Question de M. MARC François (Finistère - SOC) publiée le 20/05/2004

M. François Marc attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur les conséquences de l'article L. 132-8 du code de commerce. En conférant au transporteur une possibilité d'action en paiement directe à l'encontre du chargeur ou du destinataire, cet article induit, dans le contexte propre au secteur du transport de sous-traitance généralisée et de faillites nombreuses, d'importantes difficultés pour les chargeurs. Comme cela a pu être constaté pour les expéditeurs de fruits et légumes du Finistère, ceux-ci sont fréquemment confrontés à des doubles paiements lorsque le sous-traitant d'un transporteur défaillant demande au donneur d'ordre le paiement d'une prestation qu'il a néanmoins déjà réglée au transporteur contractant. Par ailleurs, lorsqu'ils s'adressent aux destinataires pour paiement, les transporteurs peuvent troubler sérieusement la relation commerciale existant entre ces derniers et leurs fournisseurs. Certes, un récent arrêt de la Cour de cassation limite la portée de l'article L. 132-8 en privant le sous-traitant de l'action directe lorsque le donneur d'ordre a pris soin d'interdire la sous-traitance par contrat. Cependant, cette évolution jurisprudentielle, qui est par nature susceptible de n'être pas pérenne, ne règle pas toutes les difficultés, dans la mesure, notamment, où le secteur du transport fait assez peu usage du contrat. Pour toutes ces raisons, il souhaiterait savoir si le Gouvernement envisage de réduire les effets néfastes de l'article L. 132-8, de façon à éviter les doubles paiements, sans pour autant remettre en cause le principe de l'action directe.

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Réponse du Ministère de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer publiée le 08/07/2004

L'article L. 132-8 du code de commerce prévoit que la lettre de voiture, établie pour effectuer un transport routier, a valeur de contrat pour toutes les parties concernées par l'opération. Sur cette base, le transporteur voiturier peut demander le paiement de ses prestations à l'expéditeur ou au destinataire de la marchandise, dans le cas où son cocontractant direct ne l'a pas rémunéré. La rédaction de cet article, qui résulte de la loi du 6 février 1998, confirme l'évolution jurisprudentielle, les tribunaux considérant qu'il résultait des dispositions alors en vigueur que pour être payé, un transporteur pouvait se retourner contre l'une ou l'autre des parties au contrat, sans se limiter au cosignataire. Il peut en résulter que la partie qui a déjà payé le commissionnaire de transport ou le transporteur principal défaillant soit amenée à payer en plus l'entreprise qui a exécuté la prestation de transport. C'est ce qui est appelé le double paiement. Lorsqu'un commissionnaire ou un transporteur principal est en redressement judiciaire ou en dépôt de bilan, l'expéditeur ou le destinataire peuvent régler directement au transporteur le montant de ses prestations et ne payer à l'administrateur judiciaire, ou au mandataire liquidateur que le prix de la commission de l'entreprise dont il a la charge. Actuellement, il n'est pas envisagé de modifier à nouveau l'article L. 132-8 du code de commerce. Une modification serait en toute hypothèse prématurée, la jurisprudence en la matière étant loin d'être stabilisée. A cet égard, de récentes décisions de justice tendent à renforcer le formalisme de la lettre de voiture et à tirer les conséquences de l'attitude de certains transporteurs qui ont accepté des contrats tout en sachant pertinemment qu'ils ne pourraient pas être payés par leur cocontractant direct. Il est donc conseillé aux chargeurs, expéditeurs ou destinataires, de se concerter avec les commissionnaires de transport et les transporteurs pour anticiper les accidents de paiement et tirer le meilleur profit de la réforme récente du code de commerce. Un chargeur peut par exemple exiger par contrat du commissionnaire de transport qu'il joigne à sa facture un justificatif de paiement de ses sous-traitants. Il lui est aussi possible de demander par contrat à un transporteur de ne pas sous-traiter et de ne le payer qu'au vu d'une attestation de non-sous-traitance du contrat de transport.

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