Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 17/11/1998

M. Philippe Richert souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les importantes distorsions de concurrence existant au sein de l'Union européenne dans le domaine du transport de voyageurs, du fait des législations sociales, fiscales et techniques très disparates d'un pays de l'Union à l'autre. Ainsi, tandis qu'en France la journée de travail ne peut excéder douze heures, aucune limite de temps n'est prévue dans le règlement social européen. Dans un autre registre, la longueur maximale des véhicules en France est de 12 mètres, alors qu'elle est de 15 mètres en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas. Enfin, les transporteurs français effectuant des voyages en Allemagne sont tenus d'acquitter une taxe sur la valeur ajoutée de 16 %, alors que les transporteurs allemands sont exonérés de la TVA française lors de leur passage sur notre territoire. Ces disparités, combinées à de nombreuses autres, pénalisent lourdement les transporteurs français par rapport à leurs homolgues européens, et en particulier les sociétés de transports des régions frontalières comme l'Alsace. Alors que le marché unique en matière de transport routier est entré en vigueur le 1er juillet dernier, permettant aux transporteurs européens de répondre aux appels d'offres des collectivités partout au sein de l'Union européenne, les compagnies de transport de voyageurs allemandes peuvent proposer des prix très compétitifs par rapport à ceux pratiqués par leurs collègues français : 9 000 francs, par exemple, pour le transport de quatre-vingt-dix personnes entre Strasbourg et Paris contre 15 000 francs en France. Il leur est d'autant plus facile d'afficher des tarifs aussi bas que le gouvernement allemand leur verse des subventions d'un montant de 160 000 marks (540 000 francs) lorsqu'elles assurent des transports réguliers ou scolaires. Il lui demande si ces problèmes de distorsion de concurrence, spécifiques au transport routier de voyageurs dans les zones transfrontalières, sont pris en compte dans le cadre des négociations menées actuellement au niveau communautaire, et visant à harmoniser les législations des pays de l'Union européenne en matière de transport routier ?

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 20/01/1999

Réponse apportée en séance publique le 19/01/1999

M. Philippe Richert. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les importantes distorsions de
concurrence existant au sein de l'Union européenne dans le domaine du transport de voyageurs, du fait des législations
sociales, fiscales et techniques très disparates d'un pays de l'Union à l'autre.
Ainsi, tandis qu'en France la journée de travail ne peut excéder douze heures, aucune limite de temps n'est prévue dans
le règlement social européen. Cela peut signifier pour nos transporteurs l'obligation d'avoir deux conducteurs quand
d'autres, pour le même trajet, n'ont recours qu'à un seul chauffeur.
Dans un autre registre, la longueur maximale des véhicules en France est de 12 mètres, alors qu'elle est de 15 mètres
en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas.
Enfin, les transporteurs français effectuant des voyages en Allemagne sont tenus d'acquitter une taxe sur la valeur
ajoutée de 16 %, alors que les transporteurs allemands sont exonérés de la TVA française lors de leur passage sur
notre territoire.
Ces disparités, combinées à de nombreuses autres, pénalisent lourdement les transporteurs français par rapport à
leurs homologues européens et, en particulier, les sociétés de transports des régions frontalières, comme l'Alsace.
Alors que le marché unique en matière de transport routier est entré en vigueur le 1er juillet dernier, permettant aux
transporteurs européens de répondre aux appels d'offres des collectivités partout au sein de l'Union européenne, les
compagnies de transport de voyageurs allemandes peuvent proposer des prix très compétitifs par rapport à ceux qui
sont pratiqués par leurs collègues français.
Il leur est d'autant plus facile d'afficher des tarifs aussi bas que le Gouvernement allemand leur verse des subventions
d'un montant de 160 000 deutsche Marks, soit 540 000 francs, lorsqu'elles assurent des transports réguliers ou
scolaires.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, si ces problèmes de distorsions de concurrence, spécifiques au transport
routier de voyageurs dans les zones transfrontalières - qui sont réels et peuvent engendrer des préjudices graves - sont
pris en compte dans le cadre des négociations menées actuellement au niveau communautaire et visant à harmoniser
les législations des pays de l'Union européenne en matière de transport routier.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, je tiens à
vous assurer que le Gouvernement a le souci de l'harmonisation des conditions de concurrence dans le domaine du
transport routier, qu'il soit d'ailleurs de voyageurs ou de marchandises, et pas seulement dans les zones
transfrontalières, même si elles sont naturellement plus exposées aux distorsions de concurrence : aucune réunion des
ministres européens des transports ne se passe sans que j'intervienne sur ce point.
Avec les professionnels du transport, la France défend le principe d'une harmonisation par le haut des règles sociales et
de sécurité à l'échelle européenne, ce qui aurait dû constituer un élément indissociable de la construction du Marché
unique et de la libéralisation dans les transports routiers.
Il est indispensable, pour garantir l'équité de la concurrence, renforcer la sécurité routière, améliorer les conditions de
travail et de vie des conducteurs, favoriser la qualité de service et développer l'emploi, que les règles de concurrence
soient loyales et jouent normalement.
Cette harmonisation doit nécessairement englober trois aspects : une législation communautaire sur la durée du travail
dans les transports routiers, une législation communautaire sur l'institution d'une formation professionnelle initiale et
continue des conducteurs routiers et une harmonisation des contrôles et des sanctions. La France a d'ailleurs présenté
ses propositions lors du conseil des ministres européens des transports de décembre 1997, soit après le conflit qui a
eu lieu dans notre pays, et elles ont été formalisées dans un mémorandum.
Un nouveau règlement n° 2135-98 concernant l'appareil de contrôle électronique appelé à se substituer à l'actuel
chronotachygraphe, longtemps attendu et demandé par la France, a été publié le 24 septembre 1998. Il va permettre
d'améliorer l'efficacité des contrôles.
De même, à la suite du mémorandum, il convient de se féliciter que la Commission ait adopté le 18 novembre dernier
un projet de directive sur le temps de travail, qui va pouvoir maintenant être discuté par le conseil des ministres
européens.
La réglementation française prévoit actuellement, comme vous le soulignez, une longueur maximale de 12 mètres pour
les autocars. Cette longueur est inférieure à la longueur maximale autorisée dans un certain nombre d'autres pays
européens.
Je tiens cependant à vous préciser que cette réglementation, qui figure dans le code de la route, s'applique à tous les
véhicules circulants en France, et cela quelle que soit leur nationalité. Comme dans d'autres domaines, cette
disposition peut néanmoins être amenée à évoluer en fonction des changements possibles de la réglementation
européenne.
En ce qui concerne les taux de TVA, vous savez qu'ils sont différents d'un Etat membre à l'autre. Cela ne conduit
cependant pas à une distorsion des conditions de concurrence dans la mesure où, pour une même prestation dans un
Etat donné, tous les transporteurs, quelle que soit leur nationalité, doivent acquitter la même TVA. Je peux en
particulier vous confirmer que les transporteurs allemands qui exécutent un transport en France ne sont pas plus
exonérés de TVA que les transporteurs français qui exécutent la même prestation.
Les ministres de l'économie et des finances de l'Union européenne s'efforcent d'éviter que les législations des pays
membres soient contournées. Il s'agit d'une tâche compliquée, vous avez raison de le souligner, monsieur le sénateur.
Croyez que nous travaillons non seulement à l'harmonisation sociale, mais également à l'harmonisation des législations
fiscales des pays membres, et donc à celle des taux de TVA.
M. Philippe Richert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Je vous remercie, monsieur le ministre, de reconnaître l'importance de ce dossier.
Vous savez qu'incombe aux collectivités, en particulier aux départements, la responsabilité des transports scolaires.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Eh oui !
M. Philippe Richert. Or, s'agissant des transports scolaires dans les régions frontalières, se pose très directement la
question de la concurrence. En effet, aujourd'hui, les transporteurs de tous les pays membres de l'Union européenne
peuvent, en principe, participer aux appels d'offres et les conditions offertes par certains pays voisins à leurs
transporteurs permettent à ces derniers de proposer des prix qui se révèlent excessivement intéressants par rapport à
ceux que peuvent pratiquer les transporteurs français.
Je ne voudrais pas que, lors des prochaines adjudications, nous soyons trop souvent obligés d'écarter les transporteurs
français en raison des critères imposés par la France, qui sont bien plus lourds, bien plus drastiques que ceux qui sont
imposés par nos voisins allemands, par exemple, à leurs propres transporteurs.
Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de l'attention que vous portez à cette affaire. Je souhaiterais, bien
entendu, que les négociations au niveau européen - car c'est bien là que les choses se passent - puissent aboutir le
plus rapidement possible, et ce d'autant que nos voisins allemands, par exemple, peuvent accorder des subventions
importantes aux entreprises qui, en Allemagne, font du transport scolaire.
Je vous remercie encore de votre attention, monsieur le ministre, et j'espère que nous aurons très prochainement
l'occasion d'enregistrer un accord.

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