Question de M. DÉSIRÉ Rodolphe (Martinique - RDSE) publiée le 11/05/2000

N'ayant obtenu aucune réponse à sa question posée le 28 octobre 1999, M. Rodolphe Désiré attire une fois de plus l'attention de M. le Premier ministre sur les difficulté que rencontrent aujourd'hui les productions de la Martinique, et plus généralement des départements d'outre-mer (DOM), pour faire face tant à la concurrence des productions venant des pays tiers à bas salaires (bananes, fruits tropicaux, fleurs, produits de contre-saison) qu'à la concurrence des produits fabriqués à grande échelle par des entreprises communautaires (produits agricoles transformés). Ces difficultés sont essentiellement dues aux prix de revient de nos produits grevés par l'importance des coûts de production qui ne bénéficient pas d'économie d'échelle, aux coûts supplémentaires que constitue le transport dû au grand éloignement, à l'endettement des planteurs, mais aussi à l'agressivité de nos concurrents, qui mettent en place des moyens que l'on pourrait qualifier de " dumping ", de façon à mettre en péril les productions antillaises. Or, à l'automne 1999, la Commission européenne a avalisé un régime d'aide au transport de marchandise en provenance des îles Canaries par l'Etat espagnol, pour un total de 59,5 millions d'euros. La Commission a jugé ces aides comme étant " indispensables pour permettre aux entreprises d'une région très éloignée et défavorisée comme les îles Canaries de participer valablement au marché intérieur de l'Union européenne ". Ces aides prennent la forme de subventions à fonds perdus pour le fret, entre les ports canariens et le port de Cadiz, sur la péninsule espagnole, ainsi qu'entre les aéroports canariens et l'aéroport de Barajas, à Madrid. Il lui demande par conséquent si dans la conjoncture actuelle où une grande inquiétude se manifeste par de nombreux mouvements sociaux et où il existe une sérieuse menace de déstabilisation de la société antillaise, une telle mesure ne pourrait pas être envisagée par l'Etat français pour les DOM.

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 21/09/2000

Réponse. - L'honorable parlementaire souhaite savoir si une mesure d'aide au transport de marchandises comparable à celle accordée par la Commission européenne aux îles Canaries à l'automne 1999 ne pourrait pas être envisagée pour les DOM. En octobre 1999, en effet, la Commission a approuvé un régime d'aides au transport de marchandises en provenance des îles Canaries. Les aides en cause, d'un montant de 59,5 millions d'euros sur trois ans, prennent la forme de subventions aux entreprises qui produisent ou transforment des marchandises aux îles Canaries. Ces aides portent sur les frets du transport maritime entre les ports des îles Canaries et le port de Cadix en Espagne, ou sur les frets de transport aérien entre les aéroports des îles Canaries et l'aéroport de Barajas à Madrid. Leur intensité maximale est plafonnée à : 50 % d'équivalent de subvention brut (ESB) dans le cas de produits agricoles, des plantes, des fleurs, des boutures et des aliments pour le détail ; 35 % dans le cas des produits industriels ; 3 % dans le cas des produits pétroliers. Le fondement de la politique suivie par l'Union européenne en matière d'aides d'Etat est posé à l'article 87-1 du traité. Cet article dispose que les aides d'Etat sont en principe incompatibles avec le marché commun. Cependant, le principe d'incompatibilité ne constitue pas une interdiction généralisée. L'article 87-3(a) permet en particulier d'autoriser les mesures d'aides d'Etat au bénéfice des DOM, en tant que " régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi ". Dans le cadre de la négociation des documents uniques de programmation (DOCUP), au travers desquels seront mis en uvre les fonds structurels pour la période 2000-2006, les DOM ont profité de cette possibilité pour proposer des régimes d'aides dans les secteurs où leur mise en place s'avérait nécessaire. Bien que les aides régionales destinées à réduire les dépenses courantes de l'entreprise (aides au fonctionnement) soient en principe interdites par les textes communautaires, les lignes directrices concernant les aides à finalité régionale prévoient que, dans les régions ultrapériphériques, telles les DOM, les aides destinées à compenser en partie les surcoûts de transport peuvent être autorisées. Dans ce secteur, seule la Guyane a demandé la notification à la Commission européenne d'un régime de soutien au fret comparable à celui qu'évoque l'honorable parlementaire dans le cas des Canaries. Les plafonds autorisés vont de 40 à 70 % pour le transport maritime, et de 25 à 40 % pour le transport aérien, selon les destinations. Cependant, les autres DOM ont prévu des aides à l'investissement comme au fonctionnement, en faveur des entreprises locales qui produisent ou transforment des marchandises. Ces aides ont, en pratique, un effet équivalent. En outre, dans le domaine agricole, qui concerne 80 % de l'aide au transport de marchandises dans le cas des Canaries, le règlement du Conseil 3763/91, pris dans le cadre du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité des départements d'outre-mer français (Poseidom), prévoit notamment l'octroi d'une aide communautaire pour la conclusion de contrats de campagne ayant pour objet l'écoulement et la commercialisation d'un certain nombre de produits récoltés dans les DOM. Celle-ci est accordée à l'acheteur qui s'engage à commercialiser les produits des DOM et s'élève à 10 % de la valeur commercialisée. Les DOM disposent donc d'ores et déjà d'un éventail important de possibilités pour aider leurs entreprises locales qui produisent ou transforment des marchandises. Il convient avant tout de les utiliser de façon optimale, et les services de l'Etat sont à la disposition de ces entreprises pour leur apporter les conseils nécessaires. Par ailleurs, dans son rapport de février dernier sur les mesures destinées à mettre en uvre l'article 299-2 du traité, la Commission reconnaît que les handicaps structurels permanents des régions ultrapériphériques nécessitent une approche cohérente et globale dans les aides au transport, à destination, en provenance et à l'intérieur de ces régions dans les secteurs aérien, maritime et terrestre. Elle examine donc la possibilité d'un encadrement sectoriel spécifique aux régions ultrapériphériques. Le secrétariat d'Etat à l'outre-mer veillera à ce que cet encadrement contribue de façon encore plus positive au développement des entreprises du secteur productif dans les DOM.

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