Question de M. DILIGENT André (Nord - UC) publiée le 11/01/1996

M. André Diligent appelle l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur l'application de la loi no 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. L'article 11, dans son troisième alinéa, concerne la protection des fonctionnaires. Cet article fait état de l'obligation pour la collectivité publique non seulement de protéger les fonctionnaires contre les menaces, injures ou violences dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions mais aussi de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. Il prie M. le ministre de bien vouloir faire préciser les conditions dans lesquelles doit s'exercer cette réparation et s'il en existe un plafond. Il souhaite également connaître sa position sur les éventuels dérapages qu'une telle législation peut engendrer s'agissant de l'indemnisation des préjudices moraux.

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Réponse du ministère : Fonction publique publiée le 29/02/1996

Réponse. - Selon l'article 11, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, " la collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjucide qui en résulte ". Les agents publics bénéficient donc, en contrepartie de leurs obligations professionnelles, d'un droit à la protection, qui résulte de leur appartenance à la fonction publique. Le principe de la protection bénéficie aujourd'hui, selon la jurisprudence du Conseil d'Etat, à la quasi-totalité des agents publics, quelles que soient leur situation juridique, la collectivité qui les emploie ou la nature de leurs fonctions, dès lors que la qualité d'agent public leur est reconnue (CE, 1963, centre hospitalier de Besançon - CE, 1970, époux Martin - Ce, 1990, commune de Bain-de-Bretagne). La nature des atteintes susceptibles d'ouvrir le droit à protection résulte avant tout de la loi de 1983. Mais le législateur ne saurait avoir conféré un caractère exhaustif à cette énumération. C'est essentiellement au vu de leur objet qu'il convient de se placer pour apprécier ces atteintes. D'une façon générale, il convient de constater qu'il existe, à la charge de l'administration, une obligation de protection. La mise en oeuvre de la protection revêt pour l'administration un caractère impératif, fermement rappelé par la jurisprudence administrative (CE, 14 février 1975, Teitgen). En outre, le fait que les atteintes portées au fonctionnaire ont pu, par la suite, s'atténuer ou même avoir cessé au moment où est demandée la protection à l'administration n'est pas de nature à en justifier le refus (CE, 18 mars 1994, Rimasson). Le défaut de mise en oeuvre de cette protection engage la responsabilité de la collectivité publique. Il convient toutefois de noter que cette obligation de protection n'est pas sans limite. La première de ces limites résulte de l'arrêt Teitgen précité, qui pose le principe que l'administration peut refuser la protection pour des motifs d'intérêt général. La seconde résulte de la loi. La protection ne concerne que les menaces ou attaques subies par le fonctionnaire à l'occasion de ses fonctions et non celles qui découlent de sa vie privée. Il convient de préciser que la jurisprudence administrative est encore hésitante sur le point de savoir si l'agent a droit à une protection en cas de mise en examen (TA Bordeaux, 5 mars 1987, Proux - TA Besançon, 7 avril 1994). Il s'agit là d'un point particulier qui fait l'objet de réflexions d'un groupe d'études à la section du rapport et des études du Conseil d'Etat. L'obligation de protection se traduit, d'une part, par une obligation de prévention contre les atteintes et, d'autre part, par une obligation de réparation. La prévention contre les atteintes peut revêtir toutes les formes appropriées à la situation à laquelle il convient de répondre, dans le but de faire cesser les atteintes. La réparation du préjudice subi constitue le second volet de l'obligation de protection de l'administration vis-à-vis du fonctionnaire. Elle repose sur la nature du dommage allégué, dont la seule existence suffit à fonder le droit à indemnité. Il peut s'agir de dommages matériels aussi bien que moraux, de dommages aux personnes comme aux biens (CE, 16 octobre 1981, René Guillaume et Germanaud - CE, 2 octobre 1964, époux Bouchon). La réparation prévue par la loi est essentiellement de type indemnitaire : - En cas de dommages matériels, l'indemnisation peut être immédiate, dès lors que les pièces justificatives ont été produites, sans qu'il soit nécessaire de savoir si les auteurs de l'attaque ont été identifiés ou non. Toutefois, l'administration est fondée à récupérer les sommes qu'elle aura versées à son agent. Conformément à l'alinéa 4 de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, la collectivité publique est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques, la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé. Elle dispose en outre d'une action directe qu'elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale. - En cas de dommages corporels et de préjudices personnels (pretium doloris, troubles dans les conditions d'existence, douleur morale, préjudice esthétique, préjudice d'agrément), si l'auteur de l'attaque est connu et s'avère solvable, la fixation des diverses indemnisations est effectuée par le juge sur action directe de la victime contre l'auteur de l'attaque, étant entendu que le fonctionnaire peut obtenir le remboursement de ses frais de justice et d'avocat. Si toutefois l'auteur du préjudice n'a pu être identifié ou s'avère insolvable ou si l'intéressé fait une demande de dédommagement ancitipée auprès de l'administration, la règle dite du forfait de pension ou d'allocation temporaire d'invalidité est réputée réparer forfaitairement tous les dommages corporels et les préjudices personnels, conformément aux principes généraux dégagés par la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE, 16 octobre 1981, René Guillaume et Germanaud). La victime a ainsi le droit à une rente viagère d'invalidité dont le montant correspond en principe au montant du dernier traitement multiplié par le pourcentage d'invalidité. Le caractère exclusif du forfait de pension interdit que le préjudice causé à un fonctionnaire fasse l'objet d'une indemnisation complémentaire. Il n'apparaît pas que le mécanisme de protection et les modalités de réparation du préjudice soient source de " dérapages ". ; dommages matériels, l'indemnisation peut être immédiate, dès lors que les pièces justificatives ont été produites, sans qu'il soit nécessaire de savoir si les auteurs de l'attaque ont été identifiés ou non. Toutefois, l'administration est fondée à récupérer les sommes qu'elle aura versées à son agent. Conformément à l'alinéa 4 de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, la collectivité publique est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques, la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé. Elle dispose en outre d'une action directe qu'elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale. - En cas de dommages corporels et de préjudices personnels (pretium doloris, troubles dans les conditions d'existence, douleur morale, préjudice esthétique, préjudice d'agrément), si l'auteur de l'attaque est connu et s'avère solvable, la fixation des diverses indemnisations est effectuée par le juge sur action directe de la victime contre l'auteur de l'attaque, étant entendu que le fonctionnaire peut obtenir le remboursement de ses frais de justice et d'avocat. Si toutefois l'auteur du préjudice n'a pu être identifié ou s'avère insolvable ou si l'intéressé fait une demande de dédommagement ancitipée auprès de l'administration, la règle dite du forfait de pension ou d'allocation temporaire d'invalidité est réputée réparer forfaitairement tous les dommages corporels et les préjudices personnels, conformément aux principes généraux dégagés par la jurisprudence du Conseil d'Etat (CE, 16 octobre 1981, René Guillaume et Germanaud). La victime a ainsi le droit à une rente viagère d'invalidité dont le montant correspond en principe au montant du dernier traitement multiplié par le pourcentage d'invalidité. Le caractère exclusif du forfait de pension interdit que le préjudice causé à un fonctionnaire fasse l'objet d'une indemnisation complémentaire. Il n'apparaît pas que le mécanisme de protection et les modalités de réparation du préjudice soient source de " dérapages ".

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