Question de M. VALLET André (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 18/05/2000

M. André Vallet attire l'attention de Mme le ministre de la jeunesse et des sports sur les propositions de sécurisation, voire d'interdiction, des jeux taurins, notamment en Camargue. Il lui rappelle que la participation collective au jeu est une raison structurelle de la persistance de la continuité de la tauromachie camarguaise. Dès lors, le danger serait que l'on transforme une tradition ancestrale en un pur spectacle, séparant le public du jeu taurin. En ce sens, il lui indique que la mise en place de grillages et de barres d'aciers aux pieds de ceux-ci pour empêcher le saut des bêtes serait très mal perçu en Camargue. Dès lors, il lui demande si les propositions de sécurisation ou d'interdiction des jeux taurins sont de nature à emporter l'adhésion du Gouvernement.

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Réponse du ministère : Outre-mer publiée le 11/10/2000

Réponse apportée en séance publique le 10/10/2000

M. le président. La parole est à M. Vallet.
M. André Vallet. Monsieur le secrétaire d'Etat, ces derniers temps, la voix de certaines instances,
notamment européennes, s'est élevée pour demander une plus grande « sécurisation », voire
l'interdiction des courses camarguaises de taureaux.
Ces propositions, qui ne sont, je l'espère, que la traduction ponctuelle du drame qui s'est déroulé en
avril dernier dans les arènes de Vauvert, dans le Gard, suscitent la plus grande incompréhension en
Camargue, y compris d'ailleurs dans la famille de la victime : « Il ne faut rien changer », a déclaré le
fils, qui a refusé de porter plainte.
Des voix se sont donc élevées afin que soient renforcées les mesures de sécurité des manifestations
taurines. Il a notamment été proposé que soient installés des grillages et des barres d'acier au pied
de ceux-ci, pour empêcher les bêtes de sauter.
Pour beaucoup, isoler le spectateur de la piste dénaturerait la tauromachie camarguaise et ruinerait
l'esprit de l'arène, qui recherche l'osmose entre la représentation spectaculaire et le public. La
participation collective au jeu taurin est une raison structurelle de la persistance et de la continuité de
la tauromachie camarguaise. Le plus grand danger serait sans doute que l'on transforme une tradition
ancestrale en un pur spectacle, séparant le public du jeu taurin.
Dès lors, monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous m'indiquer si les propositions de « sécurisation »
ou d'interdiction des jeux taurins, qui en dénaturent largement l'esprit, sont approuvées par le
Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer. Monsieur le sénateur, en accord avec Mme
Marie-George Buffet, je vais m'efforcer de vous répondre avec une grande précision sur ce sujet grave
et très important.
Les courses camarguaises sont régies par un document intitulé « Statut et règlement de la
Fédération française de la course camarguaise », document qui a été agréé par le secrétariat d'Etat à
la jeunesse et aux sports en 1975.
Comme pour toute activité donnant lieu à un rassemblement important de spectateurs, l'organisation
d'une telle manifestation doit respecter les prescriptions relatives à la sécurité. Ainsi les installations
doivent-elles avoir fait l'objet d'une visite de la commission départementale de sécurité, en application,
notamment, de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités
physiques et sportives.
Il doit être en outre rappelé que les organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou
culturelles à but lucratif, lorsque le public et le personnel qui concourt à la réalisation de la
manifestation dépassent 1 500 personnes, sont tenus d'en faire la déclaration au maire ou à Paris, au
préfet de police.
Par ailleurs, et là aussi de manière générale - mais je crois ces rappels utiles - le maire,
conformément aux dispositions du code général des collectivités territoriales, est chargé de la police
municipale, laquelle comprend notamment « le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de
grands rassemblements d'hommes tels que spectacles, jeux... ».
Il convient d'ajouter que les communes sont propriétaires des arènes dans lesquelles se déroulent les
courses camarguaises. En tout état de cause, le ministre de l'intérieur n'a pas compétence pour
déterminer de quelque manière que ce soit les conditions de la pratique de ce sport : c'est bien aux
fédérations sportives agréées par le ministère chargé des sports que le législateur a entendu confier
l'exécution d'une mission de service public. Tel est l'objet de l'article 16 de la loi du 16 juillet 1984 que
j'ai citée tout à l'heure. Ce même texte prescrit notamment que les fédérations sportives « font
respecter les règles techniques et déontologiques de leurs disciplines ».
Le Conseil d'Etat, dans une jurisprudence constante, a décidé que les décisions prises par les
fédérations sportives habilitées constituent des actes administratifs. Il en résulte que les fédérations
sportives « exercent leur activité en toute indépendance » - il s'agit de l'article 16 précité - et que les
décisions qu'elles prennent sont susceptibles d'être déférées au juge administratif.
Au demeurant, il ressort des renseignements obtenus par le ministère de l'intérieur - et cela répond
encore plus directement, me semble-t-il, au souci que vous exprimiez - que le règlement édicté par la
Fédération française de la course camarguaise n'est pas, à brève échéance, susceptible d'être affecté
par des modifications. Par conséquent, la tradition associée à la pratique des courses sera
maintenue. Toutefois, vous l'avez rappelé, à la suite du grave accident survenu à la fin du mois d'avril
dans les arènes de Vauvert, la fédération a décidé, très certainement à juste titre, de mettre en place
une commission, rassemblant des maires, des membres de la fédération en cause et des manadiers,
chargée de mener une réflexion sur les normes de sécurité.
Il est apparu en outre, lors de l'enquête administrative qui a suivi, que la hauteur des barrières de
protection n'était pas en conformité avec la réglementation existante. Le renforcement des barrières et
leur aménagement ont été réalisés rapidement : en pratique, dans les quinze jours qui ont suivi
l'accident dont vous avez rappelé la gravité. Bien entendu, entre ces deux dates, toute activité taurine
avait été suspendue.
J'espère avoir répondu avec précision à vos préoccupations, monsieur le sénateur.
M. André Vallet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vallet.
M. André Vallet. Je tiens tout d'abord à vous remercier, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir indiqué
avec force qu'il n'est pas question de modifier la réglementation des courses camarguaises et d'avoir
souligné qu'une telle décision appartient à la fédération régissant ce sport.
Cependant, vous n'avez pas complètement répondu à ma question, monsieur le secrétaire d'Etat,
puisque je vous ai interrogé avant tout sur les initiatives que voulait prendre Bruxelles en la matière. Je
vous ai demandé de m'indiquer si le Gouvernement approuvait les quelques initiatives qui ont été
lancées par la Commission et qui tendraient à trop renforcer, tout au moins de notre point de vue, la
sécurité dans les arènes.

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