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N° 566

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juin 2018

PROPOSITION DE LOI

tendant à sécuriser et étendre la procédure du divorce par consentement mutuel par acte sous seing privé contresigné par avocats ,

PRÉSENTÉE

Par MM. André REICHARDT, Jean-Jacques PANUNZI, Henri LEROY, Alain JOYANDET, Patrick CHAIZE, Daniel LAURENT, Mme Pascale GRUNY, M. Jean-François RAPIN, Mme Sylvie GOY-CHAVENT, MM. Jean-Marie MORISSET, Alain MILON, Philippe DALLIER, Mmes Brigitte MICOULEAU, Marie-Thérèse BRUGUIÈRE, MM. Guy-Dominique KENNEL, Robert del PICCHIA, Antoine LEFÈVRE, Mmes Marta de CIDRAC, Annie DELMONT-KOROPOULIS, M. Jean-Marie MIZZON, Mmes Anne-Marie BERTRAND, Catherine DEROCHE, MM. Bernard FOURNIER, Alain DUFAUT, Jean-François MAYET, Jean-Marie BOCKEL, Mme Christine BONFANTI-DOSSAT, MM. Max BRISSON, Benoît HURÉ, Marc LAMÉNIE, Mme Pascale BORIES, M. Jean-Pierre BANSARD, Mme Évelyne RENAUD-GARABEDIAN, MM. Marc-Philippe DAUBRESSE, Didier MANDELLI, Mme Nassimah DINDAR, MM. Olivier HENNO, Pierre CHARON, Jean BIZET, Claude KERN, Mmes Christine LAVARDE et Élisabeth LAMURE,

Sénateurs

(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a instauré un nouveau type de divorce consensuel, permettant aux parties qui souhaitent divorcer par consentement mutuel de donner force exécutoire à leur convention de divorce par un simple dépôt au rang des minutes d'un notaire, sans passer devant le juge aux affaires familiales.

Ce faisant, le législateur a créé un nouveau type d'acte, à la frontière entre le contrat et le jugement, et un nouveau type de titre exécutoire, pour l'application forcée de ces nouveaux divorces.

Ce nouveau type de divorce a suscité et suscite encore des craintes ou du moins des interrogations chez les juristes et les praticiens du droit, en raison de sa nature hybride et des conséquences concrètes susceptibles d'en découler. En effet, la convention de divorce n'étant pas homologuée par jugement, elle conserve son caractère contractuel, ce qui l'expose à l'ensemble du contentieux relatif au droit des contrats.

Il apparaît nécessaire et urgent de sécuriser ce nouveau type de divorce, afin d'éviter le développement d'un contentieux nouveau, qui serait à l'évidence contraire au but de la réforme : simplifier le divorce.

Le chapitre I er propose ainsi plusieurs mesures :

Les articles 1 er et 2 ont pour effet de consacrer le caractère divisible de la convention de divorce en conférant formellement un caractère irrévocable au principe du divorce une fois la convention enregistrée, nonobstant toute action en nullité susceptible de la remettre en cause, pour ce qui est des conséquences attachées au divorce.

L'article 3 propose d'annexer à la convention un extrait avec indication de la filiation de chacun des époux, ce qui permettra de s'assurer de leur capacité de contracter. En effet, l'absence de mention au répertoire civil est un gage de sécurité pour les avocats, dont les responsabilités ont sensiblement été accrues.

En outre, partant du constat qu'il est désormais plus facile de procéder à un divorce qu'à une séparation de corps, le chapitre II vise, dans un souci de cohérence et d'harmonisation, à déjudiciariser la procédure de séparation de corps par consentement mutuel.

Les articles 4 à 9 tendent ainsi à étendre à la séparation de corps par consentement mutuel le schéma procédural du divorce par consentement mutuel contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d'un notaire.

Afin d'encourager les parents séparés ou divorcés à organiser les conséquences de leur séparation à l'égard de leurs enfants de manière négociée et discutée, en amont de toute intervention judiciaire, le chapitre III propose d'étendre le schéma procédural du divorce par consentement mutuel contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d'un notaire aux conventions régissant les modalités d'exercice de l'autorité parentale par des parents séparés.

Les articles 10 à 14 tendent à confier aux avocats un rôle de conciliateurs et ainsi permettre aux parties de tenter de trouver un accord amiable quant aux conséquences de leur séparation à l'égard de leurs enfants avant d'envisager, le cas échéant, l'intervention du juge, à défaut de consensus.

Les dispositions communes envisagées au chapitre IV visent, enfin, à coordonner l'ensemble des mesures de déjudiciarisation envisagées par la présente proposition de loi.

L'article 15 étend la possibilité, pour le juge, de modifier ou de compléter les dispositions contenues dans la convention de divorce par consentement mutuel relatives à l'exercice de l'autorité parentale à toutes les conventions prenant la forme d'un acte sous signature privée contresigné par avocats déposé au rang des minutes d'un notaire.

L'article 16 a pour objet d'apporter une précision législative selon laquelle le notaire est habilité à délivrer aux parties des copies certifiées conformes à l'original qu'il détient, en vue de l'exécution de la convention de divorce, ce qui est susceptible de sécuriser la question de l'exécution forcée des conventions contresignées par avocats et déposées au rang des minutes d'un notaire.

Tel est l'objet de la présente proposition de loi.

Proposition de loi tendant à sécuriser et étendre la procédure
du divorce par consentement mutuel par acte sous seing privé contresigné par avocats

CHAPITRE I ER

Consacrer le caractère divisible de la convention de divorce et sécuriser la procédure

Article 1 er

Le dernier alinéa de l'article 229-1 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le principe du divorce est alors acquis de façon irrévocable. »

Article 2

Après l'article 229-1 du code civil, il est inséré un article 229-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 229-1-1 . - Par exception à l'article 2224, l'action en nullité à l'encontre de la convention de divorce déposée au rang des minutes d'un notaire se prescrit par un an à compter de la date du dépôt. Elle n'est pas susceptible de remettre en cause le caractère irrévocable du divorce, sauf à démontrer que le consentement au principe du divorce n'a pas été valablement donné. En cas d'annulation de la convention de divorce, les parties ont la faculté de saisir le juge aux affaires familiales pour qu'il se prononce sur les conséquences du divorce. »

Article 3

L'article 229-3 du code civil est complété par un 7° ainsi rédigé :

« 7° En annexe, l'extrait avec indication de la filiation de chacun des époux, qui ne doit pas dater de plus de trois mois. »

CHAPITRE II

Déjudiciariser la procédure de séparation de corps par consentement mutuel

Article 4

À la fin de l'article 296 du code civil, le mot : « judiciaire » est supprimé.

Article 5

À l'article 298 du code civil, la référence : « l'article 228 » est remplacée par les références : « aux articles 229-1 à 229-4 ».

Article 6

À la seconde phrase de l'article 300 du code civil, après le mot : « Toutefois, » sont insérés les mots : « la convention de séparation de corps par acte sous signature privée contresigné par avocats, ».

Article 7

Le début de la seconde phrase de l'article 301 du code civil est ainsi rédigé : « En cas de séparation de corps par consentement mutuel, les époux ... ( le reste sans changement ). »

Article 8

Au premier alinéa de l'article 303 du code civil, après le mot : « secours ; », sont insérés les mots : « la convention qui la constate, ».

Article 9

Le second alinéa de l'article 307 du code civil est ainsi rédigé :

« En cas de séparation de corps par consentement mutuel, la conversion en divorce ne peut intervenir que par consentement mutuel. »

CHAPITRE III

Étendre le schéma procédural du divorce par consentement mutuel contresigné par avocats

Article 10

Après le paragraphe 2 de la section 1 du chapitre I er du titre IX du livre I er du code civil, il est inséré un paragraphe 2 bis ainsi rédigé :

« Paragraphe 2 bis

« De la convention parentale par acte sous seing privé contresigné par avocat

« Art. 373-2-5-1 . - En cas d'accord entre les parents sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, ceux-ci, assistés chacun par un avocat, peuvent constater leur accord dans une convention prenant la forme d'un acte sous signature privée contresigné par leurs avocats et établi dans les conditions prévues à l'article 1374.

« Cette convention est déposée au rang des minutes d'un notaire, qui contrôle le respect des exigences formelles prévues aux 1° à 4° de l'article 373-2-5-3. Il s'assure également que le projet de convention n'a pas été signé avant l'expiration du délai de réflexion prévu à l'article 373-2-5-4.

« Ce dépôt donne ses effets à la convention en lui conférant date certaine et force exécutoire.

« Art. 373-2-5-2 . - Les parents ne peuvent conclure de convention parentale par acte sous signature privée contresigné par avocats lorsque le mineur, informé par ses parents de son droit à être entendu par le juge dans les conditions prévues à l'article 388-1, demande son audition par le juge.

« Art. 373-2-5-3 . - La convention comporte expressément, à peine de nullité :

« 1° Les nom, prénoms, résidence de chacun des parents, ainsi que les nom, prénoms, date et lieu de naissance de chacun de leurs enfants communs ;

« 2° Le nom, l'adresse professionnelle et la structure d'exercice professionnel des avocats chargés d'assister les parents ainsi que le barreau auquel ils sont inscrits ;

« 3° La mention de l'accord des parents sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les termes énoncés par la convention ;

« 4° La mention que le mineur a été informé par ses parents de son droit à être entendu par le juge dans les conditions prévues à l'article 388-1 et qu'il ne souhaite pas faire usage de cette faculté.

« Art. 373-2-5-4 . - L'avocat adresse au parent qu'il assiste, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, un projet de convention, qui ne peut être signé, à peine de nullité, avant l'expiration d'un délai de réflexion d'une durée de quinze jours à compter de la réception.

« La convention a force exécutoire au jour où elle acquiert date certaine. »

Article 11

Au deuxième alinéa de l'article 373-2-2 du code civil, les mots : « homologuée visée à l'article 373-2-7 » sont remplacés par les mots : « prenant la forme d'un acte sous signature privée contresigné par avocats mentionnée à l'article 373-2-5-1 ».

Article 12

À l'article 373-2-3 du code civil, le mot : « homologuée » est remplacé par les mots : « prenant la forme d'un acte sous signature privée contresigné par avocats ».

Article 13

L'article 373-2-7 du code civil est abrogé.

Article 14

À l'article 373-2-8 du code civil, le mot : « également » est supprimé.

CHAPITRE IV

Coordonner l'ensemble des mesures de déjudiciarisation

Article 15

À l'article 373-2-13 du code civil, les mots : « de divorce par consentement mutuel » sont supprimés.

Article 16

Le 4° bis de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution est ainsi rédigé :

« 4° bis L'original ou la copie certifiée conforme par le notaire de la convention sous signature privée contresignée par avocats, assortie de sa preuve de dépôt au rang des minutes d'un notaire selon les modalités prévues aux articles 229-1 ou 373-2-5-1 du code civil ; ».

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