Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 09/10/1996

Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme sur les conséquences dramatiques qu'aurait la délocalisation des services centraux de la SNCF, envisagée par la direction, pour Paris mais aussi pour l'ensemble de l'entreprise. Cette délocalisation irait contre les intérêts des usagers et des cheminots qui ont montré leur attachement à ce grand service public. Elle irait également à l'encontre des intérêts de Paris qui verrait une fois de plus un service d'intérêt national et des milliers d'emplois quitter la ville. Alors que le Gouvernement s'était engagé à geler toutes les opérations projetées par la SNCF, pendant la réécriture du plan, cette décision est inacceptable. Pourtant, les salariés et leurs organisations syndicales sont porteurs d'autres choix. Il faut les écouter. Par ailleurs, le Conseil de Paris, sur proposition des élus communistes, a voté à l'unanimité le voeu que les activités parisiennes de la SNCF soient maintenues à Paris. Pour toutes ces raisons, elle lui demande ce qu'il compte faire pour s'opposer à cette délocalisation et garantir l'emploi et le développement du service public à Paris ?

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Réponse du ministère : Logement publiée le 30/10/1996

Réponse apportée en séance publique le 29/10/1996

Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 20 septembre 1996, l'actuel
président de la SNCF, M. Louis Gallois, a déclaré vouloir délocaliser des milliers d'emplois sur les 10 800 qui existent au
sein des services centraux parisiens. Cela a suscité une opposition déterminée de la part des salariés, des Parisiens et de
leurs élus.
Sur proposition des élus communistes, le Conseil de Paris a adopté, à la quasi-unanimité, le voeu que les activités
parisiennes de la SNCF et les emplois soient maintenus à Paris.
Cette démarche a déjà eu pour résultat qu'un engagement a été pris, selon lequel le siège général de la SNCF resterait à
Paris, ce qui représente 600 emplois. Mais la question reste posée pour l'ensemble des services parisiens de la SNCF.
Le projet de délocalisation d'une partie des services centraux de la SNCF n'est pas nouveau ! Le prédécesseur de M.
Gallois avait émis la même idée en avril 1996.
Aujourd'hui, au mépris des engagements pris à la suite du mouvement de novembre-décembre de l'année dernière, la
direction de la SNCF et le Gouvernement continuent à mettre en cause l'unité de l'entreprise.
Cette délocalisation des services centraux de la SNCF interviendrait alors qu'une grande majorité de Français se
prononcent pour l'unicité de l'entreprise et refusent sa privatisation.
Elle aurait des conséquences néfastes pour la capitale, qui a déjà subi tant de délocalisations, avec pour conséquence des
suppressions d'emplois à Paris et fort peu de créations d'emplois en province, sans compter les gâchis humains et
financiers.
La vie sociale et économique des quartiers concernés se verrait profondément modifiée, les recettes fiscales de Paris s'en
trouveraient amoindries.
Les salariés et leurs représentants sont porteurs d'autres choix quant à l'avenir de la SNCF et de sa mission de service
public. Il faudrait les écouter !
Dans l'intérêt de la capitale, des salariés et des usagers, je vous demande ce que compte faire le Gouvernement pour
répondre aux voeux des élus parisiens, qui refusent la délocalisation des emplois de la SNCF, et pour que l'Etat montre
l'exemple en arrêtant la suppression des emplois publics.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol, ministre délégué au logement. Madame le sénateur, M. Pons aurait souhaité vous
répondre personnellement, mais il est retenu par une réunion concernant le TGV-Est.
La SNCF élabore actuellement un projet industriel qui lui permettra de répondre aux besoins de sa clientèle. C'est dans
ce cadre que s'inscrit la reconfiguration des services centraux de l'entreprise.
En aucun cas cette reconfiguration ne doit être assimilée à une délocalisation. Il s'agit en fait, pour la SNCF, de se doter
d'un véritable siège social, avec les différentes fonctions qui sont, dans toute entreprise, celles du siège : pilotage de
l'entreprise en matière de définition des stratégies, conduite des politiques commerciale, financière et de gestion.
Il appartiendra au président de la SNCF d'étudier de quelle manière les autres services, actuellement regroupés au siège
de la SNCF, seront redéployés sur les directions opérationnelles, permettant ainsi une mise en oeuvre efficace des actions
définies au niveau du siège.
Le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme, M. Bernard Pons, a demandé à la SNCF que
cette opération soit menée, naturellement, en totale concertation avec le personnel, ses instances représentatives et les
collectivités territoriales concernées, et Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat aux transports, suit de près ce dossier.
Je vous rassure donc, madame le sénateur : en tout état de cause, il est de l'intérêt même de la SNCF que son siège
social, sous sa nouvelle configuration, reste à Paris.
J'ajoute que M. Bernard Pons est particulièrement attentif à ce problème, et en sa qualité de ministre et en sa qualité d'élu
parisien.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais je constate que, pour l'instant, il n'y a
pas d'engagement précis. Vous comprendrez que nous soyons tout à fait craintifs quant au résultat, les suppressions
d'emplois étant aujourd'hui monnaie courante.
L'entreprise, dites-vous, doit définir un projet industriel répondant à la demande des usagers - pour ma part, je préfère
parler d'usagers plutôt que de clients - mais je constate, moi, que les usagers de Paris et de province veulent plus de
présence humaine dans les gares, plus de sécurité, plus de régularité, des tarifs plus simples et moins élevés.
Au lieu de répondre immédiatement à ces besoins qui s'expriment en créant partout où c'est nécessaire le nombre de
postes de titulaires correspondant, on évoque la « nécessité » d'opérer d'abord et avant tout des suppressions d'emplois
dans les services centraux. On tente ainsi d'opposer entre eux les différentes catégories de personnel.
L'expérience nous l'a montré, déshabiller Pierre pour habiller Paul, c'est refuser de répondre aux exigences exprimées par
les usagers, exigences qui recoupent largement les propositions formulées par les cheminots depuis des années. A notre
avis, il n'y a pas d'opposition entre l'attente des usagers et celle des cheminots.
Le terrain de cette délocalisation a été préparé par des années de restructurations-destructurations et par un
cloisonnement chaque fois renforcé.
Certes, comme vous le dites - et je veux bien en prendre acte - des directions centrales sont indispensables, mais elles
doivent exister en complémentarité avec une véritable décentralisation pour répondre aux besoins des personnels et des
usagers. Nous attendons que le Gouvernement s'engage précisément en la matière.
J'ajoute que nous nous prononçons également contre la vente des locaux du siège de l'entreprise. Il faudrait, au contraire,
que les locaux ainsi libérés restent dans le patrimoine de la SNCF et servent aux autres directions nationales au lieu de
servir une fois de plus, comme, hélas ! nous en avons l'expérience, à une opération financière sur le dos des contribuables
!

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