Question de Mme POURTAUD Danièle (Paris - SOC) publiée le 13/02/2004

Question posée en séance publique le 12/02/2004

Mme Danièle Pourtaud. Ma question s'adresse à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

Monsieur le ministre, toute la communauté scolaire est en émoi face à la situation qui se dessine dans les écoles, les collèges et les lycées pour la rentrée 2004.

Monsieur le ministre, vous venez d'annoncer une baisse en 2004 de 30 %, soit de presque un tiers, des postes ouverts au CAPES et à l'agrégation externe : la diminution est, ainsi, de 24 % pour le CAPES de lettres modernes, de 37 % pour celui de philosophie, sans parler de celle de 70 %, en moyenne, pour les concours spécifiques aux lycées techniques ?

Bref, le nombre de nouveaux postes d'enseignants en 2004 n'a jamais été aussi faible depuis vingt-cinq ans !

A Paris, deux cents suppressions d'emplois sont annoncées, notamment dans les lycées professionnels, alors que l'on attend deux cents élèves de plus.

Mme Nicole Borvo. Dans les lycées professionnels techniques !

Mme Danièle Pourtaud. Pourtant, vous le savez, l'éducation nationale va devoir faire face à des départs massifs à la retraite d'enseignants. Votre audit, commandé en 2002, avait conclu d'ailleurs à la nécessité de recruter un minimum de 15 800 enseignants par an dans l'enseignement secondaire, en tenant compte de la chute des effectifs sur la période de 2004 à 2008. Or vous n'en recruterez que 12 500 en 2004.

La situation n'est pas meilleure dans l'enseignement primaire. Votre budget pour 2004 permettra certes de recruter 1 500 professeurs des écoles, mais cette hausse est totalement insuffisante pour accueillir les 55 000 enfants supplémentaires à la rentrée prochaine et pour faire face à l'afflux des élèves dans les années à venir.

Là encore, permettez-moi de prendre un exemple parisien : quatre-vingt-trois fermetures de classes, c'est sans précédent !

Monsieur le ministre, vous avez déjà diminué de 10 500 le nombre d'adultes présents dans les établissements scolaires (Exclamations sur les travées de l'UMP)...

M. Alain Fouché. C'est faux !

M. Jean-Pierre Sueur. C'est vrai !

Mme Danièle Pourtaud. ... avec la suppression des surveillants, des emplois-jeunes, des conseillers principaux d'éducation.

M. Claude Domeizel. Eh oui !

M. Alain Fouché. C'est faux !

Mme Danièle Pourtaud. Certes, il est question d'affecter par-ci, par-là, des policiers dans les établissements scolaires !

Vous allez casser la cohérence des équipes éducatives en maintenant le transfert des personnels administatifs, techniciens, ouvriers et de service, ATOS, aux régions. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Aujourd'hui, vous diminuez le nombre d'enseignants.

Monsieur le ministre, les parents d'élèves et les enseignants savent ce que cette baisse du taux d'encadrement signifie, en termes de violence dans les établissements et de lutte contre l'échec scolaire, deux des thèmes majeurs ressortant de votre grand débat pour l'école.

Monsieur le ministre, ma question est simple (Exclamations sur les travées de l'UMP), très simple : quand allez-vous cesser de démanteler l'éducation nationale (Rires sur les travées de l'UMP), avec une politique qui sacrifie l'avenir de la jeunesse de notre pays à de petits calculs budgétaires ?

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Réponse du Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche publiée le 13/02/2004

Réponse apportée en séance publique le 12/02/2004

M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Madame la sénatrice, comme vous le savez, le budget de l'éducation nationale augmente de 2,8 % cette année.

Le problème se pose de savoir comment répartir à l'intérieur de cette enveloppe les différentes lignes budgétaires, s'agissant notamment des créations de postes.

En ce qui concerne les concours qui auront lieu en juin pour la rentrée de 2005, nous ne prenons pas nos décisions au hasard. Nous fondons notre réflexion sur quatre critères.

Le premier que vous avez indiqué concerne les départs à la retraite. Dans l'enseignement du second degré, 16 500 départs à la retraite sont prévus à la rentrée 2005.

Le deuxième critère a trait à l'évolution démographique des élèves. Devant l'augmentation significative du nombre d'élèves dans l'enseignement du premier degré, nous avons décidé d'ouvrir 13 000 postes aux concours pour la rentrée de 2005, contre 12 000 l'année dernière. En revanche, nous prévoyons une baisse de 100 000 élèves au cours des trois ans à venir, ce qui représente une réduction des besoins de près de 4 000 postes pour la rentrée 2005.

Par conséquent, compte tenu des 16 500 départs à la retraite et de la diminution des besoins de 4 000 postes, on obtient un nombre exact de 12 500 postes inscrits au budget.

Le troisième critère important que nous prenons en compte est lié à la sélectivité des concours. Il faut éviter de décourager les étudiants tout en conservant la qualité du recrutement. La sélectivité des concours est moins dure pour les étudiants aujourd'hui qu'elle ne l'était en 1999. Mais il ne faut pas non plus aller trop loin dans l'autre sens, recruter n'importe qui à n'importe quel prix !

Le quatrième critère que nous retenons est le maintien des taux d'encadrement, c'est-à-dire du nombre d'élèves par classe.

La prise en compte de ces quatre critères démontre qu'il faut augmenter le recrutement d'enseignants dans le premier degré, c'est ce que nous faisons, et bien évidemment le diminuer dans le second degré.

Comment pourrais-je justifier, devant la commission des finances du Sénat, le recrutement de professeurs d'éducation physique et sportive ou d'espagnol alors qu'ils sont déjà en surnombre et que les académies n'en veulent pas ?

Ce choix s'explique par une raison très simple : j'ai besoin de cet argent pour financer d'autres projets, par exemple pour créer 300 classes d'accueil pour les enfants handicapés dans le second degré. Il serait totalement irresponsable, par simple démagogie, parce que c'est la seule chose que l'on regarde, de faire de l'affichage en termes de postes alors que l'on a besoin d'argent ailleurs.

Telle est la réponse que je souhaitais vous apporter, madame la sénatrice. Je peux vous assurer que les élèves seront bien accueillis.

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