Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 09/07/1998

M. Nicolas About attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le faible développement, dans notre pays, du travail en temps partagé. Cette formule originale, qui consiste pour un salarié à exercer une activité dans plusieurs entreprises à la fois, présente pourtant de nombreux avantages : elle permet notamment à des cadres ou à des techniciens au chômage de retrouver progressivement une activité, en vendant leurs compétences à différentes PME-PMI qui sont à la recherche de personnel qualifié, mais qui n'ont pas toujours les moyens d'embaucher un travailleur à temps plein. Le développement du travail en temps partagé se heurte actuellement à la complexité des textes réglementaires du code du travail qui sont pour l'essentiel conçus sur le modèle du contrat de travail unique. Lorsqu'un salarié travaille dans plusieurs entreprises relevant de secteurs différents, il est contraint de cotiser à plusieurs caisses de retraite distinctes. Son employeur principal doit payer l'ensemble des charges patronales, puis se faire rembourser auprès des autres entreprises qui l'emploient. Cette lourdeur administrative n'incite guère les PME à se lancer dans l'aventure du multisalariat. De même, elle place le salarié dans une situation inconfortable. Si ce dernier perd l'un de ses emplois partiels, il ne pourra toucher d'indemnités de chômage qu'à condition de renoncer à tous ses autres emplois. Faute de statut juridique précis, ces multisalariés sont contraints de se regrouper au sein d'associations intermédiaires ou de sociétés de partage aux contours flous, ce qui ne favorise guère leur reconnaissance par les entreprises. Alors que la loi sur la réduction du temps de travail a délibérément limité le recours au temps partiel dans les entreprises, aucune disposition n'a été prévue par le Gouvernement pour encourager le développement du travail en temps partagé. Il lui demande par conséquent les mesures qu'elle entend prendre pour promouvoir cette formule de travail et accorder aux multisalariés un statut juridique précis. Il lui demande notamment si l'on ne pourrait pas s'inspirer du dispositif dont bénéficient déjà les voyageurs, représentants, placiers (VRP), pour permettre à ces salariés de verser leurs cotisations sociales dans une caisse unique et de se doter d'une convention collective spécifique.

- page 2199


Réponse du ministère : Emploi publiée le 10/12/1998

Réponse. - L'honorable parlementaire appelle l'attention du ministre de l'emploi et de la solidarité sur la nécessité d'adapter la législation du travail au statut spécifique des salariés à employeurs multiples. La situation des " pluriactifs " est, en effet, un sujet de réflexion d'autant plus important qu'il s'agit de l'une des formes de partage du travail qui peut contribuer au développement d'emplois stables, dans un cadre adapté à la situation des PME. En ce qui concerne le droit du travail, l'instauration d'un statut du pluriactif ne paraît pas toutefois souhaitable. En effet, si des modifications du droit existant s'avèrent nécessaires, dans la mesure où il a été conçu pour régir la situation classique de salariés se consacrant à une activité professionnelle unique, le Gouvernement réfléchit, à ce stade, à des mesures visant à adapter à la pluriactivité certaines dispositions du code du travail ayant trait notamment aux congés payés, aux heures complémentaires et à la médecine du travail plutôt que de créer un statut à part, dont l'expérience démontre qu'il ne pourrait qu'être à l'origine de rigidités et de complexités incompatibles avec la situation même de ces salariés. Il convient de souligner que, pour répondre à ce besoin, le législateur a institué par la loi nº 85-772 du 25 juillet 1985, la formule du groupement d'employeurs. Le groupement d'employeurs a pour objet d'embaucher et de mettre à la disposition des entreprises ou employeurs adhérents des salariés liés au groupement par un contrat de travail. Ce dispositif présente l'avantage, pour le salarié de n'avoir qu'un seul employeur - le groupement - auquel il est lié par un contrat de travail unique et, pour les petites et moyennes entreprises qui n'ont pas la possibilité d'employer un salarié à plein temps, de satisfaire à leur besoin de main d' uvre en occupant un salarié à temps partiel. Par ailleurs, une initiative des partenaires sociaux pour négocier un accord portant sur l'emploi des salariés à temps partiel ayant plusieurs employeurs ne peut qu'être encouragée. Cet accord pourrait être un accord interprofessionnel, conclu entre les organisations syndicales et patronales visées à l'article L. 132-2 du code du travail dont l'objectif serait de définir les règles conventionnelles applicables aux salariés à temps partiel ayant plusieurs employeurs. En ce qui concerne le droit au versement des allocations chômage, l'article L. 351-1 du code du travail subordonne ce versement à la privation involontaire d'emploi du travailleur. Toutefois, afin de ne pas pénaliser les salariés à employeurs multiples, l'article L. 351-20 prévoit le cumul de ces allocations avec les revenus procurés par une autre activité dès lors que celle-ci a un caractère occasionnel ou réduit. Le revenu procuré par cette activité ne doit pas excéder 47 % de la rémunération brute mensuelle antérieure. Il est à noter que la détermination des règles applicables en la matière relève de la seule compétence des partenaires sociaux, gestionnaires du régime d'assurance chômage. Au regard de la protection sociale enfin, il convient de préciser que le décret 97-362 du 16 avril 1997 laisse aux assurés sociaux pluriactifs le libre choix, parmi les caisses dont ils relèvent, de leur organisme de rattachement, appelé caisse pivot, indépendamment de leur activité principale, afin d'éviter le changement de caisse en cas de changement d'activité principale.

- page 3962

Page mise à jour le