Question de M. BONY Marcel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 29/02/1996

M. Marcel Bony attire l'attention de M. le ministre du travail et des affaires sociales sur le licenciement en cas de maladie. Lorsque la maladie entraîne des absences répétées du salarié et à condition que celles-ci perturbent le bon fonctionnement de l'entreprise, l'employeur a le droit de procéder au licenciement. Mais il existe des licenciements sans cause réelle et sérieuse, notion développée par la doctrine et la jurisprudence. En pareille circonstance, les juges allouent des dommages et intérêts au salarié licencié mais cette somme, déterminée à la base par la loi, est bien souvent sans commune mesure avec le préjudice subi. Compte tenu du fait que le licencié pour maladie est spécialement vulnérable dans le monde du travail et qu'il a peu de chances de retrouver un emploi à partir de 40 ans, il lui demande s'il ne lui paraît pas envisageable, lorsqu'il s'agit d'un licenciement abusif, de modifier la loi afin qu'elle prévoie la réintégration de l'intéressé au sein de l'entreprise

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Réponse du ministère : Travail publiée le 13/06/1996

Réponse. - L'article L.122-45 du code du travail prévoit qu'aucune personne ne peut être licenciée, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail, en raison de son état de santé ou de son handicap. Le licenciement intervenu en violation de ces dispositions est nul. De plus, les articles 225-1 à 225-4 du nouveau code pénal permettent de sanctionner tout licenciement discriminatoire fondé sur l'état de santé ou le handicap du salarié, dès lors que l'inaptitude n'est pas constatée par la médecine du travail. Les sanctions pénales prévues sont de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 F d'amende. La maladie entraîne une simple suspension du contrat de travail, à l'issue de laquelle le salarié reprend normalement son activité. Toutefois, dans certaines circonstances, l'employeur peut être tenu, pour un motif extérieur à la maladie, en particulier en cas de suppression d'emploi consécutive à des difficultés économiques, de procéder au licenciement du salarié. Ce licenciement n'est alors licite qu'autant qu'il repose, comme tout licenciement, sur une cause réelle et sérieuse. Cependant, une absence prolongée ou des absences fréquentes et répétées pour maladie peuvent, par les perturbations qu'elles causent à la bonne marche de l'entreprise et par la nécessité de remplacement du salarié malade, justifier la rupture du contrat de travail. Dans ce cas et sous certaines conditions, la jurisprudence admet que le licenciement du salarié est justifié. L'appréciation de l'absolue nécessité de remplacer le salarié s'effectue au cas par cas par les tribunaux, en fonction de plusieurs critères tels que l'emploi et la qualification du salarié (Cass. Soc. 6 mars 1986 et 27 avril 1988), la taille et la nature de l'activité de l'entreprise (Cass. Soc 8 décembre 1983) ou encore la durée de l'absence (Cass. Soc 1er juin 1980 et 30 juin 1988). En tout état de cause, lorsque la convention collective applicable prévoit un délai de garantie d'emploi en cas d'absence pour raisons médicales, le licenciement du salarié ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai. Par ailleurs, le licenciement n'est justifié que si le remplacement du salarié ne peut être effectué que par l'embauche d'un nouveau salarié sous contrat à durée indéterminée (Cass. Soc 13 mars 1991). Par ailleurs, il convient de souligner qu'aux termes de l'article L.122-14-4 du code du travail, si le licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le tribunal peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise avec maintien de ses avantages acquis. Ainsi, il appartient au juge, en fonction de chaque cas d'espèce, d'apprécier l'opportunité d'une éventuelle réintégration en tenant compte notamment des difficultés de reclassement du salarié licencié. Si le juge octroie au salarié une indemnité, celle-ci ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, s'agissant d'un salarié ayant au moins deux ans d'anc ienneté dans une entreprise de plus de dix salariés. Cette indemnité s'ajoute à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. Ces dispositions législatives et cette jurisprudence assurent aux salariés absents pour raisons de santé une réelle protection, tout en tenant compte des nécessités de fonctionnement des entreprises. Il n'apparaît pas opportun de remettre en cause cet équilibre par une modification législative.

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