Question de M. REBSAMEN François (Côte-d'Or - SOC) publiée le 18/12/2008

M. François Rebsamen attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le projet de création d'un « pôle national de la statistique publique » décidé au cours de l'été.
Il s'interroge notamment sur l'absence de concertation préalable à ce projet et sur les effets néfastes que cette décision aurait sur le droit des citoyens, des acteurs économiques, sociaux, syndicaux, associatifs et politiques à une information objective des réalités économiques et sociales et sur l'avenir des directions régionales et de leurs agents, et notamment celle de Dijon qui compte aujourd'hui 145 salariés.
Plus de 500 agents de la statistique publique pourraient être délocalisés de l'Île-de-France vers Metz. Présenté comme une création et un regroupement, ce projet apparaît plutôt comme un démantèlement d'activités déjà existantes. L'objectif est de porter la taille de l'établissement messin à 750 agents en transférant 543 postes, dont 310 seraient issus des directions générale et régionale de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et 142 des centres nationaux informatiques. Le rapport commandé par le Premier ministre au directeur général de l'INSEE et au vice-président du Conseil national de l'information statistique (CNIS), et remis le 2 décembre dernier, est jalonné de rappels sur les difficultés de mise en œuvre du projet.
En effet, une délocalisation entraînerait des coûts financiers importants : aménagement de nouveaux locaux, dédommagement des agents qui accepteraient de se déplacer, remboursement des frais de transport pour les nombreuses réunions de travail, etc. Et que dire des coûts humains ?
Début septembre, le Président de la République avait annoncé à des élus de Moselle, département le plus touché par les restructurations dans l'armée, des mesures de compensation, dont la délocalisation d'un millier d'emplois de la statistique publique à l'horizon 2011. Le système statistique public a pour mission d'éclairer en toute indépendance les grands débats de la société en produisant des chiffres fiables et des études économiques et sociales objectives. Il ne doit pas être un moyen de compensation d'autres réformes, une variable d'ajustement de la politique d'aménagement du territoire.
Ce projet menace l'existence même d'établissements régionaux et notamment celui de Dijon qui, s'il compte aujourd'hui 145 agents, se rapprocherait dangereusement du seuil de viabilité d'un établissement régional (fixé à 80 agents par la direction générale) si ce projet arrivait à terme.
Aussi, il lui rappelle que toute décision de délocalisation porterait atteinte à la qualité et à l'indépendance des travaux de la statistique publique et aux conditions de vie et de travail des agents. Il regrette qu'aucune réelle consultation préalable n'ait été menée sur ce projet de délocalisation. Il lui demande par conséquent les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que ce projet ne se traduise pas par un démantèlement pur et simple de l'actuel outil statistique dont chacun reconnaît la qualité de l'expertise.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé des affaires étrangères et des droits de l'homme publiée le 28/01/2009

Réponse apportée en séance publique le 27/01/2009

La parole est à M. François Rebsamen, auteur de la question n° 366, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

M. François Rebsamen. Je souhaite attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le projet de création d'un « Pôle national de la statistique publique », décidée au cours de l'été 2008, sans concertation préalable.

Je m'interroge sur les effets néfastes que cette décision pourrait avoir, d'une part, sur le droit des citoyens, des acteurs économiques, sociaux, syndicaux et politiques à une information objective des réalités économiques et sociales, et, d'autre part, sur l'avenir des directions régionales, notamment celle de Dijon, qui compte aujourd'hui 145 agents.

Présenté, dans un rapport remis au Premier ministre, comme une création et un regroupement, ce projet apparaît plutôt comme un démantèlement d'activités existantes par le transfert de 543 postes, dont 310 seraient issus des directions générale et régionale de l'INSEE et 142 des centres nationaux informatiques.

Or les deux tiers du personnel de l'INSEE travaillent en région pour répondre aux besoins d'expertise des territoires et assurer le suivi des enquêtes. Il me semble incohérent et dangereux d'imposer une délocalisation de tout ou partie des services par une décision unilatérale prise dans l'urgence et sans concertation avec les utilisateurs et les acteurs de la statistique publique.

Par ailleurs, la production de statistiques de qualité repose sur le savoir-faire d'un personnel spécialisé. La délocalisation exposerait l'INSEE à de nombreux départs d'experts en poste, comme l'illustre l'exemple britannique.

Enfin, au début du mois de septembre, le Président de la République annonçait à des élus de Moselle, département le plus touché par les restructurations militaires, des mesures de compensation, dont la délocalisation d'un millier d'emplois de l'INSEE à l'horizon 2011.

L'INSEE éclaire en toute indépendance les grands débats de la société par des études économiques et sociales objectives ; aussi, elle ne doit pas être un moyen de compensation d'autres réformes.

Ce projet, s'il arrivait à terme, menacerait l'existence même de nombreux établissements régionaux, notamment celui de Dijon, qui compte aujourd'hui, je le répète, 145 agents, le rapprochant dangereusement du seuil de viabilité d'un établissement régional, fixé à 80 agents.

Les coûts financiers d'une telle délocalisation, de toute évidence très importants, sont évoqués à de nombreuses reprises dans le rapport, mais les éléments de chiffrage précis ont été supprimés de sa version publique. Aussi, je souhaiterais obtenir plus d'éléments concernant le coût de ce projet et savoir si une évaluation des bénéfices de la délocalisation a été engagée.

Par ailleurs, les mesures d'accompagnement en direction des agents qui ne suivraient pas leur emploi délocalisé, évalués à près de 500, dont le rapport fait mention, pourraient-elles nous être précisées ?

Enfin, cette décision de délocalisation risque de porter atteinte à la qualité et à l'indépendance des travaux de l'INSEE et aux conditions de vie et de travail des agents. Par conséquent, je demande au Gouvernement de revenir sur son projet de délocalisation, qui signifierait le démantèlement d'un service de l'INSEE.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Christine Lagarde, qui est chargée de ce dossier.

Vous avez bien voulu attirer son attention sur le projet de création d'un pôle national de la statistique publique.

Le Président de la République a souhaité relancer une politique d'implantation d'emplois publics en région, en s'appuyant sur plusieurs principes : d'abord, apporter de l'activité économique à des territoires qui en ont besoin ; ensuite, réduire le coût de gestion des administrations, notamment en matière immobilière ; enfin, réaliser des synergies permettant une meilleure efficacité des services publics.

Compte tenu de la restructuration des forces armées sur notre territoire, le Président de la République a désiré que cette politique s'applique prioritairement à l'agglomération de Metz. En effet, la proximité de cette ville avec l'Office statistique des Communautés européennes ainsi que sa desserte par le TGV ont conduit le Gouvernement à considérer que le service statistique public pouvait contribuer à une opération de délocalisation vers la Moselle.

Le Premier ministre a donc demandé à M. Jean-Pierre Duport, vice-président du Conseil national de l'information statistique, et à M. Jean-Philippe Cotis, directeur général de l'INSEE, de dessiner les contours d'un tel centre statistique en prenant en compte les quatre objectifs suivants : préserver la qualité de la production du service statistique public ; apporter une véritable valeur ajoutée au fonctionnement des administrations, en exploitant toutes les sources de synergie ; créer à Metz un acteur important du service statistique public et un bassin d'emploi attractif pour les agents ; enfin, faciliter l'installation des agents via les mesures d'accompagnement appropriées.

Le 2 décembre dernier, MM. Duport et Cotis ont transmis leur rapport au Gouvernement. Sur la base de celui-ci, le Premier ministre a décidé, le 15 janvier 2009, la création d'un centre statistique à Metz. Ce centre sera structuré en quatre piliers : les statistiques sociales et locales ; les produits de diffusion ; les ressources humaines ; l'informatique.

Il s'agira d'une implantation de près de 625 postes, dont 500 en provenance du service statistique public – la direction générale de l'INSEE, les directions régionales, les centres nationaux informatiques, la DARES, la DREES – et environ 120 créations sur place, à savoir un centre d'enquêtes téléphoniques et un centre de formation aux statistiques européennes.

La création du mastère de statistiques publiques européennes sera mise à l'étude, au préalable, en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Les modalités de mise en œuvre du projet et ses mesures d'accompagnement feront l'objet de concertations avec les organisations représentatives dans les meilleurs délais.

Cette décision constitue une mesure d'aménagement du territoire et une mesure de solidarité nationale envers des régions touchées par la réforme de la carte militaire.

Le Gouvernement restera spécialement attentif à la qualité de la statistique publique ainsi qu'aux personnels du service statistique public, qui remplissent leur mission avec une compétence et un dévouement exemplaires.

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen.

M. François Rebsamen. Votre réponse ne me surprend pas, madame la secrétaire d'État. Je suis moi-même très attaché, comme tous les habitants du Grand-Est, à la compensation du préjudice subi par Metz du fait du retrait total de plusieurs régiments.

Un rapprochement de l'INSEE et de l'Office statistique des communautés européennes, EUROSTAT, certes envisageable, ne peut néanmoins pas s'effectuer au détriment de l'activité et de l'attractivité de l'INSEE ni, comme l'a souligné le directeur général de l'INSEE, entraver la relation nécessairement étroite qui doit exister entre l'INSEE, les autres services du ministère et la recherche académique.

Madame la secrétaire d'État, vous n'avez pas répondu précisément à ma question – mais je ne vous en veux pas pour autant – concernant le coût qu'entraînerait une telle opération sur les finances publiques, le devenir des personnels et les menaces qui pèsent sur les directions régionales, lesquelles seront fortement mobilisées alors qu'elles contribuent largement à l'expertise des territoires. Les élus locaux travaillent en effet à partir des statistiques qui leur sont fournies par l'INSEE.

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