Question de M. GAUTIER Charles (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 24/02/2006

Question posée en séance publique le 23/02/2006

M. Charles Gautier. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, les étudiants sont aujourd'hui dans la rue. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Ils manifestent leur mécontentement au sujet du projet de loi pour l'égalité des chances que nous examinons depuis ce matin.

M. Didier Boulaud. Ils ont raison !

M. Charles Gautier. Ces jeunes, nous les soutenons, monsieur le Premier ministre, parce que l'avenir que vous leur proposez ne répond pas à leurs attentes et ne leur apporte aucun espoir.

La première action du gouvernement Raffarin ne fut-elle pas de démanteler les emplois-jeunes ? Ils avaient pourtant permis à beaucoup de découvrir un métier et d'y faire leurs premières armes.

M. Josselin de Rohan. Vous vous moquez de nous !

M. Charles Gautier. Quant aux stagiaires, qui vous sollicitent depuis plusieurs mois, vous restez sourd à leurs revendications. Comment peut-on tolérer qu'à des jeunes de tous niveaux ne soient proposés que des stages à répétition, souvent sans rémunération, sans statut, sans accès au droit du travail ?

M. Josselin de Rohan. Et vous, qu'avez-vous fait ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous serez jugés sur ce que vous faites, pas sur ce que d'autres auront pu faire, monsieur de Rohan !

M. Charles Gautier. Et maintenant, pour les rassurer, vous leur proposez le CPE ! Grâce à ce « contrat de précarisation et d'exploitation », un jeune pourra se voir licencier sans aucun motif, du jour au lendemain. Comment alors envisager une autonomie financière ? Les jeunes Français devront-ils rester chez leurs parents jusqu'à vingt-six ans ?

Mme Hélène Luc. C'est la grande question !

M. Charles Gautier. François Mitterrand disait (Exclamations sur les travées de l'UMP) que, « si la jeunesse n'a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la frappe a toujours tort ». (Applaudissements sur les travées socialistes.)

M. Alain Gournac. C'est la Tontonmania !

M. Charles Gautier. Comment est-il possible que les seules innovations que vous proposiez aux jeunes soient l'apprentissage à quatorze ans et le travail de nuit ?

M. Alain Gournac. Dans les mines !

M. Charles Gautier. C'est un véritable retour au xixe siècle !

M. Josselin de Rohan. Pourquoi pas au xviiie !

M. Charles Gautier. En fait, vous tentez de masquer derrière les termes ronflants d'« égalité des chances » une politique de destruction des droits. Justice, travail, retraite, maladie, école : sans cesse et pour tout, vous inventez des dérogations aux droits existants. Vous ne parviendrez par cette méthode qu'à multiplier les situations d'exclusion.

M. le président. Monsieur Gautier, il vous faut conclure.

M. Charles Gautier. Monsieur le Premier ministre, vous n'écoutez pas les jeunes : ils sont dans la rue et vous refusez de les recevoir. Vous n'écoutez pas les critiques : vous avez muselé le débat démocratique à l'Assemblée nationale.

M. Alain Gournac. Oh ! là ! là !

M. Charles Gautier. Vous n'écoutez même pas les conseils de vos propres amis. Le rapport Proglio a été enterré dès sa parution, car il avait le « culot » de considérer que le contrat d'embauche normale pour les jeunes devait être le CDI et non le CPE.

Quant accepterez-vous enfin de tendre la main à la jeunesse pour lui permettre un vrai démarrage dans la vie ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes publiée le 24/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 23/02/2006

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Gautier, je m'étonne que, lorsque vous avez parlé des étudiants, vous n'ayez pas eu un mot pour les jeunes des 750 quartiers qui connaissent des taux de chômage de 40 % ou de 50 %, (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC)...

M. Guy Fischer. Il existe aussi des étudiants dans ces quartiers !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...pas un mot pour ceux qui ont été délaissés pendant des années et auxquels vous tentez d'opposer les jeunes étudiants, pour ceux - 150 000 par an - qui sortent du système éducatif sans diplôme, pour ceux - 60 000 - qui n'ont pas de qualification et qui, eux, vont connaître la voie de la « galère », la voie du chômage ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Parce que l'égalité des chances, c'est l'égalité pour tous les jeunes de France,...

Mme Hélène Luc. Justement !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...qu'ils soient à l'université, en grande école ou que, malheureusement, ils aient connu l'échec scolaire, notre ambition est que chacun d'eux retrouve une vraie chance.

C'est ce à quoi nous travaillons : une vraie chance, c'est-à-dire une formation en alternance réellement ouverte aux jeunes et qui assure la sécurité de l'emploi à plus de 80 %, une chance donnée au travers d'un contrat qui évite que 70 % des entrées dans le parcours professionnel se fassent sous CDD ou en intérim, qui évite aussi que jamais ces jeunes ne puissent accéder à un logement.

M. Charles Gautier. C'est faux !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous proposons un véritable parcours d'entrée pour ces jeunes, et nous aurons l'occasion de débattre de cette question dans toute sa dimension sociale, notamment à propos du nouveau dispositif locapasse. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, qui couvrent la voix du ministre.)

J'ai le souvenir de nos débats de l'été. Alors que 150 000 CDI font l'objet de recours chaque année, il est naturel que des CNE - et, demain, des CPE - en soient aussi frappés, car nous n'avons pas construit une zone de non-droit. Au contraire, nous n'avons cessé de dire que le code du travail s'appliquait et que les abus seraient sanctionnés.

Cette première décision du conseil des prud'hommes de Longjumeau est bien la preuve que nous avons donné une nouvelle chance à tous et préservé leurs droits ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) )

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