Question de M. DAUNAY Marcel (Ille-et-Vilaine - UC) publiée le 30/06/1994

M. Marcel Daunay demande à M. le ministre délégué aux affaires européennes si c'est à bon droit que la Commission européenne a décidé de poursuivre plusieurs pays dont la France, devant la Cour européenne de justice, au motif qu'elle maintient l'interdiction du travail de nuit pour les femmes. Il lui demande si une telle procédure ne lui semble pas regrettable puisque, quel que soit le contexte économique et social actuel, il est difficile d'envisager que le travail de nuit pour les femmes soit une mesure de progrès social.

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Transmise au ministère : Travail


Réponse du ministère : Travail publiée le 01/09/1994

Réponse. - Dans son arrêt Stoeckel du 25 juillet 1991, la Cour de justice des communautés européennes a jugé que les dispositions de l'article L. 213-1 du code du travail interdisant le travail de nuit des femmes dans l'industrie étaient contraires à l'article 5 de la directive européenne du 9 février 1976 relative à l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne les conditions de travail, l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles. Cette situation et la mise en demeure que la commission a adressée le 18 décembre 1991 à chacun des Etats concernés ont conduit la France (comme cinq autres pays de la CEE : Belgique, Italie, Espagne, Grèce, Portugal) à dénoncer la convention 89 de l'OIT en février 1992. Cette dénonciation est donc effective depuis février 1993, puisqu'elle prend effet un an après la déclaration de l'Etat auprès de l'OIT. Dans son arrêt Levy du 2 août 1993, la Cour a confirmé son point de vue en indiquant que le juge national doit laisser inappliquée toute disposition... " contraire à l'article 5 de la directive de 1976 " en précisant " sauf si l'application d'une telle décision est nécessaire pour assurer l'exécution par l'Etat membre concerné d'obligations résultant d'une convention conclue antérieurement à l'entrée en vigueur du traité CEE avec des Etats tiers ". Comme la France n'est plus liée par une convention à la directive 76/206/CE sur l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes en ce qui concerne le travail de nuit, ces arrêts ont pour conséquence que le juge national est tenu, lorsqu'il est saisi d'une affaire concernant le travail de nuit des femmes dans l'industrie, d'écarter la loi nationale au profit du respect de la directive européenne. Deux juridictions ont déjà statué dans ce sens : le tribunal de police d'Illkirch le 6 novembre 1991 (dans l'affaire qui a motivé le recours à la Cour de Justice des communautés européennes) et la Cour d'appel de Poitiers le 25 octobre 1991 (affaire Beyly c/Labo Jonchery).

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