Question de M. PASTOR Jean-Marc (Tarn - SOC) publiée le 01/04/2010

M. Jean-Marc Pastor attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les tarifs d'achat de l'électricité produite à partir de la biomasse.

Le Président de la République a annoncé un doublement voire un triplement des tarifs d'achat obligatoire d'électricité produite par les unités de cogénération.

Cependant la procédure mise en œuvre réserve les appels d'offres aux centrales de forte puissance et donc aux très grande entreprises des secteurs de la papeterie ou de la chimie. Les seuils de puissance exigés sont de 5 mégawatts ce qui exclut la quasi-totalité des entreprises de taille moyenne ainsi que les réseaux de chaleur.

Or, les centrales et les chaufferies à bois de faible puissance sont aussi soumises à une réglementation sur les poussières et les particules et sont équipées de filtres.

Il lui demande donc s'il envisage de faire cesser l'inégalité de traitement entre les entreprises de sorte que les petites centrales qui constituent le tissu industriel de la France rurale et forestière bénéficient également de tarifs d'achat auxquelles les grandes centrales ont accès.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat publiée le 02/06/2010

Réponse apportée en séance publique le 01/06/2010

M. Jean-Marc Pastor. Madame la secrétaire d'État, les tarifs d'achat de l'électricité font l'objet de calculs économiques déterminants pour les producteurs d'énergie, notamment pour ceux de la filière bois-énergie qui ont travaillé sur la cogénération. En effet, le prix de revient de l'électricité produite par la technologie dite « des cycles de Rankine », largement développée par nos voisins allemands, autrichiens ou italiens, demeure à un niveau raisonnable pour des industries de taille relativement modeste. Les installations d'une puissance de 500 kilowatts électriques à 3 mégawatts électriques sont donc rentables.

Le 19 mai 2009, le Président de la République annonçait à Urmatt, en Alsace, un doublement, voire un triplement du prix d'achat de l'électricité produite par des centrales de cogénération de taille moyenne utilisant de la biomasse. Or l'arrêté du 28 décembre 2009 réserve le bénéfice du nouveau dispositif aux installations de plus de 5 mégawatts électriques, donc aux très grandes entreprises de la papeterie et de la chimie.

La quasi-totalité des entreprises de taille moyenne ainsi que les réseaux de chaleur sont exclus du dispositif, ce qui est assez dommageable pour le territoire et l'initiative locale.

Les fortes puissances unitaires nécessitent de grosses quantités de biomasse et, par conséquent, de vastes périmètres ainsi que de très importants moyens logistiques, notamment dans le domaine des transports, en raison de la longueur des distances. En revanche, les petites et moyennes puissances offrent de bonnes garanties pour ce qui concerne la facilité de valorisation de la chaleur produite et la pérennité d'une ressource mobilisée localement.

Par ailleurs, la procédure des appels d'offres, qui privilégie les centrales de forte puissance, est-elle la mieux à même de remplir les objectifs fixés ? On peut en douter au vu de l'expérience passée dans la mesure où les opérations retenues n'ont pas forcément été concrétisées. La démarche ne permet pas une bonne répartition sur le territoire, contrairement au tarif d'achat obligatoire.

Enfin, dès que leur puissance atteint 1 mégawatt thermique, toutes les installations sont équipées d'un filtre à particules, afin de bénéficier du fonds chaleur renouvelable. De ce fait, elles doivent respecter un seuil de poussière maximal, fixé à 50 milligrammes par mètre cube pour les réseaux de chaleur et à 30 milligrammes pour l'industrie.

Madame la secrétaire d'État, envisagez-vous de faire cesser l'inégalité de traitement entre les petites et moyennes centrales, d'une part, et les grosses centrales, d'autre part, de façon que les premières, qui constituent le tissu économique industriel de la France rurale et forestière, bénéficient également des tarifs d'achat auxquels les secondes ont accès ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Monsieur le sénateur, le Grenelle de l'environnement a fixé des objectifs ambitieux en matière de développement de la production d'énergie à partir de biomasse. Ces objectifs ont été confirmés dans la programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité adoptée au mois de janvier dernier.

Tout d'abord, le Gouvernement entend donner une priorité aux installations les plus performantes d'un point de vue énergétique. La valorisation sous forme de chaleur est donc encouragée grâce au fonds chaleur renouvelable, doté de 1 milliard d'euros pour la période 2009-2011.

À titre complémentaire, la valorisation électrique est également soutenue, même si elle a un intérêt moindre d'un point de vue énergétique. La programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité fixe ainsi un objectif d'accroissement de capacité de 520 mégawatts à l'horizon 2012 et de 2 300 mégawatts à l'horizon 2020.

Pour atteindre ces objectifs, le Gouvernement a décidé : d'une part, de lancer dans les toutes prochaines semaines un appel d'offres pluriannuel portant sur 800 mégawatts pour développer des grandes installations de cogénération, c'est-à-dire de puissance supérieure à 12 mégawatts ; d'autre part, de tripler le tarif d'achat de l'électricité pour les installations de taille moyenne, c'est-à-dire d'une puissance comprise entre 5 et 12 mégawatts.

En revanche, il n'a pas pour stratégie de développer les installations de moins de 5 mégawatts, et ce pour les raisons suivantes.

Tout d'abord, les installations de faible puissance ont un coût très élevé. Or le Gouvernement a pour objectif de maîtriser la contribution au service public de l'électricité, acquittée, je le rappelle, par chaque consommateur d'électricité.

Ensuite, ces petites installations ne sont pas soumises à des normes exigeantes en termes de qualité de l'air. Or la combustion du bois entraîne des émissions de particules nocives pour la santé. C'est pourquoi le plan national santé-environnement et le plan particules recommandent de soutenir uniquement les installations les moins polluantes. Il s'agit d'un véritable enjeu de santé publique.

Enfin, un important développement incontrôlé de telles installations rendrait impossible la maîtrise des conflits d'usage relatifs à la ressource en bois : nos papetiers, nos fabricants de bois d'œuvre seraient confrontés à des difficultés d'approvisionnement ; des filières industrielles entières se trouveraient ainsi pénalisées.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement a ouvert de cette manière le tarif d'achat de l'électricité appliqué aux installations dont la puissance est comprise entre 5 et 12 mégawatts.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Pastor.

M. Jean-Marc Pastor. Madame la secrétaire d'État, votre réponse ne me satisfait pas. Je reste convaincu que, derrière ces décisions, se trouve l'action de lobbying menée par d'autres filières, plus puissantes.

Je vous invite dans mon département – proposition que j'avais également faite à M. Borloo –, sur le territoire duquel sont situés de grands massifs forestiers. Des associations forestières se sont équipées d'installations produisant moins de 5 mégawatts-heure, financièrement équilibrées, dotées de filtres à particules afin d'éviter la diffusion dans l'air de ces poussières nocives à la santé humaine. Il est regrettable de ne pas soutenir cette initiative locale, qui permet à de petites structures de se développer, dans le respect des objectifs du Grenelle de l'environnement.

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