Question de Mme GAUTIER Gisèle (Loire-Atlantique - UC) publiée le 13/03/2003

Mme Gisèle Gautier attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur les dispositions du code du travail, notamment dans son article L. 351-12 de la loi du 30 juillet 1987. En effet, cet article dispose que les agents des collectivités locales ont droit aux allocations d'assurance chômage dans les conditions prévues pour les salariés du secteur privé. Ainsi la révocation pour faute n'exclut pas du bénéfice d'une allocation l'agent public s'étant rendu coupable d'un fait répréhensible, ayant entraîné une condamnation à une peine d'emprisonnement. Compte tenu des droits et obligations des fonctionnaires inscrits dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, elle souhaiterait connaître quelle adaptation de ce dispositif pourrait être envisageable ? En effet, il est aujourd'hui indispensable d'adapter certaines dispositions, afin que tout fonctionnaire faisant l'objet d'une révocation en raison de la commission d'un crime ou d'un délit, tels que faux en écriture publique ou harcèlement moral...., ne puisse bénéficier d'une allocation pour perte d'emploi. Ainsi, l'application de l'article L. 351-12, susvisé, ne prévoit pas l'exclusion du bénéfice de ces allocations en cas de licenciement pour motif disciplinaire, ces allocations sont ainsi versées par la collectivité qui se voit contrainte d'assumer une double charge en terme de masse salariale en procédant au remplacement de l'agent. Par conséquent, s'agissant de situations graves, elle lui demande de bien vouloir lui faire connaître s'il envisage une révision de ces dispositions afin de prendre à travers des circonstances exceptionnelles, des sanctions justes et équitables.

- page 1685


Réponse du Secrétariat d'Etat à la réforme de l'État publiée le 30/04/2003

Réponse apportée en séance publique le 29/04/2003

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier, auteur de la question n° 206, adressée à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.

Mme Gisèle Gautier. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur les dispositions du code du travail, notamment sur l'article L. 351-12 de celui-ci, résultant de la loi du 30 juillet 1987.

En effet, cet article dispose que les agents des collectivités territoriales ont droit aux allocations d'assurance chômage dans les conditions prévues pour les salariés du secteur privé.

Ainsi, la révocation pour faute n'exclut pas du bénéfice de cette allocation l'agent public s'étant rendu coupable d'un fait répréhensible ayant entraîné une condamnation à une peine d'emprisonnement. Compte tenu des droits et obligations des fonctionnaires inscrits dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, je souhaiterais savoir quelle adaptation de ce dispositif pourrait être envisagée.

En effet, il est aujourd'hui indispensable, me semble-t-il, d'adapter certaines dispositions, afin qu'un fonctionnaire faisant l'objet d'une révocation en raison de la commission d'un crime ou d'un délit tels que, par exemple, faux en écriture publique ou harcèlement moral, ne puisse bénéficier d'une allocation pour perte d'emploi. L'article L. 351-12 susvisé ne prévoit pas l'exclusion du bénéfice de ces allocations en cas de licenciement pour motif disciplinaire, lesquelles sont donc versées par la collectivité, qui se voit contrainte d'assumer une double charge, en termes de masse salariale, en raison du remplacement de l'agent.

Par conséquent, s'agissant de situations que l'on peut qualifier de graves, je souhaiterais savoir s'il est envisagé de procéder à une révision des dispositions en question, afin que puissent être prises, dans des circonstances exceptionnelles, des sanctions justes et équitables.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Madame le sénateur, votre question reflète les préoccupations des responsables de nombreuses collectivités territoriales, qui comprennent difficilement pourquoi, en cas de révocation pour faits graves, s'agissant notamment des délits que vous avez évoqués, l'employeur est tenu de verser une allocation chômage.

Comme vous l'avez rappelé, cela tient à l'application de l'article L. 351-12 du code du travail, selon lequel les agents des collectivités territoriales révoqués, qu'ils soient ou non titulaires, ont effectivement droit aux allocations d'assurance chômage dans les conditions prévues pour les salariés du secteur privé à l'article L. 351-3 du même code, qui dispose que « l'allocation d'assurance est attribuée aux travailleurs mentionnés à l'article L. 351-1 qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ». Une analogie est donc établie entre le régime d'indemnisation des salariés du secteur privé et celui des fonctionnaires des collectivités territoriales.

Par conséquent, un revenu de remplacement est attribué tant aux fonctionnaires titulaires qu'aux agents non titulaires involontairement privés d'emploi, et les procédures de prise en charge prévues par la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale n'ont pas lieu de s'appliquer.

Aucune disposition législative ou réglementaire, aucune disposition de la convention du 1er janvier 2001 n'a exclu du bénéfice de ce revenu de remplacement les personnels, notamment ceux des collectivités territoriales, involontairement privés d'emploi à la suite d'un licenciement pour motif disciplinaire. Cette situation a été confirmée à plusieurs reprises par la jurisprudence administrative, en particulier par l'arrêt du Conseil d'Etat du 25 janvier 1991 « Ville de Marseille », qui fait référence.

Le principe de l'alignement des régimes d'indemnisation du chômage des agents des collectivités locales sur celui des salariés du secteur privé permet d'assurer une bonne lisibilité des règles d'indemnisation. Il n'est pas, pour l'heure, envisagé d'instaurer une dérogation à ce régime commun visant à éviter aux seules collectivités territoriales de verser les allocations d'aide au retour à l'emploi à leurs anciens agents licenciés pour motif disciplinaire. Une telle dérogation nuirait à la lisibilité des règles d'indemnisation du chômage et pourrait créer, à situation identique et en vertu des règles d'indemnisation actuelles, une inégalité de traitement entre employeurs publics et employeurs privés.

En effet, l'agent d'une collectivité locale licencié pour motif disciplinaire mais ayant travaillé plus longtemps pour un employeur du secteur privé que pour son employeur territorial voit le versement de son indemnisation chômage pris en charge par le régime d'assurance chômage général. L'instauration d'une dérogation au profit des collectivités locales aurait pour effet de contraindre, dans certains cas, le régime d'assurance chômage à prendre en charge l'indemnisation de l'agent, alors que l'employeur territorial serait exonéré d'une telle obligation.

Madame le sénateur, il s'agit donc d'une question qui ne peut être soulevée que dans un cadre général et qui concerne aussi bien les employés du secteur privé que les agents du secteur public.

Cela dit, je vous rappelle que des règles statutaires propres à la fonction publique territoriale prennent en compte cette situation et permettent de pénaliser l'agent territorial licencié pour motif disciplinaire.

Ainsi, selon l'article 43 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984, lorsque le licenciement d'un agent non titulaire intervient pour des motifs disciplinaires, ce dernier n'a pas droit à l'indemnité de licenciement. Il en va de même pour les fonctionnaires territoriaux en vertu de l'article 93 de la loi portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Ce régime présente donc un certain équilibre, même s'il est vrai que, dans certains cas particulièrement choquants, les collectivités locales ne comprennent pas qu'elles doivent indemniser des agents qui ont commis des fautes graves. Le Gouvernement en a conscience, mais le dispositif ne pourra être réexaminé qu'après une concertation d'ensemble, car serait concernée l'intégralité du régime d'assurance chômage.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Gautier.

Mme Gisèle Gautier. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai écouté avec beaucoup d'attention vos propos, qui, malheureusement, ne peuvent me satisfaire.

Il est, en effet, difficilement supportable pour une collectivité de devoir rémunérer pendant de longs mois un ancien agent qui a été destitué de la fonction publique territoriale pour faute grave et, parallèlement, d'assumer le poids de son remplacement en termes de masse salariale.

Il y a, me semble-t-il, une certaine carence qu'il faudra peut-être - je reprends vos propos - intégrer dans une réflexion globale relative aux collectivités territoriales.

- page 2705

Page mise à jour le