Question de M. TRILLARD André (Loire-Atlantique - UMP) publiée le 26/06/2008

M. André Trillard attire l'attention de M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales sur le problème posé aux communes qui emploient parmi leur personnel des jeunes en formation sous contrat d'apprentissage. Ce type de formation est encadré par des textes législatifs qui sont bien adaptés au secteur privé mais parfois difficiles à transposer à la fonction publique territoriale. Il en va ainsi de l'utilisation des machines dites « dangereuses » que les jeunes ne peuvent utiliser sans dérogation. En l'état actuel des choses, il n'existe pas de service investi du pouvoir d'accorder ces autorisations, les services de l'inspection du travail de plusieurs départements s'estimant incompétents pour la fonction publique territoriale et l'agent chargé d'assurer les fonctions d'inspection en matière d'hygiène et de sécurité (ACFI) n'ayant pas le statut d'inspecteur du travail. Il en résulte que malgré la possibilité légale de le faire, il n'est pas possible dans les faits de déroger à l'interdiction d'utiliser des machines " dangereuses" pour les apprentis mineurs employés dans la fonction publique territoriale. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il compte prendre pour mettre fin rapidement à une situation particulièrement regrettable, préjudiciable à la formation des jeunes, voire quelque peu ubuesque.

- page 1257


Réponse du Secrétariat d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales publiée le 09/07/2008

Réponse apportée en séance publique le 08/07/2008

M. le président. La parole est à M. André Trillard, auteur de la question n° 282, adressée à M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.

M. André Trillard. Monsieur le secrétaire d'État, le problème que je souhaite évoquer a trait aux difficultés que peuvent rencontrer les communes, qui, en application de la loi du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail, emploient parmi leur personnel des jeunes en formation sous contrat d'apprentissage.

S'il n'existe pas de « liste officielle » de machines dites dangereuses, les articles R. 234-11 et suivants du code du travail, selon la nomenclature en vigueur avant la recodification intervenue tout récemment, fixent en revanche une liste des travaux interdits, pour des raisons de sécurité, aux jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans.

Les articles R. 234-22 et R. 234-23 du même code permettent de déroger à une telle interdiction, en prévoyant une procédure à l'issue de laquelle l'autorisation de l'inspecteur du travail est requise. Ainsi, l'exercice de certaines activités n'est autorisé, s'agissant des apprentis mineurs employés dans les collectivités territoriales, qu'à la condition d'obtenir cette dérogation.

Or, les services de l'inspection du travail de plusieurs départements, dont celui de la Loire-Atlantique, ont fait savoir qu'ils s'estimaient incompétents pour délivrer aux collectivités locales employant des apprentis mineurs les autorisations prévues à ces articles.

Saisie de ce problème voilà déjà quelques années, la DGCL, la Direction générale des collectivités locales a indiqué que l'agent chargé de la fonction d'inspection, ou ACFI, en matière d'hygiène et de sécurité n'était pas l'équivalent de l'inspecteur du travail dans le secteur privé, car ses compétences en matière de contrôle, plus limitées, ne s'accompagnaient d'aucun pouvoir de contrainte ou d'autorisation et qu'il ne relevait pas d'un corps d'inspection indépendant. En conséquence, une concertation a été engagée avec le ministre du travail pour trouver une solution.

À ma connaissance, rien de nouveau n'est intervenu depuis, ce qui est tout à fait dommageable pour la formation des jeunes et, je me permets de le dire, quelque peu ridicule, dans la mesure où l'enjeu n'est ni plus ni moins que de rendre applicable dans les faits une disposition en vigueur depuis plusieurs années.

Si nous sommes tous parfaitement conscients que des précautions particulières doivent nécessairement être prises pour entourer ces activités dites dangereuses, le blocage constaté en l'espèce ne se situe pas à ce niveau puisqu'il est purement de nature administrative.

Monsieur le secrétaire d'État, ma question est double. La réflexion engagée a-t-elle abouti ? Une solution a-t-elle pu être trouvée ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Monsieur Trillard, vous m'avez interrogé sur les conditions d'emploi des apprentis par les collectivités territoriales.

La formation des mineurs accueillis dans les collectivités territoriales dans le cadre d'un contrat d'apprentissage est, effectivement, strictement encadrée, notamment par certaines dispositions du code du travail.

Celui-ci prévoit, sauf dérogation accordée par l'inspecteur du travail à la demande de l'employeur, l'interdiction de l'utilisation de machines dangereuses ou réputées telles, parmi lesquelles figurent apparemment les tondeuses à gazon autotractées. J'ignorais, pour ma part, qu'il m'arrivait d'utiliser, le dimanche, une machine aussi dangereuse dans mon jardin ! (Sourires.)

Or, n'étant pas autorisés par la loi à pénétrer dans les locaux des collectivités, les inspecteurs du travail sont conduits à refuser, de manière abusive selon moi, les dérogations sollicitées par les employeurs territoriaux, car ils considèrent qu'ils n'ont ni la capacité d'apprécier la situation dans laquelle se trouve le mineur ni celle de révoquer cette dérogation en cas de difficulté.

Bien entendu, nombre d'élus sont intervenus afin de tenter de remédier à cette situation, que vous-même avez qualifiée de « ridicule ». Celle-ci est effectivement pénalisante pour l'ensemble des employeurs territoriaux et, au final, pour les apprentis eux-mêmes, qui souhaiteraient pouvoir se servir, au cours de leur stage, de tels matériels, qui semblent relativement inoffensifs.

Par voie de conséquence, nous avons demandé à nos services de saisir ceux du ministère du travail, afin que ceux-ci envisagent une modification du code du travail pour permettre réellement aux inspecteurs du travail d'accorder de telles dérogations. Il importe, en effet, de mettre fin à cette situation : vous l'avez qualifiée vous-même d'« ubuesque » dans l'exposé de votre question, et je partage totalement cet avis.

Au demeurant, le ministère du travail m'a récemment informé qu'il souhaitait entreprendre une réforme de ce dispositif.

Il envisage notamment que les dérogations à l'interdiction de travailler sur les machines dangereuses ou prétendues telles soient accordées par les employeurs eux-mêmes, après évaluation des risques potentiels, et qu'elles soient ensuite simplement notifiées aux inspecteurs du travail.

Le rôle de ces derniers serait alors concentré sur le contrôle des conditions de travail de ces apprentis et du respect des règles de sécurité, contrôle assorti du pouvoir de « retirer » éventuellement le mineur en cas de difficulté extrême.

Ce nouveau dispositif s'appliquerait aux employeurs tant privés que publics. Les employeurs territoriaux seraient ainsi compétents pour délivrer des dérogations à l'utilisation des machines dangereuses ou prétendues telles.

Une telle réforme aurait l'avantage de lever les difficultés actuellement rencontrées par les élus à l'occasion de l'accueil d'apprentis.

Au total, monsieur le sénateur, un travail en ce sens entre les différents ministères concernés sera mené d'ici à l'automne, ce qui devrait se traduire à court terme par une amélioration de la situation et répondre ainsi à votre légitime demande.

M. le président. La parole est à M. André Trillard.

M. André Trillard. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, car vous avez parfaitement compris le sens de ma question. Je ne sollicite bien sûr ni l'utilisation des tronçonneuses ni la conduite d'engins agricoles sur route ! Mais les jeunes ont droit à un peu plus que le râteau et la pelle et doivent pouvoir utiliser des engins dans des conditions normales. En effet, ceux qui s'intéressent à un métier souhaitent connaître les outils qu'ils seront amenés à manier, et je ne vois pas quel danger extraordinaire il y aurait à utiliser un tracteur ou un coupe-bordure à fil.

En la matière, le bon sens doit prévaloir. C'est la raison pour laquelle votre réponse me satisfait.

M. le président. Mais il ne s'agit pas forcément de la faucille et du marteau, car c'est dépassé ! (Sourires.)

- page 4224

Page mise à jour le