Question de Mme DES ESGAULX Marie-Hélène (Gironde - UMP) publiée le 15/04/2010

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx appelle l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la situation très préoccupante des sylviculteurs sinistrés du Sud-Ouest, un an après le passage de la tempête Klaus, et lui demande si le Gouvernement a l'intention de mettre en place rapidement un fonds assurantiel pour la forêt.

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Réponse du Ministère de l'espace rural et de l'aménagement du territoire publiée le 16/06/2010

Réponse apportée en séance publique le 15/06/2010

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, vous me permettrez une nouvelle fois d'appeler l'attention du Gouvernement sur la situation des sylviculteurs du Sud-Ouest, sinistrés par la tempête Klaus de janvier 2009. Ils considèrent, à ce jour, qu'ils n'ont pas été indemnisés à la hauteur des graves dommages qu'ils ont subis, et ce pour la seconde fois en dix ans.

En effet, le plan Barnier a échoué en partie, semble-t-il, et les sylviculteurs sinistrés n'ont pu bénéficier de la valorisation par l'exploitation des chablis. Et je ne parle pas de la chute considérable des prix, qui sont descendus jusqu'à 50 centimes la tonne !

Les sylviculteurs estiment que les critères d'octroi des aides n'ont pas été respectés, pas plus que l'avis de l'Union européenne. Ils toucheront, in fine, 2 750 euros par hectare pour payer le nettoyage et le reboisement, et devront surtout attendre trente-cinq ans pour dégager un revenu des parcelles sinistrées.

Pourtant, obligation est faite aux sylviculteurs de reboiser. C'est la raison pour laquelle ils ont sollicité une aide complémentaire compensatrice, qu'ils estiment à 1 000 euros par hectare, soit 19 millions d'euros par an pendant huit ans.

Monsieur le ministre, puisque le fonds de solidarité de l'Union européenne, le FSUE, doit rembourser 58 millions d'euros, cette somme ne pourrait-elle être réaffectée aux sylviculteurs sinistrés, sans contrarier les règles comptables de l'Union européenne ?

Par ailleurs, le montant de la bonification des prêts sur 600 millions d'euros aurait dû être de 7 millions par an, et ne sera finalement que d'environ 1,5 million par an. Sur une durée moyenne de trois ans, près de 16,5 millions d'euros pourraient donc être ainsi récupérés et réaffectés.

Je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur la proposition de financement compensateur des sylviculteurs du Sud-Ouest.

Enfin, monsieur le ministre, vous me permettrez d'évoquer les débats que nous avons eus le 29 mai dernier, dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, sur le compte épargne d'assurance. Le ministre de l'agriculture a voulu recentrer ce dispositif uniquement sur l'épargne précaution, et non plus sur l'investissement, comme l'avait proposé la commission de l'économie du Sénat par voie d'amendement. Si les plantations ou replantations d'arbres ne sont pas des investissements, de quoi s'agit-il, alors ?

M. Le Maire s'est toutefois engagé devant la Haute Assemblée à engager une réflexion sur les moyens de renforcer les investissements dans ce secteur, car il a reconnu qu'il s'agissait à l'évidence d'un facteur indispensable pour la valorisation de nos forêts.

Pouvez-vous me préciser, monsieur le ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet, et donner aux sylviculteurs l'assurance qu'ils s'engagent dans une politique forestière durable ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Bruno Le Maire, retenu par la préparation de l'examen de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche en commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.

La tempête Klaus a frappé très durement le massif forestier des Landes de Gascogne, ce qui a justifié la mise en œuvre d'un plan de solidarité nationale. Échelonné sur huit années, celui-ci s'est traduit, dès la première année, par un important soutien financier de l'État : une enveloppe de 220 millions d'euros de subventions a été attribuée, et l'État en a déjà décaissé la moitié ; en outre, 236 millions d'euros de prêts bonifiés ont été accordés, les banques en ayant décaissé 140 millions. Le dispositif est désormais fluide et des décaissements se poursuivent au rythme de l'avancement des projets.

Un peu plus d'un an après, malgré un contexte difficile, les résultats sont tangibles. Tout d'abord, le rythme d'exploitation, exceptionnel, devrait permettre de traiter, d'ici à la fin de 2010, la quasi-totalité des volumes. Ensuite, le recours à grande échelle au stockage sous aspersion permettra de sécuriser l'approvisionnement des industries du massif. Réalisé à la demande de Bruno Le Maire, le bilan de ces mesures établi par le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des territoires ruraux, le CGAAER, a confirmé ces résultats.

Depuis que les bois « tempêtes » ont été évacués, la priorité est désormais d'aider les sylviculteurs à reconstituer leurs forêts. Pour cela, plusieurs mesures ont été prises.

Une enveloppe totale de 415 millions d'euros sur huit ans est réservée aux aides directes en faveur des propriétaires forestiers.

Des opérations de nettoyage des parcelles sinistrées, qui ont débuté en 2009, s'intensifient cette année. Déjà, un peu plus de 75 millions d'euros ont été engagés pour le nettoyage de plus de 50 000 hectares de forêts sinistrées. D'ici à l'été, l'objectif est que ces opérations soient achevées pour 40 000 hectares et que les propriétaires soient payés.

Enfin, pour répondre à la demande forte et légitime des propriétaires forestiers privés, un dispositif assurantiel a été introduit dans le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Il repose sur une épargne de précaution et sur une incitation fiscale au recours à l'assurance privée.

Parallèlement, la ministre chargée de l'économie doit prochainement étudier avec les professionnels de l'assurance les moyens de développer le marché de l'assurance en forêt, qui ne concerne aujourd'hui que 5 % des surfaces forestières.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Je n'ai pas tout à fait les mêmes chiffres que M. Mercier sur la fluidité du dispositif après-tempête !

M. Michel Mercier, ministre. Ce sont les chiffres transmis par M. Le Maire !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le ministre, vous devez prendre conscience du fait que le dispositif du compte épargne d'assurance, adopté par le Sénat au travers d'un amendement gouvernemental dans le cadre de l'examen de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, ne satisfait pas les sylviculteurs : ils souhaitent même son retrait. Ils considèrent que ce dispositif n'est qu'une prétendue assurance et un moyen pour l'État de se désengager.

Ce système ne fonctionnera pas, car il ne répond pas aux besoins existants. Je tiens à le réaffirmer clairement : ce qu'il faut aux forestiers, c'est un compte épargne d'investissement ; ils le réclament d'ailleurs depuis 1999... Je partage leur analyse. Il en va de l'avenir de la politique forestière de l'État !

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