Question de M. LEJEUNE André (Creuse - SOC) publiée le 06/10/2005

M. André Lejeune attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les inquiétudes que suscite le projet de décret portant réforme de la procédure civile, lequel est porteur de grands risques d'inégalité et d'injustice sociale pour les citoyens. En permettant au juge de fixer par avance le déroulement du procès, il prive les parties de la possibilité de conduire l'instance en fonction des évolutions du litige. De plus, en prévoyant l'exécution immédiate des décisions de première instance, il affaiblit considérablement le droit d'appel, droit fondamental à caractère constitutionnel, qui est offert à tous, quelle que soit leur situation matérielle. En effet, l'appel en matière commerciale ou civile sera réservé à ceux qui pourront payer le montant de la condamnation prévue en première instance, même si la réformation paraît inévitable - avec le risque, dans ce cas, de ne pas pouvoir obtenir le remboursement face à un adversaire qui serait devenu insolvable ou aurait organisé son insolvabilité. C'est pourquoi il lui demande quelles dispositions il envisage de prendre pour répondre à ces inquiétudes légitimes.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 22/12/2005

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il a transmis au Conseil d'État, pour le soumettre à son examen, le projet de décret portant réforme de la procédure civile qui a fait l'objet d'une vaste consultation et suscité des contributions enrichissantes qui ont été largement prises en compte. Ce projet de décret vise à améliorer la célérité et l'efficacité de la justice en s'appuyant sur les pratiques innovantes menées par les juridictions et les barreaux ainsi que sur le rapport Magendie en n'en reprenant toutefois pas toutes les conclusions. Les contrats de procédure que le projet consacre, parce qu'ils seront issus d'une collaboration choisie par les avocats et avoués avec les juges, permettront de raccourcir les délais de procédure tout en préservant l'examen approfondi des questions de fait et de droit d'une affaire. De même, les avancées en matière de conduite de l'expertise ou les améliorations apportées au régime des notifications vont corriger des lenteurs ou des lourdeurs, voire de réelles inadaptations, qui émaillaient encore notre code de procédure civile. La disposition du projet sur l'exécution provisoire n'a pas pour effet de remettre en cause le droit d'appel mais au contraire d'en réaffirmer le caractère essentiel en écartant les appels dilatoires et en renforçant l'effectivité des décisions de première instance, qui est un principe d'une valeur égale à celui de l'accès au juge. Contrairement à ce que préconisait le rapport Magendie, le champ de l'exécution provisoire n'est pas modifié. Le projet de décret prévoit simplement qu'en appel, lorsque l'arrêt de l'exécution provisoire n'a pas été obtenu, une partie, bénéficiaire de l'exécution provisoire, pourra solliciter la radiation de l'affaire du rôle de la cour sous le contrôle du premier président. Un tel dispositif rend effective l'exécution provisoire décidée en première instance. Il garantit également l'équilibre des intérêts en présence, ceux de la partie qui a succombé en lui maintenant la possibilité de faire examiner son affaire en appel malgré la non exécution de la décision, si elle a de justes motifs, ceux de la partie qui a gagné, en lui permettant de bénéficier de l'exécution du jugement qui lui a été accordée. Ainsi, l'ensemble de ce projet, sans porter atteinte aux grands principes de notre procédure civile, est marqué par le souci de répondre aux objectifs de rapidité et de qualité que la justice se doit de remplir.

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