Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 31/01/2003

Question posée en séance publique le 30/01/2003

M. Roland Courteau. M. le ministre de l'intérieur a décidé de remettre en marche un ancien projet de redéploiement des effectifs de police et de gendarmerie, préparé par les gouvernements Balladur et Juppé, et que le Gouvernement Jospin avait, dans sa sagesse, préféré retirer. (Exclamations sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Dans sa très grande sagesse ! (Sourires.)
M. Roland Courteau. Mais, pour éviter d'affronter brutalement le mécontentement général, vous procédez à sa mise en place à petites doses et par vagues successives.
M. Didier Boulaud. Sinueusement !
M. Roland Courteau. Populations et élus locaux rejettent en effet catégoriquement un tel projet, qui consiste à supprimer les commissariats de police dans les villes de moins de 20 000 habitants, tandis que les brigades de gendarmerie rurales transféreraient leurs hommes vers ces villes-centres, mais dans des proportions qui n'assureront pas, loin s'en faut, le remplacement de tous les policiers.
Cette mesure entraînerait une diminution des effectifs dans ces villes, mais aussi dans les brigades rurales, pour une couverture du territoire de surcroît en extension.
C'est stupéfiant ! Un vrai déménagement du territoire.
M. René-Pierre Signé. Eh oui !
M. Roland Courteau. Déshabiller les uns pour habiller les autres n'a jamais été une solution. De la même manière, on ne résout pas un problème en le déplaçant, car, aujourd'hui, c'est en milieu rural et péri-urbain que progresse le plus la délinquance.
Est-ce bien le moment de casser ce qui existe et d'affaiblir ces secteurs-là ?
M. René-Pierre Signé. Sarkozy en Lozère !
M. Roland Courteau. Est-ce bien le moment de vouloir passer en force ?
Allez-vous rester sourd au cri d'alarme d'innombrables élus ruraux qui veulent une sécurité égale pour tous et partout sur l'ensemble du territoire ?
M. Laurent Béteille. Vous avez été tellement performants !
M. Roland Courteau. Vous aviez promis à une délégation du Collectif national pour la sécurité publique d'engager une concertation à la mi-décembre sur ce sujet.
Non seulement ils attendent encore, mais la réalité du redéploiement ne correspond en rien aux assurances que vous leur avez données, en votre ministère.
Les décisions, monsieur le ministre, précéderaient-elles toujours la concertation ?
Allez-vous vous raviser et tenir compte de la volonté exprimée par ces élus et ces populations...
M. René-Pierre Signé. Ils s'en foutent !
M. Roland Courteau. ... ou bien préférez-vous avoir raison contre tous, en imposant vos vues de manière arbitraire ?

- page 503


Réponse du Ministère délégué aux libertés locales publiée le 31/01/2003

Réponse apportée en séance publique le 30/01/2003

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, la différence qu'il y a entre le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et le gouvernement de Lionel Jospin sur cette question...
M. René-Pierre Signé. Elle est énorme !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... est fondamentale.
Mme Danièle Pourtaud. Parfaitement !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Elle tient à deux principes. Le premier, c'est que la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure a prévu l'embauche sur cinq ans de 13 500 policiers et gendarmes supplémentaires...
Mme Nicole Borvo et M. René-Pierre Signé. Mais vous avez supprimé beaucoup plus d'emplois-jeunes !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... qui sont donc affectés sur le terrain. Par conséquent, la réforme est mise en oeuvre avec, au minimum, dans le pire des cas, des effectifs constants et, dans la plupart des cas, des effectifs en augmentation grâce à ce recrutement de 13 500 policiers et gendarmes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Dominique Braye. Bravo !
M. Roland Courteau. Vous savez que ce n'est pas vrai !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Avec M. Jospin, c'était un procédé pour réduire les effectifs sur le terrain. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Je comprends que vous vous y soyez vous-même opposés à ce moment-là !
M. René-Pierre Signé. Ils n'ont pas les mêmes qualités !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Deuxième différence avec le gouvernement Jospin, c'est que, dans notre cas, la concertation vient de la base. (M. Didier Boulaud s'esclaffe.) Les préfets organisent dans chacun des départements, y compris dans le vôtre, une concertation. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Didier Boulaud. Venez dans mon département !
M. René-Pierre Signé. Venez voir dans la Nièvre !
M. Roland Courteau. Ce n'est pas de la concertation !
M. Dominique Braye. Soyez honnêtes au moins !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Et c'est seulement à partir d'éléments de concertation et d'analyses sur le terrain que les décisions sont prises au niveau du Gouvernement.
Un sénateur socialiste. C'est de la théorie !
M. René-Pierre Signé. Venez voir dans les territoires ruraux !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. M. Jospin faisait exactement l'inverse, c'est-à-dire que M. Vaillant décidait dans son ministère, et l'on imposait à la population la nouvelle mécanique.
Et cela est si vrai, monsieur le sénateur, que, dans les résultats aussi, les choses sont différentes.
M. René-Pierre Signé. Vous ne savez pas quoi dire !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. D'abord, le redéploiement qui a été engagé dans trente-trois départements a été accepté sans aucune difficulté, grâce à un consensus.
M. René-Pierre Signé. Vous êtes dans votre tour d'ivoire !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. En ce qui concerne votre département, monsieur Courteau, le préfet a adressé au ministre de l'intérieur un rapport circonstancié et technique, et aucune décision n'est encore prise à ce jour : la concertation continue.
M. René-Pierre Signé. On attend de voir !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Cette réorganisation est si efficace que, toujours dans votre propre département, les faits élucidés ont augmenté de 26 % depuis le mois de mai et que le nombre de personnes placées en garde à vue a progressé de 36 %. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.) C'est donc une action beaucoup plus efficace que celle des gouvernements précédents. Cela fait la différence !
Je vous rappelle enfin, monsieur le sénateur, que l'actuelle répartition des forces entre police et gendarmerie date de 1941. Il n'est pas interdit de tenir compte des évolutions démographiques intervenues depuis lors.

- page 503

Page mise à jour le