Question de M. HUE Robert (Val-d'Oise - CRC) publiée le 28/04/2005

M. Robert Hue souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur deux des problèmes inhérents au transport aérien, que sont la pollution sonore subie par les riverains de Roissy - Charles-de-Gaulle et l'aide à l'insonorisation. Le rapport d'activité 2004 de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires remis au Président de la République le 31 mars 2005, dénonce, encore une fois, le manque de moyens financiers dégagés par l'Etat pour l'insonorisation des logements, qui concerne 63 000 logements autour de Roissy. Pour ce faire, l'Etat devrait débloquer chaque année100 millions d'euros alors qu'actuellement 55 millions d'euros seulement sont disponibles grâce à la taxe sur les nuisances aériennes. A ce rythme, l'intégralité des logements concernés devrait être insonorisé dans vingt ans. Pourtant, plusieurs associations contre les nuisances aériennes se sont formées au cours de ces dernières années, pour dénoncer la pollution sonore que les vols, et plus particulièrement ceux de nuit, engendre : 15 % des vols ont été supprimés depuis 2003 mais on peut observer une augmentation des vols avant minuit et après 5 heures alors que le coeur de la nuit englobe les heures comprises entre 23 heures et 6 heures du matin. Il souhaite donc qu'il lui fasse connaître les mesures qu'il compte mettre en oeuvre pour enfin, apporter des réponses concrètes aux riverains victimes de la circulation aérienne, et qui depuis des années ne sont pas écoutés. On ne peut décemment pas continuer le développement d'une activité génératrice de nuisances portant atteinte à la sécurité et à la qualité de vie des habitants.

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Réponse du Ministère délégué au tourisme publiée le 29/06/2005

Réponse apportée en séance publique le 28/06/2005

M. Robert Hue. Monsieur le ministre, la voix des élus concernant les problèmes de pollution sonore subis par les riverains de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, qui se situe dans le département dont je suis l'élu, doit-elle atteindre un certain seuil de décibels avant que le Gouvernement ne l'entende ?

Mon intervention d'aujourd'hui peut apparaître comme du « rabâchage », du « déjà entendu ». Pourtant, le bruit des avions fait partie intégrante de la vie de plus de trois millions de Franciliens, dont les 400 000 riverains de l'aéroport Charles-de-Gaulle que les avions survolent à moins de 1 000 mètres d'altitude. J'habite tout près, je sais de quoi je parle !

Personne ne doit sous-estimer que cette gêne pose un véritable problème de santé publique. Elle peut provoquer une diminution de l'attention, une augmentation de l'agressivité, surtout chez les jeunes. Elle peut également accroître le stress, les troubles de la mémoire, agir sur le système cardio-vasculaire.

Il convient d'ajouter aux effets du bruit, ceux de la pollution atmosphérique, entraînant asthme et bronchite chronique. Comme vous le constatez, monsieur le ministre, la liste est noire et longue.

Les propositions du Gouvernement dans ce domaine sont pour le moins floues. Le secrétaire d'Etat aux transports du précédent gouvernement affirmait, lors des débats sur l'ouverture du capital d'Aéroports de Paris, prendre en compte « des objectifs à la fois d'intérêt général, de service public, de compétitivité et de satisfaction des clients ». Il ajoutait : « Qui oserait prétendre aujourd'hui qu'il est souhaitable de freiner le développement de nos aéroports, entravant par là même le développement économique de la région d'Ile-de-France ? ».

Monsieur le ministre, comment prétendre travailler pour l'intérêt général quand les vols de nuit sont interdits uniquement entre minuit et cinq heures du matin ? Les riverains de Roissy peuvent donc royalement dormir cinq heures par nuit. Vous m'accorderez que c'est un peu court !

Quant à la journée, rien ne s'améliore. Les 700 000 mouvements annuels sont déjà atteints et le développement de 4,3 % par an de l'aviation civile nous conduira rapidement à un million de mouvements sur Roissy. La région parisienne devrait en effet accueillir 140 millions de passagers entre 2012 et 2015, contre moins de 75 millions actuellement.

Le récent rapport d'activité délivré par l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l'ACNUSA, dénonce, une fois encore, le manque de rigueur et l'absence de moyens financiers dégagés par l'Etat pour l'insonorisation des logements. Ce qu'il faudrait, c'est contribuer nettement à soulager les riverains. L'Etat devrait débloquer, chaque année, 100 millions d'euros grâce à la taxe sur les nuisances aériennes.

Pour 2004, le Gouvernement avait promis de débloquer 55 millions d'euros, mais la moitié seulement est tombée dans l'escarcelle. Résultat : un tout petit nombre de demandes d'isolation phonique ont fait l'objet d'un avis favorable : 2 216 en Ile-de-France, alors que 63 000 logements sont en attente rien que dans la zone de Roissy !

Par ailleurs, je vous confirme l'opposition résolue, qui s'est encore manifestée aujourd'hui même, des populations riveraines et de leurs élus au nouveau plan d'exposition au bruit.

Depuis le 11 septembre 2001, les compagnies aériennes ont investi 6 euros par passager pour la sécurité. C'est une bonne chose. Mais quid des demandes des usagers et des élus ainsi que des préconisations du directeur de l'ACNUSA d'ajouter un euro de plus pour améliorer la vie de milliers de riverains ?

Les riverains désespèrent, monsieur le ministre. Que peuvent-ils réellement attendre ? Peuvent-ils espérer une augmentation du budget, une simplification des démarches tendant à insonoriser leur logement, l'arrêt complet des vols de nuit ?

Une solution alternative existe déjà : l'implantation d'un troisième aéroport, mais le précédent ministre des transports l'a abandonnée sans raison sérieuse. Avec une majorité d'élus et de riverains, je le réclame à nouveau avec force !

Concrètement, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre rapidement pour diminuer, enfin, les nuisances réelles et sérieuses autour de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme. Monsieur le sénateur, depuis trois ans, le Gouvernement s'est attaché en priorité à réduire la gêne sonore nocturne autour de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle.

En effet, en 2002, le trafic réalisé entre minuit et cinq heures connaissait, depuis cinq ans, une croissance soutenue de plus de 11 % par an, culminant à 26 000 mouvements par an.

Grâce aux efforts conjugués d'Air France et de La Poste, qui ont accepté de réduire leur activité, ainsi qu'aux limitations qui ont été mises en oeuvre, le nombre de mouvements réalisés dans la tranche horaire courant de minuit à cinq heures du matin a été, en 2004, de 21 400, soit une baisse de 15 %, inversant clairement la tendance passée.

De plus, depuis le 1er avril 2004, les appareils produisant des bruits émergents - les plus perturbateurs du sommeil - ont été interdits sur la plate-forme.

Par ailleurs, la révision du plan de gêne sonore de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, intervenue en 2004, a conduit à une augmentation notable du nombre de riverains pouvant bénéficier du dispositif d'aide à l'insonorisation de leur habitation, qui a été réformé depuis 2002.

Ainsi, le taux du volet bruit de la taxe générale sur les activités polluantes a été fortement réévalué en 2003 pour les nuisances aériennes, notamment pour les vols de nuit. Cette taxe a été remplacée, à compter du 1er janvier 2005, par une taxe sur les nuisances sonores aériennes d'un montant identique mais dont le produit est intégralement affecté au financement des mesures d'insonorisation.

Les effets de ces mesures se sont déjà fait sentir. Ainsi, sur la plate-forme de Paris-Charles-de-Gaulle, 12,7 millions d'euros ont été engagés en 2004 pour des travaux d'insonorisation, soit 30 % de plus que l'année précédente, et la prise en charge par Aéroports de Paris de la gestion du dispositif a permis une réduction du délai de traitement des demandes.

Le Gouvernement s'attachera à maintenir les ressources disponibles afin de ne pas ralentir les opérations d'insonorisation des logements.

Enfin, monsieur le sénateur, des réflexions sont conduites avec l'ensemble des parties concernées afin de simplifier les procédures administratives et d'apporter une assistance accrue aux riverains.

M. le président. La parole est à M. Robert Hue.

M. Robert Hue. Monsieur le ministre, la presse a fait état ce matin du refus des riverains et des élus de prendre en compte les nouvelles donnes du plan de gêne sonore. Ils contestent - et ils ont raison - la méthode de mesure du bruit, qui sous-estime la gêne des riverains.

Les habitants sont doublement pénalisés.

D'une part, ils subissent de plein fouet le bruit. Or très peu de moyens sont mis en oeuvre pour l'insonorisation. Les sommes que vous venez d'indiquer, même si elles sont en hausse en 2004, sont très insuffisantes.

D'autre part, ils sont spoliés, car le plan a été étendu, et leurs biens immobiliers perdent de la valeur. Il s'agit, là aussi, d'un vrai problème.

En outre, monsieur le ministre, vous n'avez pas dit un mot du troisième aéroport. Le précédent ministre des transports avait abandonné cette idée sans donner d'explication, sinon que la construction de cet aéroport était prévue dans une région dont il est l'élu.

Monsieur le ministre, il faut vraiment trouver les moyens pour implanter un troisième aéroport sans compter sur les autres plates-formes de métropole. J'attends encore une réponse sur ce point. Les élus, qu'ils soient de gauche ou de droite, sont unanimes pour dire que cela ne peut pas continuer ainsi.

Mme Hélène Luc. Ceux de Roissy comme ceux d'Orly !

M. le président. Il est exact que des problèmes se posent et qu'il existe des situations dangereuses, monsieur le ministre.

A l'aéroport de Marignane, si, un jour, un avion ne s'arrête pas, il coupera en deux l'école communale de Saint-Victoret !

Il y a quinze ans que nous réclamons le déplacement de cette école. Mais, pour réaliser cette opération, il faudrait que l'Etat donne les quatre sous nécessaires.

Si, un jour, le drame se produit, on ne pourra pas dire que nous ne vous avions pas prévenu !

M. Robert Hue et Mme Hélène Luc. Absolument !

M. le président. Cela étant, je le dis avec beaucoup de courtoisie à votre égard, monsieur le ministre. Ne voyez dans la vivacité de mes propos que la chaleur méridionale qui a atteint aujourd'hui la capitale.

M. Léon Bertrand, ministre délégué. Je l'avais bien compris ainsi, monsieur le président. (Sourires.)

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