Question de M. MOULY Georges (Corrèze - RDSE) publiée le 31/08/2006

M. Georges Mouly attire l'attention de M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes sur le problème posé par le CDD unique pour le remplacement successif ou simultané de plusieurs salariés en congé payé. Jusqu'à une date récente, en effet, lorsqu'un chef d'entreprise embauchait un salarié pour une courte durée (entre dix et vingt jours par exemple) durant laquelle celui-ci remplaçait plusieurs salariés partis en congé, il lui proposait, se fondant sur la réglementation en vigueur, un contrat mentionnant le nom et la qualification desdits salariés. Cette pratique assez simple, validée par plusieurs cours d'appel, vient d'être remise en cause par la Cour de Cassation qui, se fondant sur sa propre interprétation de l'article L. 122-1-1 alinéa 1er du code du travail, estime que ces contrats, par nature à durée déterminée, sont en fait des contrats à durée indéterminée puisque les chefs d'entreprise, selon elle, ne peuvent proposer des contrats à durée déterminée que pour remplacer un salarié et non plusieurs. Un tel formalisme, si louable soit-il dans ses principes, risquant de compliquer singulièrement la tâche des chefs d'entreprise à l'avenir, il le remercie de bien vouloir lui préciser de quelle manière il est possible de modifier le code du travail pour respecter la jurisprudence, sans nuire à l'emploi.

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Réponse du Ministère délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes publiée le 07/12/2006

L'attention du Gouvernement a été appelée sur les difficultés que rencontreraient les entreprises pour conclure un contrat de travail à durée déterminée motivé par le remplacement de salariés en congés annuels et, tout particulièrement, sur l'accroissement des contraintes administratives qu'induirait l'application du principe affirmé par deux arrêts de la Cour de cassation du 28 juin dernier. Par ses deux arrêts du 28 juin 2006, n° 04-43053 et n° 40-40455, la Cour de cassation dit pour droit qu'il résulte de l'article L. 122-1-1 (1°) du code du travail que le contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour le remplacement d'un seul salarié en cas d'absence. Cette lecture de la loi est le point d'aboutissement d'une évolution de la jurisprudence de la chambre sociale amorcée dès 1998. Par un arrêt du 24 février 1998 (n° 95-41420), la Cour de cassation a approuvé la requalification en contrat à durée indéterminée d'un contrat conclu en remplacement de l'ensemble du personnel titulaire se trouvant en congé annuel ou en congé de maladie. Par deux arrêts des 29 septembre 2004 (n° 02-43249) et 26 janvier 2005 (n° 02-45342), la chambre sociale de la Cour de cassation a approuvé la requalification en contrat à durée indéterminée de plusieurs dizaines de contrats à durée déterminée successifs conclus avec la même salariée pendant plus de treize mois consécutifs dans un cas, pendant plus de deux ans dans l'autre, motivés par le remplacement d'une multiplicité de salariés absents, en jugeant que de telles successions de contrats méconnaissaient le principe de l'article L. 122-1 du code du travail qui interdit de conclure un contrat de travail à durée déterminée ayant pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Dans ses arrêts de 1998 et de 2004, la chambre sociale de la Cour de cassation précise que ces pratiques imposent au salarié une incertitude préjudiciable résultant de ce qu'il pouvait être mis fin à son contrat à tout moment. L'interprétation de l'article L. 122-1-1 (1°) qui résulte de ces arrêts devrait éviter que ne se maintiennent de telles situations. La rédaction d'un motif de recours précisant le nom et la qualification de la personne remplacée ainsi que les autres mentions de l'article L. 122-3-1 du code du travail qui permet de respecter la légalité du CDD n'apparaît pas constituer une contrainte excessive pour les employeurs. Le respect des dispositions du code du travail doit garantir la sécurité juridique de toutes les parties au contrat et permet seul un contrôle efficace des modalités de recours à la main-d'oeuvre selon les prescriptions légales.

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