Question de M. RAFFARIN Jean-Pierre (Vienne - RI) publiée le 12/03/1998

M. Jean-Pierre Raffarin attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les demandes pressantes du syndicat national de l'édition de voir appliquer aux bibliothèques publiques " un droit de prêt " prévu par la directive européenne 92/100/CEE du 19 novembre 1992. Cette directive européenne qui vise globalement la protection des droits d'auteur prévoit que " les Etats membres peuvent exempter certains établissements du paiement de ce droit ". La France n'a pas appliqué ce droit de prêt aux bibliothèques publiques, dans la mesure où le Centre national du livre, créé en 1946, aide les auteurs et les éditeurs depuis 1976. Les bibliothèques départementales et municipales en France connaissent un développement très récent, et toutes les communes ne bénéficient pas encore d'un service de lecture et de documentation. L'institution de ce " droit de prêt ", outre la complexité du calcul des recettes sur les prêts d'ouvrages et les lourdeurs de redistribution aux auteurs concernés, pèserait évidemment sur les finances locales. Une enquête effectuée en 1995 par l'Observatoire de l'économie du livre, à la demande de la direction du livre et de la lecture, montre que les emprunts de livres ne nuisent pas à l'achat en librairie. Il lui rappelle également que dans nombre de petites communes qui constituent le réseau des bibliothèques de prêts (BDP) il n'y a souvent aucune librairie ; la bibliothèque locale et le bibliobus y assurent seuls la présence du livre. Aussi, il lui demande quelle position le Gouvernement envisage de prendre pour mettre fin à la menace qui pèse sur le bon développement de la lecture publique et des bibliothèques.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 02/04/1998

Réponse. - La directive européenne du 19 novembre 1992 a reconnu le droit exclusif pour un auteur, un artiste-interprète, un producteur de phonogramme, ou un producteur d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, d'autoriser ou d'interdire le prêt de son oeuvre et de percevoir, le cas échéant, une rémunération au titre de cette utilisation, le prêt n'englobant pas au sens de ce texte la mise à disposition de documents à des fins de consultation sur place. Sous la forme du droit de destination qui permet aux ayants droit de céder autant de droits qu'il y a de modes d'utilisation d'un support d'information, le droit français de la propriété intellectuelle s'est avéré être sur ce point d'ores et déjà en pleine conformité avec la directive européenne. Si l'existence et la légitimité du droit de prêt ne sont pas contestables sur le plan juridique, il n'en est pas moins vrai que la question de son application par l'ensemble des organismes de prêt, et particulièrement les bibliothèques publiques, est demeurée entière. Quoi qu'il en soit, l'application du droit de prêt ne saurait en aucun cas, dans l'esprit du Gouvernement, freiner l'essor de la lecture publique, constamment encouragée par l'Etat, ni faire obstacle à l'action que mènent les bibliothèques pour un égal accès de tous au livre. Ce souci doit d'autant plus prévaloir que les études menées par le ministère chargé de la culture, en association avec les organismes représentatifs des auteurs, des éditeurs, des libraires et des bibliothécaires, n'ont pas fait apparaître que l'emprunt en bibliothèque concurrence ou décourage de manière significative l'achat de livres en librairie. Attentif aux souhaits des ayants droit et aux préoccupations des libraires comme aux enjeux de lecture publique portés par les élus et les professionnels des bibliothèques, le Gouvernement a choisi de conditionner l'examen des modalités d'application du droit de prêt à un consensus entre les uns et les autres. En vue de favoriser ce consensus et de permettre une étude sereine et approfondie de la question du droit de prêt en bibliothèque, le ministère de la culture et de la communication vient de confier à M. Jean-Marie Borzeix une mission de réflexion et de concertation, dont les conclusions devraient être connues d'ici à la fin du premier semestre.

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