Question de Mme DAVID Annie (Isère - CRC) publiée le 22/05/2008

Mme Annie David attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les conséquences liées à la généralisation de la distribution du livret A.

En effet, sous la pression de Bruxelles, la réforme du Livret A s'intègre dans le projet de loi relatif à la modernisation de l'économie. Ce dernier dispose qu'à partir du 1er janvier 2009, le livret A soit dans toutes les banques qui souhaiteront le proposer et non plus uniquement dans les seuls réseaux de La Banque Postale, des Caisses d'Épargne ou du Crédit Mutuel, ce dernier distribuant le Livret bleu, produit similaire au Livret A. Elle lui rappelle pourtant que l'enjeu de ce livret est double.

En étant le placement favori des familles modestes, il assure souvent l'accessibilité bancaire des plus démunis, dans la mesure où le droit au compte n'est pas respecté par les banques. Or, en banalisant le livret A, la banque postale devient une banque « comme les autres », donc contrainte d'avoir des impératifs de rentabilité. Ainsi, pour se maintenir face à la concurrence, la banque postale devra non seulement réduire le nombre d'accueils, notamment en zone rurale, mais également le nombre de services à destination des familles les plus modestes.

D'autre part, l'épargne des livrets A représente le principal mode de financement du logement social. Les sommes collectées, centralisées à la Caisse des dépôts et consignations, la CDC, alimentent les prêts à taux bonifiés accordés par cette dernière aux organismes de logement social. Or avec ce projet de loi, les acteurs du logement social craignent que le montant des encours transférés à la Caisse des dépôts (100 % aujourd'hui) soit abaissé, menaçant en conséquence cet organisme et l'ensemble des missions de service public qu'il assume au service de l'intérêt général et du développement économique. Elle lui rappelle en effet que le rapport Camdessus sur le livret A, commandité par le gouvernement, va jusqu'à préconiser qu'un tiers de sa collecte soit détourné de sa mission et reste dans le circuit bancaire

Ainsi, une partie de l'épargne populaire collectée par les banques serait réorientée vers des placements plus volatiles au détriment du logement social.
Cette réforme porterait ainsi un préjudice important à la politique publique du logement et aux familles modestes qui ont besoin du Livret A en tant qu'outil d'accessibilité bancaire.

A la lumière des différents effets pervers soulevés, elle lui demande de retirer son projet.

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 19/06/2008

Le Gouvernement a souhaité engager une réforme de la distribution du livret A qui poursuit trois objectifs : généraliser à toutes les banques la distribution du produit d'épargne préféré des Français, facilitant ainsi encore son accès et son utilisation par tous ; réduire le coût de financement du logement social afin d'appuyer l'effort du Gouvernement en matière de construction à un moment où le besoin de logement représente un enjeu essentiel pour notre pays ; renforcer l'accessibilité bancaire. Ce projet de réforme s'inscrit dans le cadre des orientations fixées par le Président de la République le 11 décembre dernier à Vandoeuvre-lès-Nancy, et notamment le respect de l'équilibre économique des réseaux qui distribuent aujourd'hui le livret A, à savoir les Caisses d'épargne et La Banque Postale, ainsi que le Crédit mutuel pour le livret bleu. Un accès facilité au livret A : 1. pour l'épargnant, les caractéristiques du livret A ne changeront pas après la réforme : le livret A restera un produit d'épargne gratuit, disponible à tout instant et totalement défiscalisé. En revanche, toutes les banques pourront désormais distribuer le livret A, et non plus seulement La Banque Postale, les Caisses d'épargne et le Crédit mutuel, comme c'est le cas aujourd'hui. Après la réforme, ce sont ainsi 40 000 agences bancaires, c'est-à-dire deux fois plus qu'aujourd'hui, qui pourront distribuer le livret A. Chacun pourra ainsi trouver le livret A plus près de chez lui. 2. Le financement du logement social sera renforcé : Les banques qui distribuent le livret A touchent aujourd'hui des commissions importantes pour distribuer ce produit. Lorsqu'un épargnant dépose 100 euros pendant 1 an sur son livret A, la banque qui tient le livret reçoit des pouvoirs publics 1 euro et 12 centimes en moyenne. Le Gouvernement propose de réduire de près de moitié cette commission en la faisant passer de 1,12 % aujourd'hui à 0,6 % après la réforme. Pour les réseaux distributeurs historiques (La Banque Postale, les Caisses d'épargne et le Crédit mutuel), la transition sera progressive afin de respecter leurs équilibres économiques. Le Gouvernement propose que les économies dégagées par la réduction des commissions payées aux banques soient utilisées pour renforcer le financement du logement social. C'est ainsi l'engagement du Gouvernement en faveur de la construction de logement, qui se trouvera conforté. Les sommes collectées sur le livret A continueront de financer le logement social par des prêts des fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations. Les fonds d'épargne bénéficieront du même niveau de ressources qu'aujourd'hui pour effectuer ces prêts. 3. Une meilleure accessibilité bancaire pour tous : actuellement le livret A participe à l'accessibilité bancaire au coté du droit au compte. La généralisation de la distribution du livret A est l'occasion de renforcer l'accessibilité bancaire en améliorant l'effectivité du droit au compte. À cet effet, le projet de loi du Gouvernement demande aux banques d'élaborer une charte définissant les modalités précises de mise en oeuvre de ce droit. Cette charte sera homologuée par le ministre de l'économie de l'industrie et de l'emploi et son respect sera contrôlé par la Commission bancaire. Le fonctionnement et l'efficacité du droit au compte seront ainsi améliorés au bénéfice de tous. Parallèlement, La Banque Postale continuera de jouer le rôle qu'elle joue aujourd'hui en matière d'accessibilité bancaire à travers le livret A. Elle recevra une compensation spécifique pour cette mission. À travers le projet de loi de modernisation de l'économie, le Gouvernement propose de donner au livret A une nouvelle jeunesse et de renforcer les missions d'épargne populaire, de financement du logement social et d'accessibilité bancaire.

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