Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 12/07/2007

M. Bernard Piras attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur l'insuffisance de la loi n° 2005-370 du 22 avril 2005 sur la fin de vie. En effet, il faut rappeler que le vote de ce texte a été motivé par la douloureuse affaire Humbert, laquelle posait le problème de l'assistance médicalisée à interrompre la vie lorsque la personne ne peut le faire elle-même et lorsque la personne n'est pas en fin de vie. Malheureusement, la loi adoptée par le Parlement ne répond en rien à ce cas de figure qui risque sans doute de se reproduire. Il lui demande de lui indiquer sa position sur cette délicate question.

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Réponse du Ministère de la santé, de la jeunesse et des sports publiée le 20/09/2007

La loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie résulte d'une initiative parlementaire. Elle est le fruit d'un long travail de consensus réalisé par la mission parlementaire présidée par le député M. Jean Leonetti. La loi consacre le principe déontologique du refus de « l'obstination déraisonnable », définie selon trois critères alternatifs : l'inutilité des traitements, la disproportion de ceux-ci au regard du bénéfice pour le malade, une finalité exclusivement tournée vers le maintien artificiel de la vie. De ce principe découle, d'une part, le droit pour la personne malade au refus de tout traitement et, d'autre part, lorsque la personne ne peut pas elle-même exprimer sa volonté, la possibilité, dans le cadre d'une procédure collégiale, d'une décision médicale de limitation ou d'arrêt des traitements. De plus, la possibilité d'établir des directives anticipées permet à toute personne majeure de faire valoir ses intentions quant à sa fin de vie avant de ne plus être en état de le faire. L'équilibre global du texte repose sur le développement en parallèle des soins palliatifs. La loi s'inscrit dans le cadre préétabli des principes posés par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Elle comporte non seulement des dispositions spécifiques aux situations de fin de vie, définies comme « la phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable », mais également des dispositions applicables à toute situation de soins. Par ailleurs, tous les traitements, quels qu'ils soient, sont concernés, y compris les soins de suppléance vitale. La loi est donc applicable au cas de figure évoqué dans sa question par l'honorable parlementaire. La loi prend en effet en considération l'ensemble des situations, que la personne soit ou non en état d'exprimer sa volonté. Lorsque la personne malade est consciente, et alors même qu'elle n'est pas en fin de vie au sens de la loi, son refus de tout traitement, à condition d'être réitéré et après consultation éventuelle d'un autre praticien, s'impose au médecin même lorsqu'il y a un risque pour la vie. Toutefois, c'est en situation de fin de vie que le droit au refus de traitement s'exerce pleinement dans la mesure où il s'impose sans la consultation d'un autre médecin ni délai de réflexion ni procédure collégiale. Le médecin doit alors respecter la volonté de la personne tout en l'informant des conséquences de son choix. Lorsque la personne n'est pas en mesure d'exprimer sa volonté, dans toutes les situations, état chronique ou fin de vie, la décision médicale d'arrêt ou de limitation de traitement s'exerce dans le cadre d'une procédure collégiale définie dans le code de déontologie médicale et après consultation des directives anticipées de la personne, de la personne de confiance, de la famille ou des proches. Le médecin forge sa décision au vu de l'ensemble de ces éléments. Afin d'assurer la transparence de toute décision d'arrêt ou de limitation de traitement, celle-ci doit être inscrite dans le dossier médical du malade. Dans tous les cas, la personne conserve tous ses droits d'accès aux soins palliatifs. La loi, dans son approche consensuelle, prend position en faveur du « laisser mourir », mais refuse « l'aide active à mourir ». Dans ce cadre, le dispositif adopté en 2005 ne se limite pas à la seule phase terminale de maladies graves et incurables, mais couvre l'ensemble des situations concernées par une décision de limitation ou d'arrêt de traitement. Elle réaffirme la priorité accordée à la lutte contre la douleur. Le législateur n'a pas hésité, en outre, à consacrer le principe dit du « double effet » et autorise le médecin à accéder à la demande du malade même au risque d'abréger sa vie, après information du malade, de la personne de confiance lorsqu'elle est désignée, de ses proches et de sa famille. Le comité national de suivi du développement des soins palliatifs et de l'accompagnement de fin de vie doit contribuer à l'évaluation des difficultés de mise en oeuvre de la loi du 22 avril 2005 et de ses éventuelles limites. Toute réflexion sur un élargissement de l'autorisation donnée par la loi du 22 avril 2005, qui couvre déjà un large éventail de situations, doit cependant s'inscrire dans une évaluation d'ensemble des moyens existants pour la prise en charge des maladies chroniques, des pathologies lourdes et dégénératives, nécessitant la mise en oeuvre de suppléances vitales, et l'accompagnement du grand âge et de la fin de vie. Une telle réflexion dépasse par ailleurs, la seule sphère médicale ou médico-sociale et s'inscrit dans des choix sociétaux fondamentaux mettant en jeu notre perception de la vie et de la mort et de la dignité de la personne.

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