Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 11/07/2002

M. Michel Charasse demande à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, de bien vouloir lui faire connaître : 1. Pour les années 1990 à 1999, combien d'actions récursoires ont été engagées par l'Etat dans les conditions prévues par l'article 11-1, 2e alinéa, de l'ordonnance modifiée n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. 2. Les condamnations de la France par la Cour européenne étant de plus en plus nombreuses en ce qui concerne le fonctionnement du service public de la justice, si la disposition de l'article 11-1, 2e alinéa, susvisée est applicable lorsque le motif de la condamnation résulte de la faute d'un agent des services judiciaires ayant le statut de magistrat. 3. Quelles sont les dispositions législatives visées au dernier alinéa de l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire et à quelles dates sont-elles entrées en vigueur.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 28/11/2002

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, pour les années 1990 à 1999, aucune action récursoire n'a été engagée par l'Etat sur le fondement de l'article 11-1, alinéa 2, de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature. Il convient de préciser que la mise en oeuvre de l'action récursoire prévue par l'article 11-1 est subordonnée à l'existence d'une faute personnelle se rattachant au service de la justice, ainsi que le rappelle l'alinéa 3 de l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire, qui régit en droit interne la responsabilité de l'Etat du fait du service de la justice. Or cette responsabilité, loin de se limiter aux seuls actes des magistrats, s'étend à l'ensemble des actes relatifs à l'exécution du service de la justice, en particulier les activités de greffe et des collaborateurs du service de la justice. Elle recouvre tous les cas de fonctionnement globalement défectueux, qui représentent l'essentiel du contentieux. Au regard de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la Cour européenne des droits de l'homme considère désormais le recours fondé sur l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire comme un recours efficace, qui doit être exercé préalablement à sa saisine lorsque est invoqué un manquement à la convention relatif au fonctionnement du service de la justice. Dès lors que l'action récursoire est ouverte à l'Etat condamné par une juridiction interne sur le fondement de l'article L. 781-1 pour un fonctionnement défectueux du service de la justice éventuellement constitutif d'une violation de la convention, il semble possible de considérer par analogie, sous réserve de l'appréciation souveraine de la Cour de cassation, qu'elle est pareillement ouverte à l'Etat condamné par la Cour européenne des droits de l'homme à l'occasion du fonctionnement de notre système judiciaire. L'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire, créé par décret du 18 mars 1978, a prévu in fine que les règles de l'article 505 du code de procédure civile, qui régissaient antérieurement la responsabilité des juges pris à partie, continueraient à recevoir application jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions législatives concernant la responsabilité des magistrats à raison de leur faute personnelle. Les dispositions législatives ainsi visées se rapportent aux dispositions de l'alinéa 2, qui précise que la responsabilité des juges, à raison de leur faute personnelle, est régie par le statut de la magistrature en ce qui concerne les magistrats du corps judiciaire et par des lois spéciales en ce qui concerne les juges composant les juridictions d'attribution. S'agissant des magistrats du corps judiciaire, leur statut, contenu dans l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, a été complété par la loi organique n° 79-43 du 18 janvier 1979 qui y a ajouté l'article 11-1 actuellement en vigueur. S'agissant des juges composant les juridictions d'attribution, telles que les tribunaux de commerce ou les conseils de prud'hommes, ils continuent d'être soumis au régime de la prise à partie.

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