N°426

SENAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 15 juin 1999.

PROPOSITION DE LOI

tendant à modifier certaines dispositions de l'article 2 de la loi n° 79-1113 du 22 décembre 1979 relative à Mayotte afin de prévoir la consultation de la population de cette collectivité territoriale sur le choix de son statut définitif dans la République,

PRÉSENTÉE

Par MM. Marcel HENRY, Philippe ARNAUD, Denis BADRÉ, René BALLAYER, Michel BÉCOT, Mme Annick BOCANDÉ, MM. André BOHL, Marcel DENEUX, Rodolphe DÉSIRÉ, André DILIGENT, André DULAIT, Jean FAURE, Serge FRANCHIS, Yves FRÉVILLE, Rémi HERMENT, Claude HURIET, Jean-Jacques HYEST, Alain LAMBERT, Jean-Louis LORRAIN, Kléber MALÉCOT, André MAMAN, Louis MERCIER, Louis MOINARD, René MONORY, Philippe NOGRIX, Jean-Marie POIRIER, Victor REUX et Michel SOUPLET,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Collectivités territoriales. - Mayotte

EXPOSE DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

En application de la loi n° 75-1337 du 31 décembre 1975, relative aux conséquences de l'autodétermination des îles des Comores, la population de Mayotte consultée sur son appartenance à la République française a exprimé massivement son choix en faveur de la France.

Le scrutin d'autodétermination organisé le 8 février 1976 répondait aux conditions fixées pour une telle consultation par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 décembre 1975.

Une seconde consultation du 11 avril 1976 a fait apparaître la volonté des Mahorais de repousser le statut de territoire d'outre-mer pour accéder à celui de département d'outre- mer qu'ils réclamaient, en réalité, depuis 1958.

Répondant à ce voeu, un projet de loi portant « départementalisation » de Mayotte fut déposé par le Gouvernement en rnai 1976 mais ne vint pas en discussion et c'est en « collectivité territoriale » de la République que Mayotte fut érigée par la loi n° 76-1212 du 24 décembre 1976. Il est bien connu que le retrait du projet de loi est intervenu pour des raisons de politique étrangère et de coopération de la France avec les pays de la région.

La loi statutaire du 24 décembre 1976 a doté Mayotte d'un statut spécifique mais provisoire. En effet, le législateur de 1976, pour tenir le plus large compte des particularités économiques, sociales et culturelles locales, avait autorisé le Gouvernement à déterminer par voie d'ordonnances, le régime administratif et financier de la « collectivité territoriale » et à étendre avec toutes les adaptations nécessaires, les dispositions législatives qui lui seraient applicables.

Mais surtout, la loi du 24 décembre 1976 a également prévu, dès son article 1 er , que la population de Mayotte serait consultée dans un délai de trois ans sur le maintien du statut de « collectivité territoriale » ou sur la transformation de Mayotte en département d'outremer ou bien, éventuellement, sur l'adoption d'un statut différent.

La consultation n'a pas été organisée et pour cette raison, une loi n° 79-1113 du 22 décembre 1979 a fixé un nouveau délai de cinq ans à l'intérieur duquel la population serait consultée sur les mêmes options.

Cette prescription n'a pas non plus été respectée en 1984, alors qu'elle résultait, comme celle de 1976, de l'initiative du Gouvernement et de la volonté du législateur.

En d'autres termes, depuis bientôt vingt trois ans, Mayotte attend l'organisation de la consultation sur son statut définitif dans la République.

* *

*

Cette longue période d'incertitude statutaire et juridique, que la population mahoraise vit difficilement est pourtant marquée d'événements positifs qui ont entretenu l'espoir du respect des engagements et des promesses.

D'abord Mayotte a bénéficié en 1986 de plusieurs programmes de mise à niveau juridique, par voie d'ordonnances.

Le Gouvernement, en effet, a constamment affirmé que le choix du statut définitif supposait, d'abord, l'actualisation du régime juridique. Celle-ci s'est effectuée dans l'objectif d'étendre à Mayotte le droit commun, avec les adaptations requises par les spécificités locales.

Dans le même temps, les Mahorais ont reçu des plus hautes autorités de l'Etat, la promesse d'organiser « avant l'an 2000 » la consultation sur le choix du statut ; plusieurs ministres en charge de l'outremer ont confirmé l'engagement et entrepris la préparation de cette consultation.

Ainsi a été nommé par le Gouvernement un groupe de réflexion sur « l'avenir institutionnel de Mayotte », présidé par le préfet François Bonnette et complété par un groupe local, installé à Mayotte sous l'autorité du préfet, représentant du Gouvernement.

Le Rapport (Documentation française, 1998, Rapports officiels) remis en juin 1998 au ministre de l'outre-mer conclut en proposant « cinq voies susceptibles d'être envisagées » :

- un statut nouveau de collectivité territoriale à vocation départementale ;

- un statut de département d'outre-mer à qui seraient dévolues des compétences régionales ;

- un statut de département d'outre-mer avec création d'une collectivité régionale ;

- un statut de département d'outre-mer avec maintien de la collectivité territoriale ;

- un statut de territoire d'outre-mer.

Puis une mission « préparatoire à la consultation » composée de membres du cabinet du Premier ministre et du secrétaire d'Etat à l'outre-mer s'est rendue à Mayotte en décembre 1998. Cette mission, d'ailleurs interrompue, n'a pas eu, à ce jour, de suites connues.

Après une si longue attente marquée par un effort sans précédent de modernisation du droit applicable à Mayotte mais aussi par de multiples progrès économiques et sociaux, le temps est venu de respecter les engagements pris, en ouvrant à la « collectivité territoriale » de nouvelles perspectives institutionnelles.

Les Mahorais considèrent que « le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes » doit pouvoir également s'exercer en faveur de la République française.

L'adoption d'un statut stable, aux lieu et place du régime provisoire qui dure depuis vingt-trois ans, leur apparaît aussi comme une condition essentielle du développement durable de Mayotte.

Pour ces raisons, il vous est demandé de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le second alinéa de l'article 2 de la loi n° 79-1113 du 22 décembre 1979 relative à Mayotte est ainsi rédigé :

« Dans un délai de trois mois, à compter de la promulgation de la présente loi, et au plus tard le 31 décembre 1999, la population de Mayotte sera consultée, après avis du conseil général, sur le maintien du statut défini par la loi n° 76-1212 du 24 décembre 1976 ou sur la transformation de Mayotte en département d'outre-mer ou éventuellement sur l'adoption d'un statut différent. »

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