à diligenter lesdits travaux de viabilisation n'a pas été non plus évaluée.

La loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer dite (ADOM), modifiée par la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, prévoit le transfert de domanialité des espaces urbains et secteurs d'urbanisation diffuse de la ZPG dans le domaine public de la région Guadeloupe et de la collectivité territoriale de Martinique au plus tard le 1 er janvier 2022 et, par voie de conséquence, la disparition des agences des 50 pas géométriques.

Ce calendrier ne peut être respecté. En effet, la régularisation des occupations sans titre est liée au contexte historique très particulier de cette zone. Les biens les plus exposés aux risques naturels ne peuvent pas être régularisés et il est prévu une indemnité dans le Fonds Barnier 286 ( * ) pour accompagner financièrement les occupants vers un autre logement. La définition de ces secteurs dit « à risque grave pour la vie humaine », qui a été fixé par la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'outre-mer, dite « Letchimy », a été modifiée par la loi ADOM, ce qui élargit considérablement le périmètre des occupations qui ne peuvent être régularisées et, en pratique, bloque l'ensemble du dispositif de transfert. Par ailleurs, la procédure de régularisation (identification des occupants, document d'arpentage, cessions) peine à être mises en oeuvre faute de moyens dans les directions départementales des finances publiques (DDFIP). Enfin, la réalisation des aménagements nécessaires aux relogements et au maintien des habitations régularisées nécessite un renforcement des compétences des agences.

Aussi, afin d'aider l'ensemble des parties prenantes à trouver une solution, les ministres de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et des Outre-mer ont confié une mission d'expertise au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) sur le devenir de la ZPG en Guadeloupe et en Martinique. Cette mission a rendu son rapport le 7 février 2020 en précisant un certain nombre de recommandations et de propositions d'évolutions législatives à prendre, à court et moyen termes.

La loi ADOM a fixé un calendrier par étapes en vue du transfert des espaces urbains et secteurs d'urbanisation diffuse du DPMn de l'État de la ZPG spécifique en Outre-mer dans le domaine public de la collectivité territoriale de Martinique et de la région Guadeloupe au plus tard (initialement) le 1 er janvier 2021. Ce calendrier ne pouvant pas être respecté et pour tenir compte des conséquences de l'état d'urgence sanitaire dû à l'épidémie de Covid-19, ce calendrier a fait l'objet d'un report d'un an du transfert au 1 er janvier 2022 par la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne. Cette prolongation de délai doit permettre de définir un nouveau calendrier durant l'année 2021.

Il s'agit donc de mesures de correction du calendrier initialement fixé par la loi d'actualisation du droit des Outre-mer de 2015 et préconisées dans le rapport du CGEDD.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'article 27 de la loi ADOM modifiée, reportant la cessation d'activité de ces agences au 1 er janvier 2022, a prévu qu'à cette même date, après consultation de la région de Guadeloupe et de la collectivité territoriale de Martinique, les espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse de la ZPG seraient transférés en pleine propriété dans le domaine public de la région Guadeloupe et de la collectivité territoriale de Martinique.

Pour préparer ce transfert, la loi prévoyait que :

- au plus tard le 1 er janvier 2018, l'État et les collectivités territoriales concernées adoptent un document stratégique d'aménagement et de mise en valeur de la ZPG. Ce document a bien été élaboré ;

- au plus tard le 1 er janvier 2021, le représentant de l'État remet au président de la collectivité concernée un rapport comportant un état des cessions et des enjeux d'aménagement qui y sont liés, une évaluation des charges liées à ce transfert ainsi qu'un bilan de l'activité de chacune des deux agences pour la mise en valeur des espaces urbains de la ZPG.

- au plus tard le 1 er juillet 2021, l'État délimite par décret en Conseil d'État, après avis des collectivités territoriales ou de leurs groupements, à l'intérieur de la ZPG, d'une part, les espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse, d'autre part, les espaces naturels, la présence de constructions éparses ne pouvant faire obstacle à l'identification d'un secteur comme espace naturel.

Ce calendrier est désormais irréalisable. Par ailleurs ces territoires concentrent de nombreux enjeux liés aux occupations sans titre et aux risques naturels. La gestion de la ZPG est éminemment complexe, en raison de la multitude des thématiques à traiter. Aux questions foncières et d'aménagement, au coeur de la problématique en raison de l'occupation massive de cette zone sans droit ni titre, s'ajoute la question des risques naturels.

C'est dans ce contexte, et afin de proposer une solution pérenne pour le transfert de la ZPG et le devenir des agences, qu'une mission conjointe des ministères de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et des Outre-mer a été adressée au CGEDD qui a remis son rapport en février 2020. Le ministère des outre-mer a transmis ce rapport aux parlementaires des deux départements et aux présidents des conseils d'administration des agences en annonçant une concertation.

Si la loi du 17 juin 2020 précitée a permis de retarder d'une année supplémentaire l'échéance de la délimitation par décret en Conseil d'État des espaces urbains ou secteurs d'urbanisation diffuse et espaces naturels, du transfert de domanialité et de la fin de vie des agences des cinquante pas, des mesures législatives doivent impérativement être promulguées avant fin 2021 pour moderniser le cadre qui permettra le transfert effectif de la ZPG aux collectivités territoriales concernées.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La proposition a pour objectif de redéfinir un nouveau processus pour le transfert de la ZPG, sur la base d'une partie des recommandations du rapport du CGEDD :

- reporter de trois ans les échéances du transfert des terrains de la ZPG relevant du DPMn de l'État du 1 er janvier 2022 au 1 er janvier 2025, ainsi qu'une partie des étapes intermédiaires (délimitation des zones urbaines et secteurs d'urbanisation diffuse, remise du rapport sur l'état des cessions) - articles L. 5112-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) et article 27 de la loi ADOM ;

- redéfinir, au sein de la ZPG, les zones à risque dans lesquelles les cessions aux occupants sont interdites. La mention « exposée à un risque naturel prévisible menaçant gravement des vies humaines » viendra remplacer la mention « exposée à un risque naturel grave et prévisible menaçant des vies humaines » (articles L. 5112-5 et L. 5112-6 du CG3P). Cette définition entraînera en conséquence une relocalisation des habitants impactés et une démolition des habitations présentes sur les périmètres de risque définis ;

- favoriser la régularisation foncière la plus large par différents leviers : agir sur la demande en permettant des cessions à prix décoté en fonction des ressources des ménages (pouvant aller jusqu'à la cession gratuite pour les ménages les plus modestes) et en prolongeant le calendrier permettant le dépôt de nouvelles demandes de régularisation, agir sur l'offre en permettant une régularisation de constructions plus récentes (articles L. 5112-5 et L. 5112-6 du CG3P) ;

- prolonger de dix ans la durée de vie des agences des 50 pas géométriques pour leurs seules missions d'aménagement en conduisant prioritairement le processus de régularisation jusqu'au 1 er janvier 2025, date du transfert- loi du 30 décembre 1996 précitée ;

- donner un rôle accru aux agences pendant la période de transition mise en place par la présente loi. Pour ce faire, étendre leur compétence aménagement sur la totalité du périmètre des communes littorales si les travaux ou opérations visés sont strictement nécessaires au maintien ou au relogement des occupants de la zone dite des cinquante pas géométriques ;

- permettre un transfert à titre gratuit de terrains de la ZPG au profit des agences, les instituer délégataires du droit de préemption urbain de droit commun mis en place sur la ZPG (article L. 211-1 et nouvel article L. 211-2-2 du code de l'urbanisme) et les doter d'un pouvoir de police domaniale ;

- renforcer les sanctions relevant de l'occupation illégale de la zone des 50 pas par une amende allant de 150€ à 12 000€. Ce durcissement a notamment pour objectif de favoriser et d'accélérer les demandes de régularisation ;

- moderniser la gouvernance des agences sur le modèle des établissements publics de l'État : nomination du directeur par arrêté des ministères de tutelles après avis du préfet et du conseil d'administration pour une durée de cinq ans renouvelable (loi du 30 décembre 1996 précitée) ;

- procéder à des corrections techniques : précisions relatives au transfert des terrains relevant du DPMn de l'État, maintien de la compétence aménagement aux agences après le transfert afin de leur permettre d'achever les opérations d'aménagement en cours, harmonisation des dispositions entre la Guadeloupe et la Martinique, abrogation d'un droit de préemption spécifique au profit du droit de préemption urbain.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Il aurait été possible de ne procéder uniquement à un nouveau report des dates du transfert de la ZPG en espérant que ce qui n'avait pas été possible jusqu'à maintenant le devienne dans un délai raisonnable. Mais il est apparu nécessaire de prévoir, outre la prolongation de la durée de vie des agences, une série de mesures mettant à la disposition des acteurs du territoire des outils juridiques facilitant la régularisation des occupations et le relogement des occupants des secteurs à risque et des ménages qui ne pourront être régularisés.

3.2. OPTION RETENUE

Le dispositif retenu par le Gouvernement s'appuie sur les recommandations du rapport du CGEDD.

Parmi ces recommandations en vue d'une solution globale, le cadre législatif doit faire l'objet d'une modification en deux temps :

Dans un premier temps, mettre en place un processus transitoire préparatoire au transfert de la ZPG en vue de délimiter les espaces concernés à terme. Il s'agit des modifications prévues dans le cadre de la présente loi qui constituent un dispositif de transition. Ce premier temps est nécessaire pour définir les secteurs de la ZPG sur lesquels les occupations pourront être régularisées et les secteurs exposés à un risque naturel prévisible menaçant gravement des vies humaines, ainsi que les modalités de relogements des occupants qui ne peuvent être régularisés.

Les différentes étapes devraient se réaliser de la manière suivante :

- 01/01/2024 : date limite de dépôt des demandes de régularisation/cession

- 01/01/2024 : délimitation par décret en Conseil d'État des parties urbaines et secteurs d'urbanisation diffuses qui feront l'objet d'un transfert

- 01/06/2024 : rapport sur l'état des cessions, un bilan de l'activité et évaluation des charges

- 01/01/2025 : transfert de domanialité

Ce nouveau calendrier pourra être respecté dans la mesure où les différentes étapes sont désormais sous l'entière maîtrise de l'État et en conservant les bénéficiaires actuels du transfert de la zone des cinquante pas géométriques. Dans le dispositif initial, la première étape du processus de transfert - qui n'a pas abouti - et qui concernait l'adoption du document stratégique était notamment à la main des collectivités. Par ailleurs, une des raisons qui explique la difficulté à régulariser l'ensemble des constructions qui peuvent l'être réside dans des considérations économiques et l'absence de sanctions réelles en cas d'occupation irrégulière. Or, le projet de texte prévoit d'une part, un dispositif de décote pour répondre aux situations des ménages à faibles revenus (la plupart des cas) et d'autre part, un dispositif coercitif d'amende pouvant aller jusque 12 000 euros en cas de construction illégale. Le rapport du CGEDD n'a pas relevé de difficultés ou de blocages à mettre en place ce calendrier quand bien même la loi serait promulguée tardivement, à horizon 2023. Enfin, le fait d'afficher un calendrier resserré vise à témoigner de la détermination de l'Etat à résoudre la situation de la zone des 50 pas géométriques aux Antilles de manière pérenne.

Dans un second temps, en 2023 au travers d'un second vecteur législatif (loi d'abolition de la ZPG), il s'agira :

- d'identifier le bénéficiaire du transfert en pleine propriété en cohérence avec les compétences d'urbanisme et d'aménagement du bloc communal ;

- de prévoir l'abolition de la réserve domaniale des cinquante pas aux Antilles pour rapprocher la légalité et les valeurs et normes sociales dans ces territoires ;

- de fixer le devenir des agences au-delà du 1 er janvier 2031.

Les mesures permettront à terme de mettre fin à un dispositif d'exception et d'instaurer en Martinique et Guadeloupe le droit commun sur le littoral (instauration de la bande des 100 mètres des communes littorales notamment).

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Le présent article modifie les dispositions de droit interne suivantes :

- loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements Outre-mer ;

- loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer (ADOM) ;

- loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne (article 27) ;

- CG3P : création d'un article L. 2132-3-2 et modification des articles L. 5112-1 à L. 5112-10 (chapitre 2, titre 1 er , livre 1 er , 5 ème partie) ;

- code de l'urbanisme : article L. 211-1 et article nouveau L. 211-2-2 (délégation du droit de préemption aux agences).

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts sur les entreprises

La présente loi ouvre la possibilité de régularisation d'occupation foncière pour les entreprises (restaurants, activités en lien avec la mer, le tourisme, autres activités) éligibles à la régularisation au sens de l'article L. 5112-6 du CG3P.

4.2.2. Impacts budgétaires

Il y aura un manque de recettes pour les directions régionales des finances publiques (DRFIP) ou les agences des cinquante pas géométriques qui bénéficient du retour du produit de cession lors des régularisations de propriété et cessions foncières en fonction du niveau de décote accordées aux occupants historiques éligibles. A titre d'illustration, en Guadeloupe, les produits des cessions représentent entre 500 et 800 000 €/an dans le budget de l'agence des 50 pas. L'impact sur ces recettes restera cependant limité dans la mesure où la décote concernera en priorité les ménages modestes qui aujourd'hui ne se rendent pas acquéreurs des biens qu'ils occupent.

En revanche, du fait de la mise en place de la décote, il n'y aura plus lieu de prévoir une aide aux acquéreurs qui est aujourd'hui financée par le budget de l'État (ligne budgétaire unique de la direction générale des outre-mer - DGOM). A titre d'exemple, en Guadeloupe, cette aide exceptionnelle représente actuellement en moyenne 160 000 € par an.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Il n'y a pas de modification de la répartition des compétences et des obligations des collectivités territoriales et de leurs groupements. Les communes et les intercommunalités verront cependant leur droit de préemption élargi à la ZPG, qu'elles auront la possibilité de déléguer aux agences des cinquante pas.

4.4. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

La mesure aura de forts impacts sur les occupants du domaine public de la ZPG qui sont éligibles à la régularisation foncière. Il s'agit souvent de populations très peu aisées. La régularisation foncière est encouragée notamment via un dispositif de cession avec décote. Ce mécanisme devrait être plus attractif.

Pour les occupants non éligibles à la régularisation (en zone à risque ou n'ayant pas l'ancienneté d'occupation suffisante), un mécanisme de relogement, financé pour partie par le Fonds Barnier et les agences pour la mise en valeur des 50 pas géométriques sera privilégié. Afin de préserver la ZPG de toute nouvelle occupation, la police domaniale sera exercée par les agences des cinquante pas géométriques.

4.5. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

La disposition relative à la nouvelle définition des zones à risque naturel prévisible menaçant gravement les vies humaines a des conséquences environnementales. A terme, les terrains répondant à cette définition et faisant l'objet d'une occupation devront être libérés et restitués à la nature et leurs occupants relogés.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Au-delà des concertations déjà engagées, les différentes collectivités (conseil départemental et conseil régional de la Guadeloupe, collectivité territoriale de Martinique) ont été consultées.

Ont également été consultés à titre facultatif, Conseil national de la mer et des littoraux, ONF, le Conservatoire du littoral, Agences des cinquante pas géométriques et les Communes concernées.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.3. APPLICATION DANS LE TEMPS

L'application sera immédiate le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.4. APPLICATION DANS L'ESPACE

Le champ d'application spatial des dispositions est limité aux seuls territoires des départements et régions antillaises de la Guadeloupe et de la Martinique (article 73 de la Constitution).

5.5. TEXTES D'APPLICATION

La mesure prévue au I-3°-b) de l'article pour la mise en place d'un pouvoir de police des domaines au profit des agences des cinquante pas géométriques (habilitation, commissionnement et assermentation des agents) est conditionnée par un renvoi à un décret en Conseil d'État. Il en est de même pour la décote prévue au I-1° de l'article.

Article 77 : Adaptation de la prescription acquisitive immobilière à Mayotte

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

La prescription acquisitive est définie à l'article 2258 du code civil comme étant « un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi ».

En matière immobilière, l'article 2272 du code civil dispose que « le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans » 287 ( * ) .

Par ailleurs, pour pouvoir prescrire, il faut que la possession soit « continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire » (article 2261 du code civil).

La prescription acquisitive étant un effet de la loi qui donne naissance de plein droit à un droit de propriété au profit du possesseur, ce dernier n'est en principe pas obligé de le faire constater. Toutefois, le possesseur peut saisir le juge d'une action en revendication pour que sa qualité de propriétaire par usucapion d'un bien soit constatée par jugement. La preuve de la possession utile peut être apportée par tout moyen.

A Mayotte, un acte de notoriété ayant pour objet de constater le caractère utile de la possession peut être délivré par la commission d'urgence foncière (CUF) comme constatant une possession répondant aux conditions de la prescription acquisitive 288 ( * ) . Cette faculté a été créée pour résoudre le désordre foncier mahorais 289 ( * ) .

Cependant, jusqu'au 1 er janvier 2008, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2005-870 du 28 juillet 2005 portant adaptation de diverses dispositions relatives à la propriété immobilière à Mayotte et modifiant le livre IV du code civil, les biens inscrits au livre foncier étaient imprescriptibles en application du décret du 4 février 1911, tel que modifié par un décret du 9 juin 1931, qui organisait un système de publicité foncière à effet constitutif de droit, régime dit « de l'immatriculation ». Ce régime prohibait explicitement l'acquisition de droits par usucapion sur des immeubles soumis par leur propriétaire au régime de l'immatriculation.

Ce régime était d'application facultative, mais définitive une fois que l'immeuble y avait été soumis par l'immatriculation. D'inspiration civiliste, il était essentiellement destiné aux acquéreurs européens de terres agricoles à Mayotte. Il a longtemps été peu utilisé par la population autochtone, qui lui préférait des règles coutumières d'acquisition de la terre, sans recours à la publicité foncière.

L'ordonnance du 28 juillet 2005 a abrogé le décret de 1911 en précisant que « les immatriculations, inscriptions et formalités accomplies (sous son empire) conservent leur force et valeur sans que les propriétaires d'immeubles ou les titulaires (de droits réels immobiliers) aient à accomplir de nouvelles formalités » (article 14).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi détermine les principes fondamentaux « du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ».

En l'état actuel du droit, le Conseil constitutionnel n'a jamais eu à se prononcer sur la valeur constitutionnelle de la prescription acquisitive.

Si le droit de propriété est protégé constitutionnellement (articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen), il peut y être porté atteinte à condition que ces atteintes soient justifiées par l'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi (Conseil constitutionnel, 13 janvier 2012, n°2011-208 QPC).

A l'occasion de l'examen d'une question prioritaire de constitutionalité opposant le mécanisme de prescription acquisitive au droit de propriété, il a pu être jugé par la Cour de cassation que la prescription acquisitive « confère au possesseur, sous certaines conditions, et par l'écoulement du temps, un titre de propriété correspondant à la situation de fait qui n'a pas été contestée dans un certain délai ; que cette institution répond à un motif d'intérêt général de sécurité juridique en faisant correspondre le droit de propriété à une situation de fait durable, caractérisée par une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire (3 ème chambre civile, Cour de cassation, arrêt n°1304, 12 octobre 2011).

La présente proposition vise à permettre aux Mahorais de bénéficier, dans les meilleurs délais, du mécanisme de la prescription acquisitive. Il ne s'agit pas de porter atteinte à la sécurité juridique qui justifie la prescription acquisitive mais, au contraire, de renforcer ce principe en permettant aux Mahorais de prescrire avant 2038. Par ailleurs, la réforme répond à un motif d'intérêt général et est proportionnée à l'objectif poursuivi.

1.3. CADRE CONVENTIONNEL

Si le droit de propriété est conventionnellement protégé (article 1 du protocole 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme), la Cour européenne des droits de l'Homme dans un arrêt J. A. Pye (Oxford) Ltd c/ Royaume-Uni du 30 août 2007 reconnaît aux États le droit « de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général » 290 ( * ) . Selon la Cour européenne des droits de l'Homme, à l'aune de l'exigence de garantie de la sécurité juridique, « un délai de prescription de douze ans pour les actions en revendication poursuit en soi un but légitime d'intérêt général ». L'extinction du droit de propriété et le délai de prescription de douze ans sont jugés conformes à l'intérêt général.

1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Ø Angleterre et Pays de Galles

Le droit anglais prévoit un régime d'usucapion immobilière équivalent au droit français appelée « adverse possession ». Comparé au droit français, il est plus facile d'obtenir la propriété d'un bien par possession en droit anglais puisqu'on y exige seulement l' animus possidendi (intention de posséder) et non l' animus domini (intention d'être le propriétaire) comme en droit français. L' animus possidendi est une condition pour acquérir un bien par possession, qui doit être complétée par d'autres conditions : le possesseur doit être effectivement en possession et ce pendant la période prévue par la loi.

Le régime applicable fait une distinction selon que l'immeuble soit ou non enregistré auprès du « Land Registry ».

• Immeubles non enregistrés

Le régime applicable pour ce type d'immeubles, ceux qui n'ont pas été enregistrés auprès du Land Registry, est celui du « Limitation Act » (LA) de 1980. Cette loi prévoit en son article 15 §1[4] qu'aucune action en restitution de la part du « véritable » propriétaire contre celui qui a possédé l`immeuble pendant douze ans n'est possible. En d'autres termes, le possesseur (« squatter ») qui occupe pendant douze ans un immeuble non enregistré peut opposer cet article à l'ancien propriétaire qui revendique l'immeuble.

• Immeubles enregistrés

A l'instar des immeubles non enregistrés, les immeubles enregistrés se trouvaient soumis au régime du LA de 1980. A la suite d'un contentieux qui sera porté devant la Cour européenne des droits de l'homme (cf. affaire précitée) et en dépit du rejet de la demande du requérant propriétaire, un changement législatif a eu lieu en 2002 afin de mieux protéger les propriétaires. C'est désormais le « Land Registration Act » (LRA) de 2002, entré en vigueur le 13 octobre 2003, qui régit l'adverse possession en matière d'immeubles enregistrés et rend plus strictes les conditions d'acquisition d'un tel immeuble par simple possession.

Dorénavant, l'annexe numéro 6 du LRA de 2002 prévoit que la personne, qui se trouve en possession d'un bien immeuble enregistré, peut après 10 ans, enregistrer son bien au registre du Land Registry en tant que propriétaire de ce bien. Il incombe alors au teneur du registre d'en informer le propriétaire enregistré qui pourra alors y faire opposition. Le délai pour faire opposition est de deux ans.

Ø Allemagne

L'usucapion immobilière existe aussi en Allemagne. Comme en droit français, l'usucapion en droit allemand est réglée dans un titre sur les modes d'acquisition de la propriété dans le troisième livre sur les biens du code civil allemand (BGB)

En matière d'immeubles, c'est le §927 BGB qui s'applique. Il ne s'agit pas dans ce cas d'une acquisition de fait mais d'une acquisition par procédure d'exclusion : après 30 ans de possession, le possesseur en propre (« Eingenbesitzer ») peut demander la radiation de la personne inscrite comme propriétaire du bien dans le livre foncier.

Si la personne inscrite est le véritable propriétaire, deux cas sont à distinguer :

- dans le cas où le véritable propriétaire est en vie, le possesseur ne pourra demander sa radiation et a fortiori acquérir la propriété du bien ;

- dans le cas où le véritable propriétaire est mort ou a disparu, le possesseur pourra demander sa radiation, à condition cependant qu'aucune inscription au livre foncier qui aurait nécessité l'accord du véritable propriétaire (mort ou disparu) n'ait été effectuée pendant l'écoulement du délai de 30 ans (accord par testament ou autre).

Si la personne inscrite n'est pas le véritable propriétaire, le possesseur pourra demander sa radiation sans conditions particulières. Cette radiation ouvre au possesseur un droit d'appropriation. Il pourra ainsi demander, après l'obtention d'un jugement de radiation / d'exclusion, son inscription au livre foncier en tant que véritable propriétaire.

La revendication du bien par le propriétaire contre le possesseur suspend le délai de prescription acquisitive. En cas de succès de l'action, le délai est interrompu.

Ø Québec

Le droit québécois prévoit aussi l'usucapion. Les règles actuelles ont été fixées par le nouveau code civil adopté le 8 décembre 1991 et entré en vigueur en 1994. Les délais de 30 ans existants ont été supprimés.

Dans le droit civil québécois, l'acquisition de la propriété immobilière par l'effet d'une possession prolongée pendant une certaine durée se réalise par le mécanisme de l'usucapion. L'article 2918 du code civil québécois dispose que le possesseur qui, pendant 10 ans, a possédé un immeuble aÌ titre de propriétaire, ne peut en acquérir la propriété qu'aÌ la suite d'une demande en justice. Il faut que la possession soit toujours actuelle. Le jugement n'est que déclaratif du droit de propriété. C'est l'accomplissement de la prescription qui transfère ce droit. La loi ne fait plus de distinction selon que l'immeuble possédé est immatriculeì ou non. Contrairement à la prescription des droits mobiliers, la prescription en matière de droit immobilier n'est pas influencée par la bonne ou mauvaise foi du possesseur. Elle débute au moment de la possession par celui qui prescrit ou ses auteurs.

Ø Espagne

Le droit espagnol connaît aussi la prescription acquisitive, comme le droit français, et prévoit comme lui un délai normal (usucapion ordinaire - articles 1940 et 1941 du code civil) et un délai abrégé (usucapion extraordinaire ou imparfait - article 1950 du code civil).

Pour un bien immobilier, le délai de l'usucapion ordinaire est de 10 ans (20 ans pour une personne résidant à l'étranger). Ce délai est applicable lorsque l'on témoigne d'une possession non équivoque, pourvue d'un juste titre, de bonne foi, publique, paisible et ininterrompue.

En cas d'usucapion extraordinaire ou imparfait, le délai est de 30 ans.

Ø États-Unis

Le droit américain en la matière est très inspiré du droit anglais. Les délais de la prescription acquisitive varient, selon les États, entre 3 et 40 ans.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Il découle de l'ordonnance n° 2005-870 du 28 juillet 2005 et de l'abrogation du décret du 4 février 1911 précités que l'article 2248 du code civil s'applique à Mayotte depuis le 1 er janvier 2008.

Faute de disposition particulière d'application dans le temps, il en résulte un doute sur la date à partir de laquelle les biens immobiliers immatriculés au livre foncier de Mayotte sous l'empire du régime ancien sont devenus susceptibles d'acquisition par usucapion La question est de savoir si la possession commencée avant le 1 er janvier 2008 a fait courir les délais de prescription acquisitive.

Si tel était le cas, s'agissant donc des biens immatriculés au livre foncier, qui sont selon la CUF très majoritaires à Mayotte, les actes de notoriété constatant une possession trentenaire ne pourraient être délivrés avant le 1 er janvier 2038. Cette commission, de même que le groupement d'intérêt public appelé à lui succédé, seraient donc privés de l'outil lui permettant de remplir la mission qui lui a été confiée par le législateur en 2017.

Dans un contexte de désordre foncier inégalé à Mayotte, qui obère largement l'aménagement du territoire, il apparaît nécessaire de légiférer pour que la CUF puisse délivrer rapidement des actes de notoriété en permettant que les règles de la prescription acquisitive puissent s'y appliquer.

En effet, la croissance de la population est exponentielle : entre 2007 et 2017, le nombre d'habitants a été porté de 186 452 à 256 518. La densité de 690 habitants au km 2 fait de Mayotte le département le plus dense derrière l'Île-de-France. Plus de 84 % de la population locale vit en dessous du seuil de pauvreté et le chômage s'élève à environ 36,6 % ce qui en fait le département le plus pauvre de France avec le taux de chômage le plus élevé de l'Union européenne.

Près de 4 logements sur 10 sont des bangas , habitations de fortune faîtes de tôle, de bois ou de terre, qui sont souvent construites sur les terrains d'autrui. En l'absence de titre, les possesseurs des parcelles en question ne sont pas en mesure de demander au juge d'expulser les squatters. Ces bangas constituent de véritables bidonvilles, particulièrement insalubres, qui abritent majoritairement des étrangers en situation irrégulière.

Cette croissance démographique a pour conséquence un manque de terrains constructibles et fait obstacle à tout aménagement du territoire et au développement économique de l'île.

L'identification des propriétaires permettrait la mise en oeuvre de politiques urbanistiques favorisant la construction de logements et d'équipements sociaux ainsi que le développement économique de l'île. En effet, si la réforme de la prescription acquisitive est adoptée, 2492 ha, soit 13 % des terrains de l'île, seraient concernés, la plupart constructibles, ce qui permettrait de réduire drastiquement le désordre foncier.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les objectifs poursuivis sont les suivants :

- résorber le désordre foncier ;

- permettre le développement économique ;

- préserver la sécurité juridique ;

- favoriser l'accession des Mahorais à la propriété foncière.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Création d'un délai de prescription acquisitive abrégé à Mayotte avec une entrée en vigueur en 2026

Une première option consisterait en la création d'une prescription acquisitive abrégée, pour une durée limitée et spécifique à Mayotte, avec une entrée en vigueur différée de la réforme en 2026. Cette option permettrait au propriétaire, dans le délai laissé de cinq ans, si la loi est adoptée en 2021, de revendiquer sa propriété alors qu'il ne l'a pas fait depuis 2008. Les risques d'inconstitutionnalité ou d'inconventionalité de la réforme étaient ainsi minorés puisque le propriétaire disposait d'un délai en revendication de cinq ans.

Cette option n'a pas été retenue car elle retarderait le travail considérable à mener par la CUF et par conséquent l'engagement du processus de résorption du désordre foncier à Mayotte, ce qui n'est pas envisageable compte tenu du contexte actuel de l'île. Par ailleurs, il faut rappeler que le propriétaire « historique » n'est pas dépourvu de voies de recours puisqu'il peut contester l'acte de notoriété délivré par la commission d'urgence foncière pendant cinq ans en application de l'article 35-2 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.

3.1.2. Ajout d'une date à compter de laquelle le délai antérieur à 2008 pourrait être pris en compte

Il a été proposé de déterminer par la loi une date à compter de laquelle la période antérieure au 1 er janvier 2008 pourrait être prise en compte. Ainsi, il a été proposé que la période antérieure au 1 er janvier 2008 ne soit prise en compte qu'à compter du 1 er janvier 1998. Cette option présenterait l'avantage de sécuriser la validité de la réforme compte tenu de son caractère rétroactif.

Cette option, qui est une variante de la première, n'a pas été retenue car elle ne permet pas plus à la CUF d'engager aujourd'hui les opérations de titrement conformément à l'objectif que le législateur lui a assigné.

3.2. DISPOSITIF RETENU

La mesure proposée a pour objet de prendre en compte la période antérieure au 1 er janvier 2008 pour le décompte du délai de la possession de fait qui motive la prescription acquisitive. Les possesseurs pourront donc prescrire un bien dès lors qu'ils justifient d'une possession, dans les conditions définies par le code civil, depuis 1991, si la loi entre en vigueur en 2021.

Elle vient préciser les modalités d'application de l'ordonnance du 28 juillet 2005 et permettre aux Mahorais de bénéficier pleinement des conséquences du passage de Mayotte au régime foncier de droit commun en 2008.

Cela viendra conforter la sécurité de la situation de nombreuses familles qui vivent sur un terrain immatriculé au registre foncier de 1911, sans en être propriétaires, depuis plusieurs générations.

Cela permettra aussi à la CUF de commencer véritablement son travail de titrement, comme souhaité par le législateur de 2017. Cette mesure s'inscrit ainsi dans le prolongement des réformes déjà mises en oeuvre sur le territoire par le Gouvernement pour remédier à ses grandes difficultés sociales et économiques.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La mesure complète l'article 13 de l'ordonnance n° 2005-870 du 28 juillet 2005 portant application de diverses dispositions relatives à la propriété immobilière à Mayotte.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La mesure relève de la seule compétence de la France.

Par ailleurs, la mesure n'est pas contraire aux règles fixées par les traités ou en découlant. Elle respecte la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme en matière de droit de la propriété privée.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts macroéconomiques

Les entreprises présentes à Mayotte peinent à se développer en l'absence de terrains susceptibles d'accueillir l'ensemble de leurs activités. La mesure proposée permettrait la vente de terrains, favorisant ainsi l'aménagement rationnel du territoire, l'accroissement des entreprises et la création d'emplois. Ces évolutions devraient contribuer à leur tour à une hausse de la consommation des ménages pour favoriser le développement économique de l'île.

4.2.2. Impacts sur les particuliers

La mesure impacte les particuliers en ce qu'elle permettra aux possesseurs de bénéficier d'un droit de propriété sécurisé juridiquement à l'expiration du délai de recours contre l'acte de notoriété. Pourront ainsi être mises en oeuvre des procédures d'expulsion pour les occupants sans titres présents sur leur terrain.

Les particuliers possesseurs devenus propriétaires devront s'acquitter des impôts locaux et des autres obligations qui s'attachent à cette qualité.

Inversement, les propriétaires historiques seront en droit de contester l'acte de notoriété délivré par la CUF, qui fait foi jusqu'à preuve contraire de la possession trentenaire utile. Il n'y aura en revanche aucun impact sur la validité des titres des propriétaires lorsque les conditions de la prescription acquisitive ne sont pas réunies.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les communes pourront mettre en oeuvre des politiques d'urbanisme et d'aménagement, notamment pour améliorer les réseaux dans leurs territoires. Des procédures d'expropriation pourraient également être mises en oeuvre pour la réalisation d'équipements répondant à un intérêt général.

La réforme de la prescription acquisitive n'aura pas d'impact financier pour les collectivités locales, mais permettra d'augmenter leurs bases d'imposition au titre des taxes foncières, qui sont aujourd'hui particulièrement faibles en comparaison des moyennes nationales.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

La mesure permettra aux services fiscaux d'identifier les propriétaires et facilitera l'action des services du cadastre.

La CUF pourra mener à bien ses missions dès lors qu'il lui sera possible de délivrer des actes de notoriété.

4.5. IMPACTS SOCIÉTAUX

Une telle réforme permettra un véritable changement sociétal à Mayotte. Si les populations mahoraises ont pu immatriculer leurs biens durant le XX ème siècle, les successions n'ont pas toujours été réalisées. En outre, les mahorais ont très largement vécu en indivision, ce qui a complexifié encore l'identification de propriétaires. Ainsi, tout en renforçant l'accès individuel de la population mahoraise à la propriété foncière, la mesure la protégera contre la précarité d'une situation qui naîtrait de l'absence de tout titre.

Jusqu'à 2008, le territoire a connu une forme de dualité juridique en matière foncière, avec le régime du livre foncier issu du droit colonial, d'une part, et l'application du droit musulman, d'autre part, lequel attachait une valeur sociale et juridique particulière à l'occupation coutumière et à la mise en valeur des terres. Douze ans plus tard, il s'agit de tirer toutes les conséquences de l'application du droit civil, en évitant des incohérences manifestes dans la dévolution du droit de propriété par rapport à la situation de fait.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

La collectivité de Mayotte a été consultée s'agissant d'une disposition qui lui est spécifique.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'article entre en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions du présent article n'ont vocation à s'appliquer qu'à Mayotte.

Article 78 : Création dans les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de la Martinique, de La Réunion et de Mayotte d'une catégorie d'établissements publics à caractère industriel et commercial en matière de formation professionnelle

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion et de Mayotte sont confrontées à la nécessité d'élever le niveau de qualification de la population active

Celles-ci sont confrontées à de nombreux handicaps structurels qui entravent la capacité des employeurs à recruter localement sur certaines compétences291 ( * ).

La configuration et l'étroitesse des marchés ultramarins ne permettent pas l'implantation d'une offre locale de formation couvrant l'ensemble des champs de compétences, et ceci tout particulièrement pour les métiers rares et émergents. Ainsi, les organismes locaux de formation ne peuvent raisonnablement créer des plateformes formatives sur l'ensemble des diplômes ou des titres professionnels, compte tenu du rapport entre les investissements requis et le nombre de stagiaires souvent insuffisant inscrits sur chaque session. Le seuil de rentabilité de chaque formation, plus difficile à atteindre dans les outre-mer, explique le déploiement concomitant de la politique de formation professionnelle en mobilité dans l'Hexagone. Financée par le ministère des outre-mer et mise en oeuvre par l'Agence de l'Outre-mer pour la mobilité (LADOM), cette politique permet aux demandeurs d'emploi ultramarins (et notamment aux jeunes) d'acquérir des qualifications qui ne leur sont pas proposées dans leurs territoires d'origine. En 2019, 2 815 demandeurs d'emploi ultramarins (issus des 11 collectivités d'outre-mer) ont bénéficié d'une formation en mobilité, d'un accompagnement et d'une prise en charge financière dans le cadre du Passeport mobilité pour la formation professionnelle (PMFP).

La persistance de taux de chômage à la fois très élevés dans ces territoires et largement supérieurs à la France métropolitaine (15 % en Martinique, 20 % en Guyane, 21 % en Guadeloupe, 21 % à La Réunion et 30 % à Mayotte en 2019, contre 7,9 % en France métropolitaine à date 292 ( * ) ) témoigne pourtant de l'existence d'une main d'oeuvre locale suffisamment nombreuse pour répondre à la demande d'emploi.

La problématique majeure de ces territoires réside dans la nécessaire élévation du niveau de compétences des demandeurs d'emploi, en raison des décrochages constatés sur les indicateurs suivants :

- part de la population active âgée de 15 à 64 ans sans diplôme : 46,9 % pour les territoires citées (hors Mayotte), contre 30,1 % en France métropolitaine en 2015 ;

- part des jeunes de 17 ans ayant participé aux journées de défense et de citoyenneté (JDC) en situation d'illettrisme en 2015 : 20,2 % pour les territoires cités, contre 3,6 % en France métropolitaine.

1.1.1. Une élévation sensible du nombre de demandeurs d'emploi formés depuis 2014, du fait des efforts entrepris par les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion et de Mayotte

Les stratégies régionales récemment déployées par ces cinq collectivités, avec le soutien financier additionnel de l'Etat, ont concouru à une élévation sensible du nombre de demandeurs d'emploi entrés en formation depuis 2016 , comme le souligne le tableau ci-après :

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Entrées en formation dans les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion et de Mayotte

23 909

23 666

28 510

44 174

30 932

40 340

43 888

dont entrées prescrites par ces collectivités

10 435

8 659

13 362

20 763

9 565

12 670

12 603

Les conseils régionaux de Guadeloupe et de La Réunion, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique ainsi que le conseil départemental de Mayotte ont ainsi été en capacité, en partenariat étroit avec les directions régionales de Pôle Emploi, de répondre aux objectifs additionnels fixés par l'État et conventionnés au titre du plan 500 000 formations (2016-2017) puis de l'amorçage du plan d'investissement dans les compétences (PIC), en 2018 et 2019.

1.1.2. Des organismes publics locaux mis en place en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique et à La Région, du fait de l'absence d'implantation de l'Agence pour la formation professionnelle des adultes

Cette élévation de l'offre de formation s'est déroulée dans ces quatre collectivités en l'absence de centres de formation de l'Agence pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) qui délivre, en France métropolitaine, des formations professionnelles qualifiantes sanctionnées par un titre professionnel du ministère du travail.

En effet, l'AFPA ne dispose plus d'établissements dans les collectivités d'outre-mer depuis 1984. Depuis cette date, les centres AFPA ultramarins ont été transférées aux collectivités territoriales qui ont financé durant de nombreuses années ces associations par le versement de subventions annuelles. Toutefois, afin de se mettre en conformité avec le code des marchés publics, les régions d'outre-mer ont engagé la transformation de ces associations en vue d'en faire des structures à part entière.

A noter que certains établissements ont, pendant longtemps, conservé l'appellation AFPA. C'est le cas notamment de l'AFPAR à La Réunion, de l'AFPA de Guyane (devenu OPRF en 2013 par le regroupement de l'ex AFPA Guyane, du CNAM et du CARIF-OREF), de l'AFPA de Martinique (dénommé IMFPA depuis 2015), ou encore d'AFPA de Guadeloupe, transformé en établissement public administratif suite à sa liquidation judiciaire en 2016 (sous l'appellation de Guadeloupe Formation).

L'organisation actuellement mise en place dans ces collectivités, qui repose sur des statuts différenciés, est précisée dans le tableau ci-après :

Territoire

Organisme public compétent

Année de création

Statut

Observations

Guadeloupe

Guadeloupe Formation

2010

Établissement public administratif (EPA)

Établissement public créé, sur habilitation législative, suite à la liquidation judiciaire de l'AFPA région Guadeloupe en octobre 2007

Guyane

Opérateur public régional de formation (OPRF)

2013

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

L'OPRF a été institué par la fusion de l'AFPA, du Centre de formation pour la promotion agricole (CFPPA) et du CARIF-OREF (IRIG-DEFIS)

La Réunion

Assistance à la formation professionnelle des adultes à La Réunion (AFPAR)

1963

Société publique locale (SPL)

Entité juridique indépendante de l'AFPA, mais qui se caractérise par un partenariat consolidé avec l'agence nationale

Martinique

Institut martiniquais pour la formation professionnelle des adultes (IMFPA)

2015

Établissement public industriel et commercial (EPIC)

Établissement public créé suite à la liquidation judiciaire de l'AFPA Martinique en date du 18 octobre 2016

Des partenariats avec l'AFPA ont toutefois été instaurés sous forme de convention dans chacun de ces territoires. Ils font l'objet d'un accord cadre triennal, fixant les axes de coopération avec l'AFPA sur les points suivants :

- animation technique et pédagogique : accès aux carrefours sectoriels, participation à des actions de recherche et développement, rencontres thématiques, échanges de pratiques ;

- mise à disposition des produits de l'ingénierie : ressources pédagogiques, accès à la plateforme Mètis ;

- offre de service d'expertise : formation de formateurs, aide au développement de la validation des acquis de l'expérience (VAE) ;

- assistance technique : perfectionnement, immersion dans des centres AFPA dans l'Hexagone ;

- prestation d'ingénierie de l'orientation, du positionnement et de l'accompagnement des stagiaires de la formation professionnelle.

Dans le cadre des missions nationales de service public, l'AFPA appuie parfois ces structures, puisque comme tout centre agréé, elles ont accès à une partie de l'offre de service en lien avec la politique du titre professionnel.

Mayotte ne dispose pas d'organisme public de cette nature. Un partenariat est toutefois engagé entre l'organisme de formation ALOALO et l'AFPA, en vue de la délivrance d'une expertise technique similaire aux prestations délivrées par l'agence au bénéfice des autres territoires ultramarins. En plein développement, l'offre de formation publique y est principalement structurée autour des lycées professionnels, d'un centre de formation d'apprentis (CFA) académique et du GRETA.

1.1.3. Des organismes publics qui devront disposer de capacités d'intervention accrues pour renforcer la coordination des acteurs publics et privés de la formation professionnelle

Des marges de manoeuvre persistent sur la capacité de ces organismes publics à mieux coordonner et piloter leurs stratégies, leurs actions, et d'une manière générale, à veiller au bon fonctionnement institutionnel des acteurs publics de l'emploi et de la formation, des représentants des salariés et des employeurs.

Les outre-mer se caractérisent, en effet, par la persistance de difficultés pour faire coïncider l'offre de formation locale avec les besoins en compétences des actifs et des entreprises sur les métiers en tension.

Des progrès majeurs ont d'ores et déjà été effectués, ces dernières années, du fait des travaux menés dans le cadre des Contrats de plan régionaux de développement des formations et de l'orientation professionnelles (CPRDFOP) 293 ( * ) puis des Pactes ultramarins d'investissement dans les compétences (PUIC). Ces derniers contiennent impérativement des diagnostics territoriaux sur l'offre locale existante en matière de formation professionnelle et d'alternance.

Ces diagnostics ont été:

- confiés aux CARIF-OREF 294 ( * ) et/ou à des prestataires externes ;

- élaborés dans une démarche multi-partenariale, par une étroite associations des régions ultramarines, des directions régionales de Pôle Emploi, des organisations syndicales et patronales représentatives, des opérateurs du service public de l'emploi et des acteurs du monde économique.

Pour autant et à l'instar des régions de France métropolitaine, il est attendu que les régions d'outre-mer adaptent davantage l'offre de formation délivrée en fonction des secteurs d'activité porteurs pour les économies locales et/ou les métiers actuellement confrontés à des difficultés de recrutement. Ainsi et à titre d'exemple, les parcours de formations additionnels pris en charge par l'Etat sur l'année 2021 dans le cadre du Plan 1 jeune -1 solution (5 675 formations) cibleront prioritairement les métiers :

- liés aux enjeux de transformation numérique et de transition écologique ,

- de la santé et du soin ;

- les activités industrielles confrontées à des enjeux importants de reconversion.

Afin de concourir à l'atteinte de ces objectifs stratégiques, il est indispensable de s'assurer au préalable que ces organismes publics locaux soient en capacité de concourir aux enjeux suivants :

- renforcer la gouvernance partagée autour des comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CREFOP) ;

- associer des représentants du monde économique à la co-construction du contenu de l'offre de formation ;

- rapprocher les acteurs du monde économique, de la formation initiale et continue, notamment sur la question du renforcement de la fonction formatrice de l'entreprise (développement de l'alternance, de l'immersion professionnelle sous tutorat).

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

Le premier alinéa de l'article 73 de la Constitution prévoit que « dans les départements et les régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit » et qu'« ils peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités. »

Au-delà des adaptations que l'État peut être amené à prévoir, l'article 73 de la Constitution prévoit également que « ces adaptations peuvent être décidées par ces collectivités dans les matières où s'exercent leurs compétences et si elles y ont été habilitées selon le cas, par la loi ou par le règlement » et que « par dérogation au premier alinéa et pour tenir compte de leurs spécificités, les collectivités régies par le présent article peuvent être habilitées, selon le cas, par la loi ou par le règlement, à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire, dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi ou du règlement. »

Le présent article s'inscrit dans le cadre de la capacité du législateur à adapter les règles législatives applicables dans les collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion et de Mayotte au regard de leurs caractéristiques et contraintes particulières.

1.3. CADRE LÉGAL

Le titre III du livre IV de la quatrième partie du code général des collectivités territoriales (CGCT) s'applique aux régions d'outre-mer (la Guadeloupe et La Réunion). Il s'applique également aux autres collectivités régies par l'article 73 de la Constitution (la Guyane, la Martinique et Mayotte), lesquelles exercent les compétences attribuées à un département et à une région d'outre-mer en vertu des dispositions suivantes :

- l'article L. 7111-1 du CGCT pour la collectivité territoriale de Guyane ;

- l'article L. 7211-1 du même code pour la collectivité territoriale de Martinique ;

- l'article LO. 3511-1 du même code pour le département de Mayotte.

En outre, les dispositions relatives aux conseils régionaux d'outre-mer sont applicables à l'assemblée de Guyane, à l'assemblée de Martinique et au conseil départemental de Mayotte en vertu des dispositions suivantes :

- l'article L. 7111-4 du CGCT pour la Guyane ;

- l'article L. 7211-4 du même code pour la Martinique ;

- l'article L. 4437-1 du même code pour Mayotte.

Ces collectivités sont compétentes en matière de formation professionnelle.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

La création d'une catégorie d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) nécessite un fondement législatif, seul à même de permettre la validation de la nature de l'établissement.

La situation des établissements publics des collectivités de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion et de Mayotte qui interviennent en matière de formation professionnelle nécessite d'être sécurisée.

Cet impératif se justifie, dans les cinq territoires visés, par la conjonction des paramètres répertoriés ci-après.

2.1.1. S'agissant des activités de service public administratif (Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique et Mayotte)

Ø Disposer, sur chaque territoire, d'un EPIC suffisamment étoffé pour répondre aux carences de l'offre de formation privée

Les cinq collectivités concernées sont confrontées à la nécessité d'adapter très finement l'offre de formation professionnelle aux demandes des employeurs locaux et aux réalités territoriales. La configuration et l'étroitesse des marchés économiques ultramarins ne permettent pas l'implantation d'une offre de formation couvrant l'intégralité des champs de compétences.

Cette configuration générale justifie de disposer d'organismes publics locaux suffisamment étoffés pour répondre à l'insuffisance de l'offre de formation privée. En effet, les situations territoriales actuellement constatées sont les suivantes :

- Guadeloupe : 450 organismes de formation (OF) privés sont actuellement dénombrés sur le territoire, pour un chiffre d'affaires de 59 M€. La moitié d'entre eux ne dépasse pas 75 000 € de chiffre d'affaires annuel et une partie demeure actuellement sans activité ;

- Guyane : la commande publique de formation étant très majoritaire (de l'ordre de 80 %, partagée entre la collectivité territoriale de Guyane et Pôle emploi), le territoire ne dispose que de 220 OF dont près de 80 % sont concentrés sur le bassin d'emploi de Cayenne. Aucun OF ne dépasse le seuil des 11 équivalents temps plein (ETP) ;

- La Réunion : les OF privés (environ 900) offrent pour beaucoup un spectre de formation étroit. Leur activité se concentre principalement sur les qualifications du secteur tertiaire ;

- Martinique : les OF privés connaissent un fort émiettement avec environ 380 organismes déclarés, dont 45 ont un chiffre d'affaires supérieur à 150 000 € et seulement 20 ont un chiffre d'affaires supérieur à 500 000 €. Près de 50 % du chiffre d'affaires total (50,2 M€ en 2017) est réalisé par moins de 5 % des OF ;

- Mayotte : seuls 30 OF privés sont à ce jour comptabilisés sur le territoire. Aucun d'entre eux n'a engagé de démarche de certification.

De plus, l'activité économique contrainte de ces territoires induit des besoins en compétences ponctuels et rapidement saturés. En réponse à ces contraintes, les employeurs ultramarins prônent depuis plusieurs années la mise en place d'une offre pouvant à la fois s'accommoder de petits effectifs et être rapidement opérationnelle sans nécessairement être pérenne.

Les OF privés ne peuvent, en effet, créer des plateaux techniques de formation sur l'ensemble des secteurs d'activité, au regard du coût des investissements requis et du faible nombre de stagiaires qui peuvent y être intégrés sur chaque session.

Le choix d'un EPIC permettrait une couverture optimisée des secteurs en tension, et ceci indépendamment du critère de rentabilité qui freine l'implantation d'une offre de formation privée sur l'ensemble des secteurs attendus.

Ø En l'absence de centres AFPA, permettre un accès optimisé à la formation des publics les plus éloignés de l'emploi

Les pactes régionaux d'investissement dans les compétences 2019-2022, signés entre l'État et les cinq collectivités concernées, témoignent uniformément de la nécessité de mettre en place des parcours de formation intégrés à l'attention des publics des demandeurs d'emploi en situation de vulnérabilité.

Est tout particulièrement concernée la démultiplication des modules de formation s'adressant aux publics en situation d'illettrisme ou à faible niveau de qualification et nécessitant une remise à niveau sur les compétences de base (français et mathématiques) et les compétences clés (socles, sociales et professionnelles) pour favoriser leur employabilité durable. Ces formations sont, par nature, davantage susceptibles d'être mises en place par des organismes de formation publics.

Ø En l'absence de centres AFPA, disposer des infrastructures d'hébergement et de restauration indispensable pour accroître les entrées en formation des personnes issues des zones géographiques les plus reculées

Les territoires ultramarins visés par cette disposition connaissent, à des degrés divers, des problématiques liées à la qualité des infrastructures de transport, de mobilité de leurs habitants et donc d'accessibilité à la formation professionnelle continue.

Les difficultés ainsi constatées en matière de mobilité intra-muros dans chaque territoire sont les suivantes :

- Mayotte : inexistence d'un réseau de transport en commun sur le territoire. L'accessibilité des services publics est ainsi limitée pour les personnes éloignées de la capitale (Mamoudzou) ;

- Guyane : les déplacements se font exclusivement en pirogue sur les fleuves ou par transport aérien dans la partie ouest du territoire. L'accessibilité pour les habitants est ainsi limitée, compte tenu de la concentration de la majeure partie de l'offre de formation dans le bassin d'emploi de Cayenne ;

- La Réunion : l'accessibilité est réduite pour les personnes habitant les parties montagneuses de l'île, qui doivent prendre plusieurs bus selon des horaires souvent non concordants avec les horaires de travail souhaités par les entreprises ;

- Martinique : bien que la zone centre bénéficie d'un réseau de transport en commun organisé, les personnes originaires des communes du Sud ou du Nord de l'île sont particulièrement confrontées à cette problématique de mobilité.

L'insertion, au sein des missions de l'établissement public, de la nécessité « d'organiser les dispositifs d'hébergement et de restauration associés » entend ainsi répondre à cette problématique de mobilité vers la formation professionnelle, en remédiant aux carences des organismes publics existants en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion et en Martinique. En effet et à ce jour, seul l'AFPAR propose ce type de prestations à La Réunion.

2.1.2. S'agissant des activités de service public industriel et commercial (Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Martinique et Mayotte)

L'EPIC sera habilité à mettre en oeuvre tout autre action en matière d'orientation et de formation professionnelles et d'accès à la qualification répondant aux besoins des régions d'outre-mer, dans les domaines de la communication, de l'information et de la réalisation d'études.

Pour exercer ces missions, l'EPIC devra impérativement créer des filiales ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes. Ces dispositions sont de nature à assurer une séparation totale à la fois juridique et comptable avec les missions de service d'intérêt économique général (SIEG) exercées au profit de la collectivité.

2.1.3. Motifs spécifiques à Mayotte

Le conseil départemental de Mayotte, compétent en matière d'orientation et de formation professionnelle, rencontre des difficultés manifestes dans le cadre de la mise en oeuvre de la commande publique de formation professionnelle continue. Il ne dispose d'aucun organisme public local en charge, sous sa tutelle, de l'exercice de la mission de service public de formation professionnelle.

La possibilité ouverte par ce texte de créer en EPIC s'avère, dans ce contexte, particulièrement adaptée aux spécificités de ce territoire en vue de mieux répondre aux problématiques répertoriées ci-dessus.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Les innovations introduites par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel et l'ordonnance n° 2019-893 du 28 août 2019 portant adaptation de cette loi aux spécificités des collectivités d'outre-mer régies par l'article 73 de la Constitution et à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon créent les conditions d'une modernisation profonde du système de la formation professionnelle et de l'apprentissage sur ces territoires.

Ont notamment été adaptées, par l'intermédiaire de cette ordonnance, les dispositions relatives au schéma d'implantation des opérateurs de compétences (OPCO), les règles applicables en matière d'apprentissage (extension de l'aide unique aux employeurs d'apprentis aux formations de niveau BAC +2, modalités de fixation des recettes d'investissement allouées aux régions d'outre-mer, possibilité de modulation des niveaux de prise en charge des contrats d'apprentissage pour les dépenses liées à l'accompagnement social des apprentis les plus en difficulté, prise en charge des frais de mobilité vers l'Hexagone ou vers d'autres collectivités d'outre-mer) et les règles applicables à la prise en charge des frais de formation en mobilité hors apprentissage pour les salariés des entreprises de moins de 50 salariés dans le cadre des actions de formation du plan de développement des compétences.

En complément et afin de contribuer à une meilleure structuration sur le long terme de l'offre de formation mise en place, le présent article entend adapter les stratégies régionales d'offre de formation professionnelle continue en fonction des spécificités locales.

Dans ce cadre, la capacité donnée aux collectivités d'outre-mer concernées de créer un EPIC en matière de formation professionnelle permettrait à cet établissement d'agir dans le champ concurrentiel.

La mesure envisagée conférerait ainsi aux collectivités concernées la possibilité de créer des établissements qui assureraient les activités menées par l'AFPA en France métropolitaine, laquelle revêt la forme d'un EPIC.

Enfin, la présente disposition permettrait d'apporter une réponse aux enjeux mahorais en habilitant le conseil départemental de Mayotte à structurer son offre de formation par la création d'un EPIC en matière de formation professionnelle.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

Quatre options apparaissaient envisageables pour sécuriser la création d'un EPIC en matière de formation professionnelle en outre-mer :

- l'habilitation des régions d'outre-mer à créer un EPIC (option n° 1) ;

- la création d'une nouvelle catégorie d'EPIC en matière de formation professionnelle pour l'ensemble des régions d'outre-mer (option n° 2 ; retenue) ;

- la création d'une catégorie sui generis d'EPIC en matière de formation professionnelle pour un seul territoire (option n° 3) ;

- la création d'un EPIC sur le fondement des dispositions de l'article L. 4433-2 du CGCT (option n° 4).

3.1.1. L'habilitation (option n° 1)

Une habilitation en application de l'article 73, alinéa 3, de la Constitution et des articles LO. 4435-2 à LO. 4435-12 du CGCT permettrait aux régions d'outre-mer de créer un EPIC.

Cette option n'a pas été retenue car elle ne permettrait pas nécessairement une mise en cohérence des établissements concernés entre les différents territoires, sur le fondement de dispositions juridiques communes.

3.1.2. La création d'une catégorie sui generis d'EPIC en matière de formation professionnelle pour un seul territoire (option n° 3)

Cette option n'a pas été retenue en opportunité, pour les mêmes raisons qu'évoquées précédemment. En effet, la multiplicité des organisations retenues s'agissant des structures en charge de la mission de service public dans les territoires ultramarins (EPIC en Guyane et en Martinique, EPA en Guadeloupe, SPL à LA Réunion) plaide davantage pour une harmonisation progressive de leur configuration sur le modèle de la transformation opérée par l'AFPA depuis le 1 er janvier 2017 (par l'ordonnance n°2016-1519 du 10 novembre 2016 portant création au sein du service public de l'emploi de l'établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes). L'objectif poursuivi est de conférer aux régions d'outre-mer, dans un cadre sécurisé juridiquement, les outils appropriés leur permettant à la fois de :

- Filialiser les activités relatives à la formation professionnelle des personnes en recherche d'emploi ;

- Distinguer, au sein l'organisation juridique et comptable de l'établissement public, les activités de service public intervenant dans le champ concurrentiel et les activités compensées intégralement par l'Etat ;

- Disposer d'une organisation pérenne ne pouvant être remise en cause à l'avenir.

3.1.3. La création d'un établissement public sur le fondement des compétences propres des régions (option n° 4)

Aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article L. 4433-1 du CGCT, « le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région dans les domaines de compétences que la loi lui attribue » et, aux termes de celles de l'article L. 4433-2 du même code, « les conseils régionaux de Guadeloupe, de Mayotte et de la Réunion peuvent créer des établissements publics dénommés agences, chargés d'assurer la réalisation des projets intéressant la région ainsi que le fonctionnement des services publics régionaux » .

En l'absence d'obligation de créer un établissement public administratif (EPA), il apparaît donc envisageable qu'une région d'outre-mer puisse créer un EPIC sur le fondement de l'article L. 4433-2 du CGCT pour le fonctionnement du service public de l'orientation tout au long de la vie et du service public régional de formation professionnelle qui relèvent de sa compétence en vertu respectivement des dispositions des articles L. 6111-3 et L. 6121-2 du code du travail.

Toutefois cette option ne permet pas de résoudre directement les problématiques suivantes :

- l'établissement public ne pourra pas intervenir dans les secteurs concurrentiels (mise en oeuvre des actions de formation et organisation des dispositifs d'hébergement et de restauration) en l'absence de dispositions expresses permettant la création de filiales ;

- l'exonération des droits de mutation entre les établissements existants et l'établissement public qui lui succédera devra être prévue par une disposition législative préalable ;

- le droit d'option pour les agents non titulaires de droit public devra être prévu par une disposition législative.

Cette option n'a pas été retenue car elle ne remplissait pas tous les critères pour redonner une assise juridique solide aux différents établissements concernés.

3.2. OPTION RETENUE

L'option retenue permet la création d'une nouvelle catégorie d'EPIC en matière de formation professionnelle pour l'ensemble des régions d'outre-mer.

3.2.1. L'obligation de prévoir l'ensemble des éléments constitutifs de la catégorie d'établissement public ainsi créé

La création d'une nouvelle catégorie d'EPIC nécessite de prévoir les éléments qui lui sont constitutifs, à savoir :

- les missions : certaines collectivités pouvant souhaiter ne pas reprendre nécessairement toutes les missions actuelles assurée par l'opérateur, il est proposé de distinguer un bloc de compétences de base et des compétences facultatives ;

- la nature et les fonctions des composantes interne, la détermination et le rôle des organes de direction et d'administration, ainsi que les conditions de leur élection ou de leur désignation : le choix est fait de ne pas nommer de membres de chambres consulaires dans le conseil d'administration pour éviter tout risque d'atteinte à la concurrence (les chambres consulaires disposent également de centres de formation) ;

- les ressources.

3.2.2. La nécessité de filialiser les activités concurrentielles

La nouvelle catégorie d'établissement devrait permettre d'exercer des missions que seul un EPIC peut accomplir (prestations de formation ou de conseil, en réponse aux appels d'offres de la région ou d'autres collectivités, aux commandes d'entreprises...).

Pour les activités de formation pour les entreprises, les salariés, comme les demandeurs d'emploi (activités purement concurrentielles), la création par une loi de l'établissement rend visible et nécessaire une clarification de l'organisation interne, dans le respect du droit de la concurrence. Afin de pouvoir justifier de l'absence de perception d'aides d'Etat de la part de la collectivité, susceptibles de générer des distorsions de concurrence avec les offreurs privés, la création de filiales a été retenue dans un cas similaire par le Conseil d'État. Par une note au Gouvernement du 20 octobre 2016, le Conseil d'État en Assemblée générale sur l'ordonnance de création de l'AFPA, a acté « l'obligation de créer des filiales de droit commun, pour exercer les activités concurrentielles de diversification de l'activité, c'est-à-dire celles qui consistent à participer à la formation tant des personnes en situation d'emploi, que des demandeur d'emploi, autres que ceux, mentionnés au 1) de l'article L. 5315-1, qui sont les plus éloignés de l'emploi » . Dès lors, il pourrait être envisagé de créer une filiale (sous forme de société par action simplifiée - SAS) détenue à 100 % par le nouvel établissement créé.

3.2.3. Les conditions de transfert entre établissements publics

Dans l'hypothèse de la création d'un EPIC succédant à un EPA, les conditions de transfert des droits, biens et obligations sont prévus par la loi, de même que les modalités d'exonération des droits, taxes et contributions ainsi que les modalités d'option des agents non titulaires de droit public.

Il est en effet prévu un droit d'option pour les agents contractuels de droit public, par dérogation au code du travail. Mais en tout état de cause, il n'est pas possible de prévenir le risque de contentieux (requalification des contrats de droit privé en contrats de droits public) avant l'entrée en vigueur des dispositions législatives.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La sous-section 3 de la section 3 du chapitre III du livre IV de la quatrième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par les articles L. 4433-14-1 et 4433-14-2.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

Les aides d'État sont des aides accordées à une entreprise, par une collectivité au moyen de ressources publiques, procurant un avantage sélectif et affectant les échanges entre États membres et la concurrence. Elles sont en principe interdites.

Lorsqu'elles sont autorisées, les aides doivent faire l'objet d'une notification à la Commission européenne et ne peuvent être octroyées qu'après approbation de la Commission. C'est l'existence de ressources (subventions de service public) et leur affectation qui doivent faire démarrer la procédure de pré-notification pour obtenir d'être exempté, sur le fondement de la décision 2012/21/UE de la Commission relative à l'application de l'article 106 du traité de fonctionnement de l'Union européenne.

Dans l'hypothèse où une collectivité envisagerait d'accorder une aide à l'établissement public qu'elle aura créé qui serait de nature à affecter le secteur concurrentiel, cette collectivité devra procéder aux formalités de notification à la Commission européenne.

4.2. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les EPIC créés ou pérennisés sur le fondement du présent article seront chargés, suite à une délibération en ce sens de la collectivité concernée, de la mise en oeuvre opérationnelle des missions qui lui seront confiées par cette dernière dans le cadre de la mission de service public de formation professionnelle sur les territoires qui auront opté pour cette configuration. Sur le fondement de cette délibération, les missions exercées par l'établissement public placé sous la tutelle de la collectivité seront définies au sein de ses statuts.

Les personnels exerceront leurs missions par l'intermédiaire de contrats de travail de droit privé, hormis :

- le directeur général et l'agent comptable de l'établissement, qui relèveront d'un statut de droit public conformément aux dispositions de droit commun ;

- les agents non titulaires de droit public employés à la date de délibération portant création du nouvel établissement qui auront opté, dans un délai de six mois à compter de cette même date, pour la conservation du bénéfice de leur contrat de droit public.

4.3. IMPACTS ADMINISTRATIFS

Les dispositions envisagées engendreront un impact en matière de gestion des ressources humaines dans la seule hypothèse où un EPA serait transformé en EPIC et si les agents non titulaires de droit public utilisent le droit d'option prévu sous un délai de six mois. Elles ne créeront pas, sauf décision contraire de la collectivité, d'impact sur le plan des effectifs en équivalent temps plein.

Le présent article prévoit, par ailleurs, que lorsqu'un EPIC succède à un EPA, la collectivité peut définir, par délibération, les conditions dans lesquelles s'opèrent, à la date de création du nouvel établissement, le transfert des biens, droits et obligations.

4.4. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les ressources des EPIC créés par les dispositions du présent article sont constituées par des dotations des collectivités territoriales, des redevances pour service rendu, le produit des ventes et des locations ainsi que par des emprunts, dons et legs et recettes diverses.

Les compétences dévolues à cet opérateur par la mesure envisagée n'impliquent pas de dépenses supplémentaires en fonctionnement et en investissement, sauf décision contraire relevant de choix politiques et opérationnels de la collectivité en charge de la tutelle de l'EPIC.

4.5. IMPACTS SOCIAUX

Les dispositions de ce projet d'article entendent créer les conditions d'une démultiplication des parcours de formation prescrits à l'attention des demandeurs d'emploi. Elles doivent donc contribuer, dans le cadre des orientations stratégiques inscrites dans les pactes ultramarins d'investissement dans les compétences 2019-2022, à l'insertion durable des demandeurs d'emploi ultramarins formés dans l'emploi.

Il est donc attendu, à moyen terme, une progression du nombre de demandeurs d'emploi formés par les EPIC susceptibles d'être créés dès la promulgation de cette loi. Une diminution des indicateurs suivants est indirectement attendue :

- Taux de chômage de la population active (cf. 1-1), et notamment des actifs de moins de 29 ans : 32 % en Guyane, 41 % en Martinique, 42 % à La Réunion, 47 % en Guadeloupe et 53 % à Mayotte en 2018, contre 18,8 % dans l'Hexagone ;

- Taux de décrocheurs scolaires âgés de 18 à 24 ans : 12 % en Martinique, 16,6 % en Guadeloupe, 22,8 % à La Réunion et 31 % en Guyane en 2018, contre 8,9 % dans l'Hexagone ;

- Taux d'illettrisme : 14,8 % à La Réunion, 16 % en Guadeloupe, 19,5 % en Martinique, 28,8 % en Guyane et 50,9 % à Mayotte en 2015, contre 3,6 % dans l'Hexagone.

Par ailleurs, les EPIC pouvant être potentiellement créés devront prioritairement concentrer leurs activités sur les secteurs en tension qui seront confrontés, dans les années à venir, à un nombre de départs à la retraite élevé. À titre d'exemple, un renouvellement des actifs devra tout particulièrement être anticipé, à horizon 2022, en Guadeloupe et en Martinique du fait du vieillissement de la population. Les actions menées en ce sens par ces établissements publics pourraient ainsi contribuer, tout particulièrement dans ces deux territoires, à la diminution du nombre de jeunes qui partent dans l'Hexagone pour la poursuite des études ou du premier emploi.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

Dans la mesure où le présent article adapte le régime législatif et l'organisation administrative des départements et régions d'outre-mer, sont consultés :

- le conseil régional de Guadeloupe au titre des articles L. 3444-1 et L. 4433-3-1 du CGCT. Un avis favorable a été rendu par le conseil régional le 21 octobre 2019 ;

- le conseil régional de La Réunion au titre des articles L. 3444-1 et L. 4433-3-1 du CGCT.

- l'assemblée de Martinique au titre de l'article L. 7252-2 du CGCT.

- l'assemblée de Guyane au titre de l'article L. 7152-2 du CGCT.

- le conseil départemental de Mayotte au titre des articles L. 3444-1 et L. 4433-3-1 du CGCT.

Le Conseil national d'évaluation des normes a été consulté en application de l'article L. 1212-2 du CGCT.

La Commission nationale de la négociation collective de l'emploi et de la formation professionnelle) a été consultée.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions envisagées par le présent article entrent en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

Les dispositions du présent article s'appliquent seulement en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion et à Mayotte.

5.2.3. Textes d'application

Les délibérations de l'assemblée délibérante des collectivités concernées seront nécessaires pour créer les EPIC, définir leur mission et prévoir les conditions de transfert des biens, droits et obligations entre établissements publics lorsqu'un EPIC succédera à un EPA.

Article 79 : Financement participatif dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF)

1. ÉTAT DES LIEUX

Les TAAF sont constituées de l'archipel Crozet, les îles Kerguelen, les îles Saint-Paul et Amsterdam, la terre Adélie et les îles Éparses. Ces territoires sont tous situés dans le sud de l'océan indien. L'ensemble de ces terres permet à la France d'avoir le deuxième plus grand territoire maritime au monde, matérialisé par une Zone Economique Exclusive de plus de 2 200 000 de km². Aucune population civile n'occupe ces territoires mais une présence militaire et scientifique y est maintenue en permanence.

Les terres australes et antarctiques françaises (TAAF) sont mentionnées par l'article 72-3 de la Constitution, dont il ressort notamment que c'est la loi qui détermine leur régime législatif et leur organisation particulière. Leur statut a ainsi été fixé par la loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton. La collectivité des TAAF est à différencier des collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution.

Il n'existe pas d'organisation judiciaire spécifique à ce territoire. Selon l'article R. 541-1 du code de l'organisation judiciaire, ce sont les juridictions de l'ordre judiciaire ayant leur siège à Saint-Denis de la Réunion qui sont territorialement compétentes pour le territoire des Terres australes et antarctiques.

Les TAAF constituent une collectivité ultramarine dotée de la personnalité morale et de l'autonomie administrative et financière. Elles ont la particularité d'être soumises au principe de spécialité législative en vertu duquel les textes de nature législative ou réglementaire (excepté les textes de souveraineté) ne sont applicables que s'ils comportent une mention expresse d'applicabilité.

Dans le cadre de la candidature des « Terres et mer australes » déposée par la France auprès de l'UNESCO en 2018, les TAAF ont envisagé une campagne de financement participatif afin de financer la réalisation d'outils de promotion (livre, exposition, film) de la candidature. A cette occasion, la collectivité a été confrontée à l'impossibilité juridique de conclure une convention de mandat avec une plateforme de financement participatif.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

L'article 40 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives autorise, d'une part, le dispositif des conventions de mandat pour l'État, ses établissements publics, leurs groupements d'intérêt public et les autorités publiques indépendantes, et, d'autre part, l'élargissement au domaine des recettes des facultés actuellement offertes aux collectivités territoriales en matière de dépenses. De façon concrète, cela permet aux collectivités territoriales, après avis conforme de leur comptable public et par convention écrite, de confier à un organisme public ou privé l'encaissement de recettes ou le paiement de dépenses. Cette disposition, qui a été codifiée à l'article L. 1611-7-1 du code général des collectivité territoriales (CGCT), n'a pas été étendue aux TAAF. Il convient donc de légiférer afin que cette collectivité ne soit plus exclue de ce dispositif.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

L'objectif poursuivi est de permettre à la collectivité de diversifier ses sources de financement en confiant à un organisme tiers l'encaissement de recettes issues d'un financement participatif. Grâce à ce mode de financement, la conclusion de projets contribuant à la visibilité des TAAF sera facilitée.

L'extension de cet article législatif permettrait de faire bénéficier les TAAF du même degré de souplesse et de sécurité juridique que l'ensemble des collectivités territoriales.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Maintenir les textes en l'état

La conclusion de conventions de mandat n'étant pas autorisée dans les TAAF, la collectivité reste privée de la possibilité de recouvrer des recettes issues d'un financement participatif, ce qui en pratique pourrait bloquer de nouveaux projets.

3.1.2. Rendre applicable dans les TAAF la disposition relative au financement participatif de l'article 40 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification des entreprises

L'extension de cette disposition aux TAAF permettrait à la collectivité de diversifier ses sources de financement confiant à un organisme tiers l'encaissement de recettes issues d'un financement participatif.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Les TAAF sont exclues des dispositifs prévus par l'article 40 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 précitée, ce qui prive la collectivité de ressources complémentaires. Cette situation n'étant pas justifiée par un motif particulier, il convient de légiférer afin de rendre applicable dans les TAAF la disposition en question par l'insertion d'un article 5-1 dans la loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

4.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne

La loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des terres australes et antarctiques françaises et de l'île de Clipperton est modifiée, il est inséré un article 5-1 après l'article 5.

4.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne

La mesure n'entre en contradiction avec aucun engagement international. Le droit de l'Union européenne ne s'applique pas aux TAAF.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

4.2.1. Impacts budgétaires

Le montant du manque à gagner si la mesure n'était pas prise n'est pas évaluable précisément, mais, pour une collectivité très spécifique disposant de peu de ressources propres mobilisables, la remise en cause d'un projet comme celui porté par l'UNESCO précédemment cité constitue un exemple pratique.

Si la mesure est adoptée, elle n'engendrera aucun coût.

4.2.2. Impacts sur les entreprises

La mesure proposée permettra d'apporter une sécurité juridique aux dirigeants des entreprises privées titulaires de conventions de mandat.

En effet, dès lors qu'une personne privée manie des deniers publics, la suspicion de gestion de fait est forte. La gestion de fait s'applique, selon l'article 60-XI de la loi de finances n°63-156 du 23 février 1963, à « toute personne qui, sans avoir la qualité de comptable public ou sans agir sous contrôle et pour le compte d'un comptable public, s'ingère dans le recouvrement de recettes affectées ou destinées à un organisme public ».

Les conventions de mandat permettent à des entreprises privées de percevoir des recettes publiques à la place de la collectivité. Par conséquent, c'est un outil qui doit être encadré par des règles précises pour éviter que la responsabilité du dirigeant de l'entreprise ne soit mise en cause pour gestion de fait.

4.2.3. Impacts sur les particuliers

Grâce à la possibilité de recourir à des financements participatifs, l'offre de la collectivité des TAAF pourra être considérablement élargie et gagnera en visibilité. Ainsi, la mesure proposée permettra :

- une visibilité sur les projets en cours, notamment les projets d'investissement ;

- un accès facilité aux offres des organismes, notamment culturelles ;

- une modernisation des procédures : paiements en ligne et offres de financements participatifs par Internet.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mesure proposée permettra :

- une sécurisation juridique du dispositif ;

- une simplification de gestion : les opérations d'encaissement de chaque recette individuelle ne sont pas réalisées par l'organisme public qui procède à un encaissement global, au vu de justificatifs, ce qui présente un gain de temps pour l'ordonnateur et le comptable (permettant à celui-ci de se concentrer sur ses missions principales) ;

- une simplification d'organisation : le dispositif évite de recourir à des régisseurs et d'augmenter le nombre de lieux d'accueil des usagers ;

- une augmentation des recettes grâce aux services de prestataires spécialisés dans la diffusion des offres notamment culturelles qui disposent d'un large réseau ;

- pour les offres culturelles, un affichage sur les mêmes réseaux que les établissements culturels privés, qui permet aux organismes de rester concurrentiels dans ce domaine.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Dans un avis du 21 février 2019, le Conseil consultatif des TAAF a fait part de son souhait d'une extension des dispositions issues de l'article 40 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification des entreprises et codifiées dans le CGCT permettant à la collectivité d'accéder au financement participatif.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

La disposition législative, permettant aux TAAF de donner à un organisme privé ou public mandat d'assurer l'encaissement au nom et pour le compte de la collectivité, nécessitera l'adoption d'un décret fixant les modalités financières et comptables de l'opération pour entrer en vigueur. Ainsi ce dispositif sera effectif dans le prolongement immédiat de la publication de la loi au Journal officiel de la République française, soit avant le second semestre de l'année 2021.

5.2.2. Application dans l'espace

La disposition sera applicable seulement sur le territoire des terres australes et antarctiques françaises.

5.2.3. Textes d'application

Le Gouvernement étendra par décret les dispositions réglementaires codifiées aux articles D. 1611-32-1 à D. 1611-32-9 du CGCT fixant les modalités financières et comptables relatives à la convention de mandat par l'insertion de ces dispositions au décret n° 2008-819 pris pour l'application du statut des Terres australes et antarctiques françaises. Ces dispositions prévoient notamment de manière expresse que les collectivités peuvent confier à un organisme public ou privé l'encaissement de recettes relatives aux revenus tirés d'un financement participatif (article D. 1611-32-9 du CGCT).

Article 80 : Modification des conseils économiques, sociaux, environnementaux, de la culture et de l'éducation (CESECE) de Guyane et de Martinique

1. ÉTAT DES LIEUX

Depuis le 1 er janvier 2018, la création des collectivités uniques de Guyane et de Martinique, collectivités à statut particulier régies par l'article 73 de la Constitution (issues de la fusion du département et de la région : articles L.7111-1 et L.7211-1 du code général des collectivités territoriales) s'est accompagnée en de la mise en place d'organismes consultatifs uniques remplaçant les anciens CESER (conseil économique, social et environnemental régional) et CCEE (conseil de la Culture, de l'éducation et de l'environnement) :

- le CESECE (conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation) de Guyane ;

- le CESECE (conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation) de Martinique.

Les dispositions de la loi n° 2011-884 du 27 janvier 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, complétées par le décret n° 2015-1666 du 11 décembre 2015 traitent de façon exhaustive de la composition et de l'organisation du CESECE de Martinique et du CESECE de Guyane. Le décret prévoit notamment que le CESECE de Martinique comprend 68 membres, répartis en deux sections, tandis que le CESECE de Guyane comprend 60 membres, répartis en deux sections.

Les CESECE exercent les prérogatives dévolues en droit commun aux CESER et aux CCEE.

D'une part, comme les CESER, le CESECE est obligatoirement saisi pour avis sur les documents relatifs à la préparation et à l'exécution dans la collectivité du plan de la nation ; à tout document de planification et aux schémas directeurs qui intéressent la collectivité ; aux différents documents budgétaires de la collectivité, pour se prononcer sur leurs orientations générales ; aux orientations générales dans les domaines sur lesquels la collectivité est appelé à délibérer en application des lois reconnaissant une compétence aux régions ainsi qu'aux schémas et aux programmes prévus par ces lois et au bilan des actions menées dans ces domaines ; aux orientations générales dans le domaine de l'environnement.

D'autre part, comme les CCEE, le CESECE est obligatoirement consulté lors de la préparation du plan de développement et d'équipement de la collectivité et de l'élaboration du projet de budget de la collectivité en ce qui concerne l'éducation, la culture, la protection des sites, de la faune, de la flore et le tourisme. Le CESECE peut être saisi de toute question dans le champ des compétences de la collectivité, à l'initiative de l'exécutif local ou de sa propre initiative.

Les articles L. 7124-1 à L. 7124-10 du code général des collectivités territoriales (CGCT) régissent le fonctionnement du CESECE de Guyane, et les articles L. 7226-1 à L. 7226-10 du même code régissent le fonctionnement du CESECE de Martinique.

Ces dispositions subdivisent les CESECE en deux sections qui correspondent au périmètre des deux anciennes instances consultatives :

- une section économique, sociale et environnementale ;

- une section de la culture, de l'éducation et des sports.

Cette subdivision des CESECE en deux sections, qui limite les effets de la fusion des anciens conseils, engendre deux types de conséquences négatives.

En premier lieu, cette dualité des sections alourdit le fonctionnement du CESECE, à l'encontre de l'objectif initial de création d'un organisme unique, et allonge les délais de traitement des demandes d'avis. En effet, les conditions de réunion des sections, fixées par le règlement intérieur du CESECE (article R.7124-22 du CGCT pour la Guyane et article R.7226-22 pour la Martinique), sont les mêmes que pour l'assemblée plénière du CESECE. Ainsi, alors que les anciens CESER et CCEE se prononçaient en moyenne dans un délai de 12 jours, le délai est désormais de 24 jours pour le CESECE.

En second lieu, cette structuration a pour effet indirect la mise en place d'une présidence alternée. L'alternance de présidence du CESECE de Guyane et du CESECE de Martinique est prévue par les articles R. 7124-9 et R. 7226-9 du CGCT, qui disposent que : « Le président du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation et les membres du bureau sont élus pour la moitié de la durée du mandat du conseil. Le président est élu alternativement dans chaque section. Les membres du bureau sont rééligibles. Il est pourvu aux vacances survenues au sein du bureau lors de la réunion du conseil qui suit leur constatation ».

Cette présidence alternée repose sur la présence des deux sections au sein du conseil (articles L. 7124-2 et L. 7226-2 du CGCT).

Ce mandat de trois ans est souvent incompatible avec la réalisation de projets dans le cadre d'une instance dont la durée du mandat des membres, désignés par arrêté du préfectoral (article R. 7124-5 du CGCT pour la Guyane et R. 7226-5 pour la Martinique), est de six ans (article R. 7124-7 du CGCT pour la Guyane et article R. 7226-7 pour la Martinique) Les membres du CESECE sont désignés par le préfet au sein d'une liste d'organismes professionnels et associatifs dont il fixe la liste par arrêté (articles R. 7124-4 et R. 7226-4 du CGCT).

Enfin, il pourrait être envisagé de laisser plus de souplesse, en renvoyant ces règles de fonctionnement interne à un règlement intérieur par exemple.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le CESECE est un organisme consultatif qui remplace le CESER et le CCEE en Guyane et en Martinique. Les articles L. 7124-2 du CGCT pour la Guyane et L. 7226-2 du même code pour la Martinique organisent la subdivision obligatoire en deux sections du CESECE, qui correspondent au périmètre des anciens conseils. Cette subdivision en sections fait obstacle à l'efficacité de cet organisme et va à l'encontre de l'esprit de la fusion des CESER et CCEE.

Pour modifier les règles de gouvernance de ces deux organismes il est donc nécessaire d'en passer par la loi.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La suppression de l'obligation de subdivision en deux sections des CESECE de Guyane et Martinique permettrait aux CESECE d'avoir une organisation alignée sur le droit commun applicable au CESER et CCEE. Ainsi le CESECE de Guyane et le CESECE de Martinique auraient la possibilité de créer eux-mêmes des sections s'ils l'estiment nécessaires. La création de sections serait une décision d'organisation interne au CESECE, qui n'aurait plus d'incidence sur la gouvernance de la structure. La présidence du CESECE ne serait donc plus alternée, ce qui était justifié par l'existence légale de deux sections.

3. OPTIONS ENVISAGÉES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Option exclue n° 1 : maintenir l'état actuel du droit

Le fonctionnement actuel des CESECE n'est pas satisfaisant dans la mesure où, d'une part, la subdivision obligatoire en deux sections correspondant au périmètre des anciens conseils entrave le processus de mutualisation et, d'autre part, la présidence alternée entre chaque président de section nuit à la continuité des projets de l'institution pendant la durée du mandat de ses membres.

Le maintien de la situation actuelle n'est donc pas souhaitable.

3.1.2. Option exclue n° 2 : maintenir l'existence légale de deux sections, mais supprimer la présidence alternée

Une solution alternative consisterait à ne pas modifier les dispositions législatives relatives à la subdivision du CESECE en deux sections mais à supprimer simplement le mécanisme de présidence alternée au niveau réglementaire.

Cette option n'est guère satisfaisante dans la mesure où la subdivision obligatoire en deux sections peut entraîner l'impossibilité de dégager une majorité en faveur de l'élection d'un président unique pendant toute la durée du mandat. Par ailleurs, cette réforme limitée à un aspect du fonctionnement des CESECE ne résoudrait pas la difficulté à la source.

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le projet de loi aligne l'organisation et le fonctionnement des CESECE de Guyane et de Martinique sur les dispositions de droit commun relatives aux CESER et aux CCEE :

- la subdivision obligatoire en deux sections est supprimée et les modalités d'organisation interne de l'institution relèvent du règlement intérieur ;

- le président est élu pour six ans, soit la durée du mandat des membres du CESECE.

Ces dispositions conforteront ainsi la fusion des CESER et des CCEE au sein des CESECE, tout en simplifiant le fonctionnement de l'institution.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

Ces dispositions modifient les articles L. 7124-2, L. 7124-3 et L. 7226-2, L. 7226-3 du code général des collectivités territoriales pour supprimer l'obligation de subdivision des CESECE de Guyane et de Martinique en deux sections. Dans un second temps, une modification de la partie réglementaire du CGCT tirera les conséquences de cette modification législative pour supprimer la présidence alternée du CESECE entre chaque président de section.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Ces mesures n'appellent pas d'engagements économiques et financiers. Les entreprises continueront à être représentées dans les mêmes conditions.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Ces dispositions simplifieront le fonctionnement des CESECE et faciliteront ainsi le suivi de projets et la formulation d'avis susceptibles d'orienter les politiques publiques des collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du CGCT, la disposition envisagée a été soumise au Conseil national d'évaluation des normes.

Les consultations ont été menées auprès des assemblées des collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

Les dispositions relatives à la réforme de l'organisation des CESECE entreront en vigueur lors du plus prochain renouvellement du CESECE de Guyane et du CESECE de Martinique qui suit la publication de la loi au Journal officiel de la République française, le mandat actuel des CESECE de Guyane et de Martinique courant jusqu'en 2023.

5.2.2. Application dans l'espace

Le présent article s'applique uniquement aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

5.2.3. Textes d'application

Un décret en Conseil d'État viendra préciser l'application des articles L. 7226-2, L. 7226-3, L. 7124-2 et L. 7124-3 du code général des collectivités territoriales.

Article 82 : Adaptation et extension en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française

1. ÉTAT DES LIEUX

En vertu de l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement peut demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.

Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation. Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse.

A l'expiration du délai, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif.

Le recours à une ordonnance sur la base de l'article 38 de la Constitution a été privilégié compte-tenu de la nécessité d'examiner les dispositions de la loi (les dispositions qui figurent à l'origine dans le projet de loi comme celles ajoutées ou modifiées au cours du débat parlementaire) pour déterminer celles qu'il convient d'étendre et d'adapter en Polynésie française (collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution) et en Nouvelle-Calédonie (collectivité sui generis régie par l'article 77 de la Constitution).

Ces collectivités présentent en effet des spécificités, d'une part, du fait de la répartition des compétences entre l'État et les différents niveaux de collectivités, et, d'autre part, au regard de leur organisation institutionnelle, incompatibles avec une extension pure et simple du droit commun.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le projet de loi est applicable de plein droit à l'ensemble des collectivités de l'article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte) ainsi qu'aux communes de Saint-Pierre et Miquelon.

Il n'est pas applicable aux collectivités de Saint-Pierre et Miquelon, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, de Wallis et Futuna, de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie, dont les compétences et les relations avec l'État relèvent de la loi organique.

Il comprend une disposition spécifique aux Terres australes et antarctiques françaises (financement participatif).

Les dispositions présentées ne peuvent être applicables aux communes de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie que sur mention expresse d'application.

Compte-tenu de l'organisation très spécifique du bloc communal dans ces collectivités, l'objet de ce projet de loi n'est pas totalement adapté à la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie, notamment dans la mesure où son extension impacterait des compétences locales (en matière sociale, sanitaire ou de circulation routière par exemple).

Aussi le Gouvernement a souhaité renvoyer à une ordonnance le soin de fixer les modalités d'application en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie. Cette option tient compte des spécificités de ces territoires et du débat parlementaire à venir. Une intervention par voie d'ordonnance permettra de disposer d'une bonne visibilité sur l'ensemble des thématiques. Il s'agit ainsi de favoriser la clarté et l'intelligibilité du droit applicable en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, en recourant à un texte spécifique qui permettra de bien rédiger les normes d'extension et d'adaptation nécessaires.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

Le présent article d'habilitation vise à étendre et adapter les dispositions du présent projet de loi aux communes de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTIONS ENVISAGÉES

3.1.1. Option exclue n° 1 : insérer directement dans le projet de loi des dispositions d'extension et d'adaptation au bloc communal de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie

La première option consiste à insérer directement dans le projet de loi des dispositions d'extension et d'adaptation au bloc communal de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie. En dehors de quelques dispositions ponctuelles qui sont directement applicables, cette option n'apparaît pas adaptée compte tenu de la richesse du texte et de son évolution probable au cours du débat parlementaire.

3.1.2. Option exclue n° 2 : exclure tout extension du projet de loi en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie

Une autre option consiste à n'insérer aucune mention d'applicabilité en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie dans le projet de loi sans prévoir d'habilitation du Gouvernement à étendre et à adapter les dispositions par voie d'ordonnance. Cette option a été exclue dans la mesure où certaines dispositions seront utiles au bloc communal dans ces deux collectivités, sous réserve d'adaptations éventuelles (par exemple en matière de droit de pétition des électeurs ou d'organisation et de fonctionnement des institutions communales en période de crise sanitaire).

3.2. DISPOSITIF RETENU

Le Gouvernement a privilégié le recours à une habilitation à légiférer par voie d'ordonnance en application de l'article 38 de la Constitution afin de disposer de la marge de manoeuvre nécessaire pour tenir compte des évolutions du texte au cours du débat parlementaire.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

L'impact des mesures que le Gouvernement décidera d'étendre et d'adapter aux communes de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie fera l'objet d'une évaluation dans le cadre de l'étude d'impact du projet d'ordonnance.

5. JUSTIFICATION DU DÉLAI D'HABILITATION

L'habilitation de dix mois pour prendre l'ordonnance commencera à courir à compter de la publication de la loi au Journal officiel de la République française. Ce délai est adapté pour organiser une concertation au niveau interministériel et au niveau local dès l'adoption de la loi afin d'identifier les mesures susceptibles d'être étendues.

Article 83 : Modalités de cession du foncier de l'État en Guyane

1. ÉTAT DES LIEUX

1.1. CADRE GÉNÉRAL

Malgré sa superficie de 83 000 km² et son faible peuplement (262 527 habitants mais 700 000 habitants en 2050) le territoire guyanais manque de foncier aménagé. Le SAR approuvé en 2016 ne comprend que 1% de zones à vocation urbaine et 2% à vocation agricole ramenant une densité apparente de 3 habitants au km² à une densité réelle de 316 habitants au km².

Actuellement parmi les 7,9 millions d'hectares du domaine privé de l'Etat représentant 96% du territoire guyanais, seuls 100 000 hectares sont disponibles et valorisables dont 6 226 hectares en zone urbaine et 87 372 en zone agricole. La plupart de ces surfaces ne sont pas aménagées, ce qui freine les politiques publiques en faveur du logement. Partout sur le territoire le logement informel progresse, l'offre de logements, notamment sociaux, ne se développe pas assez rapidement et durablement.

Pour répondre à cette situation, une opération d'intérêt national (OIN) multi-sites a été créée par le décret n° 2016-1736 du 14 décembre 2016 sur les principaux pôles urbains de la Guyane. La création de cette OIN prévoit notamment la cession gratuite de foncier de l'État au profit de l'établissement public foncier et d'aménagement de Guyane (EPFAG), établissement public sous tutelle de l'État, afin que cet opérateur puisse aménager vingt-quatre secteurs (viabilisation des terrains, aménagement des voiries secondaires et des espaces publics). Si le financement des opérations repose pour partie sur les cessions aux opérateurs privés et aux bailleurs sociaux, les opérations restent déficitaires et doivent être financées soit par des subventions295 ( * ) soit par des apports de terrains. Le patrimoine foncier de l'État permet de contribuer à l'activité de l'EPFAG avec l'apport de 1 596 hectares compris dans les périmètres de l'OIN, soit 27,5 % de la totalité de la surface de ces périmètres. Cet apport matérialise l'effort de l'État en faveur de l'OIN.

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) est venue préciser les modalités selon lesquelles les collectivités territoriales sont consultées dans le cadre de ces cessions de foncier, en précisant que ces dernières ne pouvaient être réalisées qu'à la suite d'un accord préalable de la commune de situation.

Il apparaît que suite à la modification de l'article L. 5142-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) par la loi ELAN, le transfert de ce foncier est rendu incertain du fait de difficultés constatées dans son application. En effet, cet article prévoit la consultation pour accord préalable de la commune concernée par une cession mais ne précise ni le délai dans lequel la commune doit rendre son avis, ni le sens de son avis en cas d'absence de réponse. Il en résulte une incertitude juridique si la commune ne transmet pas son avis. Dans le silence actuel des textes, seul le juge est compétent pour apprécier le formalisme de l'avis transmis ainsi que le délai « raisonnable » dans lequel la commune sera considérée comme ayant rendu celui-ci. La situation actuelle est donc source de risques juridiques et de blocages pour l'OIN de Guyane.

Le préfet de Guyane a constaté que les transferts de foncier vers l'EPFAG vont constituer une charge administrative importante pour les communes et un risque de dérapage opérationnel si elles tardent à rendre leur avis.

Cette situation est d'autant plus regrettable que l'évolution législative initiale avait pour objet de simplifier la procédure de cessions gratuites de terrains de l'État à l'EPFAG dans l'intérêt des guyanais et sans léser les intérêts des collectivités puisque l'État s'est engagé, dans l'Accord de Guyane du 21 avril 2017 296 ( * ) , à céder à titre gratuit 250 000 hectares de foncier lui appartenant, à la collectivité territoriale de Guyane et aux communes.

Le 3° de l'article L. 5142-1 du CG3P, dans sa version actuelle, fixe une limite spatiale aux cessions à titre gratuit que l'État peut faire aux collectivités territoriales ou à leurs groupements en vue de constituer, sur le territoire d'une commune, des réserves foncières. La superficie globale cédée en une ou plusieurs fois ne peut en effet excéder, sur chaque commune, une superficie de référence égale à dix fois la superficie des parties agglomérées de la commune de situation des biens cédés pour chaque période de dix années à compter de la date de la première cession gratuite.

Cette limite de superficie est susceptible de constituer un obstacle aux transferts projetés en risquant d'enfermer la finalisation du transfert dans des délais trop contraints. La négociation du transfert implique en effet que chacun puisse s'en approprier les enjeux, qu'une concertation puisse avoir lieu et que de nouveaux moyens de gestion foncière soient mobilisés.

1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL

L'article 72 de la Constitution défini le principe de libre administration des collectivités territoriales que le transfert du foncier doit respecter. Il s'inscrit aussi dans le respect de l'article 73 de la Constitution qui régit les cinq départements et régions d'outre-mer.

2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS

2.1. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER

Le foncier aménagé est aujourd'hui limité et le rattrapage de ce retard d'aménagement demande du temps (acquisition des terrains, réalisation des aménagements nécessaires, etc.).

Étant donné les enjeux d'aménagement pesant sur le territoire guyanais (logement, traitement de l'habitat informel, indigne et insalubre, préservation de l'environnement, activités économiques et agricoles, etc.), il est nécessaire d'assurer le transfert du foncier de l'État vers l'EPFAG à un rythme suffisant tout en sollicitant l'avis des collectivités territoriales.

L'objet des dispositions insérées au 3° bis de l'article L. 5142-1 du CG3P est d'améliorer la procédure permettant de doter gratuitement l'EPFAG de terrains appartenant à l'État.

Or, compte tenu de la nécessité de recueillir préalablement l'accord de la commune sur le territoire de laquelle sont situés les terrains, le silence gardé par les communes concernées a pour effet d'empêcher les transferts de terrains de l'État à l'établissement public, compromettant ainsi l'exécution de l'engagement de l'État comme la mise en oeuvre des opérations que l'OIN a pour objet de permettre.

Cette disposition apparaît incohérente avec l'ensemble des décisions qui ont été prises ces dernières années pour structurer, organiser et permettre à l'État de contribuer à l'aménagement du territoire guyanais. Elle constitue aussi une charge administrative en imposant aux communes de produire une réponse explicite. La fixation d'un délai afin de permettre de réaliser ces transferts relève du champ législatif.

L'objet des dispositions insérées au 3° de l'article L. 5142-1 du CG3P est d'améliorer la procédure permettant de céder gratuitement aux collectivités territoriales des terrains appartenant à l'État en vue de constituer sur le territoire d'une commune des réserves foncières, dans les conditions fixées aux articles L. 221-1 et L. 221-2 du code de l'urbanisme.

Or, l'article L. 5142-1 du CG3P impose des limites en termes de surfaces pouvant être cédées aux collectivités.

Cette disposition constitue un frein à la pleine mise en oeuvre de l'accord de Guyane, compte tenu des surfaces importantes du domaine de l'État à céder, et à la mise en place d'un processus permettant un transfert consensuel et équitable. Le rapport rendu sur le transfert de foncier en février 2018 par la mission des inspections générales (IGF, IGA, CGEDD et CGAAER) identifiait bien le frein que représentait cet article du CG3P.

2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS

La modification proposée permettra d'effectuer ce transfert du foncier de l'État vers l'EPFAG plus rapidement et de réaliser les opérations d'aménagement nécessaire à la mise en oeuvre de l'OIN.

De même, la suppression de la limite spatiale pour les cessions aux collectivités territoriales permettra de faciliter ces cessions et, pour les collectivités, de constituer plus rapidement des réserves foncières, ce qui facilitera l'aménagement de l'espace.

3. OPTIONS POSSIBLES ET DISPOSITIF RETENU

3.1. OPTION ENVISAGÉE

S'agissant du transfert de foncier de l'État à l'EPFAG, un projet de décret avait été présenté au Conseil d'État pour modifier l'article R. 5142-8 du CG3P et fixer un délai raisonnable aux élus pour qu'ils puissent rendre leur avis sur les cessions gratuites des terrains de l'État à l'EPFAG. Le délai de réponse de la commune proposé était de deux mois, le silence gardé à l'issue de ce délai valant accord préalable sur la cession. Ces dispositions visaient à favoriser la réalisation de l'OIN dont le périmètre a été défini par le décret n° 2016-1736 du 14 décembre 2016. Cependant il s'est avéré que seule la voie législative pouvait prévoir les conditions dans lesquelles l'accord de la commune d'assiette des biens objet du transfert est présumé acquis.

S'agissant de la limite spatiale pour les cessions aux collectivités, un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances pour 2020 a été envisagé mais n'a pas prospéré car considéré comme un cavalier budgétaire. Cet amendement précisait au 3° de l'article L. 5142-1 du CG3P que la seconde phrase de l'article était supprimée et remplacée par les dispositions suivantes : « La superficie globale cédée en une ou plusieurs fois doit au préalable faire l'objet d'une déclaration précisant la localisation, la destination et le mode d'utilisation de cette fraction en compatibilité avec le schéma d'aménagement régional en vigueur ».

Un amendement similaire a été adopté dans le cadre du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP - article 88) mais il a été censuré par le Conseil constitutionnel car considéré comme cavalier législatif.

3.2. OPTION RETENUE

Sur le premier point (accord tacite des communes pour les cessions à l'EPFAG), l'option retenue est de modifier l'article L. 5142-1 du CG3P en indiquant qu'au terme d'un délai de deux mois à compter de la réception par le maire du projet d'acte de cession adressé par le préfet, l'accord de la commune est réputé acquis. L'État devra ainsi saisir les collectivités des demandes de transfert d'immeubles domaniaux vers son opérateur. Si au terme du délai, les collectivités n'ont pas formellement répondu, leur avis favorable sera réputé acquis. Les transferts seront réalisés et sécurisés juridiquement. Ce délai de deux mois est raisonnable et laisse toute la latitude nécessaire aux collectivités de faire part d'une éventuelle opposition à un tel transfert et permet d'accélérer le transfert si elles n'y sont pas opposées. Par ailleurs, il est aussi précisé que les communes concernées peuvent s'opposer à ce transfert si ce foncier leur est nécessaire à la réalisation d'équipements collectifs, à la construction de logements sociaux ou de services publics. Enfin, pour les cessions en cours à la date de publication de loi, à l'échéance du délai de deux mois et dans le silence tenu par les collectivités, il sera réputé réalisé.

La disposition proposée, en ce qu'elle prévoit un accord tacite de la commune pour les cessions à l'EPFAG, ainsi qu'en précisant les cas pour lesquels la collectivité peut s'opposer, respecte le principe de libre administration des collectivités tel qu'il est défini par l'article 72 de la Constitution, car il ne s'agit que d'encadrer en termes de procédure la réponse qu'une commune pourrait donner pour une cession gratuite d'un immeuble domanial appartenant à l'État à son opérateur. Elle s'inscrit aussi dans le respect de l'article 73 de la Constitution.

Sur le second point (suppression de la limite spatiale pour les cessions aux collectivités), l'option retenue est de modifier l'article L. 5142-1 du CG3P pour supprimer la seconde phrase du 3° de l'article fixant une limite spatiale sur chaque commune égale à dix fois la superficie des parties agglomérées de la commune de situation des biens cédés pour chaque période de dix années à compter de la date de la première cession gratuite.

La disposition proposée, en ce qu'elle supprime la limite spatiale en cas de cessions aux collectivités territoriales pour la constitution de réserves foncières, allège les contraintes de la législation actuelle et ne remet en cause aucun principe ou disposition constitutionnel.

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES

4.1. IMPACTS JURIDIQUES

L'article L. 5142-1 du CG3P est modifié en ses 3° et 3° bis.

4.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS

Les projets d'aménagement prévus sur ces fonciers permettront de mobiliser des entreprises, notamment du secteur du bâtiment et des travaux publics. Ils auront un impact positif sur ce secteur économique et participeront à la structuration des filières sur le territoire guyanais.

A terme et selon les orientations des projets d'aménagement, des entreprises pourront s'installer sur le foncier aménagé dédié aux activités économiques et commerciales.

4.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

S'agissant de la mesure visant à permettre un accord tacite des communes pour les cessions de l'État à l'EPFAG, il convient tout d'abord de souligner que le délai de deux mois au-delà duquel le silence des communes vaudra accord correspond à un délai raisonnable et classique dans les procédures administratives. Pour exemple, le code des relations entre l'administration et le public, dans son article L. 231-1, pose le principe que le silence gardé pendant deux mois par l'administration sur une demande vaut décision d'acceptation. En tout état de cause, aucune compétence n'est retirée aux communes et le délai institué leur permettra de ne pas répondre lorsqu'elles seront d'accord avec l'opération ; elles ne devront répondre que si elles ne sont pas d'accord avec le transfert de foncier qu'elles souhaiteraient utiliser pour réaliser des équipements collectifs, des logements sociaux ou des services publics en tant que maître d'ouvrage de ces opérations.

Par ailleurs, le transfert concerne le foncier de l'État vers un de ses établissements publics et il n'y a donc pas de sujet financier à ce stade. Celui-ci n'interviendra qu'au moment d'une cession foncière ultérieure et ensuite, à plus long terme, sur les éventuels financements de travaux et les retombées fiscales issues de l'aménagement, étant précisé que les collectivités territoriales concernées par le transfert de foncier verront leur territoire aménagé et obtiendront des retombées fiscales après rétrocession des aménagements par l'EPFAG.

Les bilans des opérations de l'EPFAG en particulier seront équilibrés plus aisément via cette dotation en nature.

Les coûts de sortie des logements seront réduits, ce qui permettra aux ménages les plus précaires d'accéder à un logement plus facilement, permettant ainsi de répondre à une très forte demande sur le territoire.

La localisation et la destination du foncier transféré interviendront en compatibilité avec le schéma d'aménagement régional et le plan local d'urbanisme.

Le processus de transfert du foncier aux collectivités territoriales pourra amener ces dernières à élaborer un programme de développement du territoire à l'horizon de quinze à vingt ans pour tracer les perspectives d'aménagement de leur territoire qui tiendront compte des perspectives démographiques et des besoins en équipement qui en découlent. Ce programme sera à la discrétion des collectivités, qui auront à mettre en place des outils de gestion foncière.

Le transfert de foncier permettra à l'EPFAG et aux collectivités territoriales de limiter le recours à l'emprunt pour l'acquisition de foncier dans le cadre de leurs opérations, dont celles dédiées à l'aménagement du territoire.

Le transfert à titre gratuit du foncier de l'État à l'EPFAG ou aux collectivités représente une dotation en nature qui a pour objet de favoriser et d'accélérer l'aménagement en Guyane et la mise en oeuvre de l'OIN, permettant ainsi le développement d'une offre de logements, de locaux d'activités économiques, d'équipements des collectivités et d'infrastructures. L'ampleur de ces opérations est significative pour le marché local du logement et, plus généralement, pour le développement de la collectivité locale concernée. Cette mesure va contribuer à la dynamique du territoire et à son développement économique.

De plus, grâce à ce transfert à titre gratuit, les coûts d'aménagement seront réduits puisqu'il n'y aura pas de mobilisation financière pour l'achat du foncier. Enfin, la réalisation de projets d'aménagement sur ces fonciers aura des retombées fiscales positives pour les collectivités concernées.

S'agissant de la limite spatiale pour les cessions de l'État aux collectivités territoriales, sa suppression permettra à ces dernières de constituer plus rapidement des réserves foncières, ce qui facilitera l'aménagement de l'espace.

4.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS

Pour pallier le blocage de transfert foncier, les services de l'État organisent déjà de nombreuses réunions (incluant la présentation de documents cartographiques) avec la collectivité territoriale qui doit donner son accord et le porteur de projet (EPFA, établissement public de coopération intercommunale - EPCI, service de l'État), pour expliquer tous les avantages du projet et informer de l'état d'avancement des dossiers. Cependant, ces réunions ne sont pas toujours suivies d'effet concernant les accords attendus pour débloquer le transfert de foncier.

La mise en place par la loi d'un délai de réponse permettra de débloquer le transfert à défaut de réponse ou l'expression formalisée en cas de refus de ce transfert. Plus généralement, cette modification législative générera un gain de temps et rendra le travail des services déconcentrés de l'État plus efficaces concernant ces transferts de foncier, y compris pour les cessions en cours au moment de la publication de la loi qui bénéficieront de ce délai de deux mois.

Pour faciliter le transfert foncier et accélérer sa mise en oeuvre, les services locaux de l'État se sont réorganisés. Une mission foncière regroupe aujourd'hui plusieurs administrations (Préfecture, Direction régionale des finances publiques/SLD, Direction de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt, Office National des Forêts, Direction Générale des Territoires et de la Mer). Les commissions d'attribution foncière (CAF) ont été relancées en décembre 2018 et se réunissent à présent tous les trimestres. A ce jour et depuis 2016, 8,9% du foncier total de référence a été transféré (source Services de l'Etat en Guyane).

Les services de l'État sont chargés d'établir la cartographie du foncier de l'État disponible pour suivre en temps réel la situation des demandes pour chaque collectivité, en toute transparence, au regard de l'objectif global de cession de 250 000 hectares.

Enfin, et afin de limiter les risques de captation du foncier, l'État devra mettre à disposition du public les informations relatives aux différentes étapes de la cession, ainsi qu'au devenir des terrains cédés.

4.5. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS

Le transfert de foncier n'a pas d'impact direct sur les particuliers. Cependant, favoriser ce transfert foncier permettra, d'une part, de réaliser plus rapidement les projets d'aménagement avec notamment une production importante de logements et, d'autre part, de respecter les engagements pris par le Gouvernement dans le cadre des accords de Guyane. Cela permettra donc, à terme, de répondre aux besoins de la population guyanaise et d'améliorer son cadre de vie.

4.6. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

Les fonciers concernés sont à ce jour majoritairement situés en zones naturelles. Même si ces espaces naturels seront à terme artificialisés, cela participe de la lutte contre l'extension urbaine non maitrisée constatée actuellement au travers du développement rapide et incontrôlé de l'habitat informel et du squat. Cette consommation encadrée et limitée d'espace naturel permettra également de lutter contre le mitage en cours.

De plus, comme tout projet d'aménagement, des études environnementales seront effectuées et l'autorité environnementale donnera son avis concernant les projets d'aménagement.

Enfin, l'EPFAG applique la méthode « éviter, réduire, compenser » afin de limiter l'impact sur l'environnement de ses projets d'aménagement.

5. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION

5.1. CONSULTATIONS MENÉES

En application de l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales, le Conseil national d'évaluation des normes a été consulté.

La collectivité territoriale de Guyane a été consultée sur ces dispositions.

5.2. MODALITÉS D'APPLICATION

5.2.1. Application dans le temps

L'application de la première mesure (accord tacite des communes pour les cessions à l'EPFAG) sera immédiate le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française et pendant toute la durée de la mise en oeuvre de l'OIN.

A compter de la publication de la loi au Journal Officiel de la République française, les communes, auxquelles un projet d'acte de cession a été adressé par le préfet et qui n'ont pas fait connaître leur position sur celui-ci, disposeront de deux mois à compter de cette date pour se prononcer sur le projet. Le silence gardé pendant ce délai vaut accord.

L'application de la seconde mesure (suppression de la limite spatiale pour les cessions aux collectivités) sera immédiate le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française.

5.2.2. Application dans l'espace

La première mesure (accord tacite des communes pour les cessions à l'EPFAG) s'applique uniquement sur le territoire de la Guyane et ne concerne que le foncier appartenant à l'État inclus dans les périmètres de l'OIN de Guyane tels que définis par le décret n° 2016-1736 du 14 décembre 2016.

La seconde mesure (suppression de la limite spatiale pour les cessions aux collectivités) s'applique uniquement sur le territoire de la Guyane et ne concerne que le foncier appartenant à l'État.


* 1 Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a fait pour la première fois application du principe constitutionnel d'égalité dans sa jurisprudence en jugeant que les dispositions de la loi de finances pour 1974 tendant à permettre au contribuable, taxé d'office à l'impôt sur le revenu, d'obtenir la décharge de la cotisation qui lui est assignée à ce titre s'il établit que les circonstances ne peuvent laisser présumer « l'existence de ressources illégales ou occultes ou de comportement tendant à éluder le paiement normal de l'impôt » instituent une discrimination entre les citoyens au regard de la possibilité d'apporter une preuve contraire à une décision de taxation d'office de l'administration les concernant et, par suite, portent atteinte au principe de l'égalité devant la loi contenu dans la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 et solennellement réaffirmé par le préambule de la Constitution.

* 2 Le Conseil d'Etat considère que le respect des exigences constitutionnelles, notamment celles qui découlent du principes d'égalité, implique que la différenciation porte sur des compétences précisément identifiées et en nombre limité, qu'elle conduise à attribuer les compétences aux collectivités territoriales les mieux à même de les mettre en oeuvre, qu'elle recueille l'accord des collectivités territoriales concernées, et qu'elle fasse l'objet d'une compensation financière lorsqu'elle a pour conséquence d'accroître les charges des collectivités concernées.

* 3 Dans cet avis, le Conseil d'Etat se réfère à son avis n° 393651 du 7 décembre 2017 dans lequel il a notamment précisé les conditions de mise en oeuvre de la différenciation des compétences, lesquelles sont présentées ci-dessus.

* 4 En effet, les départements et les régions d'outre-mer régis par l'article 73 de la Constitution, les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et la Nouvelle-Calédonie disposent d'ores et déjà de possibilités de différenciation plus importantes que les collectivités de droit commun

* 5 Le pouvoir réglementaire est défini comme le pouvoir dont disposent les autorités exécutives et administratives de prendre unilatéralement (c'est-à-dire sans l'accord des destinataires) des actes exécutoires comportant des dispositions générales et impersonnelles.

* 6 Selon les alinéas 4 et 5 de l'article L.4221-1 du CGCT, « un conseil régional ou, par délibérations concordantes, plusieurs conseils régionaux peuvent présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions législatives ou réglementaires, en vigueur ou en cours d'élaboration, concernant les compétences, l'organisation et le fonctionnement d'une, de plusieurs ou de l'ensemble des régions. Les propositions adoptées par les conseils régionaux en application du quatrième alinéa du présent article sont transmises par les présidents de conseil régional au Premier ministre et au représentant de l'Etat dans les régions concernées ».

* 7 Les réformes constitutionnelles des 4 août 1995 et 23 juillet 2008 ne concernaient pas les collectivités territoriales mais le référendum sur l'ensemble du territoire national.

* 8 https://www.collectivites-locales.gouv.fr/consultation-pour-avis-des-electeurs .

* 9 L'article 158 de la cette loi organique prévoit que « L'assemblée de la Polynésie française peut être saisie, par voie de pétition, de toute question relevant de sa compétence. La pétition peut être présentée à titre individuel ou collectif. Elle doit être établie par écrit, sous quelque forme que ce soit, rédigée dans les mêmes termes et signée par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales en Polynésie française ».

* 10 https://www.gouvernement.fr/conseil-des-ministres/2018-11-26/orientation-des-mobilites.

* 11 https://www.ecologie.gouv.fr/feuille-route-economie-circulaire-frec.

* 12 http://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/redaction_multimedia/2020/2020-Documents_pdf/20200702_Rapport_GT_Decentralisation.pdf

* 13 https://www.ecologie.gouv.fr/france-relance-transition-ecologique

* 14 Accord de Paris sur le Climat, 12 décembre 2015.

* 15 Les données sont disponibles sur le site du ministère de la transition écologique, notamment dans le document Chiffres clés du transport, éd. 2020. "Les chiffres clés du transport", du MTES, éd. 2020, indique des données pour 2018 et précise 89% pour les marchandises et 86,8% pour les transports individuels (80,6) et collectifs (6,2) de personnes, soit une moyenne de 88% pour les personnes et les marchandises. Le réseau de l'Etat est de 1,9% pour 1 103 000 km, donc on peut reprendre 98% pour 1 100 000. En revanche, les routes nationales avec outre-mer font 9 500 km, modification du texte (9 000 correspond à la métropole). Pour la densité du trafic, chiffres calculés à partir des données du bilan de la circulation routière en France 2019 (G1 c Circulation par réseau) sur le site du MTE, on retrouve après calcul 18,34% du trafic pour les autoroutes les routes nationales non concédées. Hors Etat, c'est également un plus des deux tiers, soit environ 68% comme écrit.

* 16 Loi n° 2019-816 du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace.

* 17 Loi n o 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, qui a confié aux régions la charge de l'organisation et du financement des services ferroviaires régionaux de voyageurs et des services routiers effectués en substitution de ceux-ci.

* 18 L'aménagement consiste dans la réalisation de travaux de développement du réseau routier (création d'un nouveau tronçon routier, d'une déviation...) ou de travaux d'ampleur plus limité (réalisation de murs antibruit...), hors travaux "courants" rattachables l'entretien des routes L'exploitation consiste dans divers action se rattachant à la surveillance du réseau, la gestion du trafic, l'information aux usagers, ou l'intervention lors d'accidents.

* 19 Les Régions pourraient ainsi mieux coordonner l'intermodalité entre les différents modes de transports. L'exemple de l'île de France est le plus simple. Sur un périmètre très dense, les routes et autoroutes traversent toutes plusieurs départements. Par exemple, organiser des parkings relais, des voies réservées, etc. n'aurait donc de sens que si la stratégie de déplacement, y/c routière soit pilotée à un niveau supra-départemental.

* 20 En 2004, l'Etat a défini lui-même le réseau qu'il souhaitait transférer aux départements, puis il a demandé son avis à chaque département, avant de procéder au transfert. Le projet actuel prévoit (pour les départements et les métropoles) que si l'Etat définit un réseau transférable, les départements "choisissent" dans ce réseau les routes dont ils demandent le transfert. Il y a donc une différence d'approche entre l'option retenue en 2004 et l'option retenue dans la cadre du présent projet de loi.

* 21 La police de la circulation permet de définir les règles de circulation sur les routes (dans le respect du code de la route, bien sûr) : fermeture temporaire à la circulation pour certains types de véhicules, etc.

* 22 Le maître d'ouvrage est celui qui, pour chaque opération envisagée, s'assure préalablement de sa faisabilité et de son opportunité, et détermine sa localisation, le programme (ici obtention de la DUP ou déclaration de projet) et l'enveloppe financière prévisionnelle ; met en place le financement ; choisi le processus selon lequel l'ouvrage sera réalisé et conclut les marchés publics ayant pour objet les études et l'exécution des travaux de l'opération.

Toutes les collectivités et leurs groupements sont MOA, la MOA routière actuelle se concentrant - outre l'Etat - sur communes et leur groupement, les métropoles et autres CU et les départements.

* 23 Le programme 203 a enregistré une baisse de près de 22% sur les onze dernières années. Au sein du 203 les services de gestion du réseau routier national ont subi près de 15% de la baisse ces dix dernières années dont tous les secteurs ont été impactés. D'abord les effectifs d'ingénierie et de support pour préserver les mission d'exploitation avant de faire porter l'effort uniformément ces trois dernières années pour ne pas pénaliser une activité au détriment d'une autre. Le principe d'externalisation de l'ingénierie routière, largement utilisé, a atteint ses limites car il est couteux et nécessite de renforcer la maitrise d'ouvrage.

Extrait note Etp prog 203 pour 2021 : De nouvelles baisses d'effectifs auront des conséquences importantes sur le niveau de service alors que le recours aux heures supplémentaires est déjà massif. Les dégradations toucheront soit l'entretien du réseau, soit sa sécurisation pour les agents et les usagers soit enfin son accessibilité en cas de blocage hivernaux

* 24 Deux solutions : l'opération est déjà prévue dans un CPER (avec ou sans part Etat) et le changement de MOA ne change rien ; l'opération n'est pas prévue, la collectivité veut la réaliser à ses frais, l'Etat ne finançant rien.

* 25 Décret n°2004-1317 du 26 novembre 2004relatif à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France

* 26 Cas récent : deux opérations sur la RN 88 entre le Puy et Saint Etienne avec la région AURA.

* 27 Classement selon une méthodologie provenant de l'union internationale des chemins de fer (et légèrement adaptée par SNCF Réseau), sur la base du tonnage théorique circulé. Parfaitement connu dans le secteur ferroviaire.

* 28 Cf. articles R. 3114-1 à 8 du CG3P. L'Etat peut bien refuser un transfert, et l'absence de réponse vaut opposition au transfert. Pas de reprise automatique des lignes. Par contre rien n'empêche une CT de revendre une ligne ferroviaire à SNCF Réseau (qui l'achèterait alors pour le compte de l'Etat, sachant qu'elle pourrait alors être réintégrée dans le RFN par décret)

* 29 Directive 2012-34-UE, notamment ses articles 6 à 8 qui imposent la séparation entre les activités de GI et d'entreprise ferroviaire / l'indépendance du GI. Hors dérogations prévues par l'article 2 de la même directive.

* 30 Cf. par exemple : https://www.autorite-transports.fr/glossaire/monopole-naturel/ Entreprise à laquelle il est confié l'ensemble de la production du bien ou du service sur un marché, du fait de conditions techniques particulières de production. Cette situation survient dans la plupart des industries de réseau qui nécessitent des investissements d'infrastructure lourds l'infrastructure (soit des coûts fixes importants), de sorte qu'il est plus avantageux de ne pas dupliquer l'infrastructure et de confier l'intégralité de la production à une seule entreprise. En situation de monopole naturel, une entreprise bénéficie d'économies d'échelle, c'est-à-dire que le coût unitaire de production diminue lorsque le niveau produit augmente.

* 31 Nombre de passagers sur les petites lignes : de l'ordre de trois millions de voyageurs.km par an ; soit environ 1000 voyageurs/j sur chaque ligne. En supposant arbitrairement que les distances moyennes parcourues par un usager sont de l'ordre de 40km/j, on trouve de l'ordre de 200 000 personnes/j qui utiliseraient les petites lignes ferroviaires...

* 32 Décret n° 91-732 du 26 juillet 1991 relatif à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

* 33 Rapport annuel de performance 2019 de l'ADEME.

* 34 Le contrat de plan État-Régions (CPER) a été institué par la loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification, dans le contexte de l'acte I de la décentralisation. Il se définit comme un accord pluriannuel de programmation financière d'actions considérées comme prioritaires pour l'aménagement et le développement du territoire régional. Il sert aussi de contrepartie nationale aux fonds européens.

* 35 Intégration de l'économie circulaire dans la planification régionale et les démarches territoriales - ADEME 2016.

* 36 Conseil d'Etat 20 février 2013 Req. n° 360307.

* 37 Laisse de basse mer : limite basse de l'estran (zone de balancement des marées). Cette limite constitue la ligne de base, à savoir la limite géographique, pour un État côtier, qui sépare son domaine émergé du domaine maritime. Le territoire de l'État côtier et ses eaux intérieures se situe en deçà de la ligne de base. Au-delà de la ligne de base commencent ses eaux territoriales.

* 38 Espaces terrestres : territoires terrestres et incluant les eaux intérieures (lacs, rivières, ...)

* 39 Article R. 414-2-1 du code de l'environnement « Sont considérés comme des espaces marins les espaces jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ».

* 40 Estran : Zone de balancement des marées

* 41 Source : Inventaire national du Patrimoine naturel juin 2020.

* 42 Zone Économique Exclusive (ZEE) : bande de mer ou d'océan située entre les eaux territoriales et les eaux internationales, sur laquelle un État riverain (parfois plusieurs États dans le cas d'accords de gestion partagée) dispose de l'exclusivité d'exploitation des ressources. En 1976, la République française se dote d'une zone économique exclusive large de 200 miles incluant la mer territoriale (loi du 16 juillet 1976).

* 43 Le Comité de pilotage (COPIL) est un organe officiel de concertation et de débat qui réunit l'ensemble des acteurs du territoire. Il est établi au moment de la désignation du site Natura 2000.

* 44 Sauf dispositions spécifiques telles que celles prévues pour des terrains exclusivement militaires (11 sites concernés) qui conservent la spécificité de leur gestion (par ex : pour les sites militaires, la gestion est assurée par l'autorité militaire).

* 45 Au total, les 10 parcs nationaux français reçoivent 8,3 millions de visiteurs par an.

* 46 Parmi les sites classés/grands sites, 6 territoires connaissent une fréquentation annuelle de plus de 2 millions de visiteurs par an (exemples : Bonifacio, massif de l'Esterel, cité de Carcassonne, baie de Somme).

* 47 Le décret liste 232 communes dont huit d'entre elles ne sont pas soumises au dispositif SRU, mais présentait des situations « tangentes » (proche des taux de population ou très légèrement au-dessus du taux légal SRU). Elles ont été inscrites dans le décret par anticipation

* 48 Logements sociaux comptabilisés selon la définition de l'article L 302-5 -IV du CCH : logements locatifs sociaux, logements-foyers, places de CHRS et CADA, logements privés conventionnés ANAH, terrain familial locatif de gens du voyage, logements sociaux vendus à leurs locataires depuis moins de dix ans, logements PSLA durant leur phase locative, logements crées dans le cadre d'un bail réel solidaire (BRS) et logements en intermédiation locative.

* 49 Source SISAL 2019 : système d'information relatif à la gestion des aides à la construction de logement social

* 50 Article 1.4 de la convention du 25 avril 2019 relative au plan d'investissement volontaire valant avenant à la convention quinquennale 2018-2022 du 16 janvier 2018 entre l'État et Action Logement

* 51 Selon les données transmises par l'AFL.

* 52 Sur le fondement, avant la réforme de 2020, des articles L. 1331-22 et suivants du code de la santé publique ainsi que des articles L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation.

* 53 Si aucun contentieux lié à Digneo n'est à relever à ce stade, aux termes de l'article 1108 du code civil, les actes réalisés par une association en dehors de son objet social sont nuls et la responsabilité civile de ses dirigeants engagée à ce titre.

* 54 Selon les projets de convention avec les communes en cours dans le cadre de Digneo.

* 55 Selon une étude du Club de l'Amélioration de l'Habitat (CAH).

* 56 Selon l'étude réalisée par l'ANAH sur l'impact économique et financier du programme « Habiter Mieux », 1 M€ de travaux de rénovation permettent le maintien ou la création de 6 emplois en équivalent temps plein.

* 57 L'accompagnement des personnes en situation d'habitat indigne , Fondation Abbé Pierre, cahiers du logement, septembre 2017.

* 58 Etablissements publics de coopération intercommunale (EPCI) tenus de se doter d'un programme local de l'habitat ou ayant la compétence en matière d'habitat et au moins un quartier prioritaire de la politique de la ville, la métropole de Lyon, la Ville de Paris et les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris (23 ème alinéa de l'article L. 441-1 du CCH).

* 59 Lois n °2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (« ALUR »), n °2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté (« Egalité et citoyenneté ») et n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN).

* 60 Pour plus de lisibilité, les territoires susmentionnés seront nommés EPCI dans la suite.

* 61 Arrêté du 15 juin 2020 fixant le seuil de ressources des demandeurs de logement social du premier quartile.

* 62 Instruction du 3 novembre 2015 relative à la mise en oeuvre d'une politique intercommunale des attributions et du volet « attributions » de la politique de la ville et à l'articulation des dispositions relatives à l'attribution des logements sociaux résultant de l'article 97 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové et de l'article 8 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine (NOR : ETLL1523520J).

* 63 La création d'une CIL par l'EPCI doit permettre de disposer d'une instance de gouvernance partenariale, stratégique et opérationnelle en matière de politique d'attribution. L'enjeu de la CIL est de faire émerger un consensus et de grandes orientations en matière d'attribution de logements sociaux sur un territoire, dont les mutations, sur la base d'un diagnostic territorial :

- objectifs de mixité sociale et d'équilibre entre les secteurs du territoire intercommunal avec notamment des objectifs d'attributions en QPV et en dehors de ces QPV ;

- objectifs de relogement des ménages bénéficiant du Dalo, des demandeurs prioritaires au titre de l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH)1, ainsi que des ménages relogés dans le cadre d'une opération de renouvellement urbain.

Ces orientations sont ensuite approuvées par le président de l'EPCI et le préfet. Elles sont mises en oeuvre via une convention intercommunale d'attribution (CIA) qui comporte les engagements pris par les bailleurs sociaux et leurs partenaires pour remplir les objectifs précités, les conditions dans lesquelles les réservataires et les bailleurs procèdent à la désignation des candidats, ainsi que leurs modalités de coopération.

Chaque bailleur se voit notifier des objectifs en matière de relogement des ménages du premier quartile en dehors des QPV. Ces objectifs sont fixés en fonction des caractéristiques du parc social du bailleur, de sa localisation, de son occupation sociale. L'ensemble des obligations assignées aux bailleurs sociaux doit permettre de respecter l'objectif global de 25 %.

La CIA est signée par l'EPCI, le préfet de département, les bailleurs sociaux possédant ou gérant du patrimoine sur le territoire de l'EPCI, les titulaires de droits de réservation et, le cas échéant, d'autres collectivités territoriales ou d'autres personnes morales intéressées.

* 64 Bilan des attributions de logements sociaux en dehors d'un QPV aux ménages demandeurs les plus modestes en 2017 et 2018, STATISTIQUES ET ETUDES TRANSVERSALES, ANCOLS, Septembre 2019.

* 65 Arrêté du 1er août 2014 modifié pris en application de l'article R. 304-1 du code de la construction et de l'habitation.

* 66 Soit 75 % des ménages demandeurs les moins modestes à l'échelle d'un territoire.

* 67 Données issues du système national d'enregistrement de la demande de logement social.

* 68 EPCI tenus de se doter d'un programme local de l'habitat ou ayant la compétence en matière d'habitat et au moins un quartier prioritaire de la politique de la ville, la métropole de Lyon, la Ville de Paris et les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris (23ème alinéa de l'article L. 441-1 du CCH).

* 69 Données au 31/12/2019 partiellement consolidées au 30/10/2020. De nombreux facteurs expliquent ce taux : l'absence de dispositions coercitives, l'existence de territoires semi-ruraux qui bien qu'ayant décidé d'exercer la compétence habitat n'exercent pas dans les faits les compétences attachées, le degré de portage politique, l'entrée récente de certains territoires dans le périmètre de la réforme ou les créations récentes d'intercommunalités (en IDF notamment). Des écarts existent entre régions, certains territoires comptant peu de CIL

* 70 En application de l'article 1 du décret n° 2015-650 du 10 juin 2015 relatif aux modalités de mise en oeuvre du dispositif d'encadrement du niveau de certains loyers et modifiant l'annexe à l'article R. 366-5 du code de la construction et de l'habitation, ces zones sont celles énumérées par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.

* 71 Extrait de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 : « les zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social ».

* 72 Sauf lorsque l'Etat délègue la compétence aux collectivités territoriales ou à leurs groupements, il exerce les compétences en matière de financement du logement.

* 73 L'article L. 4221-1 du CGCT dispose que la région est compétente pour « (...) le soutien à l'accès au logement et à l'amélioration de l'habitat, le soutien à la politique de la ville et à la rénovation urbaine (...) ».

* 74 L'article L. 3211-1 du CGCT dispose que le département est compétent pour « (...) pour mettre en oeuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité, au développement social, à l'accueil des jeunes enfants et à l'autonomie des personnes. Il est également compétent pour faciliter l'accès aux droits et aux services des publics dont il a la charge. (...) »

* 75 Article L. 301-5-1 du CCH précité relatif aux délégations de compétences en faveur des EPCI à fiscalité propre dotés d'un PLH.

* 76 La gestion de l'hébergement d'urgence recouvre à la fois la gestion de la veille sociale, et notamment la gestion des services intégrés de l'accueil et de l'orientation (SIAO - 115), la gestion des différentes structures d'accueil (accueils de jour, espace de solidarité et d'insertion) et d'hébergement (CHRS, CHS, CHU...) et enfin la gestion de l'ensemble des financements de ces dispositifs (octroi des crédits de fonctionnement).

* 77 La garantie du droit à un logement décent correspond au dispositif dit « DALO » mis en place par la loi 5 mars 2007 instaurant le droit au logement opposable. Cette loi désigne l'Etat comme garant du droit au logement et ouvre notamment un recours amiable devant la commission de médiation départementale qui, si elle juge la demande de logement urgente et prioritaire, demande au préfet de procurer un logement sur le contingent préfectoral.

* 78 Les droits de réservation du préfet de département, à hauteur de 30% sur les programmes de logements sociaux, seront exercés par l'EPCI délégataire, en cas de convention de délégation.

* 79 La gestion de l'hébergement d'urgence recouvre à la fois la gestion de la veille sociale, et notamment la gestion des services intégrés de l'accueil et de l'orientation (SIAO - 115), la gestion des différentes structures d'accueil (accueils de jour, espace de solidarité et d'insertion) et d'hébergement (CHRS, CHS, CHU...) et enfin la gestion de l'ensemble des financements de ces dispositifs (octroi des crédits de fonctionnement).

* 80 Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021

* 81 S'il n'existe pas de définition juridique ni de définition qui fasse consensus dans le milieu académique, le polycentrisme appliqué à l'aménagement du territoire peut se définir comme le processus d'extension urbaine entrainant l'apparition de centres secondaires (emplois, activités...). Voir Marc Servais , Isabelle Thomas , Haike Van Dyck et Ann Verhetsel , « Polycentrisme urbain : une réalité spatialement mesurable ? », Cybergeo : European Journal of Geography [En ligne], Espace, Société, Territoire, document 268, mis en ligne le 07 avril 2004.URL : http://journals.openedition.org/cybergeo/3669 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cybergeo.3669)

* 82 L'ORT est un outil à disposition des collectivités locales pour porter et mettre en oeuvre un projet de territoire dans les domaines urbain, économique et social, pour lutter prioritairement contre la dévitalisation des centres-villes.

* 83 IGF, CGEDD, La revitalisation commerciale des centres-villes, juillet 2016 ; Cour des comptes, L'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et la mise en oeuvre des programmes de renouvellement urbain, juin 2020 ; Cour des comptes, Les villes moyennes en Occitanie, octobre 2020 ; Cour des comptes, L'évaluation de l'attractivité des quartiers prioritaires, décembre 2020 ;

* 84 Revitalisation des centres-villes et des centres-bourg, Rapport d'information au nom de la délégation aux entreprises et de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, Sénat, juillet 2017

* 85 Ce programme est doté de 6 Md€ sur six ans, soit la durée du mandat des maires fraîchement (ré)élus, au soutien d'une opération de revitalisation urbaine.

* 86 https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/operation-de-revitalisation-de-territoire-ort (source Ministère chargé du logement)

* 87 Le Gouvernement a mis en place en 2019, un nouveau dispositif d'incitation aux travaux de rénovation dans les logements situés dans les communes dont le besoin de réhabilitation de l'habitat est marqué et dans celles s'inscrivant dans un projet global de territoire, dénommé « Denormandie dans l'ancien ». Ainsi l'article 226 de la loi de finances pour 2019 prévoit que la réduction d'impôt sur le revenu s'applique entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021 au logement que le contribuable acquiert et qui fait l'objet de travaux de rénovation définis par décret ainsi qu'au local affecté à un usage autre que l'habitation et donnant lieu à des travaux de transformation en logement.

* 88 Définition mentionnée dans la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance.

* 89 https://www.dependance-infos.com/actualites/5786-construire-des-logements-sociaux-adaptes-aux-besoins-des-seniors

* 90 https://www.banquedesterritoires.fr/les-operations-de-revitalisation-de-territoire-ont-le-vent-en-poupe

* 91 Décret en Conseil d'Etat n° 2019-589 du 14 juin 2019

* 92 Source BANATIC au 1 er octobre 2020

* 93 Source : enquête habitat/SuDocUH : enquête annuelle menée auprès des directions départementales des territoires - DDT, visant à établir un état des lieux au 1 er janvier de chaque année, de la mise en oeuvre des procédures en matière de planification d'habitat et d'urbanisme (PDH, PLH, PLU, PLUI, PLUI(h), SCOT, etc).

* 94 Circulaire du 4 février 2019 relative à l'accompagnement par l'Etat des projets d'aménagement des territoires (NOR : LOGL1905862J).

* 95 Question orale n° 0834S de Mme Sylviane Noël (Haute-Savoie - Les Républicains).

* 96 Source : DGOS/SR5.

* 97 Les services de l'Etat et les collectivités territoriales, leurs établissements publics, les établissements de santé publics et privés, le service de santé des armées, les établissements et services sociaux et médico-sociaux, les services de secours ainsi que tout professionnel de santé.

* 98 Cet article est issu de l'article premier de l'ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 relative à l'organisation de l'épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales et aux conditions de délégation de certaines tâches liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires.

* 99 Ils sont définis à l'article L. 2215-8 du CGCT : « (...) Ces laboratoires font partie intégrante du dispositif de prévention des risques et de gestion des crises sanitaires. Ils interviennent dans les domaines de la santé publique vétérinaire, de la santé végétale et dans la surveillance de la qualité de l'alimentation, des eaux potables et de l'environnement (...) ».

* 100 Aux termes de l'article L. 1511-2 du CGCT.

* 101 Par exemple, le GDS Bretagne disposait d'un budget 2017 de 15.2 millions d'euros, dont 90% issus des adhérents (https://www.filieres-avicoles.com/actualites/gds-bretagne-maintient-son-taux-d-adhesion?sso=1581442762).

* 102 « Les centres de santé sont créés et gérés soit par des organismes à but non lucratif, soit par des collectivités territoriales , soit par des établissements publics de coopération intercommunale, soit par des établissements publics de santé, soit par des personnes morales gestionnaires d'établissements privés de santé, à but non lucratif ou à but lucratif ».

* 103 Expérimenté dans 34 départements en 2007-2008, le revenu de solidarité active (RSA) a été généralisé, depuis le 1er juin 2009, sur tout le territoire métropolitain par la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

* 104 Etudes et résultats n°1175, DRESS, 23 décembre 2020, https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/publications/etudes-et-resultats/article/plus-de-2-millions-d-allocataires-du-rsa-fin-octobre-2020-mise-en-place-d-un

* 105 En 2015, en France hors Mayotte, selon une définition large englobant domicile et établissement, 2,5 millions de seniors sont en perte d'autonomie, soit 15,3 % des 60 ans ou plus. Parmi eux, 700 000 peuvent être considérés en perte d'autonomie sévère.

Si les tendances démographiques et l'amélioration de l'état de santé se poursuivaient, la France hors Mayotte compterait 4 millions de seniors en perte d'autonomie en 2050, soit 16,4 % des seniors.

Pour maintenir constant le pourcentage de personnes en établissement par département, sexe, tranche d'âge et degré de perte d'autonomie, il faudrait que le nombre de places en hébergement permanent en établissements pour personnes âgées augmente de 20 % d'ici à 2030 et de plus de 50 % à l'horizon 2050.

(https://www.insee.fr/fr/statistiques/4196949)

* 106 Etudes et résultats n°1172, décembre 2020 , Direction de la Recherche, des Etudes, de l'Evaluation et des Statistiques

* 107 Par lettre de mission en date du 17 septembre 2018, le Premier ministre a demandé à M. Dominique Libault de conduire une concertation sur les attentes et les objectifs d'une nouvelle politique du grand âge, et de faire des propositions de réforme, notamment dans la perspective d'un projet de loi.

* 108 Données en date du 1 er janvier 2018 (source INSEE).

* 109 De très nombreux départements présentent des rapports de dépendance des personnes âgées supérieurs à 0,5 personne de plus de 60 ans pour une personne de 20-59 ans, tandis que les départements d'Ile de France ou du Nord ont des indices encore inférieurs à 0,5. A l'inverse, la Creuse, la Nièvre et le Lot atteignent des indices de 0,8 (Didier Breton, Magali Barbieri, Hippolyte d'Albis, et al. « L'évolution démographique récente de la France : de forts contrastes départementaux » , Population , 2017).

* 110 Dans la poursuite de l'impulsion donnée par les dispositions de la loi ELAN, avec la création d'un forfait pour l'habitat inclusif, le Premier ministre a chargé M. Denis Piveteau, Conseiller d'Etat, et M. Jacques Wolfrom, Président du comité exécutif du groupe Arcade, de formuler des propositions pour favoriser le développement de ce type d'initiatives dans les territoires.

* 111 Dossier de presse du 28 mars 2019, propos de Dominique Libault, pilote de la concertation « grand âge et autonomie ».

* 112 Les collectivités locales en chiffres 2020 , Direction générale des collectivités locales.

* 113 Conformément à l'article L. 224-1 du CASF dans son alinéa 1er, la « tutelle des pupilles de l'État ne comporte pas de juge de tutelle ni de subrogé tuteur ».

* 114 https://www.onpe.gouv.fr/system/files/publication/rapport_pupilles_31dec2018_juin2020_1.pdf

* 115 Décret n° 2019-57 du 30 janvier 2019 relatif aux modalités d'évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et autorisant la création d'un traitement de données à caractère personnel relatif à ces personnes.

* 116 Article 2 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

* 117 Article L. 421-1 du code de l'éducation : « Ces établissements sont créés par arrêté du représentant de l'Etat sur proposition, selon le cas, du département, de la région ou, dans le cas prévu aux articles L. 216-5 et L. 216-6 du présent code, de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale intéressé » .

* 118 « La loi de 1983 modifiée en 1985 a créé un type d'établissement qui n'a pas de précédent : il ne s'agit pas d'un établissement public local rattaché à une collectivité locale, mais plutôt d'un établissement public d'un service public qui reste national, dont l'appellation de « local » n'a d'autre signification que de marquer sa volonté de meilleure intégration dans le milieu local. En 1982 (...) le ministre de l'éducation nationale aurait souhaité que l'appellation « d'établissement public national » soit maintenue, ou tout simplement celle « d'établissement public », sans autre précision. Le Premier ministre consulté a rendu son arbitrage, estimant que le terme de « local » était plus cohérent avec l'esprit d'un texte général traitant de la décentralisation », Jacky Simon, Jean-Richard Cytermann, Alain Perritaz, Organisation et gestion de l'éducation nationale, Berger-Levrault, collection Les Indispensables, 9 e édition, janvier 2008, p. 329.

* 119 Loi de 1983 modifiée en 1985.

* 120 Article L. 421-23 du code de l'éducation : « II - Pour l'exercice des compétences incombant à la collectivité de rattachement, le président du conseil général ou régional s'adresse directement au chef d'établissement. Il lui fait connaître les objectifs fixés par la collectivité de rattachement et les moyens que celle-ci alloue à cet effet à l'établissement. Le chef d'établissement est chargé de mettre en oeuvre ces objectifs et de rendre compte de l'utilisation de ces moyens. Le chef d'établissement est assisté des services d'intendance et d'administration ; il encadre et organise le travail des personnels techniciens, ouvriers et de service placés sous son autorité. Il assure la gestion du service de demi-pension conformément aux modalités d'exploitation définies par la collectivité compétente. Un décret détermine les conditions de fixation des tarifs de restauration scolaire et d'évolution de ceux-ci en fonction du coût, du mode de production des repas et des prestations servies. Une convention passée entre l'établissement et, selon le cas, le conseil général ou le conseil régional précise les modalités d'exercice de leurs compétences respectives ».

* 121 Issu de l'article 15-14 de la loi du 22 juillet 1983.

* 122 La circulaire du 27 décembre 1985 indique que « pour les questions ayant trait à la gestion courante de l'établissement ou qui sont de nature purement technique, le chef d'établissement peut faire tenir sa réponse directement au président du conseil général ou du conseil régional » . En revanche, si la réponse du chef d'établissement a une portée générale concernant le fonctionnement du système éducatif, elle doit être adressée au président de la collectivité sous le couvert de l'autorité académique. Par ailleurs, l'autorité académique doit être informée de toute réunion de travail entre la collectivité et l'équipe de direction de l'EPLE. Une seconde circulaire n°86-047 du 30 janvier 1986 relative à la mise en oeuvre du transfert de compétences en matière d'enseignement public et aux relations entre les présidents des conseils généraux ou régionaux et les chefs d'établissement est venue rappeler les dispositions de décembre 1985, ajoutant par ailleurs « qu'il est tout à fait souhaitable que l'autorité académique soit informée au préalable de la tenue de ces réunions de travail ainsi que de leur ordre du jour. »

* 123 Il s'agissait initialement de l'article 67-X, ainsi rédigé : « Le II de l'article L. 421-23 du code de l'éducation est remplacé par les dispositions suivantes : II. - Pour l'exercice des compétences incombant à la collectivité de rattachement, le président du conseil général ou régional s'adresse directement au chef d'établissement. Une convention organise les relations entre l'établissement et la collectivité de rattachement. Cette convention précise les modalités d'exercice de leurs compétences respectives en matière de construction, de reconstruction, d'extension, de grosses réparations, d'équipement et de fonctionnement matériel de l'établissement, ainsi qu'en matière d'accueil, de restauration, d'hébergement et d'entretien général et technique, en fonction des objectifs fixés par la collectivité de rattachement et des moyens qu'elle alloue à cet effet ».

* 124 Le projet du Gouvernement se limitait à rendre obligatoire le dialogue direct entre le chef d'établissement et la collectivité (la formule « peut s'adresser » remplacée par « s'adresse » ) et renvoyait à une convention l'organisation des relations entre la collectivité territoriale et l'établissement, notamment pour préciser les modalités d'exercice des compétences respectives de chacun, en fonction des objectifs fixés par la collectivité et des moyens qu'elle alloue à cet effet.

* 125 Voir l'avis n° 32 présenté au nom de la commission des affaires culturelles du Sénat sur le projet de loi relatif aux responsabilités locales, par M. Philippe RICHERT, 22 octobre 2003, pp. 40-43 (http://www.senat.fr/rap/a03-032/a03-0321.html#toc10).

* 126 Revue Intendance, n°105, avril-mai 2010, p. 24, Bernard Toulemonde, « L'acte II de la décentralisation, cinq ans après... ».

* 127 « Une convention passée entre l'établissement et, selon le cas, le conseil général ou le conseil régional précise les modalités d'exercice de leurs compétences respectives ».

* 128 Seule la circulaire NOR LBLB0410088C du 21 décembre 2004 du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales relative à l'entrée en vigueur de la loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales précisait que « la convention pourra utilement porter sur les points suivants : l'organisation des services de restauration et d'hébergement, les catégories d'usagers susceptibles d'être accueillies par les services de restauration et d'hébergement, les modalités de paiement des prestations par les usagers... ».

* 129 Voir sur ce point les réponses ministérielles à la question écrite n°17226 de M. Krattinger, JO Sénat du 21 avril 2005 (réponse du MESR JO Sénat du 29 décembre 2005) et à la question écrite n°71592 de Jean-Claude Leroy, JO du 2 août 2005 (réponse du MESR au JO du 8 août 2006).

* 130 Voir l'avis n°32 présenté au nom de la commission des affaires culturelles du Sénat sur le projet de loi relatif aux responsabilités locales, par M. Philippe RICHERT, 22 octobre 2003 pp. 40-43 : « Le recours à une convention entre la collectivité de rattachement et l'établissement, tel que le prévoit le texte proposé, suppose l'accord du conseil d'administration de l'EPLE, au sein duquel la collectivité de rattachement n'a qu'un seul représentant. Or ce conseil pourrait faire blocage et s'opposer à son adoption. »

* 131 Voir les débats en séance publique, Sénat, 1 ere lecture, intervention de Philippe Richert (http://www.senat.fr/seances/s200311/s20031114/s20031114002.html).

* 132 Articles L. 213-2 pour les départements et L. 214-6 pour les régions du code de l'éducation.

* 133 Article L. 213-2-1 pour les départements et L. 214-6-1 pour les régions du code de l'éducation.

* 134 2 e alinéa de l'article 10 du décret n°85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement : « Le chef d'établissement est secondé dans ses tâches de gestion matérielle et financière par un gestionnaire nommé par le ministre de l'éducation nationale, ou l'autorité académique habilitée à cet effet, parmi les personnels de l'administration scolaire et universitaire ».

* 135 Article 5 du décret n°2005-1145 du 9 septembre 2005 modifiant le décret n°85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement.

* 136 Article 1 er du décret n°2011-1716 du 1er décembre 2011 relatif à l'organisation et au fonctionnement des établissements publics locaux d'enseignement.

* 137 Les adjoints gestionnaires affectés en EPLE sont des personnels administratifs de la fonction publique de l'Etat relevant soit du corps des attachés d'administration de l'Etat, régi par le décret n°2011-1317 du 1 er octobre 2011 portant statut particulier du corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat, soit du corps des secrétaires administratifs, régi par le décret n°2010-302 du 19 mars 2010 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat et à certains corps analogues relevant du décret n°2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat.

* 138 Repères et références statistiques - enseignements - formation - recherche, direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance, MENJS, juillet 2020, p. 31.

* 139 Le gestionnaire d'un « petit » collège consacrera plus de tâches relevant des missions de la collectivité que celui d'un lycée plus important en effectifs, possiblement doté d'une SEGPA, etc.

* 140 Concernant les missions des gestionnaires, on se reportera utilement au vade-mecum de l'adjoint gestionnaire en EPLE, publié en 2016, cf. https://www.ih2ef.gouv.fr/vade-mecum-de-ladjoint-gestionnaire-en-eple. Ce guide, particulièrement bien documenté et détaillé, commente le rôle de l'adjoint gestionnaire et l'environnement dans lequel il évolue.

* 141 IGEN-IGAENR, rapport annuel 2019, L'autonomie des établissements scolaires, Pratiques, freins et atouts pour une meilleure prise en compte des besoins des élèves, p.56.

* 142 IGEN-IGAENR, rapport annuel 2019, p.50.

* 143 Les problèmes de recrutement et de formation dans les filières financières et comptables, rapport IGAENR n°2017-096, janvier 2018, p.8.

* 144 Cf. 2.1.2.

* 145 Voir le rapport IGAENR n°2016-071, L'évolution de la carte comptable : de la croisée des chemins à de nouveaux défis à relever , novembre 2016, p.6 : « La mission a (...) constaté que les évolutions en cours, et notamment les nouvelles pratiques des collectivités territoriales en termes de reprise en gestion directe d'importants postes de dépenses, risquent d'affecter le contenu du métier de gestionnaire, et suggère qu'une attention particulière soit apportée à leur situation ».

* 146 Via une délégation de service public.

* 147 Par exemple, le département des Yvelines a décidé de confier à une société d'économie mixte à opération unique (SEMOP), la gestion des cantines des collèges. Les modalités sont décrites sur le site internet du conseil départemental. On y trouve notamment les conséquences pour les principaux et les gestionnaires : « Le rôle des gestionnaires sera nécessairement reconfiguré par rapport à leur périmètre d'intervention actuel. En effet, les agents ayant rejoint la SEMOP seront sous l'autorité fonctionnelle de la SEMOP et non du principal ou du gestionnaire. L'autorité hiérarchique sera pour les agents mis à disposition, le Département ; pour les agents détachés et les contractuels, la SEMOP. » https://www.yvelines.fr/2017/12/04/restauration-scolaire-lequite-au-coeur-de-la-reforme/

* 148 L'externalisation de la restauration scolaire et de l'entretien des locaux, notamment, « est particulièrement mal vécue, car cette modalité de gestion prive les établissements d'importants leviers de la qualité du climat scolaire et de la qualité de vie au travail, en même temps que de la possibilité de mettre en oeuvre une politique d'éducation à l'alimentation. » Ibid., p. 68.

* 149 « Ces évolutions, qui ont pris de l'importance assez récemment, entraînent des effets directs comme la réduction importante du budget à gérer par les EPLE et le fléchage des crédits qui leur restent », rapport IGAENR n°2017-096, op. cit., p. 19. Certaines collectivités départementales flèchent les crédits notifiés que les collèges répercutent, sans avoir de marges de discussion ; des crédits sont fléchés pour la viabilisation, d'autres affectés aux autres dépenses obligatoires (contrats de sécurité et d'entretien, dépenses de fonctionnement impératives...), d'où une marge d'autonomie parfois réduite à moins de 10% du budget alloué par la collectivité. Cette pratique de fléchage des crédits dès la notification est moins marquée dans les régions. Pour autant, la reprise en gestion directe de postes tenant en particulier à la viabilisation, réduit à due concurrence le montant des budgets, et par voie de conséquence les quelques marges qui peuvent être tirées d'une bonne maitrise de la gestion de ces postes de charges.

* 150 « Les régions et les départements peuvent conclure des conventions fixant des modalités d'actions communes et de mutualisation des services pour l'exercice des compétences définies aux articles L. 213-2 et L. 214-6. »

* 151 Par exemple, sur le site du département des Yvelines, on trouve les informations suivantes : « La création d'un groupement de commandes, coordonné par le Département, a pour objectif la mutualisation de l'approvisionnement en denrées et l'achat de prestations de services dans le respect du Code des marchés publics et en respectant l'autonomie de gestion des établissements adhérents. Le Conseil Départemental est le coordonnateur de ce groupement auquel 92 établissements ont adhéré. La massification des achats permet d'obtenir un meilleur rapport qualité/prix et améliorer ainsi la qualité des repas servis par le recours à des produits bio, locaux et labellisés, avec une attention particulière portée aux équilibres nutritionnels et à la sécurité alimentaire. Les marchés concernent l'achat de denrées alimentaires (viandes, fruits et légumes, produits laitiers et BOF...), de produits non alimentaires (produits d'entretien, contrôle bactériologique...), de prestations de services en restauration collective (production sur place et livraison de repas) et de prestations en lien avec la restauration collective (prestation mutualisée de restauration et de nettoyage des locaux). » (https://www.yvelines.fr/jeunesse/education/restauration/schema-departemental-de-la-restauration-scolaire/).

* 152 Voir les articles LO. 1113-1 à LO. 1113-7 du CGCT qui définissent les conditions de mise en oeuvre de ces expérimentations.

* 153 IGEN-IGAENR, rapport annuel 2019, p.56 : « Le choix fait par le législateur en la matière est cohérent avec l'architecture de la décentralisation, qui a confié aux collectivités la compétence d'accueil, de restauration, d'hébergement et d'entretien technique des bâtiments. Mais il peut parfois apporter un degré de complexité supplémentaire à l'exercice pratique de l'autonomie. C'est un élément que les chefs d'établissement doivent intégrer à leur réflexion et à leur action. »

* 154 Certains y voient une situation totalement « inconfortable à l'origine d'un véritable malaise », cf. Dépêche AEF n°115699, 16 juin 2009 , Faut-il décentraliser le métier de gestionnaire ? Echos du colloque de l'Association des journées de l'Intendance .

* 155 Richert p. 42

* 156 Voir également la réponse du MENESR du 16 avril 2014 à la question orale sans débat n°688 de Yves Rome du 23 janvier 2014 sur la double tutelle des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement (https://www.nossenateurs.fr/question/14/14S0688)

* 157 C'est d'ailleurs ce qui ressort d'un rapport commandé par le Centre national de la Fonction publique territoriale en 2010 selon lequel « le transfert des gestionnaires ne réglera pas ces difficultés ».

* 158 C'est donc près de la moitié des personnels de la filière administrative du ministère de l'éducation nationale qui serait transférée aux collectivités mais également les trois quarts du corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat.

* 159 Rappel pour mémoire : les gestionnaires des TOS des rectorats en application de loi du 13/08/04 et les personnels des délégations régionales de l'ONISEP par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

* 160 Décret du 29 avril 2004.

* 161 Article L. 5211-4-2 du CGCT.

* 162 CAA de Versailles, 5ème chambre, 9 juin 2016, 15VE01823.

* 163 Inspection générale de l'administration, L'évaluation des politiques partagées entre l'État et les collectivités territoriales , Bruno Acar, Xavier Giguet, rapport n°20018R, juin 2020, p. 5.

* 164 Conseil d'Etat, rapport annuel 2020, Conduire et partager l'évaluation des politiques publiques , juillet 2020, p. 14 : « Les politiques décentralisées, et souvent partagées avec l'Etat, mettent en évidence la nécessité de développer des évaluations partenariales et de sensibiliser les associations d'élus à cette problématique ».

* 165 Question écrite du 6 juin 2002 n° 72922

* 166 La jurisprudence relative à l'identification d'un tel service n'est en effet pas particulièrement restrictive : a pu être qualifié de service nécessaire la création d'un hôtel restaurant (TA Clermont-Ferrand, 21 octobre 1983) ou d'un salon de coiffure (TA Nantes, 16 décembre 1997).

* 167 Article 72-2 de la Constitution (4 ème alinéa) : « Tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. »

* 168 Par exemple, dans le cadre des transferts de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (LRL), les dépenses de fonctionnement sont évaluées sur la base de la moyenne constatée sur les 3 années qui précédent le transfert ; pour les dépenses d'investissement, la compensation est calculée sur une moyenne de 5 ans au moins ; les dépenses de personnels correspondent aux charges supportées par l'Etat avant le transfert des agents.

* 169 Lorsque le produit de la fiscalité transférée est inférieur au montant du droit à compensation, l'État est tenu de majorer le montant de la fiscalité transférée à due concurrence, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel (cf. décision DC n°2003-489 du 29 décembre 2003 sur le RMI).

* 170 La commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) a été créée par la loi du 7 janvier 1983 (acte I de la décentralisation).

* 171 « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. »

* 172 Si les charges créées pour les collectivités entrainent une obligation de compensation au titre du droit à compensation : les modalités de compensation doivent être arrêtées dans la prochaine LFI

Si l'accroissement de charges n'entraine pas de compensation au titre du droit de la compensation : le législateur est libre d'accompagner financièrement, mais son inaction n'est pas, par elle-même, sanctionnable.

Dans le cadre de son examen, le juge opère un contrôle de l'erreur manifeste, de telle sorte que les mesures peuvent effectivement être requalifiées.

* 173 Les critères objectifs peuvent être : la superficie des locaux, l'ancienneté des locaux, la population concernée ou son évolution.

* 174 Rapport de la CCEC 2005-2015, présidée par Monsieur Thierry Carcenac, juin 2016.

* 175 L'article 5 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat a posé le principe selon lequel les transferts de compétences de l'Etat aux collectivités territoriales s'accompagnent du transfert concomitant par l'Etat « des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences ».

* 176 Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République.

* 177 Décisions du Conseil Constitutionnel n° 2003-487 DC du 18 décembre 2003 et n° 2003-489 du 29 décembre 2003.

* 178 Décisions du Conseil Constitutionnel n° 2003-487 DC du 18 décembre 2003 et n° 2003-489 DC du 29 décembre 2003. Par sa décision n° 2011-142/145 QPC du 30 juin 2011 relative au RMI et au RSA, le Conseil constitutionnel a confirmé qu'en matière de transfert de compétences l'Etat a comme seule obligation d'assurer une compensation des charges évaluées au « coût historique », quelle que soit par la suite l'évolution du coût d'exercice de la compétence transférée.

* 179 Diminuées des éventuelles réductions de charges ou augmentations de ressources entraînées par le transfert.

* 180 Article 119 de la loi LRL : « Le droit à compensation des charges d'investissement transférées par la présente loi est égal à la moyenne des dépenses actualisées, hors taxes et hors fonds de concours, constatées sur une période d'au moins cinq ans précédant le transfert de compétences. »

* 181 Programme 203 : « Infrastructures et services de transports »

* 182 Article 119 de la loi LRL.

* 183 Article 119 de la loi LRL.

* 184 Décret n° 2005-1509 du 6 décembre 2005 pris pour l'application de l'article 119 de la loi LRL, soumis pour avis à la CCEC, qui fixe la période de référence à 5 ans pour la détermination du droit à compensation des charges d'investissement ; décret n° 2005-1711 du 29 décembre 2005 relatif à la compensation financière des charges liées aux routes nationales transférées aux départements et aux régions, soumis pour avis à la CCEC ; décret n° 2006-1342 du 6 novembre 2006 relatif au transfert aux collectivités territoriales des services ou parties de services déconcentrés du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer pour l'exercice des compétences en matière de routes nationales transférées.

* 185 Décision DC n° 2003-489 du 29 décembre 2003, considérant 23, et décision n° 2004-511 DC du 29 décembre 2004, considérant n° 36.

* 186 Décret n° 2014-456 du 6 mai 2014 fixant les conditions d'intégration dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes ; décret n° 2014-455 du 6 mai 2014 relatif à la retraite des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes intégrés dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale.

* 187 Décret n° 2015-782 du 29 juin 2015 relatif aux conditions d'intégration, de détachement et de mise à disposition de fonctionnaires de l'État en application des articles 83 et 86 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

* 188 Article 114 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République ; article 18 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ; article 27 de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.

* 189 Régie par la Loi n° 90-1130 du 19 décembre 1990 portant création de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie et le décret n° 91-732 du 26 juillet 1991 relatif à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie

* 190 Le rapport annuel d'activité de l'ADEME pour l'année 2019 retrace de façon exhaustive l'ensemble des actions réalisées par l'ADEME. Il est publié sur le site internet de l'établissement : https://www.ademe.fr/rapport-annuel-2019-lademe.

* 191 Circulaire n° 6231/SG du 20 novembre 2020 relative à l'élaboration des contrats territoriaux de relance et de transition écologique.

* 192 Le Centre d'études techniques maritimes et fluviales (CETMEF), le Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (CERTU), Le Service d'études sur les transports, les routes et leurs aménagements (Setra), les 8 centres d'études techniques de l'équipement (CETE).

* 193 Notamment le rapport CGEDD n° 01206401 « Evaluation des stratégies d'intervention du Cerema en vue d'accroitre son appui aux collectivités territoriales »

* 194 Programme d'activité du Cerema 2020 et 2021

* 195 cf. rapport de préfiguration de l'ANCT remis au premier ministre en juillet 2018 et convention ANCT-Cerema (CA du Cerema, mai 2020 et CA de l'ANCT, septembre 2020)

* 196 1 er rendez-vous entre la mission et le Cerema prévu le 20 février 2021

* 197 Cour des Comptes, L'accès aux services publics dans les territoires ruraux, mars 2019, p. 67.

* 198 La liste des structures lauréates et les départements concernés sont disponibles sur le site du Ministère de la cohésion de territoires et de relations avec les collectivités territoriales : https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/services-publics-dans-les-quartiers-les-30-premiers-bus-france-services-laureats-annonces

* 199 Circulaire n° 6094-SG du 1 er juillet 2019 relative à la création de France services

* 200 Les 30 critères de labellisation sont mentionnés en annexe de la circulaire du 1 er juillet 2019 relative à la création de France services. Seules les MSAP qui remplissent ces 30 critères pourront être homologuées France Services. Les critères à remplir pour chaque structure sont : Le projet de structure s'inscrit dans le cadre du schéma d'accessibilité des services au public lorsqu'il existe ; Le projet de structure s'inscrit en cohérence avec le maillage des implantations locales des opérateurs ; Deux agents polyvalents à l'accueil ; Ouverture de 24 heures hebdomadaires ; Ouverture minimale de 5 jours ; Relais de 6 partenaires nationaux + les services de l'Etat ; Information et conseil délivrés aux usagers ; Orientation ; Accompagnement des démarches ; Croissance de l'écosystème numérique local (espaces publics numériques) ; Agent formé par tous les partenaires de la structure au cours de la première année de prise de poste ; Agent a suivi la formation « accueil physique et téléphonique et information des usagers » ; Agent a suivi la formation « médiation avec les partenaires » ; Agen a suivi la formation « accompagnement des usagers à l'utilisation du numérique » ; Présence ordinateurs / tablettes ; Accès internet ; Imprimante / scanner / Photocopieuse ; Téléphone ; Espace de confidentialité/ isolé ; Accessibilité aux personnes en situation de handicap ; La documentation est correctement présentée et actualisée ; Signalétique extérieure avec la marque structure bien visible par les habitants ; Utilisation de la marque sur les différents supports de communication et mention des périodes / horaires d'ouverture ; Renseignement de la « fiche identité » de la structure sur le site internet avec un contact téléphonique et des informations actualisées ; Remplissage de l'outil de suivi de l'activité sur le site dédié ; Mesure de la satisfaction des usagers de la structure ; Réalisation d'un rapport d'activité annuel de la structure ; Organisation d'un comité de pilotage annuel pour la structure ; Respect et affichage de la charte Marianne / des indicateurs du Programme transparence au sein de la structure ; Participation aux instances de gouvernance locales (réunion préfecture).

* 201 Décret relatif aux échanges d'informations et de données entre administrations dans le cadre des démarches administratives et à l'expérimentation prévue par l'article 40 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance

* 202 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (RGPD).

* 203 Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

* 204 31 802 communes comptent moins de 3500 habitants selon les chiffres de 2020 ( https://www.collectivites-locales.gouv.fr/collectivites-locales-chiffres-2020 ).

* 205 Les chiffres-clés des collectivités locales , Direction générale des collectivités locales, édition 2020 : https://www.collectivites-locales.gouv.fr/files/files/dgcl_v2/DESL/colloc2020/2047558-chiffres_cles_2020_-_web_diffusion_1.pdf

* 206 La réalisation d'une BAL coûte quelques journées de travail d'une secrétaire de mairie. Par exemple :

- Theizé-en-Beaujolais (1 163 hab, 108 voies) : BAL réalisée en 3 jours par un adjoint au maire

- Planès (54 hab, 20 voies) : BAL réalisée en 3 demi-journées par la secrétaire de mairie

- Bréau-Mars (417 hab, 59 voies) : BAL réalisée en 2 jours par l'adjoint au maire (avec la gestion de 3 fusions de communes et tous les anciens noms ajoutés)

Le temps consacré aux travaux d'état des lieux et de première publication est le plus important. Il s'agit ensuite d'une habitude à prendre pour renseigner les nouvelles constructions, les renommages de rues, les divisions de parcelles

* 207 Un tutoriel est également embarqué dans l'outil. Cependant un support peut être nécessaire. Les structures de mutualisation peuvent proposer cet accompagnement / formation. Un Mooc adresse est par exemple proposé par le CRIGE Normandie et reconnu par le CNFPT.

* 208 Environ 5 500 communes

* 209 Environ 29 400 communes

* 210 « Proposition n° 260 : Ajouter aux choix déjà ouverts à chaque assemblée délibérante, disposant du pouvoir budgétaire, la faculté juridique de déléguer à l'ordonnateur la capacité d'admettre en non-valeur les créances irrécouvrables les plus modestes que lui présente le comptable public. » Extrait du rapport de la mission parlementaire du sénateur Éric Doligé, « La simplification des normes applicables aux collectivités locales » (2011), page 201.

* 211 ( https://dons.encheres-domaine.gouv.fr/ )

* 212 1° Schéma d'ensemble relatif à la politique de développement économique et à l'organisation des espaces économiques, et opérations métropolitaines ; 2° Schémas de cohérence territoriale et schémas de secteur ; approbation du plan local d'urbanisme et documents d'urbanisme en tenant lieu ; définition, création et réalisation d'opérations d'aménagement mentionnées à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, constitution de réserves foncières, prise en considération d'un programme d'aménagement d'ensemble et détermination des secteurs d'aménagement ; 3° Organisation de la mobilité ; schéma de la mobilité ; 4° Schéma d'ensemble de voirie ; 5° (Abrogé) ; 6° Programmes locaux de l'habitat ; schémas d'ensemble de la politique de l'habitat, du logement et des actions de réhabilitation et de résorption de l'habitat insalubre ; 7° Schéma d'ensemble des dispositifs contractuels de développement urbain, de développement local et d'insertion économique et sociale ; 8° Schéma d'ensemble d'assainissement et d'eau pluviale ; 9° Marchés d'intérêt national ; 10° Schéma d'ensemble de la gestion des déchets des ménages et déchets assimilés ; 11° Plans métropolitains de l'environnement, de l'énergie et du climat ; 12° Programme de soutien et d'aides aux établissements d'enseignement supérieur et aux programmes de recherche ; 13° Concession de la distribution publique d'électricité et de gaz ; 14° Schéma d'ensemble des réseaux de chaleur ou de froid urbains ; 15° Elaboration du projet métropolitain.

* 213 Décret n° 2015-1865 du 30 décembre 2015 relatif aux bénéficiaires et aux prestations de la protection universelle maladie et à la cotisation forfaitaire prévue à l'article L. 381-8 du code de la sécurité sociale.

* 214 Ainsi, les régions limitrophes, telles que celle du Grand Est, ont été amenées à consulter et à faire participer les territoires transfrontaliers concernés.

* 215 Source : Livre blanc de la FedEPL sur l'économie mixte locale d'octobre 2019 (8 700 en Allemagne et 4 350 pour l'Italie).

* 216 CJUE, 18 novembre 1999, Teckal, C-107/98, cons. 50.

* 217 M. Loïc Hervé, sénateur et rapporteur de la loi n°2019-463 du 17 mai 2019 tendant à sécuriser l'actionnariat des entreprises publiques locales (Rapport de la Commission des Loi).

* 218 Circulaire du 29 avril 2011 relative au régime juridique des sociétés publiques locales (SPL) et des sociétés publiques locales d'aménagement (SPLA).

* 219 Un diffuseur autoroutier est un ensemble de bretelles, assorties ou non d'équipement de péages, permettant la liaison entre une autoroute et le réseau secondaire.

* 220 Le code de l'environnement comprend des sanctions administratives, après une première phase de mise en demeure (droit à l'erreur déjà présent dans notre code) dans son livre I, aux articles L. 171-7 et L. 171-8 pour défaut d'autorisation ou de dérogation, puis pour non-conformité avec les prescriptions édictées.

* 221 Rapport « La sécurité des réseaux de distribution de gaz » du conseil général de l'économie et le conseil général de l'environnement et du développement durable en date de Janvier 2020

* 222 Article 1382 du Code civil : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Article 1383 du Code civil : « Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».

* 223 Cf. 11° de l'article 1 er du projet de décret : https://www.vie-publique.fr/consultations/21713-projets-de-decret-et-darrete-relatifs-la-reforme-anti-endommagement-d

* 224 Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant (dir.), par G. Cornu, 11ème éd. 2016, v° « Publicité foncière ».

* 225 Rapport de la Commission de réforme de la publicité foncière « Pour une modernisation de la publicité foncière » p.5.

* 226 Cf. article 18 loi du 21 ventôse an VII relative à l'organisation de la Conservation des hypothèques par lequel il est prévu que les conservateurs des hypothèques « tiendront un registre sur papier libre, dans lequel seront portés par extrait, au fur et à mesure des actes, sous le nom de chaque grevé, à la case qui leur sera destinée, les inscriptions à sa charge, et les autres actes qui le concernent, ainsi que l'indication des registres où chacun de ces actes sera porté, et les numéros sous lesquels ils y seront consignés. »

* 227 Loi du 16 avril 1930 portant fixation du budget général de l'exercice 1930-1931

* 228 Loi du 7 décembre 1941 portant unification des conditions d'exécution des opérations cadastrales et fusion des différents services chargés de cette exécution

* 229 Depuis un décret n° 2017-770 du 4 mai 2017 portant obligation pour les notaires d'effectuer par voie électronique leurs dépôts de documents auprès des services de la publicité foncière, le recours à Télé@ctes est obligatoire pour les notaires.

* 230 Données DGFIP.

* 231 Système du Livre foncier régi par la loi du 1 er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

* 232 Régime de l'immatriculation des immeubles spécifique à Mayotte, fixé par les articles 2510 et suivants du code civil.

* 233 Article 28 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière.

* 234 V. Rapport de la Commission de réforme de la publicité foncière « Pour une modernisation de la publicité foncière » p. 10 : « Quant aux opérations de crédit, la publicité foncière en est incontestablement aujourd'hui le pivot ».

* 235 Article 35 du décret du 4 janvier 1955.

* 236 V. M. SUQUET-COZIC, Publicité foncière, éd . Francis Lefebvre, 2014, n°500 p.27.

* 237 Loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées, article 9.

* 238 R.NERSON, « La réforme de la publicité foncière », D.1955, chr. p.151.

* 239 Données DGFIP.

* 240 Il est toutefois précisé qu'un certain nombre d'irrégularités ont été signalées concernant des modifications apportées aux données des rapports Doing Business 2018 et Doing Business 2020, lesquels ont été publiés respectivement en 2017 et 2019. La publication du rapport Doing Business est interrompue pendant la durée de l'évaluation.

* 241 Composition de la Commission de réforme de la publicité foncière : Laurent AYNES, Professeur émérite de l'École de droit de la Sorbonne (Université Paris I Panthéon-Sorbonne) ; Julie COUTURIER, Avocate au Barreau de Paris ; Pierre-François CUIF, Directeur général du CRIDON de Paris ; Pierre DESSEROUER, Conservateur des Hypothèques honoraire, ancien Président de la commission juridique de l'Association Mutuelle des Conservateurs (AMC) ; William DROSS, Professeur à l'Université de Lyon III ; Jacky GRANET, Conservateur des Hypothèques honoraire, Président de l'Association Mutuelle des Conservateurs (AMC) ; Hugues PERINET-MARQUET, Professeur à l'Université de Paris II (Panthéon-Assas) ; Muriel SUQUET-COZIC, Diplômée notaire ; Thierry VACHON, Notaire associé à Meudon (92).

* 242 Article 28, 1° b) du décret du 4 janvier 1955.

* 243 Article 36, 2° du décret du 4 janvier 1955.

* 244 Article 35, 7° du décret du 4 janvier 1955.

* 245 Civ. 3 ème , 12 juin 1996, n°94-18004.

* 246 Rapport de la Commission de réforme de la publicité foncière « Pour une modernisation de la publicité foncière » p.69.

* 247 Rapport de la Commission de réforme de la publicité foncière « Pour une modernisation de la publicité foncière » p.83.

* 248 Annexe au projet de loi de finances pour 2021, « Opérateurs de l'Etat », p. 13.

* 249 https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000026992859

* 250 L'article 154 de la loi de finances pour 2018 (Loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017) a introduit un nouvel article L. 2341-2 au CG3P qui fait entrer la valorisation immobilière et l'aménagement des campus dans les missions des EPES.

* 251 La loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 (JO 31 déc. 1982, p. 4004) prévoit que l'établissement public SNCF est « habilité à exercer toutes activités qui se rattachent directement ou indirectement » à sa mission ferroviaire.

* 252 CBRE, études de marché 2019 rendu 1 et rendu 2

* 253 Poste Immo, étude de marché immobilier bordelais 27 mars 2020 et étude marché des bureaux 17 juin 2020

* 254 Hobo, schéma directeur programmiste et économie de projet octobre 2019 et compléments 2020

* 255 CAA Bordeaux, 13 avril 2017, Scop Utopia Saint-Siméon, n° 15BX01432, 15BX01513

* 256 CE, 29 déc. 1999, Sté consortium français localisation, p. 816

* 257 Loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 (JO 31 déc. 1982, p. 4004)

* 258 Proche de l'aéroport de Mérignac et bénéficiant d'une excellente desserte routière avec la rocade et l'A63, le site industriel de Pessac dispose d'une implantation stratégique au sein du troisième pôle de développement prioritaire de la métropole bordelaise : l'Opération d'intérêt métropolitaine (OIM) Bordeaux Inno-Campus (BIC). Sur 1 300 hectares se concentrent 48 500 emplois dont 6 000 supérieurs, 66 000 étudiants, 4 200 chercheurs, ainsi que 3 pôles d'excellence dans les domaines de la Santé (8 centres hospitaliers, entreprises biotechnologies, TIC), de l'optique-laser et des matériaux innovants. Concentré d'innovation autour du triptyque santé, recherche et innovation, ce territoire articule opérations d'aménagement urbains, nouvelles mobilités et innovation économique définies dans le projet partenarial d'aménagement (PPA) réunissant acteurs privés et publics avec le soutien de l'Etat.

* 259 . Un environnement immobilier récurrent depuis plusieurs années que confirme les analyses périodiques de l'Observatoire de l'Immobilier Bordelais (OIEB). Le foncier valorisable de l'usine de Pessac constitue donc le dernier gisement disponible permettant d'accueillir une grande diversité d'activités tertiaire, artisanale, industrielle et de services. Le parc immobilier envisagé permettra également de compléter le parcours résidentiel des start-ups de l'OIM BIC qui, hors incubateur et pépinière, ne trouvent pas d'immobilier flexible leur permettant de grandir sur zone et ne pas s'expatrier.

* 260 La démarche de valorisation du site de Pessac a été présentée aux décideurs locaux et aux collectivités locales concernés. A ce titre, les échanges avec le Maire de Pessac et le Président de Bordeaux Métropole confirment l'accueil favorable réservées aux initiatives portées par la Monnaie de Paris et entérine leur soutien pour faciliter le projet qui prévoit une dynamisation du tissu économique et l'arrivée sur le futur site valorisé de 800 salariés qualifiés supplémentaires.

* 261 Les données citées dans l'étude portent sur la part du mécénat de compétence dans le total des dépenses de mécénat. Elles sont sur une trajectoire de hausse

(voir https://admical.org/sites/default/files/uploads/admical_2020_infographie_barometre_pages_def5.pdf ).

* 262 Le salaire moyen d'un cadre dans la FPE (hors enseignant) est de 3588€ net (chiffres 2018)

* 263 Articles L. 1521-1 CGCT et suivant pour les SEML, article L. 1531-1 CGCT pour les SPL, articles L. 1541-1 CGCT et suivant pour les SEMOP, articles L. 327-1 CU et suivant pour les SPLA et SPLA-IN et article L. 32-10-1 pour les SEMAOU,

* 264 Source Fédération des EPL (FedEPL), chiffres clés, site internet.

* 265 Source Fédération des EPL (FedEPL), chiffres clés, site internet.

* 266 Source Cour des comptes, rapport « Les SEML, un outil des collectivités à sécuriser », mai 2019

* 267 Source Fédération des EPL (FedEPL), chiffres clés, site internet.

* 268 Source Cour des comptes, rapport « Les SEML, un outil des collectivités à sécuriser », mai 2019.

* 269 Source Cour des comptes, rapport « Les SEML, un outil des collectivités à sécuriser », mai 2019.

* 270 CE 14 nov. 2018, Syndicat mixte pour l'aménagement des Combrailles, requête n°405628.

* 271 Ainsi, en vertu de l'article L. 1524-5 du CGCT, les organes délibérants des collectivités ou groupements doivent se prononcer sur un rapport écrit remis au moins une fois par an par leur représentant au conseil d'administration ou au conseil de surveillance de l'EPL. Ces mêmes organes délibérants doivent également autoriser en amont les rémunérations et avantages perçus par leurs représentants dans l'EPL, ainsi que les prises de participation de l'EPL dans le capital d'une société commerciale. En outre, la représentation de chaque collectivité ou groupement au sein du conseil d'administration ou de surveillance, prévue par ce même article, leur permet de prendre part aux principales décisions de gestion de la société, à l'instar, par exemple, de la nomination et de la rémunération du directeur général (articles L. 225-53, L. 225-59 et L. 225-63 du code de commerce).

* 272 Cour des comptes, référé, « les insuffisances du cadre juridique et comptable applicable aux entreprises publiques locales », 15 juin 2017 ; revue des dépenses IGA-CGEFI, « la maîtrise des risques par les entreprises publiques locales », juin 2017.

* 273 Depuis sa création en 1956, la Fédération des élus des Entreprises publiques locales rassemble des élus de toute la France et de toutes les sensibilités politiques autour du choix qu'ils ont fait d'exercer leurs responsabilités locales en ayant recours à la solution d'entreprises détenues par leurs collectivités locales, et qu'ils gouvernent.

* 274 Livre blanc sur l'économie mixte, octobre 2019.

* 275 Décret n° 2019-514 du 24 mai 2019 fixant les seuils de désignation des commissaires aux comptes et les délais pour élaborer les normes d'exercice professionnel.

* 276 Cette notion de contrôle est donc liée au fonctionnement de la société, mais néanmoins, il y a présomption de contrôle si elle détient plus de 40% du capital .

* 277 Président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, Premier ministre, ministres et préfets.

* 278 p. 38 du ROP.

* 279 « Proposition n°7 : Renforcer l'évaluation des politiques décentralisées en améliorant la production et l'accessibilité des données locales et en développant les compétences d'appui à l'évaluation de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locale. Développer la coopération de l'État et des collectivités territoriales pour promouvoir l'évaluation des politiques partagées »

* 280 La Gazette des communes, hors-série en date du 21 septembre 2020.

* 281 CJCE, 2 juin 2005, Commission/Grèce , aff. C-394/02, point 40.

* 282 CJCE, 4 juin 2009, Commission/Grèce , aff. C-250/07, point 34.

* 283 CJUE, 20 juin 2013, Consiglio Nazionale degli Ingegneri, C-352-12.

* 284 CE, 1 er octobre 1997, n o 151578.

* 285 CE, 23 novembre 2011, Ministre de l'écologie c/ Société Montreuil Développement, n° 325334.

* 286 Le Fonds de Prévention des Risques Naturels Majeurs (FPRNM), ou « Fonds Barnier » (loi du 2 février 1995), vise à intervenir en amont des catastrophes naturelles en finançant des actions de prévention. Il permet de subventionner plusieurs types de mesures : mise en sécurité via des dispositifs de sauvegarde, acquisition de biens très exposés (procédure amiable ou expropriation), prise en compte des risques dans les projets d'aménagement, études, travaux et équipements portés par les collectivités territoriales, information du citoyen, etc.

* 287 Celui qui l'allègue n'est pas obligé d'en rapporter un titre, ni qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.

* 288 Article 35-2 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer : « Lorsqu'un acte de notoriété porte sur un immeuble situé en Guadeloupe, en Martinique, à La Réunion, en Guyane, à Saint-Martin et à Mayotte et constate une possession répondant aux conditions de la prescription acquisitive, il fait foi de la possession, sauf preuve contraire. Il ne peut être contesté que dans un délai de cinq ans à compter de la dernière des publications de cet acte par voie d'affichage, sur un site internet et au service de la publicité foncière ou au livre foncier. L'acte de notoriété peut être établi par un notaire ou, à Mayotte, par le groupement d'intérêt public mentionné à l'article 35. Dans ce dernier cas, le groupement en assure la publicité ».

* 289 Voir Sénat Rapport d'information n° 721 (2015-2016) - 23 juin 2016 « Une sécurisation du lien à la terre respectueuse des identités foncières : 30 propositions au service du développement des territoires » p. 70 à 99.

* 290 CEDH, Grande Chambre, n°44302/02, J. A. Pye (Oxford) Ltd c/ Royaume-Uni, 30 août 2007.

* 291 Au 1er janvier 2020, l'INSEE estimait à plus de deux millions le nombre de personnes vivant dans les départements d'Outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion), soit environ 3,2% de la population française. Ces départements sont majoritairement jeunes : le pourcentage de la population ayant moins de 25 ans est de 48,6% en Guyane, de 60,2% à Mayotte, et de 35,5% à la Réunion alors qu'il est de 29,3% en France métropolitaine. Ces taux sont néanmoins moins élevés en Guadeloupe avec 28,8% et Martinique avec 25,9%.

Par ailleurs, ces mêmes territoires (Guyane et Mayotte mis à part) sont frappés par un vieillissement très rapide de leur population. Un rapport d'information sur le grand âge dans les outre-mer, rédigé par la délégation aux outre-mer de l'Assemblée Nationale (députés Atger et Bareigts), en date du 6 février 2020, souligne que la part des 65 ans et plus a été multipliée par 1,5 dans chacun de ces départements entre 1999 et 2014. En 1990, 7,1 % de la population des départements d'outre-mer avait plus de 65 ans, contre 13,9 % pour les habitants de France métropolitaine. Trente ans plus tard, ces proportions sont passées respectivement à 13,7 % et 20,7 %.

Ce même rapport met en évidence que :

Ce phénomène de vieillissement de la population a été particulièrement rapide dans les outre-mer, la transition ayant été accélérée par rapport à la métropole ;

Il devrait se poursuivre et même se renforcer, creusant ainsi l'écart avec le reste du pays. A titre d'exemple, les projections à l'horizon 2030 font de la Martinique le département le plus vieux de France en 2050, alors qu'il n'était qu'à la 74ème place il y a sept ans.

* 292 Source : enquêtes emploi INSEE en continu 2019.

* 293 La région détient une compétence de coordination sur son territoire des politiques de formation professionnelle, notamment au travers du contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelles (CPRDFOP). Introduit par la loi n°2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale et entré en vigueur depuis 2016, cet outil de programmation est négocié dans une logique quadripartite (Etat, région, Pôle Emploi, organisations syndicales et patronales représentatives).

* 294 Centres d'animation ressources d'information sur la formation (CARIF)/ Observatoire régional emploi-formation (OREF).

* 295 Subventions du Fonds régional d'aménagement foncier et urbain alimenté par la ligne budgétaire unique (P123), le FEDER et la Collectivité Territoriale de Guyane (CTG)

* 296 Accord de Guyane du 21 avril 2017 - Protocole « Pou Lagwiyann dékolé » (NOR : OMEO1713117X).

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