Question de M. MOULY Georges (Corrèze - UMP) publiée le 02/10/2003

M. Georges Mouly attire l'attention de Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur l'importante question de la facilitation de l'insertion professionnelle des handicapés. A l'heure en effet où semble aboutir concrètement la révision, tant attendue, de la loi d'orientation n° 75-534 du 30 juin 1975, plus de 200 000 personnes handicapées sont toujours sans emploi, tandis que la complémentarité, entre milieu protégé et milieu ordinaire, n'est toujours pas satisfaisante, faute de passerelles aménagées entre les deux. C'est pourquoi il lui demande, d'une part, ce qu'elle compte mettre en oeuvre pour assurer l'égalité des chances entre les travailleurs handicapés et les autres catégories de travailleurs par l'élimination des discriminations, la révision du dispositif de reconnaissance du travailleur handicapé et des missions de l'Association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH) et, d'autre part, quelle place le secteur, dit " adapté " et plus particulièrement celui des ateliers protégés devenant des " entreprises adaptées ", tiendra dans le projet de réforme du Gouvernement.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux personnes handicapées publiée le 08/10/2003

Réponse apportée en séance publique le 07/10/2003

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, en remplacement de M. Georges Mouly, auteur de la question n° 298, adressée à Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées.

M. Claude Biwer. Lors de la remise des Cahiers de la dignité par l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales, l'UNAPEI, le 27 septembre 2003, vous avez déclaré ceci, madame la secrétaire d'Etat : « Les principes fondamentaux de la nouvelle loi en préparation sont au nombre de trois : la non-discrimination, le choix du mode de vie, la compensation du handicap. »

« La dignité de la personne handicapée, c'est leur intégration dans une société où elles doivent pouvoir trouver toute la place qui leur est due pour le meilleur épanouissement possible. Un des principes fondamentaux : la non-discrimination. Cela implique, entre autres, l'accès à la profession ».

A ce jour, malgré la loi de 1987, 200 000 handicapés sont sans emploi. Devons-nous tout attendre, de ce point de vue précis, de la révision de la loi de 1975 et, au demeurant, attendre cette révision à propos d'un tel sujet ?

Les structures de travail en milieu protégé sont là, pour l'essentiel, les centres d'aide par le travail, les CAT, et les ateliers protégés. Là encore, se pose le principe de l'ouverture sur le milieu ordinaire du travail.

Peut-on alors identifier tous les obstacles à une parfaite réussite du développement de l'emploi des travailleurs handicapés ? Nous sommes notamment préoccupés par la complexité des niveaux de décision et le manque de lisibilité des dispositifs d'aide. Pour ce qui concerne les maisons du handicap, nous relevons un manque d'attractivité du statut du travailleur handicapé, une incitation insuffisante pour l'employeur, un manque de souplesse des dispositifs d'accueil, des passages d'un milieu à l'autre - dans les deux sens -, une insuffisance des fonctions d'accompagnement toujours nécessaires, ainsi que la nécessité de revoir la mission de l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, l'AGEPIH.

Pour le travailleur handicapé, comme pour beaucoup, se pose le problème de l'emploi. Les lignes de force d'une politique pourraient déjà être définies, d'abord dans le sens d'un effort d'information et d'une meilleure connaissance de l'existant. Je crois savoir que, de ce point de vue, l'Association des maires de France, l'AMF, prévoit une démarche de sensibilisation. La même chose pourrait sans doute être faite par les organismes regroupant les employeurs. Parmi les premières mesures possibles figure le statut de l'entreprise adaptée.

Une politique de l'emploi est déjà possible, puisque, comme je l'ai lu, « un plan triennal 2003-2005 en faveur du développement de l'emploi et de l'insertion des travailleurs handicapés va être mis en oeuvre. Il vise le développement de l'emploi et de l'insertion du travailleur handicapé. »

Plus généralement, M. Mouly souhaite savoir où en sont les intentions du Gouvernement connaître les mesures d'ores et déjà envisageables pour ce qui est de l'intégration par le travail et de l'accès à la profession.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, je veux tout d'abord souhaiter un prompt rétablissement à M. Mouly et le remercier de sa question vaste et très riche concernant le handicap.

L'intégration professionnelle des personnes handicapées est naturellement l'un des enjeux majeurs de l'intégration sociale des personnes handicapées.

Je puis à cet égard vous faire part des trois thèmes de réflexion qui guident la préparation du projet de loi devant réformer le texte fondateur de 1975 que le Gouvernement soumettra au Parlement à la fin de cette année.

Le premier sujet de réflexion concerne la sensibilisation et la mobilisation.

Bien entendu, comme vous l'avez souligné fort justement, monsieur le sénateur, la loi ne peut, à elle seule, résoudre toutes les difficultés. Elle peut cependant permettre de lever des freins et contribuer à faire prendre conscience que l'on peut obtenir de meilleurs résultats que ceux que nous constatons aujourd'hui, soit 26 % de chômeurs handicapés, contre 9 % seulement de chômeurs valides.

Nous devons d'abord consentir un effort tout particulier en matière d'intégration scolaire. Non seulement cette dernière conditionne l'avenir professionnel des enfants handicapés, mais elle porte également l'espoir d'un autre regard sur le handicap afin de favoriser une meilleure intégration des personnes handicapées dans notre société.

Dans le monde du travail, au-delà de la réaffirmation du principe fondamental de non-discrimination et de ses implications concrètes, il est également nécessaire que les partenaires sociaux s'approprient le sujet de l'emploi des personnes handicapées et que l'insertion professionnelle de ces dernières trouve sa vraie place au coeur du dialogue social.

Enfin, je crois bien sûr que tous les acteurs de l'intégration professionnelle, les employeurs, l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, l'AGEFIPH, les réseaux de placement spécialisés, ont un rôle déterminant à jouer qu'il faut encourager et valoriser.

Le deuxième thème de réflexion est celui de la souplesse, de la simplification et de la transparence.

L'activité professionnelle des personnes handicapées doit absolument s'inscrire dans le cadre de leur projet de vie. Leur orientation professionnelle ne peut être envisagée sans tenir compte de leurs potentialités et de leurs aspirations. Vous avez évoqué, monsieur le sénateur, les maisons du handicap. Je suis convaincue qu'elles peuvent à cet égard favoriser l'émergence d'un projet professionnel sur la base d'une évaluation partagée avec les intéressés et leur famille dans le cadre d'un dispositif d'orientation rénové.

Il est également besoin de souplesse, de simplification et de transparence s'agissant de l'obligation d'emploi à laquelle sont assujettis les employeurs publics ou privés et qui, malheureusement, n'a pas donné tous les résultats escomptés. Cet outil doit pouvoir être mieux utilisé en privilégiant la responsabilisation des employeurs, l'incitation et l'allégement des procédures.

Enfin, le troisième sujet de réflexion vise la fluidité entre le milieu de travail protégé et le milieu de travail ordinaire.

Le milieu de travail protégé a une vocation d'intégration progressive vers le milieu de travail ordinaire mais, dans les faits, cette vocation ne se concrétise pas de façon satisfaisante. Il convient ici de lever les obstacles qui entravent aujourd'hui le passage d'un travailleur handicapé d'un centre d'aide par le travail en atelier protégé ou d'un atelier protégé en milieu ordinaire.

La réorientation d'un travailleur handicapé vers un milieu moins protégé doit s'appuyer sur des dispositifs « passerelle » permettant de lever la réticence du travailleur handicapé à quitter son établissement et celle de l'employeur à embaucher des travailleurs handicapés en lui permettant, de les accueillir dans un premier temps pour une période déterminée.

Evidemment, il est également nécessaire de porter attention à la hiérarchisation des revenus entre les différents milieux de travail et de promouvoir son caractère incitatif de manière à rendre la dynamique des parcours professionnels plus attractive qu'elle ne l'est aujourd'hui.

Quant aux ateliers protégés, je partage l'avis que vous avez exprimé, monsieur le sénateur, sur l'évolution de ces structures vers un statut d'entreprise adaptée, leur reconnaissant une place spécifique, mais entière, dans le milieu ordinaire de travail.

Telles sont, monsieur le sénateur, résumées à très grands traits, pour tenir dans le temps dont je disposais, les orientations que le Gouvernement souhaite pouvoir décliner en faveur de l'intégration professionnelle des personnes handicapées.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Au nom de mon collègue M. Mouly, je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'Etat. J'ajoute que nous tous, élus, sommes sensibilisés au même problème et que nous apprécions les propos que vous venez de tenir.

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