EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La recherche constitue un pilier fondamental de la connaissance, de l'émancipation et du progrès social. Les docteurs, formés à la production et à la mise en oeuvre des connaissances les plus avancées selon les critères épistémologiques de leur discipline, représentent une ressource inestimable pour notre société. Pourtant, en France, le doctorat ne bénéficie toujours pas de la reconnaissance sociale, statutaire et professionnelle à la hauteur de sa valeur. Cette carence freine l'insertion professionnelle des docteurs et réduit l'attractivité des carrières scientifiques, affaiblissant ainsi notre potentiel national en matière de recherche et de développement. Ce manque de reconnaissance se traduit notamment par une baisse significative du nombre d'inscriptions en doctorat, avec une diminution de 13,8 % entre 2011 et 2022 selon les chiffres du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Dans la fonction publique, l'accès aux cadres de catégorie A demeure trop limité. Les modalités actuelles des concours de recrutement ne prennent pas en considération les spécificités des travaux de recherche ni les qualifications singulières des docteurs. En conséquence, les compétences scientifiques de ces derniers se trouvent souvent dévalorisées, alors même qu'elles pourraient apporter une contribution non négligeable au service public.
Dans le secteur privé, l'absence de reconnaissance salariale adéquate constitue également un frein substantiel. Les classifications professionnelles et les grilles de rémunération ignorent fréquemment le niveau de qualification doctorale et les savoir-faire particuliers des docteurs.
Enfin, il existe une inadéquation notoire entre la reconnaissance académique des docteurs et leur rémunération effective. Les grilles salariales en vigueur sont souvent obsolètes et minorent la portée de leur contribution en matière de recherche, d'innovation et de création de savoirs. Cette sous-évaluation fragilise leur intégration professionnelle et contribue au détournement des vocations scientifiques vers d'autres horizons, notamment à l'international.
Face à ces constats préoccupants, il devient impératif de procéder à une réforme structurelle, destinée à assurer aux docteurs une juste reconnaissance de leur qualification et de leur rôle dans les secteurs public et privé.
L'article 1er de la présente proposition de loi introduit une modification de l'article L. 421-1 du code de la recherche, afin de prévoir des voies spécifiques d'accès à la fonction publique pour les docteurs. Ces voies incluront notamment la création de concours externes spéciaux, fondés sur les titres et travaux des candidats. Ce dispositif sera complété par un aménagement des épreuves d'admission et d'admissibilité, garantissant une évaluation plus fidèle des compétences scientifiques et des expériences professionnelles acquises au cours de leur parcours doctoral.
L'article 2 prévoit la reconnaissance expresse du doctorat comme un grade académique sanctionnant un cursus universitaire de huit années après le baccalauréat dans les classifications professionnelles des conventions collectives. Cette reconnaissance impliquera l'intégration systématique du doctorat dans les grilles de classification et de rémunération, ainsi que la mise en place d'un salaire plancher proportionné aux qualifications et responsabilités inhérentes aux titulaires de ce diplôme. Les grilles salariales de la fonction publique devront également intégrer les spécificités doctorales pour éviter toute dévalorisation des parcours scientifiques.
L'article 3 impose l'inscription du doctorat comme niveau de qualification autonome dans les conventions collectives, dans un souci de clarification des perspectives d'évolution professionnelle et de sécurisation des parcours. Cette mesure vise également à mieux valoriser l'apport des docteurs au tissu économique et culturel, en rendant plus lisibles leurs compétences spécifiques aux yeux des employeurs.
En réaffirmant ainsi leur place centrale, cette proposition de loi entend offrir aux docteurs des perspectives professionnelles à la hauteur de leurs qualifications, des efforts consentis par les étudiants et de leurs contributions.
Enfin, elle s'inscrit dans une ambition plus large de renforcement de la souveraineté scientifique et économique nationale, en remédiant aux incohérences qui affaiblissent aujourd'hui notre système de recherche et en assurant aux docteurs une reconnaissance pleine et entière au sein de la République.