EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France, pays disposant d'un patrimoine ancien, divers et remarquable, a depuis longtemps mis en oeuvre une importante législation consistant en sa protection et son entretien.

Afin de préserver l'intérêt historique, artistique ou architectural des bâtiments, l'État a développé durant le 19 ème siècle une politique de financement de leurs travaux et de leur entretien. La loi du 30 mars 1867 pour la conservation des monuments historiques a, pour la première fois, codifié les critères et la procédure de classement.

Il existe aujourd'hui deux niveaux de protection au titre des monuments historiques : l'inscription et le classement.

Mais afin de protéger également la relation entre un édifice et son environnement, le classement ou l'inscription d'un immeuble entraîne automatiquement une servitude de protection de ses abords.

Cette dernière, qui résulte de la loi du 25 février 1943, s'applique à tous les immeubles et les espaces situés à la fois dans un périmètre de 500 mètres de rayon autour du monument et dans son champ de visibilité.

Tous les travaux à l'intérieur de ce périmètre ou susceptibles de modifier l'aspect des abords du bâtiment sont soumis à autorisation préalable et doivent avoir recueilli l'accord de l'architecte des Bâtiments de France.

En 2020, on trouvait 45 684 monuments inscrits ou classés, répartis également entre propriétaires privés et publics, entraînant autant de périmètres et de contraintes à la construction à leurs abords. Même si les patrimoines traditionnels tels les églises ou les châteaux constituent la grande majorité des biens protégés, on assiste depuis les années 1970 à une extension de la protection aux jardins, immeubles et objets mobiliers des 19 ème et 20 ème siècles, ainsi qu'au patrimoine industriel, scientifique et technique.

Cette législation stricte, associée à un périmètre de protection étendu et à une proportion importante du nombre de bien protégés qui ne peut qu'augmenter avec le temps, posent de plus en plus de problèmes aux municipalités.

Un grand nombre de communes voient en effet leurs projets de développement ou d'aménagement extrêmement contraints par ce périmètre parfois artificiel et arbitraire qu'il est difficile de modifier. Dans beaucoup de villages qui cherchent à attirer de nouveaux habitants, ce périmètre de 500 mètres bloque, ralentit ou contraint les extensions possibles d'autant plus que dans la plupart d'entre eux, il correspond dans les faits à l'intégralité de la commune.

L'effet pervers de cette législation réside aussi dans le fait que beaucoup de propriétaires privés ou publics de monuments sont dissuadés d'engager la procédure d'inscription ou de classement au titre des monuments historiques afin de ne pas contraindre plus les projets urbains communaux ou les aménagements des particuliers. Des édifices peuvent ainsi échapper à une protection nécessaire et à ses financements.

Par ailleurs, cette législation très contraignante semble inadaptée aux enjeux du changement climatique. En effet, les bâtiments inclus dans le périmètre de protection sont soumis par les architectes des Bâtiments de France, au nom de l'intérêt historique ou patrimonial, à des normes spécifiques en termes de travaux, d'entretien et de matériaux autorisés (tels le bois). Toutefois, l'usage de ces matériaux, plus onéreux, est bien souvent contraire à l'impératif de performance énergétique par une meilleure isolation des bâtiments, qui passe par des matières moins « nobles » comme le PVC, la laine de verre ou le polyuréthane.

La loi du 13 décembre 2000, dite « SRU », a introduit la possibilité de modifier le périmètre de 500 mètres des abords. Lors de l'élaboration ou de la révision du plan local d'urbanisme, ce périmètre peut en effet, sur proposition de l'architecte des Bâtiments de France et après accord de la commune, être modifié de façon à désigner des ensembles d'immeubles et des espaces qui participent de l'environnement du monument pour en préserver le caractère ou contribuer à en améliorer la qualité. Mais cela ne change en rien la nature ou l'étendue de ce périmètre.

Il est indispensable d'adapter la norme en la matière, conçue à une époque où le nombre de bâtiments protégés était beaucoup plus faible, où l'application de la loi par les architectes des Bâtiments de France était moins sourcilleuse, et où les exigences en matière de développement et d'urbanisation étaient différentes.

À l'heure où le monde rural et péri-urbain attire de nouveaux résidents qui souhaitent quitter les plus grandes villes, il est urgent de rendre les projets urbanistiques plus aisés à mettre en oeuvre.

La réduction du nombre de communes concernées par ces périmètres constituerait un compromis entre la nécessité de préserver l'environnement immédiat des monuments historiques des troubles visuels, et l'impératif de simplification du développement des plus petites communes et particulièrement celles qui sont englobées dans ce périmètre. De même, la distance de 500 mètres aux abords est très contraignante dans de nombreuses communes et il est nécessaire d'envisager un périmètre plus restreint, donnant ainsi plus de sens à la notion « d'abords ».

C'est pourquoi l'article unique de la présente proposition de loi réserve, dans le titre du code du patrimoine consacré aux monuments historiques, le périmètre de protection aux communes de plus de 1 000 habitants. Par ailleurs, il est proposé, dans les communes de plus de 1 000 habitants, de réduire l'étendue de ce périmètre de 500 à 100 mètres aux abords.

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