Question de M. JUILHARD Jean-Marc (Puy-de-Dôme - UMP) publiée le 15/10/2009

M. Jean-Marc Juilhard attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche
sur la prolifération du frelon asiatique et sur les conséquences de cette invasion sur la filière apicole. Cet insecte, originaire du sud-est asiatique, est arrivé en France autour de 2004 par le port de Bordeaux. Il s'est depuis développé dans plusieurs régions de France dont l'Auvergne. Prédateur de l'abeille dont il se régale du thorax, riche en protéines, il peut en détruire des milliers en quelques jours et donc impacter de façon significative les ruchers. Face à ce danger qui affecte l'apiculture française déjà très touchée mais également les productions fruitières, la pollinisation (80% des espèces végétales dans le monde dépendent de la pollinisation des insectes, dont les abeilles qui sont les plus efficaces) et la population victime de piqûres, il demande au Gouvernement les mesures qu'il entend prendre rapidement pour combattre cette invasion du frelon « vespa velutina »


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Transmise au Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat


Réponse du Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat publiée le 18/03/2010

Le frelon asiatique à pattes jaunes, Vespa velutina nigritorax, a été identifié en France pour la première fois en 2006, dans le Lot-et-Garonne. L'espèce, qui avait probablement été introduite quelques années auparavant dans des marchandises importées de Chine, s'est depuis acclimatée en France. Son aire de répartition s'étend d'année en année, et les scientifiques s'accordent à penser qu'elle est susceptible de coloniser une bonne partie de l'Europe occidentale, seul le nord du continent lui étant défavorable. En tout état de cause, son éradication ne semble pas possible, et l'on ne dispose pas forcément aujourd'hui des connaissances techniques suffisantes pour faire éventuellement obstacle à leur progression. Le frelon asiatique présente des points communs avec le frelon d'Europe, Vespa crabro, notamment un régime à base d'insectes et de fruits mûrs, une faible agressivité et un venin de toxicité analogue. Ainsi, du point de vue de la santé et de la sécurité publiques, ce frelon asiatique ne semble pas à ce jour responsable d'un nombre plus élevé de piqûres qu'à l'accoutumée, et les quelques envenimations observées semblent posséder les mêmes caractères de gravité que nos espèces autochtones. Bien que réputé moins agressif que le frelon européen, le frelon asiatique à pattes jaunes peut pourtant présenter un danger pour les personnes dans certaines situations, par exemple si un nid est construit dans une cour d'école. Toutefois, d'après la synthèse des observations recueillies à ce jour, les attaques ont lieu dans un rayon de 5 mètres autour des nids. Ces nids étant habituellement construits dans les arbres à 15 mètres du sol, on peut penser que les risques pour la population sont relativement limités. Cependant, le frelon asiatique possède une particularité qui l'a fait connaître, celle de s'attaquer aux ruches. L'abeille domestique, Apis mellifera, contrairement à son homologue asiatique, Apis cerana, n'a pas développé de stratégie de défense et les dégâts provoqués par le frelon asiatique peuvent être importants. Dans un contexte où l'apiculture rencontre déjà de nombreuses difficultés - infestations par le Varroa, défaut de ressources alimentaires, impact de certains produits phytosanitaires notamment, l'arrivée de ce nouveau prédateur est durement ressentie par les apiculteurs amateurs et professionnels. En revanche, on ne lui connaît pas d'impact significatif sur la biodiversité, notamment sur les espèces protégées. On ne dispose pas non plus d'information inquiétante sur l'influence qu'exercerait le frelon asiatique à pattes jaunes sur l'état des populations d'autres hyménoptères sociaux que l'on trouve en France, c'est-à-dire principalement les guêpes du genre Vespula et le frelon européen. L'ensemble de ces considérations a conduit les autorités à rechercher des moyens réglementaires d'intervention. C'est ainsi que le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, a présenté à la commission « faune » du Conseil national de la protection de la nature un projet d'arrêté visant à classer le frelon asiatique comme espèce invasive, conformément aux dispositions de l'article L. 411-3 du code de l'environnement. Ce texte sera prochainement présenté au comité permanent du Conseil national de la protection de la nature. En effet, un simple arrêté pris sur la base de l'article L. 411-3 du code de l'environnement n'est pas suffisant pour imposer des interventions contre une espèce en expansion. Ses dispositions visent avant tout l'introduction et la commercialisation d'espèces. En tout état de cause, aucune espèce de guêpe ni de frelon ne figure en France parmi les espèces protégées et par conséquent rien ne s'oppose juridiquement à la destruction de ces insectes ou de leurs nids. Le contrôle de l'expansion du frelon asiatique à pattes jaunes se heurte essentiellement aujourd'hui à des problèmes d'ordre technique. À défaut de pouvoir envisager son éradication, deux voies complémentaires méritent d'être explorées : les protections ponctuelles et le contrôle de l'espèce. Les protections ponctuelles impliquent de recenser les intérêts à protéger soit par un dispositif préventif comme dans le cas des ruchers, soit par une intervention, comme dans le cas où il faut détruire un nid dans une zone à risque pour la population. Le contrôle de l'espèce peut viser à retarder l'expansion ou à diminuer localement la densité des frelons. Chacune de ces deux voies nécessite des solutions techniques fiables qui font encore défaut. Par exemple, le piégeage des reines sortant d'hibernation a été conseillé par un institut technique, mais déconseillé par le Muséum national d'histoire naturelle ; sur l'opportunité de détruire les nids, les avis divergent aussi. Une mission interministérielle a été commanditée par les ministres chargés de l'agriculture, de l'intérieur, de la santé et de l'environnement. Le rapport qu'elle rendra orientera les choix juridiques et techniques à décider. Par ailleurs, mes services ont mobilisé le Muséum national d'histoire naturelle pour travailler à réunir et valider les données naturalistes relatives à l'expansion de cette espèce en France et qui contribue à la recherche de solutions nouvelles.

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