Question de M. SOUVET Louis (Doubs - UMP) publiée le 15/06/2006

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche sur un exemple de répartition non équitable des fonds publics, à savoir les conditions d'octroi et surtout de maintien des bourses de l'enseignement supérieur. Le débat « université-emploi » a permis encore une fois de stigmatiser les conséquences du système actuel. Il lui demande si l'anomalie qui consiste à maintenir dans le système d'aide financier des étudiants oisifs voire perturbateurs va perdurer encore longtemps.

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Réponse du Ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche publiée le 11/10/2006

Réponse apportée en séance publique le 10/10/2006

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 1082, adressée à M. le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche.

M. Louis Souvet. Monsieur ministre, j'aborde pour la sixième fois un sujet bien connu, celui des étudiants « touristes », rémunérés par la collectivité nationale.

Je me félicite que le débat national « université-emploi » qui vient de se dérouler ait permis de mettre en lumière un problème que je n'ai eu de cesse de soulever dans de nombreuses questions écrites, notamment les 26 août 2004, 31 mars 2005, 30 juin 2005, 21 juillet 2005 et 23 mars 2006, et concernant les bourses attribuées à des « étudiants » au long cours.

L'argent public n'a pas vocation à être distribué lorsque aucun résultat n'est constaté, et pour cause : les « étudiants » en question viennent les mains dans les poches pointer aux différentes séances de travaux dirigés. Cette unique obligation est d'ailleurs obsolète et n'engendre que des désordres supplémentaires pour les vrais étudiants, ainsi que pour les enseignants.

Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : nous sommes en présence d'un cercle vicieux. En effet, les dotations aux universités sont délivrées en tenant compte du nombre d'étudiants. C'est la raison pour laquelle certains élus locaux qui sont attachés à leur université - et on les comprend ! - dénoncent également cet état de fait en général, mais ne préconisent pas une quelconque sélection au niveau local.

L'affichage des résultats après les partiels donne une idée de l'ampleur du désastre financier pour la collectivité nationale. Entendons-nous bien, monsieur le ministre, je stigmatise non pas les étudiants qui, en travaillant, n'arrivent pas, la première année, à obtenir la moyenne - le fameux « E » pour se situer dans le contexte ECTS -, mais bien les heureux bénéficiaires des prébendes publiques, abonnés ad vitam æternam aux zéros.

Ne sont pas à blâmer les secrétariats des universités en question, qui doivent gérer les situations les plus insolites. Ainsi, un « étudiant » qui n'est pas satisfait d'une première évaluation en contrôle continu, va, avec les pièces nécessaires, se déclarer salarié et entrer ainsi dans la catégorie du contrôle classique. Ces secrétariats, s'ils ne respectent pas les textes édictés pour laisser perdurer de telles situations, sont évidemment l'objet d'injures et d'insultes.

En revanche, les CROUS ne répondent pas aux sollicitations des secrétariats en question lorsqu'il est manifeste que la bourse devrait être suspendue sine die, ou arguent d'une nécessaire rétroactivité, totalement illusoire, rendant de fait inapplicable la mesure de suspension.

Ces jeunes pensionnés - qui, pour la plupart, avec le jeu des différentes aides sociales, le resteront une grande partie de leur vie - n'apparaissent pas dans les statistiques du chômage pendant trois ou quatre ans - soit un redoublement plus un changement de filière et à nouveau un redoublement -, mais ils n'y apparaîtraient pas plus s'ils avaient été orientés dans les branches déficitaires en main-d'oeuvre.

Ne pas tenir compte du ressentiment des parents dont les enfants payent des droits d'inscription à plein tarif, tout en étant gênés par des éléments perturbateurs, ce serait faire preuve d'une vision à court terme, vous le savez bien, monsieur le ministre. C'est la raison pour laquelle j'insiste sur un sujet qui fâche : il faut réformer ce système !

Quels moyens proposez-vous, monsieur le ministre, pour que la majorité des copies blanches ne soit pas le fait des boursiers de niveau 5, catégorie la plus haute dans l'attribution des bourses ? Je m'appuie sur les statistiques qui sont établies par les enseignants et qui attestent la véracité de ce propos. Les parents des étudiants pénalisés à un double titre par ce fléau - les étudiants ne sont pas aidés et sont, de plus, gênés dans leurs études - attendent des réponses concrètes.

Pour conclure mon propos, reprenant, en le transformant pour cette cause, un slogan d'une centrale étudiante, je dirai qu'« étudier lorsque l'on est payé pour cela c'est un devoir. ».

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur Souvet, vous avez mentionné un problème qui est tout à fait réel et qui aujourd'hui n'est pas réglé. Il faut être très clair et très honnête : nous ne nous sommes pas suffisamment attaqués aux situations parfaitement critiquables que vous relevez.

Les textes existent : un étudiant boursier doit être assidu aux cours et se présenter aux examens. L'assiduité est en général assez mal contrôlée dans nos établissements d'enseignement supérieur ; en tout cas, la situation est assez variable selon l'établissement concerné. Quant à la présence aux examens, elle est assez facilement vérifiable, mais la remise de copie blanche ou carrément l'absence à l'examen n'entraîne pas automatiquement, comme elle le devrait, la suspension du versement des bourses. C'est anormal !

Chaque année, il existe bien quelques cas de suspension, d'exclusion, du bénéfice des bourses, mais nous avons jusqu'à présent porté une attention insuffisante à ce fait, que vous dénoncez à juste titre.

Je ne prétends pas qu'il y a des milliers d'étudiants « factices » dans nos universités, mais cette situation existe et elle est déplorable sur un plan non seulement pratique, mais également et avant tout moral. Nous devons être plus vigilants. Je prends devant vous l'engagement que des instructions extrêmement fermes seront données pour tenter de remédier à cette situation.

Il existe des anomalies dans le mode de financement des universités. En effet, le critère principal du système d'analyse et de répartition des moyens - système informatique dénommé SAN REMO - servant de base au calcul de la dotation globale de fonctionnement est le nombre d'étudiants inscrits. J'ai demandé une modification de ce critère, afin qu'il concerne non plus le nombre d'étudiants inscrits, mais le nombre d'étudiants présents aux examens. Cela me paraît d'autant plus logique que certains étudiants, inscrits uniquement pour bénéficier soit de bourses, soit de la sécurité sociale étudiante, et donc non réellement présents, représentent un coût pour l'université en termes à la fois de locaux et de présence des enseignants.

La gestion de nos universités doit donc être encore plus rigoureuse qu'elle ne l'est. Monsieur le sénateur, j'accepte cette critique, qui correspond effectivement à une réalité, et il nous revient d'y remédier.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Je remarque que M. le ministre adhère à ce que je viens de dire, ce qui aurait pu ne pas être le cas.

Si nous parvenions à éliminer, d'une manière tout à fait convenable, ces faux étudiants, nous constaterions bien évidemment un changement de mentalité à la fois au sein de l'université et chez les enseignants. Nous aurions tout à y gagner !

La dotation de base des universités est basée sur le nombre des étudiants, critère qui n'est pas suffisant. Je souhaite que l'on ajoute un coefficient de pondération basé sur la réussite aux examens. Cela changerait un peu les choses !

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