Question de M. MÉZARD Jacques (Cantal - RDSE) publiée le 18/06/2010

Question posée en séance publique le 17/06/2010

M. Jacques Mézard. Monsieur le Premier ministre, concernant la suppression de la taxe professionnelle, le Gouvernement que vous dirigez est engagé, aux termes de la loi de finances pour 2010, à présenter au Parlement une clause de revoyure avant le 31 juillet 2010.

Mme Nicole Bricq. Il n'y en aura pas !

M. Jacques Mézard. Cette clause, faut-il le rappeler, doit présenter les financements de substitution qu'attendent les collectivités.

Or, aujourd'hui, force est de constater qu'un rappel à la loi s'impose, d'autant que le 3 juin dernier, sur une question similaire de notre collègue Yves Détraigne, le Gouvernement a éludé le problème.

L'article 76 de la dernière loi de finances prévoit qu'un rapport d'évaluation sur cette réforme, contestée, de la taxe professionnelle serait remis au Parlement avant le 1er juin 2010. Il doit présenter « par catégorie de collectivités […] des simulations détaillées des recettes ainsi qu'une estimation de leur variation ».

Nous sommes le 17 juin et nous attendons toujours !

M. Guy Fischer. On peut attendre !

M. Jacques Mézard. Le récent rapport Durieux ne peut en aucune manière s'y substituer. Il ne contient pas les simulations promises et si essentielles. Pourtant, vous avez déposé ledit rapport au Sénat, voilà quelques heures, comme celui du Gouvernement.

Tel quel, il ne paraît pas correspondre aux exigences de la loi.

L'article 76 précise également que la loi à venir « précise et adapte le dispositif de répartition des ressources des collectivités territoriales » et qu'elle « met en place des mécanismes de péréquation ».

Quelles que soient nos sensibilités diverses – et vous connaissez le sens de la mesure qui caractérise le RDSE… (Sourires) –, nous percevons les inquiétudes des collectivités locales dans leur ensemble quant à leurs prochains exercices budgétaires et au sort qui sera réservé aux ressources prévues, notamment celles en provenance du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle.

Ces réformes mal préparées ont une conséquence pour nos collectivités : ne pouvant agir rapidement sur les frais de fonctionnement, elles gèlent nombre d'investissements, ce qui est catastrophique pour l'économie nationale et le service du public. (Marques d'approbation sur les travées du groupe socialiste.)

Ce que le MEDEF aura gagné d'un côté, par la suppression de la taxe professionnelle, les entreprises le perdront de l'autre, par la baisse des investissements.

MM. Charles Gautier et Guy Fischer. C'est vrai !

M. Jacques Mézard. En outre, à l'incertitude financière s'ajoute désormais l'incertitude institutionnelle, puisque personne ne peut dire aujourd'hui le sort qui sera réservé à la réforme des collectivités.

Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, quelles assurances le Gouvernement est-il en mesure de fournir aux élus locaux ? De quelle manière entendez-vous respecter l'article 76 de la loi de finances pour 2010 ? Quelles garanties pouvez-vous encore apporter quant au maintien des dispositifs de péréquation ? Et comment entendez-vous crédibiliser la parole de l'État en direction des collectivités locales ? (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Hervé Maurey applaudit également.)

Mme Nicole Bricq. C'est Jean-Pierre Raffarin qui a demandé la revoyure !

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Réponse du Ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État publiée le 18/06/2010

Réponse apportée en séance publique le 17/06/2010

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État. Monsieur le sénateur, si j'apprécie votre sens de la mesure, vous me permettrez, toujours avec mesure, de ne pas être tout à fait d'accord avec vous sur l'équation entre la réduction progressive de l'implication financière en matière d'évolution de la taxe professionnelle et la réduction drastique des investissements des collectivités locales. (Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Je suis moi-même un élu local, et je peux vous dire que ce n'est pas la réforme de la contribution économique territoriale qui va altérer les projets des politiques municipales des quatre années à venir ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Charles Gautier. Si, parfaitement !

M. François Baroin, ministre. C'est le sens de l'intérêt général qui guidera les politiques publiques.

M. Charles Gautier. Avec quel argent ?

M. François Baroin, ministre. À gauche comme à droite, il y a des gens responsables !

M. Marcel-Pierre Cléach. Bien sûr !

M. François Baroin, ministre. J'ajouterai quelques mots concernant la méthode retenue pour cette clause de revoyure de la taxe professionnelle.

Mme Nicole Bricq. On la connaît, la méthode !

M. François Baroin, ministre. Le gouvernement de François Fillon avait commandé à M. Durieux un rapport sur la question. Ce dernier a été remis à la fin du mois de mai, puis immédiatement transmis au Comité des finances locales, qui travaille sur le sujet.

Mme Nicole Bricq. Il y avait un engagement au 1er juin !

M. François Baroin, ministre. J'ai moi-même adressé toutes les estimations et toutes les simulations envisageables en termes de péréquation pour chacune des collectivités territoriales aux président et rapporteur général des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Ainsi les deux assemblées seront-elles en situation d'en discuter.

Les rendez-vous suivants sont connus.

D'abord, le Comité des finances locales fera sa propre évaluation et les commissions des finances rendront leurs expertises. Ensuite, un travail préparatoire sera effectué sur la gestion des sources de financement des dotations d'État, gelées sous l'impulsion du Premier ministre, pour rentrer dans la matrice budgétaire globale de la loi pluriannuelle, qui vise à revenir au niveau d'équilibre de nos déficits d'avant la crise.

Mme Nicole Bricq. Personne n'y croit !

M. François Baroin, ministre. C'est à l'intérieur du système de péréquation que la question de la revoyure devra être examinée avec pertinence.

Il y aura donc, comme le Gouvernement s'y est engagé, une revoyure sur ce sujet, au fil de l'évolution de la préparation budgétaire.

M. Jean-Pierre Sueur. Quand ?

M. François Baroin, ministre. Je suis en tout temps, tout lieu, toutes circonstances, à la disposition des deux commissions des finances pour aborder ce sujet ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Charles Gautier. Quel sens de la démocratie !

Mme Nicole Bricq. En voilà une réponse !

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