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N° 800

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 septembre 2011

PROPOSITION DE LOI

relative à l 'abrogation du conseiller territorial ,

PRÉSENTÉE

Par Mme Nicole BORVO COHEN-SEAT, MM. François REBSAMEN, Jacques MÉZARD, Mmes Éliane ASSASSI, Marie-France BEAUFILS, MM. Michel BILLOUT, Éric BOCQUET, Mmes Laurence COHEN, Cécile CUKIERMAN, Annie DAVID, Michelle DEMESSINE, Évelyne DIDIER, MM. Christian FAVIER, Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Mme Brigitte GONTHIER-MAURIN, MM. Robert HUE, Gérard LE CAM, Michel LE SCOUARNEC, Mmes Isabelle PASQUET, Mireille SCHURCH, MM. Paul VERGÈS, Dominique WATRIN, Mmes Leila AÏCHI, Jacqueline ALQUIER, Michèle ANDRÉ, MM. Serge ANDREONI, Maurice ANTISTE, Jean-Étienne ANTOINETTE, Alain ANZIANI, Mme Aline ARCHIMBAUD, MM. David ASSOULINE, Bertrand AUBAN, Dominique BAILLY, Mme Delphine BATAILLE, M. Jean-Pierre BEL, Mme Esther BENBASSA, MM. Claude BÉRIT-DÉBAT, Michel BERSON, Jacques BERTHOU, Jean BESSON, Mmes Marie-Christine BLANDIN, Maryvonne BLONDIN, Nicole BONNEFOY, M. Yannick BOTREL, Mme Corinne BOUCHOUX, MM. Didier BOULAUD, Martial BOURQUIN, Mme Bernadette BOURZAI, M. Michel BOUTANT, Mme Nicole BRICQ, MM. Jean-Pierre CAFFET, Pierre CAMANI, Mme Claire-Lise CAMPION, M. Jean-Louis CARRÈRE, Mme Françoise CARTRON, MM. Luc CARVOUNAS, Bernard CAZEAU, Yves CHASTAN, Jacques CHIRON, Mme Karine CLAIREAUX, M. Gérard COLLOMB, Mme Hélène CONWAY MOURET, MM. Jacques CORNANO, Roland COURTEAU, Ronan DANTEC, Yves DAUDIGNY, Marc DAUNIS, Michel DELEBARRE, Jean-Pierre DEMERLIAT, Mme Christiane DEMONTÈS, MM. Jean DESESSARD, Félix DESPLAN, Claude DILAIN, Claude DOMEIZEL, Mmes Odette DURIEZ, Josette DURRIEU, MM. Vincent EBLÉ, Philippe ESNOL, Mme Frédérique ESPAGNAC, MM. Alain FAUCONNIER, Jean-Luc FICHET, Jean-Jacques FILLEUL, Jean-Claude FRÉCON, André GATTOLIN, Mme Catherine GÉNISSON, M. Jean GERMAIN, Mmes Samia GHALI, Dominique GILLOT, MM. Jacques GILLOT, Jean-Pierre GODEFROY, Gaëtan GORCE, Jean-Noël GUÉRINI, Didier GUILLAUME, Claude HAUT, Edmond HERVÉ, Mme Odette HERVIAUX, MM. Claude JEANNEROT, Philippe KALTENBACH, Ronan KERDRAON, Mmes Bariza KHIARI, Virginie KLÈS, MM. Yves KRATTINGER, Georges LABAZÉE, Joël LABBÉ, Serge LARCHER, Mme Françoise LAURENT-PERRIGOT, MM. Jean-Yves LECONTE, Jacky LE MENN, Mme Claudine LEPAGE, MM. Jean-Claude LEROY, Alain LE VERN, Mme Marie-Noëlle LIENEMANN, MM. Jeanny LORGEOUX, Jean-Jacques LOZACH, Roger MADEC, Philippe MADRELLE, Jacques-Bernard MAGNER, François MARC, Marc MASSION, Rachel MAZUIR, Mmes Michelle MEUNIER, Danielle MICHEL, MM. Jean-Pierre MICHEL, Gérard MIQUEL, Jean-Jacques MIRASSOU, Thani MOHAMED SOILIHI, Robert NAVARRO, Alain NÉRI, Mme Renée NICOUX, MM. Jean-Marc PASTOR, Georges PATIENT, François PATRIAT, Daniel PERCHERON, Jean-Claude PEYRONNET, Bernard PIRAS, Jean-Vincent PLACÉ, Roland POVINELLI, Mme Gisèle PRINTZ, MM. Marcel RAINAUD, Daniel RAOUL, Daniel REINER, Thierry REPENTIN, Alain RICHARD, Roland RIES, Gilbert ROGER, Yves ROME, Mmes Laurence ROSSIGNOL, Patricia SCHILLINGER, MM. Jean-Pierre SUEUR, Simon SUTOUR, Mme Catherine TASCA, MM. Michel TESTON, René TEULADE, Jean-Marc TODESCHINI, Richard TUHEIAVA, André VALLINI, René VANDIERENDONCK, Yannick VAUGRENARD, Michel VERGOZ, Maurice VINCENT, Richard YUNG, Nicolas ALFONSI, Jean-Michel BAYLET, Alain BERTRAND, Christian BOURQUIN, Jean-Pierre CHEVÈNEMENT, Yvon COLLIN, Pierre-Yves COLLOMBAT, Mme Anne-Marie ESCOFFIER, M. François FORTASSIN, Mme Françoise LABORDE, MM. Jean-Pierre PLANCADE, Jean-Claude REQUIER, Robert TROPEANO, Raymond VALL et François VENDASI,

Sénateurs

(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les articles concernant la création des conseillers territoriaux, en lieu et place des conseillers généraux et régionaux, ont été les plus discutés de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités locales.

Leur adoption fut obtenue, en première lecture au Sénat, grâce au vote d'un amendement sur le mode d'élection du conseiller territorial qui devait selon ce texte assurer la représentation des territoires par un scrutin uninominal, l'expression du pluralisme politique et la représentation démographique par un scrutin proportionnel, ainsi que la parité.

Mais, dès son passage à l'Assemblée nationale, les députés s'empressèrent d'annuler cet amendement et de définir un autre mode de scrutin qui devint uninominal à deux tours, exclusivement.

Ainsi les engagements pris par le Gouvernement devant le Sénat ne furent pas tenus.

Puis un tableau définissant le nombre de conseillers territoriaux par département et par région fut annexé à la loi par un amendement gouvernemental de dernière minute à l'Assemblée nationale.

Malgré de nombreuses protestations venant des différentes sensibilités de la représentation nationale, le Gouvernement réussit à faire adopter cette répartition territoriale des conseillers territoriaux.

Cependant, le Conseil constitutionnel ayant été saisi, considéra que cette répartition méconnaissait le principe d'égalité devant le suffrage universel et déclara alors ce tableau de répartition des conseillers territoriaux contraire à notre Constitution.

Un nouveau tableau fut alors établi par le Gouvernement et présenté au vote de l'Assemblée national en première lecture, puis au Sénat.

Ce faisant, le Gouvernement méconnaissait à nouveau un principe constitutionnel en ayant soumis en premier lieu à l'Assemblée nationale ce nouveau tableau de répartition. En effet, le deuxième alinéa de l'article 39 de la Constitution prévoit que les projets de loi ayant pour principal objet l'organisation des collectivités territoriales sont soumis en premier lieu au Sénat.

C'est donc naturellement que le Conseil constitutionnel déclara la procédure législative utilisée contraire à la Constitution.

Il fallut donc faire délibérer à nouveau le Sénat puis l'Assemblée nationale.

Ces différents rappels des procédures législatives utilisées afin de créer ce nouveau type d'élu local montrent bien les réticences de bon nombre de parlementaires, y compris au sein de la majorité, en particulier au sein de la Haute assemblée.

Il faut dire qu'aucun gouvernement n'avait auparavant osé faire disparaitre plus de 2 000 élus locaux et organiser une telle confusion entre les assemblées délibératives des départements et des régions.

Le risque est alors grand d'une mise sous tutelle d'une assemblée sur l'autre.

Aussi nous craignons que ce nouveau dispositif de représentation au sein de deux assemblées locales ne soit le premier pas vers la disparition programmée de l'une d'entre elle : le Conseil général.

Ce serait alors la fin de nos départements.

La mise en place de ces nouveaux conseillers territoriaux est d'autant plus condamnable que rien ne vient en fait justifier leur existence.

En effet, le seul argument avancé est d'ordre financier, laissant croire que moins d'élus feront moins de dépenses.

Or il n'en est rien, au contraire. Toutes les études sérieuses qui ont été faites par diverses associations d'élus montrent que le statut et le nombre de ces conseillers territoriaux entraineraient de nouvelles dépenses de fonctionnement et d'investissement dont les montants seront finalement plus élevés que celles engendrées actuellement par l'activité des conseillers généraux et des conseillers régionaux.

Aussi le seul argument avancé ne tient pas. Il faut donc se résoudre à s'interroger sur les vrais motifs d'une telle réforme.

Pour l'essentiel, il faut y voir deux objectifs centraux.

Le premier tient à la volonté du Gouvernement et de sa majorité de reprendre la direction politique de nombreux territoires, actuellement dirigés par des élus d'opposition, afin de s'assurer que les politiques locales s'inspirent totalement de celles définies nationalement.

Pour y parvenir, il lui faut réduire et redécouper les cantons et faire de ceux-ci les nouvelles circonscriptions électorales servant à l'élection des assemblées régionales.

Ce faisant, tous les équilibres politiques actuels dans les départements et les régions vont être bouleversés à partir d'une surreprésentation des zones rurales, au détriment des zones urbaines, tout particulièrement au sein des assemblées régionales.

Cette volonté est si puissante que cette réforme prend alors le risque de remettre totalement en cause le principe de parité, qui s'était mis peu à peu en place dans les conseils municipaux et régionaux et qui est pourtant devenu un objectif constitutionnel. Chacun le sait, dans un scrutin uninominal, il y a moins de femmes élues.

Par ailleurs, la réduction de moitié du nombre de conseillers généraux va entrainer un affaiblissement considérable de la représentation de certaines sensibilités politiques entrainant ainsi une plus grande bipolarisation de la vie politique, en prenant le risque d'une plus grande abstention.

Ce faisant, la création des conseillers territoriaux marque un recul démocratique.

Le second objectif vise, quant à lui, à poursuivre et amplifier, au niveau local, les politiques de restriction des politiques publiques. Pour y parvenir, après avoir réduit les moyens financiers des départements et des régions et encadré plus fortement leurs possibilités d'intervention, il faut éloigner les élus et les assemblées délibératives des citoyens qu'ils sont censés représentés. Il faut transformer les administrations locales de proximité en une administration éloignée des préoccupations et des besoins des habitants.

Les missions dévolues aux nouveaux conseillers territoriaux les transformeront peu à peu en des administrateurs professionnels mettant en oeuvres des politiques publiques qui auront finalement été définies par d'autres.

Certes, la création de ces conseillers territoriaux en lieu et place des conseillers généraux et régionaux actuels est en cohérence avec l'ensemble de la réforme des collectivités territoriales qui visent aux mêmes objectifs.

Le renforcement de l'intercommunalité aux périmètres élargis et les nouvelles règles de représentation en leur sein auront les mêmes conséquences au niveau local. Moins de femmes dans les assemblées communautaires, moins de sensibilités politiques représentées et un premier éloignement des citoyens des lieux de décisions.

Ainsi, toute réforme globale visant à redonner sens à la décentralisation, engagée dans notre pays il y a près de trente ans, en se fixant l'objectif de mieux répondre sur l'ensemble du territoire national aux besoins et aux attentes de nos concitoyens passera, nul n'en doute, par l'abrogation de la réforme des collectivités locales du 13 décembre 2010.

Dans cette attente, et compte tenu des risques démocratiques portés par la création des conseillers territoriaux, cette proposition vise à l'abrogation des conseillers territoriaux.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Les articles 1 er , 2, 3, 4, 5 et 6 de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités territoriales, sont abrogés.

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