Question de M. FERRAND André (Français établis hors de France - UMP) publiée le 31/01/2003

Question posée en séance publique le 30/01/2003

M. André Ferrand. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question, ou plutôt mes questions, s'adressent à M. le ministre des affaires étrangères et concernent la situation en Côte d'Ivoire.
Ces derniers jours, la crise ivoirienne, extrêmement complexe depuis le début, a sombré dans une grande confusion. Ses conséquences, déjà très lourdes en termes économiques, sont devenues particulièrement inquiétantes pour la sécurité de notre importante communauté.
M. Didier Boulaud. C'est le début de la fin !
M. René-Pierre Signé. Le piège se referme !
M. André Ferrand. La France a pris en temps utile ses responsabilités. Son engagement et sa détermination ont été à la hauteur de celles-ci.
Pour son honneur, notre pays a voulu éviter à tout prix que se renouvelle un de ces scénarios tragiques tels que l'Afrique en a trop souvent connus, ces dernières années en particulier.
Le processus qui a conduit aux accords de Marcoussis a été salué par tous. Ces accords ont été approuvés par le sommet africain qui l'a suivi et pendant lequel ont été également négociées la désignation d'un nouveau Premier ministre...
M. René-Pierre Signé. Ils ont de la chance ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. André Ferrand. ... ainsi que la composition du futur gouvernement. Il convient de bien distinguer ces deux étapes, car c'est à partir de ce moment que les choses se sont gâtées.
L'annonce de la désignation de deux représentants du MPCI, le Mouvement des patriotes de Côte d'Ivoire, aux fonctions de ministre de l'intérieur et de ministre de la défense a fait l'effet d'un véritable chiffon rouge, ce qui a conduit à la situation actuelle.
M. Nicolas About. Ce sont eux qui ont les armes !
M. André Ferrand. J'en arrive, monsieur le ministre, à mes questions.
Vous l'avez répété ailleurs, tout est prévu pour la sécurité de nos compatriotes de Côte d'Ivoire, et il existe un plan pour une éventuelle évacuation. Pouvez-vous nous donner quelques informations complémentaires ? En particulier, peut-on imaginer, en ville, des patrouilles mixtes réunissant soldats ou gendarmes français et hommes des forces armées de Côte d'Ivoire ?
En tant que sénateur des Français de l'étranger, j'ai interrogé nos délégués au Conseil supérieur des Français de l'étranger, tous présents sur place, ainsi qu'une compatriote présidente d'association. Tous souhaitent que l'information sur la situation en Côte d'Ivoire circule le mieux possible parmi eux. Ils ressentent, en effet, le besoin d'être rassurés. Quelles mesures peut-on envisager en ce sens ?
Quant à la poursuite du processus lui-même, n'est-il pas possible, monsieur le ministre, dans le strict respect des accords de Marcoussis, et sans commettre l'erreur de repousser le balancier trop loin dans l'autre sens, de faire en sorte, pour les portefeuilles de la défense et de l'intérieur, de désigner deux personnalités que toutes les parties accepteraient ?
Cette question est essentielle, à en croire ce que nous ont dit nos compatriotes de Côte d'Ivoire, dont je tiens à saluer ici le sang-froid et la confiance tout en les assurant de toute notre solidarité agissante.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères publiée le 31/01/2003

Réponse apportée en séance publique le 30/01/2003

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous l'avez parfaitement dit, la Côte d'Ivoire est aujourd'hui face à une alternative grave.
M. René-Pierre Signé. Le piège !
M. Dominique de Villepin, ministre. Ce sera ou bien la paix, la réconciliation, la reconstruction - c'est le choix de la France pour sortir de la catastrophe annoncée, du piège qui était tendu à la Côte d'Ivoire...
M. René-Pierre Signé. Ah ! vous voyez !
M. Dominique de Villepin, ministre. ... ou bien la guerre civile, l'embrasement régional ; c'est ce qui se serait déjà produit si la France n'avait pas décidé d'assumer ses responsabilités devant la communauté internationale et devant tous les Ivoiriens.
Un choix clair a été opéré à Paris.
D'abord, le choix de réformes de fond, différées depuis trop d'années...
M. René-Pierre Signé. Ah ! ça y est !
M. Dominique de Villepin, ministre. ... qu'il s'agisse des questions d'identité, de nationalité, de loi foncière, du statut des étrangers, toutes questions qui ont gangrené littéralement la Côte d'Ivoire depuis une dizaine d'années.
Ensuite, le choix, à Paris, d'un Premier ministre d'union nationale par l'ensemble des forces politiques ivoiriennes, sur proposition du président Gbagbo.
Le choix, encore, d'une répartition des portefeuilles effectuée par l'ensemble des forces politiques ivoiriennes réunies à Paris,...
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas comme en France !
M. Dominique de Villepin, ministre. ... avec l'accord du président Gbagbo.
Le choix, enfin, de garantir ce processus, ce qui explique que nous ayons demandé aux plus grands représentants de la communauté internationale - communautés régionales, Union africaine, secrétaire général du Conseil de sécurité - de venir à Paris.
Chacun le voit, nous sommes dans une phrase de transition difficile. On ne passe pas de la guerre à la paix sans efforts. Dans cette entreprise, l'appui de tous est donc nécessaire. En Côte d'Ivoire, que chacun prenne ses responsabilités ! En France, que chacun soutienne les efforts de la diplomatie française au service de nos amis africains !
Vous avez raison, il faut répondre à l'inquiétude de l'ensemble de la communauté française, et c'est pour cela que nous avons activé les dispositifs d'urgence, que nous avons mis en place les plans de sécurité et que nous avons renforcé nos moyens de gendarmerie pour faire face à toute éventualité sur place.
D'ores et déjà, des messages sont transmis, parfois plusieurs fois par jour, et diffusés par l'ensemble des chefs d'îlot, qui ont été sensibilisés à la nécessité de renforcer les communications.
M. René-Pierre Signé. Pour quel résultat ?
M. Dominique de Villepin, ministre. L'évacuation n'est pas à l'ordre du jour, mais toutes les dispositions sont prises pour faire face à cette éventualité si elle devait s'imposer.

Le résultat, c'est la mobilisation de la diplomatie française, c'est l'effort fait par la France qui, je le crois, honore notre pays et tous ceux qui, militaires, civils, communauté française, font face aujourd'hui à la situation avec un courage que nous souhaitons partagé par tous.

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