Question de M. DOMEIZEL Claude (Alpes de Haute-Provence - SOC) publiée le 01/05/2003

M. Claude Domeizel attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur les difficultés qui apparaissent pour la prochaine rentrée scolaire. Il note que les mouvements de protestation à l'égard du service public se multiplient, qu'ils viennent des parents ou du personnel (enseignant ou non). Les motifs ne manquent pas : suppression des aides-éducateurs et des surveillants, suppression de 5 000 postes de contractuels, transfert de personnel par le biais de la décentralisation, insuffisance d'enseignants pour la prochaine rentrée scolaire. Dans le département des Alpes-de-Haute-Provence, le mécontentement s'amplifie tant dans l'enseignement élémentaire et préélémentaire que dans les collèges. L'élaboration de la carte scolaire du primaire est laborieuse par manque de création de postes. Dans les collèges, les dotations horaires sont en diminution pour un nombre d'élèves identique ou supérieur. Pour exemple, le collège Jean-Giono à Manosque, classé en ZEP, voit, pour une structure équivalente et un effectif quasiment inchangé, sa dotation horaire 2003/2004 fortement diminuée, la dotation de la SEGPA restant en deçà des exigences minimum officielles. Le temps d'enseignement de la totalité des matières s'en trouve réduit. De plus, l'obligation d'intégrer des heures " itinéraires de découvertes ", discipline nouvelle et intéressante, fait disparaître des heures d'enseignement général non compensées par ailleurs. Globalement, cet établissement, mais il n'est malheureusement pas un cas isolé, comptabilise un déficit d'une quarantaine d'heures pour assurer un enseignement normal. Outre les conséquences dont seront victimes les élèves, les conditions de travail risquent de créer un découragement parmi le personnel particulièrement dans les collèges situés dans les secteurs difficiles. Dans le cadre d'une rigueur budgétaire appliquée à l'éducation nationale, on peut craindre qu'une simple opération comptable porte atteinte à la qualité de ce service public dans une période où plus que jamais la jeunesse a besoin, par le biais de l'école, de références pour se construire. Les élèves, les enseignants et les parents attendent une réponse rassurante de sa part.

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Réponse du Ministère délégué à l'enseignement scolaire publiée le 28/05/2003

Réponse apportée en séance publique le 27/05/2003

M. Claude Domeizel. Hasard et aléas du calendrier, la question que j'ai adressée à M. le ministre voilà quelques semaines n'est inscrite qu'aujourd'hui à l'ordre du jour. Depuis, la situation a sensiblement évolué, mais ma question reste d'actualité, car elle traite de l'un des thèmes révélateurs du malaise de l'éducation nationale.

Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur les difficultés qui se font jour pour la prochaine rentrée scolaire. Les mouvements de protestation à l'égard du service public se multiplient, qu'ils proviennent des parents ou du personnel, enseignant ou non.

J'écrivais ces lignes il y a quelques semaines et, depuis, les mouvements se sont amplement multipliés.

Les motifs de protestation ne manquent pas : suppression des aide-éducateurs et des surveillants, suppression de 5 000 postes de contractuels, transfert de personnels par le biais de la décentralisation, insuffisance du nombre d'enseignants pour la prochaine rentrée scolaire.

Dans le département des Alpes-de-Haute-Provence, le mécontentement s'amplifie dans l'enseignement tant élémentaire et préélémentaire que secondaire.

L'élaboration de la carte scolaire du primaire est très laborieuse du fait du manque de création de postes. Dans les collèges, les dotations horaires sont en diminution alors que le nombre d'élèves est identique ou supérieur.

Par exemple, le collège Jean-Giono à Manosque, classé en ZEP, voit, pour une structure équivalente et un effectif quasiment inchangé, sa dotation horaire pour 2003-2004 fortement diminuée, la dotation de la section d'enseignement général et professionnel adapté, la SEGPA, restant en deçà des exigences minimales officielles.

Le temps d'enseignement de la totalité des matières s'en trouve réduit. De plus, l'obligation d'intégrer des heures consacrées aux « itinéraires de découvertes », discipline nouvelle et intéressante, font disparaître des heures d'enseignement général non compensées par ailleurs.

Globalement, cet établissement, qui n'est malheureusement pas un cas isolé, comptabilise un déficit d'une quarantaine d'heures pour assurer un enseignement normal.

Un professeur me disait hier qu'il s'agissait d'une remise en cause de la politique de l'un de vos prédécesseurs, M. Allègre, qui avait créé des postes afin de supprimer les heures supplémentaires. Aujourd'hui, on compense de nouveau le manque de professeurs par des heures supplémentaires.

Outre les conséquences dont seront victimes les élèves, les conditions de travail risquent de décourager le personnel, particulièrement dans les collèges situés dans les secteurs difficiles.

En période de rigueur budgétaire pour l'éducation nationale, il est à craindre qu'une simple opération comptable ne porte atteinte à la qualité de ce service public dans une période où, plus que jamais, la jeunesse a besoin, par le biais de l'école, de références pour se construire.

Les élèves, les enseignants et les parents attendent une réponse rassurante de votre part, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez, comme le font beaucoup d'élus, sur la situation du département dont vous êtes le représentant à la Haute Assemblée, le département des Alpes-de-Haute-Provence, et plus spécifiquement sur celle du collège Jean-Giono de Manosque.

Vous connaissez la méthode que nous utilisons pour répartir les emplois d'enseignants et vous savez que celle-ci n'obéit qu'à un seul but : assurer l'équité des dotations entre les académies en tenant compte à la fois de la démographie des élèves et des disparités de la situation géographique et sociale de la région concernée. Nous faisons donc simplement un effort de justice.

Outre l'évolution démographique et l'indicateur du taux d'encadrement global, trois sortes d'indicateurs sont pris en compte pour l'élaboration de la carte scolaire : l'indicateur territorial, calculé à partir de la densité de la population des enfants âgés de deux à seize ans, du poids du secteur rural isolé, et d'un certain nombre de paramètres du même ordre ; l'indicateur social, établi en fonction du pourcentage de RMIstes, de chômeurs, de ménages en difficulté ; l'indicateur des « contraintes structurelles », évalué par rapport au nombre d'établissements de faible taille ou classés en ZEP.

Sur la base de ces trois indicateurs, les décisions se prennent en concertation avec l'ensemble des partenaires concernés, dont les élus. J'ai d'ailleurs demandé aux recteurs et aux inspecteurs d'académie de réunir les conseils académiques de l'éducation nationale et les conseils départementaux de l'éducation nationale dès le premier trimestre de l'année scolaire pour expliquer cette politique, ce qu'ils ont fait.

S'agissant du département des Alpes-de-Haute-Provence, je m'en tiendrai aux chiffres, même si je comprends parfaitement que chacun puisse souhaiter plus encore qu'il n'est fait !

Contrairement à ce que vos propos pourraient laisser croire, monsieur le sénateur, le taux d'encadrement des élèves dans le premier degré n'a pas fléchi. Il a même augmenté sur la période 2001-2003. Ainsi, en 2001-2002, on comptait 5,66 enseignants pour 100 élèves. En 2002-2003, on en comptait 5,76. Ce chiffre devrait rester constant, voire s'améliorer, en 2003.

Pour ce qui concerne plus précisément le collège Jean-Giono de Manosque, ce collège, classé en ZEP, a bénéficié d'une dotation de 583 heures d'enseignement, auxquelles nous avons ajouté 35 heures diverses, ce qui porte le total à 618 heures. Cette dotation initiale a été en outre majorée et portée à 636 heures.

C'est une situation, je vous l'assure, tout à fait favorable par rapport à la moyenne des collèges classés en ZEP de l'académie. C'est donc à tort que vous vous inquiétez si vous pensez que l'enseignement ne sera pas assuré dans de bonnes conditions. En tout cas, je vous confirme que l'ensemble des enseignements sera parfaitement assuré dans le cadre de la réglementation en vigueur.

Tels sont les éléments que je suis en mesure de vous apporter, monsieur le sénateur. On peut toujours espérer mieux. Nous répartissons les moyens dont nous disposons en fonction de ce que nous croyons être l'intérêt général. Dans le cas du collège Jean-Giono à Manosque, je vous assure qu'il n'y a aucune raison d'avoir des craintes. Il faut rassurer les élèves, les parents et les enseignants, car les moyens affectés permettront d'assurer une année scolaire 2003-2004 tout à fait convenable.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, je ferai part aux enseignants du collège Jean-Giono de Manosque comme aux enseignants des autres collèges de mon département de votre réponse. Vous la jugez rassurante et j'espère qu'elle les rassurera. Pour ma part, elle ne me rassure pas du tout.

En ce qui concerne l'enseignement élémentaire et préélémentaire, vous avez dit que mon département, qui compte 141 000 habitants répartis sur 200 communes, était bien doté puisqu'il bénéficiait d'un ratio de 5,66 enseignants pour 100 élèves. Or permettez-moi de vous répondre que ce genre de ratio n'a vraiment aucune valeur (M. Dominique Braye s'exclame) dans un tel département. Il y a lieu en effet de tenir compte de la désertification et des difficultés à pourvoir des postes dans certains lieux reculés.

Je regrette que le mouvement de rattrapage avec le département voisin des Hautes-Alpes, qui avait été engagé par le précédent gouvernement avec la création de trente postes, soit aujourd'hui arrêté. Je suis certain, à entendre les propos que tiennent les enseignants et les parents d'élèves que j'ai rencontrés dans l'enseignement primaire et préélémentaire, que ces derniers ne seront pas satisfaits de votre réponse.

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