Question de M. BAILLY Gérard (Jura - UMP) publiée le 28/01/2010

M. Gérard Bailly appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat sur la question du bien-être animal.

Ayant participé au Sénat au groupe de travail "Animal et société" dans le cadre des projets de loi sur le Grenelle de l'environnement, il a pu mesurer l'attention portée au bien-être animal dans les élevages et dans les transports. Il y a quelques mois, l'Union européenne envoyait une brochure à tous les éleveurs de l'Union européenne intitulée "PAC et bien-être des animaux : des normes élevées dans l'UE". Ce critère de bien-être est entré dans la plupart des exploitations et on ne peut qu'y souscrire. La brochure indique que "ces normes de bien-être peuvent conférer un avantage concurrentiel dans la mesure où les consommateurs européens sont prêts à payer davantage pour la viande, le lait ou les oeufs produits dans des conditions respectueuses du bien-être, à condition qu'ils soient effectivement commercialisés comme des produits de première qualité". Hélàs, dans la conjoncture actuelle, les éleveurs n'ont pas perçu, dans les prix, le moindre retour de leurs efforts ... Il lui demande donc ce qu'il entend faire pour valoriser les efforts faits par la profession.

Par ailleurs, de nombreuses lois européennes en matière de bien-être sont déjà en vigueur afin que les animaux ne subissent pas de douleurs ni de souffrances. Conformément à la définition du protocole sur la protection et le bien-être des animaux annexé au traité CE en 1999, ces règles reflètent les cinq libertés largement reconnues comme définissant l'idéal du bien-être animal : être à l'abri de la faim et de la soif, ne pas souffrir de contrainte physique, avoir la liberté d'exprimer des comportements normaux, être à l'abri de la peur et de l'angoisse, ne pas être sujets à la douleur, aux blessures et aux maladies.

Sans parler des sommes importantes engagées dans le budget de l'État ni des préjudices subis par les éleveurs et les bergers, il aimerait comprendre comment, face à ces textes, on peut tolérer que, du fait de la ré-introduction des prédateurs, environ 3 000 agneaux soient blessés, mutilés ou déchiquetés dans des conditions exécrables - sans parler d'autres animaux comme les bovins ou le jeune gibier.

Il se demande si l'Europe et le Gouvernement français vont accepter encore longtemps la ré-introduction des prédateurs et ne pas intervenir pour en limiter les effectifs.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 03/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 02/11/2010

M. Gérard Bailly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le bien-être animal. J'interviens en tant que président du groupe d'études de l'élevage du Sénat. Ayant participé au Sénat au groupe de travail « Animal et société » dans le cadre des projets de loi Grenelle I et II, j'ai pu mesurer l'attention portée au bien-être animal dans les élevages et les transports. Il y a quelques mois, l'Union européenne envoyait une brochure à tous les éleveurs de l'Union, intitulée « PAC et bien-être des animaux : des normes élevées dans l'UE ». Ce critère de bien-être est entré dans la plupart des exploitations et on ne peut qu'y souscrire. La brochure indique que « ces normes de bien-être peuvent conférer un avantage concurrentiel dans la mesure où les consommateurs européens sont prêts à payer davantage pour la viande, le lait ou les œufs produits dans des conditions respectueuses du bien-être, à condition qu'ils soient effectivement commercialisés comme des produits de première qualité. » Hélas, dans la conjoncture actuelle, les éleveurs n'ont pas perçu dans les prix le moindre retour de leurs efforts. J'aimerais savoir ce que vous comptez faire pour valoriser les efforts réalisés dans ce domaine par la profession. Par ailleurs, de nombreuses lois européennes en matière de bien-être sont déjà en vigueur afin que les animaux ne subissent pas de douleurs ni de souffrances, principalement au niveau de l'abattage. Conformément à la définition du protocole sur la protection et le bien-être des animaux annexé au traité CE en 1999, ces règles reflètent les cinq libertés largement reconnues comme définissant l'idéal du bien-être animal : être à l'abri de la faim et de la soif, ne pas souffrir de contrainte physique, avoir la liberté d'exprimer des comportements normaux, être à l'abri de la peur et de l'angoisse, ne pas être sujet à la douleur, aux blessures et aux maladies. Sans parler des sommes importantes engagées dans le budget de l'État ni des préjudices subis par les éleveurs et les bergers, j'aimerais comprendre comment, face à ces textes, on peut tolérer que, du fait de la réintroduction des prédateurs – loups, ours, lynx –, des milliers d'agneaux soient blessés. Pas moins de 3133 ont été mutilés ou déchiquetés dans des conditions exécrables, sans parler d'autres animaux comme les bovins ou le jeune gibier qui sont aussi attaqués. Est-ce que l'Europe et le gouvernement français vont accepter encore longtemps la réintroduction des prédateurs et ne pas intervenir pour en limiter les effectifs ? L'actualité montre tous les jours les dégâts qu'ils causent et le profond découragement des éleveurs qui en résulte, notamment dans les élevages ovins. M. le président. La parole est à M. le ministre. M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M. Jean-Louis Borloo. La France s'est engagée à protéger les grands prédateurs que sont l'ours, le loup et le lynx, tant à l'échelon international, dans le cadre de la convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe, qu'à l'échelon communautaire, en application de la directive du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages. Dans le droit national, ces dispositions sont transcrites dans le code de l'environnement et par l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. Des dérogations au statut de protection peuvent être accordées, notamment pour prévenir des dommages importants à l'élevage – vous y avez fait référence, monsieur le sénateur –, à condition toutefois qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable. De ce fait, des mesures générales de limitation des effectifs ne peuvent être envisagées, bien que des opérations de destruction puissent être autorisées pour répondre ponctuellement aux problèmes qui se posent. Le plan d'action national sur le loup 2008-2012 prévoit ainsi la mise en œuvre d'une gestion différenciée de cette espèce en fonction de critères liés notamment aux caractéristiques des systèmes d'élevage concernés. L'arrêté du 3 juin 2009 fixe les conditions et les limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup. Concernant l'application des règles du bien-être animal aux animaux d'élevage exposés à la prédation, l'annexe de la directive européenne du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages précise que « les animaux non gardés dans des bâtiments sont, dans la mesure où cela est nécessaire et possible, protégés contre les intempéries, les prédateurs et les risques pour leur santé ». À ce titre, il convient de souligner que, en conformité avec la réglementation européenne et nationale sur le bien-être animal, le Gouvernement finance depuis 2004, tant dans les Pyrénées que dans les Alpes, un ensemble de mesures pour assurer la défense des troupeaux contre la prédation. Le financement de ces mesures – gardiennage, chiens de protection, mise en place de clôtures et de parcs – destinées à garantir le bien-être et la sécurité des animaux d'élevage fait l'objet d'un cofinancement à l'échelon européen. Il représente de loin la partie la plus importante du budget consacré par l'État à la conservation des grands prédateurs. M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly. M. Gérard Bailly. C'est maintenant au porte-parole du Gouvernement que je vais m'adresser, monsieur le ministre, afin que vous fassiez part à vos collègues des difficultés de compréhension des éleveurs. D'un côté, on leur demande de faire des efforts considérables dans leurs exploitations en faveur du bien-être de leurs animaux. De l'autre, on laisse ces animaux se faire dévorer dans les alpages en autorisant un trop grand nombre de prédateurs, notamment des loups et des ours, voire en les réintroduisant comme c'est le cas avec le lynx. Les éleveurs ne le comprennent pas. J'avais posé une question sur ce sujet voilà environ deux ans et on m'avait déjà répondu que le nombre de prédateurs serait limité. Il faut savoir que, en 2009, il y a eu dans l'arc alpin 992 attaques, contre 810 en 2008. Alors qu'on compte aujourd'hui 200 loups dans l'arc alpin et que ceux-ci s'étendent, le nombre d'attaques ne cesse de progresser. Mon département a ainsi subi sa première attaque de loup il y a près d'un an. L'élevage attaqué comptait 240 ovins : 40 brebis ou agneaux ont été tués. Aujourd'hui, l'éleveur a quitté la profession, après avoir vendu son troupeau. Je rappelle que nous avons rédigé, en 2008, avec mon collègue François Fortassin, un rapport sur le devenir de l'élevage ovin. Nous sommes globalement passés de 11 millions de têtes d'ovins à 8 millions, soit une perte de 3 millions. Or la présence ovine est indispensable dans les alpages dans le cadre de notre politique environnementale. Si nous ne diminuons pas le nombre de prédateurs, nous savons aujourd'hui quels dégâts ils provoqueront dans les années à venir. Je tiens donc une nouvelle fois à attirer l'attention du Gouvernement sur cette question : certes, il faut des loups, des ours, des lynx – nous sommes d'accord sur ce point –, mais leur nombre doit être limité. À cet égard, je rappelle que les loups ne sont plus une espèce protégée. Il conviendrait donc de limiter leur nombre. J'ai reçu des articles parus dans la presse dans lesquels on évoque d'éventuelles fermetures de sentiers de randonnée. On a vu un loup aux portes de Gap, un autre a été tué à l'entrée de Grenoble. Cette prolifération va poser de réels problèmes, monsieur le ministre. Le Gouvernement doit donc prendre conscience de la nécessité de limiter le nombre de prédateurs. Peut-être la France pourrait-elle, à l'instar de nos amis suisses, dénoncer la convention de Berne afin que cette question puisse être rediscutée ? M. le président. Monsieur Bailly, je salue la passion qui vous anime. D'autres prédateurs, telles les buses, devraient également être régulés.

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