Question de M. HURIET Claude (Meurthe-et-Moselle - UC) publiée le 19/03/1998

Regrettant la décision de l'Union européenne de ne pas soutenir de résolution sur la situation des droits de l'homme en Chine lors de la réunion, en mars, à Genève, de la commission des droits de l'homme des Nations unies, M. Claude Huriet appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la nature exacte des résultats du " dialogue critique " qui lui est préférée. Lors d'une réponse à une précédente question écrite sur un thème proche (no 4957, Journal officiel, Débats parlementaires-Sénat, du 12 février 1998), il affirme que : " le maintien d'un dialogue sur le Tibet entre la Chine et les pays occidentaux permet d'obtenir des résultats concrets plus directs... ". A Genève, les Européens, s'alignant sur la France, ont jugé également que le dialogue engagé avec Pékin avait déjà produit suffisamment de " résultats encourageants ". C'est la raison pour laquelle il lui demande de vouloir bien lui faire connaître les résultats concrets et les avancées patentes dans le domaine des droits de l'homme, tels qu'ils ont pu, par exemple, être recensés au cours du séminaire euro-chinois sur les droits de l'homme des 23 et 24 février à Pékin. Il note pour sa part que M. Wei Jingsheng, dont la libération est abusivement comptabilisée au titre de ces avancées (il s'agissait d'une expulsion pour raison médicale, tandis que lui-même est toujours considéré par Pékin comme un prisonnier dont la condamnation demeure en vigueur), met en garde régulièrement les occidentaux contre les excès d'une vision trop idéaliste de la Chine actuelle en matière de droits de l'homme et les appelle au contraire à une vigilance accrue.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 04/06/1998

Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu attirer l'attention du ministre sur les résultats concrets et les avancées patentes que le gouvernement français et ses partenaires européens ont obtenus dans le cadre du dialogue constructif mené avec les autorités chinoises. Comme l'honorable parlementaire le sait, ce dialogue a été initié en janvier 1995, avant d'être interrompu en 1996, la Chine refusant de poursuivre un dialogue constructif alors qu'elle était mise en accusation à la Commission des droits de l'homme à Genève. Le dialogue a pu reprendre en octobre 1997, l'Union européenne ayant alors décidé de suspendre le dépôt d'une résolution sur la Chine à la Commission des droits de l'homme des Nations unies, en contrepartie d'un dialogue euro-chinois substantiel et fréquent. Trois sessions se sont tenues depuis lors : la première, à Luxembourg les 23 et 24 octobre 1997, la seconde, les 1er et 2 décembre 1997, et la troisième, les 23 et 24 février 1998. Une quatrième est prévue à Londres les 20 et 21 mai. Il convient de signaler que ce dialogue euro-chinois n'est pas exclusif des interventions bilatérales de chacun des Etats membres de l'Union. Ainsi, depuis le début de l'année, la France a eu l'occasion d'échanger des vues avec les autorités chinoises sur la question des droits de l'homme à plusieurs reprises : lors de la visite du ministre des affaires étrangères à Pékin en janvier, lors de la visite officielle en France du Premier ministre chinois, M. Zhu Rongji, en avril. Le directeur des affaires juridiques du ministère des affaires étrangères a également effectué une mission sur ce sujet en février à Pékin. Cet ensemble d'actions témoigne, d'une part, de la vigilance des Européens en général et de la France en particulier à propos de l'évolution de la situation des droits de l'homme en Chine, mais aussi de la disponibilité des autorités chinoises à se prêter à des échanges de vues sur cette question sensible. S'agissant des résultats concrets de ce dialogue qui ont motivé la décision des ministres de l'Union européenne de ne pas présenter de résolution sur la Chine à la Commission des droits de l'homme en 1998, le Gouvernement français constate que la Chine a fait des gestes significatifs sur les sujets de préoccupation exprimés par les Quinze : libération de prisonniers d'opinion. Les autorités chinoises ont procédé à la libération anticipée, pour raisons médicales, des deux principaux détenus politiques, M. Wei Jinsheng, le 17 novembre 1997, et M. Wang Dan, le 19 avril 1998. Quelles que soient les critiques exprimées sur la nature de cet élargissement, il demeure incontestable que la libération anticipée pour raisons médicales de ces deux personnalités constitue une avancée patente. Adhésion aux instruments internationaux de protection des droits de l'homme : La Chine a signé en octobre 1997 le pacte des Nations unies relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Comme elle s'y était engagée, elle procède depuis à l'examen sérieux de la traduction en droit interne de ce pacte afin d'aboutir à une ratification parlementaire qui aura lieu d'ici à la fin de l'année. La Chine a également annoncé en février 1998 son intention de signer le pacte des Nations unies relatif aux droits civils et politiques. Cette signature devrait également intervenir d'ici à la fin de l'année. Conditions de détention : la Chine a, depuis l'automne dernier, multiplié les contacts avec les institutions internationales intéressées par l'amélioration des conditions de détention. Ainsi, le groupe de travail sur la détention administrative de la Commission des droits de l'homme des Nations unies a pu effectuer, en octobre 1997, une mission sur le terrain dont les conclusions, rendues publiques en avril 1998, font apparaître une appréciation positive. De même, les autorités chinoises sont engagées dans un dialogue régulier avec le Comité international de la Croix-Rouge, les discussions portant sur l'accès aux prisonniers. Invitation en Chine du haut-commissaire pour les droits de l'homme : Mme Robinson a été officiellement invitée à effectuer une mission d'une semaine en Chine en septembre 1998. Ce sera la première fois qu'un haut-commissaire effectuera une telle visite. Questions religieuses : la Chine a accueilli en février 1998 une délégation de personnalités religieuses américaines qui a pu rencontrer les différentes communautés religieuses en Chine, y compris au Tibet. Une délégation de la troïka des ambassadeurs de l'Union européenne résidant en Chine s'est également rendue du 1er au 10 mai au Tibet. Le ministre des affaires étrangères autrichien, qui tiendra la présidence de l'Union européenne au second semestre 1998, a pu également effectuer un séjour du 5 au 10 mars au Tibet. Enfin, lors de la réunion euro-chinoise du 23 février à Pékin, les questions relatives au Tibet ont fait l'objet d'un échange de vues approfondi au cours duquel les préoccupations européennes ont été clairement exposées aux responsables chinois. Coopération en matière de droits de l'homme : lors de la réunion euro-chinoise de décembre 1997, les deux parties ont décidé de mener une série d'actions de coopération visant à favoriser le développement des droits de l'homme en Chine, tant en ce qui concerne les drois économiques et sociaux que les droits civils et politiques. Sur ce dernier point, deux actions méritent d'être relevées. La première consiste en l'assistance de l'Union européenne pour l'organisation des élections directes au niveau des villages. La seconde porte sur la tenue de séminaires réguliers associant professions juridiques et judiciaires des deux parties. Cet ensemble de faits illustre à la fois la volonté des autorités chinoises à établir avec l'Union européenne une relation de confiance et de compréhension mutuelle dans un domaine où les approches respectives sont, à l'évidence, différentes. Nous espérons que cette relation permettra de déboucher sur davantage de réalisations concrètes menées en commun, en vue de favoriser un meilleur respect des droits de l'homme en Chine.

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