Question de Mme DUSSEAU Joëlle (Gironde - RDSE) publiée le 08/02/1996

Mme Joëlle Dusseau souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la culture sur une éventuelle remise en cause de la gratuité du prêt des livres au sein des bibliothèques relevant du service public. Il semblerait que le ministère de la culture n'exclut pas un rétablissement de l'application de la loi de 1957 qui pose le principe d'un droit de prêt en faveur des auteurs, idée reprise par une directive européenne de novembre 1992. Or s'il est juste que les auteurs soient protégés contre certains abus, et notamment le " photocopillage ", il n'en est pas moins indispensable, dans le cadre du droit de tous d'accéder à la culture, de maintenir la règle de la gratuité des prêts. Tant les emprunteurs que les collectivités locales ne sauraient en effet supporter la charge financière supplémentaire que ne manquerait pas d'induire, sous prétexte de préserver les intérêts des auteurs et des éditeurs, le désengagement de l'Etat de l'une de ses plus ardentes obligations : assurer l'accès de tous à la culture. Il serait tout à fait intolérable que notre pays, dont le crédit à l'extérieur est largement bâti sur la place qu'y a toujours occupé la culture sous toutes ses formes et notamment livresque, revienne sur cet acquis culturel, alors même que le ministère de la culture instaure la gratuité du musée du Louvre le dimanche. Elle lui demande donc de bien vouloir lui préciser quelle va être l'attitude du ministère de la culture face à cette éventuelle remise en cause de la gratuité du prêt de livres.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 14/03/1996

Réponse. - Le code de la propriété intellectuelle reconnaît juridiquement aux auteurs le droit de céder séparément autant de droits de reproduction qu'il y a de modes d'utilisation d'un support, droit généralement dénommé droit de destination. La loi française prévoit donc bien un droit de prêt pour toutes les oeuvres protégées même si ce droit n'est pas toujours revendiqué par les créateurs ou leurs ayants droit. De ce fait, notre législation s'inscrit parfaitement dans le cadre normatif communautaire défini par la directive européenne adoptée le 19 novembre 1992. La mise en oeuvre de ce droit, notamment dans le domaine du livre, supposerait un accord entre ayants droit et organismes de prêt. A cet égard, une étude à laquelle l'ensemble de l'interprofession a été associée sur la place des bibliothèques dans l'économie du livre et plus particulièrement sur l'articulation entre les achats et les emprunts de livres a apporté dans le courant de l'année 1994 une première contribution à la réflexion générale qui doit aujourd'hui être poursuivie. En tout état de cause, le Gouvernement est conscient que le développement du livre et de la lecture repose sur un équilibre fragile entre un réseau de librairies de qualité, un réseau de bibliothèques conservant tous les moyens d'offrir des fonds riches, variés et facilement accessibles, notamment aux publics les plus défavorisés, et une nécessaire protection des auteurs et de leurs ayants droit. Quant aux éventuelles modalités de mise en oeuvre du droit de prêt, le ministère de la culture entend continuer le dialogue et la concertation avec les professionnels et les collectivités territoriales en liaison avec les autres départements ministériels concernés, et veillera à ce qu'aucune initiative ou mesure à venir n'ait pour conséquence de compromettre en quoi que ce soit l'essor de la lecture publique dans notre pays, qui constitue pour lui une priorité de toute action culturelle. La France devra en tout état de cause rendre compte de sa politique devant la commission, chargée d'établir un rapport sur le prêt public dans la communauté, en collaboration avec les Etats membres avant le 1er juillet 1997.

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