Question de Mme LE TEXIER Raymonde (Val-d'Oise - SOC) publiée le 08/10/2010

Question posée en séance publique le 07/10/2010

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

« Les promesses n'engagent que ceux qui les croient » : une phrase qui résume le sarkozysme appliqué au réel.

Le candidat Nicolas Sarkozy déclarait en 2007 : « Le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer ». Le même, devenu Président de la République, trahit sa parole et entend imposer un projet de loi injuste et, parce qu'il est injuste, inefficace.

Vous le savez, une personne sur deux est au chômage au moment de liquider sa retraite. Pourtant, en faisant du recul de l'âge de la retraite le seul objectif de votre réforme, vous vous bornez à transformer de jeunes retraités en vieux chômeurs. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Vasselle. C'est faux !

Mme Raymonde Le Texier. Vous le savez, ceux qui commencent à travailler tôt cumulent métiers usant et carrières longues.

Pourtant, en faisant du recul de l'âge de la retraite le seul objectif de votre réforme, vous aggravez encore des inégalités dont les effets sont terribles : les ouvriers ont déjà sept ans de moins d'espérance de vie que les cadres ; combien d'années vont-ils encore perdre ?

Vous le savez, aujourd'hui, le travail est de plus en plus précaire et les parcours professionnels de plus en plus chaotiques.

Pourtant, en faisant du recul de l'âge de la retraite à taux plein le seul objectif de votre réforme, vous demandez aux plus fragiles de régler la facture.

M. Alain Vasselle. Ce sont des contre-vérités !

Mme Raymonde Le Texier. Et ce ne sont pas vos derniers arrangements sur la retraite des mères de trois enfants et des mères d'enfants handicapés qui changeront la donne. Vous leur faites l'aumône de bonifications d'annuités qu'elles ont déjà ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

En échange de la nécessité de travailler plus longtemps, vous proposez la baisse des pensions et la montée des inégalités.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !

Mme Raymonde Le Texier. L'effort de financement que vous exigez de chacun ne s'adresse pas à tous : 85 % des efforts demandés reposent sur les seuls salariés, quand les revenus du capital, eux, ne contribuent qu'à hauteur de 15 %.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

Mme Raymonde Le Texier. C'est votre choix de société !

Ce gouvernement a dû intensément méditer la formule de Coluche : « Mieux vaut faire payer les pauvres, ils sont plus nombreux ».

M. Alain Gournac. C'est fini, le temps de parole est épuisé !

Mme Raymonde Le Texier. Avec 13 % de personnes vivant sous le seuil de pauvreté et plus de 4 millions de chômeurs, il faut reconnaître que vous avez bien contribué à augmenter encore leur nombre. Et cela ne fait rire personne !

Ainsi, pour vous, sauver le système existant, c'est en aggraver les injustices, détruire les solidarités, piller le Fonds de réserve pour les retraites. Vous voudriez mettre fin à la retraite par répartition pour favoriser la capitalisation que vous ne vous y prendriez pas autrement ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Veuillez poser votre question, madame Le Texier.

Mme Raymonde Le Texier. Nous, socialistes, avons une autre vision de la réforme, parce que nous avons une autre vision de la politique. Réformer, c'est donner à une société des outils et des moyens pour faire vivre ses valeurs. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Monsieur le ministre, allez-vous enfin retirer ce texte indigent (Non ! sur plusieurs travées de l'UMP) afin que la question des retraites soit l'occasion pour notre pays de revivifier son pacte social et non de le condamner ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 08/10/2010

Réponse apportée en séance publique le 07/10/2010

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'Union centriste.)

M. François Fillon, Premier ministre. Madame Le Texier, vous m'interrogez sur le respect des engagements.

En 1993, le gouvernement d'Édouard Balladur a choisi d'allonger à quarante annuités la durée de cotisation pour une retraite à taux plein. Vous avez combattu cette réforme et vous vous êtes engagés à l'abroger. En 1997, vous êtes arrivés au pouvoir et, en cinq ans, vous n'avez pas trouvé une journée pour le faire ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Bricq. Nous avons créé le Fonds de réserve pour les retraites, que vous siphonnez !

M. François Fillon, Premier ministre. En 2003, vous avez combattu la réforme des retraites que cette majorité a portée et qu'avec Jean-Pierre Raffarin j'ai eu l'honneur de défendre. Vous l'avez combattue avec beaucoup de vigueur, comme aujourd'hui, d'ailleurs.

M. Jean-Louis Carrère. Comme vous la décentralisation !

M. René-Pierre Signé. Parfaitement !

M. François Fillon, Premier ministre. Vous avez répété maintes et maintes fois que, le jour où vous seriez au pouvoir, vous reviendriez aux trente-sept annuités et demie. Aujourd'hui, lorsqu'on lit les propositions du parti socialiste, on constate avec intérêt que l'allongement de la durée de cotisation est désormais intégré dans ce que doit être une bonne réforme des retraites !

En 2007, vous avez combattu avec beaucoup d'énergie la réforme des régimes spéciaux, mais nous rechercherions en vain dans les documents que vous produisez aujourd'hui la moindre mention de la réforme des régimes spéciaux et du retour en arrière que vous opéreriez si demain vous étiez au pouvoir !

Vous nous dites que le système est injuste.

Mme Annie David. C'est vrai : il est injuste !

M. François Fillon, Premier ministre. Vous avez, à chaque élection depuis le milieu des années quatre-vingt, promis de régler la question des longues carrières, pour ceux qui commencent à travailler à 14, à 15 et à 16 ans : jamais vous ne l'avez fait ! (Applaudissements sur les mêmes travées.)

M. Jacques Mahéas. Si, on l'a fait !

M. François Fillon, Premier ministre. C'est cette majorité, avec la CFDT, qui l'a réglée.

Vous nous dites aujourd'hui que, pour financer la réforme des retraites, il faudrait taxer un peu plus le capital, les stock-options. Mais que ne l'avez-vous fait lorsque vous étiez au pouvoir ? (Bravo ! sur les travées de l'UMP.) Non seulement les stock-options n'étaient pas plus taxées, mais en 2000, sous l'autorité de Laurent Fabius, vous avez pris une décision qui aboutissait à réduire le poids de la fiscalité sur les stock-options ! (Applaudissements sur les mêmes travées.)

Alors, ne venez pas nous parler du respect des engagements !

La vérité, c'est que, sur les retraites, vous avez toujours promis ce que vous n'avez jamais fait. Et c'est l'honneur du Président de la République et du Gouvernement…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Écoutez le peuple aujourd'hui !

M. François Fillon, Premier ministre. … que de proposer aujourd'hui de sauver notre régime de retraite en passant à 62 ans, parce que c'est la seule manière d'assurer le paiement des pensions…

M. David Assouline. Ce n'est pas vrai !

M. François Fillon, Premier ministre. … de nos concitoyens à l'avenir. (Les membres de l'UMP, ainsi que certains sénateurs de l'Union centriste, se lèvent et applaudissent longuement, tandis que les membres du groupe CRC-SPG martèlent leurs pupitres en scandant : « Retirez votre projet ».)

M. Didier Boulaud. Moi, j'ai vu la majorité acclamer Juppé debout il y a quelques années. Cela n'a pas duré longtemps !

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