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N° 209

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 décembre 2018

PROPOSITION DE LOI

visant à attribuer l' allocation de reconnaissance à certains supplétifs de statut civil de droit commun ,

PRÉSENTÉE

Par M. Jean-Pierre GRAND,

Sénateur

(Envoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Plus de cinquante après la fin de la guerre d'Algérie, la législation française distingue les supplétifs de statut civil de droit local (Arabo-Berbères) et ceux de droit commun (souche européenne).

Ainsi, le législateur a mis en place un régime particulier d'indemnisation pour les anciens membres des formations supplétives de l'armée française soumis antérieurement au statut civil de droit local. Il a ainsi voulu constater, à tous égards, la situation très particulière des supplétifs de droit local à leur arrivée en métropole. Ceux-ci ont en effet rencontré des difficultés d'intégration spécifique, que le législateur a entendu reconnaître et indemniser.

Cette indemnisation passe notamment par l'attribution d'une allocation de reconnaissance.

Dans sa décision n° 2010-93 QPC du 4 février 2011, le Conseil constitutionnel a censuré une partie de la rédaction de l'article 9 de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l'indemnisation des rapatriés, rendant ainsi les supplétifs de statut civil de droit commun éligibles à l'attribution de l'allocation de reconnaissance à compter du 5 février 2011.

Cette éligibilité sera ensuite corrigée par la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale, réservant à nouveau cette allocation aux seuls supplétifs de statut civil de droit local.

Il ressort donc que tous les supplétifs ayant formulé une demande ou un renouvellement de demande entre le 5 février 2011 au 20 décembre 2013 étaient éligibles à cette allocation.

Cette situation a été confirmée par la décision n° 342957 du 20 mars 2013 du Conseil d'État statuant au contentieux.

Néanmoins, l'administration a préféré garder volontairement le silence face aux demandes déposées sur cette période, entraînant donc des refus implicites. Elle a ensuite attendu la promulgation de la loi n° 2013-1168 précitée pour rejeter officiellement les demandes.

En effet, le II de l'article 52 de la loi n° 2013-1168 prévoyait que les nouveaux critères d'éligibilité étaient applicables aux demandes d'allocation de reconnaissance présentées préalablement qui n'avaient pas donné lieu à une décision de justice passée en force de chose jugée.

Face à cette nouvelle disposition législative, les supplétifs concernés étaient dès lors peu enclin à engager une procédure longue et coûteuse devant la justice administrative pour contester ces rejets.

Dans sa décision n° 2015-522 QPC du 19 février 2016, le Conseil constitutionnel a déclaré le II de l'article 52 de la loi n° 2013-1168 contraire à la Constitution avec prise d'effet à compter du 21 février 2016 et application à toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement.

Il est donc admis que les supplétifs de statut civil de droit commun étaient éligibles du 5 février 2011 au 20 décembre 2013 et qu'en l'absence de recours dans les délais légaux leur situation est désormais forclose.

Néanmoins, il convient de rappeler que les supplétifs concernés sont âgés et dans des situations parfois bien fragiles ne leur permettant pas de se battre à armes égales contre l'administration.

Lors de l'examen du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense au Sénat, le Gouvernement s'était engagé à étudier individuellement l'ensemble des 74 situations fournies par une association.

L'analyse du ministère des armées fait apparaître que :

- 23 personnes ne sont pas d'anciens supplétifs ;

- 25 personnes sont introuvables dans les fichiers ;

- 26 personnes sont bien des supplétifs de statut civil de droit commun.

Dès lors, il est juste que ces 26 supplétifs de statut civil de droit commun puissent désormais bénéficier de l'allocation de reconnaissance malgré l'absence de recours dans les délais légaux du fait du comportement de l'administration.

Chaque année, une centaine de bénéficiaires environ sortent du dispositif consécutivement à leur décès. Il n'est aujourd'hui plus possible d'attendre pour réparer cette injustice.

Il est donc proposé de donner une base législative à la réouverture de ce droit pour ces 26 supplétifs de statut civil de droit commun et ainsi clore définitivement et humainement ce douloureux contentieux.

Afin de limiter l'impact de cette mesure sur les finances publiques, il est proposé de limiter ce droit à l'attribution de la rente annuelle d'un montant de 4 109 € et donc pas à la possibilité de versement d'un capital.

Proposition de loi visant à attribuer l'allocation de reconnaissance à certains supplétifs de statut civil de droit commun

Article 1 er

L'allocation de reconnaissance prévue à l'article 6 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationales en faveur des Français rapatriés, dans sa rédaction issue de l'article 223 de la loi n° 2018- 1317 de finances pour 2019 du 28 décembre 2018, est versée aux supplétifs de statut civil de droit commun ayant déposé une première demande ou un renouvellement de demande entre le 5 février 2011 et le 20 décembre 2013, ayant obtenu une décision de refus non contestée dans les délais légaux et remplissant les conditions autres que celles du statut.

Pour la perception de cette allocation, ils ne peuvent bénéficier du versement que sous forme de la rente viagère mentionnée au 1° du II de l'article 6 de la loi précitée.

Article 2

La perte de recettes résultat pour l'État de la présente loi est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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