Question de M. BONY Marcel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 03/07/1997

Les caisses d'épargne occupent une position singulière au sein des banques. Etablissements privés à but non lucratif, une grande pression pousse aujourd'hui à leur métamorphose. Cette pression est exercée d'abord par les banquiers classiques sous convention AFB (Association française des banques), par leurs relais au sein des pouvoirs publics, et enfin par les dirigeants des caisses d'épargne eux-mêmes. Toutes ces velléités ont pour point commun d'inquiéter grandement le personnel dans la mesure où le but non lucratif des caisses d'épargne serait remis en cause, avec pour conséquence une banalisation du livret A et un gommage du rôle social de la banque. Aussi M. Marcel Bony pose-t-il à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie la question suivante : face au défi de l'avenir, est-il en mesure de le rassurer sur les orientations prises par le Gouvernement afin en premier lieu, de doter l'institution des caisses d'épargne de tous les moyens nécessaires pour affronter, avec succès, la nouvelle situation concurrentielle européenne qui naîtra de la création de l'Euro ; en second lieu, de permettre aux déposants de mieux participer au contrôle de leur caisse dans l'esprit de la tradition mutualiste française ; en troisième lieu de concilier les objectifs d'intérêt général des caisses et leur nécessaire rentabilité ; en quatrième lieu de pérenniser les fonds propres au sein des caisses d'épargne en les employant dans un champ de missions d'intérêts général élargi ; enfin, de dynamiser l'intervention des caisses d'épargne dans la relance de l'aménagement du territoire et dans le développement économique local, en partenariat avec les collectivités locales ?

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Réponse du ministère : Économie publiée le 04/02/1999

Réponse. - Les caisses d'épargne occupent une place originale et précieuse dans le paysage bancaire français. Elles constituent un grand réseau de l'économie sociale, enraciné dans la nation et cher aux Français qui sont près de trente millions à être devenus leurs clients. Fortes de leur histoire, les caisses d'épargne ont su se développer et jouer un rôle essentiel dans la protection de l'épargne populaire et le financement du logement social, au service de l'intérêt général. Elles se trouvent aujourd'hui à un tournant de leur histoire. L'enjeu, c'est de leur permettre de jouer tout leur rôle dans un secteur bancaire en pleine évolution. Dans ce cadre, les caisses d'épargne possèdent d'ores et déjà de nombreux atouts (dynamisme commercial, capacité de distribution, densité du réseau, etc.). Pour tirer pleinement parti des évolutions à venir, elles doivent néanmoins s'adapter et clarifier leur statut. Les handicaps auxquels elles se trouvent confrontés, et notamment leur isolement statutaire, entravent en effet leur développement et les empêchent de remplir pleinement leur rôle d'intérêt général. C'est pourquoi le conseil des ministres a adopté le 2 décembre dernier un projet de loi de modernisation des caisses d'épargne. Ce projet a fait l'objet d'une très large concertation : mission de six mois menée par M. Raymond Douyère, député de la Sarthe, de novembre 1997 à avril 1998 (près de trois cents personnes de tous horizons rencontrés : salariés et dirigeants des caisses d'épargne, organisations syndicales, élus locaux, personnalités qualifiées, etc.) ; concertation avec l'ensemble des acteurs du réseau de mai à novembre 1998. Ce projet de loi reconnaît et définit, pour la première fois de leur histoire, les missions d'intérêt général des caisses d'épargne : le Gouvernement se refuse à toute banalisation du livret A ; une partie de leur résultat sera affectée à des dépenses d'intérêt local et social ; le produit de cession du capital social sera affecté au fonds de réserve pour les retraites qui, par la constitution d'une réserve financière, participe à l'équilibre à long terme et à la sauvegarde des régimes de retraite par répartition. Il dote les caisses d'épargne d'un statut coopératif, porteur des valeurs de solidarité et de participation, qui permet de concilier responsabilité individuelle et solidarité collective et qui leur permet de préserver leur spécificité. Il garantit leur solidité financière, qui restera très largement supérieure à celle des autres banques françaises : le ratio de solvabilité du groupe sera, à l'issue de la réforme, supérieur d'environ 50 % à celui de la moyenne des banques françaises. Il ne comporte enfin aucune disposition sur leur système de retraite, dont l'évolution relève de la négociation entre les partenaires sociaux. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie veillera toutefois à ce que la négociation en cours assure le respect des droits des salariés. Au total, ce projet de loi permet de donner aux caisses d'épargne une légitimité nouvelle fondée sur un vaste sociétariat, de réaffirmer leur vocation d'établissement de proximité et de trouver un nouvel élan au bénéfice de la solidarité.

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