Question de M. BOULAUD Didier (Nièvre - SOC) publiée le 09/03/2006

M. Didier Boulaud appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur la procédure exceptionnelle d'indemnisation des communes victimes de la sécheresse. L'état de catastrophe naturelle faisant suite à la sécheresse de 2003 a été reconnu à peu de communes, si bien que le Gouvernement a cru nécessaire de créer une procédure exceptionnelle d'indemnisation. Une enveloppe financière de 180 millions d'euros a été prévue dans la loi de finances pour 2006 ; elle sera répartie entre chaque département en fonction du nombre des dossiers de demande d'indemnisation. Cependant, cette enveloppe ne semble pas suffire à indemniser toutes les victimes de la sécheresse et entraîne plus de mécontentements que de satisfactions. En effet, pour prendre un exemple concret, Nevers, qui n'a pas pu bénéficier du dispositif de catastrophe naturelle, dénombre plus de 60 victimes qui se sont fait connaître. D'autres peuvent encore se manifester. Toutes ce personne voient leurs maisons d'habitation se dégrader, se fissurer, s'affaisser. Aucune n'a des moyens suffisants pour financer des travaux qui devraient l'être normalement par la solidarité nationale. Ces propriétaires ne comprennent pas pourquoi ils sont obligés de remplir un dossier de demande d'aide financière aussi exigeant. Ils s'inquiètent déjà de devoir fournir deux devis d'entreprises et déposer leur dossier dans des délais aussi courts, et ils s'interrogent sur les modalités d'indemnisation. Qu'adviendra-t-il s'ils ne perçoivent que 5 ou 10 % du montant des devis fournis ? Comment pourront-ils faire face au coût des travaux ? Afin de pouvoir leur fournir les explications qu'ils sont en droit d'obtenir, il lui demande de bien vouloir communiquer les modalités d'indemnisation qu'il envisage de mettre en oeuvre pour couvrir la totalité des dépenses supportées par les victimes de la sécheresse 2003.

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Réponse du Ministère délégué à l'aménagement du territoire publiée le 22/03/2006

Réponse apportée en séance publique le 21/03/2006

M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud, auteur de la question n° 979, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Didier Boulaud. Monsieur le ministre, vous le savez, rares - ou en tout cas trop peu nombreuses - ont été les communes reconnues en état de catastrophe naturelle à la suite de la sécheresse de 2003, à telle enseigne que le Gouvernement a jugé nécessaire, à juste titre, de mettre en place une procédure exceptionnelle d'indemnisation.

Ainsi, la loi de finances pour 2006 a créé une enveloppe financière de 180 millions d'euros, qui doit être répartie entre les départements, en fonction du nombre des dossiers de demandes d'indemnisation.

Cependant, je crains que cette enveloppe ne suffise pas à indemniser toutes les victimes et suscite, au final, plus de mécontentements que de satisfactions.

La ville que j'ai l'honneur ...

M. le président. De gouverner !

M. Didier Boulaud. ... d'administrer, monsieur le président, n'a pas bénéficié du dispositif de catastrophe naturelle.

Pourtant, plus de soixante victimes se sont fait recenser par mes services, et d'autres peuvent être encore se manifester. Toutes ces personnes voient leurs domiciles se dégrader, se fissurer, ou même s'affaisser. Aucune d'entre elles ne dispose des moyens suffisants pour financer les travaux nécessaires. Il me semble donc indispensable de faire appel à la solidarité nationale.

Or les démarches administratives de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sont d'une telle complexité qu'elles deviennent, reconnaissons-le, un souci supplémentaire pour ces personnes déjà très affectées, qui, par conséquent, attendent de vous un véritable soutien. Je tiens particulièrement à appeler votre attention sur ce point.

Les propriétaires que j'ai rencontrés ne comprennent pas pourquoi ils sont obligés de remplir un dossier de demande d'aide financière aussi exigeant. Ils s'inquiètent déjà de devoir fournir deux devis d'entreprises différentes et déposer leurs dossiers dans des délais aussi courts.

Monsieur le ministre, imaginez, d'une part, les difficultés que rencontrent les soixante victimes pour trouver ces deux sociétés, d'autre part, le travail que doivent accomplir les rares entreprises de bâtiment de notre région pour délivrer ces devis ! Une telle disposition aggrave la situation.

Monsieur le ministre, comment la procédure d'indemnisation sera-t-elle mise en place ? Nos concitoyens s'interrogent sur ses modalités. Qu'adviendra-t-il si les propriétaires concernés ne perçoivent que 5 % ou 10 % du montant des devis produits ? Comment pourront-ils faire face au coût des travaux ?

Je souhaite pouvoir fournir aux habitants de Nevers les explications qu'ils sont en droit de recevoir. Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir me préciser les modalités de l'indemnisation qui sera mise en oeuvre pour couvrir la totalité des dépenses supportées par les victimes de la sécheresse de 2003.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, vous interrogez M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire sur la procédure exceptionnelle d'indemnisation des communes victimes de la sécheresse de 2003, qui auraient été peu nombreuses à se voir reconnaître l'état de catastrophe naturelle.

Toutefois, je le rappelle, le régime des catastrophes naturelles a produit des effets importants, dans la mesure où il a permis l'indemnisation de près de 4 000 communes au titre des mouvements de terrains différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols de 2003.

Si les critères habituellement utilisés avant 2003 pour statuer sur les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle n'avaient pas été adaptés à cette sécheresse atypique, puis assouplis à deux reprises, seules quelque 200 communes auraient bénéficié de ce régime.

J'attire votre attention sur ce point. Quel aurait été le thème de votre intervention d'aujourd'hui si nous en étions restés aux critères d'avant 2003 ? Ceux-ci permettaient l'indemnisation de 200 communes. Nous en dédommageons aujourd'hui 4 000. Il me semble tout de même qu'il s'agit d'un progrès ! (M. Didier Boulaud acquiesce.)

En ce qui concerne le département de la Nièvre, les communes concernées sont rattachées à l'une des trois stations météorologiques de référence, c'est-à-dire à Château-Chinon, Marzy ou Saint-Georges-sur-Baulche, dont deux répondent à l'ensemble des critères définis pour qualifier la sécheresse de 2003. Ainsi, sur 111 communes demanderesses, 48 peuvent être reconnues en état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse de 2003.

Trente autres communes, je le précise, doivent, au préalable, par une étude de sol, attester de la présence d'argile sur leur territoire. Elles pourraient ainsi bénéficier également de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, ce qui porterait à 70 % la proportion des communes reconnues comme telles dans votre département.

Les autres communes peuvent bénéficier de la procédure de solidarité nationale, dotée d'une enveloppe de 180 millions d'euros, à laquelle sont éligibles les propriétaires de 33 communes de la Nièvre. Je puis vous assurer que la direction compétente du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, en contact permanent avec un panel représentatif de douze préfectures, suit de très près la mise en oeuvre de cette procédure.

Comme vous l'avez indiqué, certains sinistrés rencontrent des difficultés pour constituer leur dossier, en particulier pour produire les deux devis nécessaires. Par ailleurs, les entreprises du bâtiment refusent, dans certains cas, d'établir ces devis sans avoir réalisé au préalable une étude de sol.

Ce problème a été rapidement signalé. Saisis par M. le ministre d'État, les ministres concernés se sont accordés pour redéfinir l'obligation relative aux devis. Il a été décidé que la production d'un seul document indicatif, qui pourrait comporter une clause de réserve, émise par les entrepreneurs, concernant l'étude de sol, serait acceptée, le dossier pouvant être complété ultérieurement.

C'est pourquoi une lettre circulaire à l'attention des préfets, en date du 16 mars dernier, engage les représentants de l'État à prononcer l'éligibilité des dossiers des particuliers qui ne comprendraient qu'un seul devis, sous réserve qu'un second puisse être produit ultérieurement.

Ainsi, monsieur le sénateur, considérant que la procédure était complexe, l'indemnisation urgente et l'attente des propriétaires longue, nous avons pris cette décision pour ne pas perdre de temps.

Cette disposition devrait faciliter le traitement des dossiers par les préfectures concernées, étant entendu que les préfets ont reçu toutes instructions pour simplifier au maximum les démarches des particuliers. De même, nous avons demandé aux assureurs d'être particulièrement attentifs à cette question et d'accompagner leurs clients tout au long de cette nouvelle procédure.

Quant aux modalités d'indemnisation, M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et M. le ministre de l'intérieur arrêteront les enveloppes d'aide par département, dans la limite des 180 millions d'euros fixés par l'article 110 de la loi de finances pour 2006, et après avoir fixé les mesures générales d'encadrement pour le calcul des aides individuelles et les conditions de versement.

Voilà les éléments que je pouvais vous apporter aujourd'hui. Il est urgent à présent, me semble-t-il, que les particuliers et les entrepreneurs fournissent les devis nécessaires.

Monsieur le sénateur, je vous assure que les préfets ont reçu des instructions, tout d'abord pour simplifier les procédures, ensuite pour accélérer les indemnisations.

Sur cette base, nous répondrons le plus rapidement possible aux demandes, étant entendu que, normalement, le problème devrait être réglé pour 70 % des communes de la Nièvre. Il l'est déjà pour près de 43 % d'entre elles ; en outre, pour 30 % des communes, nous attendons les retours des trois stations météorologiques. Toutefois, en principe, d'après les premiers éléments dont nous disposons, nous devrions compter bientôt 70 % de communes indemnisées dans ce département.

Resteront 30 % des communes de la Nièvre, qui devraient bénéficier de l'enveloppe de 180 millions d'euros, pour autant que les entrepreneurs fournissent aux particuliers, le plus rapidement possible, un premier devis.

M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud.

M. Didier Boulaud. Monsieur le ministre, merci de votre réponse extrêmement détaillée, qui sera de nature à rassurer les personnes intéressées, même si, pour l'instant, toutes les communes ne sont pas éligibles

J'insiste sur le cas de Nevers, qui est presque la seule ville du département. Les personnes concernées sur le territoire de ma commune sont, à elles seules, beaucoup plus nombreuses que les habitants de certaines communes éligibles. Il est facile d'affirmer qu'une commune du département de la Nièvre est éligible, quand, en réalité, seules vingt personnes sont indemnisées, pour peut-être cinq maisons. Le cas dont je vous parle concerne soixante maisons à lui seul !

Vous avez évoqué également la question de la nature des terrains. Vos propos sont de nature à me rassurer, parce que le sol de Nevers est très riche en argile. Vous le savez, il s'agit du pays de la faïence, notamment.

M. le président. Et le pays du président Mitterrand ! (Sourires.)

M. Didier Boulaud. Nos sols ne manquent donc pas d'argile. Voilà quelques années, lorsque j'ai fait construire un hôpital, il a fallu planter quelque 500 pieux, parce que le terrain était argileux. Il sera, me semble-t-il, relativement facile de prouver la présence d'argile à Nevers !

Monsieur le ministre, merci en tout cas de ces éléments de réponse, qui sont de nature à faire avancer le débat.

M. le président. Monsieur le ministre, j'espère que vous n'oublierez pas non plus Château-Chinon ! (Sourires.)

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