Question de Mme LABARRE Marie-Agnès (Essonne - CRC-SPG) publiée le 08/04/2010

Mme Marie-Agnès Labarre interroge Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche au sujet de l'université Paris-Dauphine. Le conseil d'administration de l'université Paris-Dauphine a voté le 1er février 2010, malgré l'opposition des enseignants-chercheurs, une augmentation sans précédent des droits d'inscription concernant les masters de gestion et d'économie internationale.

Les tarifs applicables pour la deuxième année des masters concernés seront désormais de 1.500 à 4.000 euros (selon le revenu fiscal familial déclaré de l'étudiant). Seuls deux abattements de 500 euros, sur critères, sont prévus.
Certes, l'université de Paris Dauphine a acquis en 2004 le statut de grand établissement relevant de l'article L. 717-1 du code de l'éducation mais cette politique de fixation des droits d'inscription va à l'encontre du principe de justice sociale : les tarifs défavorisent les étudiants dont les parents appartiennent aux classes populaires ou moyennes et ne sont pas progressifs au-delà d'un revenu familial annuel de 80.000 euros.

Il y a un risque évident d'exclusion ou d'auto-exclusion pour de nombreux étudiants qui choisissent la filière universitaire, plutôt que les grandes écoles, justement pour des raisons financières. Cette logique de marchandisation des diplômes se fonde sur un principe fallacieux qui fait un lien entre le « prix du diplôme » et le « prix du marché » des diplômés sur le marché du travail. L'égalité républicaine et les valeurs du service public de l'enseignement supérieur sont ainsi mises à mal. De plus, l'augmentation des frais d'inscription va creuser le fossé entre les universités fréquentées par des étudiants issus de milieux aisés et celles fréquentées par les jeunes issus des classes populaires.

En outre, comme l'a rappelé le 19 février 2008 le Conseil d'État dans son avis n° 381.333, les établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel, comme l'université Paris-Dauphine, « ont vocation, à titre principal, à délivrer des diplômes nationaux ». Or, la tendance actuelle est de transformer des diplômes nationaux, créés depuis parfois plusieurs décennies, en diplômes d'établissement sans aucun changement substantiel dans le seul but de déterminer sans limite le montant des frais d'inscription.

Elle lui rappelle que, lors du vote de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, le Gouvernement avait promis qu'il n'y aurait pas d'augmentation des droits d'inscription dans les universités. Aussi, lui demande-t-elle un état d'avancement de la procédure d'évaluation des diplômes transformés et si la décision d'augmentation des droits d'inscription adoptée par cet établissement a vocation à servir de modèle aux autres établissements d'enseignement supérieur français.

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Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 01/07/2010

L'université Paris-Dauphine a un statut particulier, celui de grand établissement, et le décret n° 2004-186 du 26 février 2004 l'autorise à proposer une offre de formation s'articulant autour de diplômes propres et de diplômes nationaux. Le décret n° 2009-1131 du 17 septembre 2009 a étendu aux diplômes délivrés par l'université Paris-Dauphine, à l'instar des instituts d'études politiques, la capacité de voir conférer à ses diplômes de grand établissement le grade de master à condition que ceux-ci figurent sur une liste arrêtée par le ministre, après expertise des maquettes de formation. L'université Paris-Dauphine vient ainsi de transmettre à la direction générale pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle la liste des diplômes pour lesquels elle souhaite voir reconnu le grade de master au titre de ses diplômes d'établissement. Pour développer cette nouvelle offre, le conseil d'administration du 1er février 2010 a adopté la tarification des droits d'inscription applicables à la rentrée 2010 à ses diplômes de grand établissement, équivalent au niveau master. Il convient pour le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, comme pour toute autre formation, d'apprécier leur qualité scientifique et leur adossement aux équipes de recherche présentes dans l'établissement ou développées à travers des partenariats. L'université s'est par ailleurs engagée à délivrer majoritairement des diplômes nationaux pour lesquels elle a été habilitée conformément à ses missions et dont les droits d'inscription sont fixés annuellement par un arrêté ministériel. À cet égard, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche veille à faire respecter les préconisations de l'avis du Conseil d'État au gouvernement du 19 février 2008 qui a établi que « La délibération d'un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel qui requalifierait à l'identique ou, du moins, sans changement substantiel, un diplôme national qu'il a été habilité à délivrer, en diplôme propre, aux seules fins d'échapper à la règlementation des droits d'inscription prévue par la loi du 24 mai 1951 pourrait être regardée comme entachée d'un détournement de pouvoir de nature à justifier son annulation contentieuse. »

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