Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 28/04/1999

M. Georges Mouly appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le niveau de ressources des personnes handicapées particulièrement touchées par les dernières mesures de la loi de finances pour 1999 (nº 98-1266 du 30 décembre 1998), et plus spécialement sur la situation des adultes handicapés exerçant une activité en centre d'aide par le travail (CAT) et des majeurs faisant l'objet d'une mesure de protection.

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Réponse du ministère : Droits des femmes publiée le 09/06/1999

Réponse apportée en séance publique le 08/06/1999

M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, alors que chacun s'accorde à souligner la nécessité de réformer la loi
du 30 juin 1975, afin de recentrer ses objectifs sur la personne, il est difficile de se satisfaire du dispositif tendant à
aligner la situation des personnes handicapées sur celle des personnes âgées.
Est-il utile de rappeler la spécificité du handicap et de sa prise en charge ? Le désavantage issu du handicap doit être
compensé - c'est une opinion généralement partagée - dans le cadre d'une législation adaptée.
L'allocation aux adultes handicapés, oubliée des réformes en cours et qu'il n'est pas question d'indexer sur le SMIC - le
Gouvernement l'a confirmé dans une réponse en date du 20 août 1998 - vient d'être à nouveau touchée, cependant, par
une mesure contenue dans la loi de finances pour 1999, qui dispose en son article 135 que toute personne handicapée,
quel que soit son taux d'invalidité, est présumée inapte au travail dès l'âge de soixante ans et qu'elle doit faire
prioritairement valoir ses droits à un avantage vieillesse.
Une disposition similaire, introduite par une lettre ministérielle du 8 janvier 1987, pénalisait déjà les allocataires atteints
d'un handicap d'au moins 80 %. Désormais et, selon mes informations, sans qu'une concertation préalable ait été
menée, les personnes atteintes d'une incapacité comprise entre 40 % et 80 % verront automatiquement leur allocation
supprimée à soixante ans et remplacée par un avantage vieillesse. Une telle mesure pénalise tout particulièrement les
personnes accueillies en CAT, qui verront leur allocation supprimée brutalement, ce qui entraînera une baisse de leurs
ressources et les contraindra à cesser leur activité, quand bien même celle-ci pourrait être poursuivie.
Il peut paraître paradoxal d'inciter ainsi les travailleurs handicapés à cesser leur activité, alors même que les places
d'accueil pour personnes handicapées vieillissantes ne sont pas à la hauteur des besoins et que les solutions sont
souvent, aujourd'hui, trouvées par défaut et peu adaptées à leur situation spécifique ?
Ne pourrait-il pas être envisagé d'introduire un droit d'option ? Cette option serait exercée par la personne handicapée
titulaire d'une allocation aux adultes handicapés en vue de bénéficier d'une pension pour inaptitude ou de poursuivre son
activité tout en percevant l'AAH, afin de ne pas être confrontée à une baisse de ressources, ressources dont chacun
peut reconnaître qu'elles sont modestes et qu'il conviendrait de les revaloriser. L'allocation aux adultes handicapés est
une allocation de compensation du handicap, lequel ne disparaît malheureusement pas avec l'âge.
Parallèlement, afin de soutenir l'activité des centres d'aide par le travail et permettre d'augmenter la rémunération des
travailleurs handicapés, ne pourrait-il être envisagé, au moins dans un premier temps, de réintroduire le système
d'exonération des cotisations assises sur la garantie de ressources versées aux salariés handicapés ? Ainsi, les
associations d'aide à domicile bénéficient désormais - et la mesure est évidemment bienvenue - de l'exonération des
cotisations patronales pour les prestations qu'elles effectuent chez le public handicapé ou dépendant ou au titre de
l'aide ménagère. Par ailleurs, les bas salaires bénéficient d'une réduction des charges sociales de l'URSSAF, l'Union de
recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, alors que les établissements de travail
protégé ne bénéficient plus, depuis 1994, de la compensation de l'ensemble des cotisations assises sur les salaires.
Dans le même temps, le bilan des centres d'aide par le travail pour 1996 met en évidence la diminution constante de la
rémunération du travail handicapé par rapport au SMIC, alors que l'augmentation régulière de la valeur réelle ajoutée du
travail handicapé dans les activités de production et de commercialisation de ces établissements est constante.
C'est pourquoi, je vous demande, madame le secrétaire d'Etat, s'il ne serait pas possible d'examiner en urgence la
situation des adultes handicapés afin qu'il leur soit enfin permis de prétendre à un niveau de rémunération plus normal.
J'aimerais aussi connaître votre réaction aux propositions contenues dans le rapport d'enquête sur le fonctionnement du
dispositif de protection des majeurs, établi à la demande de votre collègue, ministre de la justice, propositions qui ne
peuvent laisser indifférent eu égard à la population concernée, qui ne doit pas être mise à contribution pour réduire le
coût du service rendu, tant d'un point de vue financier que d'un point de vue social.
Alors que chacun semble appeler de ses voeux une politique d'ensemble régulièrement élaborée et évaluée pour tenir
compte des aspects humains, sociaux, juridiques, financiers et institutionnels du système de protection des majeurs, il
conviendrait pour le moins, en tout cas de mon point de vue, de veiller à ce que l'exploitation de ce rapport permette aux
associations tutélaires de recevoir un financement à la hauteur de la tâche qui leur est confiée, mission d'intérêt général
qu'elles remplissent souvent dans des conditions difficiles.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le sénateur,
vous appelez l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur le niveau des ressources des personnes
handicapées, notamment depuis l'adoption de l'article 134 de la loi de finances pour 1999. Vous vous interrogez, en
particulier, sur la situation des adultes handicapés exerçant une activité en centre d'aide par le travail.
Vous me permettrez tout d'abord de rappeler que l'allocation aux adultes handicapés a bénéficié, au 1er janvier 1999,
d'une revalorisation de 2 %, c'est-à-dire d'une revalorisation supérieure à la hausse des prix, garantissant ainsi une
amélioration de son pouvoir d'achat.
L'article 134 de la loi de finances pour 1999 a pour but d'aménager, pour l'ensemble des bénéficiaires de l'allocation aux
adultes handicapés, un passage automatique dans le dispositif de la retraite pour inaptitude au travail dès l'âge de
soixante ans.
Applicable à compter du 1er janvier 1999, cette modification législative ne change rien aux droits des titulaires de cette
allocation lorsque leur taux d'incapacité permanente est au moins égale à 80 %. La disposition nouvelle a pour seul
objet d'affirmer, au niveau législatif, la reconnaissance de l'inaptitude au travail dont ils bénéficiaient déjà.
Cette disposition permet en revanche d'ouvrir, dès l'âge de soixante ans, les droits aux avantages vieillesse aux
personnes bénéficiant de l'allocation aux adultes handicapés dont le taux d'incapacité permanente est compris entre 50
% et 80 % et qui sont en outre dans l'impossibilité, reconnue par la commission technique d'orientation et de
reclassement professionnel, la COTOREP, de se procurer un emploi. La reconnaissance automatique de l'inaptitude au
travail à l'âge de soixante ans les rend d'office éligibles à cet âge à une pension de vieillesse à taux plein.
Ainsi, ils se voient traités à l'égal des pensionnés d'invalidité du régime général, dont la pension d'invalidité est
automatiquement transformée, quand ils atteignent l'âge de soixante ans, en pension de vieillesse pour inaptitude au
travail.
S'agissant des personnes travaillant en centres d'aide par le travail ou CAT, les dispositions de l'article 134 n'ont pas
pour objet de les empêcher de poursuivre leur activité au-delà de leur soixantième anniversaire si elles ne souhaitent
pas, à cet âge, user de la faculté qui leur est donnée de percevoir un avantage de retraite pour inaptitude au travail.
Tel peut notamment être le cas des personnes qui, grâce à la garantie de ressources assurée aux travailleurs
handicapés, perçoivent, en poursuivant leur activité en CAT, un revenu supérieur à celui que leur procurerait la
perception d'un avantage de vieillesse. La liquidation de la pension de retraite interviendra, alors, au moment de la
cessation définitive de l'activité en CAT. Donc, sur cette question, monsieur le sénateur, je vous rassure pleinement : il
s'agit d'une simple faculté.
S'agissant des autres questions que vous avez posées, sachez que j'interrogerai les ministres concernés et vous ferai
parvenir par écrit, dans les jours qui viennent, les réponses précises que vous attendez, à moins que vous ne préfériez
évoquer de nouveau ces sujets ultérieurement, sous forme de question orale.
M. Georges Mouly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, pour les deux parties de votre réponse.
J'ai bien noté que vous réaffirmiez le caractère facultatif de la retraite à soixante ans. Il convient en effet d'y insister, car
chacun sait ici que ce caractère lui est parfois dénié, ce qui suscite un véritable problème. Il s'agit bien d'une faculté.
Je me suis, pour ma part, permis d'insister plus particulièrement sur la situation des personnes en centre d'aide par le
travail parce que chacun connaît l'intérêt de ces établissements sur les plans personnel et social, mais aussi
économique.
Pour les autres questions, j'ai apprécié votre proposition, madame la secrétaire d'Etat. Je ne reviendrai pas sur ce sujet
par le biais d'une question orale, mais j'attends avec beaucoup d'intérêt les réponses écrites que vous avez annoncées.

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