Question de Mme GONTHIER-MAURIN Brigitte (Hauts-de-Seine - CRC-SPG) publiée le 31/03/2010

Question posée en séance publique le 30/03/2010

Concerne le thème : L'éducation et l'ascension sociale

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le ministre, avec les enseignants, les parents et les élèves, fortement mobilisés ces derniers mois contre les réformes de l'éducation nationale, je partage l'aspiration populaire à une école de l'égalité, de la justice et de la réussite pour tous.

Enjeu de société, le devenir de l'école publique doit être pensé pour relever le défi d'émancipation de tous, sans exclusive.

Or on nous enferme dans des débats stériles. Il en est ainsi de l'égalité des chances, qui ne valorise en réalité que le mérite individuel. Loin de faire reculer les inégalités devant l'éducation, elle laisse de côté l'immense majorité des élèves issus des milieux populaires.

Stigmatisante, même, pour ceux qui ne s'en sortent pas, cette politique nie la possibilité pour le plus grand nombre de se construire un avenir, chacun à son rythme.

Car faire reculer les inégalités devant l'éducation, c'est offrir à chacun les moyens de construire sa propre vie scolaire et intellectuelle, sans que les conditions économiques d'origine et de position sociale la déterminent.

C'est donc bien à l'État de garantir, sur l'ensemble du territoire, la présence et le développement d'un service public de l'éducation, dont l'ambition est l'égalité d'accès pour tous à un haut niveau de culture.

Mais faire cela, c'est aller à l'exact opposé de votre politique favorisant l'école privée, renforçant l'élitisme et réduisant des voies de l'insertion aussi indispensables que l'enseignement professionnel et agricole.

Il faut stopper la réduction du nombre de fonctionnaires, refuser leur précarisation et l'amenuisement de l'offre éducative.

Monsieur le ministre, allez-vous fournir aux parlementaires un bilan de la loi dite « d'égalité des chances » et engager une réforme digne de ce nom, celle qui doit réfléchir au rôle nouveau et à la transformation de l'éducation nationale comme outil d'égalité, de gratuité sur l'ensemble du territoire ?


Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 31/03/2010

Réponse apportée en séance publique le 30/03/2010

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Madame le sénateur, je crains que deux minutes ne me suffisent pas pour évoquer l'ensemble des sujets que vous avez abordés dans votre question.

M. le président. Vous pourrez y revenir !

M. Luc Chatel, ministre. En effet, monsieur le président, j'aurai l'occasion de revenir sur ces sujets dans les réponses que j'apporterai aux différents orateurs.

Madame le sénateur, vous appelez à une mobilisation en faveur de l'égalité des chances. Aujourd'hui, d'un point de vue sociologique, si la proportion de fils et de filles d'employés et d'ouvriers dans les classes de sixième correspond fidèlement à la structure de la population active française, il n'en est plus de même dans les classes de terminale, en fin de cycle. Dans ces conditions, il est bien difficile de parler d'égalité des chances.

J'ai dénoncé cette situation dès ma prise de fonctions. C'est pourquoi il faut renforcer le brassage social, et c'est précisément l'objet des réformes que nous mettons en œuvre.

M. René-Pierre Signé. C'est un problème social !

M. Luc Chatel, ministre. Par exemple, quand on réforme le lycée professionnel pour une meilleure insertion professionnelle, donc pour qu'il débouche davantage sur un emploi, on travaille pour l'égalité des chances. De même, lorsqu'on améliore l'orientation au lycée afin que chacun puisse trouver sa voie plus facilement tout au long de son parcours, l'orientation ne tombant plus comme un couperet, on travaille également pour l'égalité des chances.

Pour autant, je ne souhaite pas opposer égalité des chances et excellence. Je suis pour une école de la République qui soit une école de l'excellence, de l'élitisme – je n'ai pas peur des mots. Oui, je suis favorable à ce qu'une élite scolaire accède au meilleur niveau, mais, en même temps, je veux que chaque élève trouve sa voie dans le système éducatif.

L'action que nous menons et les réformes que nous mettons en œuvre ont pour objectif de diminuer progressivement le nombre des élèves quittant le système éducatif sans aucun diplôme.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour la réplique.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Confrontés à l'explosion des exigences et de la colère des banlieues, vous aviez fait adopter, en 2006, la loi dite « d'égalité des chances ».

Quatre ans après, le bilan est plutôt maigre. Outre le fait que le contrat première embauche, ou CPE, a été massivement rejeté, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, pointe aujourd'hui la persistance de fortes inégalités de toutes sortes, qui font que, à diplôme égal, on n'accède pas aux mêmes catégories socioprofessionnelles.

La discrimination positive, que vous mettez en œuvre et qui vise à instaurer des politiques de quotas et des internats d'excellence, n'est pas la réponse aux exigences d'acquisition du plus haut niveau de connaissance pour tous.

Il faut des moyens supplémentaires, ce que les acteurs de l'éducation ne cessent de réclamer, comme ils l'ont encore redit ces derniers jours.

Il faut des enseignants supplémentaires, il faut des RASED, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, il faut des infirmières, il faut des médecins à l'école, il faut des CO-PSY, les conseillers d'orientation psychologues, il faut des CIO, les conseillers d'information et d'orientation !

En parallèle, il faut aussi réfléchir à l'offre pédagogique du troisième millénaire.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Aussi, je réitère ma demande qu'un bilan de la loi de 2006 soit dressé.

M. René-Pierre Signé. Et il ne faut pas supprimer de postes !

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