N° 417

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 15 juillet 2004

PROPOSITION DE LOI

modifiant l'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l' organisation et à la promotion des activités physiques et sportives ,

PRÉSENTÉE

Par M. Michel MERCIER,

Sénateur.

( Renvoyée à la commission des Affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Sports.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 30 mars 2004, la Commission européenne a adressé une « mise en demeure » à la France pour non respect du droit européen. Elle concerne deux dispositions de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives. La première interdit aux clubs professionnels français d'avoir accès à l'appel public à l'épargne. La seconde ne permet pas à un actionnaire privé d'avoir des participations dans plusieurs clubs. Cette décision fait suite à une plainte contre l'État français déposée le 12 février 2002, par huit clubs de football professionnels. Après deux ans d'instruction, Bruxelles estime aujourd'hui que ces deux interdictions sont contraires au principe de la libre circulation des capitaux.

L'article 11 de la loi du 16 juillet 1984 permet aux clubs sportifs de prendre la forme soit d'une société à responsabilité limitée ne comprenant qu'un associé, dénommée entreprise unipersonnelle sportive à responsabilité limitée, soit d'une société anonyme à objet sportif, soit d'une société anonyme sportive professionnelle.

La présente proposition de loi propose de modifier cet article en ajoutant un alinéa permettant aux associations sportives de se constituer sous la forme d'une société anonyme. Il s'agit d'autoriser les clubs français d'accéder aux marchés financiers en leur permettant d'avoir recours à l'appel public à l'épargne. Ainsi les clubs de football français pourraient faire face à leurs besoins de financement, assurer une parfaite transparence de leur fonctionnement et harmoniser leur statut juridique avec celui de l'ensemble de leurs concurrents européens.

En effet, les clubs français peuvent difficilement rivaliser avec leurs partenaires européens tant les différences entre les législations nationales créent un décalage avéré entre les clubs français et les autres grands clubs européens. Par exemple, la Direction Nationale du Contrôle de Gestion, chargée d'assurer en France le contrôle juridique et financier des clubs sportifs affiliés, peut décider de rétrograder un club de football en division inférieure dès lors qu'il se trouve dans une situation financière difficile. À l'inverse, les clubs italiens ou espagnols en particulier bénéficient de la plus grande mansuétude de la part de leurs fédérations respectives (quand le Gouvernement n'intervient pas directement pour couvrir une partie des dettes des clubs comme ce fut le cas en Italie).

Par ailleurs, la pression fiscale sur les clubs français est une des plus lourdes d'Europe. Ainsi, selon un étude publiée en décembre 2001, pour un salaire net équivalent, un joueur français coûte à un club 243 786 euros en charges sociales, un joueur anglais 45 547 euros, un joueur italien 24 168 euros, un joueur Allemand 13 666 euros et un joueur espagnol 12 337 euros.

Dans ces conditions, on comprend l'inégalité criante entre clubs européens et notamment entre la France et le reste des grandes nations européennes du football.

Les clubs professionnels français ont mis l'accent sur la formation des joueurs. Or cette activité coûte très cher. La France cultive ce paradoxe de former les meilleurs joueurs du monde et d'être la plus grande exportatrice de ces mêmes joueurs. Nous sommes dans l'incapacité de garder l'élite de nos footballeurs au sein de l'Hexagone. Il faut savoir que 78% des internationaux français ne jouent pas dans un club national alors que cela ne concerne uniquement que 4% des joueurs italiens, anglais et espagnols.

Les clubs professionnels, notamment les clubs de football, ont aujourd'hui atteint un niveau qui permet de les considérer non plus uniquement comme des créateurs de divertissement, mais comme de véritables entreprises qui doivent vivre dans un contexte de concurrence vive et dure. Nous devons donc leur permettre de faire jeu égal avec les autres clubs européens dans ce contexte de compétition commerciale.

La disposition que nous vous proposons permettrait de réduire ces inégalités de traitement entre les différents clubs européens. Elle ne concerne pas uniquement les clubs de football mais les autres sports, comme le rugby ou le basket, qui ont choisi la voie de la professionnalisation.

Le rapport d'information de notre collègue Yvon Collin souligne également dans ses conclusions que cette interdiction de faire appel public à l'épargne est « d'autant plus contestable que certains clubs bénéficient, à travers des maisons-mères, dans des conditions qui ne sont pas toujours économiquement justifiées du soutien d'entreprises, qui, elles, sont en mesure d'accéder à l'épargne publique ».

Lors de l'examen de la loi portant sur l'organisation et la promotion des activités physiques et sportives modifiant la loi du 16 juillet 1984, avec plusieurs de mes collègues, nous avions déposé un amendement permettant aux clubs sportifs de se transformer en société anonyme de droit commun. Le Ministre des sports nous avait répondu à cette occasion que « sur la possibilité de transformation en société anonyme, [il était] prêt à lancer la réflexion ».

Le temps est venu de lancer cette réflexion et de modifier notre législation pour offrir au sport professionnel un environnement juridique et économique plus favorable.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

L'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives est ainsi modifié :

I.- Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« - soit d'une société anonyme. »

II.- Au dernier alinéa, après les mots « la société anonyme sportive professionnelle », il est inséré les mots : « ou la société anonyme. »

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