Question de M. ADNOT Philippe (Aube - NI) publiée le 25/03/1999

M. Philippe Adnot appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur le développement alarmant de la distribution et la vente de copies numériques musicales. Ce phénomène génère un trafic illicite de centaines de milliers d'unités, en infraction avec les dispositions du code de la propriété intellectuelle qui réprime pénalement la distribution, la diffusion, la revente des copies autres que celles effectuées par le copieur pour son seul usage privé. Effectuées soit à partir du support original, le compact disque, soit à partir du téléchargement en ligne via Internet sur le disque dur d'un ordinateur, ces copies, d'une qualité identique à l'orinal et non dégradables, sont réalisées le plus souvent sur des supports vierges informatiques vendus à des prix dérisoires de moins de dix francs l'unité grâce à des graveurs de disques compacts disponibles pour quelques milliers de francs. Ces copies sont très souvent revendues pour 30 ou 40 francs dans les établissements scolaires. Récemment, les professionnels de la musique se sont émus du préjudice important que le développement de ce trafic ne manque pas d'avoir sur les ventes de disques et donc sur les rénumérations des artistes-interprètes, des auteurs-compositeurs, des éditeurs et des producteurs phonographiques. D'ores et déjà, le marché du format court de disques a marqué le pas pour la première fois en 1998. En conséquence, il lui demande quelles mesures son ministère entend prendre pour mettre un terme à de telles pratiques, qui mettent en péril la création musicale nationale et dans quel délai elle entend agir.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 24/06/1999

Réponse. - Les comportements illicites constituent une grave menace pour la création et la production de biens culturels et la lutte contre de tels comportements est une préoccupation majeure du gouvernement français. En effet, l'émergence de nouvelles techniques de reproduction et de communication donne une dimension nouvelle à la contrefaçon : elles facilitent la diffusion illégale des uvres ainsi que la fabrication et la diffusion de copies ne présentant pas de différence de qualité par rapport aux exemplaires licitement mis sur le marché ou diffusés sur les réseaux et qui sont reproductibles à l'infini sans perte de qualité. Ce problème se trouve très clairement posé en matière d' uvres musicales ainsi que le souligne l'honorable parlementaire. D'ores et déjà, la France est dotée d'un dispositif législatif et réglementaire répressif assurant un haut niveau de protection de la propriété littéraire et artistique dont la mise en uvre est assurée par les ayants droit, les sociétés de perception et de répartition des droits et les organismes professionnels habilités à constater la matérialité des infractions. Cependant, l'harmonisation des législations européennes est indispensable et sera assurée par la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information. Ce texte, outre le haut niveau de protection qu'il consacre, donne une place centrale à la mise en uvre et à la protection juridique des mesures techniques visant à sécuriser la diffusion des uvres ainsi qu'à permettre l'information sur les droits. Le gouvernement français soutient ce projet de directive et encourage les titulaires de droit à mettre au point les solutions techniques permettant la protection la plus efficace contre la contrefaçon et participe à l'élaboration d'identifiants numériques normalisés, reconnus internationalement, aux côtés des ayants droit et de l'association française de normalisation (AFNOR). En outre, le Gouvernement français vient de marquer son soutien à la proposition de la Commission européenne, exprimée dans le livre vert sur la contrefaçon et la piraterie, d'un renforcement des moyens juridiques et pratiques sur le plan communautaire pour assurer le respect des droits de propriété intellectuelle, en particulier dans le contexte numérique. Les actes de contrefaçon sont cependant à distinguer de la copie effectuée pour l'usage strictement privé du copiste qui est, quant à elle, autorisée par les dispositions du code de la propriété intellectuelle. Compte tenu de la qualité parfaite de la copie numérique qui fait courir aux ayants droit le risque d'un préjudice bien supérieur à celui engendré par la copie analogique, le projet de directive modifié par le Parlement prévoit que la mise en place d'un droit à rémunération pour copie privée numérique doit être envisagée jusqu'à ce que le développement de moyens techniques efficaces permette aux titulaires de droit d'assurer la protection effective de leurs uvres et l'exercice d'un droit exclusif. Enfin, l'exception de copie à usage strictement privé du copiste ne peut pas servir de fondement aux commerces qui proposent en libre service l'utilisation des graveurs de compact disques vierges à des clients venant par exemple faire copier des phonogrammes. En effet, même si cela n'a pas encore été jugé en matière de copie privée numérique, la responsabilité du commerçant pourrait être reconnue comme cela a été décidé dans un cas analogue par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 7 mars 1984 relatif aux libres services de reprographie. Les prochains Etats généraux du disque qui seront organisés en juin prochain permettront de faire un point précis avec les professionnels sur ces différents sujets fondamentaux pour une diffusion bien maîtrisée des uvres sur les réseaux et leurs prolongements.

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